Magazine lm92 janvier 2014 nord de france belgique bd

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n째92 / janvier 2014 / GRATUIT

nord & belgique

Cultures et tendances urbaines


Nouvel an, ns ! io t u l o s ĂŠ r s e l l e Nouv

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#92 Sommaire Let’smotiv - janvier 2014

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L'amour est un crime parfait © Gaumont Distribution

n ews L'esprit tordu de Victor Enrich, les bijoux électroniques de Suzywan, la balle au doigt, l'origine du spam, les cirques belges, le code de sécurité nucléaire, Quentin Tarantino, Arnold Schwarzenegger, James Bond, et quelques chiffres...

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l ieu Musée Fin de Siècle

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E xposition Germaine Van Parys & Odette Dereze, Editing the News, Le Lynx, Indian Studio, Les Étrusques, Helmut Newton & Alice Springs, Jonone... Agenda

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p ortfolio Séverin Millet : l'enfance de l'art

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m ode Tristan Besnard fait visiter sa Garçonnière Le Détail qui tue : l'indispensable accessoire

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d ossier o.n.l. : En avant la musique !

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musique Son Lux, La Rumeur, Poliça, Connan Mockasin, Goran Bregovic, Cheveu, Fun Lovin'Criminals, Les Transardentes

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cinéma Jamais Seuls, Lovelace, Chris Marker, Tel Père, Tel Fils, L'Amour est un crime parfait

théâtre François Morel, Joël Pommerat, Vivat la Danse !, Mathurin Bolze, Week-end Poil à Gratter, Le Carnaval des Ombres, Tendance Europe, L'Assommoir... Agenda

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l itterature Denis Robert, en passant par la Lorraine Felix Denk & Sven Von Thülen, Kerry Hudson, Olivier Texier, Henry Miller, Patrick Varetz

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d isques Tribute To Dance Mania, Andreas Dorau, Moonface, Kevin Morby, Acid Arab

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Le Mot de la fin

Les affaires de famille de Qingjun Huang


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Let’smotiv Nord & Belgique 28 rue françois de badts - 59110 La madeleine - F tél : +33 362 64 80 09 - fax : +33 3 62 64 80 07

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Direction de la publication / Rédaction en chef :

Direction Artistique / graphisme : Cécile Fauré

Publicité :

Nicolas Pattou

cecile.faure@lastrolab.com

nicolas.pattou@lastrolab.com

Couverture : Séverin Millet - (détail) Drôles de zèbres, éd. de L'an 2, 2005

administration : Laurent Desplat

Rédaction : Thibaut Allemand redaction@lm-magazine.com

Elsa Fortant info@lm-magazine.com

Alexis Floret redaction@lastrolab.com

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Impression : Imprimerie Ménard 31682 Labège

diffusion : C*RED (France/Belgique) ; Zoom On Art (Bruxelles)

Ont collaboré à ce n° : Sandrine Allanic, François Annycke, François-Xavier Beague, Sylvain Coatleven, Julien Collinet, Sophie Desplat, Hugo Dewasmes, Marine Duquesnoy, Marine Durand, Florian Koldyka, Séverin Millet, Raphaël Nieuwjaer et plus si affinités. Let’smotiv Nord & Belgique est édité par la Sarl L'astrolab* - info@lastrolab.com L'astrolab* Sarl au capital de 5 000 euros - RCS Lille 538 422 973 Dépôt légal à parution - ISSN : en cours L’éditeur décline toute responsabilité quant aux visuels, photos, libellé des annonces, fournis par ses annonceurs, omissions ou erreurs figurant dans cette publication. Tous droits d’auteur réservés pour tous pays. Toute reproduction, même partielle, par quelque procédé que ce soit, ainsi que l’enregistrement d’informations par système de traitement de données à des fins professionnelles, sont interdites et donnent lieu à des sanctions pénales. ı Let'smotiv est imprimé sur du papier certifié PEFC. Cette certification assure la chaîne de traçabilité de l’origine du papier et garantit qu'il provient de forêts gérées durablement. Ne pas jeter sur la voie publique.

Papier issu de forêts gérées durablement



© Victor Enrich

news

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Tour tour de force Installé à Barcelone, le photographe Victor Enrich tort ses souvenirs. Comment ? En immortalisant le NH Deutscher Kaiser Hotel de Munich, puis en découpant, tordant, gonflant, divisant, multipliant l'édifice pas moins de 88 fois ! Le résultat, spectaculaire, pourrait donner des idées à quelques architectes... www.victorenrich.com

ACIIIIID ! Doit-on encore présenter la TB-303 ? Cette machine mythique / légendaire / dantesque / dionysiaque (non, aucune mention inutile n'est à rayer), cet instrument, donc, est l'origine du son acid – ces sinusoïdales qui vrillent le cerveau et firent le succès de l'acid-house et ses dérivés. Or, la jeune créatrice Suzywan rend hommage à cet engin – et à quelques autres – en créant des broches et colliers ornés de la grande invention des eighties. Comptez une grosse trentaine d'euros. Pas très cher, comparé à une TB-303 d'occase... www.suzywan.com


Quel cirque ! La nouvelle a fait l'effet d'un coup de tonnerre : Elio Di Rupo, « soucieux du bien-être animal », vient d'interdire les animaux sauvages dans les cirques en Belgique. Quel égoïsme ! Lui a sans doute déjà vu des lions, des otaries et des ours en vrai. Mais nos chères têtes blondes ? Pourquoi les empêcher de voir un ours danser avec un chapeau sur la tête, un lion bondir dans un cerceau enflammé ou une otarie jouer à la baballe, hein ? Heureusement qu'il nous reste les bons vieux safaris-chasse au Congo...

La main de dieu ✪

La Coupe du Monde approche et avec, ses après-midis à s'ennuyer au travail en attendant le match du soir. Sur le principe du finger-skate, le finger-ball permet de jouer avec deux doigts : un maillot, un short autocollant, une mini-balle... Vous avez saisi le principe. Une question : y aura-t-il des pénos pour faute de main ? www.doiydesign.com

00000000 La guerre, parfois, c'est simple comme un coup de fil ! De 1962 à 1977, en pleine guerre froide, le code de lancement des missiles nucléaires américains était tout simplement... huit fois zéros. Un numéro rappelant, à peu de choses près, le code Pin de votre carte Sim. On se dit alors que la survie du monde relève du miracle.

Dans le pâté LM ayant inauguré son nouveau site web, vous avez enfin une bonne raison de vous rendre sur Internet. Et qui sait, d'ouvrir votre boîte mail ? L'occasion de revenir sur le terme spam. À l'origine, Spam désignait de la viande en conserve (Spiced Ham) en vogue dans les années 40. Trente ans plus tard, les Monty Python, parodiant une pub de la marque, répétèrent ce mot des centaines de fois dans leur sketch. Volontairement envahissant ! Comme aujourd'hui : plus de 200 milliards de spams sont envoyés dans le monde chaque jour, soit plus de 90 % du volume total de mails quotidiens. Il y a quelque chose de pourriel au royaume d'Internet.


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Agent Get 27

Qui aime bien châtie bien !

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Ce joli graphique dévoile combien de personnages a « assassiné » Quentin Tarantino durant sa carrière. Vous le pensiez assagi avec Jackie Brown ? Il a repris du poil de la bête dans Inglorious Basterds. Bon, d'un autre côté, faire brûler un cinéma rempli de nazis, ça fait gagner du temps.

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Arnold Schwarzenegger est plus artisanal. Car à la différence de QT, lui met les mains dans le cambouis. Ainsi, de Conan Le Barbare (1982) à L'Effaceur (1996), le futur Governator a dessoudé pas moins de 509 personnes. Dans le détail ? 278 par armes à feu, 91 dans des explosions et 15 à mains nues. Le compte est bon ? Ah, on en oubliait 11 par empalement. Oui, par empalement. Normal.

Il y en a un autre qui ne pourra plus servir d'exemple. Des médecins anglais ont calculé, certainement pour tuer... le temps, combien de verres s'enfilait James Bond lors d'une semaine ordinaire. Réponse : environ 736 grammes. Or, selon les rabatjoie de l'OMS, cette consommation devient « à risque » à partir de 280 grammes et « nocive » au-delà de 420 grammes. Bref, l'agent 007, qui enchaîne cascade sur culbute, devrait normalement être impuissant et atteint d'une triple cirrhose. Magie de la littérature !

Télex Ciné market vintage - Cinéphiles, le 26.01, la Condition Publique de Roubaix accueille les chineurs en quête de dvd, d'affiches, de livres et autres vidéoprojecteurs. 9h>17h, Gratuit ! // Bonne nouvelle : depuis le 1er janvier, en France, les moins de 14 ans bénéficient d'un tarif unique de 4€ dans toutes les salles, tous les jours et pour tous les films.



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news

bilan 2013 Les groupes qui ont le plus tourné Bilan de la liberté de la presse 2013 (source Reporters Sans Frontières)

71 journalistes ont été tués 78 journalistes emprisonnés (au 15 décembre 2013)

37 journalistes otages ou disparus (au 18 décembre 2013)

+ 129% : Forte © Song Kick

augmentation des enlèvements de journalistes

Le pire, c'est que Pernaud et Pujadas courent toujours.

Le pire, c'est que certains tournent en rond.

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Les sujets les plus discutés sur Facebook

Tendances françaises

Le pire, c'est qu'on répète ici ce que dit tout le monde.


Ciné-concert sur Georges Méliès

Vendredi 24 janvier / 20h30

Gaël Faye (concert)

Vendredi 21 février / 20h

Feinix Crew + Roger Molls (concert)

Vendredi 21 mars / 20h

Les dessous d’une Cantatrice (concert) Dimanche 23 mars / 18h

www.espace-casadesus-louvroil.com Billetterie : 03 27 39 37 30 billetterie.louvroil@gmail.com


portfolio

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Séverin Millet Le fond et la forme Ce Valentinois d'origine nourrit un appétit pour le dessin depuis sa plus tendre enfance. Sans se poser de questions, bac en poche, le jeune Séverin intègre les Arts Décoratifs de Strasbourg, " un vivier d'illustrateurs " où il suit une formation de graphisme. « J'ai eu une révélation en exécutant ma première série d'images sur Illustrator. Avec ce médium d'une grande souplesse, je construis les dessins au fur et à mesure en me débarrassant d'une partie technique laborieuse » explique-t-il. Le résultat s'avère proche du photomontage et du papier découpé, que le trentenaire pratique depuis toujours. Repérées par Le Monde, ses compositions ornent aussi les colonnes de Télérama, Revue XXI, Libération et s'exportent dans les pages du New Yorker ou L'Internazionale. La force de ses illustrations ? Un langage d'inspiration surréaliste : « Les formes coexistent, engendrent des décalages qui donnent eux-mêmes naissance à une nouvelle réalité ou identité graphique. Comme lorsque j'utilise les animaux pour parler des Hommes » précise cet admirateur de Tomi Ungerer (Les Trois Brigands, 1961). Logique, donc, que le dessinateur s'épanouisse au travers de l'édition jeunesse, à l'image de son dernier ouvrage, Ma vie de fourmi (2013), ou de son premier, Drôles de zèbres (2005). En parallèle, ses sérigraphies et digigraphies sont à découvrir dans son atelier et sur son site. Un artiste haut en en couleurs et très en forme ! Elsa Fortant

À visiter / www.severinmillet.com À lire / Ma vie de fourmi (éd. Sarbacane, 44p., 14,90€) ; En Route (éd. Albin Michel, 32p., 13,50€) ; La Bobine d’Alfred (éd. L'Ecole des Loisirs, 173p., 14€) ; Un soir de pleine lune (éd. Sarbacane) Sortie septembre 2014 À voir / Exposition Fête du graphisme de Paris, Cité de la mode et du dessin, 30.01>02.02 / Exposition d'affiches à la boutique Happy Valley Shop, Melbourne, novembre 2014









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portrait

TRISTAN BESNARD Cherchez le garçon Cursus de modéliste et imagination fertile résument le jeune parcours de Tristan Besnard. Rêveur au rire facile, le styliste affirme son attachement à l’artisanat. Après une brève incursion dans le prêt-à-porter féminin, il a créé sa marque pour hommes en 2011, avec la ferme intention de réactualiser le dressing du dandy. Poussons les portes de sa Garçonnière. Un nom joliment désuet pour une marque moderne. « La Garçonnière, c’est l'histoire d'un garçon tombé dans un vestiaire d’hommes : des vêtements classiques auxquels je donne un aspect ludique, grâce à un col noué sur une chemise ou un bouton de chino décalé de quelques centimètres. » Si Tristan Besnard a appris à coudre, petit, avec sa mère, le Nantais, passé par le Morbihan et Saint-Brieuc, revendique n'être pas tout à fait sorti de l’enfance, ancrée dans l’ADN de ses collections. Le jeune homme de 24 ans a d’ailleurs ▲

Bio express • 1989 : Naissance à Nantes • 2007 : Titulaire d'un Bac Pro artisanat et métiers d’art après un BEP métiers de la mode • 2008 : Entame une formation design de mode à l’institut Saint-Luc à Tournai, mais n’ira pas jusqu’au bout (« Trop formatée ») • 2010 : Lance sa première marque de prêt-à-porter féminin avec une collègue. L’expérience tourne court. • 2011 : Intègre le label Maisons de mode et crée la marque La Garçonnière. • 2012 : Sélectionné pour le salon parisien de jeunes créateurs Who’s next. • 2013 : Sortie de sa 4e collection, « Kalon a Dilhad » (vêtements du cœur, en breton)


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convaincu le label Maisons de mode avec un projet s’inspirant du scoutisme – enfin, moins par les Louveteaux que par la poésie de Wes Anderson dans Moonrise Kingdom (2012).

La chemise colibri

« Cette pièce est issue de ma troisième collection, Dark Hawaïan Part II. J’ai dessiné le colibri à l’aquarelle avant d’en faire un imprimé fort. D’ailleurs, l’épaule tombante casse le côté un peu violent du graphisme. Cette chemise en coton satiné représente bien l’évolution permanente de La Garçonnière : ici, un mélange d’inspirations tropicales et néo-futuristes. J’affectionne particulièrement cette silhouette englobante. »

Made in France Confectionnés par des ouvrières de la région, tout en laine française et finitions impeccables, ses vêtements (essentiellement des manteaux, des chemises et des pantalons) remportent le concours Who’s next en 2012, et le créateur tape dans l’œil d’un revendeur canadien. Un début prometteur, qui ne lui permet pas encore de « s’autosuffire ». Le Breton combinera dès janvier sa griffe à un poste pour la Redoute, comme styliste manteaux… pour femmes. Rien d'étonnant, en fait : « De plus en plus de femmes portent La Garçonnière ! ». Arrivé au terme de son contrat dans l’incubateur lillois, Tristan Besnard espère ouvrir une boutiqueatelier au Vestiaire à Roubaix. « Je ne suis pas encore prêt à voler de mes propres ailes », sourit-il. Nous, on en est sûrs, le petit garçon deviendra grand. Marine Durand

Page 1 / « Kalon a Dilhad » - S/S 13/14 Artistic Direction : Valériane Dousse Photographer : Amel Kerkeni Make-up & hairdressing : Ophélie Secq Model : Clément Griaud Page 3-4 / « Dark Hawaiian » Part II - F/W 13/14 Photographer : Victor Pattyn Model : Tristan Dormont Make-up & hairdressing : Florence Bracaval & Julie Tavernier

Boutique / Jardin de mode, 58/62 Faubourg des postes, 59000 Lille à visiter / www.lagarconniere-studio.com www.lagarconniere-studio.com/e-shop


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La nuisette en dentelle de Rita Hayworth.


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interview

FRANCOIS ARMANET Le sens du détail Propos recueillis par ¬ Elsa Fortant Photos ¬ Rita Hayworth © Bob Landry/Time & Life Pictures/Getty Images David Bowie © Terry O'Neill / Getty images - Kanye West © Michel Dufour/WireImage

« Qui sont les artistes qui ont su définir, incarner voire inventer le style, ou plutôt les ruptures de style ? » Telle est la question posée par les journalistes François Armanet et Elisabeth Quin. Épluchant les clichés de paparazzi comme les images mythiques de Jean-Marie Périer, ne choisissant pas entre Marguerite Duras et Kanye West, la Birkenstock ou le monocle, le tandem passe en revue un siècle de mode occidentale et de révolutions vestimentaires. ▲


Comment définiriez-vous cet ouvrage ? Il entre dans la catégorie des beaux livres, bien qu'il se lise autant qu'il se regarde. Il fallait écrire avec un certain style pour se montrer à la hauteur des personnages et photographes présents ! Le livre est drôle, ne porte pas de jugement définitif. Ce sont aussi des histoires, des moments judicieux qui donnent envie d'en savoir plus. La photo sert d'en-tête, d'accroche au texte. Comment avez-vous procédé ? Nous avons d'abord cherché les photographies à travers une bibliographie et sur Internet. Il nous manquait parfois des détails comme l'année, le lieu ou le photographe. L'identification fut une étape fastidieuse. Quant à l'obtention des droits... c'est encore une autre affaire ! Ensuite, plutôt que de procéder chronologiquement, nous avons préféré éplucher la silhouette, du chapeau aux chaussures. Cette enquête représente trois années de travail.

Quelle est votre définition du détail qui tue ? C'est le défaut charmant selon Stendhal. Vous avez un gros grain de beauté placé au dessus de la bouche : théoriquement, il rompt l'harmonie du visage, pourtant quelques mannequins célèbres en ont fait une signature. C'est aussi, en quelque sorte, le défaut qui renforce une singularité, accroche le regard et détermine parfois un certain chic. Jusqu'à quel point ce détail se cultive- t-il ? Je ne pense pas que nos exemples cultivaient un détail dérangeant ou singulier. C'était naturel pour la plupart d'entre eux. À l'image de Fred Astaire qui transformait sa cravate en ceinture pour faciliter l'ajustement de ses pantalons lors des répétitions, car il perdait beaucoup de poids. Ou encore Brigitte Bardot qui, pour la fameuse scène de danse de Et Dieu Créa La


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« Jusqu'au milieu du xxe siècle, les écrivains incarnaient le style. Puis, les acteurs et musiciens ont pris le relais »

Femme (1956), commanda à Repetto des ballerines spéciales, qui ne soient pas tout à fait des chaussons de danse, et plus adaptées à la rue. Elles se sont ensuite démocratisées. Un peu comme le tee-shirt blanc ? C'est vrai que LA photo iconique du teeshirt immaculé, c'est Marlon Brando. N'oublions pas qu'il a fallu attendre la fin de la Seconde Guerre Mondiale pour que le teeshirt, jusqu'ici porté comme un maillot de corps, s'arbore sans rien au-dessus. Nous trouvions plus drôle de mettre Brando en marcel. Ici, Mel Gibson n'est pas l'homme le plus stylé mais il est d'une beauté transcendentale – au début de sa carrière, en tout cas. Pour nous, cela fait figure de petites mythologies. Pourquoi avoir choisi des artistes ? Car dans notre civilisation de l'image, ce sont souvent des personnes connues qui symbolisent ou inventent. Jusqu'au milieu du xxe siècle, les écrivains, plus que les autres, incarnaient le style. Ernest Hemingway ou Thomas Walsh ne sont pas dans l'ouvrage, mais auraient pu, car leur look est aussi évocateur que celui de Jay-Z aujourd'hui. Puis, les acteurs et musiciens ont pris le relais. Les auteurs sont moins sur

le devant de la scène. Plus généralement, un artiste invente, incarne, révèle.

Impossible de ne pas évoquer le dandysme... Il est souvent de tradition anglaise ou française, il y en a eu d'autres évidemment, mais quand on parle du style il existe un triangle franco -anglais/americain– italien. Le dandysme a donné naissance à toute une lignée assez excentrique allant de Beau Brummel à Oscar Wilde et côté français de Baudelaire à Raymond Roussel. Parfois, surprendre par l'excentricité permet de passer de la laideur au dandysme. C'est aussi ça le style, oser.

Et les anonymes dans tout ça ? Un anonyme, c'est éphémère : sitôt l'effet produit, il disparaît. Obtenir des photos d'anonymes s'avérait trop compliqué. Nous ne sommes pas des sociologues de la rue, néanmoins elle est remplie de personnes qui inventent des styles et les font perdurer. La haute couture les exacerbe et les retransmet. Nous avons simplement essayé de lire une époque et ses personnages.

à lire / Le détail qui tue : Petit précis de style de Marcel Proust à Kate Moss, François Armanet & Elisabeth Quin, éd. Flammarion, 262p., 35€


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dossier

o.n.l. En avant la musique ! Photos ¬ Ugo Ponte © ONL

Un nouvel auditorium, des concerts à l'heure du déjeuner, des ciné-concerts, des représentations dans toute la région et par-delà les frontières, L'Orchestre National de Lille ne chôme pas. Non content d'être l'un des orchestres nationaux les plus influents, l'ensemble fondé par JeanClaude Casadesus innove sans cesse, pour toucher de nouveaux publics. Philippe Danel, directeur artistique délégué, lève un coin du rideau.



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C'

est un drôle de ballet auquel on assiste, plusieurs fois dans l'année, du côté de la place Mendès-France : à la mi-journée, des centaines de personnes convergent vers le Nouveau Siècle pour en ressortir 45 minutes plus tard, la mine ravie et des étoiles plein les yeux – plein les oreilles, plutôt, puisque ces mélomanes avertis ou simples amateurs viennent d'assister à un concert-flash. Un quoi ? Une représentation durant la pause casse-croûte. Mais quelles notes se marient avec le jambon-beurre ? « Toutes, répond Philippe Danel dans un sourire. Depuis le début, les concertsflash ont été servis par l'orchestre complet, un solo de clarinette ou encore un un pianiste jazz comme Baptiste Trotignon ». Belle façon d'annoncer le

concert du soir, et les couleurs défendues par l'Orchestre national de Lille. Belle façon, aussi, de toucher d'autres publics. « À l'origine, se souvient le directeur, nous voulions toucher les retraités qui ne sortent pas forcément le soir, et titiller la curiosité des étudiants. Mais en sus de ce public, de nombreux salariés qui travaillent à proximité sont venus. D'autant que certains habitent loin de Lille ». Porter la musique partout où elle peut être reçue Ces mots sont de Jean-Claude Casadesus, fondateur, âme et figure de proue de l'o.n.l., dont l'aura dépasse largement la région Nord-Pas de Calais et la musique classique. Des mots qui définissent à merveille la ligne directrice d'un orchestre fondé en 1976 et


qui, depuis, n'a cessé de propager la musique (et son amour) à travers la région – et aux quatre coins du globe, aussi : en septembre dernier, l'ensemble se produisait au Kazakhstan, et s'envolera bientôt vers la Chine. Le tout sans jamais délaisser notre territoire, des hôpitaux aux prisons en passant par plus de 250 communes en 38 ans d'existence. Ce chiffre donne le tournis ? L'important est ailleurs : ce qui est présenté à Arras, Hénin-Beaumont ou Orchies est identique à ce qui est joué à l'auditorium de Lille. Cuisine et dépendances Un auditorium flambant neuf, longtemps attendu et enfin construit, véritable écrin pour les musiciens. « L'orchestre a besoin de la salle comme le violon, de sa caisse de résonance, explique Philippe Danel. C'est le même principe que les enceintes retour d'un guitariste électrique. Sans ce retour, les artistes sont trop dépendants du chef d'orchestre ». Tiens, parlons-en du chef. À plusieurs reprises, l'o.n.l. a convié d'autres maestros, tels James Judd. Mais la partition ne change pas. À quoi bon, alors ? « Une partition n'est qu'une suite de signes à interpréter, poursuit Philippe Danel. Les notes sont précises, certes. Mais lorsqu'est indiqué "lent", que faire ? C'est l'interprétation du chef. Chacun a sa patte, son nuancier, son répertoire de prédilection. ». Enfin, pour ceux qui voudraient en savoir plus, l'o.n.l. montre parfois ses coulisses : les répétitions ouvertes permettent à chacun de découvrir le travail quotidien des violonistes, cuivres et autres percussionnistes. Ces moments d'intimité ouverts à tous permettent, une fois de plus, de briser les derniers clichés sur une musique réputée inaccessible. Thibaut Allemand

Son & Lumière Défi de musiciens, relecture d'œuvres légendaires, volonté d'apporter un supplément visuel à la musique – ou l'inverse, les ciné-concerts se ramassent à la pelle : Mad Max par Montgomery, Eraserhead par Cercueil, Desperado par Bikini Machine... Et l'o.n.l. n'est pas en reste. Si on imaginait volontiers l'ensemble donner du coffre à Barry Lindon ou 2001 L'Odyssée de l'Espace, deux bobines indissociables de la grande musique, l'orchestre a surpris une première fois en s'attaquant à… Matrix. « On touche ainsi un public différent, et une corde sensible, s'enthousiasme Philippe Danel. La plupart des spectateurs n'avaient jamais entendu un orchestre en live. La puissance de cent musiciens est phénoménale. Ça vous traverse ». Cette année, avant le Cuirassé Potemkine (1925) d'Eisenstein – avec la partition de Chostakovitch – ou les grands thèmes de John Williams pour Steven Spielberg, c'est le chef-d'œuvre de Walt Disney, Fantasia, qui sera mis à l'honneur. Ou plutôt Fantasia/ Fantasia 2000, soit un mélange des deux longs-métrages, respectivement sortis en 1940 et 1999. L'occasion de croiser la fameuse souris, Donald et Daisy avec le son de Beethoven, Debussy, Dukas, Elgar, Ponchielli, Respighi, Stravinsky, Tchaïkovski... Décidément, l'o.n.l, c'est pas des mickeys.


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programme Ciné-Concerts LE CUIRASSÉ POTEMKINE 18.01, Lille, Le Nouveau Siècle, 18h30, 45>5€ par l'Orchestre symphonique du Pôle supérieur Paris Boulogne-Billancourt Pierre-Michel Durand direction FANTASIA / FANTASIA 2000 23>26.02, Lille, Le Nouveau Siècle, 16h, 45>5€ 27.02, Boulogne-sur-Mer, Salle Damrémont, 20h

Siècle, 20h, 45>5€ 08.01, Aire sur le Lys, Le Manège, uniquement sur invitation 10.01, Calais, Théâtre, 20h, 12/7/4€ CONCERT FLASH : Hindemith, Sonate pour alto et piano n°4 + Mozart, Quintette pour cordes, K.515 09.01, Lille, Le Nouveau Siècle, 12h30, 8/5€

Concerts

Cordissimo : Mozart, Une Petite Musique de nuit + Mendelssohn, Concerto pour violon et cordes + Chostakovitch (Barshaï), Symphonie de chambre + Bartók, Danses populaires roumaines 18.01, Gravelines, Scène Vauban, 20h30

Viva Strauss (II) : Bach Bartok - R. Strauss 07 & 09.01, Lille, Le Nouveau

CONCERT FLASH : Mozart, Une Petite Musique de nuit + Chostakovitch (Barshaï),

STEVEN SPIELBERG & JOHN WILLIAMS 23>25.05, Lille, Le Nouveau Siècle

Symphonie de chambre 22.01, Lille, Le Nouveau Siècle, 12h30, 8/5€ Carrefour des Orchestres : Janáček, Danses moraves + Chopin, Concerto pour piano n°2 + Szymanowski, Symphonie n°2 24.01, Lille, Le Nouveau Siècle, 20h, 45>5€ Carte blanche à Maxime Pascal : Fauré / Lavandier, Mirages + Eötvös, Shadows + Garcia-Velasquez, Concerto pour violoncelle 31.01, Lille, Nouveau Siècle, 20h, 45>5€ Viva Wagner : La Walkyrie (extraits) + Tristan et Isolde (extraits) 13 & 17.02, Lille, Nouveau Siècle, 20h, 45>5€ 15.01, Paris, Salle Pleyel



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Le chevalier lumière On pourrait en écrire long sur Son Lux, sa technique et son savoirfaire prodigieux. Un talent hors du commun ? Sauf que dans cette veine, la concurrence est rude et les musiciens surdiplômés ne manquent pas. Son Lux devrait être une divine exception, il est simplement dans l'air du temps. À l'origine, était Ryan Lott. Un type de Denver, tranquille, sans histoires. Comment en aurait-il trouvé le temps ? Depuis son plus jeune âge, Lott vivait reclus, collé au tabouret, le nez dans les partitions, enchaînant piano, batterie, guitare. Le genre de surmenage qui peut vous dégoûter à jamais. Mais, après de difficiles années de solfège, le gamin s'est détendu. A pris son pied. Et un jour, heureux comme un poisson dans l'eau, Lott a ri. Car de ce parcours du combattant, l'Américain a acquis un savoir-faire. Ainsi, en 2008, le musicien au lumineux pseudonyme publie chez Anticon, label hip-hop défricheur (cLOUDDEAD, Why?), un premier essai mariant beats rap et phrasé neurasthénique sur fond d'arrangements précieux – Debussy en baggy, oui. Musique ampoulée ? Aujourd'hui hébergé par un autre label, Lott nourrit des rêves de grandeur. Baroque, le bien nommé Lanterns (2013) regorge de chansons en forme de courses folles entonnées d'une petite voix. Conjuguant fragilité et grandeur, Son Lux s'impose comme un sorcier, un prodige, un démiurge. Autant d'épithètes accolés à Sufjan Stevens (un intime de Son Lux), Grizzly Bear ou St Vincent. Des techniciens inspirés, hérauts de la sophistication xxie siècle, dont la pop ravit mais revêt, parfois, un aspect virtuose, écrasé par l'ingénieuse ingénierie. Alors, sans rien enlever au talent du bonhomme, on espère simplement que, sur scène, passe un peu de vie. Thibaut Allemand

Son Lux 18.01, Bruxelles, Ancienne Belgique, 20h, 15€, www.abconcerts.be // 25.01, Tourcoing, Le Grand Mix, 16h, Goûter-Concert, 5€/gratuit pour 2 accompagnateurs + 19h, 12€/gratuit abonnés, www.legrandmix.com // 28.01, Gand, Vooruit, 19h30, 16/14,75€, www.vooruit.be


Š Tim Navis


© C. Robin

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À l'origine Pour votre serviteur, trentenaire vraiment pas spécialiste en hip-hop, évoquer La Rumeur, c'est replonger plus de quinze ans en arrière – lorsqu'il en savait encore moins sur la chose rap. Au moment où, l'espace de quelques semaines, on a cru trouver une porte d'entrée. En 1997, lycéen et peu au fait du bavardage sur boucles, on tombait sur le premier EP de La Rumeur, Volet 1 : Le Poison d'Avril. Un affranchi qui nous avait pris sous son aile ? La médiathèque du coin, plutôt. Et la découverte d'un rap différent. Coriace. Intransigeant. À l'époque, pour le béotien, le paysage semblait pauvre. C'était avant la découverte d'Anticon, Stones Throw et tout ce rap indé qui séduirait les poppeux. NTM propose de fricoter dans des BM, mais on n'a pas le permis de conduire. Et IAM ? Un discours d'instit' qu'on n'a pas envie de coller dans le walkman. Assassin ? Oui, bon, sauf qu'on recevait déjà des tracts contre l'Etaaat à la sortie du bahut. Passi, Stomy, Doc ? Sérieusement... La Rumeur proposait autre chose : la grande Histoire narrée en petites histoires, sans se raconter d'histoire – vous suivez ? La colonisation, l'immigration et la répression policière sur des beats simples et des ambiances poisseuses. On ne reviendra pas sur le procès qui fut intenté par le Ministère de l'Intérieur, et remporté par La Rumeur. Ni sur ce talent scénique et cinématographique (De L'Encre, 2011). A-t-on, depuis, pénétré le vaste univers du rap ? Pas vraiment. Mais le vestibule vaut le coup. Thibaut Allemand La Rumeur + Scred Connexion + pression 18.01, Oignies, Le Métaphone, 20h30, 13/10€, www.9-9bis.com // 17.05, Bruxelles, Magasin 4



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poliça Ce quatuor américain utilise l'image d'une église pour décrire son propre son. Si à la sortie de Give You The Ghost (2012), nous n'étions pas restés sur le parvis, aujourd'hui, nous poussons grand les portes de Shulamith. à grand renfort de mélodies tantôt nébuleuses, tantôt psychédéliques, cet album s'inscrit dans la continuité. Enregistré dans le studio de Justin Vernon (Bon Iver), il consacre Channy Leaneagh en icône féminine d'une pop synthétique musclée. Entre murmures et clameurs, la voix autotunée – mais pas trop, promis – de la garçonne plane sur des instrumentations puissantes, renforcées par deux batteries asynchrones. Qui peuvent aussi faire regretter l'aspect criard de certains morceaux (Chain My Name). Flirtant allègrement avec le trip-hop comme le rock, la formation souffle le chaud et le froid. Un pouvoir de séduction imparable. Elsa Fortant 29.01, Bruxelles, Ancienne Belgique, 20h, 23€, www.abconcerts.be

Une galette qui nous met d'emblée au parfum : le caramel. à la lumière d'une plage comme I'm The Man That Will Find You, on se lécherait presque les doigts. Petit protégé du DJ et producteur londonien Erol Alkan, le musicien néozélandais rempile naturellement chez Phantasy Sound (Daniel Avery, Ghost Culture...). Son deuxième essai est moins expérimental, plus accessible. Odyssée spatiale et lascive au pays de Candy, Caramel fut enregistré en un mois dans une chambre d'hôtel tokyoïte avec quelques guitares, une basse, une batterie et la voix si particulière de notre chère tête blonde. Sur scène, profitant de changements de rythmes (accélérations et décélérations), la formation de Mockasin alterne les ambiances douces et subtiles. Ça colle aux dents ou à l'esprit, on ne sait plus trop. Mais on aime ça. Elsa Fortant 30.01, Bruxelles, Ancienne Belgique, 20h, 19€, www.abconcerts.be // 05.02, Tourcoing, Le Grand Mix, 20h, 16/13€, www.legrandmix.com

© Jen Carrey

© DR

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connan mockasin



Laurent Garnier © Patrick Curtet

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Chaud devant ! Une seule édition, la première en 2008, aura suffi pour consacrer Les TransArdentes comme le plus grand festival de musiques électroniques de Wallonie. Depuis, le succès ne se dément pas, la foule se presse chaque hiver dans la Cité Ardente. Saugrenu ? Pas tant que ça. Ce premier mois de l'année, le plus morne, marque aussi la fin des examens pour des milliers d'étudiants. Le festival liégeois se présente alors comme une parfaite échappatoire au moment des résultats. Le succès de la manifestation repose aussi sur la qualité de l'organisation, les prix démocratiques et l'ambiance. La jauge atteint certes 12 000 personnes, mais les Halles des Foires de Coronmeuse constituent un théâtre idéal pour s'abandonner en mouvements aux sons synthétiques. « Plus qu'une nuit de fête, on propose de vivre une véritable expérience », ajoute Jean-Yves Reumont, porte-parole du festival. Cet engagement fait la différence d'autant que la ligne artistique ne faiblit pas. Nombre d'artificiers se succèderont aux manettes, à commencer par les légendes techno Laurent Garnier et Jeff Mills dans la Pyramid Room. On se réjouit aussi à l'avance de la présence de Kavinsky, digne rejeton de Moroder dont le live hypnotisera certainement l'assemblée. Sans oublier Ben Pearce, nouvelle étoile deep house et responsable du tube underground What I Might Do. Les murs de béton serviront tout autant les infrabasses des figures locales comme Martin Garrix. La nuit promet d’être chaude en bord de Meuse ! Elsa Fortant 25.01, Liège, Halles des Foires, 19h, 45/37€, www.lestransardentes.be PROG : Jeff Mills, Laurent Garnier, Kavinsky Outrun Live, Martin Garrix, Dr. Lektroluv, Jackson & His Computer Band Live, Andy C + Mc Dynamite, Camo & Krooked + Mc Youthstar, Dj Hazard, Tc, Wilkinson, Rockwell, Dope D.O.D Live, Fred V & Grafix, Dub-Timus Sound System, Klangkarussell, Duke Dumont, Dusky, Francesco Rossi, Ben Pearce, Huxley, Blonde, Dj Slow, Folie Douce, P.P.W.B., Moodprint.



Cheveu

Goran Bregovic Arizona Dream (1990), Le Temps des Gitans (1988), des collaborations avec Iggy Pop, Cesaria Evora ou Gogol Bordello… Goran Bregovic a fait ses preuves. Grand copain d’Emir Kusturica, le génie des Balkans demeure hyperactif : pour ce Champagne For Gypsies Tour, le Serbe réunit le chœur d’hommes de Belgrade et un quatuor à cordes. Ici, hommage est rendu à ses racines (d'où le nom de la tournée !) à l’heure où, selon lui, ses pairs sont malmenés dans l’opinion publique. Un chœur venu du cœur, donc. Le temps d'une soirée, Béthune se met à l'heure de Belgrade. Jetlag assuré. 17.01, Béthune, Théâtre municipal, 20h30, 36/32€, www.theatre-bethune.fr

© John G Moore

Fun Lovin'Criminals

Rythmes proto-punk et dégénérescences primitives, le trio parisien, figure de proue du label Born Bad (Catholic Spray, Frustration...) évoque l’insolence de The Jesus And Mary Chain, la bile de The Fall et ramène Suicide à la vie. Le tout à grands coups d'effets larsen, de mélodies viciées et de synthés désuets aux rythmes détraqués. Concert forcément ébouriffant à l'occasion de la parution d'un troisième LP plus qu'attendu – et craint par la concurrence. 18.01, Dunkerque, Les 4 Ecluses, 19h, 5€/ gratuit abonnés, www.4ecluses.com

© Pascal

© Nebojsa Babic

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Fun Lovin'Criminals ? En 2013 !? Eh oui. Depuis le carton Scooby Snacks (1997), le trio new-yorkais a publié, dans l'indifférence la plus totale, quelques albums toujours bardés de samples jazz, funk, soul, blues, hiphop et rock, dans une ambiance de fin de soirée et d'arrière-bar enfumé de la Grosse Pomme. À l'instar de Cake, le trio représentait une certaine idée de la coolitude laid back vêtue en mafioso. Reste à voir ce que nos éternels ados peuvent produire et donner sur scène aujourd'hui... 22.01, Anvers, Trix, 19h30, 26/23€, www.trixonline.be



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jamais seuls

Terrain Miné Tourné dans la région Nord-Pas de Calais pour Arte, la mini-série Jamais Seuls suit l’enquête d'Alexandra Perrucci (Judith Davis) de retour sur ses terres natales après le meurtre d'un jeune supporter durant un match de football. Comme dans tout bon polar, la trame policière sous-tend la vue en coupe d'une communauté intrigante, à savoir le club d'Arcanville, véritable boîte de Pandore. Rencontre sur le tournage, avant une diffusion prévue pour la fin de l'année.

« Trois années ont été nécessaires au montage du projet » explique le coproducteur Fred Bellaïche. L'écriture ? « Collective et féminine, pour donner plus d'ampleur à la dramaturgie ». Ainsi la réalisatrice Virginie Sauveur

(Engrenages) fût très tôt associée aux auteurs Raphaëlle Roudaut et Clara Bourreau. Serait-ce la voie du salut pour la création française ? « C'est notre manière de faire, en tout cas. Impliquer très tôt le réalisateur, ici la


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À l'anglaise Ce format en trois épisodes de 52 minutes, très prisé des Britanniques (citons Sherlock, Black Mirror...), utilise les outils feuilletonnants (cliffhangers, ellipses, changements de point de vue), tout en développant des personnages complexes. Ce qu'un simple (télé)film ne garantit

pas. Un maître-mot : la prise de risque. « On n'est pas des épiciers, on est spectateurs avant tout, s'enthousiasme Fred Bellaïche. C'est excitant d'innover, d'apprendre sur le tas ». Pour l'anecdote, l'écusson du club d'Arcanville est orné d'un arc, d'une flèche tendue vers un ballon, des couleurs rouge et noir évoquant Boulogne et du slogan : « Pour la beauté du geste ». Un détail ? Peut-être. Mais révélateur. Florian Koldyka

Jamais Seuls (Titre provisoire) 3X52 minutes, Diffusion prévue fin 2014, en une soirée, sur arte

© Severine Brigeot

réalisatrice, rend plus limpide le passage à la mise en scène ».


© Dale Robinette

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lovelace

En travers de la gorge En 1972, la déferlante Gorge Profonde s’abat sur le cinéma américain. Pour la première fois, un porno contient un scénario, de l'humour, et élève au rang d’icône de la révolution sexuelle l’inconnue Linda Lovelace. Huit ans plus tard, devenue militante contre l’industrie du X, elle raconte dans un livre l’enfer d’un tournage forcé. Un biopic pénétrant mais qui manque paradoxalement de chair. Coincée dans une famille rigide de la banlieue de New York, Linda Boreman, 20 ans, trouve en la personne du charismatique Chuck Traynor le moyen de s’émanciper. Poussée par son mari à développer des talents sexuels insoupçonnés, la jeune femme tourne un porno pour sortir son couple de la misère, avant de recueillir les lauriers d’une gloire éphémère. C’est ce que décrit de prime abord Lovelace. Or, revenant sur certaines scènes dans une seconde partie plus sombre, les réalisateurs décalent leur caméra pour montrer la réalité : une femme sous emprise, battue et prostituée par un époux qui subtilise ses moindres cachets. Face à des seconds rôles réjouissants (James Franco, Sharon Stone…), Amanda Seyfried écarquille ses yeux de biche pour jouer une Linda émouvante mais sans réelle... profondeur. Honorable dans son aspect documentaire (malgré des « oublis », comme la triste tentative de poursuivre une carrière d’actrice), l’œuvre pêche par manque de nuance, réduisant la figure féminine à une ingénue ou à une victime. La vraie Linda, elle, est morte dans un accident de voiture à 53 ans, sans avoir touché un sou d’un film ayant rapporté 600 millions de dollars... Marine Durand De Rob Epstein et Jeffrey Friedman, avec A. Seyfried, P. Sarsgaard, J. Franco, J. Temple... Sortie le 8.01



Le Joli Mai © La Sofra

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Planète Chris Marker

Rien à "jetée" Ceux qui n’ont jamais vu un film de Chris Marker peuvent se réjouir. Ceux qui en ont déjà admiré(s) aussi, car voici réunis quatorze films du maître, dont six récemment restaurés. Sans doute la meilleure chose qui pouvait arriver à ces désormais classiques du cinéma français. Parmi ces bobines, notons de géniales incursions vers la science-fiction, telle La Jetée (1962) qui inspirera L'Armée Des Douze Singes (1996), des essais directement politiques (Le Fond de l’air est rouge, 1977) ou de cinéma-vérité (Le Joli Mai, 1963). L’ensemble est toujours empreint d’une sensibilité et d’une approche unique, teintée d’humour ou du moins d’une légère ironie, marque de fabrique du plus secret des cinéastes français. Car ce qui caractérise le cinéma de Chris Marker tient moins à une unité formelle qu'à une certaine idée de son médium : une pratique pouvant rendre compte de la société et de ses (tentatives de) transformations. Finalement, le plaisir du spectateur tient d’abord à la grande intelligence du cinéaste et à sa capacité à s’ouvrir au monde. C'est paradoxal et plutôt drôle. Pourquoi ? Car on sait peu de choses, voire rien, sur cet homme né en 1921 et décédé en 2012. Sa propension à rester reclus était légendaire. Mais s’il ne se montrait pas lui-même, Marker avait un talent, celui de filmer la planète comme personne. Ces œuvres parlent pour lui, témoignages d'une époque traversée de manière discrète mais terriblement précieuse. Et c'est sans doute là l'ultime paradoxe : voici une œuvre monumentale et intimiste. Sylvain Coatleven Planète Chris Marker Coffret 10 DVD (arte DVD) 79,99€, www.boutique.arte.tv



Tel père, tel fils Est-on davantage père en transmettant son sang ou beaucoup d'amour ? Cette question a taraudé Kore-eda à la naissance de sa fille (âgée aujourd’hui de 6 ans, comme les deux protagonistes), et sous-tend l’intégralité du délicat Tel Père, Tel Fils, Prix du jury au dernier festival de Cannes. Ce récit de bébés issus de milieux différents et échangés à la naissance réserve peu de surprises : Ryota, brillant architecte tokyoïte et père exigeant, fait preuve d’étroitesse d’esprit, tandis que le commerçant de banlieue est fainéant mais déborde d’amour. Qu’importe. Ménageant une part au comique, le réalisateur de Nobody Knows (2004) déroule les failles d’un personnage qu’on finit par regarder avec tendresse. Dommage que la traduction convenue du titre (en japonais « devenir père ») ne fasse pas honneur à la subtilité de ce long-métrage. Marine Durand De Hirokazu Kore-eda, avec Masaharu Fukuyama, Machiko Ono, Lily Franky…

L'amour est un crime parfait Prof de littérature séducteur, Marc emmène une étudiante dans son chalet perdu dans les montagnes enneigées. Peu après, elle est portée disparue. Dans Fargo (1996), les Coen avaient maculé la neige de traînées de sang. Les Larrieu, eux, s'amusent à creuser des « trous noirs » de toutes sortes : sexes féminins, crevasse, somnambulisme... Car Marc est aussi peu capable de résister à ses pulsions que de se souvenir de ses virées criminelles. Le film séduit d'abord par le contraste entre les paysages, magnifiquement filmés, ses décors (une faculté toute en verre, des massifs d'une blancheur absolue) et un personnage principal dépassé, parfois bouffon. Malgré quelques longueurs, L'amour... atteint par endroits une folie sèche et réellement inquiétante, comme un conte où le loup serait dévoré par son propre appétit. Raphaël Nieuwjaer Un film d'Arnaud et Jean-Marie Larrieu Avec Mathieu Amalric, Karin Viard, Maïwenn, Sara Forestier... Sortie le 15.01

© Gaumont Distribution

© Le Pacte / Fuji Tele Vision Network Amuse Gaga

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zoom

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lieu

MUSéE FIN DE SIèCLE époque charnière À défaut d’investir un nouvel édifice, le Fin de siècle, dernier né des musées bruxellois, prend ses quartiers dans l’ancien musée d’art moderne. Consacré aux années 1868-1914, période artistique fondamentale en Belgique, le circuit est tourné en grande partie vers la condition sociale de ses contemporains. « Il était temps de donner plus de sens à nos collections » explique Inge Rossi, conservatrice. Il est vrai que les Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique pouvaient ressembler à un vaste capharnaüm. La réforme fut initiée avec l'inauguration du Magritte Museum (en 2009). Et malgré des retards incessants, le musée Fin de Siècle, consacré à la fin du xixe siècle, ouvre enfin. La Belgique, tout jeune pays, est alors en plein essor : les mines de charbon et les usines tournent à plein régime. Léopold II enrichit le royaume sur le dos du Congo alors que de


© DR

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grands artistes se pressent à Bruxelles sous l’impulsion du Groupe des XX et du salon de la Libre esthétique. On comprend vite que ces derniers furent à l’écoute des mutations sociales de leur époque. Ainsi, la première salle des 4 500 m2 de l’établissement ouvre grand les bras à Charles Hermans et son imposante toile À L'Aube (1875) : sérieusement éméchés, de riches bourgeois sortent d’un club sous le regard atterré d'ouvriers misérables. À l’époque, l'œuvre choqua, mais fut déterminante pour le réalisme belge. De nombreux artistes exposés (Constentin Meunier, Léon Frédéric) s'intéressent aux questions ouvrières et paysannes. « Il existait une réelle volonté de démocratiser l’art en Belgique. On donnait des cours artistiques à la maison du peuple de Bruxelles » poursuit Inge Rossi. L'art Nouveau « Même s’il est resté élitiste, l’art nouveau est pour beaucoup dans cette démocratisation. Horta et Van de Velde souhaitaient introduire l’art décoratif dans le quotidien ». Cette marotte bruxelloise tient une place de choix grâce à l’incroyable collection privée Gillion Crowet. Enfin, cette période inaugure d'autres courants à l’aube de la Grande Guerre. La noirceur des tableaux de Félicien Rops ou l’abstraction et le modernisme des toiles de Léon Spilliaert concluent un circuit de quatre étages qui n'étale jamais son opulence. La sélection montre surtout comment les artistes de cette époque, à Bruxelles, ont annoncé tout le xxe siècle. Julien Collinet Bruxelles, Musée fin de siècle, 3 rue de la régence, mar>dim, 10h>17h, 8/6/2€, www.fine-arts-museum.be


FOMU

« Le FoMu n'oublie jamais qu'un musée demeure avant tout un lieu de transmission et d'apprentissage » écrivions-nous en juillet 2012. La maison le prouve à nouveau en trois accrochages certes différents, mais complémentaires. En s'intéressant aux parcours de Germaine Van Parys, Odette Dereze et Joseph Quatannens, l'institution remplit sa mission historique, voire patrimoniale. Puis elle pique notre esprit critique avec Editing the news, qui s'intéresse aux images de presse et, surtout, à leur utilisation.

Anvers, FoMu, mar>dim, 10h>18h, 7/5/1€, gratuit-12 ans, www.fotomuseum.be


Réalisé par ¬ Thibaut Allemand & Elsa Fortant

Eddy Merckx et Claudine Acou, Bruxelles, 1969 © Odette Dereze

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1 Germaine Van Parys & Odette Dereze Jusqu'au 02.03

Débutons avec Germaine Van Parys (1893-1983), pionnière du photojournalisme en Belgique. Durant la Première Guerre Mondiale, la photographie remplace peu à peu les antiques gravures des gazettes, connaissant un formidable essor durant les années 1920. Germaine Van Parys fut de ces précurseurs, mais « ce ne fut pas toujours facile, explique Rein Deslé, commissaire de l'exposition. Elle a dû lutter. Elle était d'ailleurs membre fondatrice d'un cercle de photographes de presse mais, du fait de sa condition de femme, n'en fut jamais présidente ». Pas présidente, mais proche du pouvoir, puisqu'elle était photographe officielle de la maison Royale de Belgique. Cela dit, plus que les fastes de la cour, c'était la vie des petites gens qui peuplaient son quartier des Marolles qui l'intéresse. En témoigne cet accrochage, pour lequel de nouveaux tirages furent nécessaires. Sont immortalisés, façon Prévert, des enfants jouant dans un square, des paysages de campagne... Des sujets bucoliques ? Pas seulement ! De voyages au Congo en politique internationale, Van Parys capte l'époque et ses progrès technologiques : zeppelins, avions et autres fous volants. Autant de témoignages d'un temps révolu qui provoquent des bouffées de nostalgie. Sa nièce, Odette Dereze, prit la relève en développant l'une des premières agences de presse photographique du Royaume. Réunies, ces deux œuvres donnent un aperçu complet (artistique, technique, politique) de la vie en Belgique, entre 1918 et 1995. ▲


exposition

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Théâtre de 10 heures à Bruxelles, ca. 1930 © Joseph Quatannens (Le Lynx) / FoMu Gilles de Binche, ABC., jg.1, nr.2, 7 février 1932 © Joseph Quatannens / FoMu

2 Collectie FoMu : Le Lynx Jusqu'au 08.06

À l'instar de sa collègue Germaine Van Parys, Joseph Quatannens (1902-1974) fut un pionnier du photojournalisme belge. Né à Dixmude, cet ingénieur de formation apprend à manier l'objectif avec son oncle. Il devient rapidement professionnel free-lance, sillonne la Flandre profonde puis l'Europe (Espagne, Pologne, GrandeBretagne) pour en dresser le portrait. Ce bilingue publie dans la presse flamande et wallonne : Le Soir Illustré, Le Patriote Illustré, ABC, AZ, Zondagsvriend et Vu – entre autres. Au début des années 1930, il crée son agence de presse, Le Lynx, clin d'œil à son patronyme (Quat signifiant chat en moyen néerlandais) et à l'animal réputé pour l'acuité de son regard. « Il offre une réponse à la concurrence accrue et la standardisation des clichés, explique Brecht Bostyn, commissaire de l'exposition. À cette époque, influencé par le modernisme, Quatannens se démarque en développant un style humaniste. Il est à l'apogée de son art ». La sélection de magazines et les 150 clichés noir et blanc (18x24 cm) rassemblés ici par thèmes (politique, crise, sports...), narrent l'histoire sociale, politique et culturelle belge de 1927 à 1950 à travers les kermesses, processions, les catastrophes minières et tout un folklore local touchant. « J'ai voulu, avec ce parcours, raconter l'histoire personnelle de Joseph et celle de la presse en Belgique » conclut l'administrateur de collection.


3 Editing the News Jusqu'au 02.03

28 Juin 1994 : La Commission de Droits de L'ONU expose un rapport démontrant que les massacres ont été pré planifiés et font partie d'une campagne systématique de génocide. 4 Juillet 1994 : Des troupes françaises établissent une "zone humanitaire sûre" dans le sud-ouest du Rwanda. 1er Août 1994 : Newsweek magazine dédie sa 1ere de couverture au Rwanda. © Alfredo Jaar - Courtesy de l'artiste

Le poids des mots ? Le choc des photos, surtout. Des exemples ? Cette petite fille brûlée au napalm, Mitterrand et Kohl main dans la main, les avions du 11-Septembre... Les auteurs de ces souvenirs ? Les photographes, bien sûr. Mais aussi des rédacteurs en chef sélectionnant les clichés reçus. « Il y a 15 ans, explique le commissaire Joachim Naudts, deux à trois cent photos étaient transmises quotidiennement à un journal. Aujourd'hui, le responsable doit choisir parmi 15 000 envois ». Mais Editing the News n'est pas une célébration de cette périlleuse mission. Le parcours interroge également des choix, parfois étranges, sinon coupables. Citons ainsi Alfredo Jaar : ce Chilien met en perspective l'année 1994, marquée par le génocide rwandais, à travers l'intégralité des unes du prestigieux Newsweek, qui « fait » l'opinion chaque semaine. Il fallut attendre la fin du massacre (d'avril à juillet) pour que l'hebdo lui consacre une couverture. Cette exposition-choc ne joue pas la provoc', mais use elle aussi d'images marquantes : accueillis par des cocktails molotov immortalisés durant une émeute athénienne, nous sommes assaillis par des milliers de photographies projetées sur un écran – en fait, le déroulé continu des clichés reçus par les agences de presse Belga et AFP. Dans lesquels le tri s'impose, forcément.

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Que el mundo tenga su perdida, 1998 © Johan Muyle

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Indien vaut mieux que deux tu l'auras ! Des installations gigantesques, inclassables, (d)étonnantes. Une esthétique indienne, mais des messages universels. à travers Indian Studio, Johan Muyle provoque un doux choc des cultures, une hybridation des sentiments – œcuméniques, forcément. Entre le globe-trotter Johan Muyle et l'Inde, c'est une longue histoire. Ce plasticien se rend pour la première fois au pays de Gandhi en 1995, attiré par les savoir-faire des affichistes du cinéma de Bollywood. C'est le début de rencontres et d'échanges entre l'artiste et des artisans aux techniques picturales prodigieuses. Sont ainsi réalisés des portraits monumentaux. Seraient-ce des personnalités ? Non, de simples amis et connaissances de Muyle, qui entretient une réflexion sur la célébrité et dynamite ces images à grands coups de slogans lacaniens (« J'étouffais pour toi »). Ici, on redécouvre ces fresques, posées tout près d'installations sonores interactives. Imposantes, ces œuvres ont déjà été présentées à São Paulo, Venise ou Brighton, mais jamais en Belgique dans leur intégralité, ni en Inde ! Dans le deuxième volet, nous attendent des sculptures réalisées ces deux dernières années à partir de petites figurines indiennes en terre cuite : une fillette et son chien, un policier, un garçonnet... Mises en scène, elles relatent cependant l'histoire terrible de cette jeune fille violée dans un bus, ou la situation d'Arcelor, rachetée par Mittal... Muyle croise les cultures, et mêle le trivial au social – imparable. Thibaut Allemand Indian Studio Jusqu'au 09.02, Bruxelles, Centrale For Contemporary Art, mar>dim, 10h30>18h, 5/4/2,5/1,25€, gratuit moins de 18 ans, www.centrale-art.be



JonOne

Les Étrusques et la Méditerranée : La cité de Cerveteri Le Louvre-Lens retrace la vie de l'une des plus grandes métropoles étrusques, depuis ses origines jusqu'à l'invasion romaine, au ive siècle av. J.C. De grandes fouilles menées en particulier au xixe siècle ont mis au jour une quantité d'éléments relatifs à la ville, aux nécropoles, à l'organisation politique et aux relations avec la Grèce ou l'Orient. Ces pièces de grandes collections sont ici confrontées aux plus récentes découvertes archéologiques. Une première, avant la présentation de l'exposition à Rome, en avril.

L'accrochage s'intitule When the substance becomes bigger than the being, qu'on pourrait traduire par Quand l'essence devient plus importante que l'existence. Prends ça Jean-Paul Sartre ! Du haut de ses cinquante ans, le street-artist qui réenchante les galeries présente une trentaine d'œuvres récentes. L'occasion de (re)découvrir ce pionnier du graffiti, qui n'a rien perdu de ses couleurs et de son énergie, emmenant l'art de rue toujours plus loin. Quant à la critique de l'existentialisme, on verra ça une autre fois. Jusqu'au 25.01, Lille, New Square Gallery, mar>sam, 10h>12h et 14h>19h, 1er dimanche du mois et sur rendez-vous, gratuit, www.newsquaregallery.com

Jusqu'au 10.03, Lens, Louvre-Lens, tlj sf mar, 10h>18h, 9/8€, www.louvrelens.fr

Helmut Newton & Alice Springs Les artistes Helmut Newton (1920-2004) et Alice Springs (née en 1923) furent mariés durant 56 ans. Lui fut le photographe que l'on sait, elle fut comédienne, peintre, avant de tâter de l'objectif. Ces auto-portraits, portraits de lui par elle, d'elle par lui, et gros plans de personnalités réalisés par elle et lui sont, pour l'une des premières fois, montrés côte-à-côte. Où l'on s'aperçoit que les deux époux se sont mutuellement nourris, sans jamais interférer dans le travail de l'autre. Autoportrait © Helmut Newton Foundation

Jusqu'au 25.01, Lille, Maison de la Photographie, lun>ven, 10h>18h, sam, 14h>18h, gratuit, www.maisonphoto.com

JonOne, Fall , Acrylique sur toile, 153x206 cm, 2013, courtesy New Square Gallery

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Antéfixe, tête féminine, Fin 6e siècle - début 5e siècle avant J.-C.© RMN-GP (musée du Louvre) / Tony Querrec

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© Charlotte Lloyd ; Faberge Leather Lace

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agenda

Happy Birthday Dear Academie Aussi prestigieux soit-il, le Département mode de l'Académie d'Anvers n'a que 50 ans ! Initié par l'audacieux Mark Macken (1913-1977), il laisse libre cours à l'imagination de ses étudiants – à l'instar des art-schools britanniques. Doit-on revenir sur le parcours des Six d'Anvers ? Non, le MoMu le fait très bien en accordant une large place aux croquis de mode, défilés de fin d’études et travaux d’étudiants de toutes les générations regroupés par thèmes. Anvers, MoMu, jusqu’au 26.01, mar>dim, 10h>18h, 1er jeu du mois, 10h>21h, 8/6/1€/ gratuit, www.momu.be

Le Futur commence ici L'exposition inaugurale d'un FRAC relocalisé sur le port dévoile un (très) vaste échantillon de sa collection - plus de 1 500 œuvres. Une plongée dans les thèmes abordés par le lieu - les liens entre création et société, la fonction du design au quotidien... Tourné vers l'avenir, sans renier le passé industriel de son environnement, le FRAC s'ouvre au monde... et au public. Dunkerque, FRAC Nord-Pas de Calais, jusqu'au 27.04, mer>dim, 10h>18h, gratuit, www.fracnpdc.fr

Living Objects Made for India

Depuis quelques années, de jeunes créateurs confirment le regain d'intérêt pour la dentelle. En témoigne Lace Effects 1, soit une vingtaine d'artistes qui jouent avec la transparence, les entrelacs, le vide et le plein... Broderie, couture, mais également dessin, sculpture et impression 3D propulsent la dentelle dans un futur très, très proche. On file découvrir cette exposition avant que ne déboule le deuxième volet, de fin-mai à décembre prochain.

Depuis l'an 2000, à Londres, l'écossais Jonathan Levien et l'indienne Nipa Doshi, tous deux diplômés du Royal College of Art, conjuguent leurs talents. Pour le GHI, les deux designers ont sélectionné des pièces trouvées dans les foyers et bazars indiens. Ces objets du quotidien sont utilisés pour les repas, le bain, la prière, le culte de divinités... Mêlant sacré et profane, marketing et artisanat, cette exposition en dit long sur la culture indienne. Et sur notre regard porté sur elle, aussi.

Calais, Cité internationale de la dentelle et de la mode, jusqu'au 18.05 tlj, 10h>17h, gratuit, www.cite-dentelle.fr

Hornu, GHI, jusqu'au 16.02, mar>dim, 10h>18h, 8/4/2€, www.grand-hornu-images.be

Lace Effects 1



Femme fatale © Delphine Depetro

exposition

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Tony Oursler : Phantasmagoria

Andy Warhol : Life, Death & Beauty

Ce parcours présente les premiers films, datant des années 1970-80, du plasticien, les poupées-vidéo des nineties, ou encore les fameux globes oculaires. Investissant le lieu, l'Américain dévoile une frise historique retraçant les grandes dates des arts visuels, du Moyen-âge à la 4D, en passant par la fantasmagorie née au xviiie siècle et dont le plus illustre représentant fut le liégeois Étienne Robertson.

En produisant plus de 200 œuvres uniques sur le thème du Christ, Warhol ne cessa d'interroger la foi, le sacré. Omniprésente, la mort dialogue avec la grâce, et forme la sous-couche invisible de célèbres icônes colorées. Celles-ci tiennent à la fois de l’image pieuse et du masque funéraire (Marilyn, Jackie...). En une centaine d'œuvres, est soulignée la part de spiritualité chez un artiste qui clamait sa superficialité.

Hornu, MAC’S Grand-Hornu Images, jusqu'au 23.02, mar>dim, 10h>18h, sf jours fériés, 8/4/2/1,25€, www.mac-s.be

Mons, BAM, jusqu'au 19.01, mar>dim, 10h>18h, 9/6€, www.bam.mons.be

Salon du dessin et du multiple

Baselitz-Leroy, Le récit et la condensation

L'association Organisme Onirique se penche sur le dessin et le multiple. Par multiple, entendre tous les moyens d'impression et de reproduction manuelles d'une image : gravure (sur bois, métal, lino...), transfert, lithographie... 21 artistes, dont Yves Gobart et son impressionniste fusain ou Michel Castaignet et ses jeux d'ombres et lumière ont répondu présents. En tout, 38 œuvres, témoignent de la création contemporaine fait-main. Stimulant !

Quel rapport entre les figures renversées, colorées, de Georg Baselitz, et le travail sur la matière d’Eugène Leroy ? Se dévoile ici une même implication physique chez ces deux maîtres et amis. Le tumulte de la matière sédimentée, chez Leroy, répond aux nombreux accidents de surface de Baselitz. Une même libération des facilités de la narration, de la figure… De part et d’autre, est mis en lumière l’acte de peindre, avec la matière, avec la peinture elle-même.

La Madeleine, CCA, 08>31.01, lun>ven, 9h>12h, 14h>19h, sam, 14h>17h, gratuit, www.cca-lamadeleine.fr

Tourcoing, Muba, jusqu'au 24.02, tlj sauf mar. et jours fériés, 13h>18h, 5/3€/gratuit, www.muba-tourcoing.fr



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« L'humour détermine mon rapport au monde, mais j'aime les spectacles empreints d'une certaine gravité »


interview

FRANçOIS MOREL Acteur de proximité Propos recueillis par ¬ Nicolas Pattou Photos ¬ La Fin du Monde est pour dimanche / Instants Critiques © Manuelle Toussaint

À la grande époque des Deschiens, dans la rue, on demandait à François Morel la recette du Gibolin. Aujourd'hui, on l'aborde pour ses dernières chroniques sur France-Inter. Au risque d'oublier que l'homme, né à Flers (Orne) il y a 54 ans, jongle avec les casquettes. Actuellement, François Morel a six spectacles en tournée, dont deux passent dans la région. L'occasion de faire le point en toute simplicité avec un artiste hors du commun. Comment peut-on vous présenter ? Auteur, comédien, chroniqueur, conteur, chanteur, poète ? Poète c'est beaucoup. Disons que je suis un comédien qui écrit parfois ses textes. C'est sur une scène que j'ai le sentiment de faire le mieux mon métier. Sinon, il y a un vieux mot que je ne déteste pas : fantaisiste.

traite tout ceci avec une certaine légèreté. Je m'attarde sur quelques angoisses, mais autour desquelles on se réunit au théâtre pour rire et se consoler. Comment trouvez-vous l'équilibre entre ces différents registres ? L'humour détermine mon rapport au monde, mais les spectacles que je préfère sont empreints d'une certaine gravité. La grande comique suisse Zouc évoquait la maladie, la vieillesse et la mort avec un humour ravageur. Ces gens-là m'ont inspiré. Je ne monterais pas un spectacle sur François Hollande ou Nicolas Sarkozy, je m'ennuierai avec eux.

Vous décrivez La fin du monde est pour dimanche comme un spectacle existentiel. C'est-à-dire ? C'est un peu pour rire, hein. Existentiel, car je me concentre sur le temps qui passe, la recherche du bonheur, des amours impossibles... Evidemment, je ▲

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Pourquoi avez-vous imaginé cette temporalité ? Une vie se déroulant sur une semaine ? Le titre du spectacle provient d'une phrase de Michel Audiard, dans la première page de La Nuit, Le Jour Et Toutes Les Autres Nuits (1978). C'est d'une grande force poétique. Cet ouvrage autobiographique, assez désespéré, fut écrit suite à la mort accidentelle de son fils. Il considérait que les hommes ayant inventé les moyens de détruire la planète ne tarderaient pas à le faire... Si l'on part du principe que la fin du monde est pour dimanche, voyons où on en est, s'il nous reste quelques belles journées. Pouvez-vous nous présenter une scène ou un personnage fétiche ? Prenons Jeanine, la fan de Sheila : elle est a priori pathétique et solitaire, mais elle est de bonne humeur et n'en veut

à personne. Elle se débrouille avec ses angoisses. En la regardant boire du Rivesaltes et écouter son idole, les spectateurs éprouvent de la tendresse pour elle et reconnaissent peut-être une voisine ou un membre de leur famille. C'est assez représentatif du regard qui je porte sur mes personnages. On ne se moque pas d'eux, on rit avec eux. Quelle elle est l'idée de départ d'Instants Critiques, votre autre pièce en tournée ? Au départ, je souhaitais faire plaisir à un ami, Olivier Broche. C'est un grand cinéphile, un type extraordinairement cultivé. Au théâtre, il jouait souvent de petits personnages un peu écrasés par le monde. Sa passion pour le cinéma, parfois véhémente, m'a rappelé celle de Jean-Louis Bory au Masque et la Plume. J'ai approfondi l'idée. Face à Bory, il fallait Charensol, son alter


« On ne se moque pas de mes personnages, on rit avec eux » ego conservateur. Le tandem mettait en scène ses joutes oratoires pour intéresser l'auditeur. Cette pièce évoque moins la critique que l'amour du cinéma, le plaisir de la conversation et la force de l'amitié. Les œuvres d'art rendent nos vies plus intéressantes. Quel est votre avis sur Le Masque et la Plume en 2014 ? Je l'écoute encore régulièrement. Dans un monde où la publicité est omniprésente, c'est important d'entendre des gens qui n'ont aucun intérêt à défendre ou à descendre un film. Mes derniers spectacles ont plutôt été plutôt défendus. En revanche, certains films dans lesquels j'ai tourné ont connu un plus mauvais sort. Comment trouvez-vous le temps de d'écrire avec six spectacles en tournée (en tant que chanteur, auteur ou metteur en scène) ? J'ai toujours du mal à abandonner un spectacle… Comme je joue le soir, j'ai toute la journée pour m'occuper. J'écris un peu partout : dans le train, à l'hôtel, en voiture. Non seulement mes spectacles, mais aussi ma chronique hebdomadaire pour France Inter.

Justement, comment abordez-vous cet exercice de billettiste ? J'essaye de ne pas trop me répéter. Je n'ai pas de têtes de turc comme certains humoristes. Je me mets parfois en colère, mais je ne m'acharne pas. Le billet est un exercice de liberté absolue. Je ne suis pas obligé de faire rire. Je regarde l'actualité, je lis le journal et je vois ce que cela produit en moi. J'essaie simplement d'être intéressant. Toujours cet amour du travail bien fait ! La Fin du Monde est pour dimanche 09&10.01, Valenciennes, Le Phénix, 20h, 28/26/22/15€, www.lephenix.fr 11.01, Hazebrouck, Centre André Malraux, 20h30, 18/14/10€, www.centreandremalraux.com 13&14.03, Amiens, Maison de la Culture, www.maisondelaculture-amiens.com Instants Critiques 26.01, Saint-Amand-Les-Eaux, Théâtre, 16h, 25/20/15€/grat, www.saint-amand-les-eaux.fr 08.02, Creil, La Faïencerie, 20h30, 12 à 25€, www.faiencerie-theatre.com


Joel Pommerat Š Cici Olsson


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Joël Pommerat Mots de passe Artisan des sentiments à l'emploi du temps chargé (toujours une pièce en tournée, une création sur le feu et une dizaine d'autres projets supposés), Joël Pommerat surprend en portant sur les planches de l'Hippodrome de Douai un texte qui n’est pas signé de sa main. Parallèlement, deux des ses classiques sont repris à Bruxelles. Le fondateur de la Compagnie Louis Brouillard nous éclaire un peu.

« C'est, à ma connaissance, la première œuvre de la dramaturge et comédienne Catherine Anne. Elle fut écrite avec et pour ses camarades du Conservatoire. Je l’ai découverte lors de sa création, en 1987, au Théâtre de la Bastille. Nous sommes de la même génération et ce texte me passionne, explique l'intéressé. Je me sens intimement lié aux personnages qui débutent leur vie d'adulte. Les protagonistes sont encore dans une sorte de candeur, et l'écriture fait également preuve d’une naïveté étudiée. La justesse de son regard me touche ». Durant cette Année Sans Eté, cinq jeunes gens aspirent à devenir écrivain, à partir loin, pour fuir qui les parents, qui la province, parfois tout cela à la fois. Ils vivent des amours

sans lendemain et passent, peut-être, à côté du grand… Le genre d’histoire qui réveille forcément des souvenirs de jeunesse en chacun, et fait sûrement écho à l'existence des jeunes comédiens dirigés par Joël Pommerat. Enfin, dirigés... Expérience Lorsqu'on connaît la méthode Pommerat, faite de répétitions et d'échanges, mise en scène et écriture étant réalisées simultanément, on s'interroge : quelles libertés ont été prises ici ? Quelle place fut laissée à l'initiative des comédiens ? « Nous n'avons pas touché au texte. Un choix plutôt sage, afin d'être disponible au maximum pour accompagner les acteurs dans leur interprétation ». N'empêche, lorsque l'on décide de porter un ▲


Une année sans été @ Elizabeth Carecchio

« Il n'y a pas de changement radical, mais une évolution naturelle. Je ne suis plus la même personne qu'il y a dix ans » tel texte sur les planches, on a forcément en tête quelques idées, arrêtées ou non. « Je n'impose rien, et privilégie toujours le dialogue et l'écoute. Bien sûr, j'avais quelques grandes lignes à l'esprit, qui furent confirmées ou démenties par le travail. Finalement, j'ai fonctionné de manière plus "classique", j’ai mis en scène sans être à

l'origine du texte. Ce n'est pas mon rôle favori mais ici, c'était nécessaire et plutôt intéressant. Cette expérience m'a beaucoup appris ».

Cent fois sur le métier... Impatient, on se demande à quoi ressemblera la mise en scène. « Les familiers de notre travail ne seront pas déconcertés, confie Pommerat. La scénographie est frontale, sur le principe d'un espace vide, une boîte noire dans laquelle la lumière, le son et quelques éléments scéniques construisent à la


@ E. Carecchio

Au Monde 28.01>02.02, Bruxelles, Théâtre National, Complet !

@ E. Carecchio

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Les Marchands 16>25.01, Bruxelles, Théâtre National, Complet !

fois une réalité et un imaginaire. Vous savez, ce n'est pas parce que le texte n'est pas de moi que je vais faire autre chose. Ce spectacle est la continuité de mes œuvres précédentes ». Justement, en mars, sont à nouveau repris deux standards d'un vaste répertoire. D’un côté, le huis-clos familial Au Monde (2004), qui a définitivement assis la réputation de son auteur. Puis Les Marchands (2006), sublime travail sur l’aliénation, la perte de soi dans

le labeur, jouant sur la dissociation du son, de l’image, pour faire sens. Une belle occasion de les (re)découvrir et, pour leur auteur, de les revisiter. « Il n'y a pas de changement radical, mais une évolution naturelle. Je ne suis plus la même personne qu'il y a dix ans. Je n'écrirai pas forcément les mêmes mots aujourd'hui. Mais ces petits chocs, ces légers troubles sont stimulants ». Le trouble. Une courte, mais juste définition de l'œuvre de Joël Pommerat. T. Allemand

Une Année Sans Été - (Complet les 8 & 9.01) 08>10.01, Douai, L'Hippodrome, 20h, 20/16/12/10/9€, www.tandem-arrasdouai.eu


Une douce imprudence © Laurent Philippe

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Se souvenir des belles choses Douze spectacles, six jours, trois villes, mais un festival qui repousse les contingences mathématiques. Le thème de ce nouveau Vivat la danse ! est de l’ordre de l’impalpable, quelque part entre mémoire des corps, disparition des êtres et fantômes du passé. Peutêtre vaut-il mieux laisser Eliane Dheygere nous en parler. « Je vois énormément de représentations. Cette saison, la notion de disparition s’imposait, de façon littérale ou poétique, et liée selon moi à l’angoisse de la fin d’une époque, d’un siècle achevé », éclaire la directrice du Vivat. « Mais ça ne signifie pas forcément des spectacles plombants ! » Parmi ces variations sur un même thème, surgissent ainsi de beaux duos masculins : l’un évoque les corps vieillissants de deux amis de vingt ans (Une douce imprudence), l’autre la pulsion de vie de deux circassiens après le décès de leur chorégraphe (Nos Limites, voir p.84). À Armentières, les habitués (L. Touzé, C. Croizé) côtoient les jeunes artistes en début de carrière... Et puis il y a Catherine Diverrès : dans O Senseï, cette "grande dame de la danse" rend hommage à son maître japonais Kazuo Ohno (1906-2010), dont l’art du Butô crée des ponts entre le monde des morts et celui des vivants. Guider le public Avec Le parlement des invisibles, Anne Collod présente une étape de création faite de matériaux compilés, de chorégraphie et de vidéos mis en chantier avec ses danseurs. Car Vivat la danse ! ouvre aussi les coulisses et forge l'esprit critique des spectateurs. Pour la première fois, une double audio-description est proposée sur Une douce imprudence : l’une assurée par une danseuse, l’autre, simultanée, par un critique qui laisse libre cours à son "théâtre mental". Une expérience unique qui devrait assurer la confrontation de points de vue multiples. Marine Durand

Vivat la danse ! Du 24 au 30.01, Armentières, Lille et Courtrai, 1 spectacle : 19/14/7€, Pass Vivat : 42€ pour 12 spectacles et l’accès aux installations. Navettes gratuites tous les jours au départ de Lille ou d’Armentières. Plus d’informations sur www.levivat.net

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Weekend Poil à gratter Selon la théorie de Cliff Arnalls, professeur à l'Université de Cardiff, le 20 janvier 2014 serait le jour le plus triste de l'année. Sa formule ? Une drôle d'équation comprenant la météo, nos dettes, le temps écoulé depuis Noël, entre autres. Aussi charlatan soit-il, Arnalls nous offre une habile transition vers le Weekend Poil à Gratter... qui débute le 31 janvier. De quoi se remettre de la déprime avec entre autres L'Homme Invisible (1933) mis en musique par Bobik Ou Sacha, mais également Congés Payés, par la compagnie Stereotypk, mêlant dessin, théâtre d'objet et musique live sur des images des premiers départs en vacances, en 1936. Enfin, citons Cœur de Patate, tranche de vie d'un couple tenant une friterie. Une sélection idéale de formes variées, étonnantes, drôles et souvent émouvantes. Ça vous démange ? Nous aussi. Thibaut Allemand 31.01>02.02 Hazebrouck, Centre André Malraux- Espace Flandre, Salle des Augustins, 1 spectacle : 10/7€, Pass 4 spectacles : 24€, www.centreandremalraux.com

Dans ce décor atypique, se côtoient un tapis roulant, une roue de hamster géante ou encore des trappes. Minuscule, l'espace est élégamment apprivoisé par un danseur et deux acrobates, alternant soli et pas de danse. Dans la chute, la lenteur ou la simple marche en avant, les corps s’entrecroisent, interfèrent, soutenus par des projections vidéo jamais superflues, hommage à l’ethnologue et réalisateur Jean Rouch, fondateur de l’anthropologie visuelle. Entre acrobaties harmonieuses et errances maîtrisées, ces corps, sur lesquels tout semble reposer, parviennent pourtant à se faire oublier au profit du mouvement. La compagnie du Lyonnais Mathurin Bolze se nomme M.P.T.A. (les Mains, les Pieds et la Tête Aussi) ; des initiales qui reflètent idéalement cette œuvre. Une création physiquement spectaculaire et d'une redoutable intelligence. Hugo Dewasmes 14.01, Le Manège, Maubeuge, 20h, 8/11€, www.lemanege.com

© Christophe Raynaud De Lage

Meurtre au motel © Philippe Peeters

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à BAS BRUIT



Tendance Europe

Le Carnaval des ombres En 1919, la Belgique héritait des Cantons Rédimés, rattachés ensuite à la Province de Liège. Lors de la Seconde Guerre Mondiale, le Reich enrôle de force des habitants de ces Cantons dans la Wehrmacht. Des Malgré-Nous belges, donc. Serge Demoulins conte l'histoire de ces hommes (ses oncles, son grand-père) parfois morts sous l'uniforme allemand. Avec tact, humour et un soupçon de fantaisie désespérée, le comédien signe une œuvre poignante questionnant l'identité, la transmission, mais aussi le silence de l'état belge...

La Maison de la Culture d'Amiens confirme son intérêt pour la création émergente sans frontière. Durant plus d'une semaine, Tendance Europe multiplie les propositions décalées en provenance du Vieux Continent. Au programme ? Une exposition de François Rouan, de belles retrouvailles (La Chambre d’Isabella, de Jan Lauwers & Needcompany), du trash et de l'érotisme ((Mi)IMOSA, Clowns & Queens...) et le concert d'un grand monsieur, Rodolphe Burger. Sans oublier les géniaux Superamas, prêts à clore cette édition dans un esprit cabaret bien barré. Une affiche européenne aucunement touchée par un plan d'austérité ! 21.01>01.02, Amiens, MCA, 1 spect. 13/11/7€, Pass 30€, www.maisondelaculture-amiens.com

07>25.01, Bruxelles, Atelier 210, 20h30, mar>dim, sf dim, 19h30, et 15.01, 15h, 18>8€ // 11.02, Arlon, Maison de la Culture

L'Assommoir © Bruno Dewaele

Lors de sa parution en 1877, ce roman de Zola fit scandale – l'écrivain y peignait, sans fard, la déchéance d'une famille ouvrière. Dirigés par un metteur en scène berlinois, les six comédiens issus du Théâtre national de Bordeaux (re)donnent vie à ces destinées brisées. On y retrouve Nana, Lantier et bien sûr la blanchisseuse Gervaise, ici incarné par trois comédiennes. De manière jubilatoire, la troupe rend justice au propos très noir de L'Assommoir - l'alcool devient révélateur tragicomique. Les grands thèmes chers à Zola (l'asservissement, le labeur...) sont remarquablement restitués. Cette fresque naturaliste n'a rien perdu de sa force. 08>18.01, Lille, Théâtre du Nord, mar>dim, 20h, sf jeu, 19h & dim, 16h, 25>3€, www.theatredunord.fr

La Chambre d’Isabella © Eveline Vanassche

© Alessia Contu

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Le récit de la servante Zerline © DR

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agenda

Le récit de la servante Zerline H. Broch/P. Sireuil

07>25.01

Adishatz J. Capdevielle

14&15.01

Les Irresponsables (1950) n'est pas le plus célèbre des romans d'Hermann Broch, mais il a inspiré cette pièce, créée en 1989 avec Jeanne Moreau. Ici, Jacqueline Bir reprend le rôle de cette vieille femme, autrefois belle, contant à un jeune homme le récit d'un fol amour interdit. Aigreurs et souffrances, petitesses et mensonges, jalousie et mélancolie : ce texte magnifique est une belle leçon de vie.

Seul en scène, Jonathan Capdevielle se glisse dans la robe en strass d'une Madonna de province. Assis à une table de maquillage, l'acteur caméléon reprend d'abord, a capella, les tubes de Louise Ciccone, mais également de Cabrel ou Lady Gaga. Karaoké ? Pas du tout. Dansant, se travestissant, conversant avec son père, cet artiste accompli livre un portrait sans fard de sa jeunesse – et perce le secret des pop songs : elles ne parlent que de nous.

Bruxelles, Th. de la Place des Martyrs, mar, 19h, mer>sam, 20h15, sf sam 18, 19h, dim 12 & 19, 16h, 16,50>9€, www.theatredesmartyrs.be

Arras, Théâtre, 20h, 20/12€, www.tandem-arrasdouai.eu // 22.03, Jeumont, CC A. Malraux

Drumming Live

Bleu Bleu

Rosas & Ictus

09>12.01

En 1998, A.T. De Keersmaeker créait Drumming, sur une partition homonyme signée Steve Reich (déjà mis à l'honneur sur Fase, 1982). A priori simple, cette œuvre pour percussions répète le même motif rythmique, se décalant progressivement pour créer des canons. Ictus reproduit ce tour de force, et soutient une chorégraphie idoine : une seule phrase dansée et répétée, évoluant de façon infinitésimale. Oui, c'est canon. Bruxelles, Kaaitheater, 20h30, sf dim, 15h, 25/20/16/12,5/8€, www.kaaitheater.be

S. Arcas

14>25.01

Toulouse, 1992. Trois post-ados un peu dealers ne vivent que pour la drogue, le sexe et le rock. Imagerie classique. Mais le trio se pique de percer dans l'art contemporain et filme clients et fournisseurs en vue d'une expo. Evidemment, tout ne se passe pas comme prévu. Désinvolte et souvent drôle, cette pièce autopsie les années 1990, drôle d'époque coincée entre la chute du Mur et le 11-Septembre. Bruxelles, Théâtre de Poche, 20h30 sf mer, 19h30, 21.01, 13h30 & 20h30, relâche dim & lun, 10/7,50/5€, www.oceannord.org



agenda

Comment moi je © DR

théâtre

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Punk Rock

Constellations 14.01>08.02

Nick Payne /Th. du Prisme 21 & 22.01

Simon Stephens est une figure du In-YerFace theatre (soit théâtre-coup de poing, ou théâtre-en pleine gueule). Apparus dans les années 1990, ces jeunes dramaturges britanniques traitent de sujets sensibles, souvent ancrés dans la réalité sociale du nord de l’Angleterre (dont l’auteur est originaire). Ce huis clos trahit le mal être adolescent et l'irruption de la violence. On pense alors aux tueries lycéennes, au vrai Elephant (Alan Clarke, 1989). L'acuité du regard et la justesse des acteurs frappent. En pleine poire.

Roland est apiculteur et Marianne, physicienne. Constellations conte les étapes de leur relation amoureuse. Les scènes se répètent, mais ce n'est jamais tout à fait la même chose : un infime détail peut tout faire basculer. Ce dispositif rejoint une théorie où toutes nos décisions (qu’on les prenne ou non), existent dans des univers parallèles. Après la comédie romantique, la comédie quantique ?

S. Stephens/O. Coyette

Bruxelles, Théâtre de Poche, 20h30, tlj sf dim & lun, 16/13/11/8€, www.poche.be

Douai, L'Hippodrome, 20h, 20/16/12/10/9€, www.tandem-arrasdouai.eu // 06.02, Arques, CC Balavoine, 20h, 10/8/6€ // 13>29.03, Tourcoing, Salon de Théâtre

Comment moi je

Sillon

M. Levasseur/ Cie Tourneboule 15, 18 & 19.01

B. Bouchelaghem/Cie Zahrbat 23>25.01

Les enfants sont-ils prêts à aborder quelques grandes questions philosophiques ? La Compagnie Tourneboule répond grâce à la rencontre entre une fillette livrée à elle-même et JeanPierre, philosophe perché dans un arbre. Qui suis-je ? Comment comprendre le monde ? Et les autres ? Ce théâtre d'objets et de marionnettes invite chacun à trouver sa place. à montrer aux Socrate en culottes courtes !

En solo ou en groupe, Brahim Bouchelaghem a souvent révolutionné la danse contemporaine. Dans sa dernière création, « tournée entièrement vers le micro-mouvement et la pause, la vitesse et la vélocité, mais aussi l'apesanteur », les quatre danseurs exécutent des ensembles et des soli qui défient le temps. Les cinq artistes sillonnent le plateau avec ardeur, le piétinent, le pressent jusqu’à en extraire le sens.

Calais, Le Channel, 16h (+ sam 11h), 3€ // 29.01, Liévin, Centre Arc en Ciel, 14h30, 11>6€

Lille, maison Folie Wazemmes, 20h, 12/8/6€, www.mfwazemmes-lille.fr



théâtre

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Nos Limites © Christophe Raynaud De Lage

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agenda

Nos Limites F. Champion / Mathias Pilet, Alexandre Fournier & R. El Meddeb 28 & 29.01

À l'origine, un drame : celui de Fabrice Champion, voltigeur devenu tétraplégique en 2004. Malgré son handicap, l'artiste crée un spectacle de portés acrobatiques avec deux jeunes étudiants, M. Pilet et A. Fournier. La disparition de Champion en 2011 n'y change rien, les deux acrobates poursuivent l'aventure accompagnés par le chorégraphe R. El Meddeb. Mais ici, c'est l'absence, le manque, le vide qui sont abordés. Nos Limites n'en reste pas moins une formidable ode à la vie. Lille, Le Prato, 20h, sf mer, 19h30, 17/13/8,50/5€, www.leprato.fr

La petite renarde rusée L. Janácek /R. Carsen/ONL 28 & 30.01, 1, 4 &7.02

Bienvenue dans l'espèce humaine B. Lambert

28.01>01.02

Ce spectacle s'appuie sur les écrits de Schopenhauer, Houellebecq, Beckett, ou encore Cioran. A priori, pas le boulevard du rire. Et pourtant, cette fausse conférence questionne la condition humaine de manière ludique et caustique. Dans ce nouvel épisode du feuilleton théâtral initié avec Pour ou contre un monde meilleur ? (1999), Lambert s'intéresse à l'histoire des religions, aux dictatures, au capitalisme, avec ironie et un cynisme joyeux. Béthune, La Comédie, 20h, 18/14/8/7€ //14.06, Lens, Louvre-Lens, www.louvrelens.fr

Souls Olivier Dubois 30&31.01

Un garde-chasse capture une renarde, désire l'apprivoiser, mais elle s'échappe, tombe amoureuse d'un renard et meurt sous les balles d'un chasseur. Cette fable évoque le cycle de la vie et de la nature. Brillamment mise en scène par Robert Carsen, elle introduit le bestiaire dans la tragédie et offre de splendides harmonies signées Janácek, jouées par l'o.n.l. ici dirigé par Franck Ollu.

Le nouveau directeur du CCN de Roubaix interroge la condition humaine en faisant un pas de côté. Ou plutôt, en arrière : que se passerait-il si les sept milliards de Terriens décidaient simultanément de faire un pas à l'inverse de la rotation de notre planète ? Dans cette pièce chargée de mysticisme, sept danseurs africains relèvent le pari. Un dialogue magistral entre les corps et le cosmos.

Lille, L'Opéra, 20h, 67/47/29/12/5€, sf sam 01.02, 18h, 30/15€, www.opera-lille.fr

Roubaix, Le Colisée, 20h30, 25/22/17/8/6€, www.coliseeroubaix.com



littérature

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interview

DENIS ROBERT Voyage au bout de la crise Propos recueillis par ¬ Julien Collinet Photos ¬ © DR, R. Blang - www.lepartidegauche.fr, FC Metz

« Après Clearstream, je n’écrivais pratiquement plus. Un blocage. Dès que je prenais la plume, je trouvais ça nul », se souvient Denis Robert. L'ancien journaliste de Libé vit de ses films, ouvrages et toiles. Le virus est revenu lors d'un « stage permis à points. J’ai rencontré ces gars qui m’ont raconté leurs mésaventures. Rentré chez moi, j’ai gratté sur une feuille. C'est comme si le don de l’écriture était revenu. » Le résultat ? Vue imprenable sur la folie du monde, récit haletant au cœur de sa Moselle natale, dévastée par la crise, à la rencontre de personnages souvent ignorés par les médias. ▲


« Je ne connais pas de région où l’on a autant menti et fait de plans sociaux »


littérature

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« Les incertitudes sont nombreuses : la montée de l'extrême droite, la corruption. Heureusement il nous reste le foot… » Vous explorez de nombreux thèmes dans cet ouvrage Oui. Ce livre fonctionne sur des inquiétudes. Je réfléchis à l’avenir, à la finance qui est en train de nous tuer, mais aussi à la relation entre un père et son fils. Lorsqu’il avait sept ans, nous avions passé une journée ensemble, visité un zoo, une mine, dormi chez un copain. J’ai noté nos conversations. Je me pose énormément de questions : comment va-t-il se démerder ? Il est plein de rêves et d’insouciance. Je ne veux pas le plomber, mais bon… J’espère qu’il gardera en lui cette candeur. Comment qualifieriez-vous ce livre entre fiction et journalisme ? Tout est vrai. C’est un roman ancré dans le réel. Je connais vraiment des mafieux, on a essayé de faire sauter ma bagnole... J’ai effectué toutes ces rencontres, sauf que ce n’était pas concentré sur un voyage de trois jours.

Tom Wolfe ou Hunter S. Thompson m’inspirent beaucoup, mais je fais du gonzo journalisme à ma manière. Pourquoi la Moselle ? Car je ne l’ai jamais quittée. Elle est particulière, c’est une terre d’immigration. Et je ne connais pas de région où l’on a autant menti et fait de plans sociaux. Il y a toujours des emplois détruits, des révoltes ouvrières. Je me suis intéressé à la vallée de la Fensch, avec la sidérurgie, et au bassin houiller lorrain. Comment les Lorrains vivent-ils cette situation ? L'insécurité de l’emploi conditionne les esprits. Je me souviens d'un type venu poser du carrelage dans ma cuisine. Il avait tout résumé en une phrase : « Y’a plus rien à espérer de l’avenir ». J’aurais pu la retrouver à pleins d'endroits. Je revois aussi ce couple, qui fait partie des huit mille Lorrains


littérature

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ayant bénéficié, à la fin des années 1990, d’un incroyable plan social accordant la retraite à 45 ans avec interdiction de travailler. Cela favorisa des déprimes incroyables, des drames de l’alcoolisme. Beaucoup de retraités des houillères, vivant avec de bonnes retraites, paient les façades de leur villa, mettent des nains dans leur jardin. Et à côté de cette ambiance surannée, on trouve des mômes qui sont perdus et se défoncent. Cela crée des frictions et fait monter le FN. Comment en est-on arrivé là? Ce sont avant tout des choix politiques. Je ne crois pas à la thèse de la mondialisation. On a un exemple très récent avec Mittal à Florange. Il était possible de sauver ces emplois. L’argent, je sais où le prendre. Les paradis fiscaux, les chambres de compensation de Clearstream ne sont pas un mythe. Il faut taxer ces gens-là. ça pourrait être un propos de comptoir s’il n’était pas étayé sur une vingtaine d’années. J’ai fréquenté des traders, écrit trois bouquins, on m’a fait soixante procès, j’ai tout gagné. Donc je sais de quoi je parle. Quel bilan tirez-vous de ce combat? C’est paradoxal : je peux les accuser de comptes mafieux sans être taxé de diffamation. Mais Clearstream est toujours là. J’ai gagné mais j’ai perdu. Ma victoire judiciaire a permis une plus grande liberté de la presse. Il fallait absolument que je gagne, j’ai refusé tout compromis. C’était une question de journalisme.

Avons nous atteint un point de non retour ? Non. Mais si on laisse faire la finance, ce sera encore pire. On est face à une impuissance totale, une situation unique depuis l’après-guerre. Les incertitudes sont nombreuses : la montée de l’extrême droite, les mensonges des politiques, leur absolue corruption. Heureusement, il nous reste le foot. L'avenir du FC Metz (leader de Ligue 2) est-il plus radieux ? Oui ! L’équipe a retrouvé une âme. Cela prouve que les pétrodollars ne font pas tout. Il y a une véritable communion. J’y vais avec mon fils et les copains, on boit une bière. On retrouve un peu de fierté. Mais comme à chaque fois, nos bons joueurs vont être transférés. Il y a quelques années Sollac était sur le maillot, ils ont failli être champions. L’an dernier je suis allé voir des matchs contre Le Poirée-sur-Vie ou Luzenac. En même temps je trouve un charme à ce genre de soirée dépressive. Je préfère ça au PSG.

À lire / Vue imprenable sur la folie du monde, (Les Arènes, 281 p., 21€)


chroniques

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FELIX DENK, SVEN VON THÜLEN Der Klang der Familie (Allia) Pour beaucoup, Berlin rime avec techno, clubs légendaires et underground des plus vivaces. À juste titre. Et c’est précisément la genèse du mythe que donne à entendre cet ouvrage choral. Fruit de centaines d’heures d’entretiens ici agencés en grands thèmes (façon Please Kill Me, 1997), voici le récit frénétique de la rencontre d’une musique et d’une ville, conté par les Djs, organisateurs ou simples anonymes. On comprend que la ville entretenait déjà avec la musique des liaisons dangereuses : Bowie et Iggy en tête, puis la déflagration punk, Einstürzende Neubauten et des cohortes de défricheurs convertis à une certaine éthique du Do It Yourself. Le terreau idéal pour une culture neuve, la techno, qui attirera les éléments les plus curieux des différentes sous-cultures locales : punks, hooligans, gays, breakdancers, etc. Au fil des témoignages de Jeff Mills ou Westbam, des descriptions du Tacheless, du Köpie ou du Tresor, s'installe une impression tenace : rarement l’émergence d’un son n’aura aussi bien accompagné une nouvelle ère - la devançant, même : finalement, la réunification semble d’abord avoir eu lieu dans les clubs pour trouver ensuite son prolongement institutionnel. 400 p., 25€. Sylvain Coatleven

KERRY HUDSON Tony Hogan m’a payé un ice-cream soda avant de me piquer maman (Philippe Rey) Avec ce premier roman un brin autobiographique, nous voilà plongés dans une Ecosse poisseuse à suivre les tribulations de la jeune narratrice, Janie Ryan. Trimballée par sa mère de tristes centres d’accueil en cités HLM miteuses, elle nous conte, à travers ses yeux d’enfant, une vie de misère entre drogue, alcool et violences conjugales. Bref, rien de neuf sous le soleil britannique, me direz-vous ? Certes ! Mais ce récit, sombre et drôle à la fois, dépeint des relations mère-fille entre tumulte et tendresse et nous emporte fiévreusement sur les traces de Janie. Cette jeune fille frondeuse finira-t-elle ravagée par les coups du sort comme sa mère ou parviendra-t-elle à contrarier le destin ? 299 p., 19€. Sandrine Allanic


livres OLIVIER TEXIER Marv Et Jonny (Les Requins Marteaux) « Bon sang mais c’est atroce comme cette bande dessinée est bâclée ! On dirait que ce gars-là dessine dans le bus en allant au boulot ». Nous voilà avertis et ce, par l’auteur lui-même. Marv Et Jonny, ou l’amitié virile entre un poulet plutôt joueur et un loubard obsédé par la baston. Ces deux compères pourraient mener une vie tranquille à glander si une association de malfaiteurs composée, entre autres, d’un professeur fou, d’un diable en forme de saucisse, d’un baron Von Nazi ou d’un gang de justicières à moitié à poil ne voulaient en découdre avec eux. Bref, une série de courtes histoires où se mêlent castagne, sexe, drogues et inepties qu’il est plus savoureux de butiner les soirs où, après une journée de boulot harassante, on a envie de se défouler. 104p, 13€. S. Allanic

Henry Miller Crazy Cock (Belfond Vintage) Resté inédit jusqu'en 1991, date de sa première publication chez Belfond, Crazy Cock fut rédigé entre 1927 et 1931 sous le titre Lovely Lesbians. Il s'agit du premier roman d'autofiction d'Henry Miller, dont la plupart des ouvrages (Tropique du Cancer, 1934) se heurtèrent au puritanisme américain. Greenwich Village, dans les années 1920. Tony Bring, écrivain bourgeois est marié à Hildrid, serveuse bohème et frivole. Lorsque Vanya, jeune peintre et poète (inspirée de Jean Kronski), invitée par Hildrid, pénètre dans la vie du couple et s'installe dans leur appartement de Brooklyn Heights, la cohabitation devient sulfureuse et douloureuse. Entre désir et désespoir, déchirements et réconciliations, le triangle amoureux se consume, par les trois bouts. 324p., 18€. Elsa Fortant

PATRICK VARETZ Premier Mille (POL) Ce 3e recueil de Varetz confirme l'attachement de l'éditeur à l'auteur et à son œuvre. Car Premier Mille constitue, avec les deux romans précédents, un ensemble cauchemardesque et sauvage. Un monstre textuel se déplaçant en fines colonnes de vers courts. Un corps de texte doté de nombreuses bouches – ou plaies - où s'engouffrer. Un nombre ouvre chaque poème. Un titre le finalise, apportant un autre éclairage. L'index achève l’œuvre en la recommençant, comme autant de nouvelles entrées : thèmes, personnages, amis, pays, auteurs... Au cœur de l'écriture, on trouve les parents du narrateur, couple effroyable, sorte « d'êtres pèresmères » comme dirait Evelyne Grossman à propos de l’œuvre d'Antonin Artaud. Ici, Patrick Varetz signe son Ombilic Des Limbes. 528p., 29€. François Annycke


chroniques

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A Tribute To Dance Mania (BNR/La Baleine)

Hardcore Traxx : Dance Mania Records 1986-1997 (Strut Records/La Baleine) Trax Records et DJ International seront à jamais associés à la house de Chicago. Néanmoins, un autre label a sérieusement remué les corps et traversé les genres – du disco à la ghetto house : Dance Mania (1986-1999). S'y sont bousculés Robert Armani, Parris Mitchell ou Gary Jackmaster, entre autres. Quinze ans après, Boys Noize lui rend hommage. Pour cela, Alex Ridha rassemble une figure de la ghetto house, DJ Funk, et ses dignes héritiers, DJ Feadz ou SCNTST en tête (100% BNR). L'écurie offre des inédits respectueux de l'esprit Dance Mania, comme Double Staxxx ou Whistle Jack. Rien de nouveau sous le smiley jaune, mais toujours autant d'extase. Mieux : les archéologues de Strut Records fêtent la réactivation du label de Jesse Saunders en choisissant 24 références publiées entre 1986 et 1997. Une sélection drastique mais impeccable. En vrac : 7 Ways (1986), signé Hercules, le mythique Ambulance (1995) et Feel My M.F Bass (1994) du non moins connu Paul Johnson... On regrette d'autant plus l'absence de Lil Louis, pour ne citer que lui. En tout cas, ça fleure bon la sueur. La house music est morte, vive la house music. E. Fortant

ANDREAS DORAU Aus Der Bibliotheque(Bureau B/La Baleine) Le plus vieil adolescent de Hambourg vient de découvrir la 6G : une concentration de données tangibles, disponibles, et librement transportables. Cela s’appelle la bibliothèque municipale. Où le pionnier de la Neue Deustche Welle renoue avec la discipline, mais aussi le dilettantisme et la naïveté qui fondent le gai savoir - et les meilleures chansons pop. L’ascèse a payé : Dorau ressuscite treize fois la désarmante simplicité et la grâce un peu gauche de son premier succès, l’étrange et entêtant Fred Vom Jupiter (1981). On voit bien – presque trop bien – comment un pareil disque se danse : les bras le long du corps, en se balançant maladroitement d’une jambe trop raide sur l’autre. Ce qu’on voit moins bien, c’est comment on pourrait s’en empêcher. F-X Beague


disques MOONFACE

KEVIN MORBY

Julia With Blue Jeans On (Jagjaguwar/PIAS)

Woods (Woodsist/ Konkurrent)

Après la séparation de Wolf Parade et l'arrêt de Sunset Rubdown, le prolifique Spencer Krug, désormais installé en Finlande, poursuit sa route avec un quatrième album sous le pseudonyme de Moonface. Dans une formule minimale piano / voix, fortement marqué par Erik Satie ou Philip Glass, le Canadien livre un recueil de ballades poignantes. Touches d'ivoire et chant inspiré se répondent et s’entremêlent pour former une danse hypnotique, toute en mélodies et crescendos. Une production sans artifices au service de la mélodie et des textes. Les mots de Spencer Krug nous invitent ici dans l’intimité de l’artiste, tout en abordant des thèmes aussi universels que l’amour, le doute ou la compassion. Un véritable bijou pour les longues soirées d’hiver. Marine Duquesnoy

Bassiste des Woods, moitié des Babies, et désormais en solo, donc. Sans même sous-traiter en Asie, Kevin Morby écrit au kilomètre des chansons alanguies (Wilds Side), au mieux empreintes d'un enthousiasme contenu (Miles, Miles, Miles). D'une voix mélancolique, lézardant sous le soleil californien, son nouveau lieu de résidence, l'ex-New-Yorkais engage le long de Harlem River une ôde à sa ville d'origine. Outre le thème de l'amour à distance, on reconnaît cette même honnêteté que chez Cass McCombs à ne pas rendre cool l'échec, le regret, l'amertume, ne rêvant à peine d'une rédemption que seul le Phénix (ou Kenny Powers) pourrait bien obtenir. Attendre d'avoir quelque chose à dire pour in fine mûrir son propos est toujours une très bonne idée ! Florian Koldyka

ACID ARAB Collections (Versatile Records) Acid Arab est un projet récent, mené tambour(s) battant(s) par Guido Minisky et Hervé Carvalho, résidents du club parisien Chez Moune. Collections s'impose comme un monument du métissage culturel. Patchwork savant d'électro, d'acid-house et de musiques orientales traditionnelles, voici une excursion dans les méandres d'un croissant plus fertile que jamais. Les deux Français mettent le muezzin aux platines et invitent des amis (Pilooski, Zombie Zombie, Omar Souleyman...). À l'écoute, un son à la fois chirurgical et complètement débridé. Une histoire dont l'interprétation est libre : le cœur brûlant d'un mariage au Maghreb, comme en témoigne le clip de Berberian Wedding ? Reste avant tout une intense célébration de la culture orientale, esthétiquement irréprochable. Alexis Floret


agenda

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concerts Ven 03.01 Popof + Timid Boy + P. Watson Lille, Le Magazine, 23h, 10e

Sam 04.01 Grease Bruxelles, Forest National, 15h, 20h, 88>33$, suppl. we 5$

BFG Trio "Bex / Ferris / Goubert" Dunkerque, Jazz Club / Pole Marine, 20h45, 15/10/7e

Ven 10.01 Bettens Lille, Le Splendid, 20h, 33,5/30,2e

G.T. Moore et The Lost Ark Band + Pura Vida Dixmude, 4AD, 20h30, 12/10/8e

Carla Bruni Lille, Théâtre de l'Hôtel-Casino Barrière, 20h, 46/43/40/37e

4 years Feestgedruis, 1001 nights: Radio Slave… Bruxelles, Fuse, 23h, 15/10e

Swann Arras, Théâtre d'Arras, 20h, 8e

Dim 05.01 Concert du nouvel an viennois: Thomas Blondelle et Brussels Philharmonic Bruges, Concertgebouw, 15h, 60/48/38/28e

ONL : Bartok et R. Strauss Calais, Le Grand Théâtre, 20h30, 12/7/4e BFG Trio "Bex / Ferris / Goubert" Dunkerque, Jazz Club / Pole Marine, 20h45, 15/10/7e

piano à quatre mains Armentières, Le Vivat, 17h, 19/14/7e Papaye Lille, La Péniche, 18h, 10/9/8e

Lun 13.01 Christian Zacharias Bruxelles, Beursschouwburg, 20h, 34/24e

Mar 14.01 DjanGo-on, concert d'ouverture des 20 ans de Djangofollies Bruxelles, Bozar, 20h, 16e Future Islands Bruxelles, Beursschouwburg, 20h30, 12/10e Sanseverino Amiens, Maison de la Culture d'Amiens, 20h30, 15 à 36 e

ONB: Concert de Nouvel An Bruxelles, Bozar, 15h, 40/32/20/10e

motor city drum ensemble + Horse Meat Disco... Bruxelles, Libertine Supersport, 22h30, 13/8e

Mar 07.01

Sam 11.01

Mer 15.01

Juliana Steinbach Charleroi, Palais des Beaux-Arts de Charleroi, 12h30, 6/5e

Iced Earth Anvers, Trix, 19h, 26/24e

Ictus Strings Lille, Opéra, 18h, 9/5e

Lamb Of God + Decapitated Bruxelles, Ancienne Belgique, 20h, 28e

Daan Hasselt, Cultuurcentrum, 20h, 28/26e

Vox Luminis Bruges, Concertgebouw, 20h, 21e

Lonely The Brave Lille, La Péniche, 20h, Gratuit

BFG Trio "Bex / Ferris / Goubert" Dunkerque, Jazz Club / Pole Marine, 20h45, 15/10/7e

Jeu 16.01

Rock'n'roll Nightclub Bruxelles, Madame Moustache, 22h, Gratuit

Mer 08.01 Frappée, Pincée ! Jazz et Musique Baroque Lille, Opéra, 18h, 9/5e Boeuf Jazz Lille, Le Biplan, 22h, Gratuit

Jeu 09.01 Concert flash: Hindemith, Sonate pour alto et piano n°4 / Mozart, Quintette pour cordes, K.515 Lille, Nouveau Siècle, 12h30, 8/5e

Wankelmut + Fred Hush Lille, Le Magazine, 23h, 10e

Dim 12.01 Zef Calais, Centre Culturel Gérard Philipe, 16h, 12e Anne Wischik et Emmanuelle Maggesi :

Folk Session Lille, Le Biplan, 21h30, Gratuit

Babyshambles Bruxelles, Ancienne Belgique, 20h, Complet ! Orchestre Philharmonique Royal de Liège Bruxelles, Bozar, 20h, 40/32/20/10e Reverend Zack and the blues preachers Péruwelz, Arrêt 59, Foyer culturel de Peruwelz, 20h, 7/5e/art27


Retrouvez l’intégralité des concerts sur

Solistenensemble Kaleidoskop Bruges, Concertgebouw, 20h, 21e Pete Swanson Gand, Vooruit, 20h30, 15/12e

Ven 17.01 Daan Louvain, 30 CC, 20h, 30>15e Zeus! + Meteor + Mambo… Bruxelles, Magasin 4, 20h, nc Éric Legnini et Vincent Ségal, Hugh Coltman, Mamani Keita Douai, L'Hippodrome, 20h, 20/16/12/10/9e Goran Bregovic "Champagne for Gypsies tour" Béthune, Théâtre de Béthune, 20h30, 36/32e Ivan Paduart Trio Woluwe St-Pierre, W:Halll, 20h30, 15/13/10e Sons Of Disaster Bruxelles, Beursschouwburg, 21h, Gratuit Kevin Saunderson Charleroi, Rockerill, 22h, Gratuit Poncharello Lille, Le Biplan, 22h, 6e

Sam 18.01 Bal : TangoCello, des violoncelles et du Tango Tourcoing, maison Folie Hospice d'Havré, 16h, Gratuit LE CUIRASSÉ POTEMKINE Lille, Nouveau Siècle, 18h30, 45>5e Cheveu + Zeus ! Dunkerque, Les 4 Ecluses, 19h, 5e/ Gratuit abonnés 4x4 Defeater, Caspian, Landscapes, Goodtime Boys Anvers, Trix, 19h30, 17/14e

www.lm-magazine.com

Fuel Fandango Bruxelles, VK*, 19h30, 13/10e Bal Ah Bon? : F/LOR + You Man + DJ Afrojaws Lille, La Péniche, 20h, 9>4e

Mar 21.01 OAK TREE TRIO Lille, La Malterie, 20h30, Gratuit

METAPUCHKA + MOUCHE JONAZ DANS LA BALEINE Lille, La Malterie, 20h, 6e

Jam Session Dunkerque, Jazz Club / Pole Marine, 20h45, Gratuit

Son Lux Bruxelles, Ancienne Belgique, 20h, 15e

Rock'n'roll Nightclub Bruxelles, Madame Moustache, 22h, Gratuit

BB Brunes Caudry, Théâtre de Caudry, 20h30, 29/16e

Mer 22.01

Inwolves + Jan Swerts Dixmude, 4AD, 20h30, 11/9/7e Jules et le vilain orchestra Liévin, Centre Culturel Arc-EnCiel, 20h30, 13/11/8e LG Jazz Collective Mouscron, Centre Culturel Marius Staquet, 20h30, 12/10/8e La Rumeur + Scred Connexion + Pression i Oignies, Le Métaphone, 20h30, 13/10e

Concert flash: Mozart, Une Petite Musique de nuit / Chostakovitch (Barshaï), Symphonie de chambre Lille, Nouveau Siècle, 12h30, 8/5e Cancionero Argentino Lille, Opéra, 18h, 9/5e Fun Lovin' Criminals Anvers, Trix, 19h30, 26/23e Surnatural Orchestra Arras, Théâtre d'Arras, 20h, 20/16/12/10/9e UKANDANZ + BLIND TEST Lille, L'Aéronef, 20h, 11e/ Gratuit abonnés

Dim 19.01

Jeu 23.01

Musique au bistrot : The Witches Calais, Le Channel, 17h, Gratuit

AERO(POINT)BAR : THE OPEN MIC SESSIONS PAR LA CIE A FEU DOUX Lille, L'Aéronef, 19h, Gratuit

Thomas Grimmonprez Trio Villeneuve d'Ascq, La Ferme d'en Haut, 17h, 7/4e Anaïs + Paper Fox Dunkerque, Les 4 Ecluses, 18h, 12/9e Abonnés 4x4 Duo Point Zéro Boulogne sur Mer, Carré-Sam, 20h30, 8/6/5e

The Feather + Colt Silvers Roubaix, La Cave aux Poètes, 19h, 8/6e Traams Bruxelles, Botanique/Rotonde, 19h30, 14/11/8e

Lun 20.01

Weekend d'ouverture : Joy Wellboy + Nhar + Rick Shiver Mons, Alhambra, 19h30, 10e

Jonwayne Bruxelles, Ancienne Belgique, 20h, 15e

Babylon Circus Bruxelles, Ancienne Belgique, 20h, 24e


agenda

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concerts David Laisné Trio Valenciennes, Le Phénix, 20h, 16/14/13/9e

"Kind Of Pink" - Philippe Laloy Trio Lille, La Péniche, 20h30, 12/8e

Dead Hippies Lille, La Péniche, 20h, 12/11/10e

An Pierlé + Juliane Chleide Arlon, L'Entrepôt, 20h30, 25/23e

Gabriel Rios Louvain, 30 CC, 20h, 28/27/24/22/16/14e

Arno Namur, Théâtre Royal de Namur, 20h30, nc

Rocio Marquez Feignies, Espace Gérard Philipe, 20h, 11/8e

Ciné-Concert Georges Méliès Louvroil, Espace Culturel Casadesus, 20h30, 7/5e

Wende Bruxelles, Ancienne Belgique, 20h, 15e Barber Shop Quartet Boulogne sur Mer, Carré-Sam, 20h30, 8/6/5e Yoann Bellefont + Josselin Arhiman + Peter Orins Lille, La Malterie, 20h30, 7/5e

Ven 24.01 Madensuyu Anvers, Trix, 19h30, 15/12e Weekend d'ouverture : The Tangerines + Naïve New Beaters + Bernard Dobbeleer Mons, Alhambra, 19h30, 10e Carrefour des orchestres (I) Lille, Nouveau Siècle, 20h, 45>5e Diminuita Charleroi, Eden, 20h, 12/10/8e Ensiferum Lille, Le Splendid, 20h, 22/19e Les Inouïs du Printemps de Bourges :Persian Rabbit + Tony Melvil + Vertigo + The Betrayer's Judgement Lille, L'Aéronef, 20h, Gratuit Matt Bianco Bruges, Cultuurcentrum Bruges, 20h, 32/28/21/14e ONB Bruxelles, Bozar, 20h, 40/32/20/10e

Déportivo + Périf Beauvais, L'Ouvre-Boîte, 20h30, 16/14/11e

Hazard + Huxley + Jackson & His Computer Band + Jeff Mills + Kavinsky + Klangkarussell + Laurent Garnier + Martin Garrix + Moodprint + Party Harders... Liège, Halles des Foires, 18h, 45/37e Son Lux Tourcoing, Le Grand Mix, 19h, 12e / Gratuit abonnés D6bels On Stage Louvain, Ferme du Biéreau, 19h30, 3e

Sweety Doo Dunkerque, Jazz Club / Pole Marine, 20h45, 15/10/7e

Weekend d'ouverture: Souldust + Felix Cage + Rodriguez Jr Mons, Alhambra, 19h30, 10e

Vincha Béthune, Le Poche, 20h45, 7/5/4/3e

Madensuyu Charleroi, Eden, 20h, 15/12/10e

Babylon Circus Boulogne sur Mer, Espace de la Faïencerie, 21h, 8/6.5e

Montevideo Bruxelles, Ancienne Belgique, 20h, 19e

Black Bug + Barako Bahamas + TBA Charleroi, Rockerill, 22h, nc

My Diligence + Billy Joe Bruxelles, Madame Moustache, 20h, 5e

Wille And The Bandits Lille, Le Biplan, 22h, 7e

Thy Art Is Murder Bruxelles, Ancienne Belgique, 20h, 15e

Nuages#3 avec fLako + Everydayz + Wesh Sound System... Roubaix, La Cave aux Poètes, 23h, 12/10/8e

Sam 25.01 Goûter concert de Griefjoy Dunkerque, Les 4 Ecluses, 16h, Gratuit pour les enfants Les TransArdentes : Andy C + Ben Pearce + Blonde + Camo et Krooked + Dope D.O.D + Dr Lektroluv + DubTimus Sound System + Duke Dumont + Dusky + Folie Douce + Francesco Rossi + Fred V et Grafix +

Griefjoy + Colours In The Street Dunkerque, Les 4 Ecluses, 20h30, 8/5e abonnés 4x4 Les Inouïs du Printemps de Bourges : Ellis Bell + Rapsodie + Weekend Affair + Bison Bisou Oignies, Le Métaphone, 20h30, Gratuit Nine Below Zero Liévin, Centre Culturel Arc-EnCiel, 20h30, 20/18/15e Jeremiah Cymerman Charleroi, Le Vecteur, 21h, 5e Obszon Geschoph + Cumshot + The Witch Lille, Le Biplan, 22h, 5e


Retrouvez l’intégralité des concerts sur

Dim 26.01 The Sound Of The Belgian Underground 2014 Bruxelles, Ancienne Belgique, 16h, 13e

www.lm-magazine.com

Monsigny, 20h, 21/16/15e Patrice Lille, L'Aéronef, 20h, 28,60e

Cats On Trees + Cassandre Lille, L'Aéronef, 20h, 16/11/8e

Poliça Bruxelles, Ancienne Belgique, 20h, 23e

Customs Bruxelles, Ancienne Belgique, 20h, 19e

Christophe Astolfi Duo La Louvière, CCRC, 20h, 13/10e

The Glenn Miller Memorial Orchestra Béthune, Théâtre de Béthune, 20h, 36,80/27,80e

Saule Charleroi, Eden, 20h, 22/20/18e

Lun 27.01

Jeu 30.01

Giocare la musica Mons, Le Manège, 13h30, 4/2,5e

Pop. 1280 + Falling Man Bruxelles, Magasin 4, 19h, 8e

Thomas Fersen Lille, Théâtre Sebastopol, 20h, 36,30/30,80e

Shadow Motel Lille, La Péniche, 18h, 7/6/5e

Mar 28.01 Giocare la musica Mons, Le Manège, 18h, 4/2,5e Adam Green Acoustic Concert Bruxelles, Botanique/Rotonde, 19h30, 17/14/11e D6bels On Stage Louvain, Ferme du Biéreau, 19h30, 3e La petite renarde rusée Lille, Opéra, 20h, 67/47/29/12/5e Sturm und Drang / Les Agrémens Charleroi, Palais des Beaux-Arts de Charleroi, 20h, 15/12e Ensemble 21 Bruxelles, Halles de Schaerbeek, 20h30, 18/16/10e Rock'n'roll Nightclub Bruxelles, Madame Moustache, 22h, Gratuit

Mer 29.01 Le jardin de roses Lille, Opéra, 18h, 9/5e Ahmad Jamal Bruxelles, Bozar, 20h, 40/32/25/15e Maxime Le Forestier Boulogne sur Mer, Le Théâtre

The Doors Alive Lille, Le Splendid, 20h, 30e

Connan Mockassin Bruxelles, Ancienne Belgique, 20h, 19e

Grand Corps Malade + Furieux Ferdinand Oignies, Le Métaphone, 20h30, 16/13e

La Yegros + Jorge Silva et Bagasso Beauvais, L'Ouvre-Boîte, 20h, 14/12/9e

Gérald de Palmas Lille, Théâtre de l'HôtelCasino Barrière, 20h30, 42/39/36/33e

La petite renarde rusée Lille, Opéra, 20h, 67/47/29/12/5e

Melanie De Biasio Louvain, Ferme du Biéreau, 20h30, 17/15/12e

The Glenn Miller Memorial Orchestra Lille, Théâtre Sebastopol, 20h, 40,80/27,80e

Mugstar + Monomyth Dixmude, 4AD, 20h30, 10/8/6e

Cold Cave Bruxelles, Beursschouwburg, 20h30, 12/10e Les 100 Violons Tziganes de Budapest Saint-Amand-les-Eaux, Le Pasino de Saint-Amand-lesEaux, 20h30, 42e Francesco Bearzatti Tinissima Quartet Dunkerque, Jazz Club / Pole Marine, 20h45, 15/10/7e Elfa Rún Kristinsdóttir Bruges, Concertgebouw, 22h30, 15e

Ven 31.01 Carte blanche à Maxime Pascal Lille, Nouveau Siècle, 20h, 45>5e

Tony Melvil Bruay-La-Buissière, Le Temple, 20h30, 8/5/3e Tremplin Golden Jazz en Nord Lomme, maison Folie Beaulieu, 20h30, 8e Gabby Young & Other Animals Béthune, Le Poche, 20h45, 7/5/4/3e Francesco Bearzatti Tinissima Quartet "Monk'n Roll" Dunkerque, Jazz Club / Pole Marine, 20h45, 15/10/7e Rodolphe Burger Amiens, Maison de la Culture, 21h, 10 à 21e Megaphone Tour : Vincha + Jerem + Anastasia Lille, Le Biplan, 22h, 6e


Family stuff © Qingjun Huang

le mot de la fin

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Qingjun Huang - En 2003, le photographe Qingjun Huang débutait la série Family Stuff. Le principe ? Immortaliser 35 familles devant leur maison, entourées de tous leurs biens. « Les objets domestiques en disent long sur le niveau de vie réel des Chinois malgré la modernisation frénétique du pays », explique-t-il. à visiter / www.huangqingjun.com


JEU 30 ET VEN 31 JANVIER 2014 | 20H30 LE COLISÉE-THÉÂTRE DE ROUBAIX

RENSEIGNEMENTS ET ACHATS DE PLACES +33 (0)3 20 24 66 66 - WWW.CCN-ROUBAIX.COM

Conception graphique : Agence Simone I Photo : Antoine Tempé

UNE CRÉATION D’OLIVIER DUBOIS



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