LM magazine 204_fevrier 2025

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N°204 / FÉVRIER 2025 / GRATUIT A

NEWS

– 06

Du tatouage, des fils de laine, un amour de Coccinelle et des brins d’acier !

SOCIÉTÉ

– 08

FRANÇOIS PROST Façades nuptiales

AURÉLIE JEAN

L’amour à la machine

STYLE

MARIE DARCQ

- 18

Le kitsch, c’est chic

PORTFOLIO

– 22

CLEMENS MAURER

L’imagination au pouvoir

MUSIQUE

– 32

Mustang vs Aline, Les Amazones d’Afrique, Bon Enfant, Et si l’amour c’était aimer ?, Winter Jazz Festival, Clara Ysé, Erol Alkan, Kruder & Dorfmeister, Thee Sacred Souls, Hinds, Lambrini Girls, Miossec, Rameau, Mozart et Schubert, Meute, Michael Kiwanuka, Franz Ferdinand

DISQUES

– 52

Jeshi, Frànçois and The Atlas Mountains, Sharon Van Etten & The Attachment Theory, Jean-Claude Vannier, Cassius

LIVRES

– 54

Les Veilleurs, Anatomie d’un commissariat, Écrits sur le cinéma, Mon ami Kim Jong-un, Après

ÉCRANS

– 56

Julie se tait, La Mer au loin, La Vie en gros, Maria, Hola Frida

EXPOSITION

– 62

PhotoBrussels Festival, Arlene Gottfried, Daniel Turner, Animalis Machina, Cococh Industry, Agenda

THÉÂTRE & DANSE –

76

En Vogue, Theatre of Dreams, Rue des Italiens, Qu’est-ce qu’on fabrique en famille ?, Il était un fois au Prato, Cabaret de curiosités, Bestiaire, Le Barbier de Séville, R.onde.s, Tonton Mimil dans son jaden, Lévitation, Agenda

LE MOT DE LA FIN –

98

LAITINEN Nature vivante

MAGAZINE

Direction de la publication

Rédaction en chef

Nicolas Pattou nicolas.pattou@lastrolab.com

Rédaction

Julien Damien redaction@lm-magazine.com

Bathilde Fleuret info@lm-magazine.com

Publicité pub@lm-magazine.com

LM magazine – France & Belgique

28 rue François de Badts

59110 La Madeleine - Ftél : +33 (0)3 62 64 80 09

Direction artistique

Graphisme

Cécile Fauré cecile.faure@lastrolab.com

Couverture

Clemens Maurer, Shark ck-maurer.com c @ai_made_me_do_this

Administration

Laurent Desplat laurent.desplat@lastrolab.com

Réseaux sociaux

Sophie Desplat

Cécile Fauré

Impression

Tanghe Printing (Comines)

Diffusion C*RED (France / Belgique) ; BHS.media (Bruxelles / Hainaut)

Ont collaboré à ce numéro : Selina Aït Karroum, Thibaut Allemand, Rémi Boiteux, Grégory Marouzé, Clemens Maurer, Raphaël Nieuwjaer et plus si affinités.

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PLAYLIST LM La bande son de la rédaction

LM magazine France & Belgique est édité par la Sarl L’astrolab* - info@lastrolab.com L’astrolab* Sarl au capital de 5 000 euros - RCS Lille 538 422 973 Dépôt légal à parution - ISSN : en cours

L’éditeur décline toute responsabilité quant aux visuels, photos, libellé des annonces, fournis par ses annonceurs, omissions ou erreurs figurant dans cette publication. Tous droits d’auteur réservés pour tous pays. Toute reproduction, même partielle, par quelque procédé que ce soit, ainsi que l’enregistrement d’informations par système de traitement de données à des fins professionnelles, sont interdites et donnent lieu à des sanctions pénales.

LM magazine est imprimé sur du papier certifié PEFC. Cette certification assure la chaîne de traçabilité de l’origine du papier et garantit qu'il provient de forêts gérées durablement.

Ne pas jeter sur la voie publique.

Papier issu de forêts gérées durablement

International Lille Tattoo Convention

BIEN AIGUILLÉ

Marquer un événement important de sa vie, affirmer son identité, ses goûts ou simplement s’embellir. Les raisons de se faire tatouer sont nombreuses... en tout cas plus que celles de rater cette date. Pour son 10 e anniversaire, l’International Lille Tattoo Convention met les petits plats dans les grands, conviant quelque 500 artistes venus de toute la planète. Des œuvres géométriques de l’Italien Tiziano Carbone au dotwork du Sud-Coréen Mr Light Kim, en passant par le style asiatique des Parisiens de Tiasma Tatouages, il y en a pour toutes les peaux. Édition spéciale oblige, ce rendez-vous célèbre les origines du tatouage avec un spectacle de danse polynésienne, et fait aussi la part belle au hip-hop, en inaugurant un Rap contest. Ce tremplin dédié aux nouveaux virtuoses du "mic" promet son lot de surprises, et lance idéalement le DJ set d’un certain Cut Killer... Immanquable, on vous dit ! Lille, 07 > 09.02, Lille Grand Palais, ven : 14h • sam & dim : 11h, 1 jour : 16 > 11€ • 3 jours : 36€ (gratuit -12 ans), lille-tattoo-convention.com

© Peji Photographie

FIL CONDUCTEUR

Chiharu Shiota tisse sa toile au Grand Palais. Depuis les années 1990, cette artiste japonaise crée de monumentales œuvres immersives en entrelaçant des kilomètres de fils de laine - souvent rouge, noire ou blanche. La native d’Osaka invite ainsi le visiteur à se perdre (ou se connecter) dans un réseau puissamment graphique. À Paris, cette exposition dévoile sept installations, mais aussi des photographies, dessins, sculptures ou vidéos. Pour sûr, on y fera un crochet.

Paris, jusqu’au 19.03, Grand Palais, mar > dim : 10h-19h30 • ven : 22h, 14/11€ (gratuit - 18 ans), grandpalais.fr

UN AMOUR DE COCCINELLE

C’est vrai, la voiture n’a plus le vent en poupe, mais certaines conservent une place à part au fond de notre petit cœur de baroudeur - même si celle-ci a vu le jour à la demande d’Hitler, c’est dire ! À Bruxelles, la Love Bugs Parade célèbre la fameuse Coccinelle de Volkswagen. Pour cette 16 e édition, environ 300 modèles sont attendus devant Autoworld, le 16 février, avant une balade d’une heure dans les environs. Une bonne raison de louper la Saint-Valentin.

Bruxelles, 16.02, Esplanade du Cinquantenaire, 10h, gratuit, autoworld.be

Chiharu Shiota, Uncertain Journey, 2016/2024 © GrandPalaisRmn / Photo Didier Plowy © Adagp, Paris, 2024 and the artist

Hotel Flower Style, Kashiba (préfecture de Nara), 2023

Love Hotel

VERTIGE DE L’AMOUR

Texte : Julien Damien

Il s’est intéressé aux façades des discothèques de la France périurbaine, puis à celles des gun shops et strip clubs américains. Pour ce nouveau projet, François Prost a parcouru le Japon, en quête des love hotels les plus extravagants. En immortalisant ces architectures kitsch et chamarrées, ce photographe baroudeur souhaite dresser, dit-il, « un portrait vernaculaire des bords de route du pays nippon, loin des clichés habituels  ». On le croit volontiers !

Photo © François Prost

Difficile de les louper, même au cœur de cette jungle urbaine. Aussi hétéroclites qu’exubérantes, ces architectures détonnent dans le paysage japonais. Ici un château comme sorti d’un conte de fées, là une soucoupe volante posée entre deux immeubles, une maison parsemée de friandises façon Hansel et Gretel, une gigantesque baleine échouée au coin de la rue ou encore... un paquebot sur lequel se dresse un tyrannosaure ! Pour sûr, les love hotels savent se faire

remarquer. « Oui, ils doivent se distinguer car ils sont très nombreux, parfois concentrés dans le même quartier, souligne François Prost. On en trouve partout, dans les centres-villes comme en périphérie ou dans les zones plus rurales ».

En toute intimité. Nés au début du xxe siècle (on les appelait alors "les chambres à 1 yen"), ces lieux se sont développés dans l’archipel à la fin des années 1960, sous le nom de "rabuhos" (ou "love

L’Hôtel Castle, à Oamishirasato (préfecture de Chiba), 2023

hotels" donc). Désormais, on estime à près de 40 000 le nombre de ces établissements dédiés à l’amour et à l’esthétique indéniablement sucrée, évoquant des parcs d’attractions. « Quelque part, il s’agit aussi de rassurer les jeunes gens avec des codes visuels enfantins, "fun"  ». En effet, ces endroits propres à la culture nippone sont devenus incontournables pour les couples (de tous âges) en quête d’intimité, pour quelques heures ou une nuit.

«  Les Japonais sont plutôt prudes et les rapports amoureux pas toujours bien vécus au sein du foyer familial, souvent de petite taille », explique le photographe français, qui ne pouvait être que charmé par tant de débordements créatifs...

Derrière la façade. Révélé il y a une dizaine d’années avec la série After Party, à travers laquelle il immortalisait les dancings de la France des campagnes, l’ancien graphiste fut tout aussi subjugué par ce drôle de patrimoine,

Le Festa Qugiella, à Okayama, 2023

à la fois kitsch et pop. En 2023, il s’est lancé dans un road trip de trois semaines, parcourant en voiture quelque 3 000 kilomètres à travers le pays du soleil levant, à la recherche de sites farfelus, de Tokyo à Kobe, en passant par Nagoya ou Osaka. Sa méthode n’a pas changé : le cliché est pris à bonne distance, suivant le même cadrage et en plein jour « pour faire jaillir les couleurs », mais sans jamais entrer dans ces hôtels. François Prost s’intéresse essentiellement aux devantures des

À lire / Love Hotel, de François Prost (Fisheye Éditions), 40€ L’Hôtel Cue Sea Stork, à Machida (préfecture de Tokyo), 2023

bâtiments, selon lui plus bavardes que leurs intérieurs. « Les façades montrent ce qu’une société est prête à accepter visuellement. Elles parlent du peuple, décrivent ses influences culturelles. Les étudier relève de l’approche sémantique ». Ou comment offrir un peu plus de profondeur à la surface des choses... Julien Damien

À visiter / francoisprost.com c @francoisprost

Exposition / Paris, 15.03 > 18.05 Galerie du jour - agnès b., la-fab.com

OUT OF HOME COMMUNICATION

Urban Posting

Display Racks

Visitor Information

Cultural Spots

Hotels, Bars & Restaurants

Universities

Libraries

Bicycle parkings

Bus Stops

Indoor Posting

Banners on Street Lamps

Amusement Parks

la Condition Publique

Fevrier

01.02 / ATELIER portrait dansé & coloré

02.02 / OPEN CP

05.02 REPAIR CAFÉ

11-12-13.02 / STAGE écriture + créations sonores

14.02 / LABO148 RENCONTRE UN PRO

14.02 / CONCERT : Lacrim

15.02 / ATELIER maqueterie de papier

15.02 / CONCERT : Zamdane

18-19.02 / STAGE : mini-club journalisme

19.02 / CONCERT Caballero & JeanJass

20.02 / CONCERT : Kalash

22.02 / CONCERT : Hugo TSR

26.02 / LABO 148 RENCONTRE UN PRO

+ en continu

Sessions libres machines et Fab-lab mercredi, samedi et 1er dimanche du mois

Permanences du Labo 148 [Media Lab] mercredi - 18h00

Visites guidées du parcours d’art samedi - 15h00

Café - Bar

Mercredi + samedi 15h00 - 19h00

Aurélie Jean L’AMOUR À LA MACHINE

Ils sont désormais partout. Dans notre quotidien hyperconnecté, les algorithmes scrutent nos comportements pour anticiper nos besoins. Ils nous suggèrent des achats, des amis, des séries, nous mènent à bon port via le GPS, voire instrumentalisent nos votes... Mais quid de leur rôle dans notre vie amoureuse ? C’est à cette question que répond Aurélie Jean à travers un fascinant essai, Le Code a changé. Des applications de rencontres aux réseaux sociaux, en passant par les sextoys connectés ou les agents conversationnels, cette scientifique, entrepreneure et autrice décrypte "l’algorithmisation" des sentiments, à l’heure où près de 60 % des relations se nouent en ligne.

"Algorithmes" et "amour" ne sont-ils pas a priori antithétiques ?

L’amour n’est certainement pas une science exacte. Pour mieux l’appréhender, on peut faire appel à la sociologie, la biologie, la médecine voire aux mathématiques ! Cela étant dit, chercher à modéliser l’amour est une quête sans fin, au regard de son caractère indescriptible ou imprévisible. Par contre, grâce aux mathématiques, on peut comprendre des choses.

En quoi les algorithmes seraientils bénéfiques dans notre rapport à l’amour ?

De manière générale, ils peuvent permettre d’élargir le champ des possibles pour des individus timides ou vivant dans des endroits

avec moins d’opportunités de rencontres. Ils peuvent aussi aider les personnes qui évoluent dans un environnement familial conservateur, où elles auraient par exemple du mal à vivre leur homosexualité.

« CHERCHER À MODÉLISER L’AMOUR EST UNE QUÊTE

SANS FIN »

Inversement, en quoi sont-ils délétères ?

Ils provoquent des bulles sentimentales, à l’instar des bulles d’opinion sur les réseaux sociaux, qui nous enferment avec des recommandations étroitement liées à nos préférences apparentes. Ces bulles répondent à un modèle

Propos recueillis par Julien Damien
Photo : Aurélie Jean © Alcibiade Cohen

économique de l’attention, dont l’objectif pour les propriétaires est de vous retenir plus longtemps sur leur plateforme. On peut aussi citer le paradoxe du choix induit par des suggestions très nombreuses avec les algorithmes. Celles-ci nous empêchent finalement de choisir face à des possibilités toujours plus importantes. On passe ainsi plus de temps à chercher un partenaire qu’à le trouver. Enfin, il y a une discrimination plus forte avec ces outils.

« MOINS DE MIXITÉ

SUR CES APPLICATIONS QUE

DANS LE MONDE PHYSIQUE »

N’est-ce pas à contre-courant d’une société qui se réclame de plus en plus inclusive ?

Absolument, rappelons que les études citées dans mon livre vont toutes dans le même sens : il y a moins de mixité sur ces applications que dans le monde physique, alors qu’on imaginait que ces outils allaient casser les barrières sociales, ethniques, religieuses ou économiques...

Il y a aussi le fait de "swiper", par exemple sur Tinder, des personnes sur le seul critère de leur apparence physique...

Oui, nous adoptons des comportements avec ces applications que nous n’aurions pas dans le

monde physique. Par ailleurs, cette mécanisation des glissements de pouce à gauche ou à droite, sur la base d’une photo, d’un nom et d’une punchline, nous amène progressivement vers une sorte de déshumanisation.

Vous affirmez que si l’on concevait un algorithme en mesure de nous dénicher le ou la partenaire idéal(e), eh bien il ne faudrait pas l’utiliser. Pourquoi ? Parce que nous sommes face à un paradoxe. L’amour idéal n’existe pas dans l’absolu, car il est propre ou relatif à un moment de vie. La personne avec laquelle vous êtes aujourd’hui n’aurait peut être pas été si extraordinaire si vous l’aviez rencontrée dix ans auparavant. Aussi, les relations rompues vous ont permis de grandir, de mieux vous connaître, de savoir ce que vous voulez ou pas.

À lire / Le Code a changé. Amour & sexualité au temps des algorithmes, Aurélie Jean (Éditions de l’Observatoire), 256p., 21€ editionsobservatoire.com

À lire / La version longue de cette interview sur lm-magazine.com

Craquez pour un italien à la Saint-Valentin Offrez la C’ART

!

Le pass musées métropolitain

Santi, Raffaello, dit Raphaël, Portrait de l'artiste avec un ami, 1500 / 1525, musée du Louvre (détail). Exposition Expérience Raphaël, Palais des Beaux-Arts de Lille. © Alexandre Traisnel.

Un vrai bouillon de culture !

Marie Darcq

LE KITSCH, C’EST CHIC

Débordantes de dérision et de couleurs, les œuvres de Marie Darcq marient avec malice tradition et modernité. Pour cause, cette créatrice diplômée de l’école supérieure des métiers d’arts d’Arras transpose des figures historiques, du cinéma ou de la culture pop sur des assiettes en porcelaine délicieusement kitsch. Alors, vous reprendrez bien une pincée d’humour pour finir votre repas ?

Elles ont beau être plates, les assiettes de Marie Darcq ne manquent pas de relief ni de piquant. Seraient-elles un peu fêlées ? Certes pas, mais elles honorent quelques brutes épaisses comme Mister T., Stallone ou

Chuck Norris, «  mon chouchou », confesse l’intéressée. Née d’une envie de « créer une dichotomie entre la fragilité du support et la force du sujet », cette série se nomme C’est pas de la guimauve, et fut la toute première d’une

myriade de décalages désopilants. En sus de ces icônes viriles de l’époque bénie de la VHS (« eh oui, j’ai grandi avec la téloche des années 1980 ! »), on trouve dans le vaisselier en porcelaine de cette quadra de fameuses figures de la culture pop (Jean-Pierre Marielle, Tom Selleck aka Magnum), des psys qui "passent à table" (Freud, Lacan) et quelques affreux jojos.

« UNE DICHOTOMIE ENTRE

LA FRAGILITÉ DU SUPPORT

ET LA FORCE DU SUJET »

La série J’aime pas les régimes égratigne ainsi d’abominables dictateurs, de Pinochet à Kim Jong-un, tandis qu’Al Capone et Pablo Escobar se planquent dans une forêt de bambous, au fond d’une assiette marquée par un impact de balle, derrière l’intitulé... Un dernier pruneau pour la route ! «  En fait, je pars toujours d’un jeu de mots en rapport avec la nourriture, avant de trouver les personnages qui collent  », explique l’artiste, également décoratrice d’intérieur.

Couverts de succès

Par essence kitsch, conçues dans un four selon le procédé de sublimation (qui utilise la pression et la chaleur pour transférer les images sur le support), ses créations s’ornent aussi de fonds

fleuris, étoilés ou de cieux romantiques. Inspirés par « la ringardise des toiles de Jouy », ces décors aux couleurs flashy accentuent un truculent déphasage entre le fond et la forme. Parfois, la native de Melun agrémente ses compositions d’un petit message. C’est "le bruit et l’odeur" à côté de la bobine ahurie de Jacques Chirac (qui ne fut pas toujours sympathique) ou ce "keep the fesse" accompagnant la très rétrograde Christine Boutin, la renvoyant à l’expression anglaise "Keep the Faith" - soit "garde la foi". Si elles supportent mal les coups de fourchettes, ses assiettes accueillent volontiers desserts et parts de pizza, trouvent leur place accrochées sur un mur... et se dégustent avant tout avec les yeux.

Texte : Julien Damien / Photo © Marie Darcq À visiter / monoeilcouleur.fr c @monoeilcouleur

Clemens Maurer

L’IMAGINATION AU POUVOIR

L’intelligence artificielle, amie ou ennemie de l’art ? Si elle ne remplacera jamais la bonne vieille créativité humaine (enfin, on l’espère), elle peut s’avérer un formidable outil. C’est justement l’expérience vécue par Clemens Maurer. Né à Stuttgart, aujourd’hui installé à Berlin, ce graphiste et illustrateur indépendant (depuis un quart de siècle !) a longtemps jonglé avec les images... et rongé son frein. « Au fil des ans, j’ai accumulé un large éventail d’influences, des beaux-arts au cinéma, en passant par la haute couture et la culture pop. Ce réservoir considérable et diversifié n’attendait que l’occasion de se matérialiser. Celle-ci s’est présentée avec l’avènement de l’IA, confie-t-il. Aujourd’hui, les obstacles à la concrétisation de mes visions ont disparu, je peux enfin donner vie à mon imagination ». Et quelle imagination ! Dans son portfolio, les textures, couleurs et êtres chimériques forment un impressionnant carnaval visuel, nimbé de pop art, de surréalisme, de dadaïsme, de mode... D’émotions, aussi. Certes, l’Allemand dompte avec maestria les algorithmes, mais ses œuvres ne sont pas dénuées d’humanité, loin s’en faut. « Les visages demeurent des thèmes centraux, grâce auxquels j’explore la complexité de notre existence ». Le tout mâtiné d’une pointe de spleen, d’un brin de folie et d’un indéniable sens du décalage. En témoigne ce drôle de zigue, impeccablement kitsch avec sa coiffure surmontée de ballons de baudruche. « Oui, c’est peut-être ça "la touche Clemens" : un humour doté d’une forme de mélancolie ». Et cela, aucune machine ne pourra nous le chiper. Julien Damien

À visiter / ck-maurer.com ; c @ai_made_me_do_this

À lire / L’interview de Clemens Maurer sur lm-magazine.com

« UN HUMOUR DOTÉ D’UNE FORME DE MÉLANCOLIE »

Inès Reg

sam. 01 fév. |

Scénéo - Longuenesse ven. 09 avril |

Le Zénith - Lille sam. 10 avril |

Orrage

ven. 07 fév. |

Toto +

Le Zénith - Lille

La Bulle Café - Lille

Christopher Cross mar. 11 fév. |

Lacrim

jeu. 14 fév. |

Le Zénith - Lille DER. PLACES

La Cond. Publique - Rbx DER. PLACES

Zamdane

ven. 15 fév. |

La Cond. Publique - Rbx DER. PLACES

Simon Superlapin

ven. 15 fév. |

Lille Grand Palais - Lille sam. 16 fév. |

L'Embarcadère - Boulogne-/s-Mer

Jamais le Deuxième Soir

ven. 15 fév. |

Lille Grand Palais - Lille sam. 16 fév. | L'Embarcadère - Boulogne-/s-Mer

Caballero & Jeanjass

mer. 19 fév. |

Leo SVR

jeu. 20 fév. |

Théodort

jeu. 20 fév. |

Kalash

jeu. 20 fév. |

La Condition Publique - Roubaix

La Bulle Café - Lille

L'Aéronef - Lille DER. PLACES

La Cond. Publique - Rbx COMPLET

Hugo TSR

sam. 22 fév. |

La Cond. Publique - Rbx

Elena Nagapetyan sam. 23 fév. |

ERA

dim. 24 fév. |

Le Sébastopol - Lille

Le Zénith - Lille

Stony Stone

mer. 26 fév. |

La Bulle Café - Lille Naza

jeu. 27 fév. | Le Splendid - Lille COMPLET

Edge

ven. 28 fév. | Flow - Lille

Avatar : Le Dernier Maître de L'air

ven. 28 fév. | Le Colisée - Roubaix

Freak Kitchen

lun. 03 mars | The Black Lab - Wasquehal

Thomas Dutronc

mar. 04 mars | Théâtre Sébastopol - Lille

Meute

mar. 04 mars | Le Zénith - Lille

Sierra

mer. 05 mars | The Black Lab - Wasquehal

Lord Esperanza

mer. 05 mars |

La Bulle Café - Lille Jahneration

jeu. 06 mars | Le Splendid - Lille

Marie S'infiltre

ven. 07 mars | Le Casino - Arras

Broken Back

ven. 07 mars | Le Splendid - Lille

Halfpipe Records

ven. 07 mars | The Black Lab - Wasquehal

Stories

sam. 08 mars |

RÉSA:

agauchedelalune.tickandyou.com et dans les points de vente officiels habituels graphisme : marceau truffaut - IG @hypothese.studio

Le Zénith - Amiens sam. 19 avril | Le Splendid - Saint-Quentin jeu. 24 avril | L'Embarcadère - Boulogne-/s-Mer jeu. 08 jan. 2026 l Théâtre Sébastopol - Lille ven. 09 jan. 2026 | Théâtre Sébastopol - Lille

MustangvsAline

MUSTANG – À l’origine, trois lycéens qui s’ennuient (petit pléonasme) à Clermont-Ferrand, au cœur des années 2000. Le trio se découvre une passion commune pour le rock d’hier (Nirvana) et d’avant-hier (Elvis, Roy Orbison, The Stooges, Suicide, Hank Williams…). En résultent des morceaux étonnants et détonants, inscrits dans plusieurs traditions à la fois : rock’n’roll, chanson française, electro antédiluvienne (ce sample d’Aphex Twin). Le tout mâtiné de frustration adolescente, de mélancolie bleutée, de méchanceté amusée et assumée, entonné par le meilleur crooner d’ici. Mustang, c’est une œuvre composée de cinq albums rigoureusement indispensables, de reprises parfois surprenantes (Bashung, Brassens, Booba…). Si la critique salue chacune de ces sorties, le public n’est, hélas, pas toujours au rendez-vous (doux euphémisme). Reste que, depuis plus de quinze ans, ce groupe signe les chansons les plus personnelles, sincères et émouvantes de la scène française. L’histoire jugera.

MUSTANG

Oignies, 08.02, 9-9bis ( Les Chaufferies), 20h, 15/12€ (gratuit abonnés), 9-9bis.com Château-Thierry, 31.05, La Biscuiterie, 20h, 14 > 8€, labiscuiterie.org

© Marie Planeille

TOMBÉS POUR LA FRANCE

Ces deux formations incarnèrent les espoirs d’un renouveau du rock et de la pop en français. Douchés, les espoirs. Car hélas, sur l’échelle des ventes et de la célébrité, Mustang et Aline demeurent des petits, des sans-grade. Mais on s’en fiche un peu, non ? Leurs chansons nous accompagneront longtemps , et c’est bien le plus important. T. Allemand

ALINE – Où l’on reparle de Clermont-Ferrand. Car c’est la fameuse marque de pneumatiques qui menaça Young Michelin, formation pop ligne claire marseillaise, de procès. Dommage, car le groupe s’était fait un chouette nom avec un 45 tours très réussi, en 2009. Alors, Romain Guerret et les siens optèrent pour Aline - ça rime avec Gamine. L’époque semblait propice et ouverte à un rock et une pop en français (Mustang, La Femme, Lescop, Séverin...). Un tube confidentiel (Je bois et puis je danse), puis la parution de l’impeccable Regarde le ciel (2013), sous la houlette de l’ex-Valentins Jean-Louis Piérot (Daho, Bashung), suivi du plus sombre La Vie électrique (2015), produit par Stephen Street (Blur, The Smiths) laissaient espérer un carton massif. Que dalle. Et Aline se sépara dans l’indifférence générale… jusqu’à la parution, l’an passé, d’une compilation d’inédits parfaits, et l’annonce de quelques concerts. En attendant un nouvel album ?

© Nathalie
Genot

Voici des guerrières à la voix d’or. Créé en 2014, ce collectif de divas originaires d’Afrique de l’Ouest défend la liberté des femmes. Elles dénoncent ainsi les violences qui leur sont faites, les mariages forcés, le harcèlement, le viol ou l’excision. La musique comme un exutoire en somme... Et quelle musique ! Sur scène s’entremêlent sonorités traditionnelles et beats électroniques, échos mandingues, blues ou funk, tandis que ces Amazones chantent en bambara, moré et yoruba. Leurs morceaux entonnés le poing levé résonnent alors comme autant d’hymnes à la révolte et à la joie, emportant l’assistance dans une irrépressible envie de danser. B.F.

La Louvière, 11.02, Le Théâtre, 20h, 32 > 10€ // Bruges, 19.02, Stadsschouwburg, 20h, 26 > 9€

Enfant Les Amazones d’Afrique

Adj. inv. Qui a une gentillesse simple et naïve. Des manières bon enfant. L’expression colle à merveille à ces joyeux drilles faussement naïfs qui, derrière des intitulés béats (Ding dong, Ode aux pissenlits) déploient un savoir-faire dans l’art de la pop accrocheuse, qui chipe au glam, se pique de hard rock, chope des plans disco. Le tout servi avec un admirable sens du groove et, chose rare, faisant sonner l’accent québécois comme personne ! T.A.

Tourcoing, 12.02, Le Grand Mix, 19h, gratuit Bruxelles, 13.02, Botanique, 19h30, 20,50 > 14,50€ Liège, 14.02, Reflektor, 20h, 22,50€

© Karen Paulina Biswell
© Camille Gladu-Drouin

Et si l’amour c’était aimer ?

EN DEHORS DES CASES

Au printemps prochain, Zaï Zaï Zaï Zaï (2015) fêtera ses dix ans. Pas n’importe comment : avec une réédition enrichie d’interventions de dessinateurs et de témoignages d’artistes marqués par ce livre qui fit passer son auteur de bédéaste underground à figure incontournable du neuvième art. Or, on peut mesurer l’importance d’une œuvre à son impact, voire à la possibilité laissée pour les autres de s’en emparer. Ainsi, Les Misérables de Victor Hugo, au hasard, a donné lieu à des films, des comédies musicales, des jeux vidéo… Alors, Fabcaro, nouvel Hugo ? N’exagérons pas. Hugo dessinait très bien, mais c’était une quiche en BD, il n’entravait rien au math-rock et connaissait que dalle au cinéma. Allons, un peu de sérieux. Dessiné comme un roman-photo, Et si l’amour c’était aimer ? (2017), mariant mélo sentimental et élucubrations pleines de nonsense, est ici porté sur scène par les Rennais Christophe Le Flohic et Jonathan Siche, échappés de la formation post-rock Totorro, et par un "friend", le batteur Pierre Marolleau (Fat Supper, Fordamage). Proche du ciné-concert, le dispositif consiste en la diffusion des cases façon PowerPoint, tandis qu’est jouée en direct la bande-son, volontiers noisy. L’idée était absurde, le résultat déroute, à l’image de l’œuvre originelle. Thibaut Allemand Oignies, 14.02, Le Métaphone, 20h, 10 > 5€, 9-9bis.com

© Margaux Martins

Winter Jazz Festival

LOUIS CHEDID

Voilà plus d’un demi-siècle qu’il égaie les charts de sa bonhomie moustachue. Et ce n’est pas fini. À 77 ans, le doyen des Chedid reprend la route avec un 21e album (!) sous le coude : Rêveur, rêveur. Soit une collection de chansons popfolk emplies de malice, de douceur et d’optimisme – autant dire un punk, par les temps qui courent. Attendez-vous à un concert qui donne du baume au cœur, agrémenté de tubes d’hier (Bouc-BelAir) et d’avant-hier ( Ainsi soit-il ) mais décidément atemporels.

Auditorium, 21.02, 17h30, complet !

Bruxelles, 23.04, W:Halll, 20h, 53€ Roubaix, 24.04, Le Colisée, 20h, 49 > 15€

LISA EKDAHL

Sa voix délicate et haut perchée tranche dans le milieu du jazz et des divas au timbre puissant. Il faut dire que Lisa Ekdahl n’est jamais là où on l’attend. Depuis maintenant 30 ans et 14 albums, la Suédoise mêle allégrement blues, pop, soul, folk et bossa nova, au fil de chansons chuchotées, de mélodies enjouées parfois teintées de mélancolie. Pour l’ambiance sombre des bars en sous-sol, on repassera. Mais question fantaisie et ferveur élégante, on est au bon endroit.

Salle Ravel, 21.02, 20h30, 59 > 29€

Lille, 12.02, Sébastopol, 20h, 85 > 52€

Le Touquet-Paris-Plage, 19 > 23.02, Palais des congrès, 15h 1 concert : 59€ > gratuit • pass 5 jrs : 149€, letouquet.com

© DR
Texte : Julien Damien

Quatrième édition, déjà, pour ce festival qui a le bon goût de réchauffer l’hiver, et surtout de transformer le Palais des congrès du Touquet en gigantesque boîte de jazz. Au menu ? Quatre scènes (dont deux gratuites), une trentaine de concerts et des têtes d’affiche françaises ou internationales célébrant une grande variété de styles. En somme, une programmation fidèle à l’esprit du genre. Voici nos quatre favoris.

NOUVELLE VAGUE

Should I Stay or Should I Go  de The Clash... version reggae ?

Shout de Tears for Fears revue à la sauce ska ? Oui, c’est possible, et ça sonne plutôt bien. 20 ans après ses premières relectures bossa de tubes new-wave, et malgré le décès d’Olivier Libaux, fondateur du groupe avec Marc Collin, Nouvelle

Vague n’a rien perdu de son talent de réorchestration. Mieux : on redécouvre ici des morceaux qu’on croyait connaître par cœur, lors de shows aux allures de blind tests franchement rafraîchissants.

Salle Ravel, 22.02, 20h30, 39 > 24€

Oignies, 12.03, Le Métaphone, 20h, 26 > 21€

YURI

BUENAVENTURA

Éternel Yuri Buenaventura. Après avoir remis la salsa sur le devant de la scène à la fin du dernier millénaire (sa reprise de Ne me quitte pas reste un classique), il signait en septembre un éclatant retour avec Ámame – soit "Aimez-moi". Dans ce huitième album, le plus français des Colombiens croise musique cubaine et jazz new-yorkais. Si ses concerts font la part belle à l’orchestre et aux cuivres, l’homme n’est jamais avare d’improvisation pour faire grimper la température !

Salle Ravel, 23.02, 17h30, 49 > 29€

Lille, 11.03, Sébastopol, 20h, 90,50 > 41€

Sélection / 19.02 : Thomas Leleu, Michel Leeb & the Brass Messengers... // 20.02 : Sanseverino, Alain Souchon + Ours & Pierre Souchon, Caravan Circus Band // 21.02 : Louis Chedid, Les Sugita, The Blue Nuts, Lisa Ekdahl // 22.02 : Belmondo Dead Jazz, Nouvelle Vague... 23.02 : Yuri Buenaventura, Amélie, Eddy & le Big Band...

© Linda Bujoli
© Felipe Barbosa

Clara Ysé

UNE VOIX LIBRE

Ce fut une voix, et un frisson qui nous parcourut l’échine à l’écoute de Pyromanes, Souveraines ou Douce, extraits d’Oceano Nox, premier album qui ne laissait personne de marbre. C’est bien simple, on aime ou on déteste. Les reproches ? Trop Barbara, trop maniérée, trop empruntée, trop… Mais ne voir ou n’entendre en Clara Ysé que du "trop", c’est peut-être faire fausse route, surtout au vu de son (court) parcours.

Celui-ci débuta avec un EP joliment nommé Le Monde s’est dédoublé (2018), interprété en français, en anglais, en espagnol. Le souffle de cette chanteuse de formation lyrique évoquait alors moins Barbara que Catherine Ringer ou Fishbach. Depuis, la Parisienne a simplifié son art. Elle n’utilise plus que la langue de Molière et opte pour des orchestrations plus accrocheuses – la touche de Sage et de Renaud Letang n’y est sans doute pas étrangère. Reste un disque profondément personnel, inclassable, aux accents orientaux et médiévaux. On regrettera, peut-être, certaines tournures bien dans l’air du temps (cette satanée résilience, par exemple). Sur scène, soutenues par des chœurs sporadiques mais bien présents, ces chansons paraissent à la fois apprêtées et totalement désarmantes. Thibaut Allemand

Louvain-La-Neuve, 20.02, La Ferme du Biéreau, 19h30, 38/36€, laferme.be Tournai, 21.02, Maison de la Culture, 20h, 35€, maisonculturetournai.com Boulogne-sur-Mer, 05.03, L’Embarcadère, 20h, 28€, embarcadere-boulonnais.fr Oignies, 06.03, Le Métaphone, 20h, 30 > 25€, 9-9bis.com Bruxelles, 12.03, Cirque royal, 20h, 36 > 32€, cirque-royal-bruxelles.be

© Jean-François
Robert

EROL ALKAN

En 2005, Erol était roi. L’illustre mix A Bugged Out Mix / A Bugged In Selection mêlait, à la manière de 2manydjs, rockers et clubbers sur le même dancefloor. Depuis, le Londonien n’a jamais sorti de "véritable" album, mais se plaît à exhumer des incunables et à recombiner à peu près tout ce que la planète compte d’artistes. Citons, à ce propos, la fameuse rencontre entre Kylie Minogue et New Order (Can’t get Blue Monday out of my head ) qui fait toujours son petit effet. Son label, Phantasy Sound, abrite Daniel Avery, Red Axes ou Connan Mockasin et demeure une valeur sûre. Aussi certaine que sa propension à proposer des mix toujours renversants. T.A.

Bruges, 15.02, Cactus, 22h, 24 > 17€ cactusmusic.be

KRUDER & DORFMEISTER

À la fin des 90’s, ce tandem replaça Vienne sur la carte des musiques qui comptent et, plus étonnant, qui groovent. Au point de surprendre Gilles Peterson, incrédule à l’idée que des Autrichiens puissent produire un son aussi chaloupé. Ce downtempo mâtiné de jazz, bossa, reggae et dub fut la bande-son de bien des chill-outs. Peu avares en remixes et DJ sets, leur premier album ne parut qu’en 2020 et fut intitulé… 1995. Belle façon de boucler la boucle !

Thibaut Allemand

Anvers, 19.02, De Roma, 20h, complet ! deroma.be

© Udo
Titz

Thee Sacred Souls

DANS LE RÉTRO

Qui dit soul dit sixties, mariage de musiques sacrées et profanes, déclarations amoureuses et peines de cœur, tensions raciales et luttes pour les droits civiques. Oui, durant les années 1960, ce genre fut la BO des Noirs aux États-Unis. Mais d’autres publics s’en emparèrent, par des voix détournées. Prenons l’itinéraire bis avec Thee Sacred Souls.

La musique est une affaire de production, mais aussi de réception. Banalités ? Sans doute. N’empêche, ce rappel s’impose face à Thee Sacred Souls, nouveaux hérauts d’une soul made in San Diego défendus par le label Daptone Records. À l’apogée du genre (les 60’s), les Noirs ne furent pas les seuls à se reconnaître dans ces morceaux produits par Stax, Okeh, Kent… Les Hispaniques, autre minorité raciale, accueillirent les musiciens afro-américains interdits de jouer dans certains clubs blancs, et firent de ces chansons la bande-son de leurs virées en bagnoles surbaissées et aux suspensions hydrauliques insensées – les fameuses lowriders. À tel point que l’on parla, en Californie, de lowrider soul, avec des groupes hispaniques nommés Sunny & the Sunliners, The Premiers ou… Thee Midniters. C’est en hommage à ces derniers que Thee Sacred Souls arborent fièrement ce "Thee". Finalement, on a affaire à un phénomène comparable à celui qui agita le nord de l’Angleterre dans les 70’s avec la Northern Soul. Mêmes disques mais public et réception différents. Inutile, toutefois, de se pointer en Chevrolet Impala ‘64 pour apprécier les morceaux de ce trio, sonnant comme ceux de Curtis Mayfield, Al Green ou Leon Bridges. Thibaut Allemand Bruxelles, 25.02, Ancienne Belgique, 19h, complet !, abconcerts.be

© Gus Olivares

Bønanza

— Oscillant entre funk, soul et pop, les prestations scéniques de Bonanza sont explosives !

11 Mardi mars 20h

Émile Bourgault

— Si jeune et déjà le souci du mot juste et un sens du spectacle aiguisé. Et, en matière de développement, Émile Bourgault bat tous les records au Québec !

Hinds MOVIDA ROCK

2011, Madrid. Carlotta Cosials et Ana García Perrote, toutes deux guitaristes et chanteuses, forment Hinds. Une section rythmique débarque et paraît un premier album, Leave Me Alone. Titre prémonitoire ? Deux disques garage pop plus tard, les dernières arrivées mettaient les bouts. Que faire ? Se séparer ? Après tout, on en connaît d’autres qui ont poursuivi après avoir perdu un compositeur en chef (Depeche Mode), un leader charismatique (Pink Floyd) ou juste… un bras (Def Leppard). Ce serait dommage de s’arrêter en si bon chemin. Le projet se renforce en s’épurant, la preuve avec un quatrième LP ouvert à des sons nouveaux (le new-orderien The Bed, The Room, The Rain and You, ou Stranger et ses accents Sarah Records) sans rien perdre de ce qui fait son charme : des pop songs véloces et rondement menées. Beck et Grian Chatten (Fontaines DC), par les mélodies alléchés, sont même passés dire bonjour. Sur scène, Hinds aligne les tubes potentiels avec une joie mâtinée de candeur. Voici vingt ans, à l’époque où Franz Ferdinand faisait ses premiers pas, Hinds aurait caracolé au firmament et été "condamné" aux Zénith. Aujourd’hui, les Espagnoles vivotent et signent des morceaux (trop) confidentiels. Pour la beauté du geste. T.A. Bruxelles, 28.02, Botanique, 19h30, 21,50 > 15,50€, botanique.be

© Dario Vazquez

LAMBRINI GIRLS

Vous ne pouvez pas faire mieux que deux guitares, une basse et une batterie, rappelait Lou Reed en 1985. Quarante ans plus tard, la formule se vérifie toujours. Du côté de Brighton, les Lambrini Girls suivent les traces d’Amyl & The Sniffers ou Bikini Kill, en jouant pied au plancher un rock abrupt, simple mais pas simplet. Pas question de réinventer quoi que ce soit, ni de singer les époques passées. Sur fond de punk rock ramoné et ramonesque, les Anglaises s’en prennent au gouvernement britannique, à la montée de l’extrême droite et se gaussent de la masculinité toxique – cf le morceau Big Dick Energy. De quoi suer intelligemment. T.A.

MIOSSEC

Lille, 25.02, L’Aéronef, 20h, complet !

Amiens, 18.03, La Lune des Pirates, 20h30 13>8€, lalune.net

Bruxelles, 22.03, Ancienne Belgique, 19h complet !, abconcerts.be

Mot du médecin oblige, Miossec n’avait pu mener à terme la tournée pour défendre Simplifier, dernier LP très recommandable. Cette reprise des concerts coïncide avec les vingt ans de 1964, l’un des meilleurs albums d’une discographie inégale mais passionnante. Désormais sexagénaire, le Breton ménage sa voix (deux concerts par semaine, chant adouci) et fait le point sur une drôle de "carrière" qui, depuis Boire , le vit plus d’une fois changer de cap. T.A.

Lille, 27.02, L’Aéronef, 20h, 27/20€ aeronef.fr

© Benjamin Deroche
© Nicole Osrin

Rameau, Mozart & Schubert

Parés pour une promenade dans l’âge d’or du classicisme, accompagnés par Jean-Claude Casadesus ? À 19 ans, en 1775, un certain Mozart signe les mélodies virevoltantes du Concerto pour violon n°4, l’une de ses œuvres les plus populaires. Au même âge, son compatriote Schubert crée la Symphonie n°5, sans tambour ni trompette, mais avec une grâce préromantique et une ouverture en allegro rappelant le final de sa quatrième symphonie. Enfin, un peu de mystère avec le 6e concert en sextuor de Rameau. Vraiment ? Les partitions originales, retranscrites par Saint-Saëns, étaient apocryphes. Qu’importe, cette pièce demeure un sommet du baroque. T.A.

Lille, 26 & 28.02, Nouveau Siècle, 20h, 49 > 6€, onlille.com

Amiens, 01.03, Maison de la Culture, 18h30 30 > 8€, maisondelaculture-amiens.com

Meute

On ne présente plus Meute. La fanfare allemande reprend des standards signés Laurent Garnier, Disclosure, Floating Points ou même Erykah Badu avec saxophones, trompettes, soubassophone et marimbas. Découvrant la formation sur la scène des Transmusicales, on prit notre pied tout en n’y voyant qu’une attraction de festival. Grave erreur ! En témoignent les quatre compositions originales issues d’Empor (2024) qui tiennent la dragée haute aux relectures. Thibaut Allemand

Lille, 04.03, Le Zénith, 20h, 45€, zenithdelille.com

Bruxelles, 03.10, Forest National, 18h30, 54€ forest-national.be

Michael Kiwanuka

MÛR DU SON

Petits changements ? Mon œil ! Small Changes, dernier album de Michael Kiwanuka, voit le Britannique investir de nouveaux territoires. Soul ? Sans doute. Mais avec une approche plus ouvragée, plus sophistiquée, plus… adulte. Qui n’est pas pour déplaire. Et pose de nouvelles questions.

Michael Kiwanuka vient de signer un disque qui n’a de soul que l’âme. Les oripeaux, les références, les codes ont été remisés au placard. Ne reste qu’une voix, une inspiration et une envie de voir les choses en grand. Ces "petits" changements furent le prix à payer pour sortir cet album aux allures d’aboutissement. On se souvient de ses débuts confidentiels avec Home Again, en 2012. L’apprenti avançait dans l’ombre de Terry Callier et Van Morrison : une soul folk aux accents cuivrés, finement ciselée, comme un incunable 70’s miraculeusement retrouvé. S’ensuivront deux disques très convaincants réalisés avec la paire Danger Mouse / Inflo. Or, rien ne laissait présager la participation, pour Small Changes donc, de couteaux suisses tels Pino Palladino (De La Soul, D’Angelo, Erykah Badu) et Jimmy Jam (Prince, Janet Jackson). On n’est pas exactement dans les marges et ça s’entend. Impossible de ne pas songer au Pink Floyd du milieu des années 1970 à l’écoute de Lowdown (Part II). Estce encore de la soul ? La vraie question est : comment l’Anglais va-t-il transposer tout ceci sur scène ? La machinerie sera-t-elle réduite à sa plus simple expression ou, au contraire, va-t-il customiser ses anciennes compositions ? Réponse lors de ce concert ! Thibaut Allemand

Bruxelles, 01.03, Forest National, 18h30, complet !, forest-national.be

LE THÉÂTRE LA LOUVIÈRE

Entre théâtre, slam et chanson, Pitcho Womba Konga nous invite à explorer les cabrioles de l’amour à travers une mosaïque électro, gospel et afro.

11.02 05 >07.02

LE THÉÂTRE LA LOUVIÈRE

«Nous lançons un appel aux femmes d’Afrique», chantent ces femmes, du haut de leurs voix sensationnelles, le poing levé, le cœur ouvert, leurs drapeaux africains flottant librement.

LesAmazonesd'Afrique

toute la saison ↓

Franz Ferdinand

Lorsque Franz Ferdinand apparut, en 2004, la seule ambition (avouée) d’Alex Kapranos et des siens était de « faire danser les filles ». Ce n’était pas rien, certes, et rompait avec une vision viriliste du rock. C’était alors chouette de retrouver un groupe inscrit dans une veine franchement pop et citant Josef K, The Fire Engines et les artistes constructivistes, entre autres. Six albums plus tard, l’affaire est entendue : la véritable ambition de Franz Ferdinand, c’est de signer de grandes chansons, de celles qui durent et conjuguent immédiateté et intelligence, légèreté et trouvailles soniques. Et si du line-up originel ne restent que Kapranos et le bassiste Bob Hardy, Franz Ferdinand demeure sur scène une redoutable machine de guerre. Première et mondiale, ça va de soi. T.A. Anvers, 01.03, De Roma, 20h, complet !

The Human Fear (Domino)

C’est avec une crainte bien légitime que l’on posa le disque sur la platine. Malgré la production du regretté Philippe Zdar, Always Ascending (2018) demeurait le plus faible de leur discographie. Or, arborant une pochette inspirée de Seven Twists (1979) de Dóra Maurer, The Human Fear reprend les choses là où Right Thoughts, Right Words, Right Action (2013) les avait laissées – la présence du producteur Mark Ralph n’y est sans doute pas étrangère. Resserré, cet album contient des chansons typiques du double F, et quelques surprises (le rébétiko revisité de Black Eyelashes ). Mélodies imparables, exécution précise : la puissance des Écossais ne se dément jamais. T.A

© Fiona Tores

LE GRAND MIX

SCÈNE DE MUSIQUES ACTUELLES TOURCOING

05/02 Jyeuhair + guest

06/02 Clou + Natacha Tertone

07/02 Aline + Mustang

12/02 Afterwork : Bon Enfant

13/02 Naive New Beaters + Coeur Kaiju

15/02 Open Mic Skuuurt

21/02 Kelly Finnigan & The Atonements

23/02 Tramhaus + Servo

27/02 Benjamin Epps + Eesah Yasuke

28/02 Last Train + Dalaïdrama

01/03 Davodka + Gulien

05/03 Candeur Cyclone + guest

06/03 Asinine + guest

07/03 Nadia Reid + Lili Holland-Fricke

08/03 Piche + Vespi (DJ set)

11/03 Afterwork : Ana Lua Caiano

13/03 Mairo + guest

16/03 Friedberg + guest

20/03 Le Temps d'une Lune

Dieuf-Dieul de Thiès + Guiss Guiss Bou Bess

22/03 Colt + Anaïs Cotte

26/03 Tiger Rodeo

27/03 Zélie + Victoria Flavian

28/03 Sylvie Kreusch + guest

[9-9club]

THÉA + fig.

[9-9club] MUSTANG + PRATTSEUL

BD CONCERT ‘‘ Et si l’amour c’était aimer ‘‘ TOTORRO & FRIEND X FABCARO

CONCERTO EN

Ana Pérez

1/2

Dans le cadre du festival de danse

La Beauté du Geste

BURNING HEADS + Guest

ZOUFRIS MARACAS + Guest

Dans le cadre du festival

Les Enchanteurs

JESHI

Airbag Woke Me Up

(Because Music)

Derrière cet intitulé fleurant bon la fin de soirée qui dérape (un peu moins la lutte contre l’insécurité routière), on trouve le deuxième album de Jeshi. Originaire de l’East London, le dénommé Jesse Greenway s’est imposé comme l’un des nouveaux rappeurs qui comptent, avec des morceaux suintant l’Angleterre des déclassés. Son premier disque fut ainsi baptisé Universal Credit, l’équivalent en Grande-Bretagne du RSA français. Du "rap conscient", comme dirait Mouloud Achour, et surtout un son ouvert aux quatre vents - citons le single Total 90, reprenant le mythique refrain de Song 2 de Blur. Un peu à la manière de Nia Archives, dans un autre genre, ce complice de Little Simz ou Mura Masa revisite le patrimoine musical de la perfide Albion avec l’érudition de ceux qui ont passé « des heures devant MTV ». Rien d’étonnant, donc, à ce que cet Airbag Woke Me Up soit traversé d’élans drum’n’ bass (Bad Parts are my Favorite) ou nimbé de trip-hop façon Portishead (Stuck on Loop, Over You). Notre bonhomme n’oublie pas non plus d’où il vient, appuyant quelques clins d’œil aux tauliers du grime, notamment à travers ce sample de Stand Up Tall de Dizzee Rascal sur Scumbag. Souhaitons-lui bonne route ! Julien Damien

FRÀNÇOIS & THE ATLAS MOUNTAINS

Âge fleuve (InFiné)

Après une échappée noise rock aux côtés de Lysistrata, François Marry renoue avec sa pop solaire nappée de fragile ferveur. Chantre de la joie et de la légèreté (donc totalement à contre-courant de l’époque), le Charentais signe de sa plume baudelairienne dix chansons à déguster comme autant de comptines. Citons la rythmique enfantine de Pas lents dans la neige ou Adorer, ode à l’instant présent composée avec Thomas de Pourquery. Mais à l’ombre de l’exaltation, la mélancolie n’est jamais loin, nous rattrapant au détour d’un air de guitare decrescendo ( Party ) ou d’une ballade au parfum de saudade. À l’instar de la pop suave de Jeune versant (feat Malik Djoudi) ou du spleen alangui de Rappelle-toi, en duo avec la folkeuse Rozi Plain. Un moment de douceur salutaire... Julien Damien

Sharon Van Etten & The Attachment

Theory (Jagjaguwar)

Sans renier la fougue des enregistrements précédents, l’Américaine souligne, avec ce premier disque sous l’appellation Sharon Van Etten & The Attachment Theory, une différence de couleur avec ses albums en solo. D’emblée, les textures plus pop révèlent une patine synthétique qui renverrait presque à James Murphy. Grâce au très méditatif Live Forever puis au tube fiévreux Afterlife, on sait d’emblée qu’on la suivra les yeux fermés. Au fil de cette mue, le chant de Sharon n’a rien perdu de son urgence et son écriture de sa force. Son nouveau canevas s’avère plus efficace, hypnotique. À son meilleur, le disque conjugue Bruce Springsteen avec Depeche Mode. Ultime gage de bon goût romantique : Lol Tolhurst (The Cure) adore. Rémi Boiteux

Jean Claude Vannier et son orchestre de mandolines (Ipecac Recordings)

Surprenant Jean-Claude Vannier ! Le nom de cet autodidacte fut accolé à quelques monuments francophones (Gainsbourg, Hallyday, Bashung, Polnareff, Hardy ou Barbara) et de grands noms américains (Beck, Sean Lennon ou encore Mike Patton, boss d’Ipecac). Le natif de Courbevoie, qui a signé une palanquée de bandes originales (et a co-composé Histoire de Melody Nelson, 1971) aurait pu depuis longtemps se reposer sur ses lauriers. Mais le voici déboulant avec une œuvre taillée pour la mandoline de Vincent Beer-Demander et l’accordéon de Grégory Daltin. Ces mélodies tour à tour légères ou émouvantes, primesautières ou graves, inspirées de l’enfance du maître, constituent la bande-son d’un film muet… qui reste à tourner. Thibaut Allemand

CASSIUS – Best of 1996-2019

(Love Supreme / Justice / Because Music)

Si le tandem mené par Hubert "Boombass" Blanc-Francard et le regretté Philippe "Zdar" Cerboneschi profita de l’ouragan French Touch, ses productions ne se limitèrent jamais à la house filtrée. Preuve avec ce best-of rétrospectif, qui témoigne de l’évolution de son écriture, depuis les premiers succès (1999, Feeling for You…), jusqu’à ce Dreems (2019) aussi réussi que tragique, paru le lendemain du décès de Zdar. On y retrouve le souffle soul de Jocelyn Brown (I’m a Woman), une electropop pétillante (Toop Toop) et de grands écarts stylistiques, à l’image de Cat Power groovant avec Mike D des Beastie Boys ( Action) ou Pharrell Williams (Go Up). Bref, ce florilège prend les allures d’une cure de jouvence pour les anciens, et d’un cours de rattrapage pour les plus jeunes. Thibaut Allemand

TAINA TERVONEN

Les Veilleurs

(Marchialy)

Combien sont-ils, chaque jour, à tenter la traversée vers l'Europe depuis les côtes africaines à bord d'embarcations de fortune ? Et surtout, combien y laissent leur vie ? Le collectif United Against Refugee Deaths évoque 60 620 disparus en mer, entre 1993 et 2024, mais personne ne le sait vraiment, car ces « morts ne valent rien », déplore l'un des cinq veilleurs qu'a rencontrés la journaliste Taina Tervonen. Depuis des années, ces bénévoles accompagnent les exilés dans leur périple, souvent fatal. Grâce à leur smartphone et les réseaux sociaux, ils ont noué des relations avec une multitude de ces hommes, femmes et enfants privés de la liberté de circuler. Depuis leur salon, ils savent quand les bateaux partent, restent au téléphone avec les passagers durant leur "voyage", alertent les gardes-côtes pour prévenir du naufrage. Ils aident aussi les familles à retrouver leurs proches, recensent les victimes, tentent de leur redonner un nom, luttant contre l'invisibilisation progressive d'une tragédie quotidienne (quand elle ne sert pas d'argument à quelques politiques cyniques). Ce récit dur, mais remarquable d'humanité, rend hommage à leur travail, et montre une réalité que le grand public ne veut pas voir. 224 p., 20€. Julien Damien

MIKAEL CORRE & BOUQÉ

Anatomie d’un commissariat (Bayard Graphic')

Comment notre police fonctionne-t-elle ? C’est la question que s’est posée Mikael Corre. Durant un an, ce journaliste a pu plonger au cœur d’un commissariat. Pas n'importe lequel : celui de Roubaix. Après un livre paru en 2023, il décline son enquête sous forme de BD, accompagné par Bouqé, dont le trait dépouillé en noir et blanc évoque Marjane Satrapi. Le résultat éclaire d'autant mieux le quotidien du "flic". Du "chouf" mineur aux gamins squattant les voitures à cause de logements trop petits, ce reportage empli d'humanité dessine surtout « une société qui va mal », rongée par la misère et la violence.« Face à ces problématiques, les réponses ne peuvent pas être que policières, rappelle l'auteur. Elles doivent d'abord venir de l'école, de l'aide sociale à l'enfance... ». Bien dit ! 168p., 23€. Julien Damien

PAULINE KAEL

Écrits sur le cinéma (Sonatine)

Mais pourquoi est-elle aussi méchante ? Pauline Kael (1919-2001) avait en effet la réputation d'être la critique de cinéma la plus acerbe, la plus violente. La plus influente, aussi. Elle a défendu un certain septième art européen (Godard, Bertolucci) et le Nouvel Hollywood (Coppola, Altman, Scorsese…). Elle éreintait aussi allègrement Kubrick, Fellini ou Lucas, tandis que l'immense Clint demeurait sa bête noire – un fasciste, tout simplement. Comme elle se trompait ! Mais c'est là l'un des plaisirs de cette lecture. Épidermique, Kael écrit des dizaines de feuillets sitôt le film vu (une fois seulement), aligne bons mots et vacheries bien senties. Un livre comme une conversation entre amis : on n'est pas d'accord avec tout, mais on y réfléchit pas mal. 1008 p., 32€. Thibaut Allemand

KEUM SUK GENDRY-KIM

Mon ami Kim Jong-un (Futuropolis)

L'autrice sud-coréenne de L'Attente (2021), qui évoquait le déchirement des familles séparées après la guerre de Corée, se penche à nouveau sur ce territoire via sa figure despotique, Kim Jong-un. À travers les témoignages de gens l'ayant connu (il a étudié en Suisse), de transfuges (ayant fui le Nord), d'un universitaire et même de l'ex-président de la Corée du Sud (devenu… libraire à temps partiel !), Gendry-Kim dresse le portrait d'un homme et, surtout, d'un pays partagé en deux états. Sous la légèreté du trait et la douceur des couleurs (bleu ciel, mauve pâle), on y devine ses craintes face à l'imminence d'une guerre possible. Une lecture pas vraiment "feel-good", mais hautement instructive pour qui souhaite (tenter de) comprendre les deux Corées. 288p., 30€. Thibaut Allemand

RAPHAËL MELTZ – Après (Le Tripode)

Lucas, père de famille, expérimente "l'après-vie". À la suite d’un accident de vélo mortel, le voilà spectateur du vide créé par son absence. Il suit alors sa famille durant cette période de deuil, observant leur tristesse, leur colère. Et tente de graver en lui la voix de ses proches, leurs odeurs, leur visage, avant que ses sens ne se dissipent... Qu’y a-t-il après la mort ? Vaste question à laquelle s'attaque Raphaël Meltz. Il y répond en mettant en scène une disparition progressive. À travers des phrases démesurées, le temps s’étire et, avec lui, nous perdons à chaque chapitre un peu plus de Lucas, de sa présence. Grâce à ce procédé astucieux, l'auteur traduit l’effacement inéluctable de l’être, suggérant que la mort n'est peut-être pas une fin... 144 p., 16 €. Bathilde Fleuret

Julie se tait

ENTRE LES MAILLES DU FILET

Julie excelle au tennis, dans un club renommé. Alors qu’elle s’entraîne pour intégrer la sélection nationale, son coach est soudainement suspendu, suite au suicide d’une autre talentueuse joueuse. Une enquête est ouverte, chacun est invité à témoigner. Seule Julie s’accroche au silence... Manquant de peu son ticket pour les Oscars, Leonardo Van Dijl signe un premier film d’une folle dextérité.

L’atmosphère d’un gymnase, entre plaisir et effort, routine et enfermement, lumière blafarde et bruits blancs. D’entrée de jeu règne une ambiance de secret, de non-dit. Julie rend les coups avec rage à un adversaire invisible. De toute évidence, l’ennemi est ailleurs. Entre plans fixes, cadrages sur les diagonales ou arrière-plans flous, la caméra reste à distance des personnages. Le grain de l’image confirme que rien n’est lisse. Les contre-plongées révèlent une athlète puissante, rapide, l’esprit quadrillé par les lignes de court. Son silence intrigue, déroute. Julie ne dit rien. On reste suspendus aux lèvres de cette jeune femme mutique, monstre de détermination au mental en miettes, qui multiplie les séances de pompes pour ne pas avoir à parler. Mais plus elle se tait, plus on sait. Ou quand un silence assourdissant se fait suspense suffocant…

Jeu décisif. Joueuse de tennis dans la vraie vie, Tessa Van den Broeck en impose dans le rôle principal. Tourné en 35mm (jusqu’en 65 mm pour la scène finale), co-produit par les frères Dardenne, le film révèle une justesse inouïe tout en sobriété. La musicienne américaine Caroline Shaw en a composé la bande-son, magnifique chœur vocal qui ponctue l’intrigue à des moments charnières. Une belle façon d’affûter notre oreille, de nous maintenir aux aguets. Selina Aït Karroum

De Leonardo Van Dijl, avec Tessa Van den Broeck, Ruth Becquart, Koen De Bouw, Laurent Caron… Sortie le 29.01

La Mer au loin

UNE VIE CLANDESTINE

Présenté lors du dernier Arras Film Festival, La Mer au loin a provoqué un torrent d’émotions. Après Retour à Bollène , Saïd Hamich creuse le sillon d’un cinéma engagé et romanesque. Racontant le parcours d’un émigré clandestin à Marseille, le réalisateur franco-marocain signe une fresque tragique sur fond de musique raï. Bouleversant.

La Mer au loin suit la trajectoire de Nour (magnifique Ayoub Gretaa), jeune immigré marocain, de 1990 au début des années 2000. À son arrivée à Marseille, le clandestin de 27 ans vit chichement de petits trafics. Lors d’une interpellation, il fait la rencontre de Serge, flic fréquentant les milieux interlopes qui lui trouvera une chambre au-dessus d’un club de drag queens, et de son épouse Noémie (Anna Mouglalis dans son plus beau rôle). Ces deux-là vivent leur amour de manière libre, dans le plus grand respect - Serge aimant aussi la compagnie des hommes... Saïd Hamich plonge le spectateur au cœur d’une histoire refusant les stéréotypes. Si la tragédie est au bout du chemin, le regard n’est jamais moralisateur. Nour regarde évoluer le couple, s’y attache. Sa vie s’en trouvera bouleversée. Divisé en trois chapitres, La Mer au loin adopte certes le schéma classique du récit d’apprentissage, mais n’a rien d’académique. Le raï, symbole d’espoir et de contestation pour la jeunesse arabe des années 1990, décuple les émotions et enjeux entre les personnages. Par petites touches, tel un peintre, Saïd Hamich parvient à traduire la douleur de l’exil, bien au-delà des clichés. Un grand moment de cinéma. Grégory Marouzé

Les Belles Sorties

����������Des spectacles à moins de 5 €, près de chez vous

Avec la MEL, la culture est accessible à tous !

FÉVRIER

⟶Samedi 1er février - 20 h 30

Si Vénus avait su

Beaucamps-Ligny

La Rose des Vents

MARS

⟶Mercredi 5 mars - 10 h & 15 h

Le langage des oiseaux

Houplin-Ancoisne

Le Grand Bleu

⟶Samedi 8 mars - 20 h

Giants

Bondues

Le Ballet du Nord CCN & Vous

⟶Samedi 15 mars - 17 h

Giants

Saint-André-lez-Lille

Le Ballet du Nord CCN & Vous

⟶Vendredi 21 mars - 20 h

Giants

Herlies

Le Ballet du Nord CCN & Vous

Retrouvez le programme complet

⟶Vendredi 28 mars - 14 h 30

Le joueur de flûte

Neuville-en-Ferrain

Le Grand Bleu

⟶Samedi 29 mars - 19 h

Le joueur de flûte

Wervicq-Sud

Le Grand Bleu

⟶Dimanche 30 mars - 16 h

Le joueur de flûte

Wambrechies

Le Grand Bleu

⟶Dimanche 30 mars - 17 h

Toujours de ¾ face !

Comines

Le Gymnase CDCN

La Vie, en gros

UN CŒUR XXL

Ben, 12 ans, a toujours faim et adore cuisiner. Sauf qu’à cet âge, sa passion pour la nourriture lui vaut des kilos en trop et quelques moqueries. Difficile dans ces conditions de plaire à la jolie Claire… À moins de suivre un régime ? La réalisatrice et plasticienne tchèque Kristina Dufková sublime ici le roman jeunesse de Mikaël Ollivier à travers un microcosme pop (très) animé.

Ben n’a pas la vie facile. Si son sens de l’autodérision lui sauve souvent la mise, sa corpulence suscite diverses réactions. Il est fils unique, ses parents ont divorcé et sa mère travaille beaucoup. Manger abondamment constitue alors un refuge. Ce quotidien est bousculé par un coup de cœur pour Claire, une camarade de classe. Serait-ce le déclic nécessaire pour revoir ses habitudes ? Que ne ferait-on pas par amour… Prix du Jury Contrechamp au festival d’Annecy, La Vie, en gros mêle habilement animation de marionnettes en stop motion et en 2D. Il révèle un univers ambivalent, entre fantasmes et cauchemars. Sous des atours de cité en pâte à modeler, le film aborde en effet des sujets difficiles, comme le harcèlement scolaire, la grossophobie ou la dépression juvénile. En cela, il s’inscrit dans le sillage de Ma Vie de courgette de Claude Barras ou Mary et Max d’Adam Elliot. Si l’obésité infantile ou la surproduction alimentaire sont pointées, le film prône surtout l’acceptation et le dépassement de soi à travers quelques références cultes (Rocky, E.T.). Il donne envie de croquer la vie à pleines dents ! S. Aït Karroum

© Les Films du Préau

MARIA

Après Jackie (Kennedy) et (Diana) Spencer, Pablo Larraín dresse à nouveau le portrait d’une icône féminine du xxe siècle. À la différence des deux autres, liées aux sphères du pouvoir et existant publiquement à travers leurs époux, Maria (Callas) a fait œuvre. Le cinéaste saisit toutefois la cantatrice dans ses derniers jours, alors que sa voix lui fait défaut. Construit sur des allers-retours entre moments de gloire et scènes de déchéance, le film insiste (beaucoup) sur l’impossible accord entre la femme et la légende. Le cinéaste lui-même entend moins redonner chair à la diva que la figer dans une posture marmoréenne (Angelina Jolie lui prête sa silhouette sculpturale). Sacrifiant son personnage, ce long-métrage vaut surtout comme réflexion sur ce genre ingrat qu’est le biopic. Raphaël Nieuwjaer

De Pablo Larraín, avec Angelina Jolie, Pierfrancesco Favino, Alba Rohrwacher... Sortie le 05.02

HOLA FRIDA

Librement adapté de l’album de Sophie Faucher illustré par Cara Carmina, ce film d’animation s’attache au journal intime de Frida Kahlo. Nous voilà connectés à l’enfance de la célèbre peintre, son imaginaire, sa famille (un père photographe, qu’elle assiste dès son plus jeune âge) et ses épreuves (une poliomyélite contractée à six ans, puis ce terrible accident de bus à l’adolescence), fondatrices pour son art. Truffé de clins d’œil à ses tableaux, Hola Frida souligne aussi le contexte du Mexique au début du xx e siècle (alors en pleine révolution) ou l’héritage zapotèque (une civilisation matriarcale, ceci expliquerait cela !). Enfin, c’est un condensé de folklore qui s’offre aux jeunes spectateurs, entre rites (la fête des morts), art culinaire et expressions en VO. Selina Aït Karroum

Film d’animation d’André Kadi et Karine Vézina. Sortie le 12.02

Cherry Airlines © Pascal Sgro

PhotoBrussels Festival

L’HEURE DE VÉRITÉ

Créé en 2016 à l’initiative du Hangar, le PhotoBrussels Festival investit durant un mois près d’une cinquantaine de lieux dans la capitale belge, et demeure à l’image de la ville : diversifié. Après un cru 2024 ayant attiré plus de 100 000 visiteurs (et avant une dixième édition en 2026 coïncidant avec les 200 ans de l’invention du médium !), zoom avant sur une programmation toujours aussi surprenante.

Une fausse image trahit-elle pour autant la vérité ? C’est une question vertigineuse, et ô combien actuelle, que soulève le Hangar à travers Aİmagine. Derrière ce néologisme se cache une exposition qui met les pieds dans le plat : celui de la photographie façonnée par l’intelligence artificielle. « On début, on n’osait pas y aller, c’est très provocateur de s’intéresser à l’IA quand on défend la photographie. Pourtant on ne peut l’ignorer, c’est comme l’arrivée du numérique, on doit vivre avec, alors autant y réfléchir », explique Delphine Dumont, directrice du centre d’art et fondatrice du PhotoBrussels Festival. Parmi les 17 projets présentés lors de cet accrochage, il y a notamment celui de Michael Christopher Brown. Ce photojournaliste a franchi le

Rubicon en 2023 avec 90 Miles, reportage généré par l’IA et illustrant la migration cubaine vers la Floride, dans les années 1960. Cette période n’ayant pas été documentée, l’Américain l’a "reconstituée" en s’appuyant sur le témoignage des principaux intéressés.

Alors, certes, la photo a plus ici valeur d’illustration que de preuve, mais l’information est-elle pour autant erronée ? Cette réflexion prend d’autant plus de relief au regard de l’hommage consacré par le centre Géopolis aux photojournalistes gazaouis, soit les seuls à témoigner, au péril de leur vie, des atrocités commises par l’armée israélienne dans la bande

de Gaza. Sans eux, point d’images et toujours plus d’angles morts...

Profondeur de champ

Au fil de 46 rendez-vous disséminés dans toute la capitale belge, la photographie se dévoile ainsi sous ses formes les plus diverses (documentaires, artistiques) pour aborder une multitude de sujets : l’architecture via l’objectif de Lucien Hervé (grand complice de Le Corbusier), l’identité et la masculinité (les corps "multiples" de Rami Hara et Ugo Woatzi), notre rapport à la nature (le "post-tourisme" de

la Polonaise Ada Zielinska, sur les lieux frappés par des catastrophes climatiques)... Surtout, à l’heure où notre société croule sous les images, ce festival nous rappelle l’importance du point de vue, du regard. De l’émotion aussi, à l’instar d’À partir d’elle. Présentée à la Fondation A, cette exposition collective est consacrée au rapport que des artistes entretiennent avec leur mère (de LaToya Ruby Frazier à Sophie Calle) faisant plus que jamais rimer intime et universel. Julien Damien Bruxelles, jusqu’au 23.02, divers lieux en ville, photobrusselsfestival.com

90 Miles © Michael Christopher Brown

Une collaboration entre le Musée de la Photographie et l’Amsab-IHS. Le projet a bénéficié du soutien des Communautés flamande et française de Belgique dans le cadre de la Coopération culturelle entre la Communauté flamande et la Communauté française.

Arlene Gottfried - Guy with Radio, East 7th Street, New York, 1977
© Estate Arlene Gottfried / Courtesy Les Douches la Galerie, Paris

Arlene Gottfried STREET LIFE

Elle fut l’une des grandes figures de la "street photography" de la fin du xxe siècle, aux États-Unis. À Douchy-les-Mines, le CRP rassemble une cinquantaine des images d’Arlene Gottfried, disparue en 2017 à l’âge de 66 ans. Montée avec la galerie parisienne Les Douches (qui l’a révélée en France en 2016), cette exposition saisit en noir et blanc et en couleur le New York extravagant des années 1970 à 1990, et dessine en filigrane le portrait d’une artiste humaniste.

C’est un cliché improbable. En août 1980, Arlene Gottfried se balade sur la plage naturiste de Riis Beach, à New York. Elle croise alors un Juif orthodoxe vêtu de son traditionnel habit noir, malgré la chaleur... quand un bodybuilder nu comme un ver surgit et lance : « Prends-nous en photo, moi aussi je suis juif ! ». Devenue iconique, cette image symbolise

à merveille l’œuvre de l’Américaine, tout à la fois drôle, insolite et débordante d’humanité. Née en 1950 à Brooklyn, celle qui fut brièvement dactylo a très tôt fait de la rue son terrain de jeu, choisissant la photographie comme un exutoire. «  Elle avait une énergie

débordante, ne pouvait pas rester enfermée. Ce fut le prétexte parfait pour se promener, faire des rencontres... », explique Laurence Cornet, la commissaire de cette exposition, qui l’a côtoyée voilà

Arlene Gottfried - Untitled, n.d. / © Estate Arlene Gottfried / Courtesy Les Douches la Galerie, Paris

une dizaine d’années, aux ÉtatsUnis. « Elle avait toujours son appareil autour du cou », à l’affût de ce que le hasard et la vie peuvent offrir de surprenant « et surtout des gens, qu’elle aimait par-dessus tout ».

Du chœur à l’ouvrage

Sous son objectif a ainsi défilé une faune des plus hétéroclites, propre au New York des années 1970 à 90, insouciant, diversifié et excentrique. « Elle avait un sens de l’humour incroyable, qui influençait sa pratique, ça lui permettait de photographier tout le monde, poursuit Laurence Cornet. Elle abordait ses sujets avec bienveillance, ne jugeait personne, c’est sans doute pourquoi son travail montre une telle diversité de personnages ».

Au fil de cet accrochage, on trouve une octogénaire faisant de la corde à sauter, un jeune couple s’embrassant fougueusement dans l’herbe, mais aussi des enfants, des femmes, des travestis, des héroïnomanes, des blancs, des noirs, la communauté portoricaine new-yorkaise, saisie dans « une série explosive, pleine de couleur et de vie » ou encore... des chœurs de gospel, l’une de ses grandes passions. Car Arlene Gottfried était également une voix, puissante et généreuse, à tel point que sa mère l’avait surnommée la "Singing Photographer", soit la photographe chantante. À vous d’en saisir l’écho. Julien Damien

Arlene Gottfried / Singing Photographer Douchy-les-Mines, 15.02 > 18.05, CRP/ Centre régional de la photographie Hauts-de-France mar > ven : 13h-17h • sam & dim : 14h-18h gratuit, crp.photo

Arlene Gottfried - Kissing on the Highway, Queens, New York, 1980
© Estate Arlene Gottfried / Courtesy Les Douches la Galerie, Paris

LET’S MAKE BRUSSELS VIBRATE TO THE RHYTHM OF PHOTOGRAPHY!

9th EDITION

46 LOCATIONS

46 expositions célèbrent le médium de la photographie dans des galeries, centres d’art, musées répartis dans Bruxelles. Une occasion unique de découvrir des artistes, des oeuvres et des lieux !

23.O1.23.O2.25

Daniel Turner © Isabelle Arthuis

Daniel Turner CORPS ET ÂME

Les objets ont-ils une âme ? Un esprit ? Les lieux que nous traversons gardent-ils en mémoire le passage des êtres humains ? Telles sont les questions soulevées par Daniel Turner, qui investit des sites abandonnés pour tenter de matérialiser l’invisible. À l’occasion de sa première exposition dans un musée belge, il a travaillé à partir d’un endroit chargé d’histoire : l’ancienne prison de Forest.

Daniel Turner a toujours nourri un rapport singulier à la création. L’Américain fut d’abord peintre... avant de brûler toutes ses toiles, en 2006. Cet autodafé marquera un bouleversement radical dans son processus. Depuis une dizaine d’années, il travaille ainsi à partir de sites désaffectés, généralement assez rudes. Ce sont des usines, des établissements psychiatriques voire des pénitenciers, à l’image de la prison de Forest, inaugurée en 1910 et que le plasticien a exploré six mois après sa fermeture, en 2022.

L’alchimiste. Sensible aux rebuts et matériaux métalliques (son père était ferrailleur), il a choisi un certain nombre d’objets sur place. Il les a ensuite "transformés", par des méthodes chimiques ou mécaniques, pour révéler la présence humaine qui a peuplé ces lieux, comme autant de fantômes. C’est par exemple ces pupitres qu’on trouvait dans les cellules et dont le New-Yorkais a obtenu grâce à un procédé de distillation une huile noire, guidé par « cette idée poétique et métaphysique d’extraire toute la mémoire dont ce bois s’est imprégné  » observe Denis Gielen, le directeur du MACS. L’artiste imagine ainsi que ce liquide contient les discussions qui ont pu avoir lieu autour de cette table... En cela, difficile de ne pas comparer Daniel Turner à un alchimiste, qui parvient à puiser de la spiritualité, et de l’émotion, dans la matière la plus triviale. Julien Damien

Hornu, jusqu’au 06.04, MACS, mar > dim : 10h-18h, 10 > 2€ (gratuit -6 ans), mac-s.be

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Animalis Machina, Cococh Industry

RÉFLEXION À LA CHAÎNE

Quoi de mieux, pour préserver les ressources naturelles, que de construire ses propres animaux ? Telle est la devise de Cococh Industry. Soutenue par le Musée d’histoire naturelle de Lille, cette exposition immersive nous ouvre les portes d’une usine où des machines produisent de la viande, nourrissant avec dérision le débat sur notre rapport au vivant.

C’est un drôle de manufacture qui s’est installée au Tripostal. Pour cause, dans cette usine agroalimentaire futuriste, point de veaux, de vaches ni de cochons gavés jusqu’au museau, mais des créatures biomécaniques fabriquant de la viande de synthèse... Durant la visite de cette chaîne de production pilotée par l’IA, on découvre des "incubateurs de tranches de jambon prédécoupées", mais aussi d’œufs, de bœuf haché, de sushis et bien d’autres "cocochs", terme renvoyant à la novlangue marketing comme au vocabulaire enfantin. «  Eh oui, il ne faut jamais oublier de prendre les consommateurs pour des imbéciles », s’amuse Franck Dion, dans la peau de l’héritier de ce faux fleuron de la tech, mais vrai conteur d’histoires aussi loufoques qu’inspirantes. À Lille, cet illustrateur et réalisateur de films d’animation dévoile une installation immersive hors norme présentée sous forme de vidéo-mapping projeté sur des écrans en relief. Drôle, un poil sarcastique, elle s’appréhende surtout comme une fable dystopique, interrogeant notre rapport à la consommation et aux animaux, ces "machines sans âme" comme l’affirmait Descartes. À tort ou à raison ? Ça, c’est à vous de voir... Julien Damien Lille, jusqu’au 02.03, Tripostal, mer > dim : 14h-18h, 5/3,50€ (gratuit -12 ans), mhn.lille.fr animalismachina.com • À lire / La version longue de cet article sur lm-magazine.com

© Franck Dion

C O R P S 21 04 FÉVRIER 2025 JANVIER 2026

ILS SONT FOOD CES ROMAINS !

Par Toutatis, Obélix ne mangeait pas de sangliers ! Voici l’une des nombreuses surprises de cette exposition nous projetant 2 000 ans en arrière. Plus de 200 objets dévoilent les habitudes alimentaires des Gallo-romains. Entre Gaulois partisans du circuit court ou Romains "street foodistas" avant l’heure, cette cuisine antique se révèle étonnante. Et les goûts de ces deux peuples étaient bien différents : si les premiers étaient adeptes de bière, les seconds coupaient leur vin à l’eau... Ils sont fous, ces Romains. Bavay, jusqu’au 31.12, Forum antique, lun, mar, jeu, ven & dim : 9h-12h & 13h-18h , mer & sam : 13h-18h, 8 > 4€ (grat. -18 ans), forumantique.fr

QUELS BEAUX VISAGES !

Le Musée des beaux-arts de Calais expose les œuvres récemment entrées dans ses collections (dont certaines jamais vues) dévoilant de "beaux visages". On découvre ici les photographies d’adolescents en gros plan de Philippe Bazin, les multiples figures qui composent la France vue par le pochoiriste C215, ou encore une Lio immortalisée par Pierre et Gilles. Rassemblant de grands artistes d’hier et d’aujourd’hui, cette exposition célèbre le portrait sous toutes ses facettes.

Calais, jusqu’au 31.08, Musée des beauxarts, mar > dim : 13h-17h, grat., mba.calais.fr

STUDIO STONE

Créé en 1924 par un couple belgo-russe (Cami et Sasha Stone), ce studio est depuis tombé dans l’oubli. Il demeure pourtant une référence de la photographie du début du xxe siècle, loué pour la qualité de ses images, ses cadrages dynamiques et l’attention portée à la lumière. À Charleroi, cette exposition exhume un trésor composé de documents d’époque, d’affiches et surtout de tirages originaux, entre reportage social, portraits, nus... Une belle redécouverte.

Charleroi, 01.02 > 18.05, Musée de la photographie, mar > ven : 9h-17h sam & dim : 10h-18h, 8 > 4€ (gratuit -12 ans) museephoto.be

HENRI MATISSE, COMMENT J’AI FAIT MES LIVRES

Au sein d’un musée rénové, on découvre une facette méconnue de l’œuvre de Matisse : l’illustration de textes littéraires. À partir des années 1930, ce grand lecteur pose des images sur les mots d’immenses auteurs, tels Joyce, Baudelaire ou Ronsard. Cette exposition focalise sur 14 de ces ouvrages, soit ceux pour lesquels son engagement fut total, du choix de la typographie à celui du papier. Au centre de ce corpus exceptionnel, on trouve aussi quatre livres de dessins signés du maître. Le Cateau-Cambrésis, jusqu’au 13.04, Musée Matisse, lun, mer > ven : 10h-12h30 & 14h-18h sam & dim : 10h-18h, 8/6€ (gratuit-18 ans), museematisse.fr

AUTOFICTION

Autrefois passeport vers la liberté, aujourd’hui synonyme de pollution et de surconsommation, l’automobile méritait bien sa "biographie". D’ailleurs, près d’un milliard et demi de voitures circulent aujourd’hui sur notre planète ! Réunissant visions de designers et d’artistes, cette exposition explore cette relation d’attraction-répulsion vis-à-vis de cet objet. Elle dévoile aussi les dernières innovations et les différents usages d’un concentré de technologie. Hornu, jusqu’au 16.02, CID, mar > dim : 10h-18h 10 > 2€ (gratuit -6 ans) cid-grand-hornu.be

GALERIE DU TEMPS

Attention, peintures fraîches !

Inaugurée il y a pile 12 ans, l’exposition permanente du Louvre-Lens est intégralement repensée. Si le principe reste le même (5 000 ans d’histoire de l’humanité à parcourir sans rencontrer un seul mur), la célèbre Galerie du temps voit l’arrivée de 250 nouvelles œuvres. Où l’on découvre Les Quatre saisons d’Arcimboldo, le Portrait de Luis María de Cistué y Martínez signé Goya, une statue de la reine Néférousobek datant de près de quatre millénaires... entre autres !

Lens, Louvre-Lens, gratuit, louvrelens.fr

RÊVER DEBOUT

C’est une rencontre entre tradition et innovation. Deux artistes diplômés du Fresnoy exposent leurs œuvres au milieu des collections du MUba. Le premier, Gregor Božič, s’est révélé en photographiant et filmant des arbres fruitiers à travers l’Europe, symboles d’une résistance à l’industrialisation des denrées. Le second, Léonard Martin, établit un dialogue entre peinture, cinéma, sculpture mécanique et marionnettes, initiant une balade ludique à travers l’histoire de l’art.

Tourcoing, jusqu’au 24.02, MUba tous les jours sauf mardi : 13h-18h, 5,50 > 3€ (gratuit -18 ans), muba-tourcoing.fr

BOUDDHA. L’EXPÉRIENCE DU SENSIBLE

Dodu ou effilé, les yeux ouverts ou clos, en bronze, bois laqué, ivoire... Le Musée royal de Mariemont dévoile les innombrables représentations d’un sage parmi les sages : Bouddha ! Cette exposition rassemble des pièces datant du xive siècle à nos jours, et restées dans l’ombre durant près de 85 ans. Issues de toute l’Asie, depuis l’Inde jusqu’au Japon, en passant par la Chine ou la Thaïlande, ces statuettes ou peintures invitent à la contemplation comme à la méditation.

Morlanwelz, jusqu’au 20.04, Musée royal de Mariemont, mar > dim : 10h-17h 8 > 3€ (gratuit -18 ans), musee-mariemont.be

Trajal HarrellMaggie
The Cat © Tristram Kenton

En Vogue

LIBERTÉ DE MOUVEMENT

Ce nouveau festival made in Charleroi célèbre la danse post-internet, née en réseau, mais qui ne cesse de faire des allers-retours entre la toile, la rue et la scène, l’écran et les corps. Ce temps fort convie quelques éminents représentants d’un courant entremêlant les cultures, les styles et les époques.

Le web n’est pas avare de défauts, mais l’une de ses grandes qualités réside sans doute dans sa force de partage. C'est une fenêtre sur le monde en temps réel révélant autant de communautés et de pratiques. Il fallait donc au moins un festival pour révéler les contours de cette "danse post-internet" longtemps accolée au collectif (La)Horde, féru de cultures numériques (tel le jumpstyle exalté via des vidéos YouTube) et surtout de mélanges. Le croisement des genres, c’est justement ce qui anime la Parisienne Isabelle Clarençon, aka Mab’ish. Cette danseuse, DJ, organisatrice de soirée et YouTubeuse nous convie dans son Cosmic Circle, soit une pièce pour quatre interprètes (féminines) célébrant la culture club, à grand renfort de hip-hop ou de house.

TikTok sans modération. Tandis que le New-Yorkais Jeremy Nedd ausculte la portée politique du "Milly Rock", ce pas de danse décliné à l’infini sur les réseaux, Anna-Marija Adomaityte procède à une vertigineuse mise en abyme. À travers TikTok-Ready Choreographies, la Lituanienne dissèque les petites chorégraphies formatées et virales, taillées pour un écran vertical et qui fleurissent sur l’application chinoise. La pièce est jouée par sept adolescentes (les premières concernées), et interroge sur des rythmes hip-hop ou K-pop ce langage du corps très codifié. En somme, un nouveau folklore globalisé né dans nos chambres... et ne demandant qu’à être partagé sur scène ! Julien Damien Charleroi, 29.01 > 08.02, Les Écuries (+ L’Eden), 1 spectacle : 12 > 5€, charleroi-danse.be Sélection / 29.01 : Trajal Harrell - Maggie the Cat // 31.01 > 01.02 : Anna-Marija Adomaityte - TikTok-Ready Choreographies // 01.02 : Nach - Nulle part est un endroit + Cellule, Isabelle Clarençon aka Mab'ish - Cosmic Circle // 05.02 : Jeremy Nedd - from rock to rock… aka how magnolia was taken for granite, With the Lions - L’Brahech // 07 & 08.02 : Fancy Legs #2 08.02 : Sandrine Lescourant - Raw

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Theatre of Dreams

RÊVE ÉVEILLÉ

Après avoir sondé notre rapport à la violence et à la résilience dans Double Murder, Hofesh Shechter s'intéresse cette fois à nos rêves. Star mondiale de la chorégraphie contemporaine, l'artiste israélien signe une pièce pour treize interprètes et trois musiciens aussi percutante qu’hypnotique.

Le spectacle débute à peine qu'un homme surgit de la pénombre de la salle, monte sur scène puis entrouvre un immense rideau noir derrière lequel il disparaît, tel Alice s'engouffrant au pays des merveilles... Et nous voici embarqués avec lui dans plus d'une heure de fantasmagorie pure. Un voyage lynchien au cœur de notre subconscient, avec ce qu'il contient de bizarreries, d'angoisses et de désirs. Le rideau s'ouvrira alors sur une succession de tableaux tous plus intrigants, grandioses et survoltés... Connu pour ses pièces aussi jubilatoires que spectaculaires, Hofesh Shechter s’en est donné à cœur joie dans cette nouvelle création. Sur des musiques techno, africaines, orientales (qu’il a luimême composées) les interprètes traduisent un kaléidoscope d'émotions. De plages oniriques en séquences plus rythmées, ils mêlent danses hip-hop, folkloriques ou clubbing. Ils évoluent seuls ou en groupe, au fil d'une harmonie millimétrée, un chaos maîtrisé. Éclairée par des lumières rouges ou blanches, la troupe entre parfois en transe, comme dans une rave, tandis qu’une mystérieuse brume envahit le plateau... Faite de ruptures et d’élans, la chorégraphie reflète alors la folie d’un songe éveillé. Julien Damien

La Louvière, 19 > 23.02, Le Théâtre, 20h (dim : 16h), 35 > 10€, cestcentral.be

© Tom Visser

Rue des Italiens

DU CHARBON ET DES HOMMES

En 1946, un accord entre Rome et Bruxelles acte l'envoi de 50 000 travailleurs italiens dans les mines belges, contre la fourniture journalière à l'état transalpin de 200 kilos de charbon par homme employé... Girolamo Santocono, dit "Toni", a trois ans en 1953 lorsqu'il débarque de sa Sicile natale dans le plat pays et les baraques de Morlanwelz, où son père s'échine dans les charbonnages de Mariemont-Bascoup. Trente-trois ans plus tard, il publie Rue des Italiens, roman dans lequel il raconte son enfance plutôt heureuse, la liberté dont il bénéficiait avec ses copains dans ce "paradis noir" au pied des terrils, alors « le plus beau terrain de jeu du monde »... Mais il y a aussi les accidents de la mine, les difficultés économiques, les promesses de prospérité non tenues et puis cette immigration massive qui ne plaît pas à tous et son inévitable corollaire, le racisme... Ce récit poignant est aujourd'hui adapté sur scène par Iacopo Bruno et Lara Ceulemans. Sur un plateau épuré, deux femmes et un homme portent ses mots tantôt drôles, touchants ou tristes. De ceux qui éclairent le présent à la lueur du passé, et la grande histoire à travers la petite. J.D.

Mons, 04 > 06.02, Théâtre le Manège, mar : 21h • mer : 18h30 • jeu : 13h30, 18 > 3€, surmars.be Binche, 08.02, Théâtre de Binche, 14h & 20h, 19 > 10€, cestcentral.be Bruxelles, 14 > 22.02, Théâtre des Martyrs, mar & mer : 19h • jeu : 14h & 20h15 • ven : 20h15 sam : 18h • dim : 15h, 22 > 6€, theatre-martyrs.be

QU'EST-CE QU'ON FABRIQUE

EN FAMILLE ?

Qu'est-ce qu'on fabrique en famille ? Vaste question... et drôles de réponses ! Entre jeux et ateliers, on décore nous-mêmes le festival, puis on assiste à des spectacles pas piqués des hannetons. Où l'on suit par exemple les démêlés de deux apprentis-mécaniciens, tentant de reconstruire un robot éparpillé façon puzzle. On se promène aussi dans les bois avec une violoncelliste et des marionnettes, avant de se lancer à la recherche d'un chat disparu... J.D.

Loos-en-Gohelle, 06 > 09.02, Base 11/19 1 spectacle : 6/4€ • 6 spectacles : 24€ culturecommune.fr

Sélection / 08 & 09.02 : Odile Grosset-Grange - Le Chat sur la photo, Cie Chamar Bell Clochette - Robot // 09.02 : Cie Artra - Dans les bois...

IL ÉTAIT UNE

FOIS AU PRATO

Au Prato, on a toujours aimé les rencontres improbables, les télescopages inédits. Ce temps fort en offre une parfaite illustration. Le principe ? Rapprocher deux artistes qui ne se connaissent pas et issus de disciplines radicalement différentes. Ils ont alors quatre jours pour créer un spectacle ensemble. Pour cette troisième édition, Sandrine Juglair et Loïc Lantoine se sont prêtés au jeu. La première est acrobate experte en mât chinois (voire en barre de pole dance, comme dans Dicklove). Le second est chanteur ou, plutôt, "diseur", libérant le verbe de sa voix rocailleuse. En tout cas, ces deux-là ont tout pour nous enchanter... J.D. Lille, 07.02, Le Prato, 20h, 10 > 5€, leprato.fr

Sandrine
Juglair
©Aur
Ruby
Robot © Ralph Kuehne

Cabaret de curiosités

Mère Courage © Fred De Brock

OBJECTIF LUTTE

En prise avec le monde tel qu’il déraille, ce festival créé par le Phénix de Valenciennes fait une nouvelle fois la part belle à la création et au spectacle (bien) vivant. Engagée, et engageante, cette édition interroge les ressorts de la lutte dans une société rongée par les conflits.

L'art peut-il changer le monde ? Il peut au moins en susciter l'envie. Sur une planète qui n’en finit plus de brûler, le Cabaret de curiosités entre en guérilla. « Le terme sous-entend un mode de résistance et d'engagement, il s'agit d'allumer des contre-feux artistiques  », précise Romaric Daurier, le directeur du Phénix. En cela, Lisaboa Houbrechts fait figure de porte-étendard de cette édition rebelle. La Flamande s'empare de Mère Courage de Bertolt Brecht, puissant plaidoyer contre la guerre. Soit l'histoire d'une cantinière promenant sa roulotte et ses enfants sur les champs de bataille, gagnant opportunément de l'argent en ravitaillant les troupes, jusqu'à tout perdre... Si elle respecte le texte original, la metteuse en scène lui offre une dimension d'autant plus universelle en mêlant les langues et les cultures, dans un format proche de l'opéra.

Amour interdit. Dans un registre plus intimiste, citons l'adaptation par Marie Fortuit de Thérèse et Isabelle de Violette Leduc. Écrit en 1954, paru en 1966, ce court roman, « le dernier ouvrage censuré en France », ne sera publié dans sa version intégrale qu'en 2000. Pour cause, il raconte l'éclosion du désir entre deux adolescentes dans le pensionnat d'un collège du Valenciennois. Au fil d'un spectacle traversé de musique classique et de chansons populaires, cette création évoque « les luttes des femmes face aux normes sociétales ». Il nous emporte aussi dans les méandres d’une passion interdite, cette fois sans résistance... Julien Damien

Valenciennes & alentours, 25 > 28.02, Le Phénix & divers lieux, 1 spectacle : 10 > 5€ (laboratoire de curiosités : gratuit) • pass journée : 28/20€ • pass 3 jours : 50€ (25€ pour les détenteurs du pass saison), lephenix.fr

Sélection / 25.02 : Jean Lambert-wild et Catherine Lefeuvre - Le Roi se meurt 26 & 28.02 : Kséniia Onishchenko, Laurent Hatat & Lionel Palun - Kséniia, un prénom qui veut dire l’étrangère // 26 > 28.02 : Marie Fortuit - Thérèse et Isabelle, Hugues Duchêne - L'Abolition des privilèges // 27.02 : Emma Gustafson, anima motrix & Jon Fosse - Comme des étoiles 27 & 28.02 : Lisaboa Houbrechts - Mère Courage, Jeanne Lazar - Neiges éternelles

LA PREUVE PAR

TENIR

(Eva Aubigny)

Quand la danse devient un acte de résistance, et même de résilience. Seule sur le plateau et face à une bougie qui se consume lentement, Eva Aubigny décompose ses gestes au ralenti dans un équilibre précaire. En fond sonore résonnent les bruits du monde, et sa chorégraphie constitue alors un cri sourd face au chaos qui nous menace.

Valenciennes, 26 & 27.02, Espace Pasolini 16h30, 10 > 5€

3

KSÉNIIA (Kséniia Onishchenko, Laurent Hatat & Lionel Palun)

Grâce au Laboratoire des curiosités, nouveau temps fort du festival révélant des projets en cours, on découvre la création poignante de Kséniia Onishchenko. Artiste accompagnée par le Phénix, réfugiée à Valenciennes depuis l'offensive russe, l'Ukrainienne partage le récit de sa vie bouleversée dans un spectacle mêlant musique, images 3D et émotion.

Valenciennes, 26 & 28.02, Le Phénix mer : 14h30 & 15h • ven : 16h30 & 17h, gratuit

L'ABOLITION DES PRIVILÈGES

(Hugues Duchêne)

C’est un acte fondateur de notre république, décidé par la toute jeune Assemblée nationale le 4 août 1789. Dans un État en déficit, où les plus riches échappent à l’impôt, les députés votent l’abolition des privilèges (de la noblesse, du clergé…). Seul sur scène, un comédien livre en 1h15 une vivifiante leçon d’histoire, plus que jamais d'actualité...

Douchy-les-Mines, 26 > 28.02, L’Imaginaire mer : 20h • jeu : 14h30 • ven : 14h30 & 20h, 9 > 5€

© Lionel Palun

Visuel : Hélène Blanc –Licences PLATESV-R-2021-000130 ; PLATESV-R-2021-000131 ; PLATESV-R-2021-000132

LE BARBIER DE SÉVILLE

OPÉRA GIOACHINO ROSSINI

DU 27 FÉV. AU 10 MARS 2025

Diego Ceretta Direction musicale

Jean-François Sivadier Mise en scène

opera-lille.fr

Bestiaire

CAS D'ESPÈCES

Du cirque avec des bêtes sauvages... sans animaux ? C'est possible. Dans cette pièce adressée au jeune public, un acrobate incarne à lui seul toute une ménagerie, sans prononcer un mot mais en disant beaucoup sur notre espèce. Jeanne Mordoj signe une œuvre étrange et joyeuse, continuant de tracer un sillon à part dans le spectacle vivant.

Sur une petite scène carrée aux allures de ring, il rampe, sautille sur des cubes, se déplace à quatre pattes. Sans masque ni costume, en un regard, un bond ou une posture, il devient un chimpanzé, un oiseau, un fauve au gré d'une chorégraphie confondante de vérité. Et que l'on ait six ans ou beaucoup plus, on est forcément saisi par la performance livrée par Hichem Chérif. À bien y regarder, l'acrobate formé à l'Académie Fratellini ne se contente pas d'imiter ce bestiaire. Il le fait littéralement jaillir de son propre corps, comme s'il était enfoui là, depuis toujours. C'est justement le propos de ce solo : mettre les espèces sur le même plan, le temps d'un spectacle, interrogeant d'autant mieux la nature humaine et le rapport que nous entretenons avec la faune. Dans la grande tradition du cirque forain si chère à Jeanne Mordoj (on lui doit notamment... Foraine) il s'agit d'exhiber, non pas un monstre ni un mammifère exotique, mais un être multiple, as de la transformation et de la transgression. Ici l'Homme cohabite avec l'animal dans la même enveloppe charnelle, et aucun ne cherche à prendre le dessus sur l'autre. Une harmonie au poil, en somme. Julien Damien Lille, 26 & 27.02, Le Prato, mer : 15h & 19h • jeu : 10h & 14h30, 10 > 5€, leprato.fr

Hautsde-France

04 > 28 MARS 2025

Le Barbier de Séville

LE RETOUR DE FIGARO

C’est un fidèle compagnon de route de l’Opéra de Lille. Depuis 2004, Jean-François Sivadier a présenté ici, pêle-mêle, Madame Butterfly, Les Noces de Figaro, Carmen... et Le Barbier de Séville donc. C’était pour clôturer la saison 2013, et personne n’a oublié sa version déhanchée et explosive du classique de Rossini. La voici recréée... et renouvelée !

Jean-François Sivadier le confie sans mal, il a puisé dans la comédie musicale pour offrir à ce chef-d'œuvre de l'opéra bouffe les atours d’un grand spectacle populaire. À bien y penser, quel meilleur choix pour donner vie au célèbre Figaro, excentrique valet tournant en ridicule l’aristocratie ? Au programme de sa relecture : des loubards façon blousons noirs, un Don Basilio aux lunettes fumées et adepte de ganja (!), de l’humour à revendre et surtout une joie des plus contagieuses, portée par la musique électrisante d’un Rossini alors âgé de 24 ans. Sans oublier, bien sûr, ces airs tubesques qui ont traversé les époques, et fait le bonheur des cartoons comme de nos salles de bain (qui n’a jamais entonné Largo al factotum sous la douche ?). En somme, un opéra moderne et survolté, ici recréé «  dans le même esprit », mais avec une toute nouvelle distribution. Sous la baguette du jeune chef d’orchestre italien Diego Ceretta (et l’ONL), le casting mêle étoiles montantes (la mezzo-soprano canadienne Deepa Johnny, dans le rôle de Rosina) et interprètes aguerris (Alessandro Luongo, en Figaro "latino"). Un spectacle tout sauf rasoir ! Julien Damien Lille, 27.02 > 10.03, Opéra, 20h (sauf sam : 18h et dim : 16h), 75 > 5€, opera-lille.fr

Gérard-Philipe Grand Théâtre

2 février klek entÒs

Grand Théâtre - 15h30 - magie complet

du 5 au 9 février

pestacles ! - festival jeune public

26 Février giselle

Grand Théâtre - 20h30 - ballet classique

28 février tout va trés bien

complet

Grand Théâtre - 20h30 - boulevard

6 mars la note

complet

Grand Théâtre - 20h30 - comédie

8 mars

COLT + iNi

gérard-philipe - 20h30 - pop

Retrouvez le programme ici

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Gérard-philipe - ccgp grand théatre de calais - officiel

infos billetterie : www.billetterie.calais.fr

www.spectacle-gtgp.calais.fr

Hervé Guibert

dʼaprès le roman dʼHervé Guibert À lʼami qui ne mʼa pas sauvé la vie adaptation et mise en scène Arnaud Vrech

MER 5 20H JEU 6 18H30*

VEN 7 20H MARS

*rencontre à lʼissue de la représentation

Photo © Charles Leplomb

R·onde·s

ÇA TOURNE !

C'est une figure ancestrale, sinon universelle, de la danse. Alors, peut-on réinventer la ronde ? Voici en tout cas le nouveau défi de Pierre Rigal. Chorégraphe parmi les plus courus, révélé avec des pièces à l'énergie débordante, flirtant avec le cirque, le Toulousain présente à Douai une œuvre festive et participative.

Comme un symbole, l'idée lui est venue dans un collège, où il effectuait une intervention pédagogique. En effet, quoi de plus enfantin et spontané qu'une ronde ? Certes, le motif est simple, mais d'une richesse infinie. Il offre la possibilité d'une multitude de gestes à l'unisson et, en filigrane, une belle allégorie de la solidarité, de ce rapport de l’individu au collectif, où chaque mouvement se répercute sur le groupe. « Comme une société humaine en miniature », observe le chorégraphe. Sur scène, huit interprètes apparaissent sous un châle dissimulant leur visage, tandis que résonnent les accords d'une transe mélodieuse et un chant envoûtant. Cette farandole prend d'abord les allures d'un rituel chamanique... Puis très vite, des figures géométriques se mettent en place. Impeccablement synchronisés, les gestes se complexifient, deviennent de plus en plus acrobatiques. Les danseurs et danseuses se tiennent par le bras ou se séparent, virevoltent ou tournoient sans jamais briser l'harmonie du groupe, ni se départir d'une indéniable ferveur. Cette implacable circonvolution évoquera alors le ballet parfait des atomes ou des planètes, avant de s'ouvrir au public, au fil d'un spectacle... rondement mené. Julien Damien

Douai, 27 & 28.02, Hippodrome, jeu : 19h30 • ven : 20h30, 25 > 5€, tandem-arrasdouai.eu

Tonton Mimil dans son jaden

En Guyane et aux Antilles, le jardin (ou "jaden" en créole) revêt un rôle central, autrefois symbole de l'autosuffisance alimentaire pour les esclaves et désormais de protection de l'environnement. Créé par la Guadeloupéenne Chantal Loïal, ce spectacle invite les enfants dans un jardin florissant, peuplé de manguiers et balisiers majestueux, de papillons et de petits lézards... qui n'ont plus de pattes ! Serait-ce une nouvelle fois à cause de l'Homme ? Heureusement, Tonton Mimil veille. Entre danse, chant et musique, il nous explique les méfaits de la culture intensive, la nécessité de prendre soin de la nature et d'en contempler les beautés. J.D.

Roubaix, 04.03, Ballet du Nord, 19h, 10 > 5€, balletdunord.fr + atelier parents-enfants : 01.03, 10h, 5€

Depuis des années, Jean-Camille Goimard suit les wing-suiters, ces hommes et femmes "chauve-souris" qui s'élancent depuis la cime des montagnes pour flotter dans les airs. Le chorégraphe s'est inspiré de leurs exploits pour créer un spectacle à 360 degrés. Dans Lévitation, deux danseurs évoluent dans un structure cylindrique sur laquelle sont projetées des vidéos de vol, tandis que leurs gestes restituent une quête de liberté des plus vertigineuses. J.D.

Guillaume Ducreux

Villeneuve d'Ascq, 26 > 28.02, Espace Concorde mer : 20h • jeu : 19h • ven : 15h & 20h, 21 > 5€, larose.fr ©

BÉRÉNICE (J-.R.

Lemoine / Jean Racine)

Titus, futur empereur de Rome, et Bérénice, reine de Palestine, sont amants. Mais lorsque le premier accède au trône, le voilà face à un terrible dilemme : l'amour ou le pouvoir ? Car le peuple et les lois condamnent leur union. Titus choisira la séparation... Jean-René Lemoine revisite ce classique de Racine sous l'angle de la passion, sans attenter à la puissance du texte. Dans une scénographie épurée, sur un sol doré, les personnages s'affrontent en alexandrins, mêlant la fureur au désir.

Valenciennes, 30 & 31.01, Le Phénix, 20h, 32 > 6€ // Béthune, 04 > 06.02, La Comédie, mar & mer : 20h • jeu : 18h30, 10 > 6€

LE GRAND BAL

(Cie Dyptik / Souhail Marchiche & Mehdi Meghari)

À l'immobilisme des corps et des esprits, tétanisés par de multiples crises, la compagnie Dyptik oppose la danse comme une libération. Cette chorégraphie met ainsi en scène neuf interprètes, tous frappés par une fièvre dansée, évoquant cette étrange épidémie qui toucha Strasbourg en 1518. Passant de l'ombre à la lumière, portée par l'énergie du hip-hop, cette pièce prend les allures d'une révolte et nous enjoint à nous déchaîner. Bruxelles, 04 & 05.02, Wolubilis, 20h30 45 > 35€// Mons, 12.02, Th. Le Manège, 20h, 18 > 3€ // Roubaix, 13.05, La Condition Publique (La Rose des Vents), larose.fr

LES VIRTUOSES EN PLEINE TEMPÊTE

(Julien et Mathias Cadez)

Issus d'une famille d'illusionnistes, élèves du conservatoire de Lille, les frères Cadez ont choisi... de ne pas choisir, pour mieux mêler les disciplines. Après un premier spectacle ébouriffant, ces virtuoses sont de retour avec une création à la croisée de la magie, de l'humour et de la musique ! Cette fois, nos deux pianistes se retrouvent "en pleine tempête", confrontés à une violoncelliste qui a trouvé refuge chez eux, et pas franchement commode...

Calais, 09.02, Le Grand Théâtre, 16h30 10/6€, spectacle-gtgp.calais.fr

UNE HISTOIRE SUBJECTIVE DU PROCHE-ORIENT

MAIS NÉANMOINS VALIDE… JE PENSE (Cie Théâtre Majâz)

Derrière ce titre un peu long se cache un spectacle essentiel, à l'heure où le sang n'en finit plus de couler au Proche-Orient. Lauren Houda Hussein y raconte sa drôle de vie, entre son Liban natal en guerre contre Israël, en 2006, et Paris où elle tombe amoureuse... d'un Israélien, au grand dam de son père. Accompagnée par le oudiste Hussam Aliwat, elle incarne une foule de personnages. Sa performance entremêle l'humour et le drame, l'intime et la géopolitique, avec un regard empli d'humanité. Armentières, 04.02, Le Vivat, 20h, 21 > 2€, levivat.net // Dunkerque, 06 & 07.02, Le Bateau Feu jeu : 19h • ven : 20h, 10€, lebateaufeu.com // Lille, 14.03, maison Folie Wazemmes, 19h30, 10/6€

OH YEAH ! OH YEAH !

(Black Bones)

Black Bones a toujours conçu ses concerts comme des shows. On a fréquemment vu sa tête pensante, Anthonin Ternant, grimé de peinture fluo et jouant du "rock’n’groove" dans le noir. On n’est donc pas étonnés de le voir dans ce spectacle musical jeune public. Où l’on suivra les tribulations d’un roi esseulé dans son château (hanté), mais qui découvre une mystérieuse salle… Entre musique et vidéo 3D, fantasy et train fantôme, Oh Yeah ! Oh Yeah ! transforme la scène en fête foraine !

Lille, 09 & 10.02, L'Aéronef, dim : complet ! • lun : 10h30, 7/5€, aeronef.fr Calais, 22 & 23.02, Le Channel, sam : 16h • dim : 15h, 3,50€, lechannel.fr

LA NUIT DU FILS

(Giuseppe Santoliquido / S. Raco)

Son dernier roman, L’Été sans retour, fut encensé. Giuseppe Santoliquido devrait une nouvelle fois faire parler de lui avec cette pièce. Soit l'histoire d'un père et de son fils qui tiennent un garage automobile. Mais cet argument à priori banal dessine une réalité plus difficile qu'il n'y paraît, avec ses rêves avortés et secrets enfouis... Un récit qui est un peu le nôtre, car pour citer l'auteur : « rien n’est plus complexe que l’aventure humaine. Et rien n’est moins personnel non plus... ».

Bruxelles, 12.02 > 09.03, Théâtre royal des Galeries, 20h15 (matinée : 15h), 29 > 10€, trg.be

HISTOIRE D'UN CID

LIGNES # (Cie cats&snails / C. Vanlerberghe & J. Ternoy)

D'un folklore de chambre mondialisé à la scène, il n'y a qu'un pas chassé. Cette pièce jeune public s'inspire ainsi des courtes vidéos verticales de danse partagées sur TikTok. Accompagnés par deux pianos à queue, trois interprètes se livrent à une chorégraphie dans un espace contraint, rappelant l'étroitesse d'un écran de smartphone. Au fur et à mesure, ils s'émancipent, donnant à leur geste plus d'ampleur, tandis que la musique est de plus en plus débridée !

Armentières, 25 & 26.02, Le Vivat, 20h, 21 > 2€ Loos-en-Gohelle, 26.03, Fabrique Théâtrale, 20h, 5€ (Festival La Beauté du geste)

(Corneille / Théâtre national populaire ) "Ô rage ! Ô désespoir !"... "À vaincre sans péril, on triomphe sans gloire"... "Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années". Le Cid, de Corneille, ne manque pas de "punchlines". Cette pièce en restitue fidèlement la langue... et en offre une variation des plus pétillantes ! Pour cause : dans un décor de château gonflable, six interprètes "jouent" au Cid comme le feraient des enfants, incarnant les amours contrariées de Chimène et Rodrigue avec une emphase jubilatoire.

Dunkerque, 27 & 28.02, Le Bateau Feu, jeu : 19h • ven : 20h, 10€, lebateaufeu.com

© Romu Ducros
©Jay Kiseki
Danse . Musique

ANTTI LAITINEN

Eh non, ces photographies n’ont pas été retouchées, ni même façonnées par l’intelligence artificielle. Elles sont l’œuvre du Finlandais Antti Laitinen, qui manipule avec une grâce infinie des paysages pour créer des tableaux vivants. En l’occurrence, l’artiste taille des formes géométriques d’une perfection presqu’irréelle dans les branches dénudées d’un arbre ou des bosquets. Soit autant de vides que la nature finira inéluctablement par combler. Une belle leçon d’humilité, n’est-ce pas ? anttilaitinen.com ; @laitinen_antti • À lire / La version longue de cet article sur lm-magazine.com

Broken Landscape ©
Antti
Laitinen

Théâtre Royal des Galeries

Directeur : David Michels

Santoliquido

Frédéric Clou, Marie-Hélène Remacle

Réal Siellez et Yves Claessens

Mise en scène : Sandra Raco

Scénographie : Sofia Dilinos

Costumes : Sophie Malacord

Lumières : Félicien Van Kriekinge

Du 12 février au 9 mars 2025

Giuseppe

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