LM magazine 103 france belgique

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n째103 / janvier 2015 / GRATUIT

nord & belgique Cultures et tendances urbaines



Sleeping Giraffe © Todd Baxter

Sommaire

LM magazine n°103 - Janvier 2015

06 - News

50 - Livres

De l’art ou du frometon ?, Des frigos en self-service, Des filles à poil, La culture rapporte gros, c’est quoi ce torchon ?, la France des 100, larmes à gauche, dessins animés mortels, la loi des séries, le surf des egos…

Kris & Maël, Juan José Saer, Tova Reich, Jiro Taniguchi, Colombe Schneck

10 - événement Mons 2015 : Capitale européenne de la Culture

52 - écrans Foxcatcher, A most violent year, Cold in july, L’Affaire SK1, Pasolini, Loin des hommes

62 - Portrait Du Zhenjun, philosophe de l’image

18 - Style

68 - Exposition

Bruxelles vs Liège : la gaufre prise en sandwich

Garry Winogrand, Lascaux, Orange Dreams, 100 chefs-d’œuvre de Versailles, Sésostris III… Agenda

24 - Portfolio Todd Baxter, jeux d’enfants

80 - Théâtre & Danse

32 - Musique Rone, New Beat Party, Jesse Rose, Chassol, Les Transardentes, Jay-Jay Johanson, Interpol, Zoot Woman, Mark Lanegan, Brigitte, Antra’Zik… agenda

Rencontre avec Maguy Marin, Le Cœur Cousu, Fumistes !, Week-end poil à gratter, Golden Hours, Finir en beauté, L’Exoconférence, Portrait de Jonathan Capdevielle & Vivat la Danse !… agenda

48 - Disques

98 - Le mot de la fin

BC Camplight, Archive, Panda Bear, Belle & Sebastian, Viet Cong

Toute l’année 2014 en une image


LM magazine France & Belgique

28 rue François de Badts 59110 La Madeleine - F tél : +33 362 64 80 09 - fax : +33 3 62 64 80 07

www.lm-magazine.com* www.facebook.com/magazineLM twitter.com/LM_Letsmotiv

Direction de la publication / Rédaction en chef Nicolas Pattou nicolas.pattou@lastrolab.com

Direction artistique / Graphisme Cécile Fauré cecile.faure@lastrolab.com

Rédaction Julien Damien redaction@lm-magazine.com Marie Pons info@lm-magazine.com

Couverture Todd Baxter, Astoria www.baxterphoto.com Publicité pub@lm-magazine.com

* A Responsive Web Design

Administration Laurent Desplat laurent.desplat@lastrolab.com Réseaux sociaux Sophie Desplat Impression Imprimerie Ménard 31682 Labège Diffusion C*RED (France/Belgique) ; Zoom On Art (Bruxelles)

Ont collaboré à ce n° : Ont collaboré à ce n° : Thibaut Allemand, Todd Baxter, Rémi Boiteux, Julien Bourbiaux, Julien Collinet, Marine Durand, Nicolas Jucha, Raphaël Nieuwjaer, Marie Tranchant et plus si affinités.

LM magazine France & Belgique est édité par la Sarl L'astrolab* - info@lastrolab.com L'astrolab* Sarl au capital de 5 000 euros - RCS Lille 538 422 973 Dépôt légal à parution - ISSN : en cours L’éditeur décline toute responsabilité quant aux visuels, photos, libellé des annonces, fournis par ses annonceurs, omissions ou erreurs figurant dans cette publication. Tous droits d’auteur réservés pour tous pays. Toute reproduction, même partielle, par quelque procédé que ce soit, ainsi que l’enregistrement d’informations par système de traitement de données à des fins professionnelles, sont interdites et donnent lieu à des sanctions pénales. LM / Let'smotiv est imprimé sur du papier certifié PEFC. Cette certification assure la chaîne de traçabilité de l’origine du papier et garantit qu'il provient de forêts gérées durablement. Ne pas jeter sur la voie publique.

Papier issu de forêts gérées durablement



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© Sharareh Khosravani

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News

Gun sculpture L’artiste iranienne Sharareh Khosravani a réalisé cette sculpture étonnante toute en… billes de fromage soufflées. L’œuvre, intitulée Warning, est un savant mélange d’humour et de réflexion sur la violence à laquelle sont exposés les enfants, notamment lors des fusillades perpétrées dans les écoles aux États-Unis. De l’art ou du frometon? shararehkhosravani.com

© lebensmittelretter

Les Frigos du cœur à Berlin, une association s’active depuis 2012 pour lutter contre le gaspillage massif de denrées alimentaires. Les « sauveurs de nourriture » ont installé des frigos en libreservice dans les rues. Ceux-ci sont remplis des invendus récupérés auprès d’enseignes partenaires, et grâce à l’initiative des passants, des habitants du quartier ou même des touristes. Une démarche solidaire à importer d’urgence en ces temps d’hyper-consumérisme. foodsharing.de


© instagram.com ©New York Post

Des filles à poil Plus fort que le retour de la barbe, voici une tendance initiée par des jeunes femmes : les poils d’aisselles peints. Un phénomène observable sur Tumblr et Twitter où les clichés des filles aux dessous de bras colorés affluent via le hashtag #dyedpits. Un buzz lancé par une blogueuse anglaise qui fait « un grand doigt d’honneur à la société et à ses stigmatisations ». Et se demande : « à quel moment les poils des femmes sont devenus inacceptables ? Pourquoi est-ce même devenu un sujet de conversation ? ». www.tumblr.com/search/dyed+armpit+hair

La culture, une dépense à perte ? Les chiffres publiés par le cabinet E&Y tordent le cou à ce vilain cliché. Cette étude commandée par le Groupement européen des sociétés d’auteurs et de compositeurs scanne neuf filières : musique, spectacle vivant, cinéma, TV, radio, jeu vidéo, livre, presse et arts graphiques. Et démontre que cette économie génère 536 milliards d’euros en Europe, soit 4,2 % du PIB. Elle serait même le 3e employeur privé derrière le bâtiment et la restauration, donnant du travail à 7,1 millions de personnes. Et si on arrêtait de couper dans les budgets ? www.ey.com

© Ototo Design

La culture, ça rapporte !

© Agents & Talents

Coup de torchon Les confessions de V. Trierweiler, les best-sellers de Marc Levy ou de l’omniprésent Zemmour se déclinent en édition 100% coton des Vosges, toile écrue et lettrage rouge, à l’image des célèbres couvertures Gallimard. Tous torchons cousus de fil blanc qui font au moins - on l’espère - de bons essuie-tout. curiosites.agentstalents.com


8 news

des lettres Des chiffres et

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C’est ce que les gauchers gagneraient de moins par rapport aux droitiers, selon une étude menée par un économiste de l’Harvard Kennedy School. Pire, ceux-ci seraient aussi moins performants aux tests de QI, davantage victimes de troubles comportementaux et plus souvent dyslexiques. Larmes à gauche...

92 www.lemonde.fr/les-decodeurs

100 habitants Les Décodeurs du Monde se sont amusés à ramener la population française de 66 millions à 100 habitants, histoire de mieux saisir cet afflux de chiffres dont on nous bombarde quotidiennement (parfois à des fins douteuses). Cette infographie dénombre ainsi dans cette France des 100 : 9 immigrés, 23 retraités ou, plus inquiétant, 13 personnes qui vivent sous le seuil de pauvreté.

Le nombre d’heures que quatre canadiens ont passé devant leur écran à regarder des séries. Soit le nouveau record de « binge watching ». Si vous êtes tentés, comptez 30 heures seulement pour les cinq saisons de Game of Thrones. Courage.

71%

Le pourcentage d’internautes ayant déjà tapé leur nom sur le web, selon un sondage Ipsos. Mais l’« ego-surfing» ne serait pas uniquement guidé par des troubles narcissiques. 21% veulent vérifier si la toile ne garde rien de compromettant sur eux.

3 328 Le nombre de filles portant le prénom “Abcde” aux étatsUnis. Ce n’est ni le résultat d’un manque d’inspiration des parents ni une façon rapide de leur apprendre à lire, mais un prénom originaire d’Hawaï, (prononcer « AB si dee ») qui fait des adeptes.

Selon le British Medical Journal, les personnages de dessins animés (de Blanche Neige à La Reine des neiges) ont quasiment trois fois plus de chance de se faire zigouiller que ceux qui peuplent les films pour adultes.



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Mons 2015 Capitale européenne de la Culture Texte Julien Damien & Marie Pons Photos Église Sainte-Elisabeth © Gregory Mathelot / L’éblouissement © Olivier Donnet / Fête d’ouverture, The Best Is Yet To Come © DR


L’éblouissement

Saison 1

Au carrefour de l’Europe, mais aussi du temps, Mons a longtemps souffert de la fermeture des charbonnages avant d’entamer sa mue vers l’industrie des nouvelles technologies. Et d’effacer les clichés. Aussi, on n’aurait pu voir dans sa désignation comme capitale européenne de la culture qu’un symbole. Ce serait oublier que la cité du Doudou est riche d’un patrimoine valorisé par l’Unesco, mais aussi d’une histoire et d’une identité fortes. Cette vaste programmation met définitivement à sac les dernières idées reçues.


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Fête d’ouverture, Envolée Chromatique, La Transmutation du dragon © Emmanuel Nzengu

Le principe

L’initiative date de 1985. Elle revient à Melina Mercouri, alors ministre grecque de la culture, et Jack Lang. Après Riga et Umeå l’an passé, c’est donc au tour de Mons, mais aussi de Pilsen (République Thèque) d’être désignées capitales européennes de la Culture - depuis 2009, deux villes au moins se partagent le label. Celles-ci reçoivent des financements européens pour organiser une programmation et culturelle artistique d’envergure durant un an. Cela permet également de mettre en avant leur patrimoine et d’inaugurer des lieux, des manifestations pérennes. Ainsi en 2004, Lille avait vu la création du Tripostal, des maisons Folie, puis de l’événement Lille 3000.

« E

n voilà un drôle de bazar ! ça ressemble à un gros Mikado… » Les yeux vers le ciel, Michel, la cinquantaine, affiche un air circonspect face à cette monumentale œuvre d’Arne Quinze. Inauguré le 6 décembre, cet immense enchevêtrement de morceaux de bois a posé ses 90 mètres de long et ses 40 autres de large sur la maison Losseau et l’église Sainte-Elisabeth. The Passenger (c’est son petit nom) survole la rue de Nimy - qui mène vers la Grand-Place - mais aussi les commentaires, plutôt contrastés... « Moi j’aime bien, mais je ne vois pas trop ce que ça représente. On dira que c’est le dragon de Saint-Georges, hein ?! », plaisante un autre passant, Philippe, qui convoque là le protecteur de Mons. La légende veut que ce


[ Soirée d’ouverture, L’illumination ] Pour sa soirée d’ouverture, Mons s’habille de lumière… et le public aussi ! Vous enfilez un poncho argenté conçu par le créateur Jean-Paul Lespagnard, customisé avec les Montois au fil des ateliers. Telle une boule à facettes vivante, vous vous perdez dans la ville, le meilleur moyen de tomber sur des surprises à chaque coin de rue. Notamment sur les immanquables installations de feu de la Compagnie Carabosse et les robots fluorescents de Keyframes qui invitent à entrer dans la danse. Si le besoin d’une pause se faisait sentir, plongez dans l’un des six jacuzzis finlandais installés sur les pavés ! Afters et concerts prolongeront la fête jusqu’au bout de la nuit. En 2015 nous serons tous illuminés ! 24.01, Mons intra muros, 18h>00h, Gratuit + After parties (Grand-Place, Théâtre du Manège, maison Folie, l’Alhambra…) Prog : Installation de feu, Place du Parc, Keyframes, Marché aux Herbes, Hot Pots Finlandais, 106, rue de Nimy

© DR

héros local personnifie le combat entre le bien et le mal mais, surtout, celui de « l’homme contre lui-même dans l’affirmation de son destin ». En cela, Saint-Georges incarne parfaitement le renouveau de la ville. Celle-ci se relève tout juste d’une période économique difficile depuis la fermeture des mines de charbon au début des années 1970, et a trouvé son salut dans le développement du numérique (Google, Microsoft et plus de 100 autres entreprises y ont posé leurs valises pleines d’emplois et de promesses), ambitionnant de se muer en « Creative Valley ». Métamorphose. Plus qu’un symbole donc, la désignation de cette cité de plus de 93 000 âmes comme capitale européenne de la culture vient traduire

« Tout le monde doit s’approprier cette fête ! » cette « métamorphose » que vante Yves Vasseur, commissaire général de Mons 2015. L’expression n’a rien de galvaudée : rien qu’en termes d’infrastructures, l’événement a impulsé la naissance (notamment) de cinq nouveaux musées et de deux salles de concert. Les retombées attendues sont donc « déjà là ». Le reste dépendra de l’affluence. Quelque deux millions de visiteurs sont espérés - « dans un rayon de 250 km » - sur une année qui proposera 300 rendez-vous : >>>


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[ Mons 2015 en chiffres ]

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5 nouveaux musées : le Mons Memorial Museum, l’Artothèque, le Musée du Doudou, le Beffroi de Mons, le SILEX’S 2 nouvelles salles de concert : l’Arsonic et l’Alhambra

70 millions d’euros, le budget global de Mons 2015 6 artistes complices : Wajdi Mouawad, Frédéric Flamand, Jean-Paul Lespagnard, Carl Norac, Marc Pinilla, Fanny Bouyagui 2 millions de visiteurs espérés durant l’année

25 temps forts 300 rendez-vous expositions, musique, théâtre, cinéma, littérature, etc. Ceux-ci sont répartis via une programmation découpée en quatre saisons. « Vous pourrez venir à n’importe quel moment, il se passera quelque-chose », promet Yves Vasseur, qui dit s’être inspiré de Lille 2004 dans la manière de faire, cette façon « d’être présent dans la rue tout le temps, et de

24.01>31.03, saison 1, L’éblouissement : Fête d’ouverture, Van Gogh au Borinage, Mons Superstar, Festival Via, Café Europa, La Phrase (Karelle Ménine, Ruedi Baur) 01.04>27.06, saison 2, Le grand déballage : Installations urbaines, la ville en jeu(x), inauguration des 5 musées, de l’Arsonic & de l’Alhambra, Micx & New Station

proposer des événements familiaux gratuits afin que tout le monde s’approprie cette fête ». Renaissance. Une programmation qui fera également la part belle aux « Montois » célèbres à travers des « temps forts » : Van Gogh, qui renonça à sa carrière d’évangéliste pour celle d’artiste lors de son passage dans le Borinage, fera l’objet d’une exposition très attendue au BAM dès le 25 janvier. Le compositeur Roland de Lassus et l’architecte et sculpteur Jacques Du Brœucq (« le Michel-Ange du Nord ») se verront chacun consacrer une semaine en octobre. Citons aussi l’accrochage dédié à Verlaine, qui écrivit plusieurs de ses chefs-d’œuvre à la prison de Mons. « Ce sont des personnages qui sont dans l’inconscient collectif des Montois, et autour desquels on va raconter une histoire ». Un récit traversé en filigrane par cette idée de renaissance, thème de la 4e saison. « Mons 2015 apportera-t-il ses réponses à la crise qui nous frappe, comme la Renaissance fut une réponse face au barbarisme du Moyen-âge ? », se demande Yves Vasseur. Une aussi louable ambition mérite déjà l’attention de Saint-Georges.

28.06>25.09, saison3, L’été enflammé : Sun City (and More !), Labyrinthe de tournesols, Festival au carré, La Chine ardente, sculptures monumentales contemporaines, Atopolis, Le festin (dimanche toqué & barbecue urbain), Mons Street View

26.09>12.12, saison 4, Renaissance : Parfum de Renaissance entre Lille, Mons et Bruxelles, une semaine avec Roland de Lassus, une semaine avec Jacques Du Broeucq, L’homme, le dragon et la mort (Saint-Georges), Verlaine cellule 252, Ailleurs en Folie Pilsen 2015, Mon(s) Idéal & Fête de clôture (The End)


Lettre de Vincent à Théo van Gogh, 1879 © Van Gogh Museum, Amsterdamh Vincent van Gogh, Les bêcheurs, Collectie Stedelijk Museum Amsterdam

Van Gogh tout court © Olivier Donnet

Van Gogh au Borinage, la naissance d’un artiste L’exposition phare de ce début de saison s’articule autour d’une étape décisive de la vie de Van Gogh. Le jeune Hollandais arrive dans la région en 1878, à 27 ans. En tant que prédicateur protestant, son but est d’évangéliser les communautés rurales. Mais ce séjour de deux ans amène une vraie remise en question. C’est là que Van Gogh décide de se consacrer entièrement à la peinture, du côté de Cuesmes et Wasmes, au contact des ouvriers agricoles et tisserands, des mineurs. Il commence alors à peindre ce qui restera l’un de ses sujets de prédilection : la vie ouvrière dans sa réalité quotidienne la plus brute. Quelque 70 œuvres sont exposées au BAM. En sortant du musée, il y a plusieurs façons de prolonger le parcours autour de la vie du maître. En allant à la rencontre des célèbres Mangeurs de pommes de terre (1885) à l’intérieur d’une chaumière typique de l’époque reconstituée grandeur nature. Ou en assistant à la projection de La vie passionnée de Vincent Van Gogh (1955), tourné dans le Borinage par Vincente Minnelli, avec Kirk Douglas, et présenté en avant-première mondiale dans sa version restaurée. Enfin ne manquez pas les témoignages des figurants montois dans le documentaire Hollywood au pied du terril, révélant les savoureuses coulisses du film. Van Gogh au Borinage, 25.01>17.05, Mons, BAM, mar>dim, 10h>18h, 15/12€, www.bam.mons.be 31.01>27.09, La Chaumière, Mons, Jardin du Mayeur, 17 Rue Neuve, 10h>18h, gratuit 19.02, Projection La vie passionnée de Vincent Van Gogh (Lust for life), Mons, Théâtre Royal, sur invitation. 21.02, Hollywood au pied du terril, Mons, Anciens Abattoirs, mar>dim, 10h>18h,2/1e

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© Nicolas Pattou

Arne Quinze The Passenger Arne Quinze est réputé pour son style explosif. Judicieux, donc, d’avoir fait appel à cet artiste internationalement reconnu pour démarrer en fanfare cette première saison placée sous le signe de « l’éblouissement » (24.01 > 31.03). En façonnant, à l’aide de milliers de planches de bois des œuvres aux formes organiques, de Beyrouth à Munich en passant par le désert du Nevada, le Flamand n’a qu’une seule ambition : instaurer un dialogue… Ici, son installation recouvre la rue de Nimy tel un gigantesque mikado suspendu (badigeonné de fluo) et constitue une porte d’entrée flamboyante vers l’événement. Rue de Nimy, 7000 Mons, Belgique, arnequinze.com, www.mons2015.eu/passenger-arne-quinze


[ city guide ] Mons regorge de bonnes adresses, alors profitez de votre séjour dans la capitale européenne de la culture pour : Apprécier un lunch vilaine fille ou un menu mauvais garçon dans une ancienne maison du xviiie siècle. 55 Rue de Nimy, www.vilainefillemauvaisgarcon.be Goûter la cuisine créative d’un Top Chef version resto ou bistro. iCook, 31 avenue Reine Astrid, Mons, restaurant-icook.be // Le bistro de Jeanphi, 22bis rue des Fripiers, le-bistro-de-jeanphi.be Boire un verre sur la Grand-Place à La Vie est Belge, Grand-Place, 40, www.lavieestbelge.be ou au Bateau Ivre, 1 rue de Nimy. Faire une balade en triporteur-taxi sur un Piaggio pour revivre la Dolce Vita sous nos latitudes !, www.triobalade.be Céder à une pause shopping : chez Cache-mire pour la déco et accessoires, 40 rue des Capucins. à la boutique vintage Pep’s store, 20 Rue des Fripiers. Chez Carnaby Street pour une sélection de vêtements et accessoires de 1940-1980, 54-56, rue de la Coupe, www.carnabystreet.be Découvrir des livres rares et/ou anciens (ou une bonne idée de cadeaux) : L’Oiseau-Lire, 36 rue du Hautbois, mar>ven, 10h>18h, sam, 10h30>12h30 & 14h30>18h, www.loiseaulire.com

© Collection Hainaut Vigilance Sanitaire

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24.01>12.04.15, Mons, Anciens Abattoirs, Rue de la Trouille 17, mar>dim, 10h>18h, 8/5€, www.mons2015.eu/fr/mons-superstar

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Des idées et des hommes La cité montoise comme vous ne l’avez jamais vue, à travers les hommes et les femmes qui ont discrètement changé la face du monde depuis le Borinage. Cette exposition rend hommage aux passionnés, aux visionnaires qui ont su innover dans les champs scientifique, technique ou artistique. De façon parfois inattendue. à l’instar de Nicolas Hardenpont « qui a inventé la poire telle qu’on la connaît aujourd’hui, juteuse à souhait ! », s’enthousiasme Yves Vasseur, commissaire général de l’événement, ou encore « Charles Malapert qui a découvert un cratère sur la lune qui porte toujours son nom ». Mons peut bien bomber le torse.

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Dossier

Gaufre Liège vs Bruxelles

Une histoire belge Texte & photo Marine Durand

En quelques mois, pas moins de quatre enseignes ont ouvert autour de la gaufre à Paris. Avant que la France ne se l’approprie, rappelons les faits : la waffle est bien née en Belgique ! Mais voilà que deux images se bousculent. L’authentique est-elle bruxelloise, légère et craquante avec ses carrés sagement rangés ? Ou liégeoise, plus consistante, à la cannelle ou truffée de sucre perlé ? Pour arbitrer ce match des saveurs, faisons appel aux spécialistes. Préparez-vous à saliver…

[ Mille sabords & moules à gaufres ! ]

Le mot gaufre vient de « walfre » qui signifie « rayon de miel » en vieux français (xiie siècle). Au xiiie siècle, un forgeron imagine le moule à gaufres, inspiré par des alvéoles fabriquées par les abeilles. Traditionnellement dans nos régions, on fabriquait les gaufres après Noël pour les offrir aux enfants au Nouvel An. La gaufre bruxelloise : Régulière, traditionnellement à 20 trous, légère, elle accepte toutes les garnitures ! La gaufre liégeoise : aromatisée à la cannelle ou truffée de sucre perlé qui fond lors de la cuisson. Plus dense, arrondie, comportant 24 trous et sans coin. (Voir p.22).

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epuis son enseigne arborant fièrement le drapeau noir, jaune et rouge, Lucas Montante n’hésite pas une seconde : « Pour moi, la gaufre belge, c’est celle de Bruxelles. » Elle donne d’ailleurs son nom à l’institution de la capitale que le bonhomme gère depuis 10 ans*, drainant touristes et habitués à quelques pas de la gare centrale. Ici, le succès de la belle dorée repose sur une étourdissante variété de suppléments (chocolat, fruits frais, confiture, chantilly…) et une pâte préparée quotidiennement, selon les canons du genre. à un détail près : si la levure rend ces gaufres aussi aériennes, elle ne faisait pas partie de la recette bruxelloise originale, écrite pour la première fois en 1874 par le critique gastronomique Philippe


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Cauderlier. à l’époque, pour obtenir le même résultat, il fallait battre les blancs d’œufs en neige, et surtout une grande quantité de pâte, ce qui la rendait assez coûteuse. Quant à la dénomination « de Bruxelles », elle serait apparue en 1842... Alors, qu’on le veuille ou non, la doyenne des gaufre, c’est bien la Liégeoise, inventée, selon la légende, par le cuisiner du prince-évêque de la Cité ardente au xviiie siècle, qui voulait créer « quelque chose de savoureux et sucré ». Par l’odeur alléché. En plein cœur de Liège, justement, les effluves vanillés qui s’échappent de chez Pollux sont un irrésistible attrape-gourmands. « On ne propose que la Liégeoise, c’est une évidence », s’exclame Laurence Schyns.

Elle a ouvert ce commerce avec son mari Paul il y a 20 ans. « Tout est dans la cuisson : les perles de sucre fondent doucement, cela donne cette saveur un peu caramélisée. » Et on (re)vient de loin pour déguster ces douceurs chaudes, parfumées à la vanille, à la cannelle, ou fourrées au chocolat. Parmi les clients réguliers, une bande de New Yorkais, qui ne trouve pas ailleurs cette saveur typiquement belge ! Mais alors, gaufre de Bruxelles ou de Liège ? Le mieux pour trancher, c’est sûrement d’y goûter. *Aux Gaufres de Bruxelles, 113 rue du Marché aux Herbes, 1000 Bruxelles, www.belgiumwaffle.com Pollux, 2 Place de la Cathédrale, 4000 Liège, +32 (0)4 223 67 81

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Houplines, une place au musée Texte & photo Julien Damien

La gaufre du pays Flamand - Le petit musée de la gaufre, 4 rue Victor Hugo, Houplines, lun>ven, 8h>19h, sam, 9h>12h, +33 (0)3 20 77 40 19, www.gaufrehouplines.com

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a Belgique n’a pas le monopole de la gaufre. Le nord de la France peut aussi s’enorgueillir d’un péché de gourmandise. Celui-ci n’est pas carré avec des trous, ni rond et recouvert de sucre, mais fin et fourré à (presque) tout ce que vous voulez : il s’agit de la gaufre flamande. à Houplines (près d’Armentières), Jean-François Brigant perpétue depuis 18 ans « une tradition qui remonte au temps où les mamies offraient des gaufres à leurs petits-enfants venus leur souhaiter la bonne année ». Un morceau de patrimoine local qui se déguste comme une madeleine de Proust et que ce quinquagénaire ne voudrait pas qu’on oublie. Il lui a donc dédié un musée. C’est à côté d’anciens poêles flamands et d’une improbable collection de gaufriers que ce fils et petit-fils de charcutier nous explique qu’il a quitté son poste de directeur de restauration pour reprendre cet atelier. Et c’est avec des outils issus d’une autre époque que cet artisan travaille une pâte dont la recette, imaginée en 1933, a été rachetée « à une grand-mère des Flandres ». Mais, qu’elle soit au spéculoos, au pain d’épice ou au Whisky de Wambrechies, inutile de cuisiner le Nordiste : « c’est un secret ».


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Paris met son grain de sel Texte & photo Marine Durand

La Gaufrerie, 5 rue Marie Stuart, 75002 Paris, www.lagaufrerie.fr

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quelques minutes du rush de midi, Jonathan Desaindes s’affaire. Les premiers clients pénètrent déjà dans la salle chaleureuse, aux murs de pierre et poutres apparentes. En moins de 10 mois, ce trentenaire a réussi son pari : implanter dans la capitale française le premier restaurant de gaufres salées. Presque par hasard. Après trois ans passés dans la banque, à Monaco, et une première reconversion dans l’immobilier, ce fils de boulanger natif de Cannes cherche un concept inédit, et se lance en avril 2014. « Au début, je mettais tous les ingrédients dans la pâte ! Puis j’ai compris que les gens avaient besoin de visuel ». Farines multiples - épeautre, sarrasin, quinoa, tomate séchée - produits de saison, recettes inventives (il a osé la gaufre burger !)... Sa Gaufrerie cartonne. Mais alors, pas trop peur que la folie s’essouffle ? « Cette tendance est une chance, les gens sont en train d’adopter la gaufre salée ». En attendant, quid de la prochaine carte, renouvelée tous les trois mois ? Surgissent les mots « raclette », « saumon gravlax », « chantilly citronnée ». Mais Jonathan n’en dira pas plus : « à cause de vous, les Belges vont me piquer l’idée ! »


Interview

La confrérie de la gaufre liégeoise Propos recueillis par Julien Damien Photos © DR

Jacqueline Vervoort est Grand Maître de cette très sérieuse institution appelée « la Strème »*. Celle qu’on surnomme « gaufrette » sort du moule. D’où vous vient cette passion pour la gaufre liégeoise ? J’ai toujours vu faire des gaufres. Comme dans Astérix, je suis tombée dans la pâte quand j’étais petite ! Rien que d’en parler j’ai les papilles gustatives toutes retournées. Quel est le but de votre confrérie ? La gaufre liégeoise tombait dans l’oubli, surtout celle à la cannelle. Il fallait la remettre au goût du jour. Désormais, c’est bien reparti. Combien de recettes avez-vous créées ? Une dizaine. à la pomme de terre, sans sucre et qu’il faut déguster accompagnées. Les gaufres ont leur place dans tout le menu : entrée, plat et dessert. Quelle est la différence fondamentale avec la gaufre bruxelloise ? La Bruxelloise est composée d’une pâte très légère. Toute seule, elle ne s’avale pas bien. Pour l’apprécier, il faut y ajouter du sucre, des fruits,

de la chantilly, du chocolat. Tandis que notre gaufre à la cannelle ou au sucre perlé, vous la placez au four (je conseille de la manger tiède), et elle se suffit à elle-même. La frite belge revendique son inscription au patrimoine mondial de l’humanité. Et la gaufre liégeoise ? J’ai été contactée par la ville et la province de Liège. On va d’abord essayer de la hisser au même plan que le café liégeois pour qu’elle soit ensuite reconnue au même titre que la frite. Quels sont vos arguments ? On mange des gaufres partout ! Je ne sais pas combien de doigts il me faudrait pour compter le nombre de fois où j’ai été contactée par des journalistes : chinois ou canadiens… On vient du bout du monde pour écrire sur la gaufre ! * « étrenne » en patois wallon. à visiter / www.lastreme.be


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tion au sommet

Dégusta

Meert (Lille - Bruxelles - Paris) Depuis 1761 cette confiserie tout en boiseries, dorures et fer forgé regorge de trésors sucrés. Et on s’y presse avant tout pour la spécialité de la maison, la gaufre fourrée, fabriquée à la main dans l’atelier de la rue Esquermoise. Soigneusement empaquetée, ovale, plate et dorée, la gaufre Meert se caractérise par son alliance de beurre, de vergeoise et de vanille de Madagascar… Parmi ses illustres adorateurs on note Charles de Gaulle qui s’en faisait livrer des boîtes à domicile, Léopold 1er, Marguerite Yourcenar ou Winston Churchill. La gaufre évolue au fil des saisons et se décline en parfums étonnants : pistache-griottes, citron meringué ou framboise et poivre de Sichuan. Bref, on l’aura compris, venir chez Meert c’est entrer dans une bonbonnière de luxe et fondre de plaisir. M.P. Boutiques : 27 rue Esquermoise, Lille ; 7 Galerie du Roi, Bruxelles ; 3 rue Jacques Callot & 16 rue Elzévir, Paris ; www.meert.fr

Gaufre-for t

Pour sortir de la traditionnelle forme rectangulaire, versez du côté geek de la force avec ce gaufrier - clavier azerty de Chris Dimino … ou dégustez les gaufres en forme de chaises, de tables ou de lampe des designers Ryosuke Fukusada et Rui Pereira. www.thekeyboardwaffleiron.com www.saporedeimobili.com

Depuis 1962, chaque album des Aventures de Néron et Cie, du Flamand Marc Sleen, se termine par une dégustation de gaufres…. Mais à quoi ? Jus de citron vert, œufs de lump ou réglisse ? La réponse se trouve certainement dans Happy Gaufres répertoriant près de 30 recettes, salées ou sucrées. Les Aventures de Néron et Cie, éd. Erasme, 90 tomes, 10>5 € // Happy Gaufres (éd. Hachette Pratique), de Claire Tellier. 80 p., 7,99€



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Todd Baxter

L’enfance de l’art

« Souviens-toi du futur », semblent nous dire ces images teintées de science-fiction vintage. Et faussement naïves. On l’aura compris : le travail de Todd Baxter est fait de contrastes. Son esthétique typique des années 1970, très colorée, affiche une autre constante : des enfants ou adolescents mis en scène dans des environnements hostiles. La poésie qui s’en dégage rappelle sacrément Wes Anderson. L’ancien photographe publicitaire ne nie d’ailleurs pas cette influence : « J’étudiais l’art au début des années 1990 et, à l’époque, on avait le sentiment que tout devait être morose. Lorsque j’ai vu Rushmore (1998), ce fut comme un rayon de soleil ». Retour sur un voyage entre deux âges.


C

et Américain installé à Los Angeles adore « la littérature enfantine sombre, comme Les Contes de Grimm, où les gamins se confrontent au danger ». Todd passe parfois des mois à chercher l’inspiration autour de ce thème de l’enfance « où tout est à la fois mystérieux, merveilleux et horrible ». Il dessine d’abord sur un carnet, prend moult clichés avant de se lancer dans une longue étape de pré-production (choisir le lieu, les

accessoires, construire le décor, etc.). Puis vient le « shooting ». Selon lui, « une image n’est pas la photographie de quelque-chose, mais son idée ». La puissance poétique et symbolique de ses créations réside surtout dans le fait qu’elles racontent une histoire. Particulièrement dans le Project Astoria que nous présentons ici. écrite avec sa femme, Aubrey, cette utopie prévue en huit séries a pour cadre un système solaire éloigné et colonisé par l’Homme


« peu de temps après que Neil Armstrong a marché sur la Lune », puis finalement laissé à l’abandon... « 15 ans plus tard, on suit la première génération d’Astoriens, devenus adolescents, dans un monde en délabrement. Ici, j’explore la transition entre l’enfance et l’âge adulte ». Le choix de ce sujet n’a rien d’innocent quand on sait les ascendances de Todd Baxter : « Mon père et mon grand-père étaient ingénieurs pour le US Space Program. Ils

étaient chargés de construire des fusées nucléaires qui emmèneraient les humains sur Mars. Mais une fois que nous nous sommes posés sur la Lune, la conquête spatiale a été considérée comme terminée, et ce projet démantelé. Aujourd’hui j’imagine ce à quoi ça aurait pu ressembler…». Que voulezvous, on ne survit pas à son enfance. J.D. à visiter / www.baxterphoto.com



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Retrouvez l’interview de Todd Baxter sur lm-magazine.com




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Game of Rone Propos recueillis par Julien Damien Photo Timothy Saccenti


Réservé, (vrai) modeste, Erwan Castex, alias Rone, a mis longtemps à assumer son statut de musicien. Pour la discrétion, c’est raté. Car depuis Spanish Breakfast et Tohu Bohu, le Parisien s’est imposé comme l’une des références de la scène électronique française avec des morceaux inventifs, mélodiques et mutants. Son 3e album, Creatures, fait la part belle aux collaborations - François Marry (sans ses Atlas Mountains), le violoncelliste Gaspard Claus ou Etienne Daho - et pousse plus loin encore la recherche musicale. Rencontre.

Comment définiriez-vous Creatures? Plus ouvert aux collaborations que ne l’étaient mes deux premiers albums. Entre-temps je suis devenu papa d’une petite fille, j’ai l’impression d’avoir un peu « grandi » et je pense que ça se sent dans ce disque, je l’ai voulu moins autocentré. Vous poussez également plus loin l’expérimentation... Oui, mais c’est aussi lié à mes machines. Parfois, elles devenaient presque incontrôlables, s’exprimaient elles-mêmes… comme si elles abritaient des créatures ! J’ai improvisé avec les boutons, joué un peu avec le hasard et utilisé ces accidents.

« Mes machines devenaient presque incontrôlables, comme si elles abritaient des créatures ! »

Avez-vous réalisé cet album dans de bonnes conditions ? Sans trop de pression ? De toute façon, je suis toujours anxieux ! Mais j’ai appris à travailler là-dessus. C’est plutôt entre le premier et le deuxième disque que j’ai vraiment eu un souci. De quel ordre ? J’avais conçu Spanish Breakfast tout seul dans ma chambre de bonne, tranquillement, sans même me rendre compte que je composais un album. Mais pour Tohu Bohu, j’étais complètement paralysé par la pression.

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Pourquoi ? Parce que la musique n’était plus simplement un amusement, elle est devenue un job. J’ai résolu ce problème en prenant du recul et en m’installant à Berlin (ndlr : entre 2011 et 2014). Pour Creatures, je suis parvenu à rejouer de la musique d’abord pour moi, sans penser à plaire. Je me suis enfermé dans une maison de campagne à Paris pour composer, avant d’entrer en studio. Comment sont nées les collaborations ? De belles rencontres. Pour celle avec Etienne Daho par exemple, on pourrait croire qu’il s’agit d’un « arrangement » entre maisons de disques. mais pas du tout ! On est entré en contact, sans aucun intermédiaire.

à écouter / Creatures, InFiné, sortie le 09.02 à vister / rone-music.com soundcloud.com/rone-music

Quel a été le prétexte ? Il s’est d’abord tourné vers moi pour que je remixe En surface, un titre de son dernier album. à la suite de cette première collaboration, on échangeait par téléphone. Il m’appelait pour prendre des nouvelles de ma fille. Alors, je lui ai proposé de chanter sur mon disque. Il s’est tout de suite accaparé le morceau (Mortelle).

Vous étiez d’abord étudiant en cinéma. Concevez-vous votre musique de façon visuelle ? J’envisage chaque morceau de manière narrative : avec un début, une fin... En fait, c’est tout l’album qui raconte une histoire, en ménageant différentes ambiances, des moments avec de la tension, d’autres plus doux. J’avais envie d’exprimer différentes émotions en une heure, pas me contenter d’une seule atmosphère. Comme dans un film ou dans la vie. Justement quelles sont vos influences ? Elles sont toujours aussi vastes et bordéliques ! Elles vont d’Actress à Miles Davis en passant par la musique classique qui, je pense, reste ce qu’il y a de plus proche de la musique électronique. J’essaye de combiner toutes mes influences dans un album. C’est la raison pour laquelle on a du mal à me qualifier, mais ça me plaît de brouiller 29.01, Tourcoing, Le Grand Mix, 20h, 16/13/5€, www.legrandmix.com les pistes (rires).



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© DR

musique

Soirée New Beat à l’heure où la French touch est à l’honneur, l’Hybride décale le focus musical vers le nord en consacrant une soirée au phénomène New Beat, plus sombre et hypnotique. Entre 1987 et 1989, c’est bien la Belgique qui fut l’épicentre de la scène électronique européenne. Jeunes Flamands et Wallons, mais aussi Français, Néerlandais, Britanniques, se précipitaient alors chaque week-end dans des clubs tels l’Ancienne Belgique, à Anvers ou le Boccaccio à Gand. Plongez au cœur de cette histoire tout d’abord à travers le documentaire The Sound of Belgium, présenté par son auteur Jozef Devillé, puis lors de la silent party avec DJ Saiz. Car la New Beat se danse au moins autant qu’elle s’écoute ! Marie Pons 17.01, Lille, L’Hybride, 20h30, 5€, www.lhybride.org

Jesse Rose

© DR

Au même titre qu’Erol Alkan, Jesse Rose incarne depuis 17 ans une certaine idée de la scène électro anglaise, en bon tenancier d’une deep house planante, mais aussi teintée de jazz, de blues et lorgnant à l’occasion du côté du funk ou du disco (Touch my horn, Fly tonight pour ne citer que deux titres). En ce début janvier, le producteur et DJ ne pouvait pas trouver meilleur écrin que le Magazine Club, centre névralgique du clubbing lillois et place to be des accros au dancefloor. Si toutefois le Nouvel An ne vous a pas totalement cassé les reins et la tête... J.D. Jesse Rose + Johan + Cimaï, 03.01, Lille, Magazine Club, 23h, 8€, www.magazineclub.fr



Chassol

Des sons en lumières Texte Thibaut Allemand Photo Cyril Vessier

« Comment va-t-on passer après ça ?! », avait lâché, inquiet, François Marry après la performance de Chassol au Grand Mix à Tourcoing, le 12 avril dernier. Vrai que le leader de Frànçois and The Atlas Mountains pouvait s’inquiéter. Mêlant musique et images dans un kaléidoscope sonore et visuel, Chassol avait mis l’Inde à l’honneur comme personne. Et s’attaque désormais à la Guadeloupe. Au Vivat. Comme un signe.

C

ar de vivats, il sera évidemment question. La venue du génie parisien est l’occasion d’un joli partenariat entre deux structures. En sus du théâtre et de la danse, le Vivat d’Armentières était coutumier des musiques classiques ou du monde. « N’étant pas dans les réseaux de musiques actuelles, nous avons sollicité Le Grand Mix », explique Pascal Cebulski, du Vivat. « On a tout de suite pensé à Chassol, après la claque qu’il nous avait mise ! » poursuit Vincent Nocrékul, du Grand Mix. L’intimisme du Vivat sied à ravir à ces belles retrouvailles avec un artiste à part, dont la méthode (harmoniser les images pour en tirer d’enivrantes mélopées) est aussi précise et instinctive que fascinante et obsédante. En première partie, L’ex-Encre Yann Tambour dévoile Stranded Horse Sextet. L’as de la kora se voit donc bien entouré pour livrer une pop moderne aux accents ancestraux, puisant dans le répertoire actuel ou presque (des reprises de T-Rex ou des Smiths, parfois) sur un instrument multi séculaire. Et qu’on 14.01, Armentières, Le Vivat, 20h, 21/14/7€ 30.01, Bruxelles, Halles de Schaerbeek, 20h30, 18>3e ne nous parle pas de world music !



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Nina Kraviz © DR

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Les Transardentes C’est LA nuit où la Cité Ardente porte probablement le mieux son nom… Liège accueille la Grand’messe électro (12 000 personnes en moyenne) de ce début d’année. Une date unique, pour 4 scènes déployées dans le complexe de la Halle des Foires. La sélection oscille entre techno, house et sonorités dubstep ou drum’n’bass (le duo anglais Sigma, Friction ou Black Sun Empire). On y va pour vibrer au son glacial de Gesaffelstein, pour la deep house raffinée de Nina Kraviz ou l’acid-trip de l’anglais Daniel Avery. Sans oublier la belle place réservée aux talents belges, parmi lesquels Alix Perez, Lost Frequencies ou le tout jeune Faisal. Une excellente façon de prolonger les festivités. Marie Pons 31.01, Liège, Halle des foires, 18h, 42e + frais de réservation, www.lestransardentes.be

Jay-Jay Johanson On aurait tort de réduire Jay-Jay Johanson à ses coupes de cheveux, mais on ne peut s’empêcher de les convoquer pour suivre sa carrière. De la belle mèche blonde au service du trip-hop Whiskey au mémorable mulet orange accompagnant l’electro vintage d’Antenna, le Suédois a beaucoup expérimenté avant de revenir à une forme de simplicité. Et de caler définitivement sa voix sur celle de Chet Baker - duquel il se revendique. La sobriété capillaire qu’il affiche désormais sied parfaitement à son 8e album, Cockcroach : léger, élégant et efficace. Julien Damien © DR

20.01, Lens, Le Colisée, 20h30, 11,80>6,20€, www.villedelens.fr



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Interpol

Ô rage ! Ô désespoir… Texte Julien Damien Photo Pip Cowley

Ils sont tirés à quatre épingles, tout de sombre vêtus, avec à leur tête la réincarnation vocale de Ian Curtis. Oui, la tournée mondiale de la formation la plus classe de la planète passe bien par Bruxelles. Allumez la lumière !

I

l y a quelque chose de l’ordre du sacré dans le noble fait d’assister à un concert d’Interpol. Déjà, les groupes de rock de cette envergure ne se comptent plus que sur les doigts d’une main (vous pouvez chercher…). Et, depuis Turn On The Bright Lights, ses prières post-punks ne cessent de hanter beaucoup d’entre-nous. Et tant pis si Carlos Dengler s’en est allé avec sa Fender, emportant avec lui un peu de l’âme cold-wave originelle. Il suffira de quelques secondes à Paul Banks et sa voix de baryton torturé pour nous rappeler que les New-Yorkais furent parmi les premiers à traduire aussi fidèlement un zeitgeist désenchanté et rageur. Quatre ans de silence ont à la fois tout et rien changé. El Pintor, cinquième album et anagramme d’un nom qu’on a craint de voir disparaître, n’est pas qu’un remaniement interlope de sons piochés dans un lointain passé. Sur ce dernier opus, le bien nommé All The Rage Back Home affiche les intentions de la formation : il s’agit de poursuivre l’aventure, mais en empruntant d’autres chemins musicaux. Le titre My Blue Supreme, éclairé par la guitare de Daniel Kessler (forcé de sortir du bois) et les aigus inédits du discret Paul Banks, 24.01, Bruxelles, Forest National, annonce à lui seul les promesses du renouveau. 20h, 36€, www.forestnational.be Osons dire : de la résurrection.



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© DR

Zoot Woman Derrière ce trio on trouve Stuart Price, l’un des grands architectes de la poptronika de ces quinze dernières années. Faux Frenchie - sous le blaze de Jacques Lu Cont - des Rythmes Digitales (Hey You What’s That Sound ?), artisan du virage dance de Madonna (Confessions on a Dance Floor) avant de produire deux titres de New Order… L’Anglais a aussi trouvé le temps de fonder ce charmant petit groupe qu’est Zoot Woman. Auteur de quelques pépites synthpop depuis 2001 (Living In A Magazine) jusqu’à aujourd’hui (Star Climbing). 16.01, Anvers, MuziekcentrumTrix, 19h30, 18/15€

Sam 03.01

Sam 10.01

Skank N´ Bass: NYE Afterparty Anvers, Petrol Club, 22h, 16/13e

Comme les rois mages en Galilée Valenciennes, Le Phénix, 19h, 16>9e

Mer 07.01 Soledades - Otango Lille, Théâtre Sebastopol, 20h, 45>36e

Jeu 08.01 Dal Sasso Belmondo Big Band : John Coltrane revisited Amiens, Maison de la Culture d’Amiens, 20h30, 32>15e

Ven 09.01 Emily Loizeau Louvain, Ferme du Biéreau, 20h30, 25/23e

Airnadette (air guitare) Lille, Théâtre de l’Hôtel-Casino Barrière, 20h30, 25e Marcel Dettmann Lille, Le Magazine, 23h, 12e

Mar 13.01 Brahms Version Concerto (Onl) Lille, Nouveau Siècle, 20h, 45>5e

Mer 14.01 Dans un nuage de fumée (cabaret) Lille, Opéra, 18h, 10/5e

Jeu 15.01 Manu Katché Quartet Aulnoye-Aymeries, Théâtre Léo Ferré, 20h, 15/10e

Emily Loizeau © Diane Sagnier

Marcel Dettmann © DR

certs Csoén lection

Melanie de Biasio Courtrai, Schouwburg Kortrijk, 20h, 23/20,70e Two Tone Club + Buster Shuffle… Dunkerque, Les 4 Ecluses, 20h30, 10/7e

Ven 16.01 I love Rock’n Pop Lille, Théâtre de l’Hôtel-Casino Barrière, 19h30, 35e Messe en si mineur (Bach) Tourcoing, Théâtre Municipal Raymond Devos, 20h, 25>6e Two Tone Club + Buster Shuffle Bruxelles, Magasin 4, 20h, 10e Beverly Jo Scott & band Mouscron, Centre Culturel Marius Staquet, 20h30, 29/25e Lofofora + Lomechusa Calais, Centre Culturel Gérard Philipe, 20h30, 12/7/4e Oldelaf + Sancho Beauvais, L’Ouvre-Boîte, 20h30, 18/16/13e


Sam 17.01 Blanche neige, le spectacle musical (André Manoukian + Guy Grimberg) Anzin, Théâtre muncipal, 16h, 30e

Tagada Jones + Les Sales Majestés+ Black Bomb A + Burning Lady Oignies, Le Métaphone, 20h30, 17>11e Psykup + Tang Dunkerque, Les 4 Ecluses, 20h30, 12/9e

Dim 18.01

Isaac Delusion © Antoine Robin

Messe en si mineur (Bach) Tourcoing, Théâtre Municipal Raymond Devos, 15h30, 25>6e

Mer 21.01 Flamenco ! Lille, Opéra, 18h, 10/5e Mimi (Scènes de la vie bohème) Arras, Théâtre d’Arras, 20h, 20>9e Paul Personne Lille, Le Splendid, 20h, 29e Booker T. Jones Louvain, Het Depot, 20h, 30/27e Booker T. Jones © DR

Arbeid Adelt! Eeklo, N9, 21h, 13/10e

Les petits chanteurs à la gueule de bois Ath, Château Burbant , 16h, 15/12e/gratuit Low + Soak Anvers, Trix, 19h30, 28/25e

Lun 19.01 Isaac Delusion + FùGù MANGO Tourcoing, Le Grand Mix, 19h, 12/5e/gratuit abonné I love Rock’n Pop Lille, Théâtre de l’Hôtel-Casino Barrière, 19h30, 35e

Mimi (Scènes de la vie bohème) Arras, Théâtre, 20h, 20>9e

Mar 20.01

Alpha Blondy Bruxelles, Bozar, 20h, 30e

Les Petits Chanteurs à la Gueule de Bois Mouscron, Centre culturel, 20h30, 13/9/1e

Vianney Lille, La Péniche, 20h, 15/14e

Mimi (Scènes de la vie bohème) Arras, Théâtre, 20h30, 20>9e

Jeu 22.01 Booker T. Jones Anvers, De Roma, 20h30, 26/24e François & The Atlas Mountains Lens, Le Colisée, 20h30, 11,80>6,20e Manu Katché Quartet Calais, Centre Culturel Gérard Philipe, 20h30, 12/7/4e

Celui qui a fait ses armes au sein de la scène grunge de Seattle dans les 90’s (The Screaming Trees) a aujourd’hui 50 ans et trace son chemin avec son « band ». Son dernier opus Phantom Radio sorti au mois d’octobre est hanté par les synthétiseurs et le post-punk anglais. Pour autant, la voix de Mark reste profonde et les racines américaines toujours bien présentes. En concert on imagine sans peine les paysages arides du grand ouest. Qui a dit folk synthétique ? 30.01, Bruxelles, Ancienne Belgique, 20h, Complet !

© Gullick

Mark Lanegan Band


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© Dimitri Coste

Brigitte Faire du neuf avec du vieux ? Une recette éculée, convenons-en. Pourtant Brigitte nous rappelle que les prénoms anciens sont à la mode et évite les écueils du recyclage gratuit. L’über-sexy duo ne fait pas que réactiver un son disco déjà prêt à l’emploi pour le déhanchement. Son comeback voluptueux se veut un hommage à quelques femmes libérées qui ont marqué l’histoire de la musique, de Gloria Gaynor à Diana Ross. Avec une touche de second degré en plus. 31.01, Bruxelles, Ancienne Belgique, 20h, Complet ! 21.04, Lille, L’aéronef, 20h, 29,70€

Ven 23.01 C.Bruneel, S. Walnier, K.Mizumoto : Autour de Fierrabras, Die Schöne Müllerin (F. Schubert) Bruxelles, La Monnaie, 12h30, 8e Bestiaire - Concert par l’ensemble Clément Janequin Lens, La Scène du Louvre-Lens, 19h, 20>10e I love Rock’n Pop Lille, Théâtre de l’Hôtel-Casino Barrière, 19h30, 35e Djangofolllies Bruxelles, Les Riches-Claires, 20h30, 16e

Bertrand Belin © Ph. Lebruman

Manu Katché Arques, Centre Culturel DanielBalavoine, 20h30, Tarif : 25e / 20e Pass : 15e

We Are Enfant Terrible © Stephane Hervé

certs Csoén lection Zebda +Tacite Oignies, Le Métaphone, 20h30, 17/11e Kent Béthune, Le Poche, 20h45, 10/7/4/3e

Sam 24.01 Matin brun (théâtre musical animé) Hazebrouck, Centre André Malraux, 19h, 10/7/6e Die Antwoord Anvers, Lotto Arena, 20h, 35e Hooverphonic Bruges, Concertgebouw, 20h, 39/34e We Are Enfant Terrible + Vilain + Grifon + Orco Dj set Lille, L’Aéronef, 20h, 15>5e + Goûter concert, 16h, 5/3/1e Liesa Van der Aa Gand, Handelsbeurs, 20h15, 20/17e Bertrand Belin Béthune, Théâtre de Béthune, 20h30, 16/14e Guerilla Poubelle + Justin(e) + Charly Fiasco + Nina’School Dunkerque, Les 4 Ecluses, 20h30, 10/7e

Magda Bruxelles, Fuse, 23h, 13/10,50/8e Championnat National De Brass Band (Black Dyke Band) Lille, Nouveau Siècle, 20h, 30/20/5e

Dim 25.01 Matin brun (théâtre musical) Hazebrouck, Centre André Malraux, 16h, 10/7/6e

Lun 26.01 Grant Lee Philips + Howe Gelb Anvers, Arenbergschouwburg, 20h15, 16,50/13,50e


Pere Ubu Lille, L’Aéronef, 20h, 18/11/8e

DJ Vadim © DR

Hooverphonic Courtrai, Schouwburg Kortrijk, 20h15, 31>23.40e

Ven 30.01 Tricky © DR

I love Rock’n Pop Lille, Théâtre de l’Hôtel-Casino Barrière, 19h30, 35e

Mar 27.01 Tricky Bruxelles, Ancienne Belgique, 20h, 25e Idomeneo (Mozart) Lille, Opéra, 19h30, 69/49/30/13/5 e Grant-Lee Phillips + Howe Gelb Louvain, Het Depot, 20h, 17/15e

Jeu 29.01 Idomeneo (Mozart) Lille, Opéra, 19h30, 69/49/30/13/5 e Lambchop plays Nixon Bruxelles, Ancienne Belgique, 20h, 23e

Quatuor Belcea Lille, Opéra, 20h, 23/18/14/9/5 e

DJ Vadim + Mister Critical Hasselt, Muziekodroom, 22h, 5e

Melanie de Biasio Hasselt, Cultuurcentrum, 20h, 22e

Mina Tindle Tourcoing, maison Folie Hospice d’Havré, 20h, 10/7/5e

Dagoba Arras, Le Pharos, 20h30, 9/3e

Stephan Eicher Hazebrouck, Centre André Malraux, 20h, 29/24e

Imbert Imbert Béthune, Le Poche, 20h45, 7/5/4/3e Burning Heads Beauvais, L’Ouvre-Boîte, 20h30, 17,70e

Sam 31.01 Jean-Louis Murat Bruxelles, Botanique/Orangerie, 20h, 26/23/20e Les Mauvaises Langues Lille, Le Splendid, 20h, 16e

Fills Monkey Oignies, Le Métaphone, 20h30, 16>10e Salvatore Adamo Lille, Théâtre de l’Hôtel-Casino Barrière, 20h30, 41e Orchestre National de Barbes Boulogne sur Mer, Espace de la Faïencerie, 21h, 8/6/5e Tendance Europe : Guillaume Perret & The Electric Epic Amiens, Maison de la Culture, 22h, 10>22 e

04>06.02, Lille, L’Antre 2, 20h, 8/5/1€ par soir, www.antrazik.fr Prog : Imbert Imbert + Radio Elvis, La Demoiselle Inconnue + Klô Pelgag, Askehoug + Ben Mazue,

www.lm-magazine.com

Klô Pelgag © DR

Festival Antra’Zik Ringarde, la chanson française ? Le festival Antra’Zik démontre le contraire. La recette ? Une programmation qui manifeste un goût pour les bons mots et la curiosité. Pour cette 7e édition, la formule de cet événement produit par l’Université Lille 2 n’a pas changé : durant trois soirs, deux artistes se partagent l’intimiste salle de l’Antre 2. On recommande l’atypique contrebasse d’Imbert Imbert, le flow de Ben Mazué ou encore les textes de la Québécoise Klô Pelgag, chaînon manquant entre Camille et Mansfield Tya.


48 disques

Disque du mois

Bc Camplight How to Die in the North (Bella Union/Pias Coop)

Trois morceaux de ce How To Die in the North comportent le mot « Love » dans leur titre. Et ce n’est pas un hasard si on songe au bien nommé groupe d’Arthur Lee à l’écoute de ce premier grand disque de 2015. Brian Christinzo a l’ambition de l’auteur de Forever Changes. Et son écriture musicale toute en volutes mélodiques et arabesques harmoniques fait sonner ce troisième opus comme un trésor caché des années 1970. Il renferme des secrets merveilleux tels Love Isn’t Anybody’s Fault ou le déjà connu Thieves in Antigua - depuis combien de temps n’aviez-vous pas été à ce point emportés par des cuivres mariachi surgissant au beau milieu d’un morceau ? Avec une infinie délicatesse défilent les teintes soyeuses, tropicalia et même funk déconstruit sur le très Dirty Projectors Lay me on the Floor. Mais ce sont surtout des chefs-d’œuvre de blue-eyed soul viciée mais caressante qui s’enchaînent avec bonheur malgré la tristesse latente. Comme si le cœur brisé d’un Daniel Johnston avait connu les ors d’un studio cinq étoiles pour se déployer : folie douce. Débarqué d’une Philadelphie pourvoyeuse de talents (il fut proche de War on Drugs), BC Camplight a trouvé la grâce dans le ciel pluvieux de Manchester. L’histoire est trop belle pour être vraie ? ça tombe bien, l’album aussi. Sortie le 19.01. Rémi Boiteux

Archive Restriction (Dangervisit / PIAS)

Restriction est fait de bruits, de fureur, d’une tristesse chantée par quatre sublimes voix (masculines et féminines)… et porte surtout très mal son nom ! Darius Keeler et Dan Griffiths se sont en effet tout permis, eux qui souhaitaient, neuf mois après Axiom, BO (réussie) d’un moyen-métrage qu’ils ont eux-mêmes réalisé, faire cohabiter « 12 entités distinctes et aussi puissantes ». Ainsi Feel it, mariage étrange de skiffle et de dub, ouvre un 11e opus difficile à cerner, certes implosif, souvent halluciné, mais sans véritable identité ni génie. On navigue entre ballades au piano / synthé, plages de guitare et trip-hop sans trop savoir pourquoi. On va encore les ranger dans la bonne vieille case fourre-tout du « rock progressif » - ce qu’ils n’aiment pas - mais c’est de leur faute. Julien Damien


Panda Bear

Belle And Sebastian

Panda Bear Meets the Grim Reaper

Girls In Peacetime Want To Dance

(Domino)

(Matador/Wagram)

Au sein de la bande de cas qu’est Animal Collective, Noah Lennox, aka Panda Bear, est lui-même à part. Sa férocité, comme celle de son totem, est cachée sous un duvet moelleux. Ici, le single Mr Noah, quasi-tube qui donne envie de sauter en l’air, ouvre joliment les hostilités. La machine poursuit sa course folle avec le fantastique Butcher Baker Candlestick Maker. Plus loin, on s’assoupit rêveur dans la bulle de Tropic Of Cancer aux beaux airs de berceuse de Noël. Avant de transpirer à nouveau avec un Principe Real qui semble répondre au dingo Amanita de la maison-mère. La patte typique de l’artiste imprègne Boys Latin : harmonie lancinante de voix qui s’envolent. Un peu de remplissage empêche le tout de prétendre au grand œuvre, mais on parie que le Panda s’en fout. Rémi Boiteux

Quatre ans après un Write For Love en roue libre et plutôt raté, Belle And Sebastian revient en pleine forme. La bande à Stuart Murdoch investit des champs synthétiques et fait clairement de l’œil aux Pet Shop Boys (The Party Line, Enter Sylvia Plath). Par ailleurs, la fierté de Glasgow se coltine la réalité du monde à travers les yeux d’une jeune femme, Allie. Où l’on évoque aussi bien la situation au Moyen-Orient que le retour de la droite au pouvoir (The Cat With The Cream). Le tout avec élégance, légèreté et un sens mélodique décidément hors-classe. En sus, les derniers rois d’Écosse décochent Ever Had A Little Faith, merveille pop acoustique et « velvétienne » qui n’aurait pas dépareillé sur l’inusable If You’re Feeling Sinister (1996). Thibaut Allemand

Viet Cong Viet Cong (Jagjaguwar/PIAS)

Cassette, le riche EP confidentiel du groupe, faisait la part belle à une garage-pop sixties immédiatement accrocheuse. Mais ici les choses se corsent et le ton se durcit. On pourra tiquer le manque de fraîcheur, surtout venant d’une jeune formation. Mais, c’est plutôt de froideur dont il s’agit, et sur ce versant Viet Cong impressionne. Un souffle post-punk glaçant vient cingler les oreilles dès Newspaper Spoons. Pourtant le morceau finit par s’ouvrir in extremis à la lumière, et il y a toujours une étincelle, aussi ténue soit-elle, à dénicher dans ces titres qui dessinent l’improbable pendant batcave d’Animal Collective. Il faut se frotter au long pilonnage assourdi qui ouvre l’incantatoire puis exaltant March of Progress : Viet Cong engendre des chansons littéralement monstrueuses. Rémi Boiteux


50 livres

Livre du mois

Kris et Maël Notre Mère La Guerre – Chroniques (Futuropolis)

La Première Guerre Mondiale en bande dessinée est souvent réduite à Tardi. Ce n’est que justice. Or, d’autres se sont penchés sur cette naissance douloureuse du xxe siècle avec une approche différente – et autant de talent. C’est le cas du scénariste Kris et du dessinateur Maël. Entre 2009 et 2012, les deux trentenaires nous ont tenus en haleine avec Notre Mère La Guerre. On y suivait le lieutenant Vialatte, issu de la gendarmerie, et le commandant Janvier enquêtant sur les meurtres de plusieurs femmes retrouvées mortes dans les tranchées. L’intrigue était passionnante mais, comme dans tout bon polar, presque secondaire par rapport au contexte : la guerre, le front et l’arrière, bourgeois et prolétaires dans la boue... Autant de choses que l’on avait lues chez Céline, Maurice Genevoix ou Gabriel Chevallier. Chevallier, justement, auteur de l’indispensable La Peur (1930) et auquel Kris rend hommage, ainsi qu’à Péguy, Louis Barthas, Vera Brittain... Ces destins et témoignages l’ont nourri durant la conception de ce chef-d’œuvre. Chroniques leur rend hommage en de courtes nouvelles dessinées par Maël et d’autres (Vincent Bailly, Damien Cuvillier, Hardoc et Jeff Pourquié...). Une belle conclusion en forme d’ouverture. 72p., 16€. Thibaut Allemand

Juan José Saer Glose (Editions Le Tripode)

En octobre 1961, le jeune comptable Léto croise dans une ville sans nom une connaissance surnommée le Mathématicien. Celui-ci lui narre la fête d’anniversaire d’un ami en commun. Problème, il n’y est pas allé. Son récit s’appuie sur ce que lui a raconté Bouton, présent à la soirée, mais considéré comme peu fiable… Par cette mise en abyme aux effets comiques, Juan José Saer déploie les chimères de notre représentation du passé et les virtualités de l’interprétation. L’extrême finesse narrative de l’auteur approche, dans un souffle lucide, « l’excès rugueux et changeant du perceptible », où l’imagination recompose le réel au revers d’une signification en fuite. On rit de l’angoisse que peut procurer une tâche sur un pantalon, on s’interroge sur la nécessité absolue de l’instinct, et on salue cette très belle réédition d’un roman sublime. 280p., 20€. J.B.


Jiro Taniguchi

Tova Reich

Les Gardiens Du Louvre

Mon Holocauste (Cherche-Midi)

(Futuropolis / Les Editions du Louvre)

Holocauste Connections, Inc. C’est le nom de la société dirigée par Norman Messer dont le père, Maurice, est directeur du musée de l’Holocauste de Washington. La famille «prospère» sur la mémoire du génocide juif, l’entreprise décernant un certificat (« Holocauste compatible ») à des défenseurs des animaux, des droits humains, etc. N’en déplaise aux dieudonnistes, cette satire ne rit pas du génocide. Au contraire : en se moquant de la banalisation de celuici, l’écrivain Tova Reich, fille de rabbin et ex-épouse du directeur du musée de l’Holocauste de Washington (tiens tiens...), souligne en creux l’unicité de la Shoah. Finalement, un ouvrage moraliste – au sens premier du terme – mais encore loin du génie d’un Edgar Hilsenrath (Le Nazi et Le Barbier, 1971). 358p., 19,50€. Thibaut Allemand

Dessinateur de l’intime aux accents fantastiques (Le Journal De Mon Père, 1994, Quartier Lointain, 1998), JiroōTaniguchi met son art au service de celui des autres et revisite le syndrome de Florence (cette crise d’angoisse qui s’empare d’individus exposés à une surcharge d’œuvres d’art). Souffrant et fiévreux, un Nippon en séjour à Paris visite le Louvre trois jours durant. En proie à des hallucinations, il découvre l’envers du décor, dialogue (vraiment !) avec les œuvres (La Victoire de Samothrace, au hasard) et les artistes (Van Gogh tend l’oreille, par exemple). Enfin, on en apprend pas mal sur l’impact de Corot sur les Japonais ou l’influence de ceux-ci sur les impressionnistes... Impressionnant, justement. 136p., 20€. Thibaut Allemand

Colombe Schneck Dix-sept ans (Grasset)

Colombe Schneck confie un épisode de sa vie qu’elle a longtemps caché : son avortement, au printemps 1984, lorsqu’elle était « une fille libre » de 17 ans. Pourquoi écrire sur l’IVG, 40 ans après la loi Veil, alors que ce droit semble acquis ? Eh bien, justement, pour qu’il le reste. L’acte n’a certes plus rien de celui, clandestin, vécu en 1964 par la romancière Annie Ernaux et raconté dans L’événement, mais n’est « ni banal, ni confortable », rappelle la journaliste. Un récit nécessaire, épuré et sensible, dont le sujet va bien au-delà de la revendication féministe ou du lamento autobiographique. Il s’agit ici de liberté, de la difficulté de la vivre et de la préserver, en ces temps où la parole réactionnaire se « décomplexe », jusqu’à remettre en cause les évidences. 96p., 10€. Julien Damien


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Foxcatcher

De sang-froid Texte Raphaël Nieuwjaer Photos Scott Garfield / Mars Distribution

Foxcatcher a tout pour impressionner. Pour assommer, aussi. Prix de la mise en scène à Cannes, il offre à Steve Carell son premier grand rôle « sérieux ». Méconnaissable derrière ses prothèses, le comique semblait condamné à la performance. Mais Bennett Miller l’emmène vers des territoires beaucoup plus troubles. Le fait divers a marqué l’Amérique. En 1996, le milliardaire John E. Du Pont tue Dave Schultz, champion olympique de lutte dont il finançait l’équipe depuis des années, la « foxcatcher ». Pour son troisième long-métrage de

fiction, Bennett Miller fusionne ce qui faisait le sel des deux précédents : l’investigation sur des faits réels (Capote, 2005), et l’ancrage dans un milieu sportif (Le Stratège, 2011). Finissant là où Capote commençait (le meurtre),


53 écrans

Foxcatcher apparaît même comme son envers. Mais entre les deux, il y a une même interrogation : pourquoi quelqu’un passe-t-il à l’acte ? Absurde. Miller se garde de toute psychologie. Et c’est bien la force du film de ne pas réduire une vie à un geste, aussi définitif soit-il. Rien ne permet d’expliquer ce saut brutal dans le rang des assassins. C’est un mystère, que le cinéaste approche avec toute la réserve nécessaire. Libérés de l’enchaînement facile des causes et des conséquences, les personnages gagnent alors autant en densité qu’en opacité. La mise en scène, élégante et rigoureuse, transcende les acteurs, tous d’une rare justesse. D’ailleurs, le plus étonnant reste

« La force du film est de ne pas réduire une vie à un geste, aussi définitif soit-il. » Steve Carell, qui ne renie rien de ce qui fait son génie comique. Sa gêne, sa pudeur, son sens de l’absurde, sa violence aussi, s’accordent parfaitement aux névroses de Du Pont. Le film se présente alors comme une comédie pétrifiée par le drame. De Bennett Miller, avec Steve Carell, Channing Tatum, Mark Ruffalo… Sortie le 21.01


54 écrans

A Most Violent Year

Le revers américain Texte Nicolas Jucha Photo Atsushi Nishijima / Studio Canal

« C’est une époque dangereuse à laquelle nous devons nous adapter ». En une phrase, le fil rouge de A most violent year est posé. Celui-ci raconte comment un couple d’entrepreneurs tente de faire survivre son business dans une ville rongée par la violence et la corruption.

N

ew York, 1981. L’année la plus criminelle de l’histoire de la Grosse Pomme. Année également où Abel Morales, entrepreneur dans la distribution de carburant, s’apprête à acquérir un terminal portuaire stratégique pour son commerce. Mais cet immigré à qui tout semble réussir est dos au mur : la vague de violence qui frappe la ville menace ses affaires. Employés, collaborateurs et même son épouse, sont tentés d’appliquer la loi du talion. Face à un ennemi invisible, Abel Morales sait qu’il peut tout perdre : « Si l’un de nos gars tire sur quelqu’un, ce sera la fin de tout ce pourquoi nous avons travaillé ». Ce qui ne manque pas d’arriver... Fort d’un casting haut de gamme, JC Chandor nous plonge dans un univers sombre où seul survit celui qui parvient à préserver ses apparences et percer les faux-semblants. Peu de scènes d’action et pourtant aucun temps mort. Et une histoire qui révèle ses secrets en temps opportun. Dans un monde qui aime exalter les héros sans peur ni reproche, le réalisateur américain ne nous offre que des gagnants et des perdants moins audacieux. Abel Morales incarne la morale du film : « C’est quand vous avez peur de tomber dans le vide qu’il faut sauter, sinon vous De JC Chandor, avec Oscar Isaac, Jessica Chastain, Elyes Gabel, David Oyelowo... En salle. restez au même endroit toute votre vie ».



56 écrans

Cold In July

Talion d’Achille Texte Thibaut Allemand Photo Studio la Cinefacture

Un thriller ? Un western ? Une étude de mœurs ? Un peu de tout cela à la fois dans le quatrième long-métrage de Jim Mickle. La violence âpre de ce film sous haute tension trimballe une morale qui n’est pas forcément la nôtre. Mais celle d’une certaine société du sud des États-Unis.

T

exas, 1989. Richard Dane, travailleur modeste, est réveillé en pleine nuit par un cambrioleur. Qu’il abat, presque par hasard. Érigé en héros de son bled de rednecks, ce bon père de famille tiraillé par les remords vit dans la crainte d’une vengeance du père de la victime... À première vue, Cold In July sort des sentiers battus. Certes, on songe à Nerfs À Vif (1991), dans lequel Nick Nolte était harcelé par Robert De Niro. Est surtout pointé du doigt un monde où les armes à feu sont vénérées comme des totems – mais pas par tous, heureusement. Pourtant, peu à peu, le film prend d’autres chemins et, de fausses pistes en coups de théâtre, nous entraîne vers une histoire où l’on fait justice soi-même. La mise en scène s’avère parfaite et les comédiens, remarquables ; à commencer par Michael C. Hall (Dexter, Six Feet Under), très crédible dans son rôle d’Américain moyen dépassé. Sam Shepard émeut et Don Johnson cabotine à tout va. Reste une morale trouble : ce film est adapté du roman homonyme signé Joe R. Lansdale. Cet écrivain a souvent défendu des valeurs texanes, disons, vieille école. Quand les autorités ne sont plus dans le coup – voire corrompues – la De Jim Mickle, avec Michael C. Hall, Don Johnson, Sam Shepard, Vinessa Shaw... En salle. loi du talion s’impose. Drôle de message.



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L’Affaire SK1

Chasse à l’homme Texte Marine Durand Photo SND

Sept ans d’enquête, autant de jeunes femmes violées puis poignardées. Au milieu des années 1990, la traque de Guy Georges, le « tueur de l’Est parisien », a mobilisé des milliers de policiers. Parmi eux : Franck Magne, jeune inspecteur tout juste débarqué au 36 quai des Orfèvres. Saisissant et ultra-documenté, le premier film de Frédéric Tellier devrait laisser une trace dans le polar français.

L

a réussite de ce long-métrage tient d’abord à un procédé narratif efficace : jongler en permanence entre les piétinements en temps réel des enquêteurs devant l’une des affaires les plus complexes qui leur ait été donné de traiter, et les doutes de l’avocate de Guy Georges pendant son procès, dix ans après le premier meurtre. Directeur artistique de 36, Quai des Orfèvres d’Olivier Marchal, Frédéric Tellier est dans son élément lorsqu’il s’agit de nous montrer les coulisses et les failles de l’état français. Pour L’Affaire SK1, le réalisateur a d’ailleurs rassemblé nombre de procès verbaux et témoignages des principaux concernés, garantissant la qualité quasi documentaire de son œuvre sur un fait divers encore entouré d’une forte charge émotionnelle. Mais face à des acteurs de premier plan convaincants, c’est du quasi inconnu Adama Niane que vient la révélation – qu’on s’étonne de voir si peu mis en valeur dans la promo. Dans la peau du prédateur qui fascina les médias autant que certains experts, cas unique de De Frédéric Tellier, avec Raphaël Personnaz, Baye, Olivier Gourmet, Adama tueur sensé mais sans doute irrécupérable, Nathalie Niane… Sortie le 07.01 il livre une prestation percutante.



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© Pathé

© Capricci Films

écrans

Pasolini

Loin des hommes

La rencontre entre Abel Ferrara et Pier Paolo Pasolini était évidente. Redoutée, aussi, pour ceux qui n’avaient vu dans Welcome to New York, le précédent longmétrage de Ferrara inspiré de l’affaire DSK, qu’une provocation hasardeuse. Les deux artistes n’ont pourtant jamais fait du scandale qu’un moyen d’ausculter la société. « Scandaliser est un droit ; être scandalisé, un plaisir », dira l’artiste et intellectuel italien au début du film. S’il se concentre sur les trois jours précédant l’assassinat (dans des conditions encore opaques) de Pasolini, celui-ci n’est pas la reconstitution d’un fait divers. C’est l’essence d’une vie et d’une pensée qui sont saisies là, entre le travail, le quotidien et la mise en scène des derniers projets inachevés. Pasolini parvient à ce point d’incandescence où l’art et la vie se rêvent mutuellement.

Reda Kateb et Viggo Mortensen dans l’adaptation d’une nouvelle de Camus : sur le papier, le projet de David Oelhoffen était prometteur. Pourtant, on finit par froncer le nez devant ce « western moderne » décrivant le périple d’un instituteur français chargé de convoyer un paysan algérien, accusé de meurtre dans son village, jusqu’à la ville de son procès. On ne pourra pas reprocher grand-chose aux comédiens, qui jouent leur partition avec application dans un mélange réussi d’arabe et de français. Mais le personnage sans nuances de Daru, humaniste au grand cœur qui ne cesse de pousser son prisonnier vers la liberté, flirte avec la niaiserie alors qu’on attendait un regard différent sur la guerre d’Algérie. Dommage. Reste les paysages rocailleux de l’Atlas, sublimes et inhospitaliers. Marine Durand

Raphaël Nieuwjaer

De David Oelhoffen, avec Viggo Mortensen, Reda Kateb, Nicolas Giraud, Djemel Barek… Sortie le 14.01

De Abel Ferrara, avec Willem Dafoe, Maria de Medeiros…. En salle.




63 portrait

O Du Zhenjun

à l’ère du village global Texte Nicolas Jucha Photo The tower of Babel : The Flood, 2010, variable dimension 120 x160 cm, 180 x240 cm

Né dans la Chine de Mao Zedong, éduqué dans celle de Deng Xiaoping avant de découvrir la France, Du Zhenjun est à sa manière une passerelle entre Orient et Occident. Souvent présenté comme photographe suite au succès de sa série L’Empire de Babel, il est avant tout un philosophe de l’image. Rencontre avec un artiste hors-norme.

Q

uand la Révolution culturelle chinoise de Mao Zedong commence, en 1966, Du Zhenjun est âgé de cinq ans. Rapidement, il se tourne vers l’art, avec les limites qu’implique le pouvoir politique communiste : « Au collège, j’étais dans une école de gravure sur jade et ivoire, où l’on formait plus des artisans que des artistes ». Mais cet apprentissage artistique à Shanghai, ville où il est né et a grandi, fut bouleversé en 1976, quand « Mao, Zhou Enlai et Zhu De décèdent ». Du Zhenjun se souvient que « tous les Chinois étaient tristes, un peu comme en Corée du nord après la mort de Kim Jong-il ». L’artiste s’émancipe avec l’arrivée au pouvoir de Deng Xiaoping : « Le premier grand changement fut l’ouverture de l’université. Ce n’est

plus l’état qui sélectionnait les futurs étudiants, mais les examens ». Ainsi en 1984, le sculpteur intègre l’Université des Beaux-Arts de Shanghaï pour découvrir la peinture.

« La mondialisation me fascine parce que j’ai grandi dans une société fermée » Direction la France. Pour se libérer d’un modèle qu’il estime encore trop académique, Du Zhenjun rejoint le monde occidental. Son arrivée à Rennes en 1991 pour se former aux arts >>>


The tower of Babel : Pollution, 2011, variable dimension 1 60 x 120 cm, 240 x 180 cm

numériques marque une nouvelle étape. Désormais, plus question de se laisser enfermer dans une case. Si bien qu’en 2003, en marge du Festival d’automne, l’artiste numérique Edmond Couchot le qualifiera « de philosophe qui pense avec des images ». L’inspiration principale de cet insaisissable chinois ? La mondialisation, qui le fascine : « Sûrement parce que j’ai grandi dans une société fermée ». Tandis que certains dénoncent la disparition des cultures, Du Zhenjun pointe ce qui rapproche les hommes, persuadé que l’humanité est arrivée à une situation

The tower of Babel : The Wind, 2010, variable dimension 120 x160 cm, 180 x240 cm

« où nous sommes obligés de partager des valeurs, une morale à l’échelle mondiale. Une civilisation s’impose grâce à la technologie ». Sans prise de position manichéenne : « Je ne porte pas de jugement. Je ne suis ni pour ni contre la globalisation. De même que cela n’a pas d’intérêt d’être pour ou contre Internet ». Babel, ou la contraction du monde. Aujourd’hui, on parle principalement de L’Empire de Babel, série de 15 images présentées lors de Paris Photo 2013 et 2014 par la Galerie RX. >>>



66 portrait

The tower of Babel : Destruction, 2010, variable dimension 120 x160 cm, 180 x240 cm

« Je ne suis ni pour ni contre la globalisation ». Une transposition du mythe de la fameuse Tour à notre époque. Pour sa réalisation, Du Zhenjun a prélevé sur le net des centaines de fragments d’images hétéroclites, coupées de leur contexte. Ce foisonnement de visages et d’objets renvoie aux épisodes les plus ordinaires ou les plus dramatiques du monde contemporain. L’impression de saturation de chacune des « photographies » a son explication : « Il y a très peu d’espace dans cette série qui reflète cette mondialisation qui nous sature d’informations. L’immensité et l’infiniment petit se rejoignent ». L’Empire de Babel est plus qu’une œuvre, c’est « un pays fictif qui représente notre monde. Chaque image en est une contraction ». Et qui devrait continuer d’inspirer Du Zhenjun. Mais cette fois à travers la peinture : « Elle traduit mieux les émotions personnelles. Je cultiverai cette thématique de la globalisation, en me focalisant toujours plus sur l’individu ».

à savoir / Du Zhenjun signe l’affiche de Roland Garros 2015 à visiter / duzhenjun.com

The tower of Babel: Independance of the Country, 2010, variable dimension 120 x160 cm, 180 x240 cm



68 exposition


69 exposition

Women are beautiful

L’homme qui aimait les femmes Texte Julien Collinet Photo De la série ‘Women are beautiful’ © Garry Winogrand

Photographe compulsif, l’américain Garry Winogrand était aussi un éternel amoureux du corps féminin. Marié trois fois, il a consacré une grande partie de son travail au sexe dit faible, à une époque où ce dernier s’affirmait dans une société encore trop puritaine.

«  W

inogrand avait 35-40 ans à l’époque, c’était un vrai plaisir pour lui d’aller à la rencontre de toutes ces femmes. Il les a magnifiées sans être voyeur », explique Xavier Canonne, directeur du musée de la photographie de Charleroi. à travers les couloirs de l’exposition Women are beautiful, les formes généreuses, les décolletés et les jupes courtes de ces femmes des années 60 et 70 s’affichent avec élégance. Le travail du photographe est bien une ode à la féminité. Jamais décadrées, ces dames, qui ne dépassent jamais la quarantaine, sont centrées au milieu du décor qui les entoure.

Au pied levé. La grande majorité des photos ont été prises à quelques pas de l’appartement de l’artiste, entre Central Park et la 5th Avenue. « La plupart des modèles ne remarquaient pas sa présence. Il se promenait et déclenchait son appareil avec un instinct de rue, de chasseur. » Winogrand était si prolifique qu’on a retrouvé plus de 6 000 rouleaux non développés après sa mort. Outre un esthétisme prononcé, son travail révèle un indéniable aspect documentaire, à tel point que le visiteur à l’impression de marcher dans la rue avec le photographe. Ces représentantes de toutes les communautés se rendent au travail, jouissent de la vie dans une société américaine en pleine effervescence économique. « C’est l’Amérique de Nixon et de Bobby Kennedy. Les femmes se libèrent, assument l’égalité Jusqu’au 17.05, Charleroi, Musée de la Photographie, mar>dim, 10h>18h, des sexes. Ce sont des pionnières qui vont 6/4/3€/grat. –12 ans, www.museephoto.be changer l’Amérique ».


70 exposition

Lascaux

Hors les murs Texte Julien Collinet Photo Daynes Sculpture © Lascaux International Exhibition

La grotte de Lascaux s’offre une nouvelle jeunesse grâce à la technologie. Une exposition itinérante, de passage à Bruxelles, permet de pénétrer dans ce site vieux de 17 000 ans. Sans faire le voyage jusque dans le Périgord.

S

eptembre 1940. Dans le village de Montignac, en Dordogne, quatre adolescents découvrent par hasard l’existence d’une cavité souterraine qui deviendra célèbre. L’histoire est bien connue. Et si depuis, de nombreuses grottes renfermant des trésors d’art préhistorique ont été découvertes, Lascaux reste unique. « C’est la chapelle Sixtine de la préhistoire », s’enthousiasme Serge Lemaître, coordinateur scientifique de l’exposition. On ne retrouve nulle part ailleurs une telle quantité de représentations - environ 2 000 - ni une telle variété de pigments. Par souci de préservation, la grotte originale avait été fermée aux touristes, avant l’ouverture d’une reproduction en 1983. Aujourd’hui, à l’aide d’une technologie laser, « les parois sont reproduites au millimètre près, à l’inverse de Lascaux II qui gardait quelques défauts ». Un nouveau centre d’art pariétal verra le jour en 2016, juste à coté du site originel. En attendant, cette exposition qui voyage à travers le monde, présente au public des salles situées dans des passages très étroits, jusqu’alors inaccessibles. Et nous apprend beaucoup sur l’homme de Cro-Magnon, « pas du tout la brute épaisse qu’on a l’habitude de présenter. Très organisé, il a construit des échelles pour peindre sur les plafonds, et maîtriJusqu’au 15.03, Bruxelles, Musée du cinquantenaire, mar>ven, 9h30>17h, sam>dim, sait des techniques complexes, comme 10h>17h, 10/7/4€/gratuit, www.kmkg-mrah.be l’anamorphose ».



72 exposition

Orange Dreams

Shebam ! Pow ! Blop ! Wizz! Texte Marie Pons Photo Bureau Boomerang © M. Calka © Atomium 2014

Frayez-vous donc un chemin jusqu’à Bruxelles pour découvrir le monde haut en couleurs du design tout plastique ! L’âge d’or des Golden Sixties y est à l’honneur, dans toute sa gloire orangée, au cœur de l’Atomium.

A

u sortir de la Deuxième Guerre mondiale, le plastique incarne la modernité et le progrès avec ses couleurs vives, sa légèreté et sa malléabilité dans une Europe en pleine reconstruction. Tout au long de cette exposition, des pièces emblématiques (la fameuse pomme à glaçons ou la machine à écrire Valentine) se mêlent aux œuvres d’art signées Armand. On découvre également des objets plus rares, comme le bureau Boomerang de Calka, limité à 35 exemplaires, et que Pompidou avait adopté, en version blanche, à l’Elysée. « Les pièces sont le reflet de l’époque par leur créativité, leur folie, leur côté “ tout est possible” », souligne Arnaud Bozzini, responsable de l’exposition. Un panorama des années 1960 à 1973 est dressé en sept tableaux thématiques, de la cuisine au bureau en passant par la chambre. Autant de clins d’œil aux visiteurs qui redécouvrent « sourire aux lèvres, des objets vus chez leurs grands-parents, dans leur famille ». La majeure partie des pièces présentées provient du Plasticarium, fabuleuse collection rassemblée par le plasticien Philippe Decelle, qui en possède plus de 11 000. Orange Dreams amorce ainsi la fondation d’un tout nouveau musée au sein de l’Atomium dont elle deviendra la collection permanente. Offrant ainsi à Bruxelles un espace Jusqu’au 25.05, Bruxelles, L’Atomium, de 5 000 m2 entièrement dédié au design. lun>dim, 10h>18h, 11>6€, atomium.be De quoi voir la vie… en rose.



74 exposition

Louis XV enfant, Augustin Justinat, 1717 © Châteaude Versailles, Dist RMN / © Jean-Marc Manal

Sphinx de Sésostris III, 12e dynastie, Égypte © New York, The Metropolitan Museum of Art

Le château de Versailles en 100 chefs-d’œuvre

Sésostris III, pharaon de légende

Depuis 2012 Versailles s’expose hors les murs et s’invite à Arras. Après Roulez carrosses ! place à une sélection de pièces emblématiques provenant du domaine du Roi Soleil. Des chefs-d’œuvre qui pour beaucoup quittent leur écrin d’origine pour la première fois. L’exposition propose de les découvrir grâce à une immersion en deux temps. D’abord dans les fastueux appartements privés garnis de marbre, de bronze de bois sculptés et d’argent. Puis en s’imaginant à l’extérieur du château, cheminant entre les fontaines, les bosquets et le groupe sculpté Apollon servi par les nymphes. Le tout avec une scénographie en trompe l’œil, recréant le bruit des eaux, le chant des oiseaux et même l’odeur des fleurs comme si l’on se trouvait au Petit Trianon. Marie Pons

S’il ne jouit pas de la notoriété de Toutankhamon ou de Ramsès II, Sésostris III n’en demeure pas moins l’un des plus grands pharaons du Moyen Empire. Près de 2 000 ans avant J.C, il conquit la Nubie (l’actuel Soudan), délimita les premières frontières de son royaume, réinventa l’Etat égyptien grâce à de grandes réformes… Cet illustre personnage n’aura bientôt plus de secrets pour vous grâce à cette exposition rassemblant près de 300 œuvres - dont 200 prêtées par les plus grands musées du monde. Statues, objets d’art ou papyrus témoignent d’un règne considéré comme l’âge d’or de l’Egypte ancienne, et peignent le portrait d’un monarque conquérant, autoritaire, mais aussi visionnaire et aimé de son peuple. Julien Damien

Jusqu’au 20.03.16, Arras, Musée des Beaux-arts, lun, mer, jeu & ven, 11h>18h, sam & dim, 10h>18h30, 7,50/5€/Gratuit -18 ans, www.versaillesarras.com

Jusqu’au 25.01, Lille, palais des Beaux-Arts, lun, 14h>18h, mer>ven, 10h>18h, sam&dim, 10h>19h, 10/7€/grat – 12 ans, www.pba-lille.fr



76 théâtre exposition & danse

Agenda

Nick Hannes En 2010, le photographe belge Nick Hannes entamait un périple sur le pourtour méditerranéen. De Monaco à Gaza, en passant par les pays du sud de l’Europe frappés par la crise ou ceux du Maghreb en pleine révolution, il saisit avec son style documentaire caractéristique la complexité de cette région où se croisent sur les plages touristes et migrants.

Saint-Tropez, Frankrijk © Nick Hannes

Mediterranean, the continuity of man Anvers, jusqu’au 01.02, FoMu, mar>dim, 10h>18h, 8/6/3€/gratuit -18 ans, www.fotomuseum.be

Pierre Leguillon

Putain de guerre

Quelle est la place de l’art dans notre société où l’information est reine ? Une activité humaine parmi d’autres ? C’est la question que pose Pierre Leguillon. à travers des dispositifs constitués de photos, extraits de films, publicités, pochettes de disques, magazines, et autres médias de masse, Le musée des erreurs nous invite à repenser les conditions de la réception d’une œuvre. Et à nous servir des archives « pour ré-écrire l’histoire, notre histoire ».

à l’heure où l’on commémore la Grande Guerre, cette exposition qui mêle tous les genres visuels s’intéresse aux conflits d’aujourd’hui et ses « dommages collatéraux ». Et donne un vrai visage à l’horreur : celui d’une jeune enfant terrorisée, d’un GI mutilé ou d’une mère désespérée. Plus cynique mais tout aussi fort, on trouve aussi là un cercueil au poing levé, un squelette patriote, des enfants-bombes. Putains d’images…

Le musée des erreurs : Art contemporain et lutte des classes - Bruxelles, jusqu’au 22.02, Wiels, mer>dim, 11h>18h, 8/5/3/1,25€/gratuit – 12 ans, www.wiels.org

Charleroi, jusqu’au 01.03, Musée des Beaux-Arts, mar>ven, 9h>17h, sam, 10h>18h, 6/4,50€, charleroi-museum.be

Jacques Clauzel « Je ne suis pas un graveur. Je suis un peintre qui fait de la gravure. » Ainsi se définit Jacques Clauzel. Il aurait pu ajouter « généreux ». En 2014, il faisait don de l’intégralité de son œuvre gravée (820 estampes) au Musée du dessin et de l’estampe originale. Celui-ci lui consacre un accrochage où le style épuré du Nîmois dialogue avec celui d’artistes proches, mais aussi de Picasso. Au creux, l’infini - Gravelines, jusqu’au 19.04, musée du dessin et de l’estampe originale, tlj sf mar, 14h>17h, sam & dim, 15h>18h, 2/1€/gratuit -18 ans, www.ville-gravelines.fr



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Vautour fauve naturalisé © Musée du Louvre-Lens (musée d’histoire naturelle de Lille) / Jean-Cristophe Hecquet

théâtre exposition & danse

Agenda

Des animaux et des pharaons Cette exposition propose d’aborder la civilisation ancienne à travers la faune et ses rapports avec les hommes. Elle raconte comment les Egyptiens expliquaient le monde grâce aux bêtes. 430 œuvres, dont beaucoup viennent du Louvre Paris – les babouins de Louxor en sortent pour la première fois – sont présentées : aquarelles, objets du quotidien, momies et même… un crocodile embaumé. Lens, jusqu’au 09.03, Louvre, tlj sf mar, 10h>18h, 9€/ gratuit - 18 ans, www.louvrelens.fr

Tisser Matisse

L’art dégénéré selon Hitler

En 1946, la manufacture des Gobelins commande une tapisserie à Henri Matisse. Né dans une famille de tisserands, celui-ci accepte ce défi avec la volonté de « sortir la manufacture du xviiie siècle ». à travers 70 œuvres, cette exposition met en lumière un travail plus méconnu du Nordiste, à la frontière de la peinture et des arts décoratifs.

Les jugeant « dégénérées » (entartete kunst), les nazis bannirent 7 000 œuvres d’art moderne des musées allemands. 125 d’entre-elles furent liquidées lors d’une discrète vente aux enchères, à Lucerne, en 1939. On trouva-là des tableaux et des sculptures de Gauguin, Chagall, Matisse, Picasso, etc. La Cité Miroir réunit pour la première fois une partie de ces chefs-d’œuvre.

Le Cateau-Cambrésis, jusqu’au 08.03, Musée Matisse, tlj sf mar, 10h>18h, 7/5/3€/gratuit, museematisse.lenord.fr

Liège, jusqu’au 29.03, Cité Miroir, lun>ven, 9h>18h, sam&dim, 10h>18h, 12/8e/gratuit -14 ans, www.citemiroir.be

Camille Claudel (1864-1943) En 1995, la Piscine fut le premier musée français à lancer une souscription publique pour l’achat d’une sculpture : La Petite Châtelaine, de Camille Claudel. Il poursuit son histoire d’amour avec la sculptrice en célébrant les 150 ans de sa naissance à travers une exposition qui rassemble 150 œuvres (de l’artiste et de comparaison) issues de collections publiques et privées. Au miroir d’un art nouveau - Roubaix, jusqu’au 08.02, La Piscine, mar>jeu,11h>18h, ven, 11h>20h, sam & dim, 13h>18h, 10/7€/grat -18 ans, www.roubaix-lapiscine.com

Toutes les expositions de l’Eurorégion sur www.lm-magazine.com



80 théâtre & danse

Maguy Marin à contre-courant

Propos recueillis par Marie Pons Photos Cavalca / Claude Brickage / Philippe Grappe


81 théâtre & danse

Maguy Marin est franche, directe, bien ancrée dans le présent dont elle livre des esquisses brutes sur le plateau. Dès 1981, la chorégraphe frappe fort avec l’atemporel May B, spectacle inspiré par des textes de Beckett où tout est discordant, bancal. L’œuvre marque les esprits et l’histoire de la danse. Depuis, sans concession, la Toulousaine dresse le portrait d’une époque morcelée, qui vire au champ de ruines. BIT, sa nouvelle création, est portée par un souffle aussi puissant. Rencontre avec une artiste qui n’est jamais là où on l’attend !

Quel est le point de départ de BIT ? La question du rythme. Les danseurs ont travaillé sur leur capacité à se détacher d’un tempo commun. Il fallait résister à la puissance du groupe. Le travail a été long, et difficile.

« Comment peut-on agir ensemble sans se fondre complètement dans le courant général, majoritaire ? »

Pourquoi difficile ? Dotés d’une oreillette, les interprètes dansent tous sur des rythmes différents, en décalage avec une autre musique de fond distincte entendue par le public. C’est un défi technique pour les danseurs. Et qui nous permet, en même temps, d’explorer cette question : comment peut-on agir ensemble sans se fondre complètement dans le courant général, majoritaire ? Comment cela se traduit-il sur scène ? On est partis de la marche, la chose la plus simple. Les moments partagés par les six danseurs alternent avec d’autres où chacun évolue à sa propre cadence. Cela crée des décalages surprenants pour le spectateur. Nous avons épuré les mouvements au maximum pour ne préserver que des traces.


82 théâtre & danse

En quoi la musique a-t-elle influencé la danse ? On a longtemps travaillé en silence, avec des métronomes. Puis le compositeur Charlie Aubry est arrivé et un jour il a passé un morceau de techno pure, qui a dégagé une énergie folle chez tout le monde. On a composé dessus une farandole qui unit les danseurs. Par contraste avec la façon dont les gens dansent en boîte : côte à côte mais seuls, au fond. Qu’en est-il de la scénographie ? En réalité on a recyclé les murs du décor de May B. Ils sont posés sur des échafaudages constituant sept pentes fortement inclinées. Dans ce décor il y a des trous, des niches, où l’on se hisse et « Il faut résister à tombe sans cesse, c’est un motif l’appel du succès et du récurrent. Tout s’est fait de façon empirique : nous avons combiné divertissement facile, la musique, la danse et le décor simultanément.

pour garder un discours

Vous collaborez de longue date avec les danseurs de la compagnie… Oui, c’est très important. Il y a une grande confiance et une vraie complicité entre nous. On part d’un terreau informe et tout s’articule très vite, en rebondissant sur les propositions de chacun. On choisit une direction ensemble.

critique sur l’époque »

Entamez-vous ici un nouveau cycle de travail ? Oui. Par contraste avec Salves ou Nocturnes qui sont des pièces fragmentées, je renoue avec une continuité dans la forme. Pour BIT je n’ai pas souhaité découper la danse avec des noirs ou des silences. D’ailleurs, je n’ai pas été au bout de ce travail, je vais le creuser autrement. J’envisage une pièce où les individus seraient ensemble, physiquement en contact, mais séparés par des contradictions… Qu’en est-il de l’aspect politique de BIT ? Cette pièce souligne la question de la vie ensemble, de l’attention à l’autre, mais sans se perdre soi-même. Elle interroge aussi le rapport à la femme et à la sexualité. Il y a une forme d’innocence dans la danse qui se trouble à l’instant où le sexe arrive.


Vous-même, tentez-vous de défier la marche du monde ? Oui, bien sûr. Quand on voit là où on essaie de nous entraîner… D’une façon globale, le collectif peut être terriblement absorbant, et c’est alors très difficile de porter une parole contradictoire. Cela déborde largement le cadre de mes pièces et vise le contexte général dans lequel on vit. Il faut résister à l’appel du succès et du divertissement facile, pour garder un discours critique sur l’époque. Quel regard portez-vous aujourd’hui sur May B, votre pièce emblématique reprise à Charleroi en janvier ? Je la vois avec tendresse. Elle a porté beaucoup de danseurs et d’histoires depuis sa création, des gens que je ne vois plus, d’autres qui ont fait un sacré parcours… C’est une pièce fondamentale à voir / BIT, 16>17.01, Roubaix, La condition dans mon travail, qui sert comme un Publique, 20h30, 18/12/8€, établi. Lorsque je veux savoir si je www.laconditionpublique.com May B, 30.01, Charleroi, Palais des peux travailler avec un nouveau danbeaux-arts, 20h, 15/10€, www.pba.be seur, on aborde cette pièce et je vois à visiter / tout de suite si l’on va s’entendre. www.compagnie-maguy-marin.fr


Le Cœur Cousu

Sur le fil Texte Marie Tranchant Photo Margot Daudin Clavaud

D’un côté, le Théâtre La Licorne cultive un univers fantastique auquel on aimerait croire. De l’autre, Carole Martinez a signé Le Cœur cousu (2007), un roman à succès où les limites entre le réel et le merveilleux sont vraiment ténues. Leur rencontre devait avoir lieu. Retour sur un spectacle brodé à Dunkerque avant de partir en tournée.

I

l y a chez Carole Martinez et Claire Dancoisne des points communs évidents. Une imagination au service de l’écriture, un monde traversé par une magie presque crédible. C’est ce qui a poussé la seconde à adapter le roman de la première. « J’aime beaucoup cette ambiance baroque, confie la directrice artistique de la compagnie la Licorne. Le faux et le vrai se mêlent, on traverse une réalité légèrement décalée… » Pour transposer ce récit de 400 pages sur scène, Claire Dancoisne a fait des choix. L’histoire tourne donc essentiellement autour du personnage principal, Frasquita Carasco, une femme qui habite un petit village du Sud de l’Espagne et qui a hérité d’un don incroyable : elle recoud les vêtements autant que les êtres et les animaux. « Elle espère changer le monde grâce à la beauté de ses fils ». Ce qui la mènera au cœur d’une « histoire épique ». Pour donner corps à ce texte, la compagnie a mis de côté ses objets métalliques pour privilégier le fil et le textile. Des « puppets » ont été créées en ouate et tissu pour représenter les gens du village. Les comédiens, en chair et en os, 15>17.01, Dunkerque, Le Bateau Feu, jeu & sam revêtent les mêmes costumes pour 19h, ven 20h, 8€ // 23 >25.01, Calais, Le Channel, ven 20h, sam 19h30, dim 17h, 6€ // 27 >29.01, que, là encore, les frontières entre Théâtre d’Arras, mar & jeu 20h, mer 20h30, 20>9€ réel et imaginaire restent floues.



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© DR

Matin brun © Fabien Debrabandere

Fumistes !

Week-end Poil à gratter

Fumistes ! et autres Zutistes, Hirsutes et Hydropathes de la Belle Époque réunit trois amis, Éric Leblanc et Christian Debaere, autour du facétieux metteur en scène Jean-Marc Chotteau. Leur terrain de jeu repose sur un canevas de textes d’humoristes de la Belle époque, parmi lesquels Alphonse Allais ou Charles Cros. Les trois compères en ont extrait une série de monologues, joués avec un humour pince-sans-rire qui fait mouche. La langue des années 1900 est travaillée, laissant la part belle aux jeux de mots et à un goût pour l’absurde. Les Zutistes et Hydropathes qui prêtent leurs noms à ce titre rocambolesque sont des clubs littéraires qui ont existé, sorte de cercles de poètes à l’esprit potache empreint de surréalisme. Le trio forme à son tour une joyeuse équipée qui prend plaisir à partager ces morceaux choisis. Marie Pons

Au menu de ce week-end qui démange les zygomatiques, une pléiade de petites formes théâtrales insolites et futées. Où l’on assiste aux déboires de la vie d’une marionnette (Dans l’atelier), et à l’histoire déjantée mais vraie d’un groupe de rock de filles dans l’Angleterre des années 1960 (The Shaggs – Better than the Beatles). On pénètre aussi sans crainte dans La caravane de l’horreur, théâtre d’objets surfant sur le thriller par la Compagnie Bakélite… Avant de découvrir la remarquable mise en scène de Matin Brun par le collectif des Chiennes Savantes, d’après le texte politique de Franck Pavloff (1998) qui garde toute sa force. Ce cocktail pensé à la fois pour petits et grands est aussi un puissant remède à la morosité ambiante. Marie Pons

15>31.01, Tourcoing, Salon de Théâtre, mar & jeu, 19h30, mer, ven & sam, 20h30, dim, 15h30, 18/14/8€ (étudiants), www.lavirgule.org

Prog : Dans l’atelier, The Shaggs, Matin Brun, La caravane de l’horreur, Le Chant du bouc, Oblique 23>25.01, Hazebrouck, Centre Malraux, divers horaires, 10/7/6/3€, pass 4 spectacles 24€, www.centreandremalraux.com



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Golden Hours

© Anne Van Aerschot

Golden hours est une chanson de l’album Another green world de Brian Eno, dans laquelle il est question du temps qui passe. Anne Teresa De Keersmaeker, en grande exploratrice des relations entre musique et danse, dissèque ici la pop de l’expérimentateur et producteur de génie pour tisser à sa façon une écriture chorégraphique affûtée et précise. Où la danse s’écrit par de prodigieuses combinaisons de motifs et de rythmes, plaçant les corps au centre d’un intense tourbillon. 23>31.01, Bruxelles, Kaaitheater, 20h30 sf dim 15h, 25/20/12,5€, www.kaaitheater.be

Finir en beauté La disparition de la mère de Mohamed El Khatib constitue le point de départ d’une histoire et d’une performance documentaire. à travers une somme d’archives personnelles collectées auprès de proches, le jeune metteur en scène recueille « les débris d’une relation, d’une histoire, d’un paysage ». Ce récit introspectif, nourri sur scène d’images et de sons, contribue à rendre ce deuil non plus « anecdotique » mais partageable par tous. 12>13.01, Arras, Théâtre,20h, 8€ // 14>17.01, Douai, L’Hippodrome, mer&jeu, 21h15, ven, 20h, sam 18h, 8€ // 27>29.01, Villeneuve D’Ascq, la Rose des vents, 19h sf jeu 21h, 21>10€

20&21.01, Roubaix, le Colisée, 20h30, 47,5>33,2€, www.coliseeroubaix.com // 23&24.01, Bruxelles, Théâtre Saint-Michel, 20h30, Complet !, www.theatresaintmichel.be

© Loll Willems

L’Exoconférence Sommes-nous seuls dans l’univers ? Alexandre Astier s’attaque à la Grande Question. Avec le sérieux que réclame le sujet mais sans se départir de cette ironie avec laquelle il sévit dans la série Kaamelott. Après avoir livré une leçon de musique dans le costume de Jean-Sébastien Bach il se mue cette fois en conférencier loufoque pour nous parler ovni, physique quantique, Roswell, etc. Un peu comme si Michel Audiard réécrivait Interstellar. Drôle et instructif.



O

Jonathan Capdevielle Bye bye baby

Texte Marie Pons Photo Alain Monot


91 théâtre & danse

Jonathan Capdevielle est un caméléon. Marionnettiste, comédien, ventriloque et performer de génie, il endosse des rôles troublants voire dérangeants (Jerk de Gisèle Vienne en 2008) ou burlesques (Bodies in the Cellar chez Vincent Thomasset). Avec Adishatz (adieu, en occitan) il revient sur sa propre adolescence, sur fond de tubes pop des années 1990. Dans ce cabaret décalé, les chansons se cognent aux conversations familiales, retraçant avec beaucoup de pudeur les lignes d’un itinéraire singulier.

A

dolescent, Jonathan se décrit comme « plutôt discret, sensible et un peu seul » mais déjà animé par une certaine envie de jongler avec les rôles et les identités : « Je cultivais un certain humour, un côté one-man show qui s’est développé au collège. J’animais les mariages, je copiais Muriel Robin, bref je me donnais en spectacle ». Il s’est aussi découvert une véritable passion pour l’imitation, notamment en reprenant a cappella les hits des idoles de ses quinze ans, Cher et surtout Madonna.

« Il me semblait Jeux de rôles. à Tarbes où il grandit, la rencontre décisive avec le théâtre advient en inévitable de suivant l’option proposée au lycée et une professeure hors du commun, qui initie la travailler sur ce classe aux jeux de masque, et à la danse : « Chaque année on devait monter une qui me constitue » pièce dans laquelle on s’investissait complètement, avec une rigueur professionnelle. Notre prof était comme un capitaine de navire, elle a montré que le théâtre était à notre portée ». Plus tard, en se formant aux arts de la marionnette à Charleville-Mézières, il rencontre Gisèle Vienne avant de devenir son interprète vedette à partir de 2000. Inlassablement, il travaille sa voix comme un instrument qui change de couleur, de tessiture, jette le trouble pour incarner avec une rare justesse des personnages féminins comme masculins. Une sorte de fil rouge dans sa carrière : « J’ai trouvé une réelle force de création et un plaisir à travers le chant, l’imitation et plus tard le théâtre ». >>>


92 théâtre & danse

Métamorphoses. Dans Adishatz, dont il est auteur et metteur en scène, le garçon en jeans baskets se mue en créature blonde platine, talons hauts et pull à paillettes. Il faut le voir – et l’entendre – reprendre avec la même aisance l’épais accent de son père, sa propre voix fluette d’adolescent, et celle de sa sœur malade. Le télescopage de références (les sorties en boîte de nuit, les tubes de l’époque, la difficulté de communiquer dans la famille) reflète l’identité d’un jeune homme, pris entre traditions locales et culture des mass médias. Il s’agit « Dans les chansons aussi de faire la paix avec une période pas toujours rose, sans de Madonna il était jamais verser dans la caricature : « Il me semblait inéviquestion de sexualité, table de travailler sur ce qui me constitue et là d’où je viens. Il de sujets tabous et je m’importait de poser un regard m’y retrouvais un peu » d’artiste sur mes influences ».


Like a virgin. Entre vie réelle et fantasmée, où les codes de la pop sont détournés, les chansons de la radio illustrent la profondeur du tourment adolescent : « Dans les morceaux de Madonna il était question de sexualité, d’ambigüité, de sujets tabous et je m’y retrouvais un peu. En vivant dans un petit village à côté de Tarbes dans les années 1990, sans tomber dans le cliché, on vit son homosexualité à travers la télé, des images. » Adishatz est le récit du parcours d’un jeune garçon qui trouve sa voie au fur et à mesure. Dans cette pièce, Capdevielle dit « adieu » à ces années avec pudeur et tendresse. Tout en précisant dans un sourire que « l’adolescence n’est jamais Adishatz - 28.01, Amiens, Maison de la culture, 19h, 13>7€, www.maisondelaculture-amiens.com très loin », même à l’aube de 30.01, Armentières, Le Vivat, 21h30, 21/14/7€, ses quarante ans. Disons qu’il www.levivat.net referme avec précaution le journal intime de ses quinze Retrouvez l’interview en intégralité ans. Pour mieux entamer un sur lm-magazine.com nouveau chapitre.

Vivat la danse ! Le son des corps Texte Marie Pons Photo Héroines © Vincent Arbelet

Au cœur de l’hiver à Armentières, le festival Vivat la danse ! constitue un refuge idéal pour réchauffer les corps et les esprits. Tours de chant, poésie, guitare électrique, percussions et cris : l’édition 2015 fait vibrer le son à même la chair. Du murmure à la revendication à plein poumons, il est malaxé jusqu’à devenir matière chorégraphique. On se laisse bercer par les mélopées exotiques de François Chaignaud (Dumy Moyi), par les voix qui ont peuplé l’adolescence de Jonathan Capdevielle (Adishatz), le timbre rock de Sir Alice enveloppant la danse de Julie Nioche (Héroïnes), ou la parole politique et percutante du portugais Tiago Guedes (Hoje). Soit mille et une façon de placer son oreille tout contre ces corps vibrants pour vivre des expériences très sensibles. —

29.01>04.02, Armentières, Le Vivat, La COOP, Villeneuve d’Ascq, La Rose des vents, divers horaires, 21/14/7€ la soirée (sauf Stéréoscopia, 7€), pass semaine 42€, www.levivat.net Prog : 29.01, Stéréoscopia, V. Dupont // 30.01, Bine, V. Dupont + Adishatz/Adieu, J. Capdevielle // 31.01, Hoje, T. Guedes + Héroïnes, J. Nioche // 01.02, Toute la doublure, S. Macher + Dumy Moyi, F. Chaignaud + The Extra Sensorial Garden, M. Ingvartsen + Ba-Deedly- Deedly- DeedlyDum Ba Boop-Be Doop, M. Jerez // 03.02, Tour, D. Wampach + A mon seul désir, G. Bourges // 04.02, Haut cris Miniature, V. Dupont + Les Vraoums


94 théâtre & danse

Agenda

Ha ! La chorégraphe Bouchra Ouizguen signe une transe sublime dédiée aux Aïtas, chanteuses et danseuses de cabaret marocain. Quatre silhouettes vêtues de noir et enturbannées de blanc chantent, dansent et nous emportent dans un ouragan hypnotisant. Des éclats de voix et de rires, des murmures et prières rythment cette pièce qui frappe fort et vibre longtemps après le noir final… 22.01, Valenciennes, Le Phénix, 20h, 16>9€, www.lephenix.fr Ha ! © Hervé Véronèse, Centre Pompidou

Katzelmacher (Le Bouc)

Requiem

Dans une bourgade de l’Allemagne des années 1970, l’arrivée d’un travailleur immigré vient rompre la monotonie de la vie d’une bande de jeunes désœuvrés. Ce texte signé Fassbinder met en scène la peur de l’autre et s’attaque aux travers d’une société qui cristallise ses craintes et ses fantasmes autour de l’inconnu.

Alors qu’il se sait condamné, Hanokh Levin s’inspire de Tchekhov pour narrer le deuil de personnes ordinaires. L’auteur israélien s’intéresse à un fabricant de cercueil dont la femme va mourir pour souligner les choix qui déterminent notre existence. Cette adaptation signée Cécile Backès, portée par sept comédiens, célèbre le passage d’un monde à l’autre, non sans humour, entre musique, littérature et poésie pure.

13>24.01, Bruxelles, Théâtre Océan Nord, mar>sam, 20h30 sf mer 19h30, 13h30 le 20.01, 10/7,50/5€, oceannord.org

14>21.01, Béthune, La Comédie, 20h, 20>6€, www.comediedebethune.org

La revue des galeries Entre danse, humour et chanson, ce spectacle revient sur l’actualité qui a émaillé l’année 2014. Pour l’occasion, les auteurs ont aiguisé leurs plumes et toute la troupe est prête à jongler avec les personnages de façon délirante. Une tradition unique en son genre qui ressuscite les grandes heures du théâtre de Boulevard. Jusqu’au 25.01, Bruxelles, Théâtre Royal des Galeries, 20h15 & 15h, 29>10€, www.trg.be



96 théâtre & danse

Agenda

Idomeneo Cet opéra de Mozart en trois actes prend racine en pleine tragédie grecque. La partition livre l’histoire d’Idoménée, roi de Crète, contraint de sacrifier son fils Idamante à Neptune pour sauver sa vie en pleine tempête. Entre conte et parabole, cette œuvre puissante et inventive dans la forme est mise en musique par Le Concert d’Astrée. 27 & 29.01, 01, 03 & 6.02, Lille, L’Opéra, 19h30 sf dim 16h, 69>5€, www.opera-lille.fr Idomeneo © Simon Gosselin

Yatra

Henri VI, cycle 1

Ce spectacle est le fruit d’une belle rencontre. L’illustre danseur sévillan Andrés Marin a emmené le flamenco vers l’Inde contemporaine. à travers ce rapprochement, il s’agit moins de confronter deux cultures traditionnelles que d’explorer un espace partagé. C’est alors tout naturellement que le hip-hop de Kader Attou s’est immiscé dans cet échange à plusieurs voix.

Avant de revenir sur le texte et le drame historique, Henri VI est d’abord une histoire de chiffres : 150 personnages, 12 000 vers, et 8h30 de spectacle ! Thomas Jolly maîtrise parfaitement l’adaptation de cette saga sur fond de guerre de Cent Ans puis des DeuxRoses, écrite par un Shakespeare d’à peine 25 ans, dans les années 1590.

28>29.01, Maubeuge, Le Manège, 20h, 11/8€, www.lemanege.com

31.01, Dunkerque, Le bateau Feu, 14h, 12€, lebateaufeu.com (les 1ère et 2e parties programmées les 28 et 29.01 sont annulées)

Fills Monkey Deux énergumènes assurent un « incredible drum show » endiablé. Fills Monkey est un duo de batteurs déjanté et virtuose, qui se livre à l’exercice périlleux de battre des fûts à quatre mains et avec n’importe quoi : raquettes de ping-pong, balles de tennis ou tubes en plastique. Un moment musico-comique mené tambour battant. 31.01, Oignies, Le Métaphone, 20h30, 16>10€, 9-9bis.com

Tous les spectacles de l’Eurorégion sur www.lm-magazine.com



Baladez-vous dans ce Grand Budapest Hotel à la recherche des images fortes qui ont marqué l’année 2014… films incontournables, personnalités et évènements importants cohabitent dans cette illustration américano-centrée. www.beutlerink.com Parmi la centaine de références, saurez-vous retrouver celles-ci ? Pharrell Williams, Les Simpson ont 25 ans, L’Allemagne championne du monde de foot, Le référendum sur l’indépendance de l’Écosse, Ebola, Kim Kardashian, La Cour suprême ouvre la voie au mariage gay, Le selfie des Oscars, Ice Bucket Challenge, « Bring Back Our Girls », Ferguson, Nicki Minaj, Poutine en Crimée, le mariage de Brad Pitt et Angelina Jolie, le vol MH370, les manifestations à Hong Kong...




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