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Il est temps d’adapter votre car-policy

Pendant de nombreuses années, l’octroi d’une voiture à un employé se résumait à choisir un modèle, une couleur et quelques options. Aujourd’hui, la tâche est beaucoup plus ardue. Il faut en plus non seulement déterminer quelle motorisation alternative (ou pas) est adaptée à quel type d’employé, mais aussi tenir compte des éléments complémentaires comme les solutions de recharge à mettre en place. Il est donc nécessaire d’adapter votre car-policy pour la faire coller à cette nouvelle réalité. Voici comment vous y prendre. par

Bart Vanham (Fleet 360)

» Contexte

Electrification du parc automobile : voilà probablement l’une des préoccupations majeures en 2022 des départements RH, Finance et Fleet. En plus du bénéfice fiscal pour l’employeur, avec une pression fiscale toujours plus élevée pour les véhicules à émission non nulle commandés à partir du 1er juillet 2023, et pour l’employé, avec un avantage en nature nettement plus élevé pour les véhicules classiques à essence et diesel, la crise énergétique accélère le passage aux énergies renouvelables et donc les voitures électriques.

L’hydrogène est encore en pleine phase d’expérimentation et n’apportera des solutions qu’à moyen-terme. Ces solutions seront probablement d’abord appliquées à des moyens de transport plus lourds et plus grands, comme les bateaux, les camions, les avions... On doute que cette technologie puisse devenir une alternative rentable aux voitures électriques à batterie. Car le développement d’une batterie meilleure et plus durable fait désormais l’objet d’une course effrénée entre les plus grands fournisseurs du monde.

Je suis moi-même utilisateur depuis longtemps d’une voiture électrique (+7 ans et +200.000 km) et je confirme que l’utilisation d’une voiture électrique est envisageable en toutes circonstances, y compris en vacances. Bien sûr, pouvoir recharger à son domicile, au bureau ou chez les clients sont des prérequis à un usage confortable des voitures électriques. La recharge rapide pour les (très) longs déplacements (+400 km) est indispensable pour les trajets vers les destinations de vacances. La recharge rapide sur la route des vacances ouvre une nouvelle dimension du voyage en voiture : «c’est le voyage qui compte, profitons-en». Faire une pause tous les 250300 km, c’est l’assurance de voyager en mettant le stress au placard (sauf parfois cette dernière charge avant la destination causée par un sentiment de «nous sommes presque arrivés»).

Au vu du développement rapide de l’infrastructure de recharge, cela ne pourra aller qu’en s’améliorant !

Ah oui, ma moitié est aussi totalement conquise par la conduite électrique et n’envisage pas une minute de faire marche arrière.

Rouler à l’électrique, c’est l’avenir, c’est financièrement plus intéressant, c’est possible et c’est même plus amusant - selon la majorité de ceux qui l’ont testé).

Par où commencer?

L’électrification du parc automobile colle parfaitement à la stratégie de développement durable des entreprises. Les questions qui taraudent la direction d’une entreprise sont encore souvent axées sur le coût, les profils adaptés et sur la question de regarder au-delà de l’électrification en ellemême et donc de s’intéresser aux solutions de mobilité en général.

Le ‘business case’ peut être réalisé en imaginant des profils de mobilité et en déterminant quelles solutions de mobilité et quelles motorisations sont adaptées à chacun. Le cout de la flotte ou de la mobilité actuelle peut ensuite être comparé au coût futur d’une flotte électrique comprenant une infrastructure de recharge à domicile et au bu- reau, associée ou non à d’autres solutions de mobilité. Ce business case permet de définir la stratégie de mobilité et d’élaborer un plan d’action. Les grandes étapes du plan d’action sont les suivantes :

• Identifier les profils de mobilité

• Cartographier les solutions de mobilité possibles et souhaitées et le potentiel de conducteurs qui pourrait rouler en électrique et/ou en plug-in hybride.

• Déterminer le besoin supposé en matière d’infrastructure de recharge sur le site de l’entreprise et au domicile des collaborateurs.

• Lancer une enquête auprès des fournisseurs de solutions de recharge

• Adapter les budgets de la car-policy pour les différentes motorisations et établir un comparatif ‘like for like’ des voitures qui entrent dans ces nouveaux budgets.

• Adapter la car-policy avec les règles de conduite d’une voiture électrique et celles en matière de recharge.

• Créer un plan d’implémentation: communication, syndicats, discussion avec les fournisseurs, procédure de commandes, etc.

Il est très important d’intégrer dans ce plan les bonnes personnes concernées au sein des départements HR, Finances, Facility, Procurement, etc.

Profils de mobilité

Ce qui est nouveau dans cette mobilité complexe, c’est la nécessité de faire correspondre les bons profils avec les bonnes motorisations et/ou solutions de mobilité. Vous allez forcément vouloir éviter la situation où une personne qui ne peut pas recharger à la maison et parcourt beaucoup de kilomètres veuille quand même bénéficier d’une voiture électrique parce que c’est beaucoup plus avantageux pour son ATN. Cette personne risque de sacrifier le confort de l’utilisateur et utilisera éventuellement son temps de travail pour recharger. Des actions de sensibilisation sont donc recommandées. En même temps, les personnes qui pourraient rouler à l’électrique auront peut- être besoin d’être encouragées à opter pour une voiture électrique. Le trajet vers la destination de vacances est encore trop souvent la préoccupation majeure.

On peut identifier les profils de mobilité de différentes façons. Soit sur base de données télématiques de manière détaillée ou sur base du kilométrage annuel de manière sommaire. Vous pouvez effectuer un sondage auprès de votre personnel qui vous permettra de déterminer le comportement en matière de déplacement ainsi que les éventuels défis subjectifs à surmonter. Selon la fonction, interne ou externe, il faudra se concentrer sur les trajets domicile-lieu de travail et les principaux trajets privés, respectivement sur les déplacements professionnels (en journée) et les principaux trajets privés.

Le personnel qui travaille dans les bureaux pourra, outre la conduite électrique, aussi envisager la conduite d’un PHEV (moins de 50 km en fonction de la possibilité de recharger à domicile) et l’usage d’un vélo électrique (par ex. pour les déplacements de moins de 15 ou 20 km en tenant évidemment compte du contexte familial). S’ils habitent à une distance limitée du bureau (par exemple 70 km), il ne sera pas forcément nécessaire d’installer une borne à domicile.

Les fonctions externes ne peuvent généralement pas rouler en PHEV et ont absolument besoin d’une solution de recharge à domicile pour pouvoir parcourir les kilomètres professionnels quotidiens nécessaires à leur travail.

En plus de ces profils définis, il existe aussi des schémas de travail hybrides où le personnel se déplace du bureau aux clients, sur d’autres sites ou chez des fournisseurs. Pour ces schémas de travail, il s’agira de définir des solutions pertinentes au plan individuel.

D’après les plus de 5.000 questionnaires que nous avons réalisés, il apparaît que dans une large marge de confort, 85-90 % du personnel pourrait conduire de manière entièrement électrique. L’exception concerne les postes externes qui ne peuvent pas recharger à la maison et qui parcourent des distances importantes.

Potentiel et contribution à l’infrastructure de charge requise

Ce potentiel de conduite entièrement électrique, lié à la stratégie (VE obligatoire/optionnel), au cycle de remplacement de la flotte et à l’appartenance des voitures aux différents sites, peut donner un aperçu de l’infrastructure de recharge nécessaire sur les sites dans les 4 à 5 prochaines années.

Cela permet d’entamer des négociations avec les fournisseurs de bornes de recharge et d’estimer approximativement l’investissement nécessaire à l’infrastructure de recharge.

Si vous disposez de 100 EV sur site sur une période de 5 ans, on estime qu’il vous faudra disposer d’entre 35 et 45 bornes, en fonction des possibilités ou non qu’auront vos collaborateurs de recharger à domicile et de leur distance domicile-lieu de travail. Si cette possibilité de recharge à la maison est élevée et si la distance domicile-lieu de travail est assez courte, 35 bornes sur site devraient suffire.

L’infrastructure technique est une variable supplémentaire qui peut influencer ce nombre indicatif. Si, par exemple, 30 stations de charge intelligentes peuvent être installées sans qu’un renforcement du réseau sur place soit nécessaire, notamment en installant une cabine haute tension supplémentaire, alors seules 30 stations de charge devraient suffire.

30 bornes de recharge représentent un investissement de +/- 90 à 135.000 euros. Cet exercice devra évidemment être peaufiné avec le fournisseur de votre infrastructure de recharge.

L’infrastructure de recharge à domicile est généralement considérée comme faisant partie du coût total de possession du véhicule électrique. En général, le coût d’une station de recharge standard et de son installation est inclus dans le TCO. Les coûts supplémentaires, par exemple en raison d’une modification/un renforcement souhaité de l’installation domestique ou par exemple en raison du replacement de la boîte à fusibles, sont dans la plupart des car-policies à la charge de l’employé. L’infrastructure de recharge à domicile ne représente donc pas dans la plupart des cas un investissement supplémentaire pour l’entreprise.

Budget TCO ?

L’électrification implique de nouveaux budgets de car-policy qui doivent être calculés pour les véhicules électriques et éventuellement les hybrides rechargeables. Une approche TCO est nécessaire. Celui-ci peut être utilisé comme un nouveau budget ou comme une méthodologie pour calculer de nouveaux budgets.

Un budget TCO est transparent et assure que toutes les augmentations de coûts, surtout celles qui ne sont pas comprises dans le loyer mensuel (soit le carburant et la fiscalité), sont toujours facturées aux employés. D’autre part, le TCO est difficile à expliquer et tout le monde n’en n’utilise pas la même définition. Cette dernière cause également des difficultés dans le configurateur de voiture que les sociétés de leasing mettent à disposition pour configurer une voiture dans un certain budget.

Une approche TCO pour le calcul de nouveaux budgets de car-policy, sur base des budgets car-policy existants, a fait ses preuves. Elle conduit à de nouveaux budgets qui diffèrent par motorisation, est basée sur les budgets actuels de la car policy, donc reconnaissable par l’employé, et donne une (plus) grande flexibilité dans l’utili- sation du car configurator et du processus de commande.

En général, un TCO contient trois éléments constitutifs : le coût du leasing - y compris le coût de l’assurance -, le coût de l’énergie et le coût fiscal. Pour chacun de ces éléments de base, des hypothèses doivent être formulées afin d’effectuer une comparaison correcte. Quelle base pour le calcul du coût de l’énergie ? La consommation idéale versus la consommation réelle ? Quels kilométrages annuels ? Qu’en est-il de la consommation d’un PHEV ? 70 % d’électricité versus carburant uniquement ? Quel prix du kWh pour les véhicules électriques ? Comment calculer l’impact des dépenses non admises ? En principe, il y a plusieurs bonnes réponses, tant que cette hypothèse est utilisée de façon consistante et cohérente dans le comparatif.

L’approche TCO est également nécessaire pour les entreprises qui souhaitent proposer, dans le cadre légal du budget de mobilité ou non, d’autres solutions de mobilité soutenues par le budget TCO et/ou compensées par des plans de sacrifice salarial (flex income/cafétéria).

Liste de véhicules - points d’attention

Un test qui doit absolument être fait est la comparaison «like for like» ; les voitures électriques équivalentes rentrent-elles toujours dans le budget des nouvelles voitures électriques ?

Si ce n’est pas le cas, d’autres paramètres de leasing peuvent être pris en considération, comme une durée plus longue et un kilométrage plus faible.

En ce qui concerne la durée, on remarque que les sociétés de leasing évaluent souvent positivement une durée de 60 mois pour les BEV. Et le kilométrage du contrat peut être adapté à l’augmentation du télétravail.

Cet exercice semble être nécessaire surtout dans les catégories inférieures du budget de la car-policy, où les voitures électriques (plus petites) sont proportionnellement beaucoup plus chères que dans les catégories supérieures.

En raison de l’inflation, de la pénurie de voitures neuves et de l’évolution des politiques de prix des constructeurs automobiles et des sociétés de leasing, on constate ces derniers mois une augmentation considérable du tarif de leasing des voitures. Il n’est pas exceptionnel de voir des augmentations de l’ordre de 15 à 20 %. Un benchmark des voitures ou de la car-policy s’impose, ce qui entraine une augmentation des budgets ou des variantes avec par exemple une augmentation uniquement pour le budget des voitures électriques.

Une politique de fidélité à des marques fait aussi souvent l’objet de débats. Pouvons-nous continuer à proposer une ou deux marques ? Qu’en est-il des remises sur le volume ? Etc...

En ce qui concerne les voitures électriques, aucun constructeur ne propose une offre complète dans tous les segments du marché. Cela signifie qu’à court-terme, il sera difficile de maintenir une politique de marque unique qui inclut des voitures électriques. Au-delà, on voit que des marques plus récentes, comme Kia, Hyundai ou Tesla obtiennent d’excellents scores en termes de satisfaction des utilisateurs. Nous conseillons de combiner une analyse des marques sélectionnées dans l’actuel car-policy avec les marques les plus populaires sur le marché et éventuellement de sonder le personnel.

Ce puzzle combiné à des informations financières devrait permettre de compiler des listes de voi- tures par catégorie de car-policy, soit sous forme de voitures de référence dans le cadre d’une police «libre choix avec un budget», d’une police «choix limité avec un budget» ou d’une «liste fixe de voitures».

Car Policy

En 2023, une car-policy se devra de privilégier les voitures électriques. Les véhicules électriques englobent les véhicules à batterie (BEV) et éventuellement aussi les modèles hybrides rechargeables (PHEV).

BEV et PHEV?

Première question à se poser pour la nouvelle car policy: va-t-on encore prendre les PHEV en considération ou va-t-on faire l’impasse sur cette technologie de transition?

Cette question fait également ressortir une fausse idée: seuls des profils de mobilité très spécifiques sont adaptés à une conduite efficace avec un PHEV. Après tout, la majorité des trajets doivent être effectués en mode électrique si l’on veut respecter les faibles émissions de CO2 et la consommation. La voiture doit être rechargée fréquemment et les trajets doivent donc être inférieurs à 50 km. Un tel profil peut, en principe, également conduire confortablement une BEV à l’heure actuelle.

Les PHEV commandés après le 1er juillet 2023 seront «pénalisés» fiscalement. La déductibilité fiscale des véhicules à émissions non nulles sera considérablement réduite chaque année à partir de ce moment-là.

Règle en matière d’usage des BEV/PHEV

Une car-policy est un règlement qui fixe des accords entre l’employeur et l’employé. Elle doit être adapté aux BEV et PHEV :

• Qui peut rouler en full EV? Quels éléments (profil de mobilité, possibilité de charger à domicile,...) doivent être présents? Qui peut rouler en PHEV ? Quels sont les critères nécessaires ?

• Quelles sont les règles spécifiques pour les BEV et PHEV? Exemple : fourniture de câble de recharge, perte du câble de recharge, bonne utilisation d’un PHEV,…

• Quel processus est suivi à la destination? Qui détermine la motorisation ?

• Faut-il aussi une politique de marques pour les BEV et PHEV ? En raison de l’offre plutôt restreinte de BEV, un libre choix de marques semble être une bonne solution intermédiaire. Pour les PHEV, une politique de marque (plus) stricte peut être maintenue.

• Travaille-t-on toujours avec une liste limitée de voitures, comprenant des BEV et des PHEV, ou élargit-on le choix pour les BEV ?

• Quels sont les budgets pour les BEV et/ou PHEV ? Les budgets car-policy basés sur les prix de leasing sont transparents et plus faciles à mettre en place dans le car configurator. De plus, seules les fluctuations des prix de leasing sont à la charge de l’employé, les hausses de la fiscalité et des prix du carburant ne l’est pas, ce qui tend à encourager l’égalité sociale. Les budgets d’une car-policy basés sur le TCO sont plus complexes, moins transparents et plus difficiles à mettre en place dans le configurateur de voiture. De plus, toutes les fluctuations des prix, du prix de leasing, des taxes et des prix du carburant sont à la charge de l’employé.

• Durée du contrat/kilométrage pour BEV? Voir nos remarques ci-dessus.

• ...

Tous ces éléments doivent être discutés et décidés pour aboutir à une mise à jour de la car-policy adaptée à l’entreprise.

Règles en matière de chargement du véhicule

En ce qui concerne la recharge, de nouveaux accords doivent être repris dans la car-policy :

• Quelle infrastructure de recharge au domicile?

• Quels coûts sont pris en charge par l’employeur ? Et par l’employé ? Sur quelle base sont-ils calculés ?

• Où doit-on recharger de préférence? A la maison et/ou au travail. Y-a-t-il une limite en ce qui concerne la recharge publique et/ou sur borne rapide ?

• Quelles sont les règles en matière de recharge d’un PHEV ? Quel monitoring est intégré à ce niveau ?

• Quid si on ne recharge pas suffisamment et que les frais de carburant explosent ?

• Peut-on recharger à l’étranger? Cela peut-être autorisé dans une phase intermédiaire afin de stimuler l’utilisation de la voiture électrique pour les trajets vers la destination de vacances… ou parce qu’il n’est techniquement pas possible de limiter la recharge à la Belgique.

• Quid si l’employé quitte l’entreprise? Quelles sont les règles en ce qui concerne l’infrastructure installée au domicile?

• Quid en cas d’usage abusif du badge de recharge ? Ou de perte ?

Ces nouvelles règles contribuent également à l’instauration d’une car-policy spécifique adaptée à l’employeur.

Processus de commande

Ca y est! La car-policy est à jour, les budgets de la car-policy adaptés, le fournisseur de bornes de recharge sélectionné. Il est maintenant temps de commander vos véhicules.

Contrairement à l’ancienne situation, vous devez dorénavant, pour chaque commande, déterminer la motorisation adaptée. Cela peut se faire via une discussion avec l’employé ou via un sondage online sous forme d’un arbre de décision.

Une fois la bonne motorisation est déterminée/ discutée, il faut faire procéder à un audit de l’installation électrique à domicile pour confirmer la possibilité de recharger à la maison et déterminer les coûts supplémentaires éventuels.

Les feux sont au vert ? Alors, c’est parti pour la commande… il n’y a plus qu’à être patient… n

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