Au Jour d'Hui

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Nous ne sommes pas encore dans l'an 2000, nous finissons le siècle dernier, dans les

années 80/90, et voici l'ordinateur qui arrive dans nos vies. Très vite, nous, gens d'Amérique (continent) nous avons le privilège de la haute vitesse ; pas tout à fait gratuite, mais enfin, à la portée de beaucoup. Et là, - je parle pour moi, hein ; il est possible que d'autres aient eu une expérience différente - pour moi, donc, paff, je surfe le net en néophyte, et re-paff, je tombe sur un réseau de gens totalement inconnus, invisibles, qui se chamaillent allègrement et en anglais sur le thème ô combien savoureux et d'actualité de Monsieur Clinton, alors Président des Etats Unis et amateur, en vrac, de robes bleues, de cigares et de galipettes. Nous sommes en 1998, et je suis à la fois très amusée et horrifiée de ce que je lis : mon jeune fils, toujours prêt à parfaire l'éducation de sa mère, me passe à cette occasion un petit précis qui circule sous le manteau, intitulé " Slang-Net", qui dit bien ce que ça veut dire. Sans cela, la moitié des échanges serait passé très loin de mon entendement Cette première expérience de forum m'a laissé des souvenirs mitigés, et plutôt amers : je crois que nous étions cinq femmes pour une vingtaine de messieurs déchaînés qui s'entretuaient allègrement au nom des élections futures. Il y avait un sysop qui essayait vainement de calmer les esprits. Mais dès qu'il avait, figurativement, le dos tourné, les querelles reprenaient de plus belles, constellées de tous les noms d'oiseaux possibles et imaginables ! J’ai fait de grands progrès en anglais écrit pendant les dix huit mois que j'ai passé avec ce groupe là. Donc, mon tout premier forum : Celui du Pioneer Press, St Paul, MN, USA. 1997, 1998 et les six premiers mois de 1999. Mon pseudo ? French Fries. Hé oui, il y a plus de 10 ans déjà ! Toutefois, marre d'écrire en anglais ! Je cherche un forum en français, mais… pas en France : ce que je lisais alors, à la fin des années 90, me barbait parce qu'on y faisait assaut d'intellectualisme aigué et déplacé : j'avais plutôt envie d'en rire. Après les débordements de mes amis du Pioneer Press, j'ai eu envie et besoin de calme et de sourires. J'arrive donc sur Sympatico et j'y suis restée, dans le forum de Jacks, pendant un an, environ. Et puis, un monsieur (une dame ?) commence de faire des mauvaises plaisanteries. Le meneur de jeu le chasse par la Porte, l'autre rentre par la fenêtre. Les plaisanteries deviennent plus salées, ça tourne au vinaigre et comme je ne veux pas recommencer la foire d'empoigne du PP, je file. Entre temps, une amie décide de monter son groupe de discussion, et j'embarque avec elle, merci Gît, 2001 le 9/11 : nous décidons de revenir aux USA. 2002 : mon retour aux USA. Je retrouve les forums, mais là, Tycoune nous laisse tomber ! Je ne sais pas si Janie se souvient de combien de participants il y avait en tout sur Tycoune ? J’ai oublié... Il me semble que c'était quelque chose comme 6 ou 7000. On a eu deux semaines pour faire la valise... c'était dur-dur ! Heureusement, Janie nous offre le gîte et le couvert sur un groupe MSN, Amoureux des Mots : elle crée pour nous LA MEUTE. ~~~

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En même temps, et à partir de 2003, j'embarque dans plus de 20 forums/groupes, whatever ! Des trucs, salons, bar, cuisine, trottoir, allées cavalières - parfois même très cavalières, vi vi ! Où je retrouve des gens qui aiment discuter par écrit. Voila. Le mot est dit ... Forum : un endroit dans lequel nous nous retrouvons à plusieurs pour discuter pour continuer la discussion, pour échanger des idées, des émotions, à travers nos paroles écrites. Donc pour moi, oui, de 2003 jusqu'à la fin de 2006, j'ai approché beaucoup de forums. C'était la découverte. ~~~ Et puis, tout à coup, en 2008, après la cent cinquantième bagarre pour essayer de faire comprendre aux virtuels interlocuteurs que je suis autrement qu'une image figée, brusquement la flemme, la paresse noire, l'horreur : plus rien ne m'intéresse nulle part. Et s'il n'y avait qu'à moi que cela arrive, ce ne serait pas dramatique ! Mais ce qui est grave, c'est que partout c'est la même chose : un ralentissement, un manque d'énergie, un freinage. Quand ce n'est pas l'arrêt pur et simple, la désaffection totale. J'ai abandonné les forums les uns après les autres : je passais en coups de vent sur Agora, où je laissais un message tous les trois mois ; sur K-Boum, parce que Kogan, Mab, David et les autres ; sur A des M, parce que c'était un peu ma maison. Mais le grand amour, l'énorme élan, l'ADDICTION, c'est fini. Et je sais bien que ça ne reviendra pas. ~~~ Aujourd'hui 1er janvier 2009, l'aventure virtuelle continue avec mon nouveau blog, Au Jour d'Hui, sur WordPress : http://lise2cc.wordpress.com. Soyez les bienvenus ! -------------------------------------

Une page blanche, c'est beau Le Journal Par LiseCC

Nous sommes au début du livre. En haut de la page blanche. D'heure en heure, et jours après jours, nous allons écrire 2009, chacun dans notre coin, chacun dans notre vie, seconde après seconde. Sans le savoir. Ca ne vous fait pas peur, ce livre, que nous écrivons, chacun du bout de nos neurones sans jamais en exploiter l'ampleur, du bout de nos yeux sans jamais en voir les couleurs, du bout de notre cœur, sans jamais en connaître le parfait amour ? Ce livre de vie, chacun de nous le construit à sa manière ; nos ancêtres avant nous en remontant jusqu'au premier homme, à la première femme, l'ont commencé dans la nuit des temps, comme on bâti la ville, une pierre sur l'autre, une pensée après l'autre, un rire suivant une larme, un baiser après le rejet, la vie et la mort mêlés, construisant, allant de l'avant, Jusqu'à aujourd'hui, 1er janvier 2009, sans une seconde d'arrêt. Nous reprenons la truelle, nous, bâtisseurs de notre temps, en ce début du vingt et unième siècle, qui aura dix ans l'an prochain. Construisant, bâtissant, échafaudant, sans une seconde d'arrêt : et c'est là le principal, semble-t-il. Ce temps nous mène, nous ne le menons pas. Il nous échappe ; nous ne lui échappons pas. C'est simple, mais nous refusons cette simplicité. Nous cherchons le difficile, l'incongru, le compliqué. A tel point qu'il nous arrive de démolir ce que les 2


autres ont construit - sans réfléchir, sans savoir si nous en avons le droit. Pour le plaisir de compliquer les choses et de perdre notre temps : pourtant, y a-t-il quelque chose de plus simple que cette molécule de temps enclose dans une seconde ? La page est blanche, et, humains pressés que nous sommes, fourmis diligentes de la monstrueuse fourmilière humaine, nous n'aurons de cesse de la remplir, d'y apposer nos marques, nos senteurs, nos griffes. De l'encombrer, souvent. Je nous souhaite à tous d'aimer la page blanche telle qu'elle se présente à nous en ce matin du Premier de l'An, comme on disait en des temps anciens. Je nous souhaite d'y apposer nos mots, et qu'ils soient de ceux dont on ne rougit pas, plus tard, à la relecture. D'y écrire avec notre cœur et de rejeter tout ce qui viendrait d'ailleurs. De retrouver, devant le blanc de ce livre inédit, la virginité du nouveau né. De remonter à l'innocence en nous, à la vérité, à la pureté. Je nous souhaite à tous, moi y comprise, une année remplie de mots vrais, ceux qui chantent, qui aiment, qui apaisent, et qui réconcilient. Je nous souhaite de retrouver les mots perdus, ceux qui guérissent, ceux qui déchirent les voiles noirs de la souffrance, du rejet, de la solitude, de la maladie, de la pauvreté. Il ne faut plus compter sur nos dirigeants pour se charger de ce carquois à notre place. Leur livre est un livre de compte en faillite. Faisons du nôtre un livre d'histoire à mettre sans peur entre toutes les mains.

Un livre à se passer de main en main. Le livre à deux, douze ou deux milles mains. Le livre de demain, dont nous serions fiers. CC Thu Jan 01 06:45:33 EST 2009 |lise CC | __________________________________________

La grande bagarre ... c'est celle des copyrights. Tout le monde sait ce que copyrights signifie : c'est le droit de copier une œuvre intellectuelle ou artistique. On parle moins de copyrights pour une création manuelle, mais plutôt de copie ou contrefaçon.

Mais enfin, le mot est là : copier. Déjà, on nous l'apprend à la maternelle : “Copier, c'est voler". Et qui vole un œuf, vous savez la suite ! Ce qui m'amène à dire que certains internautes se trouvent aujourd'hui, grâce au Web, à la tête d'un vaste troupeau ; mais pardon, j'anticipe. J'écrivais avant-hier, sur le blog-groupe-forum-atelierd'écriture d'une amie, sur Google, que j'aimerais rapatrier les messages d'un ami commun, lequel écrivait avec nous il y a 3 ou 4 ans. Il a laissé, sur MSN, des pages qu'il serait triste de détruire. J'ajoutais que je me sentais libre de le faire pour deux raisons : d'abord, comme je viens de l'expliquer plus haut, les messages de l'ami en question sont de petits chef-d’œuvre qu'il serait criminel, à mon sens, de laisser engloutir dans le grand tsunami messénique - je ne l'ai pas énoncé en ces termes, mais j'espère que les esprits pointus auront compris. Ensuite, j'expliquais, pour les étroits du bonnet qui voient le mal partout, que cet auteur, à qui j'ai parfois demandé la permission de copier certains de ses messages, m'a toujours permit de le faire, en me rétorquant que ce qu'il écrit en tant que messages n'est pas assujetti aux copyrights. Ce qu'il considère comme de l'écriture intrinsèque, son travail d'auteur, son œuvre, il en est plus jaloux, et ne la montre qu'à son éditeur, s'il le décide, et quand il le décide. J'ai trouvé cette attitude conforme à une certaine rigueur, et je la respecte. Je sais que ce même auteur publie aujourd'hui des Chroniques qui sortent du cadre du simple 3


message. S'il m'en donne l'autorisation, je serais fière de les publier ici, avec toutes les conformités d'usage - nom de l'auteur, date, etc. Et au moment où j'écris ces mots, je me demande s'il ne suffirait pas, finalement, de garder cette conformité, qui nous obligerait à rapporter honnêtement et tout simplement le NOM DE L'AUTEUR au bas de tous les articles, paragraphes, messages et citations que nous aurions glanés sur le web ? Un plus grave abus des copyrights a lieur dans les ateliers d'écriture, et particulièrement dans le principe de l'écriture à plusieurs, écriture dans laquelle les plumes se mélangent. Plus grave encore, l'interdiction faite aux auteurs, par les meneurs de jeu, de reprendre leur possession, leurs textes, sous le principe suivant : écrits dans le cadre d'un atelier, ces textes appartiennent désormais à l'atelier. On voyait cela au Moyen Age, lorsque les élèves de da Vinci donnaient leur talent au peintre pour la fierté d'avoir travaillé avec lui à la décoration de quelque chapelle ; leur nom s'est fondu sous le grand sceau du Maitre et ils sont rentrés dans l'anonymat pour l'éternité. De nos jours, les textes écrits par les writers en résidence dans le writing workshop de Stephen

King, à qui appartiennent-ils ? À Stephen King, parce qu'il les a achetées, payées. On me rétorque que le manuscrit de n'importe quel auteur appartient à l'éditeur, lorsque le contrat d'édition est signé. Mais la signature restera toujours celle de l'auteur. L'auteur reste apparent. Le petit élève peintre de la renaissance, l'obscur écrivain-nègre d'aujourd'hui ont accepté de perdre leur nom. Mais ils recevaient une compensation : l'un par la fierté d'avoir travaillé avec le Maître, l'autre en espèces sonnantes et trébuchantes. Reproduire un texte sans la signature de l'auteur, voici ce que j'appelle de la copie Illégale. Voici pourquoi nous devons connaître les lois du copyright, qui nous protègent. J'ai vu pire : un directeur d'atelier d'écriture a refusé d'enlever de la toile des textes que j'ai écrits, bien que j'ai clairement expliqué qu'un éditeur, intéressé par ces textes, demandait qu'ils soient ôtés du web, qu'il considérait, à bon escient, comme un "lieu public". On m'a rétorqué qu'il y avait une charte de l'atelier et que l'ayant lu, j'avais donné mon accord. Curieuse façon de contourner la loi, et les lois.

La grande bagarre du copyright ne fait que commencer sur le Net. Nous ne sommes, ici, à l'abri de rien. N'importe qui, peut, demain, recopier tout ce qui est écrit dans ces pages, signer et publier. Une photo de ma maison, que j'avais innocemment postée sur un site privé il y a trois ans et demi, a été publiée par un inconnu malfaisant, en même temps que mon nom, mon adresse et tous les détails susceptibles d'amener à ma porte une horde de chiens hurlants, si j'avais habité en Europe. Rien n'arrête personne dans la dégringolade morale et l'intrusion criminelle. Mais rien ne nous empêche de nous protéger d'abord, et de combattre ensuite pour faire valoir nos droits. Ici, je me porte garante des textes publiés. C'est peu. C'est un premier pas. Sun Jan 04 06:37:53 EST 2009 |lise CC | ______________________________ Jean Baptiste Gourmaud : "La grand bagarre du copyrights ne fait que commencer sur le Net. Nous ne sommes, ici, à l’abri de rien. N’importe qui, peut, demain, recopier tout ce qui est écrit dans ces pages, signer et publier. Une photo de ma maison, que j’avais innocemment postée sur un site privé il y a trois ans et demi, a été publiée par un inconnu malfaisant, en même temps que mon nom, mon adresse et tous les détails susceptibles d’amener à ma porte une horde de chiens hurlants, si j’avais habité en Europe. Rien n’arrête personne dans la dégringolade morale et l’intrusion criminelle. Mais rien ne nous empêche de nous protéger d’abord, et de combattre ensuite pour faire valoir nos droits. Ici, je me porte garante des textes publiés. C’est peu. C’est un premier pas." Se porter garante des textes publiés ne suffit pas pour en défendre les droits d'auteurs sur le net. Il faut au préalable les déposer devant un notaire pour fournir une preuve irréfutable s'il est nécessaire de poursuivre devant un tribunal

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Un de mes amis, peintre de Bruxelles, le fait chaque fois qu'il livre sur le net l'un ou l'autre de ses tableaux. Nous pouvons regretter qu'il n'en soit plus ainsi, mais les droits d'auteur n'existaient pas au Moyen-âge. Sur le net, il est pratiquement impossible de sauvegarder les droits d'auteur, tout est copié sans scrupule : les textes, les films, les peintures, les créations musicales, etc. LG : " Se porter garante des textes publiés ne suffit pas pour en défendre les droits d’auteurs sur le net . " J'entends bien, JB : mais si, d'aventure, tu postes une nouvelle ici, je te certifie que, si quelqu'un d'autre vient te la piquer, et l'éditer sur papier sans t'en avertir et sans la signer de ton nom, je pourrai fournir le témoignage devant n'importe quel tribunal, et affirmer que ta nouvelle t'appartient, que tu l'as postée sur mon site, tel jour, et signée par toi. Un juge n'a pas besoin d'autre chose pour reconnaitre la paternité d'une création littéraire, en l'absence d'un copyright déposé. Ici, (USA) il suffit d'être abonné à The Library of Congress, et d'envoyer périodiquement les textes que nous voulons protéger. Malheureusement, je ne le faisais pas pour les petits textes d'une ou deux pages. Ce sont ceux-là qui sont bloqués quelque part dans les tréfonds des mémoires virtuelles. Je traduis un article de chercheurs américains (University Depaul, Chicago) qui se penchent très sérieusement sur ce problème. Quelles sont les lois canadiennes en matière de copyright ? Les lois françaises ? Belges ? " Il faut au préalable les déposer devant un notaire pour fournir une preuve irréfutable s’il est nécessaire de poursuivre devant un tribunal. " Ici, non : en l'absence d'un copyright, une tierce personne peut témoigner de la paternité de l'œuvre de tel ou tel auteur. On peut aussi, si on veut économiser les frais d'envoi et d'inscription à The Library of Congress, envoyer un exemplaire de l'œuvre à protéger à quelques amis choisis, ou parents, et à soi même. Jean Baptiste : Ce qui, Lise, complique les poursuites contre les délits sur le net, c'est que ces délits peuvent être commis à partir de tous les pays, qui n'ont pas tous la même législation en particulier sur les droits d'auteur. Donc un groupe de gens en réseau à travers le monde peut très bien contourner la législation de tel où tel autre pays. Et ce genre d'opération se fait à la vitesse de la lumière. Sur le net, des malfaiteurs bien organisés sont pratiquement protégés contre toutes poursuites. Pensons à la Chine qui pendant les jeux olympiques a voulu contrôler le net à partir de son immense territoire. Elle n'a pas pu retenir cette information : la voix de la petite fille si charismatique de l'ouverture des jeux était la voix d'une autre. Il y a un côté formidable dans cette impossibilité de contrôler le net. Il est impossible à un état totalitaire par exemple de commettre ses abus de pouvoirs en toute clandestinité, à moins qu'il fasse la chasse aux ordinateurs comme autrefois en France en 1940 les Allemands, les postes de TSF Lise Genz : (je suis morte de rire, Jean-Baptiste, j'ai l'impression de m'adresser à un robot !) Donc, mon cher 3389, vous me tirez les mots de la bouche ou du clavier ! Oui, il y a autant de législations que de pays mais la question, c'est de savoir si nous avons autant de flexibilités morales que de citoyennetés ? Je veux dire : est ce qu'il est permis dans un seul pays au monde, moralement parlant, d'aller voler l'œuvre d'un/une autre ? C’est simple, et voila tout. Quand ce monsieur irascible - qui a longtemps été, et très courtoisement, mon complice d'écriture, m'accuse de lui avoir "volé" le mot "Aujourd'hui". Et qu'il se permet, parallèlement, de refuser de me redonner MES textes, nous sombrons dans la torsion des mots - car enfin, de lui ou de moi, qui est le voleur ? Dis, JB, si on transportait cette conversation sur un fil de discussion - non, je n'ai aucune idée de "comment on fait" mais on pourrait essayer ? J'aimerais reparler de ce contrôle nazi des postes de tsf - contrôle qui a eu pour effet d'amener la population à faire exactement ce qui lui était refusé : jusque dans les campagnes les plus reculées, les gens ont eu leur poste, et écoutaient pan pan pan pan. Les français parlent aux français… les appels du Général de Gaulle. Je crois fermement qu'interdire n'a jamais rien apporté et n'apportera jamais rien. Nous devrions faire plus ample confiance en l'intelligence, au raisonnement. Jean Baptiste : Et oui lise CC, Mon frère André (qui lui n'est pas un robot) avait fabriqué un poste à galène avec de la poussière de mortier du vieux mur de 200ans( voir sur Google : poste à galène) et donc dans la ferme de l'Ajonc du bocage vendéen, j'écoutais avec lui : pan pan pan ... les français parlent aux français et alors j'entendais un beau plagiat du Général : Les sanglots longs des violons bercent mon cœur d'une langueur monotone, je répète... les sanglots longs des violons bercent mon cœur d'une langueur monotone... Pauvre Général De Gaule fallait-il qu'il soit bien triste pour plagier Verlaine, Mais je n'avais que 7 ou 8 ans et je ne savais pas qu'il plagiait. En fait c'était un code secret pour dire peut-être aux partisans de bombarder notre pauvre gare de Bressuire...où sur des wagons trônaient des armements... lise Genz : hé… hep ? Jean ! Coucou, 3389... Ta conclusion m'agrée, mis à part le bombardement, because je

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suis une non-violente… je ne bombarde pas, sauf a coup de savate ou de boules de neige. Faut chaud, chez vous ? (j’ai vu il y a deux ou trois jours une magnifique photo de ta petite fille tirée sur le traineau par votre Husky ! Superbe ! ) Au fait, est-ce que je vous ai envoyé Photomaton ? Ps : j'adore l'expression "être en beau maudit " difficile à prononcer pour moué, mais tu y arrives très bien, sans perdre "le plus bel accent de la France ", gens de Bressuire ! Jean Baptiste : Oui ! Lise CC ! Je L'ai reçu le jour-même de mon anniversaire, mais aucun rapport avec : lise CC : Aucun rapport, en effet - tiens, ce serait un bon titre, ça : AUCUN RAPPORT. Et on pourrait donc y mettre n'importe quoi, LOL ! On se moquerait bien qu'il nous rapporte quelque chose ou rien du tout - et là, le choix est vaste, des rapports matériels, moraux, émotionnels, and so on. On pourrait raconter des histoires qui n'auraient absolument aucun rapport entre elles, apparemment, mais qui seraient toutefois liées par des subtilités qui n'apparaitraient pas à première lecture - une sorte de jeu de piste. Toujours et encore Sherlock, lol :) J'ai une forme du tonnerre, en ce début d'année, pour me lancer dans ce genre de casse-tête intellectuel. Jean Baptiste Gourmaud : Aucun rapport ? Cela ne signifie pas que le lecteur ne sent pas germer en lui une signification qui s’impose à son esprit entre tous ces textes dont les auteurs n'ont recherché aucun rapport entre eux. L'écrivain Guy Cloutier, mon ami, écrit des livres dont les phrases sont une musique si je les lis à voix haute. Mais il m'est impossible d'y trouver un sens dans le texte. Il m'a dit : ce n'est pas à moi de construire du sens c'est au lecteur le mettre. Il a des admirateurs qui l'encensent très fort. Bien qu'il soit mon ami parce que nous avons fait les quatre cents cops ensemble, il m'est impossible de le lire. La musique de ses phrases ne fait rien naître moi, du moins au niveau de mon conscient-intellect. Ainsi, Lise CC, Ce projet de textes sans rapport, s'il se réalisait pourrait donner une œuvre qui illuminerait des gens et en plongeraient d'autres dans l'ire de l'obscurité. lise CC : Mais NOUS ALLONS LE REALISER, mon cher ! C’est [relativement] facile. Mais dites-moi, 3389, vous avez reçu mon invitation pour pouvoir écrire directement sur les pages ? Et pour les bloquer, le mettre en privé, etc. ? Je vous envoie une seconde invitation et un e-mail de mode d'emploi. Fa frette en titi, icitte... La neige, presque 3 pieds dans le jardin - on va réécrire Intempéries

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La grande bagarre - 2 J'apprends ce matin que le texte "Des Milliards de Visages" [lise-genz/des-milliards-devisages1] est devenu, dans l'espace d'une nuit, sujet à controverse dans la bagarre suivante : Un auteur, ayant participé à un projet d'écriture, et qui a vu son, ou ses textes rejetés au moment de l'édition papier du projet, a-t-il oui ou non le droit de publier ses textes non retenus et non publiés ? Et, si oui, quand ? La logique répondrait oui à la première question. Pourtant, il semblerait que non, si j'en juge par ce court billet publié ce matin par x sur le site public d'Amoureux des Mots/Google [http://groups.google.fr/group/amoureux-des-mots/web/page-de-dmo] : " Non, ben non. Décidément non. Il y a vraiment des voisinages que je supporte plus. [ ... ] Mais qu'elle se permette des leçons de probité ici, ailleurs, partout alors qu'elle met en ligne un texte à l'évidence inspiré par le projet "Photomaton" sans citer une seule fois ce projet, ni le recueil qui en a été tiré - dans lequel elle a des textes, faut-il encore une fois le redire ? Alors là c'est la goutte d'eau. Donc je me tire d'ici. " Comprenez-moi : ce ne sont pas les crises d'urticaire de x qui me navrent. J'en ai vu d'autres, et des pires. Non, ce qui me navre, c'est la mauvaise foi associée à l'idée que, lorsqu'un auteur a eu la mauvaise idée de publier un texte sur le site, groupe ou blog de quelqu'un, ce même auteur puisse être littéralement dépouillé de ses mots, de son idée, 6


de son texte. Qu'il prenne au créateur d'un site l'envie de mettre tout les auteurs à la porte - et bien sûr, cela arrive : nous pouvons voir cela tous les jours -, le créateur du blog ou site en question deviendrait légal propriétaire des textes abandonnés (souvent par force), dans les pages web lui appartenant. Autant pour la propriété intellectuelle. Mon texte, Des Milliards de Visages, n'a pas eu l'heur de plaire à x lorsqu'il a établi son choix pour l'édition papier de son anthologie. Je n'ai rien à dire là-dessus : c'était son droit, et je me suis inclinée. Il a été clairement établi en ce temps là que les textes non édités sur papier resteraient propriété du projet x pendant un an après la publication en édition papier. Ensuite, chaque auteur pourrait reprendre son ou ses textes et en faire ce qu'il voudrait. Photomaton a été édité en décembre 2006, c'est à dire deux ans avant que je me décide à publier Les Milliards de Visages sur Au Jour d'Hui. C'est mon droit, est-il besoin d'ajouter quelque chose ? Oui, ceci : le texte " Les Milliards de Visages" n'est absolument pas inspiré par le thème de xxxxxxxx : ébauché bien avant que le projet xxxxxxxx ait pris corps, j'ai par la suite adapté le texte au projet. Nuance ; à la place d'un photomaton, nous pourrions mettre n'importe quoi, une caméra, un appareil de photo, un lap top... n'importe quoi : le photomaton n'est pas essentiel à l'histoire. Et pour finir, les petites mesquineries relatives au choix du nom de ce site, Au Jour d'Hui, dont personne ne peut se targuer d'avoir le monopole, ainsi que les sarcasmes concernant les choix qui guident mes croisades, je passe sans siller : j'ai lu sous la plume d'amis de X des propos qui me semblent autrement pathétiques. S'il faut prendre la coquille et la tenue du pèlerin, que ce soit pour la bonne cause, me semble-t-il ; une cause commune, par exemple, comme celle qui nous occupe ici. C'est affaire non seulement de choix, mais de qualité d'âme. Mm d'homme, je veux dire. Cette grande bagarre n'est pas près de se terminer. ___________________________________

Sherlock Textes en solo Il y a des choses qui sont bouleversantes. Des éclairages subis, parfois violents, dans la vie de tous les jours et qui vont tout transformer. Ainsi une petite phrase lue inopinément ce matin retient soudain mon attention ; je m'écris silencieusement " Mais c'est bien sûr ! ". Quelque chose se déclenche : une idée, encore brumeuse. Un reflet, un peu trouble. Une nouvelle, à peine une ébauche d'histoire. Je vais suivre la petite phrase mot à mot, et bientôt je plonge dans un gouffre de découvertes. Accrochée à cette bouée : on en ferait un livre ; on pourrait en faire un livre ; et si on en faisait un livre ? Jusqu'au moment où je rends les armes : ok, je m'y mets. J"ouvre une page dans Word, c'est parti. Depuis, la petite phrase tourne en vrille dans ma tête, y creuse tout un réseau de circonstances qui n'ont rien d'atténuantes. C'est une phrase toute bête. Elle a échappé à l'auteur, encore novice, qui ignore que les mots nous trahissent. C'est un assemblage de verbes qui éclairent d'un jour nouveau des évènements passés auxquels j'ai participé, des réticences, des silences, des dérobades. Tout un ensemble de secrets qu'ils ont cru bien gardés, mis soudain au grand jour. La vérité toute éblouissante dans sa nudité. Me voici une loupe à la main, un flash light de l'autre, une casquette à carreau sur la tête. Mon prochain pseudo, ce sera Sherlock _______ Lise Genz

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Fri Jan 09 14:13:54 EST 2009 |lise CC | _________________________________________

Charles Brown " Mon père, Lewis Gregory Steinberg, était en mission quelque part dans le monde, comme cela lui arrivait fréquemment. Ma mère était accompagnée par le meilleur ami du frère de son mari, le peintre Charles “Chuck” Brown, célèbre pour les fresques magnifiques dont il a, plus tard, décoré le Mall of America de Bloomington (Minnesota). Chuck avait aussi une particularité qui le rendait précieux aux yeux de mes parents : bien qu’il préférât plutôt les messieurs, il s’était pris d’une grande amitié pour ma mère, qu’il considérait comme une sœur, et sur laquelle il veillait avec un soin jaloux en l’absence de mon père. Tout était donc pour le mieux, et dans la nuit du vingt cinq au vingt six avril, lorsque je commençais de manifester avec impatience le désir impétueux de découvrir le vaste monde, c’est dans la plus grande joie et sans avoir la moindre idée de ce qui allait advenir, que notre ami Chuck accompagnât ma mère à la clinique privée du fameux obstétricien, le Docteur Hosenberg. " La nouvelle en entier : /charles-brown/1 Lise Genz Sat Jan 10 19:14:08 EST 2009 |lise CC | 1 http://lise2cc.wordpress.com/lise-genz/charles-brown/

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Parler jardin Ecrit en novembre il y a plus de trois ans, un petit texte pour nous remettre en mémoire la magie de nos jardins au printemps Aujourd'hui, dans ces heures grisâtres ; dans la monotonie de la pluie en haut, en bas, partout ; dans le froid du vent et de l'hiver qui s'annonce, à pas menus : envie de parler jardin. Il est vert encore, avec de longues herbes non coupées. Il s'échevèle, anticonformiste, à la limite de l'anarchie, seul hirsute entouré de ses frères coupés au cordeau, rectilignes et manucurés. Mon pauvre jardin de broussailles, je suis sans doute la seule à le trouver beau, mon mal loti, mon mal coiffé. Il m'est apparu en Juin aux dernières heures d'une belle journée que nous avions passée à visiter des maisons à vendre. J'étais lasse et hargneuse. La maison qu'il entoure était, sur ma liste, la dernière à visiterle vendeur nous avait abandonné, persuadé que nous étions des rigolos, avec nos questions à la noix : y'a-t-il un puits ? Les voisins ont-ils des chiens ? À combien de kilomètres se trouve la plus proche bibliothèque ? Il parlait cuisine hyper équipée et nous lui répondions feux de bois : il avait abandonné avec un rictus qui se voulait sourire, en nous indiquant comment trouver la maison bleue. Nous y sommes allés par acquis de conscience, un dernier reste de bonne éducation, la peur, aussi, de ne savoir quoi répondre s'il nous téléphonait demain matin. Mais las, fatigués, affamés, nous n'avions plus qu'un hâte : en finir, retrouver notre maison - celle que nous allions vendre - et penser à autre chose. C'était compter sans le jardin. Le soleil se couchait presque et le caressait à l'horizontale, dans une gloire dorée. Il avait fait très chaud tout le jour, et quelqu'un avait actionné l'arrosage en éventail. Une large palette d'eau se balançait de droite à gauche, accrochant mille et mille gouttelettes aux branches, aux herbes, aux fleurs : nous n'avons pas vu que la pelouse avait besoin d'être tondue, que les pierres du perron étaient disjointes, qu'il manquait quelques vitres à la verrière de la véranda. Nous étions éblouis pas cette fine poussière de soleil que le couchant posait sur tous les reliefs, arbres et arbustes, rosiers et bordures, et seringuas en fleurs. Et le parfum ! Le lendemain, nous avons visité l'intérieur. Trois jours plus tard, nous avons acheté la maison. Nous y sommes, maintenant, et nous entrons en Novembre. Le jardin va se reposer pendant de longs mois. Je le regarde de l'intérieur, par les fenêtres : il est en train de se décomposer ; il s'endort de cette façon languide

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qu'ont les choses lorsqu'on le laisse aller à leur guise, sans les bousculer. J'avais envie de vous en parler : je crois bien que je l'aime. Lise Genz - novembre 2005 Sun Jan 11 15:45:27 EST 2009 |lise CC | _____________________________ Jean Baptiste : S'agit-il de ce jardin dans cette maison, je ne sais plus où, près de Carcassonne, où Gisèle C m'avait entrainé, par ce qu'elle voulait voir Lise CC qu'elle avait rencontré sur un site de Québécoises. Grand timide, je me savais tant à faire. Et ce jardin abandonné qui avait été si beau autrefois ! Une beauté que j'imaginais a chaque pas. J'ai l'impression que je le revois, en vous lisant. Ce jardin retrouvera sa beauté d'autrefois, quand les rénovations de la maison seraient achevées. Le soir, John, m'a ramené dans votre maison paternelle près de l'Abbaye de Saint Hilaire. Nous nous sommes mis à parler, petit à petit. Deux grands inconnus, lui l'américain, taciturne, avare de ses paroles, moi le Français de nature volubile, mais à qui la vie lui avait appris à retenir ses paroles dans les situations imprévues. Maintenant, tous les deux c'est tout spontanément et avec grand plaisir que nous parlons de tout et de rien chaque fois que nous nous revoyons. Le pouvoir du jardin ! lise CC : J'adore ce billet, 3389 ! C'est vrai, je me souviens parfaitement de votre arrivée dans la grande maison-château, avec ses plafonds démesurés, ses fenêtres à carreaux, son escalier de pierre grise, tournant. Je l'aimais beaucoup. Le jardin avait trois palmiers, vous souvenez-vous ? Et oui, Gisou et moi sommes parties "entre bonnes femmes" dans votre voiture car nous devions acheter le pain et la laitue. Vous, les hommes, aviez ordre de réchauffer la paella (je crois) et de préparer l'apéritif. Non, il ne s'agit pas de ce jardin. Je l'ai vendu l'année suivante, au moment où nous décidions de revenir aux USA, because le 9/11 et parce que je n'arrivais plus à prendre racine sur le sol français. Américaine un jour, américaine toujours - je parle du continent, là. ;) Mon jardin ci-dessus, dont je mettrai des photos bientôt, est celui de la maison bleue, que vous connaissez : vous y avez fait une halte avant que nous repartions, tous les 4, vers la côte atlantique, et mon bien-aimé Plymouth. Délire de homards : il est écrit quelque part que nous ne pourrons pas nous rencontrer sans faire bombance de fruits de mer ! Pour revenir aux jardins : du vôtre actuel, j'ai le souvenir d'arbres blancs, une neige de fleurs entourant la maison. Le nôtre, nous y plantons chaque année des arbres. Pommier, érable, deux poiriers, des petits cyprès nains pour faire une haie. Et puis les choses sauvages que je soigne amoureusement. Qui n'ont pas de nom. Que j'apprivoise en leur parlant tendrement. Mes voisins, en ont pris l'habitude : pour eux, je suis "the french lady, the one which is speaking to trees " On en ferait un livre, non ? On y parlerait de deux hommes qui parlaient jardin sans se connaître. Qui ont fait rimer jardin et amitié. On ne doit pas sous estimer la puissance des jardins sauvages. Emyole : Adieu mon vieux prunier...comme je t'aimais. Toujours le premier à fleurir au printemps, ouvert de minuscules fleurs toutes blanches et si odorantes que le soir, toute la maison en était parfumée. Cela durait quelques jours pendant lesquels nous voyions les premières abeilles s'affairer à en perdre haleine. Au moment de la récolte il fallait les ramasser ces petites prunes jaune et rouge et les trier car jamais je ne t'arrosais d'insecticides, ce qui avait pour résultat de nous donner beaucoup de prunes Habitées par un petit insecte...mais celles que nous pouvions manger étaient délicieuses, elles avaient une peau épaisse et l'intérieur était tellement sucré...un vrai plaisir...en fait, tu étais un prunier sauvage...tu n'étais pas baptisé...D'une année à l'autre, ce n'était jamais régulier, une année, il y avait une récolte à tout casser et l'année suivante...presque rien. De temps en temps, je te débarrassais de quelques branches pour permettre au soleil de venir te réchauffer le cœur. Après une trentaine d'années de cette vie, tu as fini par te lasser, tu perdais beaucoup de Branches et vint un jour où il fallut penser à t'enlever de là ; mais il me vint une idée, j'ai planté à tes pieds 2 vignes différentes qui ont commencé à te couvrir du tronc au bout des quelques branches qui restaient...il fallait te voir à l'automne couvert de rouge, vert, jaune, ocre, tu étais magnifique. Les oiseaux venaient faire leur nid dans tes branches...Pendant quelques années, tu as pris la forme d'une sorte de gros oiseau ; tu veillais sur le ntais très mal à l'aise. John remettait sur pied cette très vieille maison, que vous veniez d'acquérir. Il y ardin...puis...l’été dernier, à la suite d'un gros orage suivi de gros vents, tu as piqué du nez dans les fleurs...J’aurais du voir que la charge que tu portais était beaucoup trop lourde pour tes vieilles branches...tu serais peut-être encore là aujourd'hui...mais je crois que tu serais malheureux de ne plus personnifier cet être que j'aimais tant regarder à tous moments de la journée. Au printemps, lorsque la neige sera fondue, je serai triste de ne plus te voir là...mais tout près de là, nous avons planté un arbuste qui fleurira à son tour et nous rappellera le bonheur que nous avons eu à t'admirer. Adieu mon prunier.

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lise CC : oh, c'est vrai, YF, il est parti, ton vieux prunier ? Je l'avais trouvé si beau dans son rôle de tuteur pour les lierres. Tu as toujours les photos, n'est ce pas quelque part ? Si tu veux, nous pourrions en mettre une pour illustrer l'article ___________________________

L'Etagère à Livres L'endroit sur lequel nous rangeons les livres. Les étagères. Les Rayonnages. The Shelves, pour nos amis anglais, australiens, canadiens, américains. J'aime bien le mot "étagère", il tient d'étage, de gérer et de Tage. Il a un doux parfum discret de bon vieux temps. Il sent les confitures, les objets oubliés dans le coin obscur et qu'on ressort, un peu poussiéreux. Il nous parle de photos anciennes empilées dans les cartons à chaussures, photos de communiantes et de mariées empesées sous leurs voiles, engourdies de lourdes couronnes de roses. Les photos sont un peu jaunies sur les bords, on les devine fragiles, on sait qu'elles ne témoigneront pas encore longtemps de tout ce passé perdu. C'est dit : ici je vais classer les livres, ceux de mes amis, rencontrés sur le web, mes amis qui écrivent, qui éditent, qui corrigent, qui illustrent. Mes amis d'ici et de partout. Mes amis qui ont comme moi l’amour des mots et la passion du livre. Sun Jan 11 16:27:07 EST 2009 |lise CC | ______________________ Gaia : Lise, c'est une excellente idée cette bibliothèque. Je viendrai y mettre mes livres. Ces jours-ci je lis, à petite dose chaque jour, le roman de Jonathan Littell "Les Bienveillantes". Depuis le début de cette nouvelle année 2009, nous lisons, Paul et moi, "Psychanalyse et exégèse" de Eugen Drewermann. Lecture à haute voix, discussions, partage. Avons lu de la même façon, en décembre, "Le Christ philosophe" de Frédéric Lenoir. Et tant d'autres depuis notre retraite dans les années 90 : André Comte-Sponville, Luc Ferry, Michel Onfray, Tom Harpur, Albert, Jacquart, et plus encore. Tue Jan 13 11:56:39 EST 2009 |

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Ode au pain de nuit Du pain sur la branche, l'oiseau en partance S'envole lointain. Du pain sur la planche, le chat en romance Le contemple en vain Volant sous la lune, diaphane muse Farine sans faim Oiseau des misères, chat de nos gouttières, Poursuit ton chemin.

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L'oiseau dans la brume, son cri sous la lune Qui n'a pas de fin. Le pain qui parfume, le cœur à la Une, Je fuis mes demains.

______ L.G. (Les escaliers de la butte... la la, la la, la la …) Mon Jan 12 22:03:07 EST 2009 |lise CC | Gaia : Comme j'aime ce rythme ! Il ne reste qu'à mettre en musique. | Lise : C'était facile, sans doute un peu trop. Mais je n'ai pas pu résister.

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Hier Hier s'est évaporé. Nous accrochons nos

yeux à des yeux de neuf ans, une salle de classe avec ses trente élèves, le regard de l'enfance sous la frange de brume. Nous scrutons le regard des amies d'autrefois, en espérant entendre dans l'étroit carton pâle l'écho d'un triple rire croulant en roucoulade. Les trois inséparables, et nous riions beaucoup. Hier est mort quelque part, silencieux, loin de nous. Entre rue et trottoir, entre classe et solfège, entre petits chaussons de danse et aquarelle, entre rires aigués et cinéma refuge. Hier s'en est enfui derrière l'écran bleu d'un chalet d'altitude au sommet de l'alpage, entre les roseaux gris au bord de l'océan. Il ne reste qu'un rire, une larme, un parfum. Un nom, gravé en soi, plus fort que tous les âges. Ne reste rien d'hier, hormis le souvenir, brulant encore et chaud et vibrant de souffrance, au milieu de ma joue, de la gifle reçue, comme autant d'Ismaël rougissants sous l'insulte. Hier s'est bien effacé au long des mois passés. La brulure est toujours vibrante sur ma joue. On en tremble, on en meurt, on se croyait souffrants, transis, de vents vêtus, et d'herbes odorantes. On se voulait superbes, pétris de souvenirs, et de mots, et de sons, amants des amours mortes, compagnons d'infortunes, amis des longs chemins. On se croyait insaisissable, on est saisis en voyant ce qui nous a fait tant de mal. On en rit. On pense avec mépris à cette petitesse, à ces impérieux besoins d'eux, qu'on avait. On ne se comprend plus. On hoche un peu la tête, on retient nos mots tendres. Qui

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fuseraient encore par un dernier réflexe, un sourire amical, un geste d'amitié. On se voulait d'hier quand on n'est qu'aujourd'hui. L'aujourd'hui sans tes mots résonne dans les creux. Dans l'enfer de l'hier hurlent les souvenirs. Je ne crois plus en rien, ni aux lois, ni aux hommes. Aux chiens encore, peut-être, et aux chats de gouttière passants majestueux de l'ombre au clair-obscur. Dans l'enfer de l'hier, la mémoire vacille. Les mots sont là, écrits, et ne s'effacent pas. La gifle sur la joue garde son importance. Les lèvres de demain n'en effaceront rien. On n'oublie rien, vois-tu, dans l'enfer de l'hier. N'est pas Judas qui veut. Et pour la rédemption il faudrait un Jésus courbé sur la croix noire. A force de jouer sans fin au roi des rois, il arrive qu'on meure, n'étant pas fils de dieu. Dans la folie d'hier, là-haut, sur l'Acropole, comme aussi dans l'Olympe, les dieux se faisaient forts d'être sages et sans haine. Ils régnaient sur les hommes, et de leurs punitions, on a fait des poèmes au pays des chansons. Dans l'amour de l'hier la joie était vibrante, couronnée de mots riches entrelacés en phrases. Elle est tendre, la nuit ; et fragile l'aurore, au pays des langages. Dans l'horreur de l'hier, les mots se sont enfuis. Lise Genz - 14 janvier 2009

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Une semaine chargée En surfant les blogs, je remarque qu'il y a toujours une période de fébrilité, pendant laquelle les blogueurs écrivent jour et nuit, dirait-on. Et puis, un temps d'arrêt. Je connais bien ces arrêts brusques, pour avoir créé ou fréquenté des "sites", des groupes et des forii. Il arrivera que je vienne moins. Que je ne serai pas présente 24 sur 24, ni 7 sur 7. Et pas plus tard que les jours prochains, car j’ai une semaine chargée Demain : nous avons fini les travaux, mais nous devons nettoyer et ranger. Vendredi : branle-bas de combat, je prépare le déjeuner de famille du lendemain. Samedi : le fameux déjeuner, crêpes aux fruits de mer, jambon braisé à l'ananas, gratin de pomme de terre et haricots verts, salade, petites charlottes au chocolat et grand marnier. Dimanche : il fera froid, et puis c'est dimanche. Journée lecture. Ecriture en solitaire (moi) pendant le match de hockey (John), puis farniente et cocooning (les deux). On se repose. Lundi - ah… lundi, oui, je suis libre toute la journée. Ecriture : oui, mais ici, ou en solitaire ? Impossible d'en décider à l'avance. 12


Mardi, ah ! MARDI 20 JANVIER 2009, investiture de Monsieur Obama, notre nouveau président. Tout le monde le sait : nous passerons la journée devant la télé pour ne rien perdre de toutes les cérémonies annoncées. Avis aux Québécois, tout sera retransmis en direct sur… je ne sais jamais : cbn ? Yo ? Ceci nous amènera donc à mercredi 21 janvier, c'est à dire dans une semaine exactement. Et la fin de la période Pole Nordique que nous vivons depuis hier, j'ose l'espérer. Brrr. 14 chez moi, - 22 chez Yoli ce matin. Vivement le printemps ! ________ Wed Jan 14 15:21:22 EST 2009 |lise CC | Il y a environ 250 bals prévus a partir de ce soir et jusqu'à mardi ! Avec, mardi, l'apothéose : The Président's Bal / 10 : 00 Swearing-In Ceremony starts (on aura beaucoup de marching bands, dont celle des marine's Corps. Et le Pastor Rick Warrens lira l'invocation/12 :00 (plus ou moins) Discours du Président Obama / 14:00 Inaugural ParadLe bal présidentiel est précédé d'un diner-buffet à 19:30.

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Aujourd'hui samedi Ciel bleu, soleil et -10 dehors, mais c'est bon : mes invités arrivent vers 11 heures, j'ai tout juste le temps de me mettre en marche. Là, je suis encore en veilleuse. Tout est prêt, "presque". Vous vous en moquez bien, surtout vous de France, qui avez passé le cap du lunch. J'aurais bien fait la flemme au lit, moi, ce matin ... :( La nuit dernière, quelques pages du Journal de Jules Renard. Triste vie d'écrivain pourtant célèbre. Sarcasmes et humours délabrés. Cent ans plus tard, ça dure encore sur quelques fronts, le ghost de J. Renard continue d'inciter certains auteurs, hélas. Une nouvelle à écrire d'urgence sur l'auteur de Poil de Carotte. Sat Jan 17 08:18:04 EST 2009 |lise CC | _________________

La tendre passion des mots Voici un titre qui dit bien ce qu'il veut dire. (1) Une passion, mais pas une violence. Une tendresse, mais loin des romantismes échevelés. Et pour qui, tout ceci ? Pour les mots, pour le langage, pour la communication avec l'autre, avec les autres, avec soi, en solitude, en couple, en groupe, en quant-à-soi. Derrière l'éventail des pseudos, en face-à-face, dans la nuit, en plein soleil. N'importe quoi, mais dire ; n'importe où, mais écrire. Et pas n'importe comment : écrire en passion, en passionné, en passionnant, en tendre, en amoureux, en délicat, en rude tendresse, en tendre chevauchée, en mots de passion, en mots fruits, en mots fleurs. Dans la jungle des mots, se passionner de tendresse acquise. Se retrouver tendresse au creux des mots épars sur la plaine limpide de l'écran nouveau-né. Chaque matin qui vient nous apporte l'absence et le mot qu'on attend nous fuit, tendresse éteinte. Puis il vient de très loin en résonnant tambour sous la houle du vent des amours immortelles. Caché dans la soupente il se garde de rire, affublé d'oripeaux troués par les tempêtes. Il se veut arme et feu quand il n'est que passion, gardé de main de maitre sous le gant de velours. L'ami tendre le sait qui entrouvre les lèvres et cueille sur ta bouche le mot 13


abandonné Lise Genz (1) http://www.lavenuslitteraire.com/PlumesEtPinceaux.htm Sun Jan 18 07:51:24 EST 2009 |lise CC |

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Mardi 20 janvier 2009 - 7 :11 Washington

Allô, allô, ici l'Amérique. Il est exactement 7:11, et nos présidents, celui en place pour quelques heures, et le prochain, qui sera investi dans un peu moins de 4 heures (11h soit 17 heures en Europe), prennent ensemble une tasse de café accompagnée de muffins et donuts, dans la salle à manger privée de Mr et Mme Bush, à la Maison Blanche. La plupart des chaînes de télévision ne parlent plus que de cela. C'est le grand show du jour. Un jour mémorable : l'investiture du premier Président des Etats Unis représentant sur toute sa personne le melting pot, 40 ans après l'assassinat de Martin Luther King, lequel se contentait, le pauvre, de n'avoir qu'un rêve. Barrack Obama l'a poursuivi, ce rêve et il est arrivé à destination. Au second degré, nous serions en droit de nous demander si le rêve ne se transformera pas en cauchemar par la suite ? Mais nous aurions tort d'anticiper. Je m'émerveille une fois de plus de vivre dans ce pays, où les rêves se concrétisent, à condition que nous trouvions le moyen de leur donner des ailes. Il suffisait d'un seul homme, totalement américain, coloré africain par son père, coloré européen par sa mère, pour faire aujourd'hui la preuve que tout le monde peut arriver au but, l'essentiel étant d'en avoir un. De le poser devant soi, à distance respectable, mais dans le champ de vision. Ne jamais le perdre de vue. Tout faire pour s'en rapprocher chaque jour. Savoir les efforts à fournir, les sacrifices à faire, le travail à accomplir. S'y donner corps et âme. Choisir le compagnon, la compagne qui aura la même vision. Avancer d'un pas égal, sans se poser trop de questions - pardon : sans laisser voir que l'on s'en pose. Construire autour de soi une forteresse de certitudes. Ce n'est certes ni facile, ni donné à tout le monde. Mais ceux et celles qui peuvent ont de bonnes chances de se trouver un jour à la place de B.O aujourd'hui : au faîte. Allô, allô, ici l'Amérique : il est exactement 7:25, notre gouverneur, Monsieur Patterson (aveugle et démocrate) s'interroge dans l'interview qu'il accorde à une journaliste de CBS au sujet de "qui " il va nommer à la place d'Hillary Clinton, obligée de laisser son fauteuil sénatorial pour rejoindre l'équipe d'Obama, avec un titre que lui envient bien des personnages politiques. Qui remplacera Hillary ? On parle beaucoup de Caroline Kennedy, mais les New-Yorkais la boudent. Ils lui préfèrent Cuomo, avec réserves : Cuomo a souvent glissé jusqu'au trébuchement pendant sa carrière politique. Mr. Patterson dévoilera son choix demain. En attendant, il est à Washington, avec les autres quarante neuf gouverneurs des états américains qui vont assister à la grande cérémonie qui se prépare. Nous voyons à la télé les cordons de police qui gardent les gares, les arrêts d'autobus, les couloirs du métro. La foule avance dans le calme, sourire aux lèvres. Les policiers sont courtois, renseignent, aident à pousser les fauteuils roulants. Tout se passe dans un Calme que, méditerranéenne jusqu'au bout des nerfs, j'admire et j'envie.

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On nous dit que Mr et Mme Obama vont s'arrêter dans une église (Méthodiste, si j'ai bien compris - sinon, pardonnez-moi) pour assister à un service religieux. Sur CBS, il est 7:38, et il fait toujours - 8 ici (état de NY). Je reviendrai, et pardonnez-moi à l'avance si je suis spécialement bavarde ; c'est que j'ai une raison : ce mardi 20 janvier 2009 passera trop vite. Lise Genz Tue Jan 20 07:55:18 EST 2009 |lise CC

mardi 20 janvier 2009 - 8 :15 Washington, USA - 8 :15

Vue plongeante sur l'esplanade devant le capitole. Rangées au cordeau, des milliers de chaises vides attendent les invités d'honneur. Sur les trottoirs, la foule encapuchonnée. Il fait très froid, - 2 ou -3 selon le Weather Channel. Les jeunes courent en traversant le boulevard, pour se réchauffer, disent-ils en riant à un policier qui les réprimande. Ils repartent à allure raisonnable. Aujourd'hui, il est interdit de courir, de crier, de porter sur soi des back-pack, des armes blanches ou à feu, des bouteilles en verre, d'amener des chiens, ou des vélos. Sécurité oblige. Les spectateurs debout se massent au fond de l'esplanade, au pied de l'obélisque, de l'autre coté du plan d'eau. Emmitouflés dans des couvertures, bonnets enfoncés jusqu'aux sourcils, la plupart ont en main ces énormes chopes en papier contenant le café Starbucks, qui va faire fortune aujourd'hui. 8:28 : on nous apprend que Monsieur Cheney, vice-président sortant, s'est fait mal au dos en déménageant des affaires personnelles hier (ou ce matin ?) et assistera donc à l'investiture en chaise roulante. Un vice-président qui déménagerait ses affaires luimême ? Au point de se faire un lumbago ? Voila qui est étrange pour le moins. S'agissaitil de documents secrets que Monsieur Cheney ne voulait ni laisser traîner, ni voir disparaître ? Nous en saurons plus demain : les médias américains sont friands de ce genre de chose. 9: 39 : au travers d'une fenêtre, à la Maison Blanche, nous voyons des peintres se dépêcher de repeindre une pièce. On nous dit que 95 personnes s'affairent actuellement à redecorer l'appartement présidentiel : ils ont 4 heures pour tout mettre en place. Ils ont pour ordre de TOUT mettre en état de fonctionner, nourriture dans les réfrigérateurs et jusqu'aux peluches sur les lits des petites filles. Erratum : Le service religieux avait lieu à St John's Episcopal Church, et les Obama sont arrivés à 8:50, avec 35 minutes de retard sur l'horaire. ______________ Tue Jan 20 09:45:09 EST 2009 |lise CC | _____________ Maison Blanche

Michèle et Barack Obama sont entrés à la Maison Blanche il y a quelques minutes, accueillis sur le perron par Laura et Georges Bush. Michèle Obama porte depuis ce matin un ensemble robe et manteau de cérémonie d'un 15


jaune paille. Laura Bush porte un tailleur gris clair. Madame Obama a présenté à Madame Bush une boite blanche ornée d'un ruban rouge. Nous saurons plus tard ce que contenait cette boite, que Madame Bush a donné à un de ses aides, d'un geste assez désinvolte, dès que les présidents et leurs épouses ont pénétré dans la demeure présidentielle. C'est la première fois dans l'histoire des 43 investitures qu'une future First Lady offre un cadeau à la First Lady sortante Voilà, on vient de nous dire ce que contenait la boite : c'est un "journal" et une plume pour aider Laura Bush à écrire ses Mémoires… hé, on n'en sort pas, de l'écriture ! _____________ Tue Jan 20 10:04:41 EST 2009 |lise CC Jean Baptiste : J'ai assisté à cet événement en écoutant Barack Hussein Obama prêter serment, à RadioCanada. Puis son discours. Il y avait la voix d'un grand orateur. Cependant je n'arrive pas à découvrir dans ce discours la phrase qui traversera les âges. J'en reste donc à " Yes we can " Emyole : M. & Madame Bush viennent de quitter...il est 13hres et voilà que débute une nouvelle ère...Comme canadiens nous avons assisté à la retransmission des cérémonies à la télé. Nous vivions une page d'histoire ! Lise CC : Il y a le fameux "Yes, we can " et il y a depuis hier " We want not fear, we want hope", en réaction contre la politique de peur installée par Bush et Cheney pendant les derniers huit ans, non seulement aux USA, mais un peu partout dans le monde. Je vous le dis, c'est un grand soulagement pour tout le monde, ici. Emyole : En effet, il me semble que nous respirons mieux depuis que Bush est enfin parti, et moi aussi j'attendais le fameux. "Yes we can"...et le "We want no fear, we want hope" est rafraîchissant...si je peux dire ;-) lise CC : Mr. Bush et Laura ont été chaleureusement accueillis au Texas, leur état-patrie où ils viennent d'acquérir une superbe propriété. Tiens, je vais essayer de trouver une photo : pour les amateurs d'architecture moderne à l'américaine. Et de cactus. Je lisais hier un commentaire (français) qui se voulait hilarant sur les estropiés qui ont laissé le gouvernement et le pays exsangues, et qui ont eux même quitté la cérémonie d'investiture de Prez O. dans des fauteuils roulants ou des ambulances. Commentaires qui ne m'ont pas fait sourire, je suis imperméable à un certain humour qui fait feu de tout bois : pour moi, Cheney en fauteuil roulant, et bien que je sache que ce n'est qu'un petit accident, je me dis qu'il n'a pas eu de chance. Kennedy en ambulance, c'est très triste, étant donné l'issue fatale qui ne va pas tarder. Et Bush Père qui a tant de mal à marcher, ça fait mal au cœur, non ? Il y a l'homme, derrière le titre ; nous le voyons clairement. Pourquoi se croit-on obligés de faire de l'humour avec le malheur physique ? _____________________________________

mercredi 21 janvier, 11 :12 Le Journal

Le travail n'attend pas, c'est le modus vivendi du président Obama. Cela sied au peuple américain, qui n'a jamais rechigné devant l'effort. Ce matin, après un court office religieux, tradition oblige, Prez O a commencé son boulot : Guantanamo, demande d'un délai de 120 jours, suspension des "mesures sécuritaires". Prez O espère bien que dans ces 120 jours de délais, son équipe et lui trouveront un moyen d'effacer à jamais de la carte le nom même de Guantanamo. God help us. Hier, au Congrès, Cornyn, sénateur républicain du Texas, a fait gripper la machine administrative en demandant de différer la confirmation d'Hillary Clinton au poste de Secrétaire d'Etat. Il a ainsi forcé le nouveau président à commencer son mandat présidentiel en l'absence de deux membres les plus importants de son cabinet : Hillary Clinton, Secrétaire d'Etat, et Timothy Geithner, le Secrétaire-Trésorier, dont le poste sera confirmé dans la journée Une réaction de Diane (Illinois) sur Firstread.com : 16


"Apparemment, le GOP (1) n'a pas encore pigé. N'ont-ils pas encore compris que le public a rejeté ce genre de politique avec les dernières élections ? Le peuple est fatigué des obstructions du GOP. Le peuple veut in gouvernement uni, qui va travailler en cohésion. [...] Hillary a obtenu le support des républicains aussi bien que des démocrates et elle sera confirmée dans son nouveau poste très facilement aujourd'hui. Les gens comme Cornyn doivent être remplacés ; il n'y a plus de place pour des gens comme eux dans le nouveau gouvernement en place à Washington. Si le GOP continue avec sa vieille façon [de traiter les affaires politiques], il ne reviendra pas à la tête du pouvoir [présidentiel] pendant longtemps. C'est exactement ce qu'Obama a dit dans son discours : les Américains ont choisi de remplacer la peur par l'espoir. Le GOP serait sage d'écouter le message " Nous sommes au lendemain du 20 janvier, et la fête ne fait que commencer, contrairement à ce qu'on voudrait nous faire croire. Bravo Diane, de l'Illinois, pour son commentaire clair et sans bavure, qui dit bien ce qu'il veut dire. __________________________

jeudi 22 janvier Ted Kennedy

Caroline Kennedy a annoncé hier soir qu'elle abandonnait le parcours dans la course au fauteuil sénatorial laissé vacant par Hillary Clinton. Mardi, au cours du déjeuner qui suivait l'investiture du Président O., l'oncle de Ms Kennedy, Ted Kennedy - le plus jeune frère de John Kennedy, Président américain assassiné à Dallas, (TX) - a été victime d'un malaise. Ted Kennedy est gravement malade, et ses jours sont comptés. Tout le monde pense que le retrait de Ms Kennedy est dû à l'évolution de la maladie de son oncle. Notre gouverneur Patterson dévoilera le nom de celui ou celle qui prendra place dans le fauteuil laissé vacant par Mme Clinton au Sénat. Restent en lisse Andrew Cuomo, attorney générale de l'état de New York et Kristen Gillibrand, une jeune femme dynamique bien engagée en politique, dont je vous offre ce matin le portrait. Thu Jan 22 08:45:22 EST 2009 |lise CC | _________________________

Trop de notes ! C'est le reproche de l'Empereur d'Autriche, totalement analphabète en matière de musique, au jeune Mozart déjà et pour toujours le génie que nous connaissons depuis près de 250 ans. Trop de notes. Une trop grande quantité de notes. On se souvient, dans l'admirable film Amadeus, du regard éperdu du musicien, et de son rire. C'est dans un autre ordre d'idées ce que l'on reproche au Prez O dans son discours d'investiture : trop de mots, qui ne mènent nulle part. Trop de phrases, creuses. On attendait autre chose. On attendait des mots, mais pas ceux qu'il a choisi de dire. Il est victime de sa popularité, de son savoir, de son talent : il a choisi un discours simple, et nous attendions des phrases que nous pourrions répéter dans un demi-siècle. Des " I have a dream", des " Ne vous demandez pas ce que votre pays peut faire pour vous ; 17


demandez vous ce que vous pouvez faire pour votre pays ". Mon ami Jean l'a bien compris, et c'est son commentaire d'hier qui m'a incité ce matin à reprendre le discours d'O. lignes par lignes. C'est vrai, rien de transcendant. Et pourtant... Pourtant, il a fait passer un message, et les américains l'ont capté. A travers des phrases simples, et même si dans la foule il n'y a pas eu de grandes vagues d'applaudissements, l'élan a été donné : " Au boulot, les mecs. Fini l'amusement : maintenant, on retrousse les manches et on bosse…" Vous n'avez pas entendu ? Moi si. A travers les mots, j'ai l'oreille fine. Thu Jan 22 09:45:29 EST 2009 |lise CC | __________________________ amanodelluomo Says : J'ai aimé ce discours, le discours d'O. Je l'ai enregistré sur ma freebox et ne l'ai pas effacé, je le garde. Cet homme est bon et il va chercher le meilleur au fond de nous mêmes. Cet homme m'inspire du respect et me donne espoir. Avec lui j'ai envie d'être américain... lise CC Says : Moi aussi, j'aime cet homme, Lama, seulement, j'ai peur. Sera-t-il assez fort pour résister aux puissances qui rodent et reniflent autour de lui, cherchant le défaut de la cuirasse. Il n'est pas un dieu, il n'est qu'un humain comme vous et moi, et pas des plus puissants. Déjà, je le sens qui se fatigue. Combien de temps encore tiendra-t-il devant la malfaisance du monde ? Merci pour votre passage et votre commentaire. ____________________________

Un jeudi politico-économique USA / Hillary Clinton : Après que sa nomination ait été confirmée par 92 voix contre 2 par le Sénat, hier mercredi 21 janvier, la nouvelle Secrétaire d'Etat Hillary Clinton a adressé une lettre de résignation de son poste de Sénateur au Vice-président Joe Biden, qui est encore Président du Sénat, ainsi qu'au gouverneur de l'état de New York, David Paterson. Celuici est donc maintenant en mesure d'annoncer publiquement et officiellement qui il a choisi en remplacement d' H. Clinton comme sénateur de New York. Chômage : En 2007, il y avait un peu plus de 7 millions américains sans emploi, ce qui portait le taux de chômage à 4,6 % sur l'ensemble des Etats Unis. Aujourd'hui, nous sommes à 7, 2 %. Avec plus de 11 millions d'américains sans emploi. Le bond en avant du chômage est presque de 50 % de plus que ce qu'il était il y a un an. Bravo et merci Monsieur Bush ! " La façon la plus simple pour une entreprise de sauver ses finances c'est de garder le plus petit inventaire possible et de virer ses employés " dit Robert J. Barbera, économiste principal du Groupe Investment Technology. " Et n'importe où que vous regardiez, c'est exactement cela qui est en train de se passer." http://www.nytimes.com Thu Jan 22 11:45:58 EST 2009 |lise CC | __________________________

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Jean Baptiste Gourmaud : Hilary Clinton, secrétaire d'état. Obama a dit aujourd'hui : Israël à le droit d'assurer sa défense Et Le Hamas a répondu qu'Il ne reconnaissait pas le droit à l'existence d'Israël. Alors il va falloir des trésors d'ingéniosité diplomatique pour résoudre la quadrature du cercle. Yes we can. lise CC : Remarque, si Israël n'existe pas, il va lui être difficile de bombarder Gaza, non ? Difficile d'y comprendre quelque chose : tout le monde a tort, personne n'a raison et les innocents paient. De trésors d'ingéniosité, oui ; et rien ne sera résolu avec des discours. Obama n'est pas encore allé au feu : nous verrons comment il va s'en sortir dans les semaines qui viennent. Pour l'instant, c'est encore la lune de miel ;) lise CC : Hillary Secrétaire d'Etat, vi vi vi ! Et à sa place, dans le fauteuil sénatorial, une jeune femme de 42 ans, Kristen Gillibrand, une travailleuse acharnée qui ne se laisse pas monter sur les pieds, mais ne le fait pas voir : c'est une blonde. Alors, hein ... ? :) ____________________________

A thank you note Reçue à l'instant :

Lise -Thank you for being part of the most open inauguration in our nation's history. As we begin the work of remaking America, we must draw on the common hopes that brought us together this week. I'm counting on you to keep the spirit of unity and service alive. You can visit http://www.pic2009.org/whitehouse to learn about our plans to bring change to America, and how you can get involved in the work ahead. We face many challenges. But we face them as one nation. And we have seen, time and time again, that there are no limits to what we can accomplish when we stand together. Our journey is just beginning. Thank you for all you do, President Barack Obama This email was sent to: lise.genz@yahoo.com1 Ahhhhhhhhhhhhhhh c'est chouette ! Thank You, Mr. President ; I am honored. Lise Genz Thu Jan 22 20:31:40 EST 2009 |lise CC | __________________________ Kouki : mais c'est trop d'la bombe çà ! Mais tu lui as fait quoi à Barack, Lise ? Lise : ah tu as été la SEULE à réagir ! Bon, alors, je lui ai fait quoi - le pauvre, qu'il pourrait être mon fils, t'as pas honte (Morte de rire !) Et ben, tout simplement, d'abord, je fais partie des gens qui donnent un peu de leur fric pour soutenir le Democratic Party. Ce que je peux, et je peux peu. Mais ils sont courtois, et m'invitent a toutes les cérémonies - ainsi, je n'ai pas pu y aller, mais j'étais hier invitée à Glen Falls à un Labor Day BBQ chez Kristen Gillibrand, notre Congresswoman de l'état de New York à Washington, c'est elle qui a remplacé ma chère Hillary (Clinton) lorsqu'elle a été (Hillary) nommée Secrétaire d'Etat par Prez O. Donc, ensuite, pour le message ci-dessus : j'ai envoyé mes félicitations par écrit à Obama lorsqu'il a gagné les élections présidentielles. Dis toi bien que des messages comme le mien, il en est parti quelques millions le même jour, ce n'est pas une rareté... mais, hé, oui, ça fait plaisir. Je jubile ! Kouki : ben vouihh, çà casse la baraque ce truc là ! Tue Sep 08 11:11 :52 EDT 2009 | Lise : Tu veux en recevoir un ? Kouki : tu es un cœur, mais non, c'est juste que c'est tout mignon ... ne fais pas comme si c'était si facile ... _____________________________

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La fin J'ai horreur des fins, elles n'apportent rien, elles sont morbides, indécentes et puériles à la fois. Les fins devraient être interdites. Les congés, eux, sont acceptables, qui nous donnent le temps nécessaire à la ressource, à la remontée vers la source, pour être plus précise. Mais une fin ! C'est le geste de colère qui tue, c'est moche et impardonnable. Grossier comme la mort. Je suis experte en mort, je l'ai connue très tôt dans ma vie. L'illusion établie, le cliché absurde, le stéréotype, c'est qu'elle nous grandirait ; la souffrance, j'entends, qui résulte de la mort. Et c'est faux : tout ce qu'elle sait faire, c'est nous prendre un morceau de nous-mêmes, un morceau que nous ne retrouverons jamais plus. Je me sens parent des sites, des blogs, des groupes, des forums (forii) que j'ai connus ; non pas seulement fondés, créés, mais encore, je le répète : connus. En conclusion, merci à WordPress qui m'a permit de ramener mes mots ici, et zut à MSN qui croit avoir trouvé le mot de la fin. Comme si le mot pouvait un jour finir ! Quelle illusion ! Tout ceci pour expliquer pourquoi je m'obstine à venir ici de temps en temps, au petit matin de préférence, et déposer en coin de blog des élucubrations qui n'intéressent personne mais "font nombre". Car il faut "faire nombre" sous peine de voir nos blogs disparaître dans les limbes Ouaibique. Peut-être aussi, en filigrane, un désir de lutter contre la mort. Je veux dire : contre la fin de ce quelque chose qui est un texte, une lettre, un début de nouvelle, un roman peut-être ? Qui pourrait être un livre. Quelque chose en mots, qui est vivant, qui est né un jour sous une certaine étoile et qui grandit péniblement, par saccades.

Il y a des enfants malingres qui ont besoin de plus de soins que d'autres. Plus tard, alors qu'on ne s'y attends plus, brusquement, au détour d'une adolescence fragile, ils se mettent soudain à pousser, à croître et embellir et deviennent la joie et la fierté de leurs parents : être parent, c'est avoir en soi, quelque part, cette fierté en attente. Lise Genz / Sun Jan 25 10:42:35 EST 2009 |lise CC | __________________________ Sérénité relative : Vous avez faim de la vie, la vraie, celle qui explose, fi de la fin qui suspend la vie, et qui ferme une page dans laquelle vous voyez disparaître ce qui avait fait la votre, par capillarité. Cela ressort en vous dotant d'une page d'écriture ; rien ne meurt| Lise : Peut-être pour avoir connu des fins qui sont des gouffres insondables cette fureur en moi de continuer, de ne jamais baisser les bras, abandonné ? S'accrocher à la vie, c'est parfois, un talent impardonnable. Il faut faire avec. Je sens qu'en parallèle avec ce petit texte, il faudrait célébrer les commencements, de la feuille blanche à l'enfant qui naît, du premier baiser à l'herbe qui pointe sous la neige, les commencements, les recommencements et l'espoir, la joie qui va avec. ________________________

Illusions au Carrefour et ailleurs Dans l'illusion Carrefour, on achètera la folie du jour. Il m'a fait le coup du lapin dans le chapeau et depuis, il a disparu. C'était dans un grand carrefour, un Maxi-Carrefour, un Géant-Croisement-de-Chemins camouflé en épicerie. Même pas fine. Nous étions au rayon des volailles et il a disparu au moment où je lui demandais s'il préférait la dinde ou la pintade. J'ai entendu un souffle, une brise qui finissait par "ade" ; j'ai donc pris la pintade, je me suis retournée. J'étais seule, plus seule que jamais. J'avais l'air fin avec ma pintade. Je l'ai mise dans le caddy, à la caisse, quelqu'un l'a mise dans un sac de plastique. Je l'ai trimballée dans la voiture jusque chez moi - ce n'était plus chez nous. Je l'ai déposée dans le congélateur. Elle y est toujours. Une illusion qui persiste sans signer, c'est celle qui nous entoure quand on s'avance dans

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les allées d'une grande surface alimentaire comme Carrefour, ou comme, ici, Price Chopper ou Lunds, ou BJ's : l'illusion d'être riches et comblé(e)s. On a TOUT à porté d'œil et de main. TOUT, entendons bien : tout ce qui se mange boit fume écoute voit porte lave nettoie goute lit voyage vacances ; et j'en oublie. Un gros TOUT illusoire. On engrange. C'est à qui remplira le caddy jusqu'à la gueule, même que des fois ça déborde. A BJ's, bernique : si tu n'as pas pris la précaution de te munir de grands cartons, ne compte pas sur le magasin pour te fournir en sacs, ni plastiques ni rien : ici, c'est le "warehouse", le dépôt, si tu préfères. Tu te sers ; tu mets en sacs si tu as pensé à en prendre avec toi ; tu paie avec ta carte de membre ; tu passes une première fois entre les montants d'un truc antivol qui s'enfarge les pinceaux dans les fleurs du tapis périodiquement et hurle comme un forcené même quand le client n'a rien acheté - ou alors, c'est une manœuvre pour lui faire avoir mauvaise conscience ? Car enfin, ne rien acheter à carrefour, ou à BJ's (qui est mon carrefour à moi) ou à Max, ou à Wal-Mart Food, c'est une trahison évidente contre la société et par extension contre toute notre culture de bouffe. Et quand tu arrives à la sortie, tu repasses une seconde fois entre les fourches caudines de notre vingt et unième siècle. Nostalgie de la porte vitrée qui s'ouvrait avec un tintement aigrelet, un peu triste, lorsque j'allais acheter le sel, le beurre et le radis chez ma vieille amie Liline. Chez Liline, la sonnette était directement attachée par une ficelle à la poignée de la porte. L’épicerie n’était pas plus grande que mon living-room et certainement moins propre ; et tu sais que je ne passe pas ma vie l’aspirateur autour du cou ! Dès l’entrée, on était accueillis par une forte odeur de roquefort qui dominait un tas d’autres effluves, allant de l’ail en chapelet au dessus de la caisse enregistreuse, jusqu’aux jambons sec suspendus aux solives - car la maison de Liline avait bien 300 ans - en passant par toute une gamme de parfums de fruits et légumes, négligemment présentés dans des cageots de part et d’autres des allées, et qui vieillissaient tant bien que mal. Telle qu’elle était, la vieille épicerie de Liline me ravissait, et, en vacances, je trouvais toujours un prétexte pour y faire une descente journalière Lise Genz, 14 / 04/ 2009 ___________________________

L'orgueil [ ... ] Il n'y a rien à faire.

Tordu, vrillé de souffrance, il continue pourtant d'avancer en regardant droit devant lui. Elle a eu tort. C'est dit une fois pour toutes. Qui a parlé de miséricorde ? Ce mot suranné ne se porte plus depuis longtemps. Qui a parlé de pardon ? Pardonner, c'est s'humilier un peu. L'orgueil s'avance, triomphant. L'homme continue de marcher à grands pas nerveux en le portant en lui. L'orgueil devient une roche dure. C'est un bloc sans frissons, serré, rigide. La lettre reçue ce matin, il la froisse de colère au fond de sa poche. La lettre, qui ne parle pas. La lettre qui demande une nouvelle chance, en silence. [... ] Le texte complet : http://lise2cc.wordpress.com/textes/lise-genz/lorgueil1 Tue Jan 27 08:26:31 EST 2009 |lise CC |

______________________ La voici Aujourd'hui mercredi 28 janvier, cinq semaines après la première ice storm qui a fait tant de dégâts aux alentours d'Albany (NY), voici la seconde tempête de neige et de glace de l'hiver, première de l'année 2009 : nous y sommes en plein dedans, mais sans vent, cette fois. Ouf ! 21


Hier j'apprenais qu'une tempête d'eau et de vent s'est abattue au nord de Pyrénées. Elle a touché les lieux où vivent mes amies ARA, Mab, Esther. Est-elle montée jusqu'en Auvergne, la tempête française, chez mon amie Michèle ? A-t-elle touché Caroline et sa famille, à Toulouse ? J'ai cherché avec quelque fébrilité, je l'avoue, des nouvelles de Marie-Jo, Edmonde, Suzanne, Benoît, Paul et Marthe, dans l'Aude. Du coté de Biarritz, des nouvelles de Jean-Christophe et sa famille. Je n'ai aucune nouvelles d'eux. On vit des heures dures dans la tempête. Nous étions épargnés, pendant tant de siècles. " France, au climat tempéré " ; qui a eu l'audace d'écrire cela ? Je pense à vous tous et je mesure l'inanité de l'amitié virtuelle, puisque je ne peux rien vous offrir d'autre, que ma pensée. On pourrait s'étonner que la météo joue un aussi grand rôle dans ma vie. C'est que je suis une âme simple, qui se recroqueville dans le froid. L.G. Emyole : Bonjour ma voisine, ici aussi il neige...elle tombe depuis quelques heures, tout est calme. Lise : Ici aussi, plus au sud, neige et neige et neige, plus de 30 cm depuis hier soir. Et chez toi ? Le Québec qui serait sans neige en janvier ne serait plus le Québec. L'état de New York ressemble à ton pays, en moins froid. Nous avons. Quoi ? Une, deux semaines d'avance, au printemps ? Je me souviens que nous discutions arbustes et plantations pour le jardin, l'an dernier, vers la fin avril. Mais as-tu remarqué comme les choses plantées poussent vite, une fois le printemps venu ? Dans une paire de mois nous ouvrirons ici des pages JARDINS, avec des photos, hein ? Allez, on en a encore pour deux, trois petits mois. (Soupir !) En attendant, je tricote ! Et toi ? Emyole : Non, pas de tricot pour moi auj. j'ai passé trop de temps à l'ordi. Il neige toujours mais nous aurons moins de neige que chez-vous...on nous en prédit une quinzaine de cm. Présentement il fait la même température que chez vous mais tu as bien raison, ordinairement c'est plus froid ici. Ah, le printemps et les fleurs, quelle belle époque, dans quelques petits mois. ;) Lise : et aujourd'hui, gambades sur le grand, l'immense parking de Wal-Mart, il parait qu'il faisait froid mais je suis dure au froid, moi m'en moque. Les petites collines de neige sur ces grands parkings : on y ferait de la luge, si on avait encore 8 ans. La pelle est en permanence dans l'entrée, les bottes, les bonnets, les gants fourrés, le duffle. Mon dieu que tout ceci me manquerait, si j'habitais un pays au climat tempéré ! Tu ne nous as encore rien dit de ta rivière : est-elle gelée ? Les gens patinent-ils ? Le Mohawk est gelé de bord en bord, blanc, une énorme route qui court majestueuse entre des rangées d'arbres de noël. Y'a pas, c'est beau, l'hiver ! Emyole : Nous avons tellement de neige cette année, avoir 8 ans, je passerais mes journées à glisser. La rivière ? Oui...elle est bien gelée et plein de ski-doos y circulent, je ne sais pas ce qui se passe cette année, mais la ville de St-Hyacinthe a déblayé seulement une petite partie sur la rivière, cela fait une petite patinoire...cependant mes voisins de l'autre côté, vraiment en face de nous, ont fait une belle grande patinoire pour eux, avec des sapins à chaque bout, c'est très joli. Les gens commencent à prendre des marches sur la rivière. C'est très beau l'hiver ! Magnifique, je ne saurais m'en passer. Lise : Tiens, je ne sais pas toi, mais je commence à penser bottes, bonnets, manteaux chauds, et sapin de noël. Ce dimanche, c'est à dire demain, John et moi allons préparer le jardin d'automne et en même temps, placer les crochets pour les deco de Xmas. L'an dernier, souviens-toi, nous avons eu un Noël sans sapin : et je ne voudrais pas que cela recommence cette année : je vais mettre le paquet, decos dehors, dedans, partout ! Puis la cheminée, pour l'économie d'énergie, et le plaisir. Sat Sep 12 10 :28 :51 EDT 2009 |

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La Passoire du génie de l'hyper Il s'en passe, des choses, à Carr'Four ! Vous savez bien, ce grand magasin dans lequel on 22


trouve de tout et son contraire ? Alors que je passais dans l'allée des ustensiles de cuisine, un jeune homme rondouillard et prématurément chauve m'a accostée : - Madame, vous n'auriez pas besoin d'une passoire ? Tiens, ça tombait bien, justement, oui, j'avais besoin d'une passoire, assez grande, avec des trous plutôt petits... Enfin, non, pas trop petits, quand même ; assez grands pour laisser passer les... Mais assez petits pour retenir le... Vous comprenez ? - J'ai ce qu'il vous faut, me dit le jeune homme. En plus de ses yeux clairs et son bon sourire, il donnait l'impression d'écouter parfaitement et de parfaitement comprendre ce dont j'avais besoin. Il m'a tendu une passoire à trous variables. Je suis sortie du magasin avec ma passoire. Quand il fait beau, que le soleil est gros comme une montagne, et que la joie roule sur moi en avalanche de rires et de chansons, les trous de ma passoire ne laissent rien passer. La joie, le soleil, le bonheur, tout reste à l’intérieur. Quand il fait larme et que l'orage gronde au creux des torrents, les trous de ma passoire s'agrandissent pour que passent au travers les cailloux de la haine, la pluie des mauvais jours, le sable des écorchures, les oursins ravageurs. Que passent au travers les jeunes vies arrêtées quand il fait l'arme et tue, et tire sans savoir au contact de détruire, au vouloir de folie, au pouvoir de malheur en clou de désespoir. Avec les ans, les trous de ma passoire s'agrandissent. Sont passés à travers les illusions perdus, tous les rêves d'enfance, tous les enfants trompés, tous les amours perclus, tous les bonheurs funestes, toutes les joies enfuies, toutes les vies perdues. Sont parties vers l'égout l'amer de la colère, le triste de l'absence, le rêche du désert. Ce soir, je vous le dis, au fond de ma passoire, prenant toute la place, plus lourd que le silence, plus grand que l'existence, l'amour seul est resté. Lise Genz - 16/04/2007 / posté sur AJD'H le 2 fevrier 2009

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La Paix au village Cette fois, c'est décidé, il s'en va. Ce sera vite fait : il ne possède rien. Tout ce qu'il utilise, il le vole, ou bien on le lui donne, bon gré mal gré. Il a le couteau rapide, Tim le Borgne. Il n'est pas plus borgne que toi ou moi, mais il porte un bandeau sur l'œil pour faire la manche à la porte des restos ou du super marché. Et le couteau, c'est nécessaire ; c'est ça ou un chien. Remarque, il y en a qui ont les deux. Les nantis. Tim a réalisé, hier soir, qu'il allait se tirer, après une heure passée à grelotter dans l'humidité en tendant la main, et les gens qui passaient sans le voir, en faisant semblant de regarder ailleurs, la tête tournée du coté opposé, en conversations animées avec leurs copines ou même avec leur chien, comme la grosse mémère qu'il aurait bien entrelardé 23


de quelques coups de canif bien placés dans le gras du bide, on n'a pas idée d'être obèse de cette grotesque façon, c'est dégueulasse ; les gens n'ont plus aucun sens de l'esthétique - et putain qu'il faisait donc froid à l'extérieur ! Mais plus un rond, et envie de bouffer. La soupe des Cœurs Gentils ça suffisait comme ça. Il a remisé son bandeau noir et il est reparti sous la pluie. Il ne voulait pas coucher sur un banc une fois de plus sous la pluie ? merde ! Le refuge était complet, il le savait avant d'arriver, la queue s'étirait sur le trottoir jusqu'au coin de l'autre rue. Il a pensé à sa mère. Il y pense encore de temps en temps, quand il ne sait plus où coucher. Il a piqué un portefeuille d'un gonze complètement loof qui lui a crié : " Garde tout, tu en as plus besoin que moi ! " Il y avait quelques billets, de quoi prendre le train jusqu'aux montagnes. Le train, un endroit chaud où passer quelques heures. C'est là que l'idée de partir s'est transformée en certitude. Il a acheté un pain, gros. Il a payé en pensant aux courses qu'il faisait avec sa mère quand il avait huit ans et qu'elle lui laissait quelques pièces pour acheter des choses infâmes qu'il distribuait aux copains à l'entrée de l'école. Il se demande comment c'est, ce village où elle habite depuis deux ans. Il pense qu'il y a longtemps qu'elle ne lui a pas téléphoné. Avant de déménager, elle le contactait tout le temps. Quelle colle ! Jamais contente, toujours pleurnicharde, et des "mon petit, je me fais tant de soucis pour toi ! " Comme si les soucis qu'elle se faisait pouvaient avoir une quelconque influence sur la vie qu'il menait. Il l'envoyait paître et raccrochait sans lui laisser le temps de finir ses phrases. Chiante, mais chiante ! Longtemps, il a inventé un boulot, des heures de bureau pendant lesquels, disait-il, il ne pouvait pas lui répondre. Elle a avalé toutes les couleuvres. Quelle idiote, on ne fait pas mieux. Il secoue la tête ; quand même, il y a bien longtemps qu'elle ne lui a pas téléphoné. Et là, il se souvient qu'il n'a plus de téléphone. C'est malin. Le train sort de la ville, et Tim remarque une fois de plus la grisaille des maisons, le coté sordide, pelé, rouillé qu'elles offrent sans pudeur aux yeux des voyageurs. De l'autre coté, vers la rue, elles sont maquillées, fleuries. Le dos ne ment pas : les jardins sont des cloaques, qui bordent le chemin de fer d'un coté. De l'autre, à gauche, l'Hudson : il roule ses eaux sombres et tranquilles d'un lent mouvement cruel et noir. Tim en frissonnerait s'il osait. Il regarde rapidement autour de lui, comme sans en avoir l'air : les autres voyageurs sont silencieux. Il y en a peu, disséminés dans le long wagon. A chaque arrêt, ils descendent par trois ou quatre. Arrivés à Catskill il ne restera plus personne. Et de là, pense Tim, je fais comment pour arriver jusqu'à ce bled perdu ? Et ça s'appelle comment déjà ? Peacetown, tu parles d'un nom ! Lise Genz, 2008 "La Paix au Village " est le premier chapitre de Peacetown, une nouvelle écrite fin 2008 dans le cadre d'une série de nouvelles à deux sur la paix. Mon Feb 02 06:49:56 EST 2009 |lise CC | _____________________________ Emyole : On voit ces gens...ces gens qui dérangent notre petite vie, nos petites habitudes et on ne s'arrête pas à penser comment ils la vivent cette vie... que se passera-t-il à Peacetown ? J’ai hâte de savoir...

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Lise : Et bien, je peux te dire qu'il rencontrera Jeanne, Laurence, Marie et les autres. Plus trois magnifiques chiens, qui le prendront en sympathie, car il aime les bêtes, bien qu'il s'en défende. Sérénité relative : La gène de croiser l'être qui nous révèle notre position de nanti, et, la vision de penser que c'est de sa faute, tout en étant sûr au fond de soi que c'est faux = culpabilité = irrespect = mensonge.

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Absence Sur l'écran vide au ciel de lit, dans la peur blanche de mes nuits noires, je dessine l'absence. Dévide le film en blanc et noir sans les couleurs d'un passé proche, retrouvé au fond de ma poche, dans les plis d'un mot oublié. Jetterons-nous tous les enfuis, tous les malheurs et tous les cris ? Où va l'amour que rien ne suit, où va le temps, où va la nuit ? Figé en image insolite, nuages absurdes à la Magritte, le ciel s'enferme dans son rien, la lune va, part et revient, et moi j'attends sans lendemains. Dans la chambre vide de toi, au creux des draps sans ta chanson, ma peur se met à l'unisson. Je projette l'ombre au plafond, le reflet de l'eau dehors bouge en des couleurs de lune rouge. Adieu l'été bonjour l'hiver, dehors le froid nous enclosure, le vide blanc la neige dure, et ce ciel vide par dessus tout. Les toits se meurent, vides de toi qui savait si bien les décrire. Les oiseaux bougent sans un cri en longs tracés d'envols rapides. Les cheminées ne fument plus, vides de feu où tu n'es plus. Et moi je meurs de froid sans toi, ivre de vide et je dérive. Sur l'écran gris de mes pleurs verts, je cherche les couleurs de vie, le bleu si clair de ton regard, et le blond pale de tes mèches. Un sourire en deux rouges offert, et l'éclat blanc entre tes lèvres. Sur le fond sombre de l'absence, ne plus rien avoir dans les mains, qu'un souvenir de joie entière pleine et ronde comme un ballon, donnée en merci de bonheurs dans le temps des amours humaines. Lise Genz - 2007 / Fri Feb 06 06:13:23 EST 2009 |lise CC | ______________________________

Sur une photo blanchie C'est une photo blanche, une photo loupée. Le photomaton n'a pas marché. C'est une erreur, un échec, un nul, un rien. A big mistake. On voit ce qu'on veut dans tout ce blanc. Je suis figée dans l'attente : pourquoi la rue est-elle vide tout à coup ? Je suis vidée de moi dans cette rue figée par le vide de cette fin de vie. Pourquoi les gens sont-ils partis ? Où sont allés les enfants qui couraient dans les soirs mauves ? Où est parti le chien qui aboyait sans savoir pourquoi. Où sont mes amis disparus, avec qui je gravissais les collines ? On voit de tout dans tout ce blanc. Pourquoi la photo n'a-t-elle pas pris ? Ne me répondez pas avec des mots d'acide. Je suis trop près de la mort pour entendre raison. Parlez-moi de la douleur de la non-existence, et je vous répondrai sur un air de java. On voit le déclin dans le clair de ce blanc. La luminosité de l'ombre s'agrandit dans l'espace. Pourquoi faut-il pleurer, s'il n'y a plus rien à dire ? Le visage qu'on cherche nous fuit avec la nuit. Ma mémoire est une photo qui n'en finit pas de blanchir

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Lise Genz, 2006 / AJD'H 2009 Fri Feb 06 16:12:19 EST 2009 |lise CC | ____________________________

Jean-Marc Lafrenière On ne présente plus Jean Marc Lafrenière. Son nom est synonyme de poésie-prose, un tour de force qu’il pratique depuis des décennies, un miracle d’équilibre entre le parler de tous les jours et le langage des dieux. Il vit au Québec, à mi chemin entre Montréal et Québec-ville, sur les bords du grand Saint Laurent. Jusqu’à l’année dernière, son compagnon s’appelait Chicoumi, et c’était un loup, un véritable loup gris. Quant on lit Lafrenière comme je le lis, c’est à dire, du bout du cœur, on retrouve l’osmose entre le halètement silencieux du loup et la respiration douce-amère du poète. Avec un quelque chose en plus qui fait que celui-ci, d’emblée, se place naturellement au dessus du commun, hissant l’animal avec lui au niveau des nuages. Dans ma traversée des ouragans, j’avais perdu l’adresse de Jean-Marc. Hier, par hasard et je vois dans ce hasard un signe - je l’ai retrouvée, son adresse. Il a un blog rempli à ras bord de textes, les siens et ceux des gens qu’il rencontre en surfant le Net, et qu’il aime. Il est avant tout un poète, et Québécois, il chante avec le même talent la forêt et l’amour, les feuilles et les mots, la tendresse et le ravin, les ravages et les paysages. Allez le lire, vous ne le regretterez pas. http://lafreniere.over-blog.net/article-27564007.html Lise Genz Sat Feb 07 08:58:21 EST 2009 |lise CC | __________________________

Comme une ombre portée S’apprivoiser, par Jean-Marc Lafrenière

L'amitié ne sera jamais une collection d'amis. Le véritable échange n'a rien à faire de la grégarité. Devant leur fiasco, il est difficile d'aimer les hommes en troupe. Je peine déjà à les aimer un à un, et pourtant, je ne voudrais qu'aimer. On reconnaît l'homme à sa bêtise. On n'a qu'à regarder les monuments aux morts, les porteurs de médailles, les vedettes à la mode. L'homme avance dans la lumière comme une ombre portée. L'espérance est une mine dans le désert des banques. J'attends que la monnaie y pose un pied et se transforme en confettis. Les anges ont la vie dure. On leur casse les os sans leur briser les ailes. Nous sommes tous des hommes prisonniers de l'homme. Chacun cherche une issue, qui par la main, qui par le pied, qui par la tête, qui par le cœur. Chacun est un livre qui cherche sa matière. Chacun est un tableau qui a perdu son peintre. Il faut briser le silence des noms, des costumes, des rôles, rompre le bâillon du paraître, traverser l'ombre du convenu vers l'inconnu plus vaste. On ne voit jamais les cailloux où l'on bute. Je voudrais être sans paraître mais chaque mot que j'écris vient contredire ce vœu. Je n'ai que quelques mots pour tricoter des phrases, une pelote à images, bien du fil à retordre, des pointes de coudrier pour recoudre le cœur, quelques neurones qui flashent dans le mou du cerveau comme des mouches à feu. Je compense le peu par la grandeur du monde. J. M. Lafrenière, Québec / Le texte entier : Comme une Ombre Portée : http://lafreniere.over-blog.net

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L'espoir de livre On se réveille un jour, et l'heure n'intervient pas, ce peut être trois heures de l'après midi ou le soir tard ou le matin très tôt, peu importe : on se réveille, enfin. Jusque là, on dormait. On dormait debout, on dormait mangeant, on dormait même baisant- ce qui est grave, mais on n'en était pas conscients, puisqu'on dormait. On dormait conduisant la bagnole par essence pourrie tout en grommelant des injures contre les autres qui conduisent, eux, de vrais voitures pas ce truc dégueu que nous voudrions voir relégué au plus profond du plus profond garage ; quand ce n'est pas dans un ravin, carrément. Mais alors, on ferait comment pour aller au bureau, hein ? Car nous y allons, à ce foutu bureau. Ou à l'usine, ce qui revient au même mais on ne le sait pas. De toutes façons, on dormait, ce jour-là, où qu'on aille. Le réveil nous est venu avec l'allégresse : la seconde avant, on continuait de dormir, confortablement installés devant l'écran. Oui, on a eu le temps de garer le char entre la mercédes du patron et la BMW de l'assistante blonde. On a monté les escaliers avec notre célérité coutumière. On a ouvert la porte, salué la standardiste d'un sourire si on est un homme, d'un bisou si on est une femme, d'un sourire ET d'un bisou si on a moins de trente ans et si elle est jeune et jolie. On a arpenté le couloir à pas de course, manière de faire voir au chef qu'on est plein d'énergie ce matin. Et puis on s'est installé devant l'écran. C'est là qu'on reprend nos rêves brumeux, habituellement. Mais ce jour-là, le jour du livre, on s'est senti soudain électrisé. Excité. Enervé. Anxieux. En attente. Quelque chose allait se produire, sans que nous arrivions à savoir ce que cela pouvait bien être. Indéfinissable, le livre nous a frôlés au passage. C'est à ce moment que nous savons que nous ne sommes plus seul dans ce placard que l'autre s'obstine à nommer bureau ; un placard avec une fenêtre. Une idée de livre tourbillonne sans s'accrocher - si elle s'accrochait ce serait bien commode : nous pourrions au moins la prendre en main : mais là, non. On sent son souffle, son parfum, sa tiédeur. On ose à peine remuer un pied, sachant que trop bouger la ferait disparaitre. Nous ne sommes plus seuls, quelque chose, ou quelqu'un, nous habite. Nous sommes possédés. D'autres, ceux qui sont sains d'esprits, en mouraient de peur. Pour nous, au contraire, c'est la joie : on sait que cette chose vague qui nous manquait depuis quelques semaines, ou mois, ou années, est en train de prendre forme ; on peut déjà, alors qu'il n'est encore qu'une boule de pensées nébuleuses et mouvantes, le nommer, sans pouvoir le définir : c'est le livre, ce ne peut être que cela. On sait que nous sommes revenus sur la planète des zombis. Que les jours vont venir, pendant lesquels nous ne saurons plus ce que nous sommes, que nous ne serons plus ce que nous sommes. Que les heures vont passer, où nous ne verrons qu'une lueur, et que ce phare sans nom ne percera pas toujours la nuit dans laquelle nous allons sombrer. On sait le mal du mot qui fuit, de la phrase qui résiste, de cette suite, ou cette fin, qui se refuse. On sait que ce sera encore une fois la lutte, le combat et peut être le viol, sans

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savoir qui, de nous ou du livre sera le violé. On le sait, mais on y va quand même. On le sait, et on est heureux. * On a tout laissé. On était où en ce moment-là ? Peut-être au milieu de la réunion hebdomadaire, nom d'une pipe de quoi a-t-on bien pu parler ce jour-là ? Non que je sois particulièrement attentive à ces sortes de choses, on sait qu'elles ne furent crées que dans le seul but de permettre à l'assistant de se faire mousser. Je me contente donc, habituellement, d'un sourire vague et de quelque hochement de tête qui peuvent passer indifféremment pour des approbations ou des signes d'intelligence. Ce jour là, je n'ai pas eu le temps de me mettre en conduite assistée : le livre s'est carrément installé sur mes genoux dès les premières minutes, et je ne me souviens que d'une chose : c'est qu'à partir de la troisième phrase de l'analyste qui nous exposait les mérites comparés des longs et des courts termes en matière de placements, je n'ai plus existé. Je suis partie. Avec le livre. Avec l'espoir de livre. Lise Genz Sat Feb 07 15:56:02 EST 2009 |lise CC | __________________________ Partance : Il y a bien des vies parallèles ! lise2cc : On se dédoublerait, en écrivant ? Savez-vous que, pour avoir osé amorcer cette idée de "dédoublement" dans l'écriture, je me suis vue traitée de marginale, au mieux ; de malade mentale, au pire ? :( Alors, vie parallèle, hou hou (je ris, partance, que devons-nous, que pouvons-nous faire d'autre ? ) Oui, et parce que je sais que vous écrivez aussi, donc, j'ose le redire : oui, lorsque j'écris, je suis en vie parallèle. Pas très confortable parfois, mais toujours very exciting ! Et vous ? Partance : L'écriture, (idem pour toute création) nous pose sur une planète...la planète qui nous met face à nous même, (je l'appelle ma maison) cette planète nous est propre, elle n'est visible que de nous... jusqu'à ce qu'un amateur de nos mots, s'arrête...s'unisse et ressente l'émotion qui nous est donnée de vivre la bas. Ce trouble de joie intense parce que "ça y est, je suis en gestation" Oh ! Oui... Lise : C'est pourquoi il est si nécessaire de trouver l'isolement, le calme, le sans bruit ; pour moi, le silence, primordial, avant, pendant toute création. Si nécessaire aussi, lorsque j'écrivais "à plusieurs" de me centrer sur moi et moi seule. Sortir de cette solitude de courts instants. parler un peu aux autres, mais sans quitter du regard la ligne directrice. C'est tout simplement vu comme un monstrueux égoïsme, savez-vous ? Tant pis : je suis donc partie et je suis seule maintenant - enfin, non, pas seule : les mots sont là. Et vive l'Internet qui nous rapproche des autres. (Là encore, y aller sur la pointe des pieds... ouh …) Partance : Lise, votre partance a posé des kilomètres...entre vous et vous... j'aime à croire que ce changement vous a fait renaître. Était-ce après avoir dénaître ? Où pour que le feu qui vous anime puisse croisser en fulgurance ? Pour exister purement Lise : Il s'agit d'écrire ce qui est en soi ; c'est déjà assez difficile, et le bruit fait taire mes mots. C'est pourquoi j'aime l'Internet, qui ouvre toutes les fenêtres dont nous avons besoin, mais filtre les bruits. Je n'en finis pas de naître, de dénaître et de renaître, partance ! C’est ce mouvement qui fait ma vie, et m'effraie, bien sûr. Mais il y a en même temps une attirance, vers le "renaître", une fois passées les affres du dénaître.

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Ecrire, c'est glisser

Ecrire, c'est glisser. Glisser hors de soi, glisser hors du temps, glisser vers les autres ; ou partir loin d'eux, en glissant sans bruit. 28


Glisser sur la feuille blanche, immaculée, encore vierge, intouchée, à cette seconde précise où elle se présente à nous juste avant que nous y tracions le premier point qui sera une lettre qui sera un mot suivi de tant d'autres. La page blanche, qu'elle soit sur écran ou sur papier, longtemps semblable à cette large plage de neige entre la Saulire et Courchevel ; là où, avant, gambadait le ruisseau des Verdons. Glisser dans tout ce blanc, ivresse perdue des descentes en profonde, en solitaire, dans le matin qui suivait une longue chute de neige : skis légèrement écartés, au milieu d'un silence clair ; et le doux feulement de la neige forcée, sous les lattes. Frouffff, frouffff. On écrivait dans des petits craquements, des froissements de papier, des senteurs de mandarine. On écrivait ensemble, à la même table, sous la même lampe, chauffés par le même feu de bois. Dehors, il pouvait bien neiger. On avait chaud, on se touchait presque. La main de l'un parfois allait à la rencontre des doigts de l'autre, sans un mot, sans tourner la tête que nous gardions obstinément chacun penchée vers la feuille. L'autre voyait du coin de l'œil le bras qui légèrement s'écartait du corps, venait frôler l'avantbras nu, duveteux. C'était une caresse lente et immobile, sans intention autre que celle de se savoir vivants, ensemble. Ecrivant ensemble. Sans parler. La main qui tenait le stylo ne tremblait pas pour autant. L'œil avait un instant ce rapide mouvement vers la droite, vers l'ami écrivant, vers l'épaule si proche. Le corps, sans y prendre garde, s'infléchissait vers la tiédeur de l'autre, puis revenait à son point de départ, dans un lent balancement, la cassure pudique de l'élan incertain, imperceptible. Le regard retournait à l'écriture, le crissement de la plume ne s'était pas suspendu. Les deux feuilles parallèles se noircissaient : c'était, dans le silence, la course aux mots. Ils glissent sur le papier. La main qui tient le stylo se meut sur la feuille à petits pas légers. Ce soir, mes doigts sur le clavier vont souplement d'une touche à l'autre. Puissance de la technologie : je me souviens d'un temps où je tapais avec un tel entrain sur la vieille Remington, que ma mère s'en affolait : " Ne tape pas si fort, tu vas abîmer ton doigté ". Elle me voulait pianiste, et avait décidé de faire obstacle à tout ce qui n'était pas la musique. Pour l'apaiser, pour reprendre souffle, je partais docilement vers Bach et les Préludes. Les mots venaient en même temps que la musique. L'obstacle imaginé par ma mère se transformait en élan créateur. Glissade d'une passion vers un autre, mouvement souple : les notes sur la portée, les signes noirs des lettres sur la feuille ; le pianotèrent des doigts sur le clavier du piano, ou de l'ordi ; la poésie du chant, du contre-chant, des Préludes et Fugues. L'harmonie rigoureuse d'un texte de Camus, la longue, lente symphonie d'une description de Proust. Chanter avec eux. Me recueillir dans leurs phrases, écrire à mon tour, non pas comme eux, mais avec eux. Balbutier la chanson douce, glisser ma voix dans le grand chœur, mettre en mots ma musique intérieure, que personne n'entends. Et puis, soudain, la dissonance. Un mot de trop - un "travaille !". Un "enfante !". Et c'est l'obstacle. Il fond sur nous, impossible de l'éviter. Il coupe le rythme, il nous rabat le clavier noir sur les doigts : c'est l'agonie. LObstacle, hier, c'était l'ami fâché, l'amant boudeur, la sœur angoissée. C'est le coup de téléphone qui nous prends nos minutes ; c'est l'enfant qui a peur, qu'il faut réconforter ; c'est la voiture qui refuse de démarrer, la fin de mois difficile, les taxes à payer. L'Obstacle, c'est la descente aux enfers du doute. C'est le mot qui fuit, la passion qui s'éteint. C'est lorsqu'on laisse les skis pour chausser les bottes. C'est quand on descend 29


des sommets pour aller en ville marcher comme tout le monde. L'obstacle, c'est lorsqu'on ne voit plus la neige en bas de la Saulire. Lise Genz, 2008 Sun Feb 08 08:21:04 EST 2009 |Lise Genz / CC | _______________ Emyole : Bon sang ! Quel texte magnifique...oui en le lisant, je voyais et surtout revivais ce que je ressentais face à une nouvelle partition. Oui, l'écriture des mots, de la musique et l'interprétation. Ici, on peut entendre le glissement de la plume sur le papier, ah non, c'était le stylo. Alors je me suis laissé prendre dans mes propres souvenirs. Mais qui utilise une plume de nos jours ? J'adorais voir les mots couler de ma plume, je devrais dire mes plumes car j'en avais plusieurs et selon mon humeur, le trait était large ou fin...et que dire de la couleur de mes encres. Bref, ce texte a éveillé chez moi plein de choses repoussées dans le fin fonds de mon existence. Merci chère CC j'adore ce genre de texte. Yo Lise : Vibrante jusqu'au bout de tes notes, jusqu'au bout de tes silences, je te vois bien en si majeur, en do mineur, Emyole, et lançant le contre-ut sans faiblir, retenant, modérant ta respiration pour atteindre la pureté du son, pour que le demi-ton ne vienne rien fausser. De la même façon, je retiens le mot, la phrase, avant l'envoie du point final. L'artiste en toi vit de toute sa sensibilité, frisonne à toute création : vois-tu, je crois fermement que l'artiste est en mouvance d'un art dans l'autre, de la musique à l'écriture, des couleurs aux mots, de l'ordi à la pierre. As-tu lu les lettres de Van Gogh à son frère ? Quel écrivain de la couleur et des lumières, ce Vincent Emyole : Non, je n'ai pas lu ; je vais le noter dans mon calepin bibliothèque

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L'anti-livre Un jour, je me suis mise en grève loin de tous. Avec les mouettes. J'ai cueilli une plume blanche, j'ai commencé d'écrire sur le sable, et j'ai parlé aux oiseaux. J'ai inventé l'écridire. J'ai plongé profond dans l'eau verte, dans le salé, dans les bulles. Frôlée par la transparence des anémones, par le diapré des créatures marines, j'ai écris sur les algues rencontrées au hasard des vagues et des remous. Sur la plage, les mouettes ont accouru en piaillant. J'ai dit leurs cris aigus, malfaisants, irascibles. J'ai écrit l'ennuyance de leurs criailleries, le ridicule de leurs becs agressifs, la beauté de leur vol blanc. J'ai longuement écrit le ciel et sa lente transformation, la nuit couverte d'étoiles, la douceur opaque de la brume avant le lever du jour, au retour du petit matin. J'ai dit le silence solitaire, puis la rencontre. Le vagabondage solidaire, le petit feu d'algues sèche, partagé ; et le baiser au ralenti, la communion des mains qui n'allaient pas plus loin que l'amour d'être ensemble. J'ai écrit le sourire dans un regard trop tendre et j'ai dit se noyer dans un trop plein de bleu. C'est l'écridire, c'est la transformation de ce moi hors de soi, hors des autres. C'est la panique éteinte parce qu'il faisait beau, un soir, sur une plage, loin du monde et de tous. Seul à seule avec l'ombre, et la maigre fumée qui monte entre les dunes. Le vert pale de l'herbe, si clair qu'il semble gris, avec la fleur unique penchée sous le vent, dans un goût d'herbe blanche et de sel et d'eau sombre. Dans la mouvance de deux bouches qui mettaient si longtemps à aller l'une vers l'autre ; si longtemps, plus tard, à se séparer. C'est l'écridire, cette fuite paresseuse à l'extrême bord de soi, ce retour dans le temps, cet appel vers la joie. C'est le cri, c'est le dire, C'est l'écridire, jamais livré. C'est l'anti-livre. Lise Genz / Sun Feb 08 11:31:52 EST 2009 |lise CC | ______________________________

Le croire et le savoir 30


L'enjeu serait de sortir au plus vite des généralités. Il est entendu que seule, l'originalité classe l'écrivain. Entendu par qui ? Et entendu comment ? Je veux dire : dans quel langage a-t-il un jour été énoncé, ou dénoncé, que l'originalité à tout prix devrait seule avoir quelque importance ? Ce matin très tôt nous discutons de l'opposition 'croire" et "savoir". Je lui demande pourquoi, à son avis, les deux semblent inconciliables. Il m'envoie paître gentiment : c'est ce que je leur reproche, à ces hommes : ils lancent une phrase lapidaire et quand on leur pose une question simple, ils sont souvent incapables de répondre. Croire et Savoir : lorsque j'écris, qu'est ce qui est le plus important des deux ? Ne sachant pas, il m'arrive de mélanger allègrement. Inventer un personnage, une situation, des dialogues, c'est croire et vouloir faire croire. Croire que cela a existé, ou que cela pourrait exister. Pire, parfois : faire semblant de croire. Jouer à croire, serait-ce tout le jeu de l'écriture ? Lorsque je décris les pèlerins du Mayflower, je pense savoir, mais jusqu'où ce que je crois colle-t-il à ce qui est vraiment arrivé ? Je "crois" que c'est arrivé de cette façon, mais rien n'est là pour confirmer ce croire-là. C'est ma confiance en la parole écrite du gouverneur Bradford (1620), et dans les savoirs de tous ceux qui ont traqué trois siècles d'histoire pour remonter aux sources, c'est cela seul qui fait que j'imagine savoir l'aventure des pèlerins. C'est une foi comme une autre. C'est une croyance. Le croire et le savoir se confondent. Ils ne sont donc pas toujours en dualité ni en opposition. A nous de les rendre amis. Tue Feb 10 17:11:29 EST 2009 | Lise Genz _______________________

Les chiffres et les lettres Travail

Aujourd'hui, je vais vous parler de Marina et je vais vous parler chiffres. Marina, qui est poète, se désespère : elle vient de perdre son emploi, réduction de personnel, ça n'a pas traîné. Arrivée l'avant-dernière il y a 18 mois, elle fait partie du lot des cinq (trois femmes, deux hommes, tous moins de cinquante ans) qui ont reçu la note leur expliquant qu'ils seront les premiers repris si l'économie revient à de meilleurs sentiments, mais que pour le moment, dans la conjoncture actuelle, et bla, bla, bla. Virés. Avec tous les ménagements d'usage, mais virés. Son dernier jour de travail, c’est dimanche, 15 février. Marina est divorcée et elle a deux enfants. Son mari a disparu dans la nature, c'est le cas classique et la nature est grande ici : on s'y perd facilement. Marina ne reçoit donc aucune aide de son ex-mari. Elle va recevoir une aide du "welfare", le chômage américain, égal à environ 75 % de son salaire. Il faut noter que Marina, dont le salaire annuel était de $25.000 et des poussières, reçoit aussi une aide de $150 par mois pour la nourriture, et c'est tout. L'allocation chômage, Marina la recevra pendant 6 mois (c’était 3 mois, sous Bush) Et ensuite ? Elle espère trouver un autre travail, elle s'est déjà mise en quête d'un autre job. Mais il n'y a plus d'offres d'emploi. Elle m'a dit hier qu'il ne lui restera que l'alternative de Wal31


Mart. Connaissez-vous Wal-Mart ? -------------Partance : Eclairez moi ? Pour toutes les Marina bafouées par les droits et les devoirs ignorés des états vilipendés par leur manque d’éthique, ce soir, je laisse monter ma rage, puisque mon amour n’y suffit plus. Lise : Marina est une victime de huit ans de mauvaise gestion des Etats Unis, dont sept ans de guerre et la saignée à blanc d'une économie que Clinton avait remontée dans le positif, avec un surplus qui faisait plaisir à savoir. Surplus qui est parti directos tuer les enfants innocents dans d'autres parties du globe. Si ce n'est pas criminel, qu'est ce qui le sera ? Alors, Partance, oui, moi aussi, j'ai la grosse colère. Et c'est le pourquoi de mon billet ce matin. Marina retrouvera du travail. L'économie sortira du rouge. Mais moi, ce que je vois, en plus de cela, c'est la démission du monsieur qui lui a fait deux gosses et qui a disparu dans la nature, et qui ne donne plus signe de vie depuis quatre ou cinq ans. En dehors de toute gnangnanerie de concierge, quand même on peut dire que ce n'est pas marrant, d'être une femme, voilà. Alors, maintenant, Wal-Mart : Wal-Mart, ce n'est pas pire qu'autre chose, les employés ont réagi, porté plainte - et ici, des employés qui portent plainte, ça marche. Mais les salaires sont toujours très bas, moyenne $10/heure, ce qui fait environ $370/ semaine, $1,591/mois, une fois les taxes sociales enlevées ; ici, il y a peu de taxes sociales - et peu de soutien, aussi. Hé ! On continue avec les chiffres ? OK : Donc, avec 1,591 dollars par mois, Marina recevra une allocation nourriture de $400/mois. Elle recevra aussi une "assurance -santé" gratuite pour ses deux enfants - mais pas pour elle - on imagine le topo si elle a une grippe sévère ? Et si c'est pire ? Car ici, il n'y a pas d'allocation santé par jour de maladie, qu'on le sache bien : si on est malade, on perd son salaire, tout simplement. Même si on a une assurance de santé (et tout le monde ne l'a pas) seuls les frais médicaux sont remboursés, mais pas le salaire perdu. Bon, allez, soyons optimistes et espérons que Marina ne sera pas malade : elle devra donc payer sur son salaire son loyer, $850. L'assurance de sa voiture : $ 120. Les mensualités de sa voiture : $200. L'assurance -santé pour elle : $180. Le téléphone : $60. La télé et l'internet : $50. L'essence pour aller jusqu'à Wal-Mart : $280 - et encore heureux que l'autoroute soit gratuite dans l'état de New-York entre Troy (où habite Marina) et le Wal-Mart où elle pourrait être embauchée (croisons-les doigts !). Le chauffage - et oui, les nuits sont froides ici, le thermomètre descend en-dessous de zéro facilement ! - chauffage donc : $300 / mois. Eau, la voirie : $40/mois. Les remboursements de cartes de crédit (quelle plaie !) $350/mois. Remboursement des emprunts qu'elle a fait pour obtenir son diplôme de secrétaire légale : $425/mois… heu, on en est où, là ? + + + Total $ 2,855, zut, et on n'a pas encore compté la nourriture, ni les vêtements des enfants, ni les livres scolaires, ni les frais de cafeteria, ni .... C'étaient les chiffres et les lettres, et merci, Monsieur Bush !

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Ils sont trop verts ... ...dit-il. Tout le monde connait la suite. Sauf ceux qui n’ont pas tenu à garder en mémoire les mots du bon La Fontaine.

“Ils sont trop verts”, ces textes de cet auteur qui s’élève à cent coudées au dessus de la multitude des écrivaillons se prenant pour des Prix Goncourt alors qu’ils se traînent lamentablement au plus bas de l’échelon scriptural. Trop verts, agacent-ils les dents de ces petits morveux, qui tranchent et brisent à coup de mots choisis non point pour la beauté du langage, mais pour le sarcasme déployé. Ils seraient pour la plupart bien étonnés de constater que leur prose n’a jamais l’effet escompté. Au pire, on en sourit. De pitié. Au mieux, on en soupire. De regret de les avoir un jour approchés. On voudrait n’avoir jamais perdu de temps à les lire.

“Ils sont trop verts, c’est bon pour des goujats ”, et il s’en va, croyant qu’il a convaincu son auditoire. Lequel est convaincu certes, mais pas dans ce sens-là : convaincu que l'auteurrenard est un pleutre, et qu’il se dérobe derrière des mots creux, car incapable de sortir de ses neurones des mots plus forts. Incapable de comprendre le sens profond des mots, l'originalité d'un concept, la structure d'une phrase. Incapable de sortir de son hébétude, de sa pauvreté pour 32


atteindre le niveau supérieur. Donc : " Ils sont trop verts..." Toujours d'actualité, des siècles et des siècles plus tard. Grande leçon de l'Histoire, au détour de chaque treille. Ce qu’il y a d’intéressant, avec l’auditoire virtuel, c’est qu’il n’est jamais convaincu, cet auditoire, justement : nous pouvons continuer de dénigrer, continuer d’affirmer à mille mots les pires sottises : arrive un jour où la vérité perce sous l’opacité du mensonge, sous les hypocrisies, sous les attitudes théâtrales, sous la redondance et sous les insultes. Un jour où le lecteur, lui, et lui seul, fera la différence entre tout ce qu’on lui donne à lire et ce qu’on voudrait qu’il lise à travers les mots. C’est le lecteur qui fait la transparence, le censeur, le critique confirment l’opacité, la renforcent. Le lecteur restera seul juge, en dépit de ce qu’on voudrait lui faire avaler ; parfois même le lecteur prendra le contre-pied de ce qu’on essaiera de lui faire lire. Et c’est la grande liberté de l’édition sur les blogs : on aura beau essayer d’influencer le lecteur en amont ou en aval, c’est lui seul qui restera maître de son embarcation, et qui décidera du choix à faire, bien à l’abri dans la solitude de son tête à tête avec le mot sur l’écran. “Ils sont trop verts”, ces textes et ces discours, parce qu’inaccessibles ? Alors, il n’y a donc plus qu’une chose à faire : prendre un escabeau et se hausser jusqu’à eux, au lieu d’essayer de les rabaisser Lise Genz. 2009 Fri Feb 13 09:35:53 EST 2009 |lise CC |

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Ah non, c'est fini ... les mots doux, les bisous, les fleurous. Les fleurs zé les chocolous. C'est fini ! Rembarquez vos dentelles, les mouflettes, on vous dit que c'est passé, c'est terminé : allez, vous en avez pour une belle longue année avant de le voir revenir à vos portes, rose rouge à la main, Valentin. ...

Non : maintenant, on revient dans la vie réelle, c'est du sérieux, c'est le boulot. La preuve : je vais vous raconter le film que j'ai vu ce soir. Pris hier à la bibliothèque de mon quartier, donc gratuit. Québécois. Un film de Claude Jutra, mon oncle Antoine. Tous les dix ans depuis 1984, le festival du Film International de Toronto les dix meilleurs films de l'histoire du cinéma canadien. Les dix " hauts de liste" changent changent chaque fois, mais un seul film reste constant dans sa place de premier de tous : c'est mon oncle Antoine., qui a reçu le titre officiel de Meilleur de tous les films canadiens. Dans une région minière à l’époque des années quarante, des villageois s’affairent aux préparatifs de la veille de Noël. On se lève de bonne heure au magasin général où oncle Antoine (Jean Duceppe) et tante Cécile (Olivette Thibault), avec l’aide de leur employé Fernand (Claude Jutra), leur neveu Benoît (Jacques Gagnon) et la petite Carmen (Lyne Champagne), préparent la vitrine de Noël pour les clients qui viendront se réunir avec l’intention de faire leurs achats et commencer à célébrer. L’atmosphère est à la fête, mais aussi au potinage et aux mots dits à voix basse par les gens occupés à écornifler dans la vie des autres. Alors que c’est la seule journée de l’année où les employés de l’usine ont congé, on cherche du réconfort auprès des autres et on raconte ce qu’on a sur le cœur. Tout semble aller bien comme à l’habitude lorsque Cécile reçoit un appel de Madame Poulin (Hélène Loiselle) dont le fils aîné vient de décéder. Elle envoie immédiatement son mari Antoine, également entrepreneur en pompes funèbres, accompagné du jeune Benoît qui a insisté pour l’accompagner. Durant son voyage avec oncle Antoine, Benoît 33


découvrira bien des choses, les bonnes comme les mauvaises. Alors qu’il est confronté aux dures réalités de la mort précoce, aux désillusions et à la trahison des adultes, Benoît apprendra à être un homme. Lise Genz Sun Feb 15 20:52:00 EST 2009 |lise CC Emyole : et...tu as aimé ? lise : Ah oui, beaucoup, et je vais le revoir dans quelques heures, car la poésie de ce film ne passe pas complètement la première fois : nous sommes pris d'abord par l'angoisse devant les étendues sauvages ; le film se situe dans les années 1940, 1950, dans la campagne, un petit village dans l'est du Québec, la veille de Noël, il fait très froid, le cinéaste nous montre de vastes étendues enneigées, glaciales. La pièce maîtresse du film reste le parcours en traineau pour aller jusqu'à la petite maison où habite la femme de Jos, demeurée seule avec ses quatre enfants en pleine campagne, en plein hiver, lorsque son mari s'en va comme bucheron car il ne veut plus travailler aux mines d'Asbestos. J'ai eu pitié du cheval qui continue vaillamment de tirer le traineau dans la tourmente. J'ai aussi admiré la ténacité de l'oncle Antoine et de son neveu Benoît, tous deux emmitouflés de fourrures, gants, bonnets (tuques) à découvert sur ce traineau, bien sûr, sous la grande couverture de loup. Je pense moi aussi que c'est un film magistral, qui devrait être plus connu du grand public francophone. Je le trouve un peu pessimiste, mais je crois que j'ai ressenti cette tristesse par la crainte, devant les rudes éléments de l'hiver Québécois. Je suis très sensible aux atmosphères. (Tout le monde sait que je me dédouble facilement, LOOL !) Donc, J'ETAIS dans le traineau avec eux, hier soir, et pitang de bon soir, il y faisait froid ! même si dans mon living, devant l'écran, il fait presque 70 (20 c.). L'atmosphère du film, c'est aussi le magasin général, sorte de grand bazar où l'on trouvait de tout ( l'équivalent des défunts "general stores" d'ici) : non seulement on y trouvait de tout, mais c'était aussi le point de ralliement du village, les dames y venaient pour s'y retrouver entre elles, pauvres mais gantées et chapeautées, et c'est là qu'elle apprenaient les derniers cancans, les dernières nouvelles, et jusqu'à l'annonce des prochaines fiançailles ! Il y avait une telle convivialité, bien avant que le nom même en soit inventé. J'ai beaucoup aimé, aussi, les émotions en demi-teintes, comme l'amabilité de la tante de Benoît, sa tendresse non-dite, à peine démontrée pour le petit orphelin que son mari et elle ont recueilli, pour la petite vendeuse malheureuse. A propos de la petite vendeuse, Carmen, on peut imaginer bien des choses qui se seraient passées dans la vie de cette petite fille, à peine une adolescent. Pourquoi ses larmes lorsque Benoit tente de l'embrasser ? A-t-elle souvenir de gestes plus brutaux ? en 1971, les cinéastes n'osaient pas encore montrer l'inceste sur l'écran. C'était un sujet tabou. On ne peut s'empêcher d'imaginer beaucoup en voyant plus tard le père de Carmen venir prendre le salaire de l'enfant, qu'il voudrait en totalité. Sérénité relative Says : Cela s'appelle de l'amour inconditionnel, tout est bon, délicat et subtil. Je vais me "décarcasser" pour trouver sa piste ici, et vous retrouver. Lise : il existe, c'est certain, et peut-être serait-il possible de le trouver sur Amazon. Attention qu'il soit compatible avec les vidéos européennes : on a fait beaucoup de progrès, mais nous, américains, continuons cette sombre imbécilité d'avoir des CD différents, fâ que ( comme y disent, mes amis du grand nord ) nous ne pouvons pas envoyer en France les film et vidéos qui nous chavirent, et qui sont incompatibles avec les appareils audio-vidéo européens ! Et on e croit modernes ! Emyole : Marketing marketing, quand tu nous tiens. Lise, je ne sais pas si tu as déjà vu le film Kamouraska tiré du roman d'Ann Hébert, écrivain québécoise qui a passé une grande partie de sa vie en France. Nous avons des écrivains et cinéastes ici qui ont tellement bien décrit la vie rurale au Québec, et que dire de nos séries télévisées...le Temps d"une Paix et Les Filles de Caleb. Lorsque ces séries furent montrées pour la première fois, on aurait dit que le Québec était comme en suspens, les gens avaient les yeux rivés à leur télé. Les rues étaient désertées

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Paul Auster En anglais " Man in the Dark", paru en français sous le titre “Seul dans le noir" : je viens de le terminer et je le reprends du début. J'aime lire les livres deux fois, première lecture rapide, suivie immédiatement d'une seconde, lente et approfondie. La seconde fois, je savoure. Paul Auster se lit très facilement en anglais, il ne rentre pas dans la catégorie des auteurs hermétiques.

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La couverture du livre de Paul Auster a changé en traversant l'Atlantique. Je me demande bien pourquoi, mais enfin, c'est ainsi. Je préfère la silhouette claire et imprécise sur fond éclaté. Elle a obtenu un prix des meilleures couvertures 2008. Seul dans le noir se vend très bien en France aussi : plus de 50.000 vendus en un mois. Je le recommande, si vous aimez les histoires enchevêtrées, c'est son style, il est merveilleux d'imagination, de rebondissements, et nous entraîne dans son univers de rêve, de réalité, d'histoires qu'il se raconte, qu'il nous raconte, lorsque son héro est en proie à l'insomnie. Une Amérique en proie à la guerre civile ; les moyens de communication, de transports, réduits à leur plus simple expression ; la guerre fratricide creusant des écarts incongrus entre les états, les villes et les gens ; et August Brill, journaliste à la retraite, qui se remet péniblement d'un accident dans la maison de sa fille Miriam, en compagnie de celle ci, divorcée, et de sa petite fille Katia, elle même sous le choc de la mort de son ami Titus, sauvagement assassiné en Iran. En interlude, tirée de son inconscient, de son subconscient, de ses espoirs, peut-être, l'histoire d'une autre Amérique et d'un autre héros, Owen Brick, lancé contre son gré dans une guerre civile dont il ne sait rien, en suspens entre deux mondes, ne reconnaissant plus la nouvelle Amérique dressée contre l'imposteur G.W.Bush, lequel se retrouve bien à Washington, certes, certes, mais dont la présidence est amputée de plus de la moitié des états. On en rirait d'aise si ce que P. Auster nous fait entrevoir - cruauté, égoïsme, tueries, misère - ne venait nous rappeler que les civilisations sont condamnées à la marche en avant, au progrès et à l'espoir paradoxal, même dans les pires situations., et quoique les humains puissent imaginer en leur frayeur et leur manque de foi . Deux histoires si bien mêlées l'une à l'autre que nous devons constamment faire un effort de traduction, d'adaptation, pour nous reconnaître dans l'instant présent, ou dans le rêve. On en sort en proie à un vertige qui ne manque pas de sel. Un petit livre de 180 pages, rempli de fantômes, de joies, d'amour, de violences et de bizarreries de la vie ordinaire. Un Paul Auster, quoi : j'ai tout dit. _______________________________

J'ai rencontré Philippe Didion

Et il fait quoi, Philippe ? Il écrit. Des livres, des articles et des petites notes. Des Notules. Dominicales et autres jours de la semaine. Attention, danger : voue en lisez une, et paf, c'est contagieux, c’est la drogue, c'est fini : vous en voulez encore et encore. Bref, je suis tombée dedans et me voici abonnée. M'étonnerait beaucoup que j'en sois rassasiée vite, gloutonne de mots comme je me connais. Et il n'y a pas que ça. C'est qu'il est sympa au possible, Monsieur Didion, en plus, et partageur : pas une seconde d'hésitation lorsque je lui ai demandé si je pourrais, de temps à autre et avec sa permission, vous donner ici, à lire, des passages choisis de ses Notules, j’ai eu son accord par retour tout à l'heure. Dans le temps que nous vivons, c'est unique de rencontrer quelqu'un qui a le don du partage et ce ne sont pas mes lecteurs et lectrices qui vont s'en plaindre. Donc, voilà, je vous ferai rencontrer Philippe Didion très prochainement, et vous aurez, en prime, le lien pour ses notules. Moi non plus, je n'aime pas garder mes découvertes pour moi.

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C'est fait pour cela, le net : pour le partage. Tue Feb 17 20:42:53 EST 2009 |lise CC | __________________________ Emyole Says : Décidément tu as le tour de nous mettre l'eau à la bouche toi...mais ne vas pas pour autant négliger de les écrire tes petites notes à toi...tu sais que je suis bonne lectrice...et vive les Notules de Philippe Didion... Wed Feb 18 10:10:32 EST 2009 | lise CC Says : J'ai promis à Ph. Didion de lui envoyer d'abord ce que je prélèverai sur ses Notules avant de les poster ici : tu sais combien je suis sensible aux droits d'auteur, c'est délicat, de faire des copiés-collés : je trouverai inélégant que les gens se servent de mes textes sans m'avertir, et moi, je ne le fais jamais, même avec les textes de mes meilleurs amis. Je lui ai donc envoyé hier deux paragraphes sur un article qu'il a écrit sur William Faulkner, et j'attends son retour, qui ne saurait tarder. Je lui ai aussi demandé si je peux mettre le lien pour son blog (ses blogs) et il est d'accord, Donc, tu pourras aller lire sur place dans deux ou trois jours. __________________________

Au creux de l'arbre vieux

Il y a un nid. A l'endroit où les deux grosses branches se rejoignent. Exactement à la fourche de séparation du tronc. L'arbre est vieux. Il est là depuis des siècles, la grosseur de son tronc en fait foi. On pense avec douleur aux cercles qui témoigneront de son âge, le jour où il sera abattu. Ce jour viendra. Ce n'est pas aujourd'hui. François veille. Le nid ne se voit pas. L'enfant sait qu'il est là ; l'enfant devine qu'il est là. Bien malin celui qui pourrait affirmer quelque chose, mais on peut déduire. Tout l'été, il a vu les petites bêtes duveteuses sauter de branche en branche, insouciantes et malicieuses. A l'automne, il a observé leur manège, alors qu'ils fouaillaient le sol hâtivement pour y engranger leur provision d'hiver. "Si je posais une longue échelle contre la branche je pourrais monter et les voir. Ils dorment ramassés dans leur fourrure, endormis pour le long hiver." Il ne le fera pas, il laissera l'échelle dans le garage, il ne violera pas la retraite de l'écureuil. Il sait que l'animal des villes, d'apparence urbanisé par la civilisation, mais encore sauvage, accepte d'être vu selon son bon vouloir. Qu'on le force, qu'on aille plus loin que ce qu'il permet, et il quittera pour toujours un lieu où il a fait l'expérience de l'irrespect. L'enfant, dans sa sagesse, apprends les limites. Il en comprend la nécessité. Curieux, il fera pourtant taire son désir d'apprendre pour conserver la présence des petites créatures hardies ; elles viennent manger les cacahuètes jusqu'à l'ultime approche de ses mains immobiles, et il les regarde s'affairer délicatement du bout des dents, casser la coquille tendre, extraire d'un coup de museau précis la graine qui leur fait le poil soyeux. Lise CC 2009 - "L'enfant des villes " Thu Feb 19 07:59:13 EST 2009 |lise CC | ____________________________ Emyole : Très belle observation Lise et je souris car j'ai dans mon chêne au bord de l'eau 2 de ces garnements tout gris qui s'en donnent à cœur joie mais je ne crois pas qu'il y ait de nid...et mon chêne n'a pas encore 20 ans...et déjà, il règne dans toute sa splendeur.

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Lise : on ne sait jamais, avec les écureuils : leurs nids sont souvent invisibles, bien cachés dans le tronc. J'aimerais bien voir des bébés écureuils, aussi, mais c'est impossible : ils restent au chaud jusqu'au moment où ils sont assez gros pour courir de leurs propres pattes. __________________________

Le web, comme un terrain de jeu Mon amie lointaine disait hier qu'elle venait sur le web passer un moment et s'amuser. Moi non. Je viens par nécessité, je n'y viens pas me distraire. Le net m'a apporté ce qui m'a tant manqué pendant de longues années, dans ma vie : une promiscuité linguistique. L'immersion dans le monde américain ne s'est jamais fait chez moi totalement et je ne suis pas un cas unique. Voir le Québec : il semble que nous autres, français de souche, soyons spécialement rétifs au melting pot. Il semble que nous tenions par dessus tout à notre langage. Nous nous y cramponnons, l'ami psy pourrait nous éclairer sur cet aspect du problème. Pour les auteurs, écrivains et écrivaillons de tous poils, je ne me sens pas capable de juger, encore moins d'aller jusqu'au mépris, tout simplement parce que je sais qu'il y a toujours quelque chose de bon en chacun. A peine si je pourrais expliquer pourquoi j'aime ou je n'aime pas tel auteur et ce serait irrationnel, émotionnel : " il est trop grossier, ou trop brutal, ou les crimes, moi, je n’aime pas, etc.etc. " Je ne suis pas qualifiée pour traiter tel ou tel groupe de journalistes de pacotilles ou de psychologue de mes deux (en dehors de mes montées de lait hebdomadaire) Qu’ils écrivent, ces gens ; qu'ils donnent leur OPINION, bon sang, et laissons-les faire ! Rester humble implique des oreilles attentives, et un esprit alerte assez pour aller plus loin que le mot. Ce magnifique mot français qui en dit tant, si on le laisse dire. Mais voilà le hic : il faut le laisser dire… oui, mais jusqu'où ? Sur le web, je ne m'amuse pas, je n'ai jamais beaucoup aimé le jeu. J'aime la rencontre, j'aime le travail, j’aime les autres, et leurs mots, comme un regard. Nous avançons en aveugles dans le pays web, nous sommes en pleine nuit. Notre seule guidance, ce sont les mots de celui ou celle qui vient vers nous. Nous serions fous d'en médire. Il y a des dangers, bien entendu et j'en sais quelque chose, je ne rechigne pas lorsqu'il est question d'aller au feu. Il y a des dangers sur la toile comme sur les trottoirs des grandes villes. Nous finirons bien par nous armer en conséquence. Nous finirons bien par reconnaître les avenues salubres, et nous en contenter si nous tenons par dessus tout à notre confort. Les aventuriers iront plus loin. Au nom de quoi le leur reprocherions-nous ? Ils feront des découvertes dont nous n'avons pas la moindre idée ; comme il y a des siècles Christopher Colombus. Il est possible que des terres immenses, des possibilités extraordinaires, dorment encore dans les replis de l'univers webbique. Ou bien au contraire, tout ceci va-t-il se dégonfler comme un soufflé mal cuit. Nous le saurons dans quelques années. LG - 2009

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La foi dans le livre Dingue : voila le troisième texte que je commence depuis une semaine, trois textes sur trois sujets différents, toujours reliés au livre, à l'écriture, au mot, à l'importance de l'idée mise en clair. Pour les deux autres, cela s'est passé ainsi : j'aligne des mots, j'en dessine des phrases. J'arrive à la fin. Je relis. Et j'efface. Sans sauvegarder. Pourquoi ? Parce que j'ai perdu la foi. Où la retrouver ? 37


Je me souviens avoir écrit hier, sur un de ces textes perdus, que le juste équilibre, pour n'avoir jamais été établi, n'en est pas moins une règle stricte. Que ne pas la connaître ne signifie nullement que nous puissions y échapper. Ainsi de la foi. N. me taquinait hier matin sur la foi, qu'il écrivait la Foi, sans se soucier de mon entêtement à revenir au minuscule. Il traite la foi comme quelque chose de brumeux, d'intangible, et, à la limite, d'erroné. Je lui rétorque qu'il se goure, et que ce gourrage vient de ce cynisme qu'il affiche comme un drapeau. Un drapeau qui, - j'ajoute méchamment parce qu'il commence à m'agacer ne corresponds à rien : il vient juste de le fabriquer pour partir en guerre sans savoir qu'il ne représente aucune patrie. Voila mon N. outrecuidé par mon arrogance. Il s'écrit, abattant dans sa colère sa dernière carte sans savoir qu'elle est faussée : " Mais la foi, Lise, tu ne peux pas la toucher ; elle n'existe donc pas ! ". Je pouvais éclater d'un rire mauvais et faire exploser sa pauvre phrase en mille éclats. A la place, je choisis de réfléchir. C'est vrai que je ne peux toucher aucun sentiment, encore qu'ils me touchent. Je ne peux toucher le chagrin, encore qu'il me submerge. Je ne peux toucher l'amitié, bien qu'elle soit ma seule raison de vivre. Je ne peux toucher la vie, même. Je n'ai pu toucher la mort, pourtant rencontrée. Et tout ceci, qui pourrait n'être que verbiage, est acte de vie. De là à dire que la vie n'est qu'un concept, le pas serait vite franchi. Et c'est vrai qu'ils nous échappent le plus, ces concepts, lorsque nous voudrions les serrer contre nous. Mais la foi, il arrive un moment, dans la vie de l'écrivain assez fortuné pour être édité, où il peut la tenir en main. C'est l'instant où il reçoit l'ouvrage fraîchement construit. Odeur de papier neuf, glacé frêle de la couverture, rébellion des pages qui sont encore un bloc, avant qu'aucune main ne les ai encore séparées. Un livre neuf. Un acte de foi fait objet. Il le tient en main ; il tient son propre livre en ses propres mains. Il tient devant lui cet assemblage de pages bardées de signes, enveloppés de la couverture pour laquelle il a, s'il est jaloux de son œuvre comme je le suis, planché jours et nuits pour en dessiner les contours, rejetant l'un après l'autre les dessins trop criards, les images entremetteuses et vulgaires. Je me souviens de cette couverture d'un guide de voyage édité en 99 : l'éditeur, en cela parfaitement conforme à l'idée que nous pouvons nous faire de l'éditeur américain, avait choisi des images racoleuses, un ciel trop bleu, des arbres trop verts : c'était le cliché parfait du voyage dans le Midwest. J'ai combattu pendant deux semaines, menaçant de reprendre le manuscrit (et s'il m'avait prise au mot ?) et j'ai pu finalement imposer, parce qu'il avait d'autres chats plus importants à fouetter, mon image à moi : un coin de table, un couvert, devant une fenêtre, au travers de laquelle la vue plonge dans un lac, un lointain de montagnes basses et bleutées, séparées de l'eau par ce qui est, à mes yeux, le plus grand charme du Minnesota : les rougeoiements et les ors de ses forêts d'automne. Cliché pour cliché, le mien convenait mieux à l'ouvrage où je tentais de célébrer en cinq cent pages la paix et la stabilité de cet état que je connais comme ma poche, pour y avoir vécu vingt ans, et l'avoir parcouru en tous sens. Le livre, dans mes mains, a pris vie, comme à chaque naissance l'enfant, que j'avais senti vivant abstrait en moi depuis des semaines, et qui prenait vie à la seconde où il poussait son premier cri hors de moi ; et la seconde suivante, lorsque je pouvais enfin le voir et le toucher, ma foi devenait amour. Le livre passe de la même façon de l'état de concept à celui de création concrète : il existe, soudain. Il a été acte de foi tout au long des heures passées à pianoter sur un clavier, à annoter rapidement des flash sur un carnet, entre deux cours, entre deux repas, entre deux piles de linge, entre deux enfants, entre deux nuits ; toujours en courant, toujours essoufflée, vite, vite, ne pas laisser perdre ce fil, il peut nous mener loin ; vite, vite, ne pas laisser s'effilocher la soie de la foi ; vite, vite, se raccrocher à ce brin d'herbe qui nous semble racine solide, s'y raccrocher avant de sombrer corps et âme dans la méfiance, dans le recul, dans les doutes, les pourquoi, les remises en cause, les phrases refaites et les mots effacés. 38


C'est une foi douloureuse, mais elle est là. Elle habite ceux et celles qui écrivent. Que le livre voit le jour, ou que le projet avorte, il y a toujours eu, au début, aux premiers instants, au moment de la conception, la foi grandiose et magique, mystérieuse et troublante, la foi en ce devenir du livre, en cet achèvement, en cet avènement. C'est la foi, et elle seule, qui soutient l'écrivain tout au long de sa quête. Sans la foi, il n'ira jamais au bout de la longue route. C'est elle qui le mène, c'est elle qui le soutient. Dis-le encore qu'elle n'existe pas, Nicolas ! LG - Sur le Livre 20 fevrier 2010

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Un samedi de février Il neige. Il vente. Les oiseaux reviennent malgré le froid, malgré le vent. Ils se posent sur les branches basses des petits arbustes devant la fenêtre, tout gonflés de plumes et de solitude. Ils regardent les choses de l'hiver, toute cette blancheur et ces arbres sans feuilles. Tout ce dénuement, toute cette blanche pauvreté. Heureusement, il y a le gros sapin : ils s'y engouffrent sans piailler, trop occupés à ne pas mourir de froid. Bientôt, le vieil arbre frissonnera de toute cette marmaille emplumée qui se presse sans bruit sous ses multiples jupes. Il neige, il vente, le froid est installé pour toujours, on pourrait le croire. Un jour timide blanchit le ciel. Il n'y a personne sur els trottoirs, personne dnas les rues : c'est samedi matin, Madame : les gens restent chez eux, boivent le café, mangent des rolls, ou des œufs au plat sunny side up. Il y a encore quelques journaux devant les portes, lancés prestement par le distributeur du Times Union, dans la nuit. Bientôt, même ceci, ce menu signe de vie, aura disparu : les gens n'ont que faire de l'édition papier, ils ont la télé, qui leur en dit moins, mais c'est si facile ! on peut continuer de boire son café en regardant l'écran. Bientôt, dans quelques années, les journaux auront disparu, vaincus par la paresse, par la facilité. Il neige, il vente. Saleté de pays, merveille de pays. J'oscille entre amour et haine, mes doigts sont gourds au petit matin, il faut remonter le thermostat, se servir une seconde tasse du chaud breuvage, la garder en main pour se réchauffer, mettre des chaussettes de laine épaisse, prendre le livre et se remettre sous la couette, peut-être ? Il neige, il vente. C;'est un samedi de la fin février. Ma rue est figée sous tout ce blanc, les talus se veloutent de neige fraîche. Le sapin s'emmitoufle de blanc. Les oiseaux se pressent en groupes dans l'ombre de l'arbre vieux. Les écureuils se pelotonnent dans leurs nids. Les chats frileux regardent par la fenêtre dans le clos tiède des maisons. C'est un autre samedi, l'avant dernier du mois, mars arrivera dans huit jours, et mars, c'est un peu le printemps. L"hiver finira bien un jour. Le merveilleux hiver, le féerique, le magique, celui pour lequel, je me connais, je soupirerai au milieu de l'été, en pleine canicule, dans l'insupportable chaleur. Au Jour d'Hui, samedi de février deux mille neuf, à huit heures du matin. Sat Feb 21 07:57:06 EST 2009

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_________________________ Emyole : Ici en droite ligne, au nord de chez-toi, le soleil commence à se pointer, il fait -9 et malheureusement, je ne vois plus d'oiseaux...mes arbres ont été abattus l'été dernier.....ce n'est que partie remise, déjà un jeune pommetier à fleurs prend racine et nous planterons un lilas japonais pour lui tenir compagnie...je parle ici du terrain en façade de la maison, car côté arrière, j'ai un magnifique chêne et un érable qui l'été sont très fréquentés par la gent ailée et les écureuils. ... les petites mésanges ces magnifiques petites choses qui aiment tant venir manger dans nos mains...ce qu'elles aiment surtout : les graines de tournesol noires... quelle belle photo... Voilà ce n'était qu'un petit clin d'œil du Québec à 9hres ce 21 février 2009 ! Lise : Enfant, je rêvais du Québec. Si on m'avait donné à voir Mon oncle Antoine, j'aurais pleuré d'envie. Enfant, j'avais, au plus fort des jours froids, vingt quatre heures de neige et encore, pas chaque année ; et quelle fête, quel plaisir, quel bonheur. Plus tard, j'ai vécu en montagne, j'ai connu les pistes, le ski, le froid ne me rebutait pas : en février, dans les Alpes, même en haute altitude, le froid est vaincu par le soleil. Enfant du soleil, j'ai viré ma cuti il y a vingt ans pour les blizzards du Minnesota, du Colorado, du Montana. C'est ainsi qu'on s'approche à pas de loup de nos rêves d'enfants : un jour, finalement, je suis arrivée à Montréal, c'était novembre et il neigeait fort dans la rue Sainte Catherine. Je marchais vers le musée dans un tourbillon de flocons, les maisons me fascinaient comme elles me fascinent toujours ; mais je voyais, plus loin, avec mes yeux de mémoire, les grandes étendues encore plus au nord, encore plus à l'est, et le fleuve encore sans glaçons, mais plus pour longtemps. Tu me parles des arbres abattus, de ceux que vous allez planter. Lesquels ? As-tu fait un choix ? Et grands comment ? Moi aussi, j'en veux, et j'attends le printemps pour les choisir : j'ai déjà un érable, un pommier, deux poiriers, et tout le menu fretin sauvage auquel je ne touche pas. Que vas-tu choisir, pour ton jardin de devant ? J’ai beaucoup de place, assez pour en planter trois (je crois) mais je voudrais garder du soleil, aussi. L'érable prend trop de place. Dis-moi ce qu'est un pommelier ? C'est bon, de pouvoir parler arbres ; ça réchauffe. J'ai enfin "décroché" mes wreaths de noël hier après midi. Emyole : Pommetier – Pommier à fleurs Photo Pommetier – Pommier à fleurs Le pommetier, appelé également "pommier à fleurs", est un arbre angiosperme dicotylédone appartenant à la sous classe des Rosidae, à l'ordre des rosales, à la famille des rosacées (Rosaceae) et au genre Malus. Au Québec un pommetier (crabtree en anglais) est un pommier (Malus) dont les fruits ne dépassent pas 3 centimètres de diamètre. Ainsi tout pommier peut être qualifié de "pommetier" s'il rempli cette condition. Il existe de très nombreuses espèces ou cultivars, plantés le plus souvent pour leur aspect décoratif et notamment leur floraison spectaculaire. Les fruits, appelés "pommettes" sont rarement consommables crus, mais peuvent être utilisés en gelée. Les pommettes persistent souvent pendant l'hiver et font le régal de nombreux oiseaux comme le jaseur, le gros-bec, les bruants, les moqueurs, les chardonnerets, le geai bleu. Il existe des pommetiers à fleurs simples, doubles, blanches, roses, pourpres, pleureurs, à feuilles vertes, à feuilles pourpres, à port pyramidal, à port globulaire... certains taxons pouvant cumuler plusieurs critères. A noter que certains pommetiers sont utilisés comme porte greffe pour les pommiers et comme "tiers de fertilisation" dans les vergers. La ville de Montréal a choisi le pommetier comme symbole floral. Voilà pour la définition du POMMETIER À FLEURS ;-) Lise : ah mais voilà, c’est le crabtree, et j’en voudrais bien un ! C’est très beau, j’adore cet arbre, et en plus, si les oiseaux se nourrissent des pommettes, ben, tiens, je vass en planter au moins un, devant. Et je ne vais pas oublier les forthisias, cette année : l’an dernier, je n’ai pas eu la bonne réaction, j’ai attendu une semaine et, basta ! Plus aucun forthisias dans aucune jardinerie ! Cette année, forthisias, donc et 4 ou 5 petits lilas pour faire la haie avec mon voisin de gauche, la maison grise et blanche. PS : je fais une faute avec orthisias, je pense, hein ? ... Je ris un peu en relisant ce que j'écrivais ce matin dans mon second commentaire : " j'ai beaucoup de place ! " Hi hi, ne croirait-on pas ! Lol ! À cote de ton jardin, le mien a la surface d'un timbre poste ! Mais enfin, je peux y planter deux arbres sans qu'ils se gênent parvenus à l'âge adulte. Emyole : Ah ! Mais tu sais, ce n'est pas tant la surface du jardin qui importe c’est l'âme que nous lui donnons. (;-) et comme tu l'écrivais plus haut, il faut voir à ce que les arbres ne se gênent pas lorsqu'ils auront atteint leur taille mature ;-) et aussi, il faut bien se renseigner sur les arbres avant d'en planter car beaucoup sont la cibles de prédateurs ; c'est ce qui est arrivé à nos 3 magnifiques bouleaux semi-pleureurs que nous avons du faire abattre, ça crève le cœur je te dis. Lise : De quels prédateurs parles-tu ? Ce sont des mycoses ou des insectes qui ont causé la mort de tes superbes bouleaux ? Zut, j'ai manqué quelque chose, moi : je croyais que c'était parce qu'ils devenaient trop grands et présentaient donc un danger pour la maison. Ca va me faire bizarre de ne pas les voir, j'ai quelque part une photo avec ce groupe de bouleaux devant ta maison. Mais avez-vous replanté les nouveaux arbres à peu près au même emplacement ?

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Emyole : Ce sont bien des insectes, l'agrile du bouleau qui tue tous les bouleaux. Et c'est bien dommage. J'aimais beaucoup le bruit du vent dans les feuilles de ces bouleaux. Mais en peu de temps, l'agrile du bouleau fait sécher les branches du haut c'est un insecte qui se nourrit de la sève de l'arbre, et il faut couper, couper et finalement, abattre. Pour le moment nous avons planté 2 arbustes, des sureaux du Canada... Lise : Mince, je ne connaissais pas : je suis NULLE en jardinage, même si j'adore les jardins : L'agrile du Bouleau s'attaque-telle aussi aux autres arbres ? Emyole : Cet agrile est spécifique au bouleau mais je sais qu'il y en a d'autres sortes qui s'attaquent à d'autres essences d'arbre. Alors maintenant, avant de planter un arbre, il faut bien s'informer ; on n'a pas le choix. _____________________________

Passages Avant les diverses voies et embûches de toutes sortes qui vont jalonner sa vie, au tout début, dans les premières années qui suivent le choc de ce premier passage vers la vie, dont il ne se souviendra jamais, quoiqu'il fasse, une menace s'inscrit pourtant, tronquée, dans l'exclamation qui tombe de haut sur l'enfant : "attention à toi , si tu n'es pas sage "

suprême insulte, celle sur laquelle elle butait à la moindre peccadille, celle qui faisait mourir le vilain mot sur ses lèvres, lui ôtait l'envie de grogner, et la forçait à avaler l'asperge vinaigrette, dont elle détestait tout : le gout, l'odeur, la forme et la couleur. C'était la

Nourrie d'épais albums dorés et roses, elle se devait de l'être, sage, en tous lieux et circonstances. Il lui fallait se conformer à cette étiquette du savoir-vivre enfantin, enseignée très tôt, et qui prétendait la rendre semblable aux enfants qui se découpaient fièrement sur les illustrations, campés sur leurs petits mollets ronds, chaussettes bien tirées, entourés de poneys et de bicyclettes moyenâgeuses. Et elle l'était, sage. On travaillait fort, dans sa famille, pour faire d'elle une petite fille modèle. Pourtant, de cet ancien moule, elle garde encore, en creux, les traces de Sophie Fichinni pleine de taches et d'égratignures, et de cette autre enfant un peu sauvage, découverte dans une bande dessinée en images d'Epinal, cette petite rigolote insolente et taquine, Claudine, dont elle avait fait son amie de cœur. Dans les histoires qu'elle se racontait à la dérobée, le soir, dans l'obscurité de sa chambre, elles se ressemblaient point pour point toutes deux, des cils aux orteils. Claudine, dans l'album, habitait à Paris. Les illustrations la représentaient habillée et coiffée court, en tous points semblables aux photos de la petite fille, celles qui paradaient dans l'album de famille où l'on gardait fièrement les petits carrés de carton brillant. Ils jalonnaient la petite vie des enfants, de leur naissance aux noëls, du premier vélo aux baptêmes, jusqu'à la gloire de la Première Communion, et même au delà. Claudine vivait, disait l'histoire, dans un appartement. L'enfant était passée sans s'arrêter sur ce mot incompréhensible : ils habitaient tous, ses amis et elle, dans les vieilles maisons de son petit village ; son univers se limitait à la ville voisine, où habitaient ses grands parents paternels. Elle ne connaissait personne qui habitât un appartement. Et Paris était au bout du monde, du coté des grands espaces glacés où vivait Maria Chapdelaine. Très loin, très vague, mystérieux, un peu effrayant et pour tout dire inaccessible. " Si tu n'es pas sage …! ". C'était le point culminant de l'apostrophe, l'apothéose de l'indiscipline, la paralysie assurée, l'acier tranchant contre lequel venaient se briser ses

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velléités de révolte. "Si tu n'es pas sage…? " Qu’allait-il lui arriver ? Elle ne se posait pas la question, craignant la réponse, refusant de se hasarder dans ce chemin lugubre et sombre d'où lui viendrait, pour peu qu'elle s'y aventurât, le malheur le plus noir : la désapprobation, le rejet, peut-être même l'indifférence, qui est le stade le plus avancé vers la mort. C'est avec de telles peurs qu'on ligote l'enfance. Elle avait très tôt compris qu'elle devait à tout prix protéger l'amour sans borne qu'elle vouait aux adultes qui l'entouraient. Il suffisait de se conformer à quelques règles de bienséance, somme toutes bien simples à retenir ; il suffisait de ne pas céder à l'envie de s'écarter des normes préfabriquées ; cette envie sauvage, brutale, de dire Non à tout, qui la traversait parfois. Pourtant, il y avait des jours où l'envie était plus forte que la peur. Le coup d'œil froid de sa mère, le silence réprobateur de son grand père, la main ferme de sa grand mère avaient beau parer au feu, le diable - qui d'autre aurait pu ? - la poussait, comme tout le monde et ma petite amie Pomme, à dire merde, et même pire. Les adultes présents en rougissaient : " Où, mais où donc, a-t-elle apprit ce mot ? " s'indignaient-ils. Ils oubliaient - c'est ainsi que, bien avant que la maladie d'Alzheimer fasse la Une de tous les journaux à grands tirages, elle apprît que les adultes perdent la mémoire très tôt - ils oubliaient, donc, tout simplement, qu'elle vivait au quotidien en compagnie des charretiers et à l'ombre des vignerons, pour qui le mot tonitruant tenait lieu de fond sonore et de ponctuation, dans les conversations rieuses, à l'ombre des soirs de juin. La sagesse lui était nécessaire comme un paravent ; elle la protégeait des zones inconnues dans laquelle elle n'avait pas encore le droit de s'aventurer. Ces zones d'ombre et de lumière, lumineuses, opaques, transparentes, velours de soie luisants doucement sous la clarté de la lune, l'attiraient comme le livre neuf jamais lu, la maison aux portes closes, le piano fermé, la toile vierge sur le chevalet, avant, juste avant la première ligne tracée, l'ébauche de l'histoire en couleur, lorsque dorment encore les cieux et les rivières dans les tubes de bleu outremer et de terre de sienne. Elle était une enfant heureuse, que chacun jugeait un peu sotte parce qu'elle était mince et musclée, costaude comme un petit garçon, et joviale comme un palefrenier. Elle criait fort, riait de même, inventait des jeux compliqués qu'elle abandonnait très vite, et dans lesquels elle entraînait ses amis, Coco, Romarin, Jackie-Garçon, Manino. Ils courraient ensemble dans les allées sauvages, à l'assaut du grand jardin dont ils n'arrivaient jamais à épuiser les trésors. Ils retrouvaient à chaque saison les mêmes arbres aux mêmes places, les mêmes massifs de fleurs, les mêmes croassements de grenouilles dans ce qui avait été un bassin, cent ans plus tôt. Les tonnelles s'effondraient sous le poids des roses, ils en faisaient des châteaux et des villages d'indiens, au gré de leur imagination et de leurs dernières lectures. Ils regardaient les fourmis, les abeilles venaient marcher sur leurs bras nus, les mulots détalaient à leur approche. En ce temps là, l'araignée ne s'appelait pas mygale, le scorpion n'avait pas encore envahi le carcassonnais ; on pouvait laisser les enfants jouer des après midi entières dans l'endroit le plus reculé du parc, sans crainte de les retrouver souillés, blessés, violés et perdus à tout jamais. C'était la guerre quelque part, mais la peur n'existait pas encore pour les petits enfants. Ils étaient protégés. On l'avait habituée à ne jamais crier pour rien, à retenir ses larmes, à serrer les dents et à rester maîtresse de ses réactions en toute occasion : elle avait l'exemple des adultes qui

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l'entouraient. Dans le calme olympien de son grand père, elle lisait sa souveraineté sans partage sur sa famille, sa maison, sa propriété, ses chevaux, son village et les hameaux avoisinants. Elle savait, avec une certitude en elle plantée comme un tronc d'arbre, qu'un jour elle serait à son tour souveraine du même royaume. En attendant, elle devait apprendre, comme lui et à ses cotés, à parler aux fleurs et aux chevaux, à flatter de la main et de l'œil les plantes et les arbres, à gouter l'eau de pluie au moment où elle tombe du ciel droit dans les lèvres entr'ouvertes, et à poser sur toutes choses un regard aigu pour en comprendre les besoins et les devoirs que nous avons envers chacun, hommes, bêtes ou plantes. Car il lui était imposé, de naissance, d'apprendre à pratiquer cette science de bonté sans laquelle toute vie est inutile. Elle s'y conformait souplement. Sage, elle s'évertuait à l'être tout au long des jours, en classe, à table, au jardin, dans le bain, en voyage en autocar, et jusque sur le petit banc de bois étroit et dur, lorsqu'elle tenait les rênes de Gaspard le cheval bai, sous l'œil attentif de son grand père. Ainsi passèrent les années, de passages en passages. Puis, un jour malencontreux, elle ne le fût plus, sage : c'est alors qu'elle s'aperçut qu'elle était rentrée dans une autre vie, que son enfance était terminée et qu’elle avait grandi. Lise Genz Mon Feb 23 12:12:53 EST 2009 |lise CC |

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Il y a des jours Des jours où je me demande à quoi exactement ça sert tout ça. Tout ça : les blogs, les courriels (sauf quand je reçois des photos de mon petit-fils lointain, des nouvelles de mon amie des neiges, ou le "maman, on peut venir diner demain soir" du plus jeune) J'entends par là : ces moyens de communication, sont-ils là vraiment pour que nous communiquions, que nous nous approchions et rapprochions les uns des autres, que nous fassions un bout de chemin ensemble, en regardant vers l'horizon ? Ou bien sont-ils là dans le seul but de nous faire passer un moment ? Pire : une façon comme une autre de tuer le temps ? Ce serait grave, alors. Ce Jour d'Hui qui se termine, 23 février 2009, fin des groupes MSN, qui ont fait autant de mal que de bien, qui n'étaient pas surveillés, sur lesquels les insultes, les bagarres, les injustices et immondices de tous ordres fleurissaient au quotidien. Ils sont morts, enlevés, effacés, emportés dans la spirale d'une tornade monstrueuse, TANT MIEUX ! Bien fait. Ouf ! Ouais... mais ce sera remplacé, et par quoi ? L’avenir, l'avenir seul nous le dira. Lise Genz Mon Feb 23 20:00:09 EST 2009 |lise CC | Sérénité relative : Papotages, Le net... nous est un moyen merveilleux de connexion avec le monde ...qui veut bien se connecter. La puissance de ce monde reste à s'épurer, afin d'en retirer ce qui n'est pas essentiel. Mais ce contact délicat qui n'inflige pas de sonnerie, qui attend patiemment la venue du correspondant, à son heure...j'aime. C'est aussi une thérapie pour beaucoup de personnes n'ayant pas dans leur entourage la possibilité de parler. -Bien plus nombreux que l'on ne croit- Selon ce que l'on recherche c'est aussi une façon d'évoluer, tout dépend de ce que l'on cultive. Tricoter des idées peut mener à son terme un joli pull d'évasion. L'horizon...c'est une promenade en liberté, c'est un but qui n'en parait pas un, et qui pourtant vous amène à vos rendez vous de la vie. Tuer le temps ! Quelle mauvaise façon de sacrifié la création... C'est bien moi ! Les

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MSN me sont passés au dessus de la tête, je n'ai même pas pris le temps de les comprendre, qu'ils ont fini de se détruire. Lise : Tu as raison, Sereine : c'est vers ce coté positif que je me tourne. Le net, comme toute chose, est un miroir à deux faces. Rien n'est jamais ni tout bon ni tout mauvais. Nous devrions y penser plus souvent. Tu n'as pas eu le temps de bien connaître les MSN ? Il y avait de bonnes choses, j'ai traversé grâce à eux des périodes superbes, connu des gens merveilleux. J'étais avec MSN depuis 2002 : 7 ans, c'est un bail ! Je crois que tout est un peu exacerbé, sur le Net : la joie comme la souffrance, l'amitié comme la haine. Nous arriverons à le domestiquer, cet outil Net : l'humain est capable de plus encore. Sérénité relative : Cette petite bête noire de ce matin ? Vous l'avez tuée ? Passez une bonne nuit. Lise : Oui, merci, Sérénité (j’aime bien le 'relative"… c'est exactement ainsi que je me vois aussi, parfois " relativement sereine, sereinement relative… ) Les petites bêtes noires, heureusement qu'elles sont là, pour le contraste.

Les miracles continuent Les miracles continuent : j'ai rencontré Flo il y a un mois environ, sur son site poétique, La Rôtisserie des Poètes. Je n'en suis pas repartie. Voilà pour le miracle. Pour rester dans la vérité, je dois expliquer que j'avais rencontré Flo et Isa il y a trois ans, passage en coup de vent sur l'Auberge de Ragueneau (Ah, Rostand !), j'étais trop occupée à "aider" à l'édition de Photomaton. Je comptais bien y revenir un jour. Voilà encore l'énorme mensonge de l'Internet : le temps. On dit "un jour" et c'est quand ? A tout hasard j'avais mis le lien dans mes favoris. Je ne sais pas comment ça marche pour vous, les favoris. Les miens vont en colonne sur des miles et des miles (américains, bouh) et puis, de temps en temps, mon ordi se plante, explose, se met en grève. Je suis assujettie à ses délires et fantasmes, à ses caprices et lubies : bref, il y a un peu plus de deux ans, crash ! Alors, me direz-vous, comment as-tu retrouvé la Rôtisserie des Poètes ? Parce que ma mémoire avait retenu le nom : Florence Noël. Ce n'est pas un nom facile à oublier. Pas plus que ses mots. Si vous ne la connaissez pas encore, courrez, cliquez, mettez vos lunettes, et surtout, ne faites pas comme moi, même si vous êtes en pleine édition de votre prochain bouquin, même si votre meilleur ami compte sur vous pour relire ses manuscrits et les corriger : il attendra. Plantez tout travail, et allez vite lire : ce n'est pas du temps perdu, cette immersion dans la poésie, dans l'émotion et dans le bel écrire. Je vous le dis : ça fait un bien fou ! Lise Genz Tue Feb 24 11:01:08 EST 2009 |lise CC | Emyole : Je viens de faire comme toi Lise, hop dans mes favoris avec la ferme intention d'y retourner...dis...tu ne faisais jamais de ménage dans ces favoris, pas de classement, rien ? Mais tu peux au moins faire une sauvegarde. Car tu penses bien, moi aussi j'ai déjà perdu de ces favoris. Alors Florence Noel c’est noté. Lise : M'assagir, moi ? Alors que je commence à peine d'élever la voix et de dire partout et à tout le monde ce que je pense right away, sans prendre trop de gants ? Meuh non, ma toi. :) Je ne m'assagirai jamais, c'est trop tard, lol ! Prenons-en notre parti (politique ?) - partie (de plaisir ?) - party (as a surprise ?) Lise : tu me connais ! bien sûr, toujours la ferme intention de ranger, et puis le temps passe, file, court, vole ; et moi derrière, essoufflée, essayant vainement de le rattraper ! Mais depuis un mois, ouf ! J’ai trouvé un bon rythme, je cours moins et j'agis mieux - ce serait-y pas la recette de la sagesse ? (;) Jean Baptiste : Je te lis tous les jours ou presque Lise CC Et cette lecture m'enchante. Donc je suis enchanté. Vous êtes Lise CC une merveilleuse écrivain. Je voudrais commenter. Mais je suis préoccupé par mes propres activités qui sont nombreuses. Mes sports, mes petits enfants qui me passionnent, mon site où j'écris, le cinéma, la lecture de mes journaux, ma chorale avec ce spectacle du mois de mai et puis et puis...

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Manhattan livre blanc 44


[ ... ] Lorsqu'on vient du Nord par le train, on arrive au centre de New York par un tunnel long

de presqu'une heure. Après un grand escalier où rien ne se passe, on émerge à l'air libre, dans une rue toute bête et qui sent mauvais. Le trottoir n'est ni plus large, ni moins, que dans n'importe quelle autre rue. Les taxis jaunes baguenaudent, maussades. Il s'agissait de ne pas en prendre, l'hôtel était assez près de la gare, et deux heures de train nous donnaient envie de marcher. On a pris une rue à droite, traversé une avenue assez lugubre, pour nous enfoncer, de l'autre côté, dans la crasse de la Quarante Quatrième. À intervalles réguliers, nous entendions la célèbre sirène de la police américaine. Même ce cliché ne nous était pas épargné. Les gens passaient à côté de nous, ils se hâtaient, ils devaient être heureux de laisser leur travail et de rentrer chez eux ; mais rien sur leurs visages ne laissait transparaître le moindre contentement. Nous tirions nos valises, je protégeais mon sac, et nous marchions vite. La cadence parisienne m'est revenue ce jour-là, après des années loin de mes sprints sur le Boul’mich. Mais je ne retrouvais rien de la chaude haleine parisienne. Dans le froid de ce matin de décembre, Manhattan ne m'accueillait pas. Froid, distant, muet, hautain, il ne me voyait même pas, et mes yeux se heurtaient à son indifférence. La suite : 1Fantaisie new-yorkaise2 Fri Feb 27 10:40:15 EST 2009 |lise CC | __________________________________________________

Chanson de février C’en est fait de l’hiver. Le ciel se vêt de gris, on marche dans les flaques et l’oiseau recommence son manège incessant et ses cris inutiles. C’est est fait des blancheurs. L’arbre attend le soleil et bourgeonne en cachette. On peut lui chuchoter des conseils de prudence, et que mars est parfois plus méchant qu’un janvier, il n’en croit rien, le bougre et pousse hors de lui les feuilles de soie blondes qui seront feuilles vertes. C’en est fait des frimas. L’écolier ne court plus sur le trottoir d’en face ; il marche guilleret attendant le printemps, humant l’air sans patience, sautant à cloche-pied, et chantonnant sans fin un ultime couplet. C’est est fait de l’hiver : il peut encore geler, venter et nous donner de faux airs de noël aux matins blancs de neige : on n’y croit plus. Là-haut, sous le bleu du grand ciel tendu en soie pareille, le soleil endormi ouvre un œil et s’éveille LG Fri Feb 27 16:27:54 EST 2009 |lise CC |

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Pour un livre superflu [ ... ] J'ai lu ce livre alors qu'il n'était encore qu'un manuscrit. Je l'ai lu plusieurs fois ; chaque fois,

j'ai découvert en ses pages une nouvelle richesse. La beauté d'une œuvre littéraire ne va jamais sans dire. Entre le livre et le lecteur se dresse le no man’s land de la presse littéraire et de la critique du même nom. Les prendre à revers serait une tactique que peu d'auteurs pourraient aujourd'hui se permettre, et qui ne convient qu'à des écrivains chevronnés. Il nous est tout à fait impossible d'écrire en 2004 ce que Gautier écrivait en 1834 ; nous ne pourrions vitupérer, comme il avait coutume de le faire, contre les journaux et les journalistes, ni écrire avec lui : " Ils nous entonnent malgré nous des jugements tout faits, et nous préviennent contre les choses que nous aimerions ; ils font que les marchands de briquets phosphoriques, pour peu qu'ils aient de la mémoire, déraisonnent aussi impertinemment littérature que les académiciens de province..." (1). Mots qui même un siècle et demi plus tard pèsent leur poids d'insolence. Et de vérité. 45


[La suite : Préface Universelle pour un Livre Superflu] Lise Genz 2004 Sat Feb 28 10:55:55 EST 2009 |lise CC | ______________________________

Dernier jour du mois J'aime ce mois raccourci. Demain, nous entrerons dans Mars, et il se trouve que Mars est mon mois, car je suis née un 23, bélier et fonceuse. Février se terminera ce soir, et je lui dois un grand merci : il m'a apporté cette année vingt huit bons jours d'amitié, d'amour, et mon petit fils qui est un trésor parfait, et les mots de mes fils qui deviennent hommes, et les rires de mes amis qui me tiennent chaud, et la découverte d'autres mots, d'autres émotions, d'autres cœurs, d'autres blogs, d'autres sites. Des poètes, des peintres, des conteurs. La vie, quoi. Février a vu la fin de MSN, et le renouveau qui s'en est suivi. Si le grain ne meurt, toujours d'actualité vingt siècles plus tard. La fin de MSN nous prouve que la création virtuelle est d'une fragilité déconcertante, si on la suit à la lettre. Blogs, sites, forums, tout ce qui s'inscrit dans le domaine virtuel est voué à la destruction, à plus ou moins longue échéance. Que les expériences douloureuses façon MSN ou Sympathique nous soient, à nous pauvres internautes impuissants, la leçon fondamentale, à ne jamais oublier, et qui se résume en quelques mots : tout ce qui s'écrit ici disparaîtra sans laisser de traces, et, paradoxalement, sans jamais être effacé. Mystère de l'Internet, mystère du web, leçon de février. Sat Feb 28 11:18:37 EST 2009 |lise CC | ________________________________

Fin du monde Que la liberté est difficile. Qu'elle passe par une liberté de parole. Que la liberté de parole est douloureuse Voici toutes choses dites, écrite avant moi par Salomé (Jacques). Je peux me tromper mais lui ne le peut pas. Ceci dit, j'assume, pensait-elle, et j'avance dans le sens de la parole, et celui de la liberté et nous irons ensemble, nous quatre (Salomé, la parole, la liberté et moi) dans la bonne direction. Si nous ne nous cassons pas la gueule avant, pensait-elle. Et continuait de marcher dans les rue torrides de cette ville en août, au long des trottoirs saturés de soleil. La mer d'un bleu tranchant, solidifiée, au bout de la rue, entre les murs blancs des façades. La mer et ses odeurs acres jusqu'à l'amertume, la douleur de ce bleu plus aigu qu'une lame, la lourdeur du soleil sur la nuque, sur les épaules, comment écrire tout cela, comment le dire, dans quel langage et avec quelle vérité. Pensait-elle. La musique s'était arrêtée, une voix féminine passait à travers le rideau de perles. " Le pont de Tancarville coupé en deux… La tour Eiffel s'écroule dans un grand bruit de ferraille, les arènes de Nîmes ... le théâtre d'Avignon ... les restes de l'abbaye de Jumièges... " Il suffirait de ne pas penser, pensait-elle, il suffirait de marcher jusqu;au bout de la rue, jusqu'à la jetée, regarder sans les voir les bateaux, marcher le long du port, voir sans les regarder les voiliers, les pécheurs, les stries scintillantes des poissons, leur sang noir, leurs têtes révulsées. " ... La plus belle avenue du 46


monde, les Invalides, l'Arc de triomphe de l'étoile ..." Elle va dire Notre-Dame, elle va dire Le Louvre… " Notre Dame de Paris et tout le quartier alentours : le Louvre, l'île Saint Louis..." Puis, le silence. Autour d'elle, sur le trottoir, les gens ne bougeaient plus. Un enfant arrivait en courant, remontait la rue en venant de la mer, là-bas, bleue, artificiellement bleu et lourde sous le soleil. Il disparut, happé par l'éclair rouge, par la lumière soudain fulgurante, dans le bruit atroce des maisons effondrées, dans les cris et les hurlements, et la poussière. Elle n'avait plus qu'une pensée : le rejoindre, ne pas le laisser seul. Puis elle disparut à son tour. _________ "Epilogues" - Lise Genz 2009 Sun Mar 01 09:52:21 EST 2009 |lise CC | ________________________________________

L'écrire Me viennent des bouffées d'écriture, des alanguissements de mots. C'est l'écrire, c’est le prologue à l'écriture, c'est le préambule à la grande aventure, la préface à ce qui sera, qui n'est encore qu'illusions, lignes floues dans un horizon strié de pluie. Brouillards. J'aurai beau m'asseoir devant la table, yeux fixés sur l'écran, et doigts placés en suspens sur le clavier, si le mot me fuit, l'écrire restera figé. On ne provoque pas l'écrire, on le subit. Je vois, plus loin que la fenêtre, des formes mouvantes. Je veux les dire, je veux les partager avec vous. Mon pouvoir s'arrête là. Je fais connaissance avec l'impuissance, avec la résignation : ce soir, demain, la vie finira à ma porte, je serai seule dans le silence, condition essentielle. Les vagues viendront mourir au seuil, sans entrer. Je ne les entendrai pas, je ne verrai pas la mouette, ni le flocon, ni le soleil. Je serai hors d'atteinte, loin, et ce sera enfin l'écrire, la condition première et absolue, la seule pour prendre l'envol au dessus des toits et vers les nuages. Ce sera la plénitude, sans être pour autant le bonheur : car il peut y avoir souffrance dans l'écrire. Ce sera demain. Aujourd'hui, je reste patiente dans l'antichambre de l'écrire, et j'attends, paisible. ________________ Tue Mar 03 09:56:52 EST 2009 |Lise Genz | Partance : Au jour d'hui, faites la place pour que vienne s'installer la puissance magique de l'écrire. D'abord : recevoir ...ensuite redonner. lise CC Says : Je suis toujours là, muette mais ça ne dure jamais longtemps. Déjà, des fourmis au bout des doigts. Recevoir, redonner, partager. J'aime ce programme là, partance. ______________________________

Ecrire d'émotions Le livre, ce matin, je vois que c'est une pile. Livre-pile chargé de toutes les émotions rassemblées par l'auteur. On m'a reproché, longtemps, de n'écrire qu'à l'émotion comme

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ma voiture ne roule qu'à l'essence. J'en ai pleuré, d'abord, assez stupide pour m'en sentir insultée. J'en suis fière, aujourd'hui. L'énergie d'écriture est déversée de l'auteur au livre par l'intermédiaire des doigts, de la plume, du clavier, du papier ou de l'écran : des choses, une partie du corps. Seulement des conducteurs. Ce n'est pas l'énergie qui nous fait choisir les mots, ce sont les mots que nous écrivons qui se chargent de notre énergie pour la redistribuer ensuite aux lecteurs. Cette énergie serait concentrée quelque part dans (…? l'âme, le cœur, les neurones, le souffle ? quoi d'autre ?) de celui/celle qui écrit. Nous serions de véritables centrales sans connaitre l'exact emplacement en nous du nucleus. Nous déverserions cette énergie émotionnelle à travers les phrases, dans les mots. Choisissant, ou ne choisissant pas celui-ci plutôt qu'un autre. Attrapant au vol les mots qui concrétisent l'émotion. Ces mots qui, selon certaine théorie chère à Stephen King, seraient vivants autour de nous, prêts à être attrapés (au vol ?) ou mieux, dirigés vers nous (appelés ? aimantés ?) pour devenir (servir de) véhicule de (à) l'émotion à écrire. CQFD : sans émotion, point d'écriture. Même la plus sèche façon d'écrire est une pile. Personne n'écrirait donc sans ce premier starter. Ce que Jean R. appelle " être incité". Sans lequel il ne lui est pas possible d'écrire, nous dit-il. Je le crois parfaitement : je ressens la même chose. Le miracle, permanent, c'est qu'il en faut peu pour m'inciter. Un flocon de neige suffit, parfois. Ou le parfum des genêts. -------------

Je reste persuadée que le meilleur écrivain est celui qui arrive à déverser son énergie à l'état pur de la source - lui - jusqu'à tous ceux qui vont le lire, vaste réservoir. Il nous faudra un jour aller plus loin et savoir à quoi va servir cette réserve de mots. Quel est l'enjeu, la finalité ? A recréer d'autres émotions, qui seront transformées à leur tour ? Dans ce cas, l'écriture serait un éternel recommencement, une source jamais tarie, constamment renouvelée par elle-même. Un défi à la mort. Le meilleur écrivain est celui qui va chercher l'émotion à la base, au centre de lui-même. Il raconte soi-même, et sa vie, souvent sans le savoir. Tout ce qu'il écrit est relié à sa centrale énergétique. Il ne se perd pas en fioritures. Il ne prend pas de chemins de traverse. Il est la centrale et la pile, il est l'énergie et la bombe. On le reconnait sous mille pseudos, il a un style à lui, une façon à lui de partager ses émotions avec son lecteur. Son masque est de dentelle, transparent. Le mauvais auteur invente les émotions, ne passe que des ersatz, et invente des histoires. Il copie des modèles, ne s'écarte pas de la mode du jour, ne sort pas des sentiers balisés. C'est celui qui joue avec les sentiments ordinaires, sans s''écarter des généralités, des clichés. Il accumule les masques, et on ne le reconnaît pas. Il se cache, il se dérobe, il n'ose pas. Il a peur. La pile est mal chargée. Il n'y a pas de lumière, on avance dans un faux-jour. Cela peut plaire, un temps. Le malaise nous prend vite. Ma réticence devant certains textes viendrait de là. La batterie chargée d'émotion va servir à alimenter le lecteur, les lecteurs. Energies libérées dnas les Stances (Ch. Rochefort) ; elles m'éclaboussent, m'inondent, me submergent, sans me noyer. C'est une énorme vague, marée motrice, énergétique. Ma vie, après la lecture des Stances, ne sera plus jamais la même.

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Les émotions vivantes vont de la source au capteur, de la chute à la lampe, et je comprends maintenant pourquoi j'ai peur à Niagara. Quelque chose par delà le bruit et l'écume. Une splendide monstruosité. Toute la richesse d'une encyclopédie. L'hiver avec la certitude d'un printemps. La mort, avec la résurrection. La fin du monde, avec l'éblouissante merveille d'un autre monde, parfait. Lise Genz Thu Mar 05 09:43:04 EST 2009 |lise CC | _____________________________ Sérénité relative : Je n'ai pu aligner les mots tout de suite, l'émotion, la vôtre était la mienne. Comme vous avez dû être blessée par des positions aussi péremptoires. L'énergie de tout créateur est dans sa foi du travail à accomplir, son travail, son œuvre... Le silence permet de se retrouver et de reprendre le chemin câlin de l'écriture. Une suite de mots peut changer une existence, troubler une conscience, poser une certitude. Si, l'écrivain n'est qu'une suspicion d'émotion, il ne se passe rien ! Lise : Je sens que nous menons le même combat, Sérénité : un combat sans armes, et presque sans mots. A l'intuition, souvent. Un combat à mener sur la pointe du cœur. Mais vous savez, on le gagne chaque fois que, prenant du recul, nous survolons les blessants et les blessures, les péremptoires et leurs péremptoirités, les arrache-tout et leurs emporte-pièces. Les morceaux de cœur(s) emportés à l'arraché cicatrisent à la longue. Et finalement, avec le souvenir des peines passées vient une plus grande indulgence pour les autres, une plus large compréhension. Et nos angles arrondis, comme les bras pour l'embrasse. _____________________________

Joie d'écrire Dès le premier mot, la joie vient vers nous du fond de l’antichambre. Nous traversons avec elle les pièces en enfilades, nous ouvrons les unes après les autres les portes à deux battants. Que sont devenus les laquais, où sont passés les princes d’antan ? Ce sont les paysans d’hier qui s’avancent vers nous. Leur tête est couronnée de lauriers, la grâce ennoblie leur démarche et ils rient. Le rire vient vers nous avec la joie. Nous avons mis des mots côte à côte, en longs colliers. Le bonheur, c’est une phrase, ciselée du bout de l’âme jusqu’à l’accord parfait. Parfois, ô plaisir, elle naît ronde et pure dès la première seconde. L'orfèvre en écriture reste un instant à la contempler, ébloui. Il la garde en bouche comme on fait d’un vin de prix, à la première gorgée. Il la savoure, enivré. Le bonheur d'écrire se double du bonheur d’être lu. Toucher l’absolu dans l’enchaînement d’un premier geste : des lettres, pour créer le mot ; des mots pour créer la phrase ; des phrases, pour créer le texte. Et de tous les textes, mis bouts à bouts, créer un livre, à la fin de la dernière phrase. Ecrire sur le web : le livre repose, inachevé, au creux de la toile, un court instant. On ne sait plus quand le lecteur est venu, appelé par son sourire. On ne sait pas exactement où finit la joie d'écrire, où commence la joie de lire. Les rires s’entremêlent comme corps dans l’amour. Tout vibre à l’unisson. Une musique éclate quelque part, est-ce en nous ou en dehors de nous ? Le moment où nous tombons dans le texte est plus fort que le plaisir. De qui sont les mots que nous lisons ? Peu importe. C’est un chant de joie qui nous transporte en un ailleurs magique. Casser la châsse de cristal pour libérer le mot. Éclater la gangue de roche grise pour en extraire la phrase qui attend le soleil. Celui qui écrit a martelé les lettres pour les sculpter en grappes. La bombe volcanique contient des trésors d’améthyste, la Pierre Violette a des vertus sacrées : elle donne la sérénité. Nous découvrons la joie jusque sous les larmes. Il faut le gris de l’uniformité pour que ressortent les roses, les bleus et les 49


oranges. Sur les soieries indiennes, les couleurs éclatent malgré les pluies de la mousson. La fête triomphe des plus amères larmes, la joie vient de cent sourires, cent pirouettes et cent clins d’œil. C’est une houle d’émotions qui nous roule sous ses tabous. Le paradoxe est au rendez-vous du bonheur d’écrire. Lise Genz Fri Mar 06 07:00:04 EST 2009 |lise CC | ____________________________ Kouki : çà c'est d'la belle ouvrage Dame Lise ! Mon Sep 21 01:47:56 EDT 2009 | ____________________________

Un texte à plusieurs mains Le texte suivant (1) est l'exemple de ce qui pouvait se faire sur les (défunts) groupes MSN en 2004 : écrire à plusieurs mains sur un même texte, chacun dans son registre et sa tonalité, et, sans détruire l'harmonie, accéder à un texte à plusieurs voix confondues dans une ligne mélodique d'une grande pureté, sans fausses notes. C’est une gageure intéressante pour tous ceux qui aiment écrire et n'ont pas peur de s'aventurer hors des sentiers battus. Dans son atelier d'écriture des Préfaces, ouvert en juin 2003, l'auteur-coach J.- M. Dutey (2) entraînait ses participants à l'écriture collective. Les pages web se prêtaient très bien à ce genre d'exercice : chaque auteur apportait son mot, ses mots ; sa phrase, ses phrases ; et parfois tout un paragraphe. Ces apports étaient insérés dans le texte initial, au gré de chaque auteur, chacun possédant une couleur personnelle, reconnaissable. J'écrivais en bleu sombre. Jean-Marc Lafrenière en marron clair couleur feuille morte. JM Dutey en vert, d'autres en rose, en bleu clair, en violet, en noir. Le texte initial, une fois terminé, ressemblait à un arc en ciel. Après les corrections et les ajustements nécessaires, tout le texte passait au noir, et il était alors considéré prêt pour la lecture. Dans L'Ascension, comme plus tard dans A nous la liberté (3) et dans Ricochets(4), j'ai travaillé le texte initial par rapport au style de JMLafrenière et de JMDutey, qui possèdent tous deux le don de poétiser le moindre caillou, le plus petit brin d'herbe, le plus léger souffle d'air. Dès le départ, je savais que certains mots, certaines tournures de phrase les entraîneraient vers une nouvelle image, les inciteraient à gravir les derniers mètres qui nous séparaient du sommet - ou les derniers tours de roue du train, dans "A nous la liberté", ou les derniers jets de galets dans "Ricochets". Ecrire à plusieurs a été pour moi, tour à tour, une découverte, un émerveillement, une discipline et un grand pas en avant dans l'art et la manière d'écrire. Ce fut aussi parfois la source de conflits : on ne s'immisce pas dans l'écriture d'un autre, sans quelque tiraillement : on risque de froisser, d'aller vers la dissonance. Les sauts de nos partenaires font parfois des remous dans nos flaques d'écriture. Ils peuvent faire dévier notre pensée première, leurs mots ne sont pas toujours acceptés avec le sourire. Et comment le leur dire, sans les blesser ? Il faut beaucoup d'amitié et une complicité en acier pour résister à ces égratignures. Il faut aussi une grande générosité, et la compréhension de ce qui plaît, ou effarouche, les partenaires d'écriture. Il faut le respect, savoir donner, rester positifs : et là, je savais. Il faut aussi savoir partir à temps. Je ne l'ai su que bien trop tard. _______ (1) L'Ascension, janvier 2004 (2) Zones d'Ombres, avec J. Sautières, Gallimard ; Photomaton, 2006, En-Lignes Editions. Routes Enlacées, 2007 La Madolière ; Scribulations (revue), 2008 ; _________________________

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Un quart de siècle plus tard Le Journal, par Mabica, France / 8 mars 2009 Il y a 25 ans... Entre collège et lycée, on allait à l'école, y compris dans le privé, avec Aicha,

Myriam, Karim, Moumia, Samuel, Jean-Kevin, Sandrine et personne ne se glorifiait de sa religion, de sa couleur ou ne se voulait à part du fait de ses origines ou de sa culture. On allait à l'école ensemble, on était reçu chez les parents des uns et des autres. Aujourd'hui, mes enfants ne fréquentent pas Aicha ou Karim parce que ceux la veulent rester entre eux. Ils parlent arabe entre eux aux récréations, font le ramadan, enguirlandant au besoin le chauffeur du bus qui est en retard alors qu'ils crèvent de faim et sont pressés de rentrer chez eux à la nuit pour manger. Samuel, personne ne savait qu'il était juif avant qu'il ne refuse de venir dormir chez son pote Jean-Kevin parce qu'il ne mangera pas comme il le doit. Quant à Sandrine, elle voit de moins en moins Moumia parce que ses parents trouvent que ceux de Moumia sont un peu légers sur l'hygiène alimentaire, ce qui est une autre façon de dire qu'on ne comprend pas ce que veut dire "hallal". Mais qu'est ce qu'ils ont tous à faire caguer avec leurs délires gastronomiques ? On ne va pas leur servir mémé au court bouillon, quand même ! Plus sérieusement, et au delà des considérations culino-religieuses abracadabrantes, le communautarisme a prospéré sur la victimisation des minorités, qu'il faut assimiler et non stigmatiser pour qu'une société fonctionne pour tous. Les juifs orthodoxes vivent leur foi et les contraintes qui vont avec entre eux sans l'imposer aux autres, mais il est urgent dans les médias de les confondre avec leurs frères israéliens (il faut dire que l'andouille de président du CRIF que se traine les juifs de France n'améliore pas la sauce). La plupart des musulmans pratiquants s'adaptent aux rythmes de l'occident mais pas tous, et c'est ce "pas tous" qu'on nous montre en gros plan et en panoramique. Une frange de chrétiens moqués par leurs "frères" agnostiques ou athées a fait le gros dos jusqu'à ces deux trois dernières années, où le mépris pour leur croyance a décomplexé des comportements et des mots qu'on croyait révolus. Dans les écoles, les jeunes préfèrent quitter la salle de classe plutôt que d'entendre un prof enseigner quelque chose qui contredit leur religion. Dehors, les communautés re replient entre elles de génération en génération, au lieu du processus logique (et sain) inverse. Ce n'est pas sur un socle commun que nous vivons mais sur une mosaïque de particularités que nous devons respecter, glorifier, admirer, nous assène-t-on du matin au soir. Pourtant, ça ne marche pas et on le sait. On bricole notre Babel, la seule inconnue, c'est le moment où elle va nous tomber sur la tête. En vingt cinq ans, de gouvernements de droite en associations de gauche, on a combattu, violé et bradé la laïcité (1) Mabica _______________________________

Tous et chacun Il a fallu dix ans (et plus) pour qu'enfin les français "chrétiens" (nous étions plus de 90 % cathos il y a 20 ans) commencent à comprendre ce qu'ils ont perdu. Tant pis pour eux : ils auraient dû être plus vigilants.

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Les humains préfèrent s'éloigner de Dieu, c'est plus pratique : plus d'interdits, on fait ce qu'on veut, on donne des coups de pieds dans les obligations, dans la morale, dans tout ce qui gène. Car il gène, Dieu, avec sa grande loi d'amour ! On ne se détourne pas de Dieu sans en subir les conséquences. Aujourd'hui, dans les mots révolté que je lis sur le web, dans les sarcasmes, dans les insultes, j'entends la peur. J’habite dans un pays où la grande loi, c'est la liberté de religion. Les synagogues, j'en croise trois lorsque je vais faire mon marché. Des temples protestants, il y en a à chaque coin de rue. Plusieurs églises catholiques (dont une énorme cathédrale). Et depuis deux ans, une petite mosquée. C'est ainsi, et c'est OK. Nous croisons des familles juives le samedi matin, marchant vers la synagogue, nous les saluons, ils nous saluent ; ils sont amicaux, nous aussi. Ma caissière à l'épicerie m'accueille, un foulard strict sur la tète, et me dit bonjour. Je lui réponds. Les dames en sari sont belles, souriantes, douces ; et les enfants de tout le monde se confondent, en jeans et anoraks confortables car l'hiver est dur. Nous devenons tous également vulnérables devant le froid. Je ne vois pas pourquoi nous ne nous saluerions pas, pourquoi nous devrions être arrogants les uns envers les autres. Il faut dire que l'Amérique est pointilleuse sur l'insulte, et que le sarcasme est très mal vu ici. Dans l'école laïque américaine, un élève qui aurait l'idée de quitter la salle de classe sous prétexte que ce que dit le prof serait contraire à son enseignement religieux, serait fermement reconduit chez lui avec interdiction d'école et rapport aux autorités scolaires. Dans les cafeterias des écoles, il y a tous les jours, au menu, des plats sans porc et des plats sans viande. Religion et végétarisme, c'est aussi simple que cela. Il existe partout des boucheries Kasher, j'allais dans des restos kasher à St Paul car ils servaient un excellent saumon fumé. J'allais avec Rachel et sa sœur dans mon restaurant préféré et elles ne prenaient ni saucisses ni jambon, mais a part cela, mangeaient de tout, comme moi. Je n'avais aucun problème si je les invitais à ma table, mais je n'allais quand même pas les insulter en leur servant un cassoulet ! Il faut seulement du respect. Ne pas s'autoriser à blesser. Le reste vient facilement. Nous sommes tous semblables. Et il y a deux choses : d'abord, la vie devant soi, pas celle derrière nous. . Et puis, parce que quoique nous fassions, les mauvais souvenirs sont là - je pense spécialement aux massacres, de tous bords, et partout -, nous dire que nous ne devons pas oublier, certes. Mais que notre devoir est de garder ces horreurs en mémoire non point dans un but de vengeance, mais surtout pour ne pas faire aux autres le mal que les monstres font ou ont pu faire. C'est ce que j'entends, quand j'entends "shalom", quand je dis "que la paix soit avec toi ". Si c'est trop difficile, que quelqu'un vienne ici m'expliquer pourquoi. _____________ Mon Mar 09 12:37:15 EDT 2009 |lise CC _____________________________

Naufrage C'était un vendredi, si je me souviens bien : on a décidé d'écrire à deux. Pourquoi ? Pour s'aider. Je ne vois pas d'autre raison. Vous en voyez, vous ? Nous n'étions pas les premiers. Dans son livre, Candles Burning, Tabitha King, l'épouse de Stephen, a mis le nom de son co-auteur au dessous du sien, par soucis d'honnêteté. C'est Michael McDowell, disparu depuis quelques années. Après sa mort, son compagnon a fait parvenir à Tabitha le projet de McDowell. Il s'agissait de deux cent pages, et d'un synopsis. Tabitha a rallongé la sauce, corrigé certains passages, mais elle a su garder le ton dans ce récit d'une enfant mal-aimée, ainsi que la conclusion de Mc Dowell. On retrouve, dans le style, dans les descriptions, l'empreinte des King, mari et femme. Avec un quelque chose en plus, une tendresse, qui viennent de McDowell. L'ensemble en fait, à mon avis, le meilleur ouvrage de Tabitha. Je me souviens de ce vendredi où ce complice d'écriture m'a lancé un message euphorique et électrisant : il m'invitait en quelques mots à me lancer avec lui dans une écriture à deux. La ligne principale tenait en quelques mots, alléchants. Il y avait aussi le challenge d'un sujet difficile. Un défi à relever, tout ce que j'aime. J'étais affairée par les préparatifs d'un mariage, je n'avais ni le temps, ni l'envie de me poser des questions :

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j'ai accepté, immédiatement, et en trois lignes. M'aurait-il annoncé que nous allions nous lancer dans une histoire rocambolesque à la Conan Doyle, ou dans un traité de vocabulaire, je l'aurais suivi de même. Il s'agit de cette fameuse foi dont j'ai parlé ailleurs. Il s'agit aussi d'autre chose : d'espérance, sans doute. Nous écrivions, sinon ensemble, du moins côte à côte, depuis des années maintenant. Il me faudra un jour revenir sur ce temps, raconter cette aventure, avec ses hauts très hauts, et ses bas-fonds, et mes coups de pieds rageurs dans la vase, pour remonter à la surface. J'ai honte de parodier Saint-Ex, mais c'est pourtant l'image exacte de l'écriture à deux : nous ne nous regardions pas l'un l'autre, nous regardions ensemble dans la même direction. Il n'était pas question d'amour, même pas d'amitié. L'amour, nous le réservions pour cette chose que nous avions en commun, et que nous portions en nous, bien que de façons différentes : l'écriture. Autre chose aussi nous unissait au delà de la passion d'écrire : le but suprême, l'ancre de notre navire secret, c'était le livre. Nous étions en septembre et les feuilles tomberaient bientôt. La somnolence de l'été nous quittait. Nous étions toujours côte à côte, séparés par des milliers de mers et de terres, détachés, déconnectés par des heures et des nuits, des gens et des poussières, des bruits et des paroles, des chansons et des musiques, des remous et des rumeurs. Mais avec un entêtement qui allait chez nous deux creusant la même vague dans nos colères silencieuses et nos coups de bélier rageurs, drapés dans nos silences échappatoires et nos envolées parallèles, en dépit de ses lapsus visibles à l'œil nu, et malgré mes gueulantes proverbiales, nous étions toujours là, présents l'un pour l'autre, fidèles, silencieux, concentrés sur cette seule chose qui nous semblait importante, le cap vers la terre lointaine, là-bas, dans la brume et le seul froissement soyeux de l'eau s'ouvrant sous le ventre du bateau : le livre au bout de la course, le but à atteindre. Ecrire ensemble, l'équipée belle vers la terre incognita encore vierge devant nous. Aller vers ce but : un livre. Y aller ensemble, mais comment ? Nous avions commis l'erreur irréparable de partir sans boussole. Nous avons naufragé. Lise Genz _______________________________

Les pèlerins du Mayflower Si j'en crois tous les calendriers qui passèrent par là avec leurs jours tronqués et leurs semaines boiteuses, il y a exactement trois cent quatre vingt huit ans, trois mois et vingt deux jours, [à aujourd'hui 11 mars 2009] les voyageurs du Mayflower posaient le pied en terre américaine. Avant eux, d'autres explorateurs avaient mit pied à terre plus au sud, vers le Maryland actuel. D'autres avaient remonté la rivière Hudson, à l'ouest de Buzzard Bay ; d'autres encore avaient momentanément établi des campements sur la côte poissonneuse du Maine. Mais seuls, les pèlerins du Mayflower sortiront victorieux de la grande aventure, et constitueront les premières racines de ce nouveau monde. Tous les autres pionniers ont disparu avec leurs huttes et jusqu'au souvenir de l'emplacement réel de leurs campements. Après une traversée qui a duré 63 jours, ils arrivent à la pointe extrême du Cap Code le 11 novembre 1620 (Provincetown). Ils ont amené avec eux une large chaloupe qui peut contenir plus de trente personnes. Mais les vicissitudes du voyage l'ont réduite à un amas de bois et d'arceaux de ferraille. La plupart des hommes débarquent. une poignée d'entre eux restent à bord du Mayflower avec les femmes, les enfants et les bêtes. Aujourd'hui, il fait beau temps, ciel clair et grand soleil sur la baie de Plymouth. Il y a 388 ans, le brouillard était dense, la mer houleuse, les eaux vertes. Il faisait froid. L'hiver s'annonçait rude ; il allait être un des plus rigoureux du siècle. ~~~ Le 3 août 1620, quelques semaines avant d'embarquer sur le Mayflower pour leur grande aventure, les futurs américains envoient à leurs sponsors (4) une missive expliquant 53


qu'ils ont été obligés de vendre une certaine quantité de provisions qui leur serait nécessaire pour le premier hiver : " Nous sommes dans une telle angoisse, actuellement, ayant été obligés de vendre l'équivalent de 60 livres sterling de provisions qui étaient vitales pour notre groupe, et n'ayant conservé par devers nous que l'essentiel, un peu de beurre, pas d'huile, et pas le moindre bout de cuir pour ressemeler nos chaussures, et nous n'avons pas assez d'épées pour que chaque homme de la compagnie puisse en avoir une avec lui pour se défendre. Nous aurions besoin de plus de mousquets et d'armures (??) mais malgré cela, nous avons toujours le plus vif désir de nous exposer à tous les dangers, en faisant confiance en la providence, plutôt que de trembler devant ce qui peut nous arriver. Nous vous saluons respectueusement, et demandons à Dieu qu'il vous bénisse, et qu'ils conserve entre nous tous ce lien d'amour et de paix " Il n'y a pas une seule lettre, ni une seule page du journal de bord de Carver, de Bradford ou des autres, qui ne mentionne le nom de Dieu. Je pense que la foi a été l'élément dominant et déterminant dans cette aventure. On ne trouve pas trace de cette spiritualité dans les films et documentaires actuels consacrés aux pèlerins de 1620. _____________ (4) Robert Cushman, chargé d'acheter les provisions pour les voyageurs, avait demandé 100 livres sterling pour acheter l'équivalent actuel de 2000 Kg de beurre. Il avait essuyé un refus poli mais ferme de la part des sponsors. [Réf. ; Of Plymouth plantation 1620-1647 - William Bradford Diary - Modern Library college editions intro F. Murphy] ~~~ Au moment où les pèlerins de Leyden se décident à traverser cette redoutable étendue d'eau et à affronter une terre totalement inconnue, Madame de Sévigné n'est pas encore née : elle viendra au monde trois ans plus tard ; Pascal, six ans plus tard. Dans la France de ce début du dix septième siècle, profondément catholique mais dont les mœurs se relâchent de plus en plus, nous sommes bien loin de l'austérité qui préside à la vie de la femme embarquée sur le Mayflower aux cotés de son mari, de son frère ou de son fils. L'anglaise puritaine de 1620 n'a aucun droit, que celui de se taire, de travailler, de mettre un nombre indéfini d'enfants au monde : son travail est sans fin : première levée, dernière couchée, elle n'a pas le droit d'assister aux conseils, ni de donner son avis, ni de parler à voix haute, ni de rire, ni de chanter, ni de se faire remarquer de quelque façon que ce soit. Elle n'a pas le droit de laisser voir ses cheveux (tiens ? v’là le voile !) Elle doit faire son travail en silence et sans rechigner. Lorsqu'elle sera assignée pendant des mois sur le bateau, au moment où son mari, ses frères et les autres hommes de la colonie essaient de préparer un semblant de village pour les accueillir, la femme du Mayflower va traverser une des plus dures épreuves que ce voyage lui réservait : la confination en espace très réduit, au large des côtes, dans la brume et le brouillard quasi quotidiens, et dans la promiscuité éprouvante de cinquante autres femmes et enfants parqués dans le ventre du Mayflower, qui n'avait pas été conçu à cet effet. La plupart, malades, n'y survivront pas. Lorsqu’en mars 1621 les femmes sont enfin autorisées à rejoindre leurs compagnons sur 54


la terre ferme, la colonie est décimée de plus d'un tiers. Des familles entières ont péri. L'épouse de William Bradfort s'est noyée en janvier - suicide ? Faux pas ? Nous n'avons aucun détail sur cette noyade. Le film Colonial House nous rapporte des faits, nous montre des images et verse dans la sensiblerie, l'émotion facile, le gnan-gnan. C'est le grand reproche que je puisse faire à cette réalisation. Néanmoins, ces huit heures de projection dans le passé me marquent et me font réfléchir. Je sais que les mœurs, us et coutumes de nos ancêtres étaient presque opposés aux nôtres, de ce début de vingt et unième siècle. Par exemple, on parlait sans élever la voix, on ne riait ni sottement, ni trop fort. Mais on souriait beaucoup. Mais on regardait droit dans les yeux. Mais on s'embrassait, et on pleurait facilement, de joie comme de tristesse. On ne jurait pas : une des premières lois écrites par le gouverneur Carver fut la punition corporelle pour ceux qui avaient été surpris en train de jurer. On parlait souvent de Dieu, il était présent à chaque instant de la vie : nous vivons l'exact contraire aujourd'hui. La grande, l'énorme différence, c'est la place de la femme dans la société. Elle n'était alors qu'un sous-élément social. Et n'avait aucun droit. Je pense souvent que ce qui manque à l'Amérique d'aujourd’hui c'est la part féminine de ses racines sociales, qui fut fondée uniquement par des hommes. L.G. ______________________________________

Ceux du Mayflower, oui, je les admire, oui, exactement ! Et non, je n'ai rien contre eux, rien du tout, pourquoi ? Les pèlerins du Mayflower, on nous les montre aujourd'hui comme des arrivistes assoiffés de pouvoir et de richesse ; mais qu'étaient-ils d'autres que des esclaves à la solde des riches "sponsors" anglais qui avaient financé leur voyage ? Et lorsqu'ils se sont installés sur ce qui allait devenir Plymouth - qu'ils prononcèrent à l'anglaise, Plimoth, jusqu'au vingtième siècle - ils n'avaient que le Mayflower comme refuge. Les hommes sont descendus à terre, ils ont laissé femmes et enfants dans le bateau pendant tout l'hiver. Je vais revenir là-dessus : la condition de ces femmes, de ces enfants, a été dramatique et s'est soldée par la maladie, le suicide, la dépression, et la mort de plus de trente personnes en cinq mois. Les hommes ont d'abord campé de façon très rudimentaire sur l'emplacement du village du chef Massassoit. On doit se demander pourquoi le chef Massassoit avait abandonné le campement. La seule explication que je puisse trouver, c'est que les Wampanoag étaient semi-nomades, et ils entraient a l'intérieur des terres pendant l'hiver, dont ils connaissaient la rigueur, sur cette côte est de l'atlantique. Quelques mois plus tard, lorsque la tribu Wampanoag est revenue sur la côte, ils ont trouvé des huttes de bois, des maisons de rondins, construites sur l'emplacement de leur village, et ils ont vu des gens à peau blanche - plus blanche que la leur, car ils sont des blancs, eux aussi. Des gens qui portaient robes longues et culottes bouffantes, des femmes sans cheveux : les Wampanoag ont longtemps cru que les coiffes cachaient les têtes chauves de nouvelles arrivantes. Mais ils ont vu aussi que les enfants, surtout les nouveaux né, étaient semblables aux leurs. La sagesse, le pacifisme, des indiens Wampanoag se mesure à leur décision de s'installer sur leur terre d'origine, mais un peu plus loin, à un demi kilomètre du campement des 55


étrangers, de l'autre coté de la petite rivière sur les bords de laquelle Jenny Grist, l'année suivante, construira son fameux moulin ; lequel, reconstruit et consolidé, peut être encore visité de nos jours. Les Indiens deviennent ainsi les premiers voisins de nos pionniers. Pourquoi "fameux", le moulin ? Il faut penser que nos premiers émigrés arrivaient avec très peu de ressources. Quelque barils de viande séchée et salée, un ou deux tonneaux de bière ; un peu de lard, un ou deux pains de sucre, du gruau, des pois secs. Ce qui était primordial, c'était la nourriture : et, dans la nourriture, la chose la plus facile à faire, ce qui ne demande que très peu d'ingrédients, c'est le pain. De la farine, un peu de sel, de l'eau et du feu. Il y avait alors une soixantaine de bouches à nourrir, par jour. Un four, c'est facile à réaliser : quelques pierres consolidées d'abord par de la boue - la terre aux environs de Plymouth est argileuse, thanks God. Le premier bâtiment construit par les immigrants, ce sera donc le four communal. On trouvait du bois en abondance, bizarrement, l'emplacement était déjà défriché et le bois entassé à l'orée de la forêt. Nous pouvons aujourd'hui sourire à cette réflexion contenue dans le journal de bord de Bradfort, en janvier 1621 : " Nous avons trouvé tout près de la plage, sur la petite colline qui domine la baie, un emplacement déjà prêt pour notre campement. Nous y construirons la première rue de notre premier village." Ce n'est que quelques mois plus tard qu'il a compris que cet emplacement, "préparé pour recevoir les maisons du premier village américain", il venait tout simplement de le voler à Massassoit. Lise Genz Thu Mar 12 08 :08 :51 EDT 2009 |lise CC | _____________________________

La vieille rue Sérénité Relative me demande : Comment ont ils structuré le premier village ? Oui, nous sommes tous curieux de cela, c'est la première question que je me suis posée moi aussi, et c'est à partir de là que je me retrouve, quatre ans plus tard, avec une cinquantaine de livres, des centaines de pages d'information et une passion qui ne s'éteint pas pour ces quelques kilomètres carrés de terre, à quatre heures de voiture de chez moi, vers l'est, au bord de l'océan, berceau de l'Amérique que nous connaissons aujourd'hui. D'abord, comment et pourquoi avoir choisi l'anse de Plymouth ? Et bien, ce fut un peu le hasard allié aux vicissitudes de la navigation sur la côte atlantique est en plein hiver. Lorsqu'ils ont quitté Plymouth (Angleterre) pour ce voyage à l'aveuglette vers le Nouveau Monde, les pionniers ont en main une "patente" du roi qui va leur permettre d'installer officiellement une colonie sur cette terre - et, de là, en faire tout simplement propriété anglaise. Leur but, c'est ce qui est maintenant Manhattan, c'est à dire, l'embouchure du fleuve Hudson. Perdus dans les brouillards et les tempêtes de notre côte atlantique-est, le Mayflower touche terre une première fois à l'extrême pointe du Cap Code, aujourd'hui Provincetown. C'est un endroit inhospitalier, ravagé par un climat auquel très peu de végétation parvient à résister. Horrifiés, les

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pèlerins décident de reprendre la route en longeant la côte vers le nord : ils espèrent trouver ainsi un endroit plus favorable à l'établissement du premier village. C'est sans le savoir, en traversant tout droit vers l'ouest au départ de Provincetown, qu'ils s'engagent dans la baie de Plymouth et arrivent dans le port naturel de Plymouth. Leur premier village, ils l'ont construit sur l'emplacement du campement de la tribu Wampanoag, pour la simple raison que cet emplacement présentait une large surface de terrain déjà préparé. Ma théorie (qui n'est qu'une théorie) c'est que les Indiens Wampanoag, comme la plupart des Indiens semi-nomades, se déplaçaient à l'intérieur des terres, et installaient leur séjour d'hiver à l'abri des vents et des tempêtes. En mettant pied à terre le 20 décembre 1620, Bradfort et ses compagnons trouvent donc, face à eux, une petite colline déserte, un terrain défriché qui monte gentiment vers l'ouest, et, comble de merveille, un ruisseau d'eau douce caracolant au sud, avant d'aller se jeter dans l'océan. L"eau douce, élément primordial, va décider de l'emplacement. C'est grâce à ce ruisseau que la première colonie survivra. Les hommes se mettent au travail immédiatement, malgré le froid, la neige, et les tempêtes. Ils construisent d'abord un bâtiment de rondins à mi hauteur de la colline, pour s'abriter et abriter leurs outils. [ … ]

_______________ D'Isa La Gravité [ ... ] Mes pensées ont soudainement disparu, elles se sont fondues dans une sorte de vision,

comme si j’avais été précipitée dans l’interstice qu’il y a entre chacune d’elles. La lumière avait changé, elle s’était découpée en un ensemble d’étincelles, bien distinctes et qui bougeaient beaucoup plus lentement que ne bougent d’habitude les étincelles. J’ai entendu le mot de légèreté. Pas entendu avec mes oreilles, mais il était présent. Dans mon plexus. C’est là qu’elle est apparue, brusquement. Grande, en forme d’arc, d’une beauté inoubliable, presque rouge de son palissandre soleil qui la composait presque entièrement, elle se tenait sur le chemin des étincelles, qui voguaient lentement vers elle. [… ] ______________________________________

De Christiane Aristide, le rêve bleu ou les sept portes [ ... ] Le marchand grimpa sur une escabelle de bois vermoulu, et saisit avec dextérité un petit

bocal qu’il déposa ensuite sur le comptoir. « Je crois que j’ai ce qu’il vous faut », dit-il. « Je vous l’emballe ? » Sans attendre de réponse, il vida le contenu du bocal dans un sachet en papier où il était écrit en grand « respecte l’environnement ». Je préférerais une boîte dit Aristide, le vent est si fort que le sachet pourrait s’envoler, le rêve s’échapper. Rentré chez lui, il déposa la boîte sur sa table de nuit et attendit avec impatience l’heure de se mettre au lit. Il essaya de faire des mots croisés, puis de lire « les 7 voyages de Simbad », puis de repiquer des pois de senteur et des cerisiers nains, mais le rêve l’obsédait et accaparait toute son énergie.

Vint la nuit. Aristide se coucha, ouvrit délicatement la boîte : dans un coin, un rêve se lovait, et une douce lumière bleue irradiait les parois. Qu’allait lui révéler cette boîte de Pandore ? Mais le sommeil ne venait pas ; alors il compta des pâquerettes. Il avait abandonné les moutons depuis belle lurette, car ceux-ci mangent les pâquerettes, et sont moins nombreux qu’elles. Jadis, les nuits de grande insomnie, une fois terminé le compte des moutons, il entamait celui des pâquerettes mais n’en trouvait plus aucune. Aussi avait-il inversé l’ordre de la comptabilité. Et les fleurs étaient tellement nombreuses que jamais il n’arrivait au bout, et il s’endormait avant la 15.000è. [... ] 57


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De Flo Serviette-éponge [ ... ] Quelques fois, Elia et Dalila me rejoignent dans le verger. Elles ne jouent jamais avec moi,

non. Alors je joue avec elles. Elles tournent et dansent autour des arbres fruitiers. A la nuit tombante, elles se cachent et tentent de se retrouver. Leurs rires les dénoncent et je m’amuse de leurs rites. Elia choisit toujours le pommier près du muret. Dalila le prunier planté au centre. Elles se rendent à ces arbres sans savoir pourquoi. Moi, je sais qu’au creux noueux de leurs racines, les placentas de leurs naissances y ont été enterrés. Personne ne me l’a dit, bien sûr, mais je l’ai vu. Je vois beaucoup plus de choses qu’elles. Par exemple, que les arbres se saluent le soir, par ordre de préséance. Du plus jeune au plus âgé. Commence le prunier qui se penche vers le pommier. Celui-ci oscille à son tour ses ramures vers le prunier, puis tous les deux orientent leur posture vers mon arbre, un peu plus longtemps. Au printemps, les trois rayonnent d’un halo vert. Elia et Dalila ne peuvent saisir à quel point ils sont beaux dans leur recouvrement de sève, presque prêts à prendre la route, brûlant silencieusement leur folle énergie neuve. Et à la saison des fruits, chacune d’elle inaugure la cueillette, qui des pommes, qui des prunes. C’est ainsi qu’il en est depuis toujours. [ ... ] ___________________________________

De Lise Le Village [ ... ] Elles se sont disputées parce que le bébé est malade. Mary Catherine n'a pas crié, nous ne

crions jamais. Elles ont murmuré des mots pleins de griffes, des mots tranchants, aiguisés. Dans leurs voix basses, j'entends rouler la peur. Il ne faut pas regarder leurs yeux alors, on dit que la colère peut nous blesser dans un seul regard. J'ai pris la Bible, j'ai ouvert au hasard, mais je n'y voyais pas assez, entre les larmes qui ne voulaient pas couler et la lumière jaune de la mauvaise bougie. Amélia s'est approchée, les autres continuaient de se disputer, c'était maintenant à propos d'un pain, mal cuit ou je ne sais quoi. Amélia m'a donné un mouchoir, sans parler. Nous entrons en amitié un peu plus chaque jour. J'ai refermé la Bible, il y a des moments où je donnerais n'importe quoi pour avoir un autre livre. Ceux de mes parents sont enfermés dans la cale. Amélia dit que j'ai de la chance de savoir lire et écrire. J'ai décidé de lui apprendre les lettres . [ ... ] ___________________________________

Mailles [Tricotés serré…] Elle aime cette expression du Québec, qui signifie que l'amitié est construite jour

après jour, un point à l'endroit, un point à l'envers, avec cette patience têtue des femmes qui prennent leur temps pour faire les choses, sans se presser comme sans ralentir ; comme le montagnard qui poursuit sa montée à travers la draille dangereuse, du même pas lent et long ; comme le paysan lançait le grain, avant, dans le s labours, d'un geste ample et noble ; sans hâte comme sans faiblesse. Un point à l'endroit, un point à l'envers. "Regardez les, ces deux, disaiton : ils sont tricotés serrées" L.G. Thu Mar 19 10 :44 :09 EDT 2009 |lise CC | ____________________________________

C'est le printemps 58


Petite Sœur et Emyole l'affirment toutes deux ce matin : oui, c'est le printemps, aujourd'hui vendredi 20 mars 2009. J'en suis encore aux saisons immuables, celles qui commençaient, avant, le 21 du mois quel que soit le temps, la tempête et mon roi. Mais on ne va pas faire un drame pour un jour : donc, c'est officiellement le printemps aujourd'hui, réjouissons-nous ! Je trouve que c'est épatant, un printemps qui commence un vendredi, non ? Demain, nous pourrons commencer le week-end en nous disant que CA Y EST, nous sommes finalement sortis de ce long hiver. Lilas, tulipes, Pâques, toilettes claires, manches courtes, salades de pissenlit frais et tendres, rangements, jardinage, vélos, marche à pied, giboulées, feuilles vert-jaune, oiseaux... c'est tout cela, le printemps, et plus encore. Je vous souhaite à tous un magnifique printemps plein d'oiseaux et de fleurs, comme chantait Charles Trenet dans Mes Jeunes Années. Fri Mar 20 05:58:34 EDT 2009 |lise CC | _____________________________________

Le prolongement [ ... ] Ce qui a de bien quand on écrit, c'est qu'il y a des prolongements pertinents chez le lecteur, qui "voit" plus loin que l'écrit premier. Non pas en contradiction, juste plus loin... - Fl. Noel

Ce prolongement, c'est un mouvement de vie. C'est la vie même. La minute présente, qui fond derrière celle qui vient, qui elle-même anticipe l'heure future. La vie, un éternel prolongement. Et ce qui m'a si longtemps freinée dans l'écriture "à plusieurs", qui est devenue tellement à la mode depuis l'avènement de l'Internet et des pages web, ce que j'ai vainement tenté d'expliquer pendant les quatre ou cinq ans où j'ai fait partie de groupes d'écriture, c'est justement que l'autre n'accepte pas toujours le prolongement. Je ne dis pas que tout le monde en est là : je dis que j'ai rencontré, toujours, une ou deux personnes dans le groupe qui se croit tout permis sous prétexte de "corrections". Il ou elle se donne alors le droit de critiquer et d'apporter la CONTRADICTION, ce que Florence à très bien vu comme un danger pour l'auteur : cette contradiction qui va couper la branche neuve, qui ne permettra pas le greffon. Ecrire ensemble, lire ensemble, aller ensemble dans l'écriture, sur le chemin des mots, c'est tout le merveilleux de l'accord parfait. Oui, mais au diapason. Et il faut aussi avoir l'oreille juste et l'humilité de suivre l'arpège, sans dérapage. L'écriture, prolongement de la musique ? Un chant sorti des notes, et mis en mots ? Fri Mar 20 11:37:27 EDT 2009 |lise CC | _____________________________

La truite vagabonde Par Emyole

Et hop, en cette fin de semaine, une recette qui nous vient du Québec ! Merci, Emyole ! : Les filets de truite marinés Vous avec un beau filet de truite, cela ne vous tente pas de le passer à la poêle….alors pourquoi ne pas le mariner ? On le fait volontiers avec du saumon, mais la truite elle… elle saura vous faire saliver…. ;-) Prendre un beau filet avec la peau, le passer sous l’eau, le sécher et ensuite le recouvrir de gros sel de mer…pas besoin d’en mettre épais, mais surtout d’en mettre partout, avec 59


un peu de poivre, recouvrir d’un linge humide et laisser au frigo toute une nuit. Le lendemain, laver à l’eau fraîche pour enlever le surplus de sel, faire des tranches très fines, déposer dans un plat creux, arroser avec un peu d’huile d’olive + citron et de l’aneth; on laisse macérer 2 bonnes heures au frigo. Au moment de servir, parsemer de tranches très minces d’oignon rouge, ou échalotes françaises, câpres, filet huile d’olive et quartiers de citron. Croûtons, ou bagels et fromage crème, au goût. Régalez-vous bien ! ______ Sat Mar 21 08:13:48 EDT 2009 |lise CC | _____________________________

De l'art et la manière ... Par Mabica

Mon amie Mab (France du Sud profond) est une maitresse de maison accomplie jusque dans

l'art d'accommoder non seulement les restes, mais encore les restes des restes. Pour preuve, ce billet qu'elle me fit parvenir, un jour où je pleurais sur la fragilité des sacs de plastiques et autres récipients destinés à contenir les déchets autres qu'humains, et souvent rétifs à toute forme de fermeture. -------Autant la chaussette est une distraite sans méchanceté qui s'ingénie par nature à perdre sa jumelle, autant la poubelle fait preuve en toute occasion d'une perversité à briser les nerfs. Comme les bons conseils, les plus simples sont les plus vicieuses : celles dépourvues d'anses à nouer se feront un plaisir de céder à droite pendant que tu colmates à gauche (oui, un peu comme en politique). Les robustes, à fermer en tirant délicatement les petits bouts de ficelles de chaque côté, sont victimes consentantes de leur succès : on en met toujours trop. Premier commandement : tu obliges l'ensemble de la famille à se mettre au tri collectif. Tu repèreras vite les resquilleurs (ceux qui compteront sur toi pour affiner leur "tri" ; ec eux, pas de pitié. Dès la première récidive, tu déposes au pied de leur lit le ou les objets du délit -je t'assure, ça marche. Deuxième commandement : tu inscris dans la Constitution Familiale l'interdiction formelle d'entasser dans la poubelle plus haut que le niveau. Explique-leur que ce n'est pas un concours d'architecture. Troisième commandement : on dépose dans la poubelle, on ne balance pas en shootant depuis le fond de la maison, ou en passant en roller devant l'évier. Quatrième et dernier commandement : il n'est pas nécessaire de plonger les deux bras au-dessus de la poubelle pour la scotcher, ni même de s'assoir dessus. En extension, à un mètre, les bras bien tendus et les doigts agiles, forte de la conviction que ce n'est qu'un sale moment à passer et plus vite ce sera fait, plus vite ce sera fini, tu noues tout ce que tu trouves - ah tiens, la queue du chat, pardon, Georges -, tu soulèves avec énergie d'une main, tu ne te laisses attendrir ni par la cruauté de son destin ni par les moins trois degrés du jardin et tu vires la copine dans le container prévu pour sa dernière fiesta. 60


Mais surtout, tu ne respires pas. Parce qu'une bonne poubelle qui se remplit doucement, respectueuse de l'environnement de ta descendance, bousille épouvantable le tien immédiat. Moralité : la fermeture d'une poubelle dépend beaucoup de la façon dont elle a été remplie. ____________________________

Jour de pluie Le printemps commence, il pleut doucement, il f ait tendre et frais. Journée très active pour moi, suite logique d'hier. J'ai un aujourd'hui chargé, et je suis désolée de constater que je n'ai pas remis les pieds, les doigts, les yeux, et mon cœur sur ce blog depuis plusieurs jours. Mais demain, fin de semaine calme, tranquille et solitaire : deux belles journées d'écriture du matin au soir. Qui dit mieux ? Fri Mar 27 08 :05 :32 EDT 2009 |lise CC _________________________________

Tournez, manèges ! Un nouveau jeu d'écriture à La Rôtisserie des Poètes, chez Florence, qui possède une vitalité et une imagination toutes deux sans défaut. Cette fois, nous embarquons dans un projet d'écriture interactive. Nous avons commencé avant hier soir, tellement pressées que Christiane et moi nous sommes bousculées pour passer en même temps sous la grande porte. Mais c'est Christiane qui a gagné, avec 3 minutes d'avance ! Pourquoi le bambin a-t-il dessiné un cœur bleu sur ses lèvres ? Pourquoi est-il si pâle et silencieux ? Pourquoi un des jumeaux a-t-il donné le caillou irisé à Gabrielle ? Y aura-t-il un gouter d'amitié samedi ou peut-être dimanche chez la maman de Noémie ? Et que viennent faire les manèges là dedans ? Vous le saurez en lisant les premières pages de "Tournez Fri Mar 27 08 :22 :07 EDT 2009 |lise CC | Lou : Bonjour Lise, la réponse est oui. [Voilà au moins un commentaire limpide pour tout le monde :)] L'écriture interactive m'intéresse aussi, même si je crois plutôt à l'écriture personnelle, dans le cadre d'un atelier. C'est d'ailleurs de là que vient, à peu près, le texte que vous avez lu - mais le sens était différent dans la première intention... ... je poursuis sur Libellus. A bientôt. Lise : Merci, merci, LOU, et voilà : j'ai publié le poème - dont le sens, à première lecture, m'a entraînée bien loin des soldes, je dois dire. Votre LIBELLUS est une mine d'or, vous m'y verrez souvent, friande de textes sortant de l'ordinaire. Je le recommande chaudement aux visiteurs d'aujourd'hui. Lou, si vous aimez l'écriture interactive, vous êtes bienvenu pour écrire avec nous dans Tournez Manèges, si le cœur vous en dit Lou : Ah la la ! J’ai lu et encore peut-être pas tout... mon clavier en est tout rouge. En surfant ? J'envoie un deuxième mail. A bientôt. Lise : Bien reçu les Mails et répondu, Lou ; et la Résurrection dont le parlais, c'est Pâques. Humm oui, je suis en avance de trois semaines ... oui, je suis TOUJOURS en avance, j'en arrive à me bousculer moi-même, lol ! Pâques restant pour l'incorrigible optimiste que je suis malgré tous les aléas de la vie, la plus grande et la plus belle fête de l'espoir. Mais ou est ce texte ? Je cherche… je cherche ... ____________________________

De libellule en Libellus LOU

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Le Web nous redonne l'humilité perdue. Il y a plusieurs années, lorsque j'ai plongé pour la première fois dans les groupes d'internautes auteurs français [à dominance française, devrais-je dire pour rester dans l'exactitude] il y avait cet émerveillement constant, de côtoyer sur les mêmes pages web des auteurs de talent. Tous l'étaient à mes yeux. J'ai compris très vite que cet émerveillement se heurtait aux murs invisibles du groupe, à son étanchéité, à sa rigidité, à son étroitesse. Le merveilleux, avec les mots, c'est qu'ils résistent à tous les -âges et âges, en passant par les cages et les copinages. Pour trouver les vrais poètes, les sincères amoureux des mots, les artistes brodeurs de phrases, les chantres purs de l'esprit et du cœur, il faut abattre les murs et renverser les montagnes et aller plus loin, toujours plus loin. C'est facile sur le Web : il suffit de surfer. C'est en surfant que j'ai trouvé LOU Même s'il s'agit d'un poème sur les soldes dans les grands magasins - pas carrefour, mais presque - je vous propose ce matin "Attendez-vous à savoir ", un texte de Lou ( non, je ne connais pas le "vrai" nom de Lou mais c'est sans importance, ce sont ses textes que j'aime, pas lui ou elle, en tant que personne de chair et d'os) donc, un texte glané sur le blog de LOU, dont l'adresse est apparente en fin de page. Ce texte en forme de poème m'a fait penser à un autre texte posté ici en février, et dans lequel TOUT disparait aussi. Le parallèle s'est imposé dès les premiers mots. A la relecture, je suis saisie par la correspondance qu'il peut y avoir entre deux textes, écrits sur deux modes différents, peut-être à deux époques différentes, par deux auteurs habitant deux continents différents et qui ne se connaissent pas jusqu'à ce matin, ne s'étant jamais rencontrés même pas sur Facebook ( c'est pour dire !). Malgré toutes ces différences, les deux textes se rejoignent et c'est là le merveilleux. Lou me réconcilie avec l'extraordinaire derrière le mot, avec la magie ; avec le surnaturel du Verbe. Et me redonne le sens perdu de l'humilité : nous ne sommes rien, que des "porteurs" d'esprit, des transmetteurs, des traducteurs. Heureuse de pouvoir le ou la remercier pour cette découverte printanière - samedi 28 mars - à quelques jours de la résurrection. Sur LIBELLUS, j'ai découvert un monde de mots, et d'émotion, et de mots en motions, et de emots. Bref, c'est mon cadeau du samedi, ouvrez-le vite : http://libellus.over-blog.com Sat Mar 28 08:17:08 EDT 2009 |lise CC | _____________________________

Attendez-vous à savoir

soldes / http://libellus.over-blog.com/ Et vous saurez Tout doit disparaître Veillez car vous ne savez pas quand il doit venir Tout doit disparaître Vu je l'avais pas vu Emporté c'est moins cher

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Cris et chuchotements dernière séance Un veilleur de nuit une belle de jour Représailles stockage express L’épicier du haut de la rue lève le rideau de fer Les premiers caddies les derniers jours avant fermeture Tout doit disparaître Le dernier lampadaire le premier gyrophare Dernière station avant l'autoroute La sirène des pompiers rouge sur la bretelle La température est de 4° centigrade Levée des brouillards matinaux Tout doit disparaître Haut-parleurs sous tension Sifflements c'est l'instant Dernière traînée d'étoiles Tout doit disparaître Après-demain

LOU _________________________________

Retrouver ... les

mots d'avant -hier dans le chant du poète d'aujourd'hui, c'est un plaisir rare et qu'il est bon de signaler, de souligner. De Jean-Marc Lafrenière : Je viens pour commencer. Je suis venu grimper, sans guide, sans appui, sans marche s'il le faut. Je voudrais m'insérer dans la rumeur du monde mais je navigue au large de mes yeux. La parole ouvre en moi l'énorme plaie des hommes. Nulle part le chemin ne débouche mais il ouvre sur tout. Le soupir d'un brin d'herbe réveille les oiseaux. La terre avec ses couleurs, ses feuilles à l'intérieur de l'arbre, ses graines dans la cosse, ses foulards fleuris, ses cartes infinies, ses lapins, ses colombes, est un immense prestidigitateur. Elle se surprend elle-même à chaque tour solaire, à chaque chair nouvelle. L'enfant poussé trop vite grimpe encore dans les arbres et s'attarde en route. Il veut rester dehors quand tout le monde s'enferme. Les bras en balancier, l'espoir dans une main et la peur dans l'autre, il avance sur un fil. Pour toucher l'essentiel dans les os

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de la terre, il nous faut des mots tendres qui ont appris à mordre. Mon Mar 30 08 :48 :02 EDT 2009 |lise CC | ________________________________

Et si on reparlait ... ...

des droits d'auteurs ?

Non, je dis ça, je dis rien, mais c'est que je viens de recevoir un texte tout prêt pour s'en servir, on n'a qu'à allumer le four et hop, ça cuit tout seul. Merci Zoé et Brigitte ! Donc, voilà : " L’ensemble de ce site relève de la législation française des droits d’auteur et de la propriété intellectuelle. Tous les textes et images peuvent être cités, au sens du droit habituel à la citation (avec mention de la source). Ils peuvent être utilisés dans le cadre d’un cours. Ils ne peuvent être republiés, sous quelque forme que ce soit, sans l’autorisation de l’auteur. Rappel : le Code de la Propriété Intellectuelle (CPI) dispose que l’auteur d’une œuvre de l’esprit jouit du droit exclusif d’exploiter celle-ci. Toute représentation et reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur est illicite ((articles L111-1 et L122-4). (1) " Il est bon de le dire, de le redire, et de le répéter de temps à autres. Il n'y a qu'une règle : c'est d'accepter une fois pour toutes que les œuvres des autres ne nous appartiennent pas. Qu'elles sont propriété de leurs auteurs. Et que, si nous voulons les publier pour en faire profiter notre lectorat, c'est TRES SIMPLE : il suffit d'en demander la permission ; ce n'est pourtant pas très compliqué, si ? D'autant plus que je n'ai encore jamais rencontré un auteur refusant que son texte, article, poème ou petite nouvelle soit éditée, par exemple sur Au Jour d'Hui : l'auteur, le créateur, est par nature généreux et convivial. Si nous parvenons à faire du Web un grand champ d'échanges et de cordialité, la toile ne sera plus d'araignée mais tissée serrée d'amitié, c'est quand même plus beau. ______ (1) hello, j'insiste, madame Myriam, ton blog parodique sur lequel tu as copié INTEGRALEMENT les textes contenus sur un de mes anciens blogs est donc ILLICITE. ___________________________________ Mon Mar 30 18 :21 :41 EDT 2009 |lise CC |

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