École Nationale Supérieure d'Architecture de Paris Val-de-Seine Rapport de Projet de Fin d'Études - Juillet 2022
Nanterre Productive
Développer la résilience, la productivité et l'habitabilité d'un Port d'activité aux dynamiques multiterritoriales
TOME 2
Loïc Tchernatinsky et Charles Boullenger
Professeurs encadrants Étienne Lenack et Ludovic Vion
Couverture : Carte des typologies de bâtiments, monde résidentiel/monde économique ; Projet
École Nationale Supérieure d'Architecture de Paris Val-de-Seine Rapport de Projet de Fin d'Études - Juillet 2022
Nanterre Productive
Développer la résilience, la productivité et l'habitabilité d'un Port d'activité aux dynamiques multiterritoriales -
TOME II
Développement du projet urbain et architectural
Loïc Tchernatinsky et Charles Boullenger
Domaine d'étude Territoire de l'Architecture Architecture - Ville - Nature
Professeurs encadrants Étienne Lenack et Ludovic Vion
Remerciements
Nous tenions à nouveau à exprimer en premier lieu nos remerciements à Étienne Lenack et Ludovic Vion pour leur encadrement durant cette année.
Merci également à l'ensemble des enseignants, camarades et amis qui nous ont accompagnés ces six dernières années et à toutes les personnes qui ont participé de près ou de loin à l’élaboration de ce projet de fin d'études.
Enfin nous adressons toute notre reconnaissance à nos familles et proches pour leurs soutiens.
Avant-propos
Ce projet de fin d’études est la formalisation pour nous d’une réflexion autour de ce que représente la ville dense et ses perspectives pour faire face aux grands enjeux écologiques de notre siècle.
Pour cela, notre travail dans le domaine d’étude Territoires se développe autour d’une réflexion pluriscalaire, du grand territoire au détail architectural, et qui nous permet de définir des réponses situées et ancrées dans leur environnement.
Cela passe aussi par l’analyse de la fabrique de la ville ; comment la ville se forme, fonctionne et évolue, pour proposer des solutions localisées et pertinentes vis-à-vis de leur contexte. En effet, après plusieurs décennies d’urbanisme de zoning, où chaque fonction de la ville a été séparée (habiter, travailler, produire), il semble primordial aujourd’hui de réfléchir la ville comme un système vivant et connecté, et de surtout ne plus l’étendre sur des espaces perméables.
Cela signifie construire la ville sur elle-même. C’est donc un élément fondamental qui nécessite aujourd'hui de repenser l'acte de construire, et ainsi de travailler sur le renouvellement urbain plutôt que la construction neuve, et surtout sur des territoires pouvant être mal exploités, comme c’est globalement le cas des zones d’activités, de production et de logistique; des territoires souvent pollués et très artificialisés.
Encore aujourd’hui, ces zones sont rarement pensées dans leur ensemble, et la pression foncière de la ville dense autour les poussent à se transformer, généralement en complexes de logement ou de bureau sans lien avec le territoire, tout en continuant à renvoyer les activités de production et de logistique toujours plus loin à l’extérieur des villes.
Il est alors nécessaire et essentiel de repenser leur intégration à la ville, pour réduire à la fois l’artificialisation des terres (30 000ha en France chaque année, soit 3 fois la taille de Paris), et l'impact carbone des trajets logistiques en produisant dans, ou au plus proche, des villes. Notre travail sur le Port de Nanterre [300Ha]se basant sur une analyse des nombreux atouts, contraintes et des possibilités de mutations du territoire - cherche à proposer des grands axes et stratégies de transformation urbaine pour connecter cet arrière de ville donnant sur la Seine. Entre enjeu de productivité de la ville, résilience, frugalité et patrimoine, il s'agit ici d'entrevoir les possibilités de mutation du territoire pour que ville , port productif et nature ne fassent qu'un.
Loïc et Charles
Sommaire Remerciements
page 1 Avant-propos page 3
Introduction pages 6 à 11
1/ Stratégie urbaine
De nouveaux maillages résilients adaptés aux temporalités urbaines pages 12 à 31
2/ Projet Urbain Rendre le(s) sol(s) productif(s) et vivant(s) pages 32 à 39
3/ Projets Architecturaux Mixer Habitat et production pages 40 à 59
Conclusion page 61
Le port de Nanterre dans la Vallée de la Seine▷
Un paysage naturel et infrastructurel au coeur de la métropole parisienne▷
Introduction et rappel d'analyse
Le territoire d’étude est situé dans les Hauts de Seine à Nanterre à l’ouest de la ville. Il s’agit d’un Port d’activité de 300Ha qui monopolise le front de Seine Nanterrien.
Le Port de Nanterre est situé à proximité des grandes figures paysagères de l’Ouest parisien : les forêts domaniales, la plaine de Montesson, la Seine et ses Iles.
C’est également un territoire à la croisée des grands axes de transports régionaux, nationaux et Européen avec la présence des réseaux ferrés du RER A qui mène à Paris, les réseaux autoroutiers de l’A86 et l’A14 et bien sûr le réseau infrastructurel de la Seine.
À ces réseaux viendra prochainement s’ajouter la ligne 18 du métro du Grand Paris Express, dont le tracé prévu passe au niveau du territoire étudié
À une échelle beaucoup plus large, le port de Nanterre est aussi un territoire stratégique. Pourtant peu connu, c’est un des plus grands ports d’activité, en taille, de la vallée de la Seine. Il est situé entre deux des plus grosses plateformes logistiques Francilienne, Limay et Gennevilliers et c’est finalement un port qui est la porte d’entrée de l’ile de France depuis le Havre. Il sera aussi en lien direct avec l’Europe du Nord avec la création du canal Nord Europe (2027).
Si ce port est si peu connu, c’est parce qu’il est actuellement sous-exploité (très peu d’entreprises en lien avec l'activité fluviale bordent les darses du port (ndrl les canaux) alors qu’il permet une éventuelle trimodalité Fleuve, Rail, Route. Avec l’évolution et la diversification actuelle des modes de transport logistique, c’est un site qui est essentiel dans le futur mix productif et logistique d’île de France.
De nombreuses caractéristiques en font donc un site particulièrement stratégique, à la fois pour habiter(réseau de transport en commun diversifié, proximité avec Paris et les grands pôles tertiaires, cadre paysagé) et aussi pour produire et développer la logistique (grande emprise à proximité de Paris en lien direct avec les autoroutes, la Seine et les Rails).
Vers
NANTERRE
Vers
Vers
Après avoir analysé longuement le territoire pour tenter d'en entrevoir les subtilités spatiales et sociales, les enjeux définis (Tome 1) ont permis d'établir une stratégie urbaine sur le temps long. Celle-ci se base sur des maillages existants, amplifiés ou créés permettant de tisser les différents quartiers qui ponctuent le territoire comme un archipel. Le travail consiste ici à adoucir des frontières extrêmement imposantes entre Terre et Eau, industrie lourde et Habitat ou encore zone sensible et quartier d'affaires.
Il y a en effet deux quartiers principaux, les quartiers de Rueil 2000 et du Chemin de l’ile qui se développent petit à petit vers le Port de Nanterre et le fleuve, de manière désordonnée. Il devient alors essentiel de penser le futur de cette zone d’activité non pas parcelle par parcelle mais avec une vision globale à l’échelle du grand territoire pour accompagner cette densification actuellement en cours et agir à la hauteur des potentialités que présente le Port de Nanterre.
L’analyse permet de mettre en lumière divers enjeux à la fois urbains, écologiques, sociaux et productifs pour permettre d’offrir une cohérence globale au territoire qui souffre aujourd’hui de fractures et de ses risques naturels et technologiques.
On parle ici de recréer des maillages permettant de mettre en place de nouvelles trames vertes dans ce territoire très artificialisé, de reconnecter les quartiers entre eux par des espaces publics qualitatifs, de reconnecter le fleuve à la ville, et d’offrir une certaine résilience face aux risques du territoire tout en conservant, développant et optimisant la productivité déjà présente.
Nous avons donc cherché comment développer la productivité du port de Nanterre tout en favorisant son habitabilité et sa résilience ?
Pour répondre à cette problématique, il a tout d'abord fallu définir les grands enjeux du territoire, à savoir
- Un enjeu de mutation des activités existantes et de conservation du patrimoine
- Un enjeu de développement industriel et productif du port, incluant un travail sur la tri-modalité potentielle du site,
- Un enjeu de connexion de quartiers antagonistes
- Un enjeu de résilience vis-à-vis des risques actuels (naturels et technologiques)
Plan des espaces publics
STRATEGIE URBAINE
Créer de nouveaux maillages résilients adaptés aux temporalités urbaines
Pour réaliser le projet urbain, nous avons déterminé et réfléchi les différents maillages et tenté de lier les quartiers existants en tissant un nouveau réseau d’espace vert et d’espaces publics, tout en réfléchissant les flux logistiques et productifs.
Il a également fallu penser le projet sur le temps long, et ainsi définir les temporalités du projet, qui se développerait sur plusieurs décennies, et dont l’objectif final est de réussir à faire ville dans un territoire productif, à proximité d’industries.
DÉSARTIFICIALISER POUR RECONNECTER
Développement d’un maillage écosystémique connectant les principaux parcs existants
1.1 Maillage écosystémique : Penser le territoire par les espaces verts
L’élément principal concernant la stratégie urbaine interroge plus que l'humain. Ce territoire artificialisé à plus de 85% est un "no biodiversity land" malgré son emplacement entre parcs et fleuves. Ainsi créer, ou recréer, des continuités écologiques, des axes verts devient un élément essentiel du territoire. Pour cela, nous avons voulu créer de grands parcs et des corridors verts reliant les espaces vert existant - dont le parc Départemental du chemin de l’ile à Nanterre, les parcs à Rueil, et la Seine - en se basant sur les contraintes comme les lignes à haute tension ou des friches existantes sur le territoire, pour pouvoir amorcer le projet par ce développement d’espaces verts. Ces nouveaux espaces verts se veulent également être des points de connexion entre trames, trames vertes et bleues, et donc d’avoir un maximum de berges non artificialisées.
L’objectif était de dimensionner au maximum ces espaces perméables pour pouvoir créer des lieux plus ou moins accessibles à l'homme, de terrains de sport engazonnés (Plaine sportive en front de Seine) à des réserves de biodiversités non accessibles. Ces réserves de biodiversité, des refuges pour la faune et la flore, présents le long des axes verts représentent des haltes pour la biodiversité dans un territoire fortement urbanisé.
RENDRE LE TERRITOIRE RÉSILIENT PAR LE PAYSAGE
Mise en place de parcs décaissés et de noues pour absorber les excédents d’eau
Maillage
1.2 Maillage écosystémique : S'adapter face aux crues
Ce réseau de parcs et corridors verts permet aussi d’être résilient face aux crues qui peuvent toucher le territoire, en devenant des réservoirs accueillant les excédents d’eau. Actuellement, une large partie du territoire est fortement soumise aux crues centennales, et ce, incluant des habitations, des entreprises et même une partie de l'autoroute A86 .
L’objectif est, en travaillant la topographie des parcs et terrains sportifs, de réussir à stocker une quantité importante d’eau en cas de crue centennale ou de pluie intense, et de créer ainsi un réseau de parcs/canaux en prolongement aux darses (canaux) existantes.
Il serait possible d’accueillir dans ces parcs plus des 2/3, des 360 000m3 d’eau que la zone subit actuellement, permettant ainsi de mettre hors d’eau une grande partie des bâtiments du site.
Le travail paysager de ces parcs permet d'imaginer un nouveau paysage, varié, dont un paysage de la crue qui se forme alors en transformant la presqu’ile du Port de Nanterre en une île continuant à fonctionner malgré les aléas. Les parcs deviennent par ailleurs des terrains d'absorption des eaux de pluie essentielles dans un territoire autant artificialisé.
La réflexion en fonction de la topographie permet aussi de rendre plus résilient le quartier existant du chemin de l'île. En surélevant de 50cm une partie des nouveaux bâtiments soumis aux crues (équipements) pour créer une digue [Zone rouge sur la carte], il serait alors possible de mettre à l’abri des crues des habitations actuellement sous le niveau de crue centennale.
DEVELOPPER LE MAILLAGE D’ESPACES PUBLICS
Créer de nouveaux axes et espaces qualitatifs pour rentre le territoire au habitants
Maillage publics_ Existant Emplacement pressenti pour la gare du GPE (18) Proposition d’emplacement dans le projet urbain (GPE 18)1.3 Maillage d'espaces publics
Associé au maillage écosystémique, un nouveau maillage d’espace public et de voiries est dans ce territoire essentiel, car actuellement sous-dimensionné vis-à-vis du site. Il n’y a pas réellement d’espaces publics, les seules voies étant des dessertes pour camions dans cette grande zone d'activité.
Avant de développer le maillage d’espace public, nous avons questionné l’emplacement pressenti de la gare du prolongement la ligne 18 du Grand Paris Express (VersaillesLa Défense). Cette partie de la ligne 18 est prévu après 2030 et les gares ne sont pas totalement définies ni financées. Pressenti à la limite entre Rueil et Nanterre, à proximité de la gare de Rueil-Malmaison et en zone de crue, l’emplacement actuel ne semblait pas vraiment justifié dans le cas d’un aménagement urbain englobant tout le port de Nanterre.
Nous avons donc émis l’hypothèse d’implanter cette gare, toujours sur le tracé de la ligne, mais en zone non inondable, à égale distance des gares existantes de Rueil et Nanterre ville, et au centre du projet et des darses, dans le futur quartier de la presqu’ile de Nanterre Le maillage viaire est alors pensé autour et en connexion avec cette future gare du Grand Paris et les gares existantes de Rueil-Malmaison et Nanterre Ville. Le travail s’est défini par la mise en place de nouvelles centralités, de grandes places publiques accrochées à des espaces verts ou connectés au fleuve et aux darses. Ces centralités se veulent être des points de connexion avec les quartiers existants, comme des éléments de liaison, et raccrochés à des équipements publics ou des écoles. Ce travail inter-quartier propose alors de nouveaux liens entre des quartiers antagonistes, la zone urbaine sensible du chemin de l'île et le quartier d'affaire e Rueil 2000. La définition d'un axe majeur NordEst/SudèOuest entre le parc départemental du chemin de l'île et le nouveau grand parc des Guilleraies vient alors offrir une possibilité d'accroche pour chacun des quartiers autour d'une colonne vertébrale unique.
La grande majorité des axes nouvellement créés sont praticables uniquement en mobilités douces. Ils accompagnent le maillage écosystémique en lui apportant une épaisseur fonctionnelle et efficace urbanistiquement. Ainsi, chaque espace public est qualifié par les emprises et bâtis les entourant, pour créer des intériorités, des petites places fermées ou bien au contraire ouvertes sur le fleuve ou sur un parc.
AMPLIFIER LA PRODUCTIVITÉ ET LA TRIMODALITÉ
Simplifier les accès logistiques et les liaisons entre les différents modes de transport (Péniche/Camion/Train)
1.4 Maillage logistique
En plus des flux doux et voiture, il était indispensable dans cette zone d’activité de penser les flux logistiques. Ceux-ci ont alors été rationalisés en conservant les grands axes existants, et en n'ajoutant que des raccords entre certaines routes pour les compléter. Il y a alors très peu de création de nouvelles voiries automobiles. Les raccords créés permettent principalement de mettre à l’écart du trafic les habitations existantes et futures étant présentes sur les anciennes voies d'accès.
L’objectif était également de permettre un maximum de connexion entre le fleuve et la route pour permettre une facilité de bimodalité Péniche-Camion. Pour cela, l'organisation des entreprises a parfois été repensée pour optimiser ces accès, en priorisant les entreprises nécessitant un contact avec l'eau auprès des darses. C'est le cas par exemple des entreprises de matériaux de construction, auparavant excentrées du fleuve, qui retrouvent une place ayant une facilité de bimodalité, dans un pôle les regroupant au nord des industries lourdes.
Toujours dans une optique post-carbone, toutes les emprises ferroviaires du site, actuellement en friche, ont été conservées ou intégrées à des parcs pour envisager une future potentielle Trimodalité (Fleuve/ Rail/Route). Plusieurs entreprises comme le centre de tri ou le pôle matériaux de construction sont également placées stratégiquement pour un futur accès ferré.
BÂTIMENTS BARRIÈRES
Mise
PLAINE SPORTIVE
Initier
TRAMES VERTES
FAÇADE
Ouvrir
CONNECTER DES GUILLERAIES
2. Penser le temps long
L'ampleur du projet urbain induit le développement de temporalités de projet. Celui-ci va donc se développer sur plusieurs décennies, et est pensé dans le temps long, pour que chaque temporalité, chaque étape du projet soit bénéfique au territoire même si la temporalité suivante n’a pas lieu.
Les premières interventions [2025-2030] consistent à équiper le territoire stratégiquement pour faire face aux risques et améliorer le cadre de vie des habitants et usagers du Port de Nanterre. Cela inclus la constitution des premières trames vertes et des réservoirs d’eau, de rendre accessibles certains bords de darses, selon les temporalités, et faciliter, rendre plus lisible les accès au bord de Seine. Cette première temporalité initie également le désenclavement de la ZUS (Zone Urbaine Sensible) en l’ouvrant sur la Seine par l’intermédiaire d'une plaine sportive.
Dans une deuxième temporalité [2030-2037] l’objectif est de désenclaver les quartiers existants en les ouvrant sur le Port, les darses et la Seine. À cela s'ajoute la création d'une version lisible urbainement de l'axe central du projet, avec la mise en place du Parc des Guilleraies à la place de larges emprises anciennement occupés par des magasins de vente de matériaux. Ceux-ci sont déplacés et regroupés dans un pôle, en connexion avec les darses et dans la zone la plus soumise aux aléas SEVESO, loin des habitations.
La temporalité 3 [2037-2050] découle des conditions d'habitabilité mises en place dans les deux temporalités précédentes. À cela s'ajoute l’arrivé de la Gare Nanterre Port de la Ligne 18 du Grand Paris intégrant au site une centralité métropolitaine, appuyant la construction de logements sur des socles productifs et la mise en place de grandes centralités culturelles et sportives tant à l'échelle du quartier qu’à l’échelle métropolitaine.
Carte des typologies de bâti existant
Carte des typologies de bâti avec projet
Comprendre et adapter les typologies urbaines
Ce projet urbain est une opportunité pour Nanterre de désenclaver cette zone d’activité et de rendre accessible son fleuve en rendant publique une grande partie du foncier, et en travaillant les typologies de bâti dans une continuité et une amélioration de l’existant.
Ainsi, les typologies de bâti développées dans le projet proposent une certaine continuité vis-à-vis de l'existant, avec un prolongement du quartier d'habitation près du parc départemental et en front de Seine, ou bien le prolongement du front bâti tertiaire le long de l'autoroute.
Mais c’est un territoire qui est à premier abord peu appréhendable pour le piéton, et qui nécessitait donc des points d’accroches que nous avons matérialisés par des bâtiments remarquables, ou significatifs dans le paysage. On retrouve alors un IGH qui termine l’axe SudOuest-NordEst, en bout du parc des Guilleraies et en front d'autoroute; une Halle réhabilitée comme entrée du quartier depuis Rueil, avec un nouveau parvis, et enfin sur la presqu’ile, la Gare du Grand Paris Express.
Un des principaux objectifs était également de mettre à l'écart les industries lourdes (Zone Seveso), en créant 3 bâtiments imposants, 3 Bâtiments barrière, qui protègent visuellement et physiquement les futurs quartiers. Ces 3 bâtiments intègrent des éléments d'un programme utile au territoire, à savoir la relocalisation des entrepôts bus éparpillés dans la zone d'activité; un bâtiment sportif métropolitain proche de la future gare avec un centre de tri en rez-de-chaussée, et enfin un autre équipement public en bordure de la zone urbaine sensible.
Ainsi les nouveaux quartiers développés se raccrochent à l’existant dans leurs formes urbaines, et en dialoguant avec les nombreuses contraintes du site devenant des figures de projet.
Créer la ville Post-Carbone
Penser la ville sur la ville - un sujet étudié depuis aussi longtemps qu'il existe des villes - nécessite aujourd'hui un changement de paradigme. Il ne s'agit plus seulement de construire des espaces agréables, confortables, fonctionnels pour l'Homme, mais bien des lieux "Vivables" et évolutifs permettant de s'adapter au changement climatique. Le scénario développé ici tente alors, dans une réflexion tout de même très réaliste, de démontrer que les solutions impliquent un travail à toutes les échelles, et notamment l'échelle du grand territoire urbain. La mise en place d'axes structurels du projet, priorisant les mobilités douces, la biodiversité, et les ilots de fraicheur, permettent d'imaginer l'évolution progressive de la ville vers un système résilient et frugal.
Le financement d'espaces publics et parcs si généreux nécessite forcément, pour fonctionner une approche incluant le développement d'activités tertiaires , d'emprises d'activités diverses et de quartiers plus ou moins denses qui pourraient remettre en question la logique frugale de tels projets. Pourtant chaque nouveau quartier est ici étudié pour aboutir et améliorer l'existant, en complétant l'offre de logement, de commerces, d'équipements ou de bureaux, sur des emprises non optimisées. Ainsi certaines concessions programmatiques à la marge, ne remettent finalement pas en cause l'impact positif du projet sur le territoire (tant au niveau biodiversité, climatique, carbone et énergie).
PROJET URBAIN
Rendre le(s) sol(s) productif(s) et vivant(s)
Transformer la ville implique d'imbriquer une multitude d'échelles de réflexion, dont celle du quartier, qui va traiter des connexions et interactions sociologiques, ainsi que des détails de logique urbaine. Cela comprend la manière dont il est possible de conserver et d'accroitre la productivité de la ville tout en proposant aux riverains une qualité de vie optimale. Ainsi, en s'intéressant plus précisément à la presquîle de Nanterre, le nouveau quartier de la gare de Nanterre Port, il est possible d'émettre des hypothèses sur ce que pourrait être la ville productive.
2.1 Espaces publics et biodiversité
Le projet urbain se caractérise par une logique typologique assez simple, de rez-de-chaussée productifs sur lesquels viennent cohabiter logements, bureaux et équipements. Il s'agit alors d'obtenir une surface d'activités productives la plus étendue possible, tout en créant autour des espaces publics attractifs.
Dans la continuité de la réflexion autour d'un maillage écosystémique, de dessin des différentes zones perméables du site, il s'agit ici de définir les futurs usages de chaque espace et de prendre en compte les contraintes, pour y intégrer la flore adéquate. Ainsi, certains espaces publics fortement attractifs présentent une végétation plus pauvre (strate herbacée : pelouse) comme la pelouse des darses le long d'une grande promenade piétonne. Au contraire, plusieurs zones non accessibles à l'homme ont été définies. Ces réserves dispersées sur le territoire et reliées entre elles par des espaces verts forment de véritables trames vertes, en connexion régulière avec le fleuve. Leur disposition prend en compte les flux sur le territoire pour les intégrer dans des endroits les plus calmes possibles, avec le moins de passage autour.
Le choix des différentes strates de végétation permet également de cadrer certaines vues, comme dans le prolongement de l'avenue ou bien du parc des Guilleraies. La disposition des arbres devient alors partie prenante des formes urbaines, et de la création de perspectives dans le quartier.
La place de la gare de Nanterre Port [au niveau de la gare en rouge], est quant à elle l'unique espace public principalement minéral, pour pouvoir accueillir une diversité d'activités (marché, concerts, activités associatives...). Orientée sur les darses, avec une place haute et une place basse, elle dialogue avec des péniches qui peuvent répondre à des besoins urbains temporaires (une piscine, des espaces de travail sur l’eau, des bars) en fonction des saisons ou des évènements.
2.2 Fonctionnement systémique
La presque'île se compose de 5 zones distinctes qui fonctionnent comme un tout :
* Un système de protection, de mise à l'abri des industries lourdes [à droite] grâce à un très long bâtiment mixte; centre de recyclage en rez-dechaussée et équipement sportif métropolitain en étages. Celui-ci est en contact direct avec une des darses pour redirection des déchets valorisés par péniche.
* L'avenue des Guilleraies, desserte logistique exclusive de la presqu'île, et seul accès routier, longée par une forêt linéaire mettant à distance le centre de recyclage des habitations.
* La pointe de la presqu'île, centralité principale, incluant la nouvelle gare de Nanterre Port, la grande place, des commerces et un bâtiment culturel réhabilité. Avec sa passerelle connectant le quartier de Rueil 2000, la place de la gare est facilement accessible depuis n'importe quel quartier alentour.
* Les logements sur rez-de-chaussée productifs, sous formes diverses, mais concentrées de manière assez dense pour permettre de proposer des espaces verts les plus vastes possibles et ainsi un maximum de perméabilité. L'échelle mixte de ces bâtiments leur permet de dialoguer à la fois avec les masses bâties imposantes autour, les espaces verts généreux et le tissu plus diffus des quartiers Nanterriens.
* Un quai public et attractif [à gauche], avec des commerces en rez-de-chaussée, reliant la place centrale et la gare avec le grand parc des guilleraies, le long d'une des darses.
La place orientée sur les darses est bordée par 2 bâtiments à échelle plus petite que le reste du quartier, et apporte principalement des commerces pour animer la place. Leur petit impact visuel permet aussi de réduire l’impact du bâtiment mixte logistiquehabitat à côté. Ce bâtiment mixte (développé en détail par la suite) intègre également un grand parking silo en bois, qui permet d’éviter la construction de soussols sur la presqu’ile, et de favoriser les transports en commun et les mobilités douces en devenant un parking relais, à la croisée de 2 autoroutes et au pied d’une gare du grand Paris.
PROJETS ARCHITECTURAUX
Mixer productivité et Habitat
Pour rendre habitable la presqu’ile, il a fallu réfléchir à une gradation des fonctions localisée : les cuves situées dans le périmètre SEVESO (sources de nuisances sanitaires); suivies d’industries liées au traitement des déchets du BTP (sources de nuisances visuelles et sonores) couplées à des équipements sportifs et culturels (non impactée par ses nuisances)[BÂTIMENT 1]. S'ensuivent des Ateliers et des espaces verts (absorption des nuisances) pour enfin pouvoir proposer des bâtiments habitables, ici mixte Habitat/ Activité ou en l’occurrence ici, Logistique(RDC)/Parking Silo/ Habitat[BÂTIMENT 2].
La réflexion autour de la mixité production/Habitat se poursuit alors à l'échelle architecturale. Les deux bâtiments présentés ici démontrent un nouveau fonctionnement de quartier mixte.
3.1 Superstructure mixte_ Centre de recyclage et centre sportif métropolitain
Cette architecture est l’un des 3 bâtiments "barrières" permettant de protéger le quartier de la presqu’ile de Nanterre de la Zone SEVESO. Il s’agit d’un bâtiment monument qui participe à caractériser, à donner une identité au Port de Nanterre. Le Bâtiment a été pensé afin de pouvoir généré de larges plateaux libres pouvant accueillir diverses activités et pouvant être facilement modulable au fil du temps et des besoins.
Il est composé au RDC d’une Recyclerie; grand centre de valorisation des déchets du BTP qui est connecté aux darses devant un quai de transbordement . Celuici est accessible aux camions depuis l’axe principal du projet, ce qui permet de réduire les nuisances au niveau de la Presqu’ile.
Des Ateliers sont situés face aux logements de la Presqu’ile, en relation à la forêt linéaire le long des voies ferrées en friche.
Au-dessus du centre de recyclage se trouve un complexe sportif métropolitain. Un large plateau et une toiture intégralement dédiés aux sports variés, et dont l’entrée principale s’ouvre sur la Gare de Nanterre Port et la place centrale.
Étage gradin
Étage intermédiaire vestiaire
Plateau sportif
Sport et Ateliers
Étage intermédiaire vestiaire
Sport Ateliers Recyclerie
Toiture sportive et festiveLe bâtiment est pensé le plus possible en structure Bois, mais des blocs et murs latéraux en béton restent indispensables à la stabilité et au contreventement de la structure globale.
Les poteaux en Bois sont doublés pour une meilleure inertie et les poutres sont mixtes Bois/Acier, le bois pour les éléments travaillant en compression et l’acier pour les éléments travaillant en traction. Des escaliers hélicoïdaux désaxés de la façade en relation aux blocs en béton donnent une identité productive et dynamique à cette grande ligne horizontale.
La largeur de 24m entre chaque poteau et la hauteur libre de 8m permet d’y développer un grand nombre d’activités sportives.
Au niveau de l’entrée et du prolongement de la place de la Gare, le sport occupe toute la largeur du bâtiment. On y retrouve l’accueil, les circulations verticales et le bloc vestiaire qui se déploie sur 6 niveaux.
Les Sports demandant peu de surface se développent dans la partie gauche sur toute la hauteur du bâtiment. Les terrains de sports plus volumineux se développent quant à eux dans la longueur du bâtiment. Côté presqu’ile sont rendus accessibles des espaces extérieurs en relation à la forêt linéaire.
La toiture est investie par des activités sportives diversifiées et un espace festif surplombe le Port de Nanterre et le grand paysage alentour.
Donner à voir les industries depuis le complexe sportif et les ateliers a aussi été un choix pour conserver une identité forte et contextualisée, une identité productive au bâtiment et laisser voir au grand public le fonctionnement d’une recyclerie.
Montesson MoulinAlard
Nanterre
▷
Entrée de l’équipement sportif métropolitain
Une interface mixte
Vue
Vue
3.2 Bâtiment mixte_ Logements / Centre logistique / Parking silo
Le projet urbain intégre des bâtiments 'iconiques', traduisant la volonté de mixité Production/Habitat.
C'est le cas du deuxième bâtiment développé ici : un grand entrepôt logistique lié aux darses, sur lequel nous avons réfléchi comment intégrer de l’habitat. Il intègre aussi un parking silo de 580places en ossature bois.
L’idée principale est ici de prendre l’emprise artificialisée d’un centre logistique pour densifier en logement sans artificialiser d’avantage. Cela permet aussi d’utiliser cet emplacement stratégique dans le quartier, et dans le territoire, à la fois pour la production (la connexion aux darses), et l’habitat (la vue, le paysage et la proximité avec la gare)
Le rez-de-chaussée est alors totalement productif, avec le centre logistique au centre, et des locaux d’activité sur les deux longs cotés.
L’avenue des Guilleraies, sur laquelle donne le parking silo, sert de desserte principale au bâtiment pour ses différentes fonctions avec une entrée camion au centre logistique, une entrée voiture au parking et un grand escalier public permettant d’accéder au jardin au centre du bâtiment. Cet escalier d’accès au jardin intérieur dans le parking, est très large et la structure bois contreventée vient créer avec des poteaux arborescents une atmosphère très spéciale dans cette interface entre l’avenue productive et le paysage intérieur.
Ce jardin intérieur intègre d’ailleurs des arbres plantés en pleine terre, qui permettent aussi de créer des patios éclairant naturellement les bureaux du centre logistique.
Ce grand jardin se termine sur la façade des darses par des espaces communs ouverts mais abrités, surplombant la darse au sud-Ouest. Certains logements à ce niveau bénéficient de jardinets privatifs mais la majorité de cet espace reste ouvert à tous en journée.Concernant la structure du bâtiment, il est entièrement basé sur une grille de 8m par 8m, avec certaines portées de 16m pour l’entrepôt logistique ou le parking, ou de 4m pour la façade des logements.
On a donc une régularité sur toutes les fonctions du bâtiment permettant d’optimiser la structure.
Le centre logistique est en béton, pour plusieurs raisons, pouvoir résister aux crues, éviter les remontées capillaires et projections d’eau, et répondre aux exigences en termes de sécurité incendie, mais le reste du bâtiment est en ossature bois et matériaux biosourcés.
On a donc un grand parking silo avec toute sa structure ossature bois et avec des jambes de forcepermettant de reprendre les efforts des portées de 16m en bois et contreventant le parking. Les hauteurs d’étages correspondent aux étages d’habitation, si bien que ce parking présente une forte composante de réversibilité et d’adaptabilité.
On peut imaginer qu’une partie soit fermée aux voitures et puisse accueillir une activité de production ou de stockage, voir des bureaux en extension des bureaux existants
Tous les étages, et principalement le dernier ou celui à niveau du jardin, peuvent également accueillir d’autres activités, comme l’organisation d’évènement sur un ou deux niveaux, fêtes, brocantes etc.
Ce bâtiment mixte est aussi un bâtiment de logement qui nécessite des conditions d’habitabilité exigeantes.
Pour proposer des logements au cœur du port de Nanterre, sur un centre logistique, il est nécessaire de proposer des lieux de vie vraiment qualitatifs.
On a donc des logements principalement traversants, ou en duplex mono orienté, avec des balcons de 2m de large de chaque côté, faisant office, à la fois, de protège soleil et d’extensions extérieures de grande dimension.
Les logements sont rattachés à des circulations verticales extérieures éclairées naturellement, et avec des escaliers généreux et agréables pour inciter à leur utilisation.
Du coté du jardin intérieur, les balcons peuvent être considérés comme des coursives privatives, accessibles directement des circulations verticales. On peut donc y entreposer des équipements ou bien accéder directement aux chambres sans passer par les pièces communes. Cela permet également d’envisager la transformation d’une chambre en bureau pour un indépendant recevant des clients et donc de proposer une grande modularité aux appartements.
Toiture terrasse [Coupe]
Vue du jardin intérieur depuis un balcon privé
Les matériaux participent aussi pleinement au confort de vie du bâtiment. Avec une structure principale poteaux poutres en bois, visible en façade, et des planchers et murs de contreventement en CLT (lamellé croisé), le bâtiment est entièrement biosourcé. Les murs d’isolations sont en caissons bois avec une isolation en laine de chanvre et finition enduit chaux sable en façade, un enduit clair réfractant la chaleur des deux côtés.
Cependant, les ambiances sont différentes, avec les pièces de jours donnant sur les darses, un espace extérieur pouvant être fermé par un claustrât grillagé, avec une vue dégagée, sur l’eau ou la place, où l’on peut manger, se détendre, plutôt au sud, sud-ouest ; alors que les chambres donnent sur la coursive végétalisée, plus ombragée, donnant sur le paysage intérieur qu’est ce jardin commun.
Finalement le bâtiment tenter de créer une intériorité et une ambiance de quartier dans un milieu pourtant hostile à l’habitat au premier abord. La forte fonctionnalité du lieu, que ce soit avec le centre logistique, les activités diverses en RDC, ou le parking silo participent à le rendre vivant et efficace, et les logements optimisent son emprise importante en y créant des lieux de vie.
Liaison facade-Balcon [Coupe]Conclusion
Avec une réflexion globale de l'échelle du territoire au détail architectural, ce projet démontre des possibilités de combinaison, de superposition des fonctions afin de répondre à des problématiques multi territoriales, de la Vallée de la Seine au quartier. Les maillages et axes structurants, les espaces publics et les bâtiments répondent à des enjeux locaux et exploitent pleinement les potentialités et la place stratégique du Port de Nanterre.
Ils s’insèrent et représentent un projet urbain qui explicite donc cette notion d’interface, de système de connexion entre différents mondes, que ce soit le monde productif et le monde de l’habitat ; le monde écosystémique et le monde urbain dense ; le monde des transports doux et celui des transports routiers ; le monde économique de Reuil et le monde social de Nanterre. Nanterre Port devient un avant de ville, un front de seine habité et dynamique, une nouvelle façade de Nanterre.
Cette intervention essentielle dans une zone d'activité est une opportunité unique pour Nanterre
- D’augmenter la biodiversité : En recréant les continuités écologiques des bords de seine et en rendant le territoire résilient notamment aux crues avec un nouveau maillage écosystémique
- D’augmenter l’habitabilité : En ouvrant la ville sur le fleuve, et en désenclavant les quartiers existants avec un nouveau maillage d’espace public
-D’augmenter la productivité : En conservant et augmentant toutes les potentialités productives et logistiques du port de Nanterre à l’échelle de la vallée de la seine.
Ce projet est finalement pour nous l’aboutissement d’une réflexion autour de ce que pourrait être une ville où cohabitent biodiversité, urbanité et productivité.
Ce tome 2 expose notre vision urbaine et architecturale pour le Port de Nanterre, en réponse aux enjeux déterminés par une analyse poussée du territoire. Ce travail mené dans le domaine d'étude territoire de l'architecture de l'école d'architecture de Paris Val de Seine se développe autour d'une réflexion pluriscalaire, du projet urbain au détail architectural afin de définir des réponses situées et ancrées dans leur environnement.
Entre enjeu de productivité de la ville, résilience, frugalité et patrimoine, il s'agit ici d'entrevoir les possibilités de mutation du territoire pour que ville , port productif et nature ne fassent qu'un.