entrevues
Animal Triste réveiller la bête, rallumer la flamme LAURENT THORE
Fier de son deuxième LP, Night of the loving dead, le groupe Animal Triste déploie avec toujours plus de force et de détermination son univers sensible et passionné pour reprendre le flambeau du rock ténébreux, mystique et agité des Doors et de Nick Cave.
D
’une certaine manière, Yannick, Mathieu et David sont les porte-paroles de cette formation à six musiciens, longtemps restée à l’état d’envie, mais devenue réalité courant 2018, avec des premières compositions dédiées pour Animal Triste en particulier. Il faut dire que leurs parcours respectifs, notamment au sein de La Maison Tellier – pour le premier –, que Mathieu a d’ailleurs rejoint dernièrement et Radiosofa – pour les deux autres –, ne leur ont pas donné l’occasion de chômer depuis de nombreuses années. Et pourtant,
16 LONGUEUR D’ONDES N°95
MARYLÈNE EYTIER
galvanisés par l’esprit libérateur et vibrant de leur nouvelle entité rock, ils affichent une excitation digne d’un jeune groupe à peine sorti du local de répétition, comme l’exprime avec fraîcheur le guitariste, David Faisques souvent appelé Darko : « À l’adolescence, le grand frère d’un ami, féru de musique, m’a fait découvrir Hendrix, premier choc ! Le 2e : AC/DC. Avec des solos de guitares endiablés avec une raquette de tennis devant un miroir ! » Mathieu Pigné évoque quant à lui l’impact de la musique des Doors, véritable élément fédérateur du groupe : « Je devais avoir 10 ans. Les Doors ! La première fois, ma vie a été bouleversée, j’ai entendu la cymbale dans l’orage de “Riders on the storm”, à ce moment-là, je me suis dit que je voulais être batteur ! » Mais pour eux, l’œuvre de la bande à Jim Morrison touche au sacré. Sous le couvert d’un défouloir évident, de sa liberté transgressive, le rock est aussi quelque chose avec lequel on ne plaisante pas : c’est un refuge, une chapelle. Le batteur souligne non sans humour « C’est
interdit de reprendre les Doors… Déjà parce que Laurent Voulzy l’a fait avec “Light my fire”, et c’est vraiment dégueulasse ! » Animal Triste s’inscrit avec humilité mais aussi éréthisme dans la grande histoire du rock. Plus sérieusement, Darko complète : « Je crois que nous sommes vraiment en religion avec le rock. Plus jeunes, nous nous sommes abreuvés des anecdotes de la presse, des histoires de tournées, de studio. » Dans la foulée, Mathieu Pigné évoque ainsi l’interview d’Alain Bashung pour Longueur d’Ondes en 2007, qui avouait, ayant écouté Black Rebel Motorcycle Club à la radio, qu’il aurait beaucoup aimé jouer dans ce groupe pour le côté puissant et électrique déployé. Transition habile pour parler de Peter Hayes, membre éminent de BRMC, ayant apporté son feeling de guitare si particulier pour des sommets de mélancolie nocturnes et introspectifs