L’urbanisme de dalle, un urbanisme de l’évolution des modes de vie ?

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1 L’urbanisme de dalle, un urbanisme de l’évolution des modes de vie ? Lou CHAUBARD Directeur d’études : Gilles Antoine Langlois Université de Paris École Nationale Supérieure d’Architecture Paris Val de Seine Année Universitaire : 2021 2022 Master 2 : Ville, Architecture, Patrimoine

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SOMMAIRE

PREMIEREINTRODUCTIONÉTATDEL’ARTPARTIE : HISTOIRE DES OPERATIONS DE DALLE Chapitre I : Chronologie du patrimoine 1959/1979 Chapitre II : Origine du terme a La charte d’Athènes b Le rapport Buchanan c Les zones à urbaniser en priorité d Artificialisations des sols Chapitre III : Utopie ou réalité ? a Modernisme français inspiré des américains ? Un urbanisme radical et révolutionnaire b Dystopie Chaptire IV : Du patrimoine du xxe siècle à l’architecture contemporaine remarquable a Le label « Patrimoine du XXème siècle » b Le label « Architecture Contemporaine Remarquable » c Politique de protection des dalles du point de vue juridique DEUXIÈME PARTIE : ARCHITECTUREABSTRACTIONET Chapitre V : Peinture et architecture : un processus créatif avant tout artistique et sensible a Rendre l’espace sensible b Art abstrait et architecture : influence du Bauhaus, du mouvement de Stijl et Constructivisme Russe Chapitre VI : L’œuvre de Michel Holley a Histoire d’influences b Conception du projet : art chitecture OuvertureCONCLUSIONdusujet:quel devenir patrimonial envisageable pour les opérations de dalles ?

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La problématique qui découle de ces opérations est donc la suivante : l’urbanisme de dalle est-il un urbanisme de l’évolution des modes de vie ? L’objectif dans ce choix de sujet de mémoire est donc, dans un premier temps, de retracer l’histoire des opérations de dalle par l’analyse chronologique de ce patrimoine, Les espaces collectifs aménagés. Il existe des infrastructures primaires, secondaires et tertiaires qui correspondent à l’échelle d’intervention, la répartition des financements entre l’État, les collectivités locales et les constructeurs dépend de cette classification. » selon la définition donnée par le Dictionnaire de l’Urbanisme et de l’Aménagement (Merlin Pierre et Françoise Choay, éditions PUF)

« Comme Howard le disait, les anciennes villes ont « fait leur temps ». Elles étaient ce qu’on pouvait attendre de mieux de l’ancien ordre économique et social, mais il fallait les remplacer si l’humanité devait atteindre un niveau supérieur de civilisation. ». Fishman, L’utopie urbaine au XXe siècle, 9. Apparu dans un contexte singulier, celui de la crise du logement mais aussi celle de l’émergence du monde tout automobile, l’urbanisme de dalle connait son apogée durant la période des Trente Glorieuses (19451975). À l’époque, il promeut une certaine liberté, la création de quartiers populaires, de nouvelles villes et entraine également avec lui la mutation des infrastructures 1 . Moderne et contemporain, il transmet en héritage certaines de ses caractéristiques à l’urbanisme actuel, telles que l’empilement des 1 Le terme infrastructure décrit « l’ensemble des installations réalisées au sol ou en souterrain permettant l’exercice des activités humaines à travers l’espace. Elle comportent notamment : Les infrastructures de transports ; Les aménagements hydrauliques ; énergétiques, de communication ; Les réseaux divers (eau, assainissement, électricité, gaz, téléphone) ; fonctions, la recréation de la rue, l’interrogation du cheminement ou encore de l’appropriation des Ceespaces.sujet suscite mon plus grand intérêt, tant du point de vue de la forme urbaine présentée que des théories de la ville abordées. Il traite également, par ramification, d’autres thèmes sous-jacents qui me semblent capitaux dans l’élaboration d’un projet architectural et urbain ; nous pouvons évoquer ici les questions de la gestion des échelles, de l’héritage et de l’évolution qui en découle.

INTRODUCTION

6 développé ici sur la période de 1959 à Cette1979. première partie sert à contextualiser son apparition, son apogée et enfin son déclin. Mais également à mettre en évidence quelles réponses les dalles ont apportées durant la révolution des modes de vie modernes. L’hypothèse est de considérer la dalle comme une forme-bascule entre le modernisme et le post modernisme. L’objectif consiste à de évaluer si ces espaces, lieux d’intensité, sont témoins de la mutation moderne des villes. Mais également d’évaluer si ces formes sont encore capables de nourrir, par leurs caractéristiques, l’urbanisme de la ville contemporaine.

C’est ainsi que nous allons dans un premier temps faire un bond dans l’histoire et découvrir rétrospectivement ce patrimoine architectural et urbain, tout en abordant les origines du terme avec comme sujets d’appui la charte d’Athènes, le rapport Buchanan, la création des ZUP et la question de l’artificialisation des sols. Cette première partie va par la suite chercher à montrer en quoi le modernisme américain à influencé le modernisme français par la création d’un urbanisme radical et révolutionnaire. Pour ce faire, nous nous attacherons à découvrir ce qui découle réellement des utopies et dystopies développées et liées à la création de ce patrimoine. Ce premier chapitre se termine alors sur la question de la place du patrimoine des dalles au sein du label « Architecture Contemporaine Remarquable » et les politiques de protection de ces espaces du point de vue Dansjuridique.undeuxième temps, ce mémoire se tourne vers le lien entretenu entre l’architecture et l’abstraction en art. Pour ce faire, j’ai abordé cette partie selon un point de vue sensible en comparant peinture et architecture selon leur principe de processus créatif. C’est ainsi que nous partons à la découverte du lien entre certains mouvements artistiques qui se côtoient et se joue de leurs limites : nous parlons là des influences du Bauhaus, du mouvement de Stijl mais également de celui du Constructivisme Russe. De cette introduction aux liens entre art et architecture j’ai décidé d’utiliser comme support d’expression plus précis, le cas du travail de Michel Holley. En raison de son décès lors de l’écriture de ce

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mémoire, j’ai pris à cœur l’idée de raconter son histoire d’un point de vue plus personnel grâce à la relation entretenue avec sa fille, Kitty Holley. Cette dernière sous partie du mémoire retrace ainsi l’histoire de cet architecte, du point de vue de l’influence de son histoire familiale dans son œuvre, des amis qu’il côtoyait, des passions de ses proches et notamment des influences crées entre son travail et celui de sa femme, elle même peintre, Francine Holley. De toutes ces influences en découle alors une réflexion sur sa conception de projet urbain et architectural qui peut être considéré comme de l’art chitecture. Le mémoire se termine finalement sur une conclusion qui questionne le devenir patrimonial envisageable pour ces opérations de dalle.

La question du sol dans la ville est très rapidement devenu un enjeu majeur, qui est passé par le développement de techniques anciennes comme le pavage, au bitume et à la gestion des réseaux ou encore la création des trottoirs.

La révolution industrielle à beaucoup influencé le changement de la forme urbaine telle que nous la connaissons aujourd’hui. Cette période a notamment mené à l’artificialisation du milieu urbain, qui était un besoin se profilant selon la demande de l’évolution sociétale.

ÉTAT DE L’ART

Les sols sont également témoins de la rationalisation de la circulation automobile et un facteur de réflexion sur les déplacements piétons ou encore le développement contemporain des modes de 2 « L’urbanisme opérationnel est « un ensemble d’actions, conduites ou contrôlées par les pouvoirs publics, qui peuvent avoir pour objet la fourniture de terrains équipés (aménagement), la construction de bâtiments ou le traitement de bâtiments existants (rénovation, restauration, réhabilitation). Les types d’opérations sont variés. Certains n’ont plus qu’un intérêt historique (grands ensembles, zones à urbaniser par priorité), d’autres sont en voie de disparition (résorption de l’habitation insalubre). Les mécanismes actuellement les plus utilisés en France sont la zone d’aménagement concernée (ZAC) et le lotissement. Les objectifs poursuivis sont aussi divers que les modes de réalisation. Les opérations d’urbanisme peuvent déplacement doux. C’est ainsi que la stratification de la circulation urbaine apparait. L’étape finale de cette réflexion étant celle des opérations de dalle 2 . Dans ces espaces nous pouvons y voir un sol qui se veut praticable et démontable du point de vue des réseaux, automobile et piétons, le tout assurant une sécurité pour le citadin et une circulation fluide et sans L’architectureaccroc. du corps bâti est quant à elle désormais plus dépendante de la Decirculation.toutes ces réflexions de nombreux projets voient le jour dès le XIXe siècle, dont celui d’Hector Horeau, projetant une ville à mettre sous cloche en 1866, permettant alors de mettre à l’abri des intempéries la ville, la libérant de tout facteur naturel « nuisible ». Hector Horeau est considéré comme comporter des acquisitions foncières, la réalisation d’équipements dits « d’infrastructures » (voirie par exemple) ou de « superstructure » (stade), des constructions, des restaurations d’habitations existantes immobilière, ou même des politiques conduites hors du Code de l’urbanisme, comme la « résorption de l’habitat insalubre » (1970). » selon la définition donnée par le Dictionnaire de l’Urbanisme et de l’Aménagement (Merlin Pierre et Françoise Choay, éditions PUF, Ces2015).opérations sont par ailleurs d’initiative privées ou publiques.

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C’est dans ce contexte de transformation urbaine, la dalle propose un nouveau mode de vie par le contrôle des nuisances causées par les flux automobiles. Cela induit un reniement de la ville traditionnelle.

L’abandon de la nature ne peut être formellement exécuté et reste à l’état de projections, souvent décriées pour l’aspect invivable qu’ils projettent. Un milieu urbain empreint de technologie et dénué de naturel mène généralement à des dystopies, souvent représentées dans des films tel que Métropolis de Fritz Lang (1927) ou encore Blade Runner 2049 de Ridley Scott (2017).

9 l’un des prédécesseurs de la dalle dans son argumentaire, notamment par son regard sur les dangers liés à la circulation. « Des passages souterrains avec rampes et escaliers permettraient des traverser le boulevard en toute sécurité. »3 Cette idée de dôme en verre sera également explorée au XXe siècle par Auguste Perret ou encore Buckminster Fuller, le groupe Archizoom et Gilles Perraudin. Cependant cette artificialisation massive de notre milieu de vie, mène également à des controverses au sujet de l’environnement naturel qui disparait en ville. Cela se traduit notamment du point de vue de la pollution, de la gestion des déchets, de l’imperméabilisation des sols ou encore de l’apparition de la congestion automobile. En ressort également un questionnement au sujet de l’influence de la technologie sur le développement de l’urbanisme, comme Philippe Roqueplo a pu le faire remarquer dans son article 3 BOUDON, Françoise, LOYER, François (dir.), « Hector Horeau 1801 1872 », Technique et idéologie, publié en 1979 : « Nous assistons à l’heure actuelle à une mise en question profonde du technicisme et de la technocratie, au moment où, d’une certaine façon, leur emprise se fait de plus en plus forte ».

La ville moderne voit le jour grâce aux réflexions menées notamment par le Congrès International d’Architecture Moderne (CIAM) et Le Corbusier, avec la création théorique de la ville fonctionnaliste supplément aux Cahiers de la recherche architecturale, n°3, S.D., 93

4 HITCHCOCK, Henry Russell, Architecture XIXe et XXe siècles, s’inscrivent, la question de la conception et de la mise en œuvre de tels espaces sont indispensables à la compréhension de l’évolution de la ville moderne à la ville post moderne et contemporaine. Sa situation historique et architecturale permet de mieux saisir les enjeux et le poids direct de la conception urbaine moderne sur l’urbanisme contemporain. Elle permet de comprendre les problématiques et les erreurs liées à ces opérations ambitieuses et de grande envergure aujourd’hui plus réalisables. « Les deux décennies avant 1970, les années 50 et 60 virent la production d’une grande partie des cadres urbains et suburbains dans lesquels nous continuerons probablement à vivre pendant le reste de ce siècle (…) ainsi les années d’après guerre (…) virent la réalisation de beaucoup d’idéaux urbanistiques qui avaient semblé fantastiques et utopiques. »4 Nous pouvons également observer un fait étrange : ces formes urbaines sont peu étudiées par les architectes, historiens et critiques. Autre fait, la Harmondsworth, 1958, traduction française Bruxelles, Mardaga, 1981, 614

10 où nous venons penser et même idéaliser la ville du futur. C’est à ce moment là que la dalle vient apporter une solution aux maux de la ville. La question du partage de l’espace est au centre des réflexions. Elle propose divers dispositifs automobiles et piétons pour pallier à ces problématiques. Elle s’impose comme le paradigme de la ville du « futur ». Mais cette solution est aujourd’hui victime d’une forte critique. Les espaces publics sont considérés comme dangereux, inhumains, désorganisés et inconfortables. En découle une réflexion quant à la démolition de ces lieux dans les années cinquante à soixante-quinze. Cependant pour des raisons techniques et économiques ces campagnes de démolition ne seront jamais menées. Ces formes urbaines, les plans de conception et les problématiques qu’elles posent aujourd’hui sont les motifs de réflexion mobilisés dans ce mémoire. La compréhension de ces espaces, du contexte dans lequel ils

11 France se fait silencieuse à l’étranger et ceci s’explique par son absence aux débats internationaux. Les liens entretenus aux États Unis, au Royaume Unis, en Allemagne ou encore en Italie par exemple, contribuent à exclure un peu plus la France de ces réflexions sur l’évolution de l’architecture moderne durant les années Du1940/1950.pointde vue de la critique, le constat est complexe, du point de vue historique nous avons peu de recul sur le sujet. Les retours sur le sujet de la part des historiens et des architectes semble cependant unanime : ces opérations sont un échec et jugées médiocres, au point que le sujet ne forme même pas débat. On ressent une critique à son égard plutôt froide : ces architectures déracinent l’homme de la nature et de la ville traditionnelle. Dans les années 1980, point de basculement bascule vers la période contemporaine actuelle, la ville tend à s’adapter à l’Homme, à ses modes de vie, ce qui explique une critique très rude sur ce type d’opérations. Les quartiers sur dalle sont considérés comme des espaces « sans âme ». Tout architecte et urbaniste ayant participé à ces réflexions, à l’exception de Le Corbusier et des projections de la ville mobile et des mégastructures de Yona Friedman, sont vivement attaquées. Les architectures produites par ces deux personnes sont par ailleurs l’objet de nombreuses analyses et réflexions et forment un socle de pensée bien assise et un moteur de réflexion encore d’actualité. Le patrimoine sur dalle n’est donc pas un sujet de réflexion important ni à l’étranger, ni surtout en France.

Françoise Choay évoque ce type de sujet avec l’exemple des États Unis au travers d’écrits sur Le Corbusier, tandis que d’autres ignorent complètement le sujet. Les années soixante sont marquées surtout par le travail des architectes Kenzo Tange, Le Corbusier, Louis Khan ou encore le groupe Archigram. Cependant, aucune référence à ces opérations de dalle en France ne sont faites. En France, le sujet de tous les débats se concentre avant tout sur les grands ensembles. Françoise Choay en parle brièvement dans ses écrits et d’autres ouvrages se concentrent avant tout sur les questions de la mobilité en ville, des stratégies de transformation urbaines, de

il existe une exception, l’écrit de René Jullian, Histoire de l’architecture moderne en France, où il présente de telles opérations, notamment celle de La Défense comme un « témoin représentatif de l’architecture moderne en France5 ». Un peu plus tard, dans les années

l’hygiénisme, de l’industrialisation des villes, de l’avènement de la technologie en tant que puissance, de la place de l’Homme en ville, de la question de la crise du logement, de la création du zoning, de l’historicité du fait urbain, de la temporalité de l’homme dans la ville, de la densification des espaces, de l’étalement urbain et autres innovations typologiques. Ces sujets sont abordés au travers de rapports, comme celui de Colin Buchanan, un rapport britannique qui a son impact et un écho en France important. Ou encore au travers de livres et études menées par des architectes et urbanistes comme Eugène Hénard, Robert Fishman, Carol Willis, certaines écoles comme l’École Nationale des Ponts et Chaussées, Michel Ragon et Christine Hoara CependantBeauval.

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6 PICON LEVÈVRE, Virginie, Paris ville moderne: Maine Montparnasse et la Défense, 1950 1975 , Paris, 2000

5 JULLIAN, René, Histoire de l’architecture en France de 1889 à nos jours un siècle de modernité, Paris, 1984 1990, le silence règne et le peu de critiques visibles dénigre l’aspect commercial et anecdotique de telles opérations6 Les ressources disponibles sont donc plutôt minces et se basent avant tout sur des livres, des rapports, des articles de revues, des photographies et documents d’archives.

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PREMIÈRE PARTIE HISTOIRE DES OPERATIONS DE DALLe

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DALLE : 1959-1979

Urbanisme marquant de la fin des années 1960 notamment, l’urbanisme de dalle est la forme « moderne » de la ville. Il s’agit en effet d’une des formes urbaines développées dans un contexte de modernisation de la ville, en lien avec une volonté de séparer les flux de circulation pour résoudre les problèmes d’espace et de vitesse.

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L’urbanisme sur dalle apparait alors comme un « paradigme7 » de la ville de « demain ». En France, cet urbanisme avait vu le jour dans les années 1950, dans un contexte de rénovation urbaine. Ce contexte s’installe en raison d’un mouvement de population, qui se traduit par un éloignement du centre de la ville vers la périphérie, notamment à Paris. Ce mouvement est par ailleurs amplifié par la progression du secteur tertiaire, mais 7 KLEIN, Richard, MONNIER, Gérard, Groupe d'étude Histoire de l'architecture de la ville et du design, École Doctorale d'Histoire de l'art de l'Université de Paris I, Séminaire Archéologie du projet, ENSA Lille, ENSA aussi du mouvement pendulaire. En résulte alors le plan d’une rénovation urbaine et le développement de grands ensembles en périphérie de la C’estville. pour ces raisons que les opérations de dalle sont souvent assimilées à celles de la création des Zone Urbaine Prioritaire (ZUP). Nom localisationet Date créationde La Défense / Paris 1958 Front de Seine / Paris 1959 Le Mirail / Toulouse 1967 Villejean / Rennes 1968 MontparnasseMaine / Paris 1969 Les Olympiades / Paris 1969 La Villeneuve / Grenoble 1970 Val d’Argenteuil / Argenteuil 1970

CHRONOLOGIE DU PATRIMOINE SUR

Nancy, DESS Les pratiques européennes de l'architecture, Les années ZUP. Architectures de la croissance 1960 1973, Paris, 2002, 251.

FIG 1 : Liste des différentes dalles françaises classées par leur dates de L’urbanismecréation. de dalle se caractérise par une séparation des fonctions, par la création d’un espace en surélévation par rapport au niveau du sol naturel. La rue est donc laissée à l’automobile tandis que le niveau 8 KLEIN, Richard, MONNIER, Gérard, Groupe d'étude Histoire de l'architecture de la ville et du design, École Doctorale d'Histoire de l'art de l'Université de Paris I, Séminaire supérieur est dédié aux piétons. Le Corbusier, au travers de la Chartes d’Athènes, avait déjà cherché à créer un lien intrinsèque entre architecture et infrastructure ou encore architecture et urbanisme. Les initiateurs de ces opérations cherchaient de leur côté à répondre aux enjeux de la ville du XXe celui : ceux d’une ville qui « souffre de congestion automobile, manque de logements, est saturé d’habitations insalubres et n’offre pas d’espace adapté au secteur tertiaire et l’automobile 8 . » La quartier de la Défense à Paris en est le plus connu et le plus emblématique en France. Archéologie du projet, ENSA Lille, ENSA Nancy, DESS Les pratiques européennes de l'architecture, Les années ZUP. Architectures de la croissance 1960 1973, Paris, 2002, 253.

Les dalles de Bobigny / Paris 1971 Porte Bagnoletde / Paris 1971 La Source / Orléans 1972 Centre ville de Choisy le Roi 1973 Polygone / Montpellier 1975 Cergy Préfecture 1979 Meriadeck / Bordeau 1980 Val de Reuil 1981 Part Dieu / Lyon 1983

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CONTEXTE D’APPARITION DU PATRIMOINE SUR DALLE L’initiative des aménageurs de la seconde moitié du vingtième siècle est celle de créer d’immenses esplanades au dessus des axes routiers et ferroviaires afin de supprimer les ruptures qu’elles génèrent pour le piéton en ville. Ces terrasses ainsi créées seraient donc destinées aux piétons et à la création d’espaces publics, c’est ce que l’on appelle l’urbanisme de dalle. Cette idée commence à germer dès les années 1920 dans les concepts par l’urbanisme et l’architecture

18 FIG 2 : Principales réalisations d’urbanisme de dalle, HOAREAU BEAUVAL, Christine, Urbanisme de dalle. Urbanisme vertical : Entre utopies et réalités, Le Moniteur, Paris, 2019, 185.

19 modernes hérités du Congrés International d’Architecture Moderne (CIAM). C’est ainsi qu’architectes et urbanistes cherchent de nouveaux moyens pour agrandir et réorganiser les villes. L’objectif est de trouver le moyen architectural permettant de faciliter les déplacements des habitants, tout en sécurisant les flux automobiles et piétons en particulier. Le but est également celui d’apporter une réponse technique par le biais de croisement, séparation selon la vitesse, des principes de voieries qui suppriment la possibilité de faire demi tour, l’arrêt ou encore le stationnement. Du côté des piétons l’enjeu est de faciliter les trajets entre le domicile et lieu de travail. Cependant le concept de la dalle ne se borne pas à la gestion des flux, à 9 Actes du colloque des ateliers d’été de Cergy (auteur moral), TOMAS, François (coordinateur), GERMAIN, Annick, ALVAREZ MORA, Alfonso, MARSAN, Jean Claude, SÉNÉCAL, Gilles, DUFRESNE, Muchel, PARADIS, Renaud, LAPERRIÈRE, Rachel, FILION, Serge, URBAN SOLAND, Peter, GREENBERG, Ken, CAPRON, Guénola, MARIANI, la séparation des fonctions par le biais de sols reconstitués, de souterrains ou autres niveaux. Elle trouve des origines dans des réflexions menées au XVIIIe siècle, dans des traités militaires comme celui de Vauban à propos des édifices de défense. Selon le propos de Bruno Vayssière 9 , ces écrits y évoquent des principes de combats autour de lignes de défenses successives reliées entre elles par le biais de souterrains. Il évoque également l’apparition des ingénieurs des Ponts et Chaussées qui ont pour objectif de mener des recherches sur les possibilités qu’offrent le sol et l’urbanisme souterrain du point de vue des techniques constructives, de la circulation et de l’usage. Riccardo, PICON LEFEBVRE, Virgine, BONILLA, Mario, DE LAS RIVAS SANZ, Juan Luis, BELLI RIZ, Pierre, AZÉMA, Jean Louis, CLUZET, Alain FANZUTTI, Daniel, L’urbanisme de dalles : continuités et ruptures, Presses de l'Ecole nationale des ponts et chaussées, 1993, 189.

20 FIG 3 : Projection de la ville américaine en 1950, The Wonder City You may Live to See, dans le Popular Science Monthly, 1925.

21 Cette image a été choisie en raison de la pensée d’Harvey Wiley Corbett concernant l’évolution de la ville d’ici 1950. Cette image représente parfaitement la pensée de la structuration de la ville par le biais de l’utilisation des dalles : les villes utiliseraient des rues à plusieurs niveaux pour répondre à la surpopulation de cette dernière. Un niveau serait dédié aux piétons, deux autres pour la circulation automobile et le niveau le plus inférieur pour les trains électriques. Dans cette projection l’architecte y projetais même d’attribuais les toits des gratte ciels à des espaces de jeux, des écoles et des pistes d’atterrissages pour avions. Les années 1950/1960 sont particulièrement marquées par le développement des industries et des modes de travail, développant l’industrie automobile et ses chaines de production. Ainsi, la démocratisation de l’automobile impacte la société moderne par la demande de plus en plus importante d’infrastructure routière. De ce fait le paysage des villes va se 10 BARRÉ, Alain, Quelques données statistiques et spatiales sur la genèse du réseau autoroutier français, Annales de géographie, 1997, 229 40 métamorphoser pour accueillir en 1950, 2 310 000 voitures, 6 240 000 en 1960 et enfin 13 710 000 en 1970 10 . L’avènement du tout automobile et la dangerosité de ce développement vis à vis du piéton devient un axe majeur de la réflexion de la ville. La ville dans sa conception devient rapidement obsolète pour ce nouveau mode de déplacement qui devient de plus en plus populaire. Dès les années 1950 nous assistons alors à la modernisation des réseaux de transports afin de répondre à une toute nouvelle logique de flux qui sont en lien étroit avec la question de la vitesse et l’accessibilité en ville, points centraux traités dans les nouvelles politiques de déplacements. La mobilité est alors intégrée à la vie urbaine et modifie les échanges entre les individus, impactant les rapports espaces/temps et modifiant de ce fait les territoires. L’automobile est désormais un nouveau levier économique et de développement urbain. Cependant un tel développement induit des changements qui peuvent aussi être

22 perçus comme des nuisances qui impactent la ville. La mobilité devient alors très rapidement un vecteur de fragmentation urbaine, nuisant à l’espace public, au paysage et aux déplacements. Le réseau viaire devient très rapidement le moteur de ce que l’on appelle la diffusion urbaine et se traduit par une forme de périurbanisation. Serge Wächter le définit ainsi : « l’obsession de l’équipement routier, surtout dans les périphéries, a été un des ferments de la mort de la cité. Cette frénésie (…) a à la fois accéléré l’éclatement et la dilution urbaine qui ont sapé ce que certains appellent l’échelle humaine ou anthropologique de la ville, faite de proximité et de convivialité11 ». La question qui se pose alors est la suivante : comment peut ont protéger les piétons de l’espace qu’occupe la voiture ? C’est ainsi qu’en 1963 parait le rapport Buchanan, Traffic in Towns, qui au fil des lignes nous guide vers la création d’esplanades urbaines permettant de mieux sectoriser les 11 WÄCHTER, Serge, Trafics en ville. l’architecture et l’urbanisme au risque de la mobilité, Recherches, 2004, 163. flux : au sol, les voitures, en R+1 les piétons. L’idée est d’adapter la ville au tout nouveau réseau routier

FIGnécessaire.4:BUCHANAN,

Colin. D, Traffic in Towns, The specially shortened edition of the Buchanan Report, Penguin Special, 1963 C’est alors que l’on commence à construire des dalles au dessus du sol de la ville d’origine. La ville se stratifie désormais au dessus et au dessous : en hauteur les piétons, au niveau du sol dit « naturel »

23 l’automobile et au dessous les réseaux de distribution et le métro. Sur ce « sursol » les architectes ont alors choisi de développer de nouveaux logements et bureaux. La ville se construit ainsi sur plusieurs niveaux pour la rendre plus agréable, plus praticable, plus sécuritaire, supprimant tout danger ou nuisances générées par l’avènement de la voiture en ville. De cet urbanisme nait une dualité : celle de la critique dès les années 1970 et celle du sentiment d’appropriation des lieux par ses Leshabitants.dalles montrent cependant rapidement leur déclin, notamment à la suite des chocs pétroliers des années 1970, forçant à réduire les ambitions urbaines engagées. En même temps, l’envie de retrouver la ville au niveau de sol « naturel » se fait de plus en plus ressentir. La dalle est de moins en moins vue comme un élément permettant l’effacement des rupture liées aux axes routiers, elle en devient une, notamment en raison de son accessibilité souvent jugée fastidieuse pour les pratiquants de 12 PICON LEFEBVRE, Virginie, Paris ville moderne: Maine Montparnasse et la Défense, 1950 ces lieux. Les rampes et les escaliers déplaisent, les espaces sont jugés complexes par les visiteurs qui ne connaissent pas les lieux et qui doivent déambuler entre les divers équipements et la superficie des lieux font perdre facilement ses Durepères.point de vue sécuritaire, ces espaces sont difficiles d’accès pour tout type d’intervention et ces contraintes restreins l’accès aux lieux présents sur la dalle, ce qui génère cette sensation d’insécurité en raison d’une défaillance dans le maintien de la sécurité et de l’ordre, faute d’accès. Ces lieux sont également fortement critiqués pour leur aspect « inhumain, dangereux et inconfortable12 ». 1975 , Université de la Sorbonne, Paris, 2000, 17.

Le terme de « dalle » n’est pas employé lors du CIAM de 1933, ni dans la Charte d’Athènes formalisée et publiée par Le Corbusier en 1943, ni dans les textes des opérations menées dans les années 50 ou 60. Le terme de « sol artificiel » est utilisé pour la première fois par André Prothin, premier directeur de l’établissement public responsable de la construction de la Défense en 1968 : « sol artificiel à l’usage exclusif des piétons et constituant le rez de chaussée de la future ville (…) ». De nombreux écrits sur le sujet sont trouvables, mais il faut être en mesure différencier deux typologies : celle de l’urbanisme de dalle et celui de l’urbanisme souterrain, qui partagent pourtant des intérêts similaires13 . Une origine militaire Comme énoncé précédemment, nous avons pu constater que les réflexions 13 PICON LEFEBVRE, Virginie, Paris ville moderne: Maine Montparnasse et la Défense, 1950 1975 , Université de la Sorbonne, Paris, 2000, 17. sur l’urbanisme souterrain, des sols artificiels, ainsi que des doubles niveaux ont étés explorés dès le XVIIe siècle avec la création de l’école ingénieurs des Pont et Chaussés, en charge de la fouille des sols, puis par l’appréciation de leur capacité quant à la création d’une nouvelle forme d’urbanisme durant la période d’après guerre. C’est ainsi qu’au XVIIIe siècle, les ingénieurs militaires, notamment sous l’œuvre de Vauban, avaient pour rôle de remodeler les traits urbains de l’Europe et de diffuser les théories et les formes de l’architecture d’avant garde en période de reconstruction des villes. Ces villes évoluent par ailleurs, en même temps que les stratégies militaires par la création d’une forme de fortifications permettant de protéger la France de ces ennemis14 . Nous en conservons comme exemple les fortifications de Vauban, inscrites sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO, mettant en relief l’évolution des conceptions défensives de Vauban. 14 FICHET, Françoise, BUREAU, Jean, KAUFMANN, M, MINISTÈRE DE L'URBANISME ET DU LOGEMENT, Le corps des ponts et chaussées du génie civil à l’aménagement du territoire, Paris, 1982, 97.

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Origine du terme

25 FIG 5 : Table of Fortification, Cyclopaedia, Volume 1, 1728

26 Ces réflexions seront également menées, en opposition des ingénieurs et militaires, par le Groupe d’Études et Construction de l’Urbanisme souterrain (GECUS) chargé d’écrire des traités sur le sujet des sols artificiels et reconstitués beaucoup plus tard en 1933. Le GECUS est créé sur la base de trois constats alimentant la réflexion du groupe : « le chaos du sous sol, qui doit être jugulé par une gestion rationnelle des équipements ; l'encombrement de la surface, qui doit entraîner l'implantation de certaines fonctions en souterrain ; le risque d'agressions étrangères, qui nécessite la création d'abris pour la population et l'enterrement des usines stratégiques. Ces motivations évolueront tout au long de l'existence du GECUS, et, outre le manifeste, conduiront ses membres à faire des propositions concrètes d'aménagement et de gestion du sous sol, dans lesquelles toutes les contraintes sont prises en 15 BARLES, Sabine, GUILLERME, André, L’urbanisme souterrain, Presses universitaires de France Vendôme, Paris, 1964, 6. compte : techniques (mécanique des sols, génie civil), juridiques, économiques, humaines (habitabilité, psychologie), etc15 . »

De ces motivations en résulte la doctrine de l’inadaptation de la ville aux techniques nouvelles, les maux urbains n’étant pas nouveaux et nécessitant une réflexion d’urgence sur les questions d’hygiène, de logement, de circulation, de l’importance rôle du sol en ville. Ce groupe est connu notamment pour sa proposition de projets de circulation automobile sous Paris suite à son constat de la faible utilisation du sous sol de la capitale et de la congestion automobile constatée en ville. Un projet majeur émerge : celui d’un quadrillage d’autoroutes sous le dessin du projet de Jean Tschumi et Edouard Utudjian. Ce plan vient en opposition des ceintures radioconcentriques afin de création des points névralgiques reliés à la surface notamment au niveau des axes Denfert Rochereau>Sébastopol et Nation>Champs Élysées.

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Le projet propose une maquette représentant alors les trois couches principales de la ville : la surface du sol visible et lisible de la ville, les infrastructures telles que le métro et les égouts et enfin la grille souterraine proposée. Ces maquettes joueront finalement un rôle important dans la conception des voies du RER et des parkings parisiens.

28 FIG 6 & 7 : GECUS, Maquette, Les réseaux acquis dans le sous sol, 1937 / Maquette, Effet radiographique de la nouvelle grille souterraine, 1937

Le GECUS travaillera également sur le cas d’autres villes par l’expression de l’importance du développement de la pensée de la ville dans son épaisseur en travaillant la surface et le sous sol, en y créant des liens et lui offrant une importance. Cette importance se retrouvant dans l’utilisation des sous sols comme des lieux à support d’équipements urbains qui ne nécessitent pas la lumière naturelle, ainsi le sol visible serait dégagé pour d’autres usages. Le concept de la « ville épaisse » est avancé, l’interaction entre les différents niveaux apparaissant comme une nouvelle logique de conception de la ville. « L'élévation du niveau de vie, l'urbanisation, la rareté de l'espace, l'augmentation des déplacements, la consommation croissante de services engendrent de nouvelles in frastructures liées aux réseaux d'information, aux voies de

29 communication que les villes ne savent où installer : congestionnées, saturées, asphyxiées, elles n'ont plus que leurs dessous à offrir à ces activités gourmandes d'espace qui, par un effet boule de neige, en génèrent toujours d'autres16 . »

Nous constatons alors que la France se place en position de pionnière sur la réflexion de l’urbanisme souterrain. Notamment au travers des travaux d’Eugène Hénard pour commencer, puis Le Corbusier et enfin par le GECUS animé par Edouard Utudjian rendant le mouvement international. La charte d’Athènes D’autres facteurs ont cependant dû être pensées pour mener à la création des dalles comme nous les Enconnaissons.1933, est tenu à Athènes, l’assemblée des Congrès Internationaux d’Architecture Moderne (CIAM), qui donne 16 BARLES, Sabine, GUILLERME, André, L’urbanisme souterrain, Presses universitaires de France Vendôme, Paris, 1964, 3 naissance à la suite d’un rassemblement d’architectes et urbanistes, à une charte, qui apparait comme une ressource théorique majeure de son époque. Cette dernière est une synthèse de concepts permettant de créer une ville fonctionnelle, pensée pour l’homme. Elle est une mise en perspective des moyens pouvant être mis en œuvre pour remédier aux maux de la ville. Les solutions proposées incluent les principes que l’on retrouve dans l’urbanisme de dalle, notamment par le travail de la hauteur pour libérer la place nécessaire aux réseaux de communication et espaces de loisirs. Il s’agit de penser la « ville verticale ». La gestion des flux est un élément majeur abordé selon la théorie d’une ségrégation des espaces dissociant piétons et voitures. « Le principe général adopté est, selon les principes énoncés par Le Corbusier, la séparation totale de la circulation des piétons et de celles des véhicules17 » 17 TECHNIQUES & ARCHITECTURE, Aménagement de la région de la défense : région de la défense : plan de masse et plan des circulations zone A : chantiers de voirie. Les équipements commerciaux

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L’objectif est de proposer une ville fonctionnelle pour ses habitants, notamment à l’aide d’une réflexion autour de l’échelle des déplacements par une pensée de proximité entre son lieu de travail, de l’école pour les enfants, les commerces mais également sur les espaces de stationnement, jugés alors très importants en ville.

18 KLEIN, Richard, MONNIER, Gérard, Groupe d'étude Histoire de l'architecture de la ville et du design, École Doctorale d'Histoire de l'art de l'Université de Paris I, Séminaire Archéologie du projet, ENSA Lille, ENSA Nancy, DESS Les pratiques européennes de l'architecture, Les années ZUP. Architectures de la croissance 1960 1973, Paris, 2002, 263. libérer les sols au profit d’espaces verts et libres offrant plus de place pour créer des espaces de loisir. Pour répondre à ces objectifs d’assainissement de la ville, il est alors jugé nécessaire de détruire les quartiers jugés insalubres, alors remplacés par des espaces verts. Cette Charte permet également de « relever que la ville existante finit par coexister avec les nouveaux modes d’urbanisation préconisés 18 » agissant comme « une attitude réaliste qui estime impossible de supprimer la ville dense traditionnelle, ou d’un point de doctrine envisageant la réalisation d’une entité urbaine d’un nouveau type dont les caractéristiques ne sont pas encore pensés19 . » Ces caractéristiques se dessinerons finalement dans le rapport de Buchanan20 19 KLEIN, Richard, MONNIER, Gérard, Groupe d'étude Histoire de l'architecture de la ville et du design, École Doctorale d'Histoire de l'art de l'Université de Paris I, Séminaire Archéologie du projet, ENSA Lille, ENSA Nancy, DESS Les pratiques européennes de l'architecture, Les années ZUP. Architectures de la croissance 1960 1973, Paris, 2002, 263.

Le CIAM tombe également d’accord sur la question des conditions de vie, en décrivant une nouvelle manière de se loger : dans des espaces sains et ensoleillés.

L’idée est de faire de la ville, un espace où tout ce dont les citadins ont besoin se trouve à proximité de leur logement afin de réduire les temps de déplacement. La hauteur des éléments bâtis sont également discutés ainsi que leur espacement, dans l’objectif de du quartier de la défense zone B : Nanterre etc, n°29, Chez l’auteur, 1968, Numéro spécial 1, 73.

C’est alors que dès les années 1950, apparaissent les grandes opérations telles que les quartiers sur dalle en France. Ces lieux sont une réponse à la crise du logement en ville et répondent en grande partie aux théories de la Charte d’Athènes. « La Charte d’Athènes (…) a formulé les bases mêmes de l’urbanisme d’aujourd’hui donnant un départ plein de promesses (…) vivre aujourd’hui : point de vue technique, point de vue spirituel, solidarité des deux21 . »

déconnection avec le reste de la ville et du sol, menant alors à la destruction de quartiers entiers pourtant récents.

« Dans les années 60 s’opère un changement que nous sommes aujourd’hui seulement en mesure d’évaluer. D’une part, l’architecture moderne se diffuse dans le monde entier, d’autre part, elle perd son caractère de mouvement unitaire en abandonnant les caractéristiques des 50 années précédentes. Ce renversement s’exprime dans les faits bien avant d’apparaître dans les discussions théoriques (...) : la crise des associations d’architectes agissantes de ce demi siècle ; la mort des maîtres : les expériences conçues à grande échelle, qui soumettent à l’épreuve des faits les modèles d’agrégation étudiés précédemment ; le débat sur la ville 21 CANDILIS, Georges, Problèmes d’urbanisme, L’architecture d’aujourd’hui, Paris, 1965, 118.

Contexte des années 1950/1960

Cependant très rapidement nous nous rendrons compte que l’un des principes majeurs est laissé pour compte : celui de la place de l’Homme dans la ville. Ce dernier se perd dans l’immensité architecturale qui se dessine. La modernité commence à montrer des faiblesses et se montre parfois comme un signe d’échec, en raison de leur 20 Il s’agit d’un rapport rédigé par le groupe pilote et le groupe de travail créé par le Ministre des transports de Grande Bretagne.

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Cette charte continue par ailleurs à faire sens notamment du point de vue de la géographie, de la topographie, des enjeux liés aux site et à la ville.

32 ; les discussions sur les nouvelles tendances architecturales22 » Les années 1950/1960 sont donc un champ d’application des théories urbaines modernes dans le contexte de la reconstruction rapide des villes détruites par la guerre ou des villes qui se développent parallèlement à l’essor économique de cette période. En résultent de nombreuses visions du monde utopique de ce que sera la ville de demain. Il s’agit d’une période de remise en question des pensées modernes et notamment de la place de l’industrie dans la société. Nous constatons alors que l’architecture devient la plupart du temps une expression directe du modèle capitaliste. C’est par ailleurs, ce que de nombreux artistes et intellectuels reprocherons aux architectes, vus comme tributaires de la technoculture si souvent remise en Ilquestion.estimportant de comprendre ici que l’architecture moderne trouve son origine dans le fonctionnalisme : elle propose une ville qui se répartit sur les axes du travail, du transport, 22

BENEVOLO, Léonardo, Histoire de l’architecture moderne, 1987 du logement et du loisir. C’est ce qu’on appellera l’efficacité. La ville est alors une « machine dévouée à la libre circulation du capital, du travail, des matériaux et de leurs produits23 ». Les années 1950/1960, sont des décennies qui marquent par leurs nouvelles formes architecturales, le développement de nouvelles techniques de mise en œuvre. De manière générale les architectes vont alors s’emparer de la facilité de mise en œuvre, des nouveaux matériaux légers et travailler sur de nouveaux modes d’assemblages qui vont mener à la création d’immeubles préfabriqués. La construction préfabriquée, telle qu’utilisée dans la création de Grands Ensembles, suit un schéma de production en usines puis d’assemblage sur site. On appelle ces constructions industrialisées composées de panneaux de sols et muraux porteurs préfabriqués en béton armé de la « préfabrication lourde » ou encore « système de préfabrication lourde ». Les 23 WARK, McKenzie, New Babylon ou le monde des communs : L’actualité intemporelle du projet d’architecture utopique de Constant, Multitudes n°41, No 2, Cairn, 114.

33 marques créaient des ensembles complets, incompatibles avec d’autres chaines de production en créant des géométries propres et pouvaient être utilisés que sur un certain nombre de constructions avec un certain nombre de composants standards. Ce type de construction permettait de réduire le temps de construction et d’offrir un avantage financier du point de vue des matériaux utilisés mais aussi de la main d’œuvre nécessaire sur site.

Ces caractéristiques constructives devaient par ailleurs être intégrées au processus de la conception architectural en raison de leur flexibilité limitée. Ce système constructif a largement été appliqué en Europe occidentale et orientale24 . Nous pouvons commencer par parler du Plattenbau, qui signifie un assemblage à partir d’éléments de panneaux préfabriqués en béton, typique de la République Démocratique Allemande (RDA) Née en URSS entre 1920 et 1930, les panneaux préfabriqués furent dessinés à partir d’un module unique de six et trois mètres. Le format classique faisait alors trois mètres de 24 Matériaux de construction d’après guerre e.behttps://materiauxdeconstructiondapresguerr, long, et les formats carrés servaient à habiller la peau extérieure des bâtiments. D’autres, de six mètres, permettaient de concevoir des appartements de grande profondeur, et ainsi plus confortables. En Allemagne, on distingue trois types d’éléments de béton préfabriqué : les panneaux de revêtement, le béton architectonique préfabriqué et les panneaux sandwich. À partir des années 1960, le béton architectonique préfabriqué est adopté à travers tout le pays, afin de construire des immeubles de bureaux, des bâtiments résidentiels, jusqu’à de grandes tours de logements grâce à des panneaux muraux porteurs de la hauteur d’un Dèsétage.les années 1960, en Europe, les joints et connexions entre les panneaux peuvent prendre différentes formes. Fixés à l’aide de barres d’armature protubérantes, ils sont comblés de béton coulé sur Lesplace. éléments de façade sont généralement non porteurs et leurs ancrages en acier sont ajustables. À partir des années 1970, le développement de l’industrie et

34 l’augmentation de la construction en préfabriqué permettent de développer de nouveaux types de panneaux « sandwich » comprenant des matériaux isolants (comme le polystyrène) entre les couches de «béton.Généralement, les panneaux présentaient une superficie maximale de 0,1 m² ou ne mesuraient pas plus d’1 m de large ou de 5 cm d’épaisseur. Ces dimensions étaient calculées pour obtenir un poids d’environ 50 kg, de manière à permettre à deux ouvriers de soulever un panneau. Ce dernier se composait souvent de deux couches consécutives de béton : une couche de base et une couche de surface ou de finition extérieure, coulées relativement vite l’une après l’autre pour assurer la cohésion entre elles. La composition de la couche de surface était plus spéciale et onéreuse que celle de la couche de base en béton normal.

25 VAN DE VOODRE, Stephanie, Matériaux de construction d’après guerre dans Les joints horizontaux entre les panneaux étaient généralement remplis de mortier et/ou de mastic. Pour les joints verticaux, en particulier pour les panneaux un peu plus larges, plusieurs autres options furent élaborées. Si les panneaux avaient une rainure ou un creux sur le côté, ce creux pouvait être rempli de mortier fin. Les joints pouvaient également être ouverts, avec un scellant élastique au fond du joint. Les plus utilisés étaient des caoutchoucs synthétiques comme le Thiokol (à base de dichloroéthane et de polysulfure de sodium), le néoprène (chloroprène polymérisé) et le Butyl (un copolymère d’isobutylène et d’isoprène). Une troisième possibilité, quoique moins utilisée, reposait sur des éléments de connexion métalliques, comme des brides de connexion ou des profilés d’étanchéité expansés avec des bandes de recouvrement et des griffes de serrage, souvent complétés par un scellant élastique25. » l’habitation, à bruxelles 1945 1975, Vrije Universiteit Brussel, 2015, 375 376.

35 FIG 8 : MÜNZERG, Josef, l 464, large concrete panel building system, Barets system

Une caractéristique première du système Barets était sa flexibilité : les concepteurs pouvaient choisir la composition des matériaux, les finitions et les dimensions des éléments, ainsi que le schéma structurel des bâtiments projetés (avec ou sans cadres de portail)

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Pour citer d’autres exemple du point de vue de l’exportation à l’international il existe les système Coignet, Barets, Cauvet, Estiot, Traboca, Balency et Porte des Lilas.

Des dizaines d’autres systèmes ont été conçus en même temps au Royaume Unis, en Allemagne, aux Etats Unis, en Scandinavies et Europe de l’Est.

De là naît une nouvelle « conquête spatiale » qui vise à nourrir l’univers architectural et remettre en question la pensée architecturale du début du XXe siècle. La production de masse dans la ville devient alors le nouveau parti pris Enconstructif.parallèle, ce développe la communication de masse, de laquelle il va naître un changement d’échelle de la pensée de la ville, en mettant l’accent sur la question de réseaux, de la mobilité et de flexibilité tout particulièrement. La mobilité devient peu à peu la notion centrale du développement de la pensée de la ville, il est alors très important de penser aux déplacements motorisés et donc aux axes de communication à générer. Cette mobilité c’est le moyen de désancrer la pensée de l’habitant dans le territoire, de défixer les éléments. Un individu mobile sous entend une architecture et un urbanisme nouveau qui s’adapte à cette nouvelle capacité de se Cdéplacer.esont pour ces raisons que les architectes et urbanistes de ce temps pensaient avant tout à des habitats évolutifs, dynamiques, qui laissent aux individus le choix de leur organisation et même de leurs Onemplacements.remetl’homme au centre de l’attention avec des formes d’habitats qui déterminent un nouveau mode d’habiter et de se comporter entre individus. Cet urbanisme, nouveau né d’une éthique et d’une esthétique

La préfabrication lourde en France se fera plus tard, dans les années 1950, dont le premier système a été conçu par l’ingénieur Raymond Camus, qui sera breveté en 1948 et mis à œuvre à grande échelle, en faisant le symbole du préfabriqué « à la française » le plus connu. Il va donc sans dire que la France a été pionnière dans les système de préfabrications lourdes.

37 novatrices, permettrait donc dévier de la question de la fonctionnalité vers la ville et ses individus. À ce titre là les questions de mobilité, de stratification, de structure et de flexibilité sont vu comme éléments majeurs à développer. Le rapport Buchanan, 1963 Dans les nombreux rapports d’urbanismes publiés, le rapport Buchanan intitulé Traffic in Towns est l’un des plus utilisés en tant que support pour le développement des plans d’aménagement dans les années 1960/1970. Ce dernier fait écho à la Charte d’Athènes, il est à l’origine publié pour mettre en relief les conflits liés à l’automobile dans les villes britanniques. Le rapport se divise en deux parties : une première sur le constat du développement de l’usage de la voiture en ville et de son impact sur l’urbanisme à venir. Puis sur une réflexion qui s’adresse à des non techniciens par le biais d’illustrations concrètes, rendant le rapport plus accessible que la Charte d’Athènes.

Son rôle est de réduire le conflit entre la volonté de produire des espaces pour le piéton tout en conservant une accessibilité sécuritaire aux lieux en voiture. Nous en revenons à cette question de l’utilisation du sens unique, de l’interdiction du demi tour ou encore de stationner qui n’aident en rien à accéder simplement aux immeubles.

Pourbâtiments.répondre à ce paradoxe, le rapport a notamment recours au plan d’un hôpital, qui de plus, apparait comme une métaphore de la conception hygiéniste de la ville. L’organisation urbaine doit être complètement repensée et elle se fait sur la base du fonctionnement d’un immeuble.

L’analyse que propose le rapport se termine sur la notion d’environnement, qui met en exergue le paradoxe de la place que l’on veut laisser à l’automobile en ville. La favorisation du piéton face à l’accessibilité des voitures semble complexe. Ainsi, le rapport s’éloigne de la Charte d’Athènes qui tend à isoler la circulation sans chercher à modifier directement les accès aux

38 « Il n’y a pas d’autre principe à appliquer en matière de circulation urbaine, qu’il s’agisse d’une ville nouvelle construite sur un site vierge ou de l’aménagement d’une ville existante. On doit y trouver des zones d’aménagement agréable des « chambres » urbaines où les gens puissent vivre, travailler, faire des courses, flâner et se promener à pied à l’abri des dangers du trafic automobile ; il doit aussi un réseau routier complémentaire des « couloirs urbains » permettant d’assurer la distribution primaire de la circulation vers les zones d’environnement26 . » 26 BUCHANAN, Colin, Rapports du Groupe Pilote et du groupe de travail crée par le Ministre des Transports de Grande Bretagne de 1963, Rapport Buchanan, Trafic dans les villes : une étude des problèmes à long terme de la circulation dans les zones urbaines, H.M Bureau de papeterie, Royaume Unis, 1963, 41.

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FIG 9 : Schéma typique de la circulation d’un hôpital, d’après L’automobile dans la ville, Étude des problèmes à long terme que pose la circulation dans les zones urbaines, rapport du groupe pilote et du groupe de travail crée par le Ministre des Transports de Grande Bretagne, Imprimerie Nationale, Paris, 1965, illustration n°55, Bibliothèque de l’École d’architecture de Versailles.

40 Dans ce rapport nous y comprenons que l’architecture doit s’adapter aux flux. Ce qui diffère des préconisations avancées par la Charte d’Athènes qui elle rejette cette circulation et son impact sur l’architecture et l’avènement de Enl’automobile.somme, le rapport Buchanan propose de mêler architecture et infrastructure, en prouvant la viabilité de principes théoriques à différentes échelles. Il permet de l’impactmesurer de notre investissement dans l’automobile vis à vis du développement et de l’évolution des formes urbaines. Il est le moyen de mise en garde sur l’intérêt que nous avons à préserver l’environnement historique déjà existant par la rationalisation des circulations dans ces espaces déjà construits. Enfin, il fait l’apologie d’une nouvelle forme urbaine capable de résoudre les problèmes d’aménagements relevés par le biais d’interventions mixtes sur de l’existant et des opérations Lorsnouvelles.de sa publication, les principales opérations de dalle en France comme La Défense et le Front de Seine ont déjà commencé. Ce rapport constitue cependant le premier écrit à fixer les grands principes et l’idéologie du dispositif urbain de la dalle au travers d’analyses, d’apports théoriques et pratiques sur la base d’opérations menées dans les villes britanniques. Il est la synthèse des réflexions menées sur la ville et son implantation au sol durant les années Desoixante.nombreux éléments de ce rapport prennent leur source dans des projets dits utopiques et dans des images de propositions de concours, ayant jeté les base de cet urbanisme. Les zones à urbaniser en priorité L’origine de la création de ces zones remonte aux années 1950, où la production de logements et d’équipements sont d’une urgence capitale à l’échelle nationale. À cet instant, les pouvoirs publics privilégiaient de fait le quantitatif pour répondre à la crise du logement qui pesait, faisant des grands ensembles une architecture aux techniques constructives faisant appel à l’industrialisation, menant à une production rapide et de piètre qualité.

41 L’idée derrière la création de ces quartiers était aussi de construire plus près des centres urbains existants, mais sur des sites vierges de construction et aérés. C’est pourquoi bien souvent, les Zone à urbaniser en Priorité (ZUP) sont situées sur des plateaux. Ces opérations urbaines viennent alors marquer la rupture avec la période de la fin de la reconstruction et le lancement des grandes opérations d’urbanisme des années Lessoixante.ZUP sont issues d’une procédure administrative d’urbanisme opérationnel menée entre 1959 et 1967. Ces opérations voient alors le jour par ordonnance le 31 décembre Les1958.ZUP seront par ailleurs les prédécesseurs de ce que nous appelons les Zones d’Aménagement Concerté (ZAC) 27 « Article 1 Dans les communes et agglomérations où l’importance des 27 KLEIN, Richard, MONNIER, Gérard, Groupe d'étude Histoire de l'architecture de la ville et du design, École Doctorale d'Histoire de l'art de l'Université de Paris I, Séminaire Archéologie du projet, ENSA Lille, ENSA Nancy, DESS Les pratiques européennes de programmes de construction de logements rend nécessaires la création, le renforcement ou l’extension d’équipements collectifs, un arrêté du ministère de la Construction peut désigner des zones à urbaniser par priorité, dont chacune doit avoir une superficie suffisante pour contenir au moins cinq cents logements, avec les édifices, installations et équipements annexes28 . » Elles se composent de logements, commerces et d’équipements publics permettant de répondre à un manque de logement constaté et offrant ainsi à la ville de nouveaux quartiers dynamiques. Il s’agit d’une forme de « politique de la ville » mise en œuvre dans le cadre du renouvellement urbain mis en œuvre par l’agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), dans le cadre d’un programme national. En raison du contrôle des constructions par le Ministère de la Reconstruction et de l’Urbanisme l'architecture, Les années ZUP. Architectures de la croissance 1960 1973, Paris, 2002, 23. 28 Décret d’abrogation des ZUP, Décret n° 58 1464 du 31 décembre 1958

30 MERLIN, Pierre, CHOAY, Françoise, Dictionnaire de l’urbanisme et de l’aménagement, Stater et gordon PUF, Dictionnaires Quadrige, 1988, 829.

42 (MRU), les financements étaient alors complexes et répartis entre les propriétaires des sols, les promoteurs et les habitants. L’État a par ailleurs mis à disposition des systèmes d’aides financières et des réserves

constitue une procédure d’exception qui déroge au droit commun des sols Afin de prévenir de la spéculation foncière, le droit de préemption est d’ailleurs instauré par la loi du 26 juillet 1962, avec la création, « dans les mêmes formes que les zones à urbaniser en priorité, des zones d’aménagement différé [ZAD]» 29 ». Elles sont aussi une tentative de rationalisation de cette forme urbaine par une concentration des efforts sur l’équipement, la maîtrise foncière et la réduction du caractère de « cités dortoirs » des grands ensembles30 . Artificialisation des sols

Le sol est un des éléments techniques les plus contrôlés et remis en question dans la ville. Ainsi, la rationalisation de la circulation automobile et sa place en ville est un enjeu de taille. La stratification des espaces de circulation et des équipements par le biais de la création de dalles est ainsi une étape très importante dans le développement urbain.

FIGfoncières.10:

MARTIN, G, Résidence Cormontaigne, Thionville, vue d’ensemble, s.d., Archives de l’Institut Français d’Architecture, Fonds Jean Dubuisson, 224 IFA 1005/4. Doc. IFA, Paris Elles ont servi à la régularisation des grands ensembles construits dans les années cinquante hors de tout cadre règlementaire : « fondée sur une assiette foncière unique, elle 29 RATOUIS, Olivier, TISSOT, Sylvie, Énoncer, découper, valoriser, VESCHAMBRE, Vincent, Géographie sociale, Rennes, 2016.

Le sol se veut praticable, avec un accès aux réseaux simple. Ainsi, les piétons bénéficient de zones sécuritaires où circuler et les automobilistes circulent sur une chaussée sans aucune interférence. Les bâtiments quant à eux prennent une toute nouvelle indépendance face à la circulation. L’artificialisation des sols est une porte ouverture à une nouvelle manière de penser l’architecture et Cependantl’urbanisme.le développement des opérations de dalle suggère un abandon de la vie urbaine pittoresque au profit d’une circulation fluide et sécurisée. La place de la nature est également un support à réflexion. En effet, le sol est le socle de la ville, l’environnement est totalement lié de ce type d’opération par la création de trottoirs, de rues bitumées et l’imperméabilisation des sols. La pollution prend alors place et le caractère de l’environnement proche du site est complètement rejeté par le quartier.

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44 Utopie ou réalité ? En France, il s’agit d’un urbanisme « opérationnel », en continuité de l’urbanisme de la période de reconstruction après la seconde guerre mondiale. C’est une réponse à une recherche « d’économie d’échelle », suite à un manque de logements en ville et au besoin de la création de bureaux dans le secteur Detertiaire.cesconstats

nous allons observer au travers de divers projets les propositions émises tant bien du côté Français mais également du côté Américain. modernisme français inspiré des américains ? un urbanisme radical et révolutionnaire Les architectes comme Howard, Le Corbusier ou encore Wright, attentifs aux maux que présentaient la ville et sa société ont pensé à une nouvelle conception de la ville par la création d’un nouveau type de cité. Il s’agit alors d’un remède à un 31 FISHMAN, Robert, L’utopie urbaine au XXe siècle, édition Pierre Mardaga, Liège, 1980, 9. devenir critique de la civilisation si aucune action n’est entreprise par les architectes et urbanistes de l’époque, pour faire évoluer les modes de vie observés par les habitants des grandes villes. La crise urbaine et sociale à laquelle ils font alors face a pourtant une solution qui s’offre à elle : celle de reconstruire radicalement la ville, d’en créer d’autres sur un tout autre modèle : novateur et à l’écoute des besoins nouveaux sociétaux. Le projet de la création de la cité idéale voit lors le jour.

« Le moment était venu d’élaborer les programmes d’ensemble, et de repenser complètement les principes de la planification urbaine31 » Les innovations techniques et technologiques ont permis de faire de grands pas en avant dans la conception urbaine des nouvelles villes. Les grattes ciels ont fait leur apparition, comme le train express ou encore la voiture. Des modes de déplacement impliquant une croissance importante des grandes villes mais aussi offrant une

45 possibilité de décentralisation comme Wright a pu l’explorer. Tandis que Le Corbusier a plutôt profité d’une avancée technique architecturale pour proposer la « rue verticale », par la création de grattes ciels, promouvant le parti pris d’une densification de la ville nouvelle. Voici donc une des premières réponses, drastique, à une situation d’urgence. La ville doit ici cesser d’évoluer progressivement mais proposer une transformation complète du paysage urbain connu jusqu’alors. De ce constat nait alors le concept des trois cités idéales, exposant de nouveau fondamentaux théoriques porteurs de la création d’un nouvel urbanisme radical et révolutionnaire. On peut y découvrir l’idée de la cité jardin développée par Howard, celle de la Broadacre City de Wright ou encore celle du Corbusier avec la création du Plan Voisin et de la Ville radieuse.

33 Simplifier et recréer une ville ne peut être une réponse à la mutation sociale, aux différences sociales, politiques et économiques auxquelles les villes font face.

Les idées développées sont novatrices, pensées dans un objectif de développement basé sur l’humain et non sur une politique économique avérée mais a fini par s’avérer être

33 FISHMAN, Robert, L’utopie urbaine au XXe siècle, Pierre Mardaga, Bruxelles, 1980, 203.

32 FISHMAN, Robert, L’utopie urbaine au XXe siècle, Pierre Mardaga, Bruxelles, 1980, 203. une totale désillusion. Leur pensée dépasse alors les capacités humaines et technique, les systèmes proposés sont hors d’échelle, trop radicaux. Mais elle pose aussi des problèmes de faits sociaux : créer une harmonie sociale parfaite n’est pas possible. Chaque homme est différent et la « diversité humaine » 32 incontrôlable. Craindre cette diversité par ailleurs relève du « refus d’accepter la vérité inconfortable que conflit et désordre sont inévitables dans toute société ».

LA VILLE FUTURE - UNE SOLUTION HARDIE AU PROBLÈME DE LA CIRUCLATION

34 TRUONG, Nicolas, L’hégémonie culturelle, mère de toutes les batailles politiques, Le Monde, 2019.

35 MASSU, Claude, Les imaginaires de la ville, entre littérature et arts, Entre littérature et arts, Rennes, 2007, 105 12. (ce qui équivaut aux années folles en France), un univers tout à fait utopique et imaginaire voit le jour. Il s’agit de projections américaines expérimentales, qui ont pour vocation d’être par la suite reproduites en Europe une fois le « modèle » fixé et fonctionnel. L’idée dominante aux États Unis à cette période, est d’imposer une hégémonie culturelle, plaçant leur pays au devant de la scène internationale, leur assurant une position de force politique dans le C’estmonde.donc en 1910, dans cette quête du pouvoir, qu’Harvey Wiley Corbett dessine son projet de la rue future, où il y présente une ville moderne, pensée essentiellement pour résoudre les problèmes de circulation à l’ordre du jour, par un système « d’étagement de réseaux de communication36 . »

46 HARVEY WILEY CORBETT :

Unis à l’époque est celui d’imposer une hégémonie culturelle 34 , plaçant leur pays au devant de la scène internationale, leur assurant une position de force politique dans le monde. Se dessine alors le projet d’une ville moderne, pensée essentiellement pour résoudre des problèmes de circulation à l’ordre du jour, par un système d’étagement de réseaux de communication35 . Cette deuxième théorie s’inscrit dans le contexte des “roaring twenties”

L’objectifexpérimentales.auxÉtats

36 MASSU, Claude, Les imaginaires de la ville, entre littérature et arts, Entre littérature et arts, Rennes, 2007, 105 12.

Ce concept a également été exploré par Harvey Wiley Corbett, lors de sa création d’un univers utopique dans le cadre de projections

47

FIG 11 : WILEY CORBETT, Harvey, Étude de circulation, pour le plan régional, The skyscraper museum, 1924.

C’est par ailleurs en 1922 qu’ils commencèrent une étude sur les exigences réglementaires new yorkaises dans le but de proposer une nouvelle forme de structuration de la ville, plus rentable. Leur collaboration montrera alors les aspects positifs du zonage sur les nouveaux gratte ciels mais aussi pour la métropole future.

Leur exposition a donc mené à la création d’un « Urbanisme visionnaire 38 » marqueur de son temps et influenceur d’autres 37 WILLIS, Carol, Les gratte ciel de l’avenir, l’urbanisme visionnaire des années vingt, Centre de recherche sur la culture technique, Neuilly sur Seine, 1993, 151.

architectes et urbanistes de leur période et des années à venir. Leurs pistes de réflexions ont continué à être travaillées, approfondies et à évoluer du côté de leurs successeurs.

38 WILLIS, Carol, Les gratte ciel de l’avenir, l’urbanisme visionnaire des années vingt, Centre de recherche sur la culture technique, Neuilly sur Seine, 1993, 154

Il est important de savoir que les recherches menées par Harvey Wiley Corbett et Hugh Ferriss ont eu en Amérique, un grand rôle dans les évolutions urbanistiques et les implications formelles des nouvelles lois relatives au zonage.

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Harvey Wiley Corbett travaillera à la suite de son exposition La Ville des Titans (1925) sur la séparation des voies de circulation tandis que Hugh Ferriss travaillera sur le projet de créer des « immeubles d’habitation édifiés sur des ponts37 . »

49

FIG 12 : HÉNARD, Eugène, La « Rue future », coupe : la verticalité des bâtiments est exploitée autant dans la strate aérienne (terrasses et plateformes) que dans la strate souterraine (évacuation des déchets, transport des personnes et de marchandises), The Cities of the Future, publié dans American City, Janvier 1911.

EUGÈNE HÉNARD : LA RUE FUTURE

41 CHAUBARD, Lou, Le Quartier de la Défense à Paris, ENSAG Grenoble, Grenoble, 2020 41.

50 Toujours dans un constat de l’évolution, de la Science et de l’Industrie modernes, Eugène Hénard a été l’un des précurseurs de la création des « Villes de l’Avenir 39 ». Son constat critique sur les pathologies de la ville de son époque ont pour sujet principal la rue mais aussi la question de la gestion de Hénardl’hygiène.dans son étude de la ville du futur, pense avant tout à la gestion des nouveaux modes de transport. Cela se traduit par « la séparation des flux véhicules/piétons que l’on peut observer dans son travail avec sa proposition de la Rue Future en 191040 . » Il propose une séparation verticale des flux piétons et véhicules, en offrant un nouveau sol qui accueille par la même occasion, sous sa toute nouvelle infrastructure, les flux techniques comme les tuyaux d’eau, de gaz, les conduits de ventilation ; le métro, les eaux putrides et 39 HÉNARD, Eugène, Études sur les transformations de Paris, Formes urbaines, L'équerre, 1982, 347. 40 HÉNARD, Eugène, Études sur les transformations de Paris, Formes urbaines, L'équerre, 1982, 347. stérilisées, le réseau de câbles électriques. Ces réseaux permettent d’assainir la ville. La séparation des flux quant à elle permet de prévenir l’étalement urbain par la pratique de la Uneverticalité.voieà grande circulation fait également son apparition pour gérer encore plus facilement les flux. Le premier niveau serait dédié aux piétons et aux voitures, le second aux tramways, le troisième aux conduits techniques et le quatrième au transport de marchandise 41 . (écrit basé sur l’ouvrage : Études sur les transformations de Paris et autres écrits sur l'urbanisme, Hénard, 347 454). Nous assistons là, à la naissance du concept du quartier sur dalle, répartissant les flux techniques et humains sur différentes couches dans un soucis de praticité spatiale et hygiénique de la gestion des espaces construits.

51 LE CORBUSIER : LA VILLE RADIEUSE ET LE PLAN VOISIN Il s’agit d’une proposition urbaine pour le développement de Moscou, à Bruxelles, dans le cadre du CIAM III, en 1930. On y retrouve le dessin d’une « ville dense, concentrée, régie notamment par des principes de circulation, la séparation des fonctions et l’application de règles hygiénistes pour l’habitat la trilogie “air son lumière42 ». Résultant d’une série de recherches commencées en 1922, ce projet est un développement de principes progressistes, avec comme idée majeure de remplacer la « ville ancienne par une ville nouvelle43 ». 42 MARCHAND, Bruno, La Ville Radieuse de Le Corbusier : les paradoxes d’une utopie de la société machiniste, Université de Lausanne, Lausanne, 2016, 16. 43 MARCHAND, Bruno, La Ville Radieuse de Le Corbusier : les paradoxes d’une utopie de la société machiniste, Université de Lausanne, Lausanne, 2016, 16. 44 MARCHAND, Bruno, La Ville Radieuse de Le Corbusier : les paradoxes d’une utopie de la société machiniste, Université de Lausanne, Lausanne, 2016, 16. La ville radieuse, c’est une ville contemporaine, logeant trois millions d’habitants, composé de grattes ciels, de plates formes multimodales, le tout implanté sur un sol vaste et libre, composé d’immenses parcs. On observe une séparation des fonctions par une organisation spatiale stricte, régie par un « schéma linéaire 44». À l’image de sa pensée capitaliste45 , la ville s’organise de la manière suivante : d’un côté la cité d’affaires, au centre les habitations et de l’autre le monde de l’industrie. Ceci plaçant au cœur de la réflexion, la pensée humaniste de la ville 46 , si représentative des années 30. Selon les mots de Françoise Choay, Le Corbusier a donc ici proposé une utopie d’une « ville vivante, totale, 45 Ce terme est utilisé pour parler de la demande de production architecturale notamment avec la construction des Grands Ensembles durrant la période des 30 Glorieuses.

46 La création de ces constructions est alors un moyen de développement rendant les habitants de la ville plus autonomes et libres, ce qui induit un confort individuel non négligeable qui met l’Homme au cœur de la nouvelle ville.

48 MARCHAND, Bruno, La Ville Radieuse de Le Corbusier : les paradoxes d’une utopie de la société machiniste, Université de Lausanne, Lausanne, 2016, 16.

52 fonctionnant avec ses organes qui sont ceux de la société machiniste47 » (Le Corbusier, 1964). Ce qui va de soi puisqu’il met en avant par ce travail, une théorie où la mobilité, l’habitat, la santé et l’homme sont le centre de l’attention. 48 En effet, les mobilités tracent la ville et la régissent, transforment le rapport au territoire. Ce projet s’inscrit dans l’optique de proposer des services de transports publics qui relient les zones industrielles aux Duhabitations.côtédes habitations, on peut observer qu’elles sont orientées sur “l’axe héliothermique” (production de la chaleur par l’énergie solaire), ce qui met en avant les préoccupations hygiéniste, novatrices de l’époque.

FIG 13 : LE CORBUSIER, Le Plan Voisin pour le redéveloppement de Paris, 1922 47 CHOAY, Françoise, L’urbanisme, utopies et réalités : une anthologie, Point Essais, Paris, 2014, 108.

Le Plan Voisin c’est l’application « concrète » de la théorie de La Ville Radieuse sur le cas de Paris en 1925. Il s’agit d’une proposition qui suggère de faire tabula rasa d’une partie de Paris.

L’idée principale du Plan Voisin est de faciliter les déplacements, trouver un logement rapidement et ouvrir Paris sur la France.

Le but est de faire de cet espace un quartier d’affaires, entourés d’espaces verts et reliés par d’immenses autoroutes.

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Ce plan proposait une utilisation de 5% des sols pour ce qui est de la surface bâtie, tout le reste aurait été réservée à la création d’espaces verts et des espaces de stationnements. Des barres d’habitation avaient également étés pensées à proximité des bureaux pour réduire les temps de trajets pour les travailleurs. En périphérie de la ville, le secteur industriel pointait avec sa zone résidentielle qu’on appelait alors “les cités jardins” 49 GRÉBERT, Christophe, CAUE95, Histoire de Puteaux : La Défense imaginée dès 1922 par Auguste Perret , Puteaux, 2008 AUGUSTE PERRET : LES MAISONS TOURS DE LA DÉFENSE A PARIS Dans le cadre de cette projection urbaine, nous sommes face à la toute première proposition d’aménagement du site de La Défense... En effet, ce célèbre quartier n’a pas été pensé en 1950 contrairement aux idées reçues, mais bien avant, en 1922, par l’architecte Auguste Perret. Il présente dans cette tout première projection, l’idée des « Maisons Tours ». Il s’agit d’un projet qui repose sur la construction d’une centaine de tours de 200m de hauteur (nous noterons que son dessin fait référence aux tout nouveaux gratte ciels new yorkais par leurs formes et leur hauteur), avec comme axes principaux la création d’une grande avenue allant de la Porte de Maillot à la Croix de Noailles ; ce qui revient à traverser les communes de Neuilly, Puteaux et Nanterre, territoires sur lesquels La Défense telle que nous la connaissons, prend place49 .

54 Le principe de ce dispositif urbain était de ceinturer Paris par ces constructions, le tout en développant une voie de circulation, aujourd’hui connue comme le boulevard périphérique parisien. Ce concept renvoie à une pensée fonctionnelle bien ancrée dans son époque, mais également a la volonté de répondre aux problématiques liées à l’extension de Paris vers sa banlieue50 . Ce travail renvoie par ailleurs à tous les problèmes rencontrés lors du développement des tours à la Défense et des enjeux encore plus contemporains concernant les réglementations quant au développement du Grand Paris (notamment du point de vue de la hauteur des constructions à venir).51 En parallèle de cette proposition, on retrouve les travaux de Le Corbusier avec la Ville Radieuse et le Plan Voisin. 50 CHIRARCHE, Emmanuel, Quand Paris faillit devenir New York L’avenue des Maisons Tours, Time Out Paris, Paris, 2014.

Cette ville verticale pensée en 1924 est une utopie fonctionnaliste, utilisant un principe de zoning, avec des espaces de travail et des habitations liées dans le but de réduire l’utilisation des moyens de Latransport.Höchstadt c’est une ville industrielle, composée de « simples corps géométriques : cube et sphère, prisme et cylindre, pyramide et cône, éléments purement plastiques, qui forment la base de toute architecture 52 ». Cette organisation stricte de l’espace, c’est l’essence même de la création de cette utopie. L’axe majeur de développement de cette ville est celui de construire à la verticale avec des tours d’immeubles permettant aux habitants de se loger au dessus de leurs lieux de travail. Du point de vue des circulations, la ville future met en avant un espace 51 GRÉBERT, Christophe, CAUE95, Histoire de Puteaux : La Défense imaginée dès 1922 par Auguste Perret , Puteaux, 2008.

52 CHAPON, Axelle, LECLERCQ, Elena, VANZATA, Nadège, La Cité verticale de Ludwig Hilberseimer Histoire des arts LBA, Histoire des Arts, Lycée Bertrand d’Argentré, 2015

LUDWIG HILBERSEIMER : LA HÖCHSTADT (LA VILLE VERTICALE)

Ce projet est en quelque sorte un écho au travail du Corbusier avec le Plan Voisin. Il apporte ici des solutions plus fonctionnelles en proposant une nouvelle organisation, un zonage à la verticale et une nouvelle manière de se déplacer. Il vient donc penser à contre pied de Le Corbusier, qui lui pensait ces villes de manière horizontales, laissant les piétons au sol et les voitures en hauteur sur des autostrates (Le Corbusier) 53 . FIG 14 : AURELI, Pier Vittorio, Architecture for Barbarians: Ludwig Hilberseimer and the Rise of the Generic City, AA Files, no 63 (2011): p.14.

53 CHAPON, Axelle, LECLERCQ, Elena, VANZATA, Nadège, La Cité verticale de Ludwig Hilberseimer Histoire des arts LBA, Histoire des Arts, Lycée Bertrand d’Argentré, 2015

55 régulé par un système de répartition des flux sur différents niveaux : les routes sont donc séparées des accès Souspiétons.ces routes, au niveau du sol, Hilberseimer développe un espace vide, où nous y retrouvons les notions du courant hygiéniste. Y prennent donc place tous les réseaux d’eau propre, de gaz, de traitement des eaux usées, des conduits de ventilation mais aussi le métro.

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DES FLUX DE TRANSPORTS

FIG 15 : NEUTRA, Richard, Rushed City, 1923 54 J.CORN, Joseph, HORRIGAN, Brian, CHALBERS, Katherine, Yesterday’s Tomorrows : Past Visions of the American Future, Johns Hopkins University Press, Baltimore, 1996, 39.

De retour du côté américain, nous y retrouvons Richard Neutra, qui après de nombreuses recherches sur le développement des villes contemporaines et de leurs problèmes, déménagera finalement en 1923 aux États Unis, pays où il présente en 1928 sa ville idéale appelée “rush city reformed”. Il s’agit d’une ville où la circulation efficace des véhicules est l’essence du projet. Effectivement, dans ses plans et perspectives, d’immenses dalles composées de grandes artères dédiées d’un côté aux automobilistes et de l’autre aux voies à grande vitesse fleurissent un peu partout. On y observe des tours toutes orientées vers ces axes routiers, qui sont alors placé au centre de l’image et donc de Lal’attention.voiture étant au centre du projet, nous pouvons constater que la vie humaine à l’air d’avoir du mal à trouver sa place54 ...

L’OPTIMISATION

RICHARD NEUTRA : RUSH CITY REFORMED :

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HUGH FERRISS : LA VILLE IDÉALE SELON LES ZONING LAWS En 1929, Hugh Ferriss, publiera dans The metropolis of Tomorrow, l’image idéale qu’il avait de la ville dans l’avenir. Dans cette métropole, il propose une vision où la forme, les volumes et la masse sont au cœur du travail. Il aborde également la problématique des Zoning laws, causés par la croissance rapide des gratte ciels à NY. Les immeubles qu’il dessinera alors répondront à ces contraintes définies par la loi de 191655 . « L’imaginaire métropolitain » de Hugh Ferriss prend place à New York entre 1916 et 1962. Dans le contexte de l’applications des premières Zoning Law, l’immobilier est fortement touché par cette nouvelle loi destinée à « rationnaliser la course aux hauteurs et à l’hyperdensification 56 ». Le contexte met en avant la croissante, l’accélération des mobilités, la congestion marquée et des 55 Exposition BNF, Utopie La métropole de l’avenir. 56 ROSEAU, Nathalie, L’imaginaire métropolitain de Hugh Ferriss, Documents d'architecture, no°4, Marnes, 2016, 191. architectes qui tentent de produire des architectures qui répondent aux nouvelles règles. Cet imaginaire métropolitain que construit Hugh Ferriss se base sur l’observation des mutations urbaines et des possibilités qu’elles offrent. Dès 1922, lui et Harvey Wiley Corbett, commenceront des études théoriques sur ces nouvelles exigences règlementaires dans le but d’appliquer les contraintes à des structures dites rentables. Leurs théories visent à montrer que ce zonage influence positivement le style des gratte ciels et projettent la métropole future. Hugh Ferriss déclarera « nous n’envisageons pas la nouvelle architecture d’une ville mais la nouvelle architecture d’une civilisation57 ».

57 WILLIS, Carol, Les gratte ciel de l’avenir, l’urbanisme visionnaire des années vingt, Centre de recherche sur la culture technique, Neuilly sur Seine, 1993, 18.

du Plan Voisin, comme dans le quartier Mériadek à Bordeaux, montre une forme de discontinuité entre la ville ancienne et la ville nouvelle. Nous y constatons alors une fracture urbaine et architecturale, poussant la population à laisser ces espaces vacants. La dalle ayant comme objectif premier de révolutionner et répondre à de nouveaux modes de vie humains, elle n’a pas réussi à s’inscrire comme une réponse pérenne. La dalle ne se montre pas assez flexible face à la mutation de la ville et des besoins de la population quant à son appropriation de l’espace. Ces lieux sont contournés ou abordés uniquement si le passant doit s’y rendre pour un besoin précis. Ainsi l’accès au bâti doit bien souvent être repensé et présente des problèmes d’utilisation du sol et du sursol. MERIADECK BORDEAUX Le maire de Bordeaux, Jacques Chaban Delmas, en 1946 prends immédiatement le cas du quartier insalubre de Mériadeck en considération. Profitant des pkans de reconstruction, d’urbanisation et de rénovation mis en place alors par le gouvernement il projette l’idée de reconvertir ce quartier en un espace moderne avec des logements modernes et sains. En 1951 est finalement décrété qu’il impossible de conserver le quartier en l’état car jugé trop insalubre et par manque d’hygiène ; sa démolition est alors décrétée. Les premières études du quartier sont alors réalisées en 1955 sur décision du Conseil municipal de Bordeaux. La période de

L’allure brutaliste, le préfabriqué et le béton pèse visuellement, il est dense, morne et ne séduit pas la L’applicationpopulation.

58 DySTOPIE UN URBANISME FORTEMENT CRITIQUÉ

Malgré l’engouement autour du développement des quartiers sur dalle au début des années soixante, les critiques ne mirent pas longtemps à se produire, jusqu’à mettre un terme à ces opérations de rénovations urbaines.

Le problème est tout d’abord formel : l’urbanisme construit est en rupture totale avec la ville ancienne, la population qui y vit n’est pas satisfaite des modes d’habiter et de la circulation dans ces zones.

59 reconstruction est toujours en cours bien que moins urgente. Ce quartier s’inscrit dans le cadre de la loi du 1er août 1957 et l’ordonnance du 31 décembre 1958 qui imposent de nouveaux plans d’urbanisme et définissent de nouvelles politiques du patrimoine immobilier. Cette conservation devient un enjeu avec la loi Malraux en 1962. A l’origine Mériadeck est un quartier concerné par la création de logements. L’architecte en chef est alors M. Jean Royer. Le projet est celui d’un ensemble de logements sur la forme de tours et de barres d’immeubles, formant marquant du besoin de créer de l’utile et dans la précipitation. L’idée de construire sur une dalle en béton émerge alors avec cette idée de séparation des flux automobiles et piétonniers. Finalement, en 1965, le contexte change, Bordeaux devient un « métropole d’équilibre » et se 58 DOCOMOMO, Fiche DOCOMOMO 01, Bordeaux Meriadeck Fiche générale quartier moderne de l’hotel de ville, retrouve dans une position où elle doit favoriser le développement d’activités nouvelles importantes à l’aide de subventieons liées à des activités tertiaire, de la recherche publique et privée ainsi que des services bancaires. Le plan initial est alors jugé trop petit et devient alors une opération de grande envergure, considérée comme l’une des plus ambitieuses de France avec la Part Dieu à Lyon. Les urbanistes en chef de ce projet seront alor Jean Willerval et Paul Lagarde. Dans l’établissement de leur nouveau plan urbain, ils remplacent les constructions de Jean Royer par des constructions en croix, en référence au travail de Le Corbusier en 1922 : le Plan Voisin. En 1970 les permis de construire sont alors déposés et la dalle terminée dix ans plus tard58 . es/2018https://www.docomomo.fr/sites/default/fil10/quartiermeriadeck_2.pdf

esthétique, il n’est pas propice au développement du quartier et son accessibilité est limité. En effet, la dalle ne peut pas se dissocier réellement de son sol naturel puisque l’Homme a besoin d’accéder à ses grands plateaux, les accès piétons via des escaliers et les accès PMR sont jugés fastidieux à emprunter et même à trouver lorsque l’on vient depuis l’extérieur du Laquartier.rue et la ville traditionnelles développées à l’horizontale, manquent aux habitants et ce, en dépit de la création de squares et jardins. Les esplanades ont beau être un vaste terrain de jeu et un lieu propice à la rencontre, elles sont Enfin,désertées.du point de vue du cheminement, les piétons se retrouvent vite perdus dans ces quartiers faute d’une organisation claire et lisible. L’application du rapport Buchanan aura finalement généré une forme d’insécurité et des problèmes d’accessibilités.

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FIG 16 : La passerelle qui mène à l’Immeuble Gironde, Meriadeck, bordeaux, Aumerrygraph.comdelàdecetaspect

61 Malgré l’engouement rapide pour le développement de ce type d’opérations, sa forme et ses usages novateurs deviennent rapidement obsolètes dans la forme, la fonction et la conception. Ceci trouve son origine dans les chocs pétroliers de 1973 et 1979, remettant en question un modèle fondé sur une consommation d’énergie importante à l’origine à faible cout. Nous constatons également un retour aux modes de transports en communs et un développement contemporain des modes de circulation doux, mettant en mauvaise posture les principes fondateurs de la dalle. Finalement, ces quartiers deviennent des espaces délaissés, décriés et dégagent un vif sentiment d’insécurité, de danger, expliquant un rejet de cette morphologie «urbaine. Que ce soit à cause de la verticalité ou de l’horizontalité des bâtiments, de leur promiscuité ou de m’entretien des espaces… Les dalles piétonnes sont souvent devenues des espaces sans contrôle, les sous sols des lieux dangereux59 . »

59 BAUER, Alain, FELIX, Frédéric, Prévoir avant de construire, Urbanisme : le retour du débat sécuritaire, Le Moniteur, 2021

CONSERVATION RÉINTERPRÉTATIONET

Aujourd’hui, en 2022, certaines dalles sont toujours conservées et influencent tout de même une autre forme d’urbanisme. Comme nous pouvons le constater, la voiture n’est plus au cœur des villes, elle tend à disparaitre du côté de la périphérie et les centres anciens deviennent piétons. La circulation est toujours séparée, mais plus à la verticale. Cependant nous pouvons observer que le zoning horizontal ne résout pas le problème d’étalement urbain comme le faisaient les quartiers sur Nousdalle. comprenons alors que le principe de séparation des flux est une caractéristique forte héritée de ces constructions bien que la solution de la création de dalles n’ait pas été la bonne pour répondre aux enjeux de la densification de la ville. La surface de la dalle devient également un immense terrain de jeu pour des pratiques sportives urbaines. Ces pratiques donnent alors un tout nouvel intérêt à la dalle

DES ESPACES

62 et donnent lieu à des pratiques alternatives des modules et espaces mis à disposition60 . En effet, la culture urbaine est avant tout une question de perception et de rapport à l’espace. Il s’agit d’utiliser l’espace avec le corps, d’habiter la ville avec le corps. Cette dernière influe sur la manière dont nous nous déplaçons, investissons et utilisons la ville. Très présent en ville, ce phénomène regroupe maintes disciplines telles que la photographie, le graffitis ou encore les sports de rues tels que le BMX, le skateboard, la trottinette, le parkour Leetc. skate en ville c’est un rapport étroit à l’architecture et sa construction : les revêtements de sols sont importants pour bien rouler dessus et une attention particulière au béton est observable. En général, ces disciplines sportives s’intéressent et donnent vie à des points morts de la ville, faisant des pieds d’immeubles, de places vides ou de friches un véritable terrain de jeu. Leur regard sur la ville y est donc créateur, novateur et force à 60 SANCHIS, Anthony, « Le recyclage de l’urbanisme moderne de dalle », ENSA Bordeaux, Bordeaux, 2019, 28 29. une nouvelle manière d’arpenter les rues pour mieux transformer les espaces, le mobilier urbain : c’est une nouvelle manière d’habiter la ville et de la vivre. Pour autant le skate n’est pas la seule discipline sportive issue de la street culture à s’approprier l’espace par le corps et à réinterpréter ce dernier. On retrouve la danse de rue mais également le BMX. Ces pratiques font à leur manière ce que le skate fait également. Là où une fonction première est donnée à un lieu ou un mobilier urbain, tel qu’une rampe PMR, un escalier, une main courante, un banc. Leur regard créatif va leur adjoindre une toute nouvelle utilité et le mobilier urbain devient alors source d’amusement et lieu de pratique de la discipline. Ces pratiques ne sont certes pas le meilleur exemple d’une ouverture vers la ville douce et partagée qui est pensée aujourd’hui, mais montre néanmoins toujours une forme d’habitation des lieux et source

Led’intérêt.postmodernisme à cette époque marqué par ses principes fragmentés et opposés, autour de l’utilisation de

62 ROUSSEL, Alexis, CHAUBARD, Lou, L’architecture est un sport de rue, ENSA Grenoble, 2021, 26 27.

61 VICTORIA AND ALBERT MUSEUM, Postmodernism: Style and Subversion 1970 1990, Cromwell, 2012. Ces lieux souvent chargés d’histoire sont par excellence des lieux voués à être interprétés et pas que par le monde du sport mais également par l’art avec notamment tous les artistes de rues qui viennent projeter leurs créations contre les murs oubliés de ses pièces d’histoire. La forme ainsi pensée par l’architecture en tant que qualité spatiale ou architecturale va être amenée à générer des comportements variés62 .

63 la complexité et de la contradiction architecturale. Cette période architecturale se place comme une forme de résistance à l’autorité qui finalement dans les années 90 sera rattrapée par l’influence économique qui était pourtant reniée à la base. Cette logique est en adéquation avec l’esprit rebelle et revendicateur d’identité qui se caractérise par les pratiquants de ces sports de rue. De la même manière que ces sportifs qui travaillent leurs mouvements et leur style de glisse, l’idée était de « briser les idées établies sur le style. Apportant une liberté radicale à l’art et au design au travers du geste apportant une nouvelle conscience de soi et du style lui même61 ». Le post-modernisme est également un symbole de la dystopie découlant du modernisme, pas aussi parfait que ce qu’il avait été imaginé. C’est ainsi que de nombreuses représentations architecturales, telles que Blade Runner 2049 de Ridley Scott, forment une image forte et importante de ce nouveau courant, à la fois un mélange entre apocalyptique et haute technologie issue de la période post industrielle.

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Aujourd’hui l’utilisation de passerelles au-dessus des routes est par exemple favorisé pour se déplacer d’un bâtiment à un autre. Nous pouvons également penser à l’utilisation d’un autre type de sol artificiels dans le cadre de projets comme celui de Dominique Perrault avec l’université de Séoul en Corée, avec son bâtiment partiellement enterré, où la toiture végétalisée se traverse comme un parc ou une

Bien que ce principe d’urbanisme ne soit plus au goût du jour le principe de la séparation des flux et la création d’un sol spécifique aux piétons est toujours de mise.

FIG 17 : SANCHIS, A, Dalle Part Dieu, Lyon, BMX, 2018

: PERRAULT, Dominique, Rendering (illustration architecturale en trois dimensions montrant les attributs d’une conception architecturale proposée) de l’Université de Séoul en Corée, Ewah Womans university, 2008

FIGbutte.18

D’ENTRETIENPROBLÉMATIQUES

Ces espaces sont aujourd’hui en état de délabrement avancé en raison des droits de propriétés de la surface de la dalle. Le propriétaire, ayant l’intendance de la dalle est celui qui exploite la sous face du sol. Il est ainsi difficile de faire réagir tous les copropriétaires, généralement représentés par des associations syndicales, lorsqu’il est question d’entretien de la structure. Ces

65 FIG 19 : Rendering de la Scala Tower, BIG, Copenhagen, 2008 Les sols artificiels aménagés sont également source de réflexion ses dernières années avec des projets comme celui de la Scala Tower, proposé par l’agence BIG. Ce projet interroge par ailleurs la question de la connexion entre le sol et le bâti par la proposition d’un bâtiment, qui se prolonge dans un sol prenant la forme d’un escalier sur lequel les passants peuvent circuler ou s’arrêter librement.

POINT DE CINÉMATOGRAPHIQUEVUE

66 travaux sont par ailleurs très coûteux et demandent une logistique importante puisque les espaces ne sont pas adaptés à la maintenance.

MÉTROPOLIS 1927 Ces quartiers inspirent par ailleurs de nombreux univers de science fiction. Nous avons pour exemple le film Métropolis de Fritz Lang, ou encore Blade Runner (1982) de Ridley Scott où l’artificialisation du milieu urbain apparait comme une erreur, 63 MOUTARDE, Nathalie, COULAUD, Nathalie, Aménagement L’urbanisme sur dalles est à réinventer, Le Moniteur, 1998 conduisant à l’effondrement de la société urbaine. Dans le cas de Métropolis, sorti au cinéma en 1927, nous pouvons observer qu’il est à lui seul un résumé de toutes les théories et pensées futuristes de son époque. Il évoque notamment la pensée selon laquelle la ville est constituée d’immenses tours qui se ressemblent toutes avec de nombreux ponts et passerelles de circulation très denses et rapide. La ville s’organise sur plusieurs niveaux, ce qui évoque les théories urbanistiques qui vont mener à la création de la dalle.

La dalle ne représente alors qu’un immense problème municipal quant aux droits de propriété. Il s’agit d’espaces comportant différents statuts juridiques, rendant difficile la compréhension du droit de propriété de ces lieux. « Il n'existe pas de solution juridique traditionnelle, qu'il s'agisse de la division du parcellaire, de la copropriété, ou du bail à construction », explique Claude Garreau, Directeur juridique de l'EPA de Cergy63 .

FIG 20 : LANG, Fritz, Extrait de la ville dans le film Métropolis, 1927 L’introduction à la ville de Métropolis dans le script est faite par Théa Van Harbour de la manière suivante : « Le titre Métropolis apparaît sur un fond de lignes géométriques animées, faisant place à un tableau peint de hauts grattes ciels en pyramide de la ville64 . » Dans l’image projetée il n’est pas précisée qu’elle se situe en sous sol, mais elle est tellement refermée sur elle même, que le ciel ne semble pas visible Ce n’est que plus tard, dans l’intertexte qu’il est spécifié que la 64 VON HARBOUR, Théa, Extrait du script Métropolis, 1926 ville se trouvait « au profond de la terre (se trouvait la ville des travailleurs). 65 » À noter que la nature dystopique de cette ville se dessine au travers des différents intertextes, de polices d’écritures utilisées afin de montrer la réelle nature de la structuration de cette dernière.

65 LANG, Fritz, Extrait de l’intertexte, Métropolis, Film cinématographique UFA, 153 min, Allemagne, 1927

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BLADE RUNNER 1982 Dans le cas de Blade Runner, le constat est le même, mais plongé dans un univers plus américain et contemporain avec une ville constituée d’immenses gratte ciels, des voitures volantes et un monde où la technologie domine.

FIG 21 & 22 : Peinture à la gouache, San Angeles, premières esquisses préliminaires du paysage urbain pour Blade Runner, 1980. Œuvre originale perdue lors d’une exposition en 1991. CARDINI RIPCHIP, On the Edge of Blade Runner, Youtube, 2012.

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La deuxième image quant à elle montre une forme de monolithisme et se dessinent sans aucune préoccupation structurelle. L’artiste explique dans une interview de Curbed, en 2015 « J’apprécie l’architecture qui a une fonction, les classiques grecs et romains. Mais j’aime aussi l’architecture contemporaine qui (voit les bâtiments) comme objet, comme structure. J’ai aimé le bâtiment AT&T de Johnson à New York, qui était vraiment controversé à l’’époque et les tours jumelles de Yamasaki67 . »

67 SISSON, Patrick, goodbye Syd Mead : A conversation with the artist who illustrated the urban future, Curbed.com, 2019

69 Comme dans les concepts art de Métropolis, le paysage urbain se compose de « pyramides » de grattes ciels. Los Angeles est plongée dans la nuit, les bâtiments par leur gigantisme sont dotés de fenêtres qui ne forment que de petits points de lumière. Les couleurs ternes de l’atmosphère représentent l’atmosphère industrielle de la ville et une forme d’étouffement. Les bâtiments au premier plans sont minuscules face à la ville nouvelle au second plan, c’est comme ça que la ville futuriste s’y exprime. « Dans les designs primitifs que j’avais en tête, il y avait ces sortes de structures énormes d’une hauteur de deux mille ou trois mille pieds, et les gens normaux n’allaient jamais au delà du soixantième étage, vous aviez donc ces grands piliers qui supportent l’architecture. Et la rue est devenue comme un énorme socle, socle urbain66 ». La peinture appelée « San Angeles » s’inspire de « San », qui en japonais est une forme de respect pour un 66 FRANCHER, Hampter, extrait du script du premier Blade Runner, 1982 autre individu. La culture asiatique influe donc beaucoup ces créations.

« Le label Architecture contemporaine remarquable a été créé par la loi du 7 juillet 2016 relative à la liberté de création, à l'architecture et au patrimoine (LCAP, art. 78), et succède au label Patrimoine du XXe siècle, créé en 1999. Il est attribué aux immeubles, ensembles architecturaux, ouvrages d'art et aménagements réalisés il y a moins de 100 ans, non protégés au titre des monuments historiques, et dont la conception présente un intérêt architectural ou technique68 . » 68 MINISTÈRE DE LA CULTURE, Label Architecture contemporaine remarquable 69 COMMISSION DES BIENS CULTURELS DU QUÉBEC, Comment Le Label « Patrimoine du XXème siècle » En France le label « architecture contemporaine remarquable » est un outil mis en place par le Ministère de la Culture pour permettre la reconnaissance et la sauvegarde du patrimoine du siècle qui se termine.

L’origine du label est Européen et découle de la prise en considération de l’importance du patrimoine architectural du XXème siècle et de sa précarité en raison d’une absence d’intérêt général « en raison de sa proximité dans l’Histoire, de l’abondance de ses témoignages et de son caractère hétérogène, moins reconnue de la part des autorités responsables et du public que d’autre composantes du patrimoine architectural 69 . » Cette décision de prises de mesures concernant la protection du patrimoine contemporain découle de la création de l’association DOCOMOMO et de son assemblée constitutive à Eindhoven en 1990. Le nommer le patrimoine quand le passé n’est plus ancien ?, Document de réflexion sur le patrimoine moderne, 2005, Extrait du Conseil de l’Europe, 1991 : 1, Blin, 1998.

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Du patrimoine du XXe siècle remarquablecontemporainel’architectureà

70 MINISTERE DE LA CULTURE, Cinq édifices de Charleville Mézières (Ardennes) labellisés « Patrimoine du XXe siècle , 2022 Le label prend de l’importance en France notamment en raison de la politique de rénovation urbaine, en cours dans les plans de politiques de gestion de la ville durant les années 198à et 1990. L’objectif étant alors de résoudre les problèmes sociaux constatés par la destruction de masse de grands ensembles. Cette campagne sera par ailleurs menée dès les années 2000 avec la création de l’Agence Nationale pour la Rénovation Urbaine (ANR) qui finance, établis et administre ces Nousdestructions.observons par ailleurs, sur un même temps, une hausse de l’importance accordée au développement durable, posant la base de nouvelles exigences quant à la performance énergétique des bâtiments supposant des interventions souvent lourdes sur de nombreux édifices issus de la période de l’après guerre. Nous observons alors une remise en question de la reconnaissance du patrimoine récent mais également des pratiques de rénovations, restaurations et conservations de cette même architecture.

71 label est créé à la suite de la recommandation du Comité des ministres du Conseil de l’Europe ayant recommandé certaines mesures à prendre quant à la protection des productions architecturales récentes avec pour objectif d’attirer « l’attention des décideurs, des aménageurs, mais aussi et surtout de ses usagers et du public sur les productions remarquables de ce siècle70 ». En raison de sa constitution récente, du caractère hétérogène et de la quantité de productions, il est jugé difficile de connaître réellement l’importance et la teneur des bâtiments remarquables, rendant leur reconnaissance au titre de patrimoine complexe et leur préservation tout autant. Ainsi, les États membres ont pour objectif de conserver et de protéger le patrimoine bâti par la mise en œuvre de mesures spécifiques visant à identifier, protéger, restaurer, conserver et sensibiliser le public à l’architecture générée durant le courant du XXème siècle.

72 Le label est ainsi crée entre 1999 et 2001 par le ministère de la Culture et porte le nom de « Patrimoine du XXe siècle ». Il sert avant tout de moyen de valorisation et de sensibilisation à la sauvegarde et la restauration de l’architecture du siècle dernier notamment par l’utilisation de plaques qui permettent d’identifier les édifices labellisés et de leur donner une nouvelle visibilité. L’objectif est d’ajouter plus d’architecture datant d’après 1945 a l’inventaire des édifices protégés au titres des monuments historiques. Dans un premier temps une liste de ces architectures est établie en région Ile de France avant d’être déployée sur le reste du territoire Français. Cette nouvelle politique porte le nom de Directions Régionales des Affaires Culturelles (DRAC) et a pour rôle d’inventorier, étudier, choisir et labelliser les édifices remarquables de leur territoire. Ces listes sont par ailleurs étables par le biais de groupes de travail qui se retrouvent dans le cadre de Commissions Régionales du Patrimoine et des Sites (CRPS). Un projet d’étude est par la suite lancé sur un domaine ciblé : celui des productions architecturales du XXe siècle concernant le logement. L’attention se porte alors sur les grands ensembles et par la suite les lotissements remarquables, faisant office de référence et de publications, colloques et expositions. En découlera l’écriture des « carnets d’architecture » visant à mettre en avant les réalisations architecturales emblématiques de leur siècle par la mise en avant de leurs architectes, de la typologie ou du programme de l’espace concerné. Cependant il est nécessaire de renforcer le poids de ce label pour le maintien de l’architecture du XXème siècle en partant de la sensibilisation (objectif du label) jusqu’à la protection patrimoniale au titre de MH et/ou d’espaces protégés par un partenariat avec les opérateurs de projet. Le label « ContemporaineArchitectureRemarquable » Dans le but de donner plus de poids et donc d’importance au label, en 2016, la loi LCAP (Liberté de la Création, à l’Architecture et au Patrimoine) inscrit le label dans le code du Patrimoine et propose une

Autre problématique : celle de la conservation physique de ce patrimoine, dans le cas du remarquable, In Situ, Revue des Patrimoines, DRAC Ile de France, 2022.

73 réforme. Il devient alors « Architecture Contemporaine Remarquable » et couvre à présent les bâtiments de moins de cent ans et plus seulement ceux construits au cours du XXe siècle. De ce changement en découle le fait que les édifices considérés comme monuments historiques disposent désormais d’office du label. De ce fait les édifices labellisés ont drastiquement diminués pour laisser place à une mise en valeur d’une architecture datant notamment des années 1960 et 1970. Une meilleure connaissance des édifices labellisés est également demandée afin d’affiner le choix concernant l’aspect remarquable du Lebâti.problème à l’ordre du jour est désormais celui des ensembles à l’échelle urbaine, à savoir comment il est possible de valoriser un lot et pas seulement un élément isolé71 Les problèmes liés à la reconnaissance des bâtis dans le cadre de ce label sont liés à la représentation que nous avons du patrimoine récent en comparaison de 71 MASSE, Sophie, Du patrimoine du xxe siècle à l’architecture contemporaine l’intérêt porté au patrimoine ancien. Le comité d’experts réunis par l’UNESCO et ICOMOS révèlent d’ailleurs un déséquilibre dans la liste du patrimoine mondial notamment en regard du XXe siècle. Ceci se justifie donc notamment par l’aspect récent des constructions, l’absence de la reconnaissance du traditionnel mais aussi par un manque de connaissance et de médiation sur le propos. Nous pouvons y constater donc un manque de connaissances, lié à un manque de recul, d’expertise sur la période concernée mais également une forme de densité bâti qui ne laisse pas la place à une analyse globale permettant de faire ressortir ces éléments remarquables parmi le reste de l’ensemble construit. Nous pouvons également parler de ce rejet du patrimoine bâti en période de guerre et d’après guerre par la politique de démolitions massives de la ville moderne qui dénote un rejet drastique et forme de ce fait un frein à la protection du patrimoine bâti mais également à sa reconnaissance.

À ce propos : « La vocation fonctionnelle très spécialisée de certaines constructions modernes les rend rapidement obsolètes. De plus, le caractère expérimental de certains matériaux et techniques mis en œuvre est la cause d’un vieillissement physique accéléré du bâti, de ses composantes dont la fabrication a souvent été arrêtée et de ses installations mécaniques vite dépassées. Généralement moins de trente ans après leur inauguration, les finitions et les équipements des bâtiments modernes nécessitent des travaux de réfection majeurs72 » 72 DOCOMOMO, Québec, 2000 Outre le nombre d’éléments bâtis sur cette période, rendant le choix des éléments à protéger, conserver et restaurer complexes il y a donc ce problème de taille. Il s’agit souvent d’un ensemble urbain et non pas d’un objet seul dont il est question, ceci rendant les stratégies de conservation différentes, plus onéreuses et complexes. Le problème de l’identification de bâtiments remarquables réside donc dans l’absence de cette rareté que l’on reconnait aux monuments historiques anciens et dans cette question de durabilité de la construction du point de vue technique et matériel.

74 patrimoine sur dalle, comme celui des interventions plus modernes et contemporaines on observe avant tout une échelle grandissante des éléments concernés. A cette question d’échelle nous pouvons y ajouter le problème de la dégradation matérielle du bâti, qui semble complexe à réhabiliter ou entretenir en masse. Il y a ce critère d’obsolescence qui fait barrage. Les problèmes techniques sont un véritable frein à la conservation du patrimoine que ce soit au niveau des ressources disponibles et des moyens financiers qui en découlent.

L’ICOMOS de son côté tend à valider le point de vue selon lequel les patrimoines moderne et ancien ressortissent aux mêmes objectifs de sauvegarde et d’entretien, tandis que le point de vue de DOCOMOMO considère cet aspect hétérogène de la modernité comme un élément « antinomique aux valeurs de continuité historique et d’identité culturelle dont la conservation patrimoniale est traditionnellement garante. De plus, le jeune âge et l’importance quantitative des

74 RICHARD, David, Le volume immobilier : une alternative à la copropriété, Politiquedulogement.com, 2016

Cette répartition des droits de propriété se justifient notamment par la multipicité programmatique qui va de l’équipement public, au logement, passant par la création de commerces, bureaux, parkings publics et privés, l’aménagement de la dalle comme espace public et réseaux de circulation rendant le principe de la copropriété classique inadapté. Inadapté dans la limite où certains espaces mélangent public et privés au sein d’un même ensemble. Les juristes ont alors développé de nouvelles règles de domanialité, utilisant la notion de « propriétés de volumes immobiliers dans l’espace, limités sur le plan horizontal et sur le plan vertical74 ».

75 éléments à prendre en compte rendent caduques les critères d’ancienneté et de rareté qui légitiment les mesures de protection73 ». Politique de protection des dalles du point de vue juridique

Les dalles telles que nous les connaissons aujourd’hui sont concernées par de nombreuses dégradations nécessitant des opérations de réhabilitation coûteuses. Cette dégradation se justifie par l’âge des infrastructures et le vieillissement naturel du béton, qui sont alors victimes de réparations lourdes et souvent hors de prix. Ce coût se justifiant par de nombreuses reprises de structures, des problèmes d’étanchéités, l’état du revêtement des sols, des problèmes de normes sécuritaires concernant notamment les L’autreparkings.problème qui se dessine face à ces dégradations, c’est celui de la propriété : la plupart de ces quartiers sont morcelés en diverses 73 DOCOMOMO, Québec, 2000 copropriétés séparées entre les bailleurs sociaux et des propriétaires privés qui ne souhaitent pas particulièrement prendre à charge de tels travaux. L’usage public de ces lieux à cependant permis aux propriétaires privés, d’obtenir des aides des communes et des communautés d’agglomérations pour la réhabilitation de ces lieux.

76 Il existe également le problème de la délimitation de ces propriétés qui nécessitent une période de reconnaissance qui est complexe de par la nature artificielle du sol et de la division des propriétés en volume. De fait « Il n’existe pas de solution juridique traditionnelle, qu’il s’agisse de la division parcellaire, de la copropriété ou du bail à la construction », comme l’explique Claude Garreau, Directeur juridique de l’EPA de Cergy. « Volume et copropriété partagent un objectif commun : opérer une division verticale immobilière. Néanmoins, chaque technique va renvoyer à un objet différent. Le volume réfère en effet au sol alors que la copropriété vise, elle, l’immeuble ou le bâtiment. La distinction se retrouve dans le Code civil puisque le volume se fonde sur l’article 552 et la copropriété à l’article 664, ancêtre de la loi de 1965, aujourd’hui abrogé. Pour(…) la division en volumes, les éléments doivent jouir d’une certaine autonomie et former par là 75 RICHARD, David, Le volume immobilier : une alternative à la copropriété, Politiquedulogement.com, 2016 un ensemble hétérogène. Ainsi, schématiquement, des ensembles disposant d’éléments communs structurants et formant un ensemble cohérent donneront lieu à l’application du statut de la copropriété. Inversement, les opérations hétérogènes ou complexes, constituées de volumes indépendants les uns autres, pourront correspondre à une organisation dérogatoire : une division en volumes75 .» Pour ce qui est des outils juridiques déjà mis en place, nous avons d’abord celui de la copropriété, qui prévoit que « chaque copropriétaire est propriétaire d'un lot particulier et d'un lot indivis des parties communes. Lorsque la loi sur les copropriétés a été adoptée, le législateur n'a pas prévu de statut pour les millièmes indivis d'un lot appartenant à la puissance publique. Ils n'ont pas de nature juridique. En outre, la copropriété nécessite une connaissance définitive des immeubles alors que dans le cas de la Défense, notamment, les projets évoluent en cours de route. Il y a

Pour pallier à ces problèmes juridiques une solution a été inventée par les juristes : celle de l’organisation en volume immobilier. Qui est une combinaison entre le volume immobilier, le réseau de servitudes permettant de faire exister un lien entre l’ensemble des volumes immobiliers. La création d’association syndicales libres sont également pensés pour gérer cet ensemble. Ainsi le volume immobilier rend propriétaire d’un 76 MOUTARDE, Nathalie, COULAUD, Nathalie, Aménagement L’urbanisme sur dalles est à réinventer, Le Moniteur, 1998 droit de superficie sur lequel peut exister encore un autre propriétaire.

Trois textes ont été édités à ce propos : L'état descriptif de division en volume, qui permet de décrire chacun des volumes géométriquement, de définir et d'énumérer les servitudes qui grèvent et modifient chacun des volumes ; - Le règlement de jouissance qui est un document qui définit les règles, les droits et les obligations de chacun des propriétaires et permet de régler les problèmes de gestion quotidienne, mais également les problèmes d'évolution. On y trouve des articles relatifs à l'assurance ou à la reconstruction partielle ou totale de ces ensembles immobiliers ;

77 MOUTARDE, Nathalie, COULAUD, Nathalie, Aménagement L’urbanisme sur dalles est à réinventer, Le Moniteur, 1998

77 donc méconnaissance de l'ensemble immobilier »76

Pour ce qui est du bail à construction nous pouvons noter que « cet outil permet au preneur d'édifier des constructions sur le terrain du bailleur, loué pour une durée déterminée contre un loyer. Il a été utilisé, mais pose des problèmes. Ils sont essentiellement dus au fait que les droits consentis par cette technique sont des droits temporaires, ce qui est assez mal compris et accepté par les promoteurs ou acquéreurs immobiliers. »77

78 Les statuts de l'association syndicale, organe de gestion de l'ensemble immobilier 78 » Le sol est alors perçu comme un volume, divisé dans le sens de la hauteur et compose avec la loi de 1965 à chaque fois que la division prend place sur des biens privés. Dans le cas de biens publics, cette loi est exclue, laissant place au volume immobilier. Dans le cas d’un sous sol (transport public), d’un rez de chaussée (centre commercial) et d’un immeuble d’habitation il s’agira d’une division en trois volumes. Un autre division se ferai sur l’immeuble d’habitation où chaque logement sera soumis au statut de copropriété.

78 MOUTARDE, Nathalie, COULAUD, Nathalie, Aménagement L’urbanisme sur dalles est à réinventer, Le Moniteur, 1998

79 deuxième PARTIE architecture et abstraction

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Peinture architectureet : un créatifprocessusavant

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tout artistique et sensible « La perspective enseigne les raisons des fausses apparences qui se présentent à l’œil » tandis que la peinture, qui emprunte à l’optique, « fait apparoistre par fausses mesures ce qui n’est point comme s’il estoit ou autrement qu’il n’est » 79 ` RENDRE L’ESPACE SENSIBLE

Nous avons vu précédemment que les opérations de dalle ont généré des espaces qualifiés comme étant « inhumains ». Nous allons donc nous intéresser maintenant à ce qui 79 BALTRUSAITIS, Jurgis, Anamorphoses ou Thaumaturgus opticus, Les perspectives rend l’approche d’un espace sensible. De cette manière, nous comprendrons ce qui constitue les failles de ces L’architectureespaces.génère chez l’Homme des sensations qui découlent de notre propre perception des lieux. L’espace sensible se réfère donc à notre sensibilité optique, auditive, olfactive et à notre sens du toucher. Ainsi chaque individu a sa propre expérience du lieu, elle peut être partagée par d’autres personnes ou non. LA VUE La vue nous permet de comprendre un ensemble, une forme générale, le détail d’un ornement, la composition d’un espace, d’une façade. La couleur quant à elle joue un rôle très important dans l’architecture : la couleur naturelle des matériaux utilisés, les couleurs ajoutées, le contraste et la variation des couleurs ont un effet sur notre perception des Avecespaces.la vue nous nous sensibilisons également à l’assemblage des Dépravées, Collection Champs, Flammarion, 1984, 7.

LE TOUCHER

82 matériaux malgré nous, nous pouvons observer un motif, un rythme, un assemblage, des effets de symétrie, des épaisseurs, des volumes, des courbes. Et vient envie la lumière naturelle et artificielle qui va faire ressortir des espaces, les rendre chaleureux ou froids, amènes ou désagréables. L’ombre et la lumière définissent également les espaces. Si l’on projette cette analyse visuelle sur les environnements générés par le patrimoine sur dalle le constat est le suivant : il apparait ici clairement une forme de monotonie et les bâtiments donnent la sensation de tous se ressembler. Les bâtiments sont généralement constitués de béton, proposent des variations de motifs, de composition de façade, mais cela ne reste pas suffisant pour les rendre tous clairement identifiables et uniques. Les lieux sont considérés par les habitants comme ternes, sans vie, trop ressemblants et cela peut également se lire en plan masse. Ces espaces deviennent alors rapidement anxiogènes car ils ne proposent pas d’élément « signal », visible, auquel nous pouvons nous rattacher pour se repérer dans les lieux. L’OUIE Chaque lieu à sa propre sonorité. L’indentification des sons, la répétition de sons caractéristiques lieux, les bruits de circulation, leur intensité font la spécificité des lieux. Le bruit peut très rapidement devenir une source de nuisance, notamment en ville. Isoler l’automobile du piéton en cela n’est qu’un atout. L’ODORAT Tout comme l’ouïe, l’odorat se réfère à son environnement, les odeurs peuvent être agréables, désagréables et contribuent à nous faire nous sentir bien dans un lieu ou non. Elles peuvent également définir des espaces, nous annoncer que nous sommes à proximité d’un commerce ou d’un espace plus naturel.

Nous n’y prêtons pas toujours attention, mais tout au long de la journée nous sommes en contact direct avec notre environnement. Nous touchons les matériaux, apprécions leurs qualités du point de vue de la matière, de la texture, de

FIG 23 : AMARTIN LOPEZ, Alicia, Dark Matter, Kutxa Kultur Plaza, Tabakalera, San Sebestian.

Ainsi nous remarquerons que suivant les saisons nous allons naturellement occuper certains espaces plutôt que d’autres en raison de la qualité propre des matériaux mise en œuvre.

Le béton est un matériau qui a pour particularité d’être froid tant visuellement qu’au toucher, il est aussi rugueux, solide, donne une impression lourdeur et de durabilité. Ce qui peut avoir un effet écrasant, désagréable au contact.

D’autres sensations sont également liées aux lieux, nous avons par exemple les sensations affectives qui font appel aux souvenirs. Mais aussi les sensations émotionnelles qui sont induites par les sens présentés juste au dessus. Enfin, nous avons les sensations liées à notre déplacement dans l’espace qui permettent de prendre conscience de la place de notre corps dans l’espace, d’expérimenter une forme d’immersion et de changement de points de vue. Ainsi, le patrimoine sur dalle peut donner une sensation de grandeur oppressante, générer une sensation de désorientation qui nous met en position d’insécurité, avec une esthétique d’apparence monotone. Des sensations décrites précédemment, nous pouvons faire un lien avec l’art abstrait. Il s’agit d’un langage visuel, qui peut également être lié au toucher comme c’est le cas dans l’œuvre d’Alicia Martin Lopez.

83 leur chaleur. Nous allons les trouver à la fois doux, rugueux, froid, chaud, humides, sec, fragiles ou solides.

weimar/archive der moderne, 1926 En 1933, le bauhaus, passé alors de Dessau à Berlin sous la direction de Mies Van Der Rohe, se voit dans l'obligation de fermer ses portes sous la pression du régime nazi, ces derniers considérant l'enseignement et la philosophie de l'école comme un « art dégénéré ». Une grande partie des artistes et professeurs ayant participé à la renommée de l'école s'exilent aux États Unis pour échapper au nazisme, exportant au passage le mouvement bauhaus à l'échelle mondiale. L'école Bauhaus est l'une des plus grandes écoles artistiques allemandes du XXe siècle. Lignes épurées et angles droits, simplicité dans les couleurs, façades en verre et absence d'ornement sont des éléments dont usait Walter Gropius,

BAUHAUS Le mouvement Bauhaus est un courant artistique ayant puisé ses influences dans des philosophies en pleine croissance pendant le XIXe siècle, auxquels ont participé notamment le mouvement Arts & Crafts, l’Art Nouveau, le Cubisme ou encore le Neues Bauen. Bauhaus, ou « La maison de la construction », était d’abord une école d’architecture et d’arts appliqués, la Staatliches Bauhaus, qui a vu le jour en 1919 à Weimar en Allemagne. Son directeur, Walter Gropius, architecte designer et urbaniste au style avant gardiste, souhaitait effacer les frontières entre beaux arts et arts appliqués, entre artisanat et industrie et ainsi pouvoir marier créativité et exemplarité technique.

FIG 24 : Bâtiment du Bauhaus de Dessau, Bauhaus-universität

84 ART ABSTRAIT et architecture : INFLUENCE DU BAUHAUS, DU MOUVEMENT DE STIJL ET DU CONSTRUCTIVISME RUSSE

80 GUILLERMET, Julie, 100 ans du Bauhaus : retour sur un mouvement artistique précurseur et centenaire, Journal des femmes, 2019

LithographieFIG no. 186) , lithographi e, 35 x 23.5 cm , 1925 De ce mouvement sont né deux musées, l’un à Weimar et l’autre à Dessau pour célébrer le centenaire de l’école du Bauhaus. La critique émise sur ces constructions peut faire écho à la réception des opérations dalle. Ils sont décrits comme l’illustration même du « conflit architecte/usager » 81 en raison de la pensée du projet par le plan et non par sa matérialité et sa tridimensionnalité.

81 FROCHAUX, Marc, Le Bauhaus est une idée | Espazium, 2019

85 maintenant éléments stylistiques clef du mouvement Bauhaus. Voisin du brutalisme, le style Bauhaus, faisant aussi grande utilisation du béton et un important travail sur les volumes, vise à simplifier les formes, épurer et standardiser. Ce mouvement a posé les bases de la réflexion sur l'architecture moderne, notamment du style international. Au delà de l'architecture, les code bauhaus peuvent également être trouvés dans les œuvres d'artistes tels que le Russe Vassily Kandinsky et l'Allemand Paul Klee, qui furent tous deux professeurs à l'école du L'influencebauhaus. du bauhaus a également permis la naissance et le développement du concept de design démocratique: un objet peut désormais être à la fois simple, fonctionnel et esthétique tout en étant accessible au plus grand nombre80 .

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Le

FIG 26: musée du Bauhaus Heike Hanada laboratory of art and architecture, Weimar 2018

,

FIG 27 : ADDENA ARCHITECTS, Le musée du Bauhaus, Dessau, 2019 Roberto Gonzalez dira à propos du musée de Dessau : « Notre bâtiment PICOUT, Laurie, Musée du Bauhaus la nuit, Addenda Architects, Dessau, Allemagne, 2019. est axé sur les proportions, le positionnement et l’espace. Notre musée montre que, avec la bonne combinaison de matériaux, d’espaces et de couleurs, vous pouvez obtenir un résultat exceptionnel avec des ressources limitées. C’est très Bauhaus de tirer le meilleur parti d’un investissement minimal82 . » Ainsi, ces deux constructions font ressortir malgré elle, les critiques avancées au sujet de ce mouvement artistique et architectural, faisant écho encore une fois à celles émises quant aux quartiers sur dalle : celle d’une « production rationnelle, scientifique, insensible, froide, inhumaine83 ». D’un autre point de vue, le bauhaus est apprécié en tant qu’école où l’expérimentation et l’expression personnelle est de mise. Du côté du champ expérimental, on peut tenter de penser que compte tenu du sujet de ce mémoire, le quartier de la Défense à Paris est un très bon exemple à mettre en parallèle. A l’origine il n’était qu’un vaste espace d’expérimentation constructive qui a fini par devenir l’un des plus 83 FROCHAUX, Marc, Le Bauhaus est une idée | Espazium, 2019

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L'idéologie du groupe De Stijl plus tard fondé par les mêmes artistes se veut universaliste, dénuée de ce qui fait l'art traditionnel notamment la subjectivité de l'artiste derrière l'oeuvre. Bien que l'idéologie utopiste derrière ce mouvement soit un échec et n'ait aucun impact socio économique le figuratif ne disparaissant jamais , De Stijl marquera le XXe siècle et notre perception esthétique. Les écrits laissés par le groupe, dans leur premier manifeste rédigé en 1918 donnent alors une description du mouvement comme ceci : « La nouvelle connaissance des temps est prête à se réaliser dans tout, même dans la vie extérieure. Les traditions, les dogmes et les prérogatives de l'individualisme (le naturel) s'opposent à cette réalisation ».

« L'artiste vraiment moderne ressent consciemment l'abstraction de son expérience de la beauté : il se rend compte consciemment que cette expérience de beauté est cosmique, universelle. »

« Si en vérité l'élaboration adéquate des moyens d'expression et leur usage la composition sont la seule expression pure de l'art, ces moyens d'expression doivent être en accord complet avec ce qu'ils expriment. S'ils prétendent être l'expression immédiate de 84 KASSAS, Eliane, Le mouvement Bauhaus, bien plus qu’un courant artistique, a4perspectives.com, 2021

87 puissants quartiers d’affaires du Pourmonde.en revenir à l’école du bauhaus, nous pouvons également souligner son aspect pluridisciplinaire qui a permis de lier art et industrie, sciences de la conception et sciences humaines84 . DE STIJL Le mouvement du néoplasticisme naît avec De Stijl, ou "Le Style" en Néerlandais, une revue d'art créée en 1917 aux Pays Bas par une poignée d'artistes incluant, entre autre, et Piet Mondrian (1870 1944) et Bart van der Leck et à la tête de ce groupe l'architecte, peintre et théoricien de l'art Theo van Doesburg. La revue publiera son dernier numéro après le décès de Van Doesburg en 1931.

88 l'universel, ils ne peuvent être qu'universels eux mêmes, c'est à dire abstraits. » Avec leur attrait pour l'impressionnisme, le fauvisme ou encore le cubisme, ces artistes souhaitent aller vers une abstraction rigoureuse et presque austère, définie par les codes visuels suivants: des formes aux lignes droites et angles droits, exclusivement horizontales et verticales. Des couleurs dites "pures", appliquées en aplats: uniquement primaires (rouge, jaune, bleu), du blanc, du noir et du gris. Piet Mondrian, passé de l'impressionnisme au cubisme, et Vassily Kandinsky, qui vient de l'expressionnisme allemand, deviennent deux des célèbres initiateurs de l'art abstrait ou non Lefiguratif.Stijl, en architecture, se rapproche fortement de l'Art Déco et du Style international. Ses codes stricts esthétiquement influenceront les créateurs du mouvement Bauhaus, tout comme la volonté 85 BOIS, Yve Alain, De Stijl, Encyclopédie Universalis d'améliorer le cadre de vie de l'Homme85 FIG 28 : VAN DOESBURG, Theo, Counter Axonometric,Construction,PrivateHouse, Gouache sur lithographie, Museum of Modern Art, New York, 57,2 cm x 57,2 cm, 1923

89 FIG 29 : MONDRIAN, Piet, Composition II en rouge, bleu et jaune, Peinture, Huile sur toile, n° d’inventaire 1987/0028, 59,5 cm x 59,5 cm, 1930 Du point de vue architectural, de Stijl n’apportera pas autant que d’autres courants artistiques. Il servira seulement de base et d’influence à des mouvements comme celui du Bauhaus ou encore du style international ayant largement influencé des architectes comme Le Corbusier ou Robert Mallet Stevens. Nous en retirons notamment l’utilisation de la couleur 86 BOUTARD, François, De Stijl : une influence radicale et avant gardiste, Design Market Magazine, 2020 dans les projet de Le Corbusier par Commeexemple. autres références architecturales nous avons les maisons de Van ‘t Hoff, réalisées en 1916, largement inspirées du travail de FIGWright.30:Villa Henry, Van’t Hoff, Ou1916.encore le travail de Walter Gropius et Mies van der Rohe cherchant à « associer les arts plastiques à l’architecture, au graphisme, à la typographie et au design, dans le but d’améliorer le cadre de vie de l’homme moderne86 . » Nous avons également comme référence le travail de Gerrit

Rietveld qui a réussi en un projet à faire la synthèse des principes de De Stijl. Le projet présente des assemblages asymétriques d’éléments simples, utilise les couleurs primaires, propose un lieu de vie modulable, n’emploie que la ligne droite et l’angle droit. FIG 31 : RIETVELD, Gerrit, Maison Schröder, Propriété du Centraal Museum, le musée d’art d’Utrecht, le bâtiment a été inscrit par l’UNESCO en 2000 sur la liste du patrimoine mondial, 1924

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CONSTRUCTIVISME

RUSSE

Les années 1920 voient naître le constructivisme Russe, idéologie directrice et novatrice dans l'art Alorsmoderne.que le néoclassicisme et l’Art Nouveau s’imposent dans le reste de l’Europe, le mouvement constructiviste apparaît en réponse aux excès décoratifs et ornementaux, considérés alors comme caractéristiques de l’art bourgeois. Celui ci, contrairement aux premiers, décide de privilégier l'aspect fonctionnel avant l'aspect esthétique, et tente ainsi de dépasser les limites des mouvements décoratifs antérieurs. C'est pourquoi le mouvement marque davantage et de façon concrète le milieu de l'architecture, de la sculpture et des arts appliqués plutôt que celui de la peinture. En effet, le constructivisme permettra le développement du design, de la typographie et du photomontage, s'opposant aux courants d'arts abstraits jugés trop philosophiques et spirituelles, pas assez ancrés dans la réalité. Il apparaît comme l'application concrète du langage élaboré par le suprématisme de Malevitch, et l'abstraction géométrique de Mondrian. Il se crée un art basé sur la simplicité, des lignes épurées et des formes géométriques, inspiré du cubisme et du futurisme.

FIG 32 : MALEVITCH, Kasimir, Carré blanc sur fond blanc, peinture, huile sur toile, 79,4 × 79,4 cm, 1918 Le mouvement constructiviste gagne en popularité grâce à l'œuvre de deux sculpteurs

FIG 33 : TATLINE, Vladimir, Monument à la troisième internationale, un projet architectural en mouvement, haut de 400 mètres dont les plans ont été dessinés en 1919 1920 L'art sera utilisé par les constructivistes Russes comme un outil de révolution, dédié à la diffusion de l'idéologie socialiste, le style du design étant influencé par la révolution industrielle. Du point de vue architectural l’application des principes du constructivisme s’avère être des plus

russes : Vladimir Tatline (1885 1953) et Naum Gabo (1890 1977). Voulant prendre à contrecourant la sensibilité picturale dépeinte par le biais du Cubisme de Picasso ou le futurisme Italien, les deux artistes ont à cœur de détruire le figuratif, le volume et donner de la profondeur.

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92 concret et révolutionnaire. Le socialisme à impliqué énormément de changements dans le mode de vie russe, ce qui a impliqué de nombreux changements dans la conception de la nouvelle ville. Les critères architecturaux se tournent avant tout vers la fonctionnalité, privilégiant des matériaux tels que le béton, le verre, le métal et l’utilisation d’un style sobre, épuré. L’objectif est alors celui de construire simplement, dans un souci économique. Ainsi de nouvelles typologies ont vu le jour en Russie. Ces typologies concernent essentiellement des bâtiments utilitaires ou des équipements destinés aux habitants.

« Le but de ma vie était de faire le tour de toutes les connaissances possibles pour en tirer un résultat tangible, unique, artistique, décisif. C’est ce que j’avais déterminé à treize ans, dans un article écrit pour le journal du collège. Et c’est ce que j’ai fait. » 87 HISTOIRE D’INFLUENCES BIOGRAPHIE Né en 1924, Michel Holley est décédé lors de la rédaction de ce mémoire, le 18 mars 2022. Cette dernière partie se veut donc être en son honneur et un peu plus intime, en vous proposant de partir à la découverte de son histoire Michelpersonnelle.Holley est un architecte et urbaniste diplômé de l’école des 87 HOLLEY, Michel, dans l’article de DORCY, Camille, Michel Holley à l’origine de la Dalle des Olympiades, 2020. Beaux Arts de Paris. Il est connu notamment pour ses opérations urbaines de grande ampleur à Paris dans les années 1950 à 1970, qui concernent principalement la création de quartiers sur dalle comme le quartier des Olympiades (Paris 13e) ou encore le Front de Seine (Paris 15e) réalisé auprès de Raymond Lopez. Ces formes d’urbanismes sont remarquables puisqu’ils constituent des exemples célèbres de l’application de l’urbanisme sur dalle. Ces dalles ont par ailleurs été mises récemment en lumière au travers du film de Jacques Audiard : Les Olympiades (2021). Dans sa conception de l’urbanisme, Michel Holley dessine afin d’aménager le paysage urbain pour l’automobile. Il s’agit là de l’esthétique urbaine du déplacement qui apparait dans le paysage urbain parisien et qui développe de nouvelles formes qui vont révolutionner les modes de déplacement dans les grands Meyerensembles.Heine, dira à propos de l’évolution de l’urbanisme :

93 L’ŒUVRE DE MICHEL HOLLEY

QUESTIONS PATRIMONIALES

Du point de vue patrimonial, il est possible de mettre en comparaison la pensée de Michel Holley et celle de Le Corbusier quant à la conservation et le développement de la ville nouvelle dans les années 50 jusqu’à Chez70.

94 « l’urbaniste reste un visionnaire qui doit savoir inventer des schémas qui rompent apparemment avec le présent. Il doit sentir le message du passé et savoir l’intégrer à l’avenir 88 ». Michel Holley, dans une même pensée, s’accordera à dire qu’il est nécessaire d’ajuster ses compétences d’urbanistes à la connaissance historique à une situation actuelle et future.

Le Corbusier, au travers de ses projets comme celui du Plan Voisin, nous montre une forme de nécessiter doublier, de passer outre les styles existants, de s’affranchir de ce qui existe déjà en se débarrassant de ces formes qui lui semblaient comme figées dans la ville. Le Corbusier voulait donner un nouveau sens à la ville en supprimant son langage actuel de manière tout à fait brutale et radicale. La suppression 88 MEYER MEINE, Georges, Au delà de l’urbanisme, Aube territoires, 2016, 6. s’effectuerait au niveau du centre ville à l’exception de certains monuments comme Notre Dame et le Louvre. L’objectif étant de préserver la périphérie mais de redessiner le centre pour sauver le devenir de la grande ville. Du point de vue de Michel Holley, la ville nouvelle quant à elle se construit en périphérie et conserve l’histoire à conserver en son centre. Les nouvelles constructions mettant alors dans un écrin le centre ancien et y apportant une valeur Pourparticulière.Michel Holley nous pouvons donc noter que ce qui doit être conservé est la trace des évènements historiques tandis que du point de vue de Le Corbusier il s’agit de son mode de développement. Dans le cadre de débats à propos de la construction du nouveau Paris en période d’après guerre, Michel Holley reprochera aux conservateurs de faire de cette ville un lieu « craintivement immobilisée au seuil d’un nouveau temps, vaniteuse de se croire la capitale d’une culture vivant intensément avec la conscience à la fois mauvaise et fanfaronne d’être un anachronisme

ARCHITECTURALE

95 du bien vivre 89 ». De ces propos Lopez et Holley souhaitent réaliser un inventaire des éléments à conserver pour éviter une forme de nostalgie d’un « bien vivre » parisien qui n’est qu’une illusion à leurs yeux90 .

artiste peintre et l’accompagne dans ses projets par d’une expression architecturale au travers de l’art Deabstrait.ces études et concours, Michel Holley a réuni une équipe de travail, avec laquelle il a pu rencontrer des architecte éminents de son temps comme Wright, Mies van der Rohe, Eero Saarinen, de Skidmore, Owen & Meril ou encore Gropius. L’Amérique lui a alors offert une nouvelle vision de l’architecture, qui ne se focalise plus seulement sur l’habitation, mais plutôt sur un ensemble de fonctions. Il décide alors de construire la ville avec des bâtiments multifonctionnels, menant à une forme de conception dite globale, qui donne lieu à la création de ce qu’il appelle l’urbanisme «vertical.Cefut un choc, évidemment. Mais ma génération a également été très influencée par l’univers des comics américains des années 1930. Nous étions fascinés par ces villes verticales avec leurs super héros, ces villes avec des routes suspendues 90 GUILLOT, Jean François, Les idées de temps et de vivant chez les urbanistes du Musée social aux villes nouvelles, Université de Picardie, Jules Verne, Picardie, 2020 267.

SA VISION

Ses projets architecturaux voient le jour en période d’après guerre, où il est nécessaire de reconstruire le pays. Les dix premières années qui s’en suivirent ont été dédiées à la reconstruction à l’identique, tandis que les architectes de l’époque de Michel Holley allaient puiser leurs connaissances et leurs recherches dans les architectures à l’étranger. En France se retrouve alors des étudiants internationaux, qui apportent leurs connaissances propres et leurs points de vue personnels, qui apportent une nouvelle vision de l’architecture en EnFrance.parallèle Michel Holley épouse Francine Trasenster, qui est alors 89 HOLLEY, Michel, L’espace parisien..., Centre de documentation et d'urbanisme de la ville de Paris, Paris, 1961.

96 et des ponts invraisemblables qui nous faisaient rêver… La dalle, dans tout cela, n’était en aucun cas une religion, mais la conséquence d’une approche volumétrique de l’espace urbain, nourrie de cet imaginaire où se mêlent des références architecturales et cinématographiques, mais aussi des références populaires91 ». Lorsque Charles de Gaulle arrive au pouvoir, lui même et le préfet de Paris demandent à Raymond Lopez et Michel Holley de prendre en charge l’étude de principe « radiographique » de Paris afin de cibler les rénovations urgences à réaliser dans la capitale. Les deux architectes recrutent alors une équipe de trente collaborateurs pour mener à bien leur mission. Sont alors ciblé trois quartiers : le front de Seine, Belleville et la Place d’Italie.

FIG 34 : HOLLEY, Michem, Plan masse du projet du quartier des Olympiades, 1969 91 HOLLEY, Michel, CLERC, Thomas, LIONEL, Enguerand, Le Front de Seine 1959 2013, co edition Pavillon de l’Arsenal / Alternatives en partenariat avec la SemPariSeine, Mémoires urbaines Paris XXIe siècle, 2013

« J’ai réussi à réaliser une synthèse de ce qu’il y avait dans l’air. Je n’ai pas inventé l’urbanisme vertical, c’était une perception de l’évolution de l’architecture dans le monde, de 92 HOLLEY, Michel, L’espace parisien..., Centre de documentation et d'urbanisme de la ville de Paris, Paris, 1961. la conscience sociale, des nécessités économiques… le métier d’architecte a ceci d’admirable : on est un réceptacle et un traducteur de tous les courants qui font la vie, toutes les virtualités d’une époque. Le tout est d’en tirer un ensemble cohérent, logique, personnel »92 LE QUARTIER SUR DALLE, INSPIRÉ DE LA VILLE SOCIALISTE ALLEMANDE ?

Nous pouvons comparer cette pensée à l’un des plus grand modèles réalisés de la ville socialiste en Europe, celle de Halle Neustadt. La guerre y avait entraîné une crise du logement dans les années 1955/1956, ce qui avait poussé les dirigeants soviétiques et la République Démocratique Allemande (RDA) à favoriser la construction de bâtiments plus sobres, industrialisés, rapides à mettre en œuvre et moins onéreux Ce qui en tout point, correspond également aux techniques constructives française de l’époque avec la construction de masse des grands ensembles.

97 Le concept de dalle s’inscrit dès lors dans l’architecture de Holley : il est nécessaire dans le cadre de rénovation urbaine de penser à l’aspect sanitaire des logements français. Il effectue en même temps le constat du besoin majeur de logement par rapport à la création de bureaux ; les logements trouvent une place plus agréable en hauteur tandis que les bureaux sont bien placés lorsqu’ils se trouvent à la portée de la circulation urbaine. C’est ainsi qu’il pense des quartiers comme des ensembles urbains regroupant écoles, habitations, commerces avec des services accessibles le plus rapidement possible pour la famille habitant et se logeant sur les dalles ainsi crées. La dalle a pour objectif de concentrer la population, de leur offrir tous les services nécessaires dans un périmètre restreint, sans nuisance sonore pour ce qui est du logement. Ainsi, Michel Holley développe un nouveau mode de vie.

98 Halle Neustadt est à ce moment là une ville modèle qui sert de terrain d’expérimentations urbaines jusqu’aux années 1990. Elle s’inscrit dans une tradition urbaine moderne de conception de la ville fonctionnelle, c’est à dire séparant les fonctions en zones de vie, de travail, de loisirs et de transport. Cette pensée provenant d’une croyance technocratique de la planification totale de la vie urbaine. Elle se construit d’après le modèle de la ville socialiste et s’érige selon quatre lignes directives : le système social, les conditions fonctionnelles, les possibilités techniques et les exigences esthétiques. Ce qui correspond encore une fois à la méthode d’organisation des quartiers sur dalle que l’on peut retrouver en France.

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100 FIG 35, 36 & 37 : CHAUBARD, Lou, MOURCIA, Mathilde, reconstitution d’un des quartiers sur dalle de la ville de Halle Neustadt, situé dans le WK IV. Y est représenté des espaces commerciaux, des logements, des espaces de circulation au sol et des passerelles. Nous y comprenons ici l’importance donnée aux piéton set y retrouvons le modèle de dalles que nous connaissons également en France. Ce principe de développer des dalles autour de galeries commerciales peut être mise en parallèle avec le quartier de Grand Place à Grenoble, construit selon le même principe à l’époque des Jeux Olympiques en 1968, PFE ENSA Grenoble, 2021.

FIG 38 : Passerelle d’entrée dans la galerie commerciale de Grand Place, La Villeneuve, Grenoble, 1980. Ce qui est également à noter dans toutes ces constructions c’est leur nom : Neustadt, voulant dire « ville nouvelle », ou Villeneuve dans le cas de Grenoble qui indique cet aspect novateur dans la conception de la ville et une volonté de marquer un changement dans le mode de vie citadin. Ces espaces sont par ailleurs toujours construits en périphérie de la ville ancienne si nous y prêtons attention, que ce soit à Paris, Grenoble, Bordeaux, Lyon ou même à Halle-Neustadt.

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FIG 39 : Grand Place, Gare de bus, aujourd’hui également station de tramway au Sud de Grenoble, 1980 A la manière des quartiers sur dalle, Halle Neustadt est une ville qui se construit par pôles indépendants et autonomes, qui se divisent en quartiers avec sa propre typologie bâtie et son propre modèle Auconstructif.mêmetitre que les quartiers sur dalle que nous connaissons aujourd’hui en France, ces espaces ont fini par montrer leur limites et l’impossibilité de diminuer la consommation spatiale et l’augmentation de la densité bâtie. Les constructions ont mené à la disparition de la rue, restreignant la composition des espaces par la forme, créant un tissu complexe, supprimant le lien entre les espaces.

La discontinuité urbaine a alors contribué à la déshumanisation des

103 espaces que l’on y reproche et par créer des ruptures. Un autre des défis communs lancés à Halle Neustadt nous pouvons évoquer celui de la gestion de la circulation et des flux véhicules et piétons dans la ville. La voiture y trouve ici aussi une place prépondérante et les axes routiers sont priorisés face à l’afflux en ville. La circulation des piétons à donc été pensée pour permettre aux habitants de circuler en sécurité. Ainsi la ville s’est organisée autour d’un axe majeur : La Magistrale qui est finalement décrite comme infranchissable tandis que le reste de la ville se veut construite comme des espaces pavillonnaires où la voiture accède à vitesse réduite et où le piéton et les espaces verts sont favorisés.

FIG 40 : CHAUBARD, Lou, MOURCIA, Mathilde Plan masse de la ville avec l’apparition des Wohnkomplex (quartiers). Nous pouvons observer le grand axe Est Ouest qui est la Magistrale et une coupure Nord Sud qui constituent les axes routiers principaux. Nous pouvons également y observer l’importance des espaces verts et donc celle dédiée aux piétons, PFE ENSAG, 2021

Son père faisait également du bateau, ce qui demande une certaine vision de l’espace puisqu’il faut savoir situer son bateau, comprendre d’où vient le courant, le vent et comment se déplacer au mieux pour aller jusqu’à la destination souhaitée. Il s’agit alors d’un ensemble de paramètres qui donnent une position et permettent de visualiser l’espace et les moyens de déplacements possibles. C’est au travers de ces balades en mer ou des récits militaires que sa visualisation des espaces s’est développée.

Parvenu en école d’architecture, Michel Holley avait donc déjà cette notion de l’espace bien ancrée dans son esprit. Il disposait alors d’une forme de facilité à se projeter dans l’espace notamment à grande échelle, celle de la ville et donc une prédisposition à dessiner Al’urbanisme.utravers de la rigidité tirée de l’armée et de son expérience en mer, dans son approche architecturale, Michel Holley a par conséquent

104 UNE PENSÉE SCIENTIFIQUE ET ARTISTIQUE

Pour saisir toutes les qualités et la réflexion dans le travail de Michel Holley et ainsi, comprendre son œuvre, il est nécessaire de commencer par parler de son Michelhistoire. Holley a grandi dans une famille de militaires : son grand père et son père ont été tout deux généraux pendant la guerre. Pour parler d’une influence proche et directe nous pouvons aborder l’histoire de son père, qui l’a grandement influencé au cours de sa vie et dans sa manière de concevoir ses projets architecturaux. Son père a donc servi dans l’armée et dans les Forces Françaises de l’Intérieur. Son rôle était de déterminer l’emplacement des tireurs allemand par le regroupement d’axes de tir. Il s’agit d’un travail de visualisation et de spatialisation du sol. Dans le cadre familial, le père de Michel Holley racontait souvent les batailles vécues, les faits, et délimitait les espaces par la parole. Son oncle parfois lui expliquait d’autres batailles comme Waterloo ou Austerlitz à l’aide de soldats de plombs. L’histoire de sa vision dans l’espace (appréhension de la topographie des lieux) prend donc racine dans tous ces récits, par le biais de cet héritage familial.

À ce moment là se dessine alors tout un mouvement de peinture abstraite. Ici nous parlons d’abstraction géométrique faite à partir d’aplats et de formes proches des formes industrielles, qui viennent de l’influence de Fernand Léger. Dans l’atelier de Jean Dewasne et Edgard Pilet, une fois par semaine les élèves devaient arriver avec leurs tableaux pour avoir une discussion tous ensemble avec ce désir d’abstraction après l’abandon de la figuration.

Grace à cette école, les étudiants ont pu alors intégrer les ateliers de Kandinsky, Magnelli et Vasarely.

Michel Holley était à ce moment là, grand massier des architectes en même temps que César était grand massier des sculpteurs. C’est ainsi qu’ils recevaient souvent à domicile des peintres, des architectes et des sculpteurs. Il y avait donc des mélanges et effectivement après la guerre, cette utopie de refaire le monde : il existait cette volonté d’abandonner la figuration pour faire de la peinture abstraite et il y avait cette recherche de nouvelles manières de vivre par le biais de nouveaux concepts. Pour exemple à ce propos, Michel Holley a pensé au plan Lafay, qui établit la délimitation des quartiers de la ville potentiellement à reconstruire. Il y imaginait de nouvelles manières de vie, de sorte

105 toujours dessiné ces projets à l’aide de tableaux, de graphiques, de chiffres. C’était un moyen mécanique, rationnel et pragmatique de penser le projet. De la déformation de ces éléments a découlé son propre mode de pensée du Michelprojet.Holley a également reçu une influence artistique, notamment du côté de sa femme, Francine Holley, qui a réalisé ses études en Belgique aux Beaux Arts de Lièges. Elle a travaillé pour Fernand Léger et été au contact d’artistes comme Edward Kelly, Nicolas de Staël ou encore Jackson Pollock. Elle est également entrée à l’atelier d’art abstrait, dont les initiateurs étaient Jean Dewasne et Edgard Pilet. Jean Dewasne est par ailleurs connu pour être un théoricien de l’art qui est à l’origine des couleurs des tubes de Pompidou. Nous pouvons également retrouver son travail à Paris la Défense puisque c’est lui qui a réalisé tout le système des paliers d’étages de l’intérieur de l’Arche de la Défense qui forme un énorme tableau visible par tranches. Leur atelier brassera de nombreux artistes dans les années 1947/1953.

106 qu’il y ait plus de lumière, plus de confort, que la vie quotidienne soit mieux organisée En parallèle, toujours à domicile, il y avait tout ce monde d’architectes et d’amis comme Olivier Brachat, Robert Jacobsen, César Baldaccini, Jesús Rafael Soto, Vasarely, Magnelli qui venaient. Il y avait de grandes discussions, parce que les tenants de l’abstraction pure étaient comme des écoles, des chapelles différentes. Entre les artistes géométriques et lyriques c’était deux mondes. Par exemple, il n’avaient pas pardonné à Nicolas de Staël, de revenir à la figuration. Et c’est autour de tous ces sujets et de ces réflexions que l’art a été intégré à sa pensée et son dessin architectural. Toute cette énergie découle de cette période d’après guerre, des Trente glorieuses qui permettaient alors de penser et de reconstruire autrement. Tout était possible et Michel Holley s’en est saisi.

Conception du projet : art - chitecture ARTS VISUELS ET ARCHITECTURE

Au travers de ces influences diverses mais convergentes, Michel Holley a donc cherché un moyen de représentation personnel, l’architecture n’étant pas un élément complètement rigide, mais plutôt qui se module selon sa période et son évolution dans le temps. Il considérait l’architecture comme un ensemble de passerelles entre différents domaines. L’organisation de l’espace que ce soit pour une peinture ou raconter, expliquer quelque chose, dessine alors un ensemble de formes abstraites qui les illustrent.

Depuis le début du XXe siècle nous pouvons constater qu’il s’est mis en place une forme d’échange entre les arts visuels et l’architecture. Les disciplines se nourrissent et naissent de l’intérêt des architectes envers la peinture, la sculpture et autres formes d’art qui remettent en question la forme, la matérialité et les atmosphères des espaces. Pour les artistes, les processus de conception, le vocabulaire architectural, les éléments construits les inspirent également. Leur art, va cependant se montrer plus libre que dans l’œuvre des architectes puisqu’il n’a pas d’usage autre que d’être des supports visuels.

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Cependant l’art donne à l’architecture des références nouvelles qui mèneront à des expériences hybrides comme c’est le cas avec le mouvement De Stijl ou encore l’école du Bauhaus qui met en avant une nouvelle pensée de la relation entre art et architecture. Les expérimentations menées dans les années 1920/1930 ont permis de repenser la pensée et la production du projet architectural et artistique au travers d’une forme de pluridisciplinarité.

Ainsi, en France, dès 1936, nous voyons apparaitre la procédure du 1% artistique, qui invite à intégrer l’art aux espaces publics, puis en 1951 dans les édifices également. La production contemporaine telle que nous la connaissons est approchée par les architectes comme une forme d’appropriation des disciplines qui se mêlent pour alimenter les pratiques. Cette relation est encore discrète et complexe à mettre en œuvre mais suscite des réflexions notamment du point de vue Lapédagogique.relation entre l’art et l’architecture est une forme d’enrichissement réciproque des deux métiers. Une forme d’extension pour l’architecte et l’artiste. La présence de l’art dans le bâti peut être également vu comme un moyen qui permet de sensibiliser le grand public qui ne côtoie pas les musées et Lesgaleries.deuxmétiers ne doivent pas être divisés : l’architecte fait le bâti et l’artiste le complète par le dessin. Ainsi les deux réunis forment une interaction avec le visiteur. De cette collaboration étroite entre artiste et architecte découle une inspiration, une pensée différente de la forme et du projet, par un travail de matérialité nouveau. L’art et l’architecture se présentent alors comme lieu d’indéfinition des limites. L’un et l’autre se nourrissent et se contestent par une forme de remise en question du bord artistique par une pensée architecturale et Ceinversement.quiest aussi c’est intéressant c’est de prendre en compte le fait que, là où un architecte doit faire en fonction d'un contexte, « la création artistique, sans contrainte, laisse à l'imaginaire de l'artiste une liberté totale non pas de faire ce qu'il peut, mais de faire ce qu'il veut. A partir de là, l'art contemporain est libre de témoigner, évaluer, questionner, juger, proposer et finalement

108 influencer la création architecturale93 » LA CONCEPTION DU PROJET ARCHITECTURAL

« relation foisonnante », Pavillon de l’Arsenal, Paris, 2015.

MICHEL HOLLEY Dans la conception du projet architectural de Michel Holley nous pouvons parler d’une recherche de représentation qui permet de faire comprendre. Il existe des formes reprises de la peinture mais également des formes de la nature, organiques, comme dans le travail de Zaha Hadid. Il pense le projet comme une forme d’organe vivant. La conception de l’architecture, pour lui, n’est pas complètement un élément rigide, la preuve en est, ses projets se modulent suivant les périodes et évoluent. Il y a dans sa pensée de l’architecture, des passerelles entre différents domaines, que ce soit l’art, le design, la musique et d’autres aspects plus L’organisationscientifiques. de l’espace que ce soit pour une peinture ou un récit, 93 LANG, Grégory, POLGAR, Pauline, Les artistes et l’architecture, une explique quelque chose : c’est pour cette raison que Michel Holley utilise des formes abstraites pour les illustrer. En son sens, le concept s’exprime mieux à l’aide d’une forme plastique, souvent influencé par la peinture, bien que pas pensé en tant que tel. Il s’agit d’une manière de penser qui se concrétise en une forme qui s’apparente à la peinture. De cette pensée Michel Holley a développé ce qu’il appelle les urbanigrammes, qui se présentent à la fois comme des données brutes, scientifiques, des tableaux mathématiques qui sont aussi plastiques et représentent comme une œuvre graphique. Il s’agit de son support principal de réflexion pour la création de ces projets.

SELON

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FIG HOLLEY, Michel, Urbanigramme du secteur de rénovation Italie, quartier des Olympiades, 1966.

Dans ces dessins Michel Holley utilisait beaucoup les zipatons, qui sont des feuilles autocollantes avec des formes à découper comme voulu. Ces feuilles permettaient de définir plus ou moins des formes et des espaces et se collaient sur le plan. Le côté pratique de cet objet, avec toutes ces formes différentes, c’est qu’elle forme une trame, un élément pratique pour délimiter les zones. Beaucoup de façades, dans les années 1960/1990, avant l’utilisation de l’ordinateur, étaient pensées à l’aide de zipatons. C’est ainsi que certaines matérialités ont été utilisées pour dessiner des formes qui donnent des textures et un effet visuel particulier aux façades.

FIGartificiel.42:HOLLEY, Michel, Variations dans la formulation des bétons des différentes tours, textures d’une des façades des tours des Olympiades, 1969 1977 Au travers de toute cette pensée autour du lien entre l’art et l’architecture, en ressort cette idée selon laquelle, en réalité, ce qui se passe pour trouver une nouvelle forme, inventer quelque chose, c’est qu’il faut plusieurs champs de connaissance. Il apparait comme nécessaire de les mettre en confrontation pour qu’une idée nouvelle puisse arriver.

Dans ses premières ébauches de projets Michel Holley aimait aussi beaucoup dessiner ces premières idées sur des timbres poste pour faire une conception première sur de petits espaces. C’est ce qui lui permettait de focaliser la pensée sur une échelle resserrée pour pousser le concept encore plus loin. Et c’est donc ainsi que la pensée de sa femme, Francine Holley l’a influencé dans sa pensée et sa représentation du projet. Ils se sont par ailleurs mutuellement influencés dans leurs œuvres. Toutes leurs formes se retrouvent dans le travail de l’un et de l’autre. Pour exemple : Francine les travaillait par l’aplat, tandis que lui utilisait le zipaton comme outil architectural pour faire les formes. De l’influence des études de sa femme dans l’art abstrait,

110 Pour ce qui est de Michel Holley, ces façades lui sont devenues propres lors de son intervention à Berlin en 1953. Berlin avait alors invité les huit meilleurs architectes européens à venir construire une allée de tour sur la Stalin Allee. Raymond Lopez et Michel Holley ont alors choisi de créer ce que Holley appelle la façade aléatoire, servant à différencier les tours les unes des autres. Ce modèle berlinois est alors reproduit à Paris sur la demande de Bernard Lafay dans le cadre de la construction de dix tours en périphérie du Nord de Paris. On y voit par la même occasion, la création du système de dalle avec des quartiers de tours qui composent un espace sur un sol

Miche Holley a pu développer sa plastique et sa vision de l’abstraction des formes. Ceci s’exprime par le dessin de zones de tours, une distribution particulière des espaces, la création de cheminements piétons qui mènent à la création de la dalle.

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FIG 43: HOLLEY, Michel, Plan de masse avec utilisation du zipaton, Cité de l’architecture et du patrimoine, Bobigny Pantin, 1959 Sa femme était également issue d’un milieu musical et jouait des heures de piano chaque jour, rendant Michel Holley sensible à la musique et, son histoire et sa composition. Il en tirera d’ailleurs l’inspiration nécessaire pour le dessin de son plan masse des Olympiades puisqu’il y projette une composition inspirée de la manière d’écrire les musiques médiévales, ce que l’on retrouve également aux

112 Olympiades du côté de Place

Fd’Italie.IG44:

Saltarello portée médiévale de musique, auteur inconnu, XIVe siècle. Ce qui converge entre la partition et le plan c’est cette place laissée aux volumes, qui se rapproche de celui de la partition.

FIG 45 : HOLLEY, Michel, LOPEZ, Raymond, Coupe du Front de Seine, Zoning Vertical, 1959 Dans le cadre du projet du Front de Seine, Michel Holley développe une dalle fonctionnelle, qui place une rue piétonne au dessus du terrain alors inondable. Francine a aussi peint de nombreux murs dans des halls d’entrées d’immeubles, constituant ainsi le 1% artistique évoqué plus haut. Cette mesure est alors pour elle un moyen d’entrer dans le monde architectural en y apposant son art. Le 1% artistique est une mesure qui permet de réaliser une ou plusieurs œuvres d’art spécialement conçues pour un lieu. Il s’agit d’une forme d’inversion de ce qui se faisait dans le temps. À l’origine le bâti était construit autour de l’œuvre d’art et n’était pas support à sa diffusion, aucun intérêt particulier n’y était portée, tandis que dans l’architecture contemporaine c’est l’inverse : le bâti peut être utilisé en tant que support de l’art. Le 1% artistique est aussi un moyen qui « permet à des artistes de tendances et d’expressions diverses de créer des œuvres pour un lieu de vie quotidien, de se confronter à l’espace, au milieu urbain et de

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94 MINISTÈRE DE LA CULTURE, 1% artistique [et commande publique], DRAC Provence Alpes Côte d'Azur, Aides & Démarches. 95 MINISTÈRE DE LA CULTURE, 1% artistique [et commande publique], DRAC Provence Alpes Côte d'Azur, Aides & Démarches 96 MINISTÈRE DE LA CULTURE, 1% artistique [et commande publique], DRAC Provence Alpes Côte d'Azur, Aides & Démarches

114 familiariser le public à l’art de notre temps94 » Cette mesure concerne « toutes les opérations dont la maîtrise d’ouvrage est assurée par l’Etat ou ses Etablissements Publics, autres que ceux présentant un caractère industriel et commercial, ainsi qu’à celles dont la maîtrise d’ouvrage est assurée par leur mandataire. Elle s’applique également aux collectivités territoriales ou leurs groupements, dès lors que ces constructions faisaient l’objet de la même obligation à la charge de l’Etat, lors de la publication des lois relatives à la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l’Etat95 » Cette intervention peut prendre une forme plastique, graphique et concerne des interventions paysagères, sur du mobilier, de la signalisation ou en intérieur. L’origine du nom de cette mesure se situe dans l’aspect financier du projet : « Le montant toutes taxes comprises des sommes affectées au respect de cette obligation est égal à 1 % du montant hors taxes du coût prévisionnel des travaux tel qu’il est établi par le maître d’œuvre à la remise de l’avant-projet définitif, hors dépenses de voiries, réseaux et équipements mobiliers. Il ne peut excéder 2 millions d’euros96 . »

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116 CONCLUSION

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Le changement est alors jugé trop brutal, la gestion de la circulation ne semble pas satisfaire la population car cela rend les espaces trop difficilement accessibles et ce pour les différents modes de déplacement. Les lieux forment une discontinuité

118 Ce mémoire à donc abordé deux thèmes différents : le point de vue historique et technique de la création du patrimoine sur dalle et l’aspect plus artistique de ses influences et de sa conception.

HISTOIRE DES OPÉRATIONS DE DALLE Dans la première partie nous avons découvert que l’urbanisme de dalle se présente comme une forme moderne et novatrice de la ville qui se base sur la séparation des flux de circulation afin de résoudre des problèmes d’ordre spatial en raison de l’avènement de la voiture en ville. L’urbanisme de dalle se positionne alors comme un paradigme de la ville de demain. Et la ville de demain se profile comme une ville où les fonctions se séparent et où l’architecture devient infrastructure. Cette pensée soudaine de la ville nouvelle trouve également son origine dans le mouvement de population du centre ville vers la périphérie et d’un besoin de renouveau dans la manière de vivre et d’habiter. La Charte d’Athènes, le congrès des CIAM ou encore le rapport Buchanan s’attellent alors à répondre à ces nouveaux besoins par une réflexion sur la place de l’automobile en ville comme levier économique, par l’apparition de la vitesse en milieu urbain et un besoin majeur d’assainissement de la ville. La réflexion moderniste de l’urbanisme en devenir se concentre alors sur la création d’un espace fonctionnaliste mettant en relation de proximité le travail, le logement, les transports et les espaces de loisirs pour ses habitants. En découle alors une pensée de la ville à une toute autre échelle basée sur le principe de la mobilité et de la flexibilité par la rationalisation des espaces de circulation et la création de ZUP. Ce patrimoine urbain est également marqué par une crise sociale qui demande de reconstruire urgemment la ville sur un nouveau modèle, suggérant des innovations techniques, une densification de la ville, une pensée de l’hygiénisme s’imposant alors comme en rupture complète avec la ville historique. De tous ces besoins nait la ville sur sol artificiel avec son lot de problème…

Noussensibles.l’avons

vu précédemment, l’urbanisme de dalle est décrié par la population et qualifiés comme étant inhumains. Se pose alors la question des moyens existants pour rendre ces espaces sensibles. L’art apporte alors une réponse simple en abordant la notion de perception dans la forme, la composition des espaces, les matériaux employés, la gestion de la lumière dans le projet, le travail du motif, du rythme, des volumes, de la géométrie ou encore celui de l’épaisseur. Dans le cadre des projets sur dalle l’architecture y décrite comme monotone, froide et ce malgré un utilisation de variations des motifs souvent visibles en

valoriser ces lots mais cela forme un déséquilibre avec les périodes plus anciennes où les éléments labellisés auprès d’experts de l’UNESCO et d’ICOMOS sont généralement isolés. ARCHITECTURE ET ABSTRACTION La seconde partie du mémoire portait avant tout sur le lien entre art et architecture afin de comprendre comment le processus créatif peut influencer la conception du projet mais aussi rendre les espaces

119 urbaine avec l’existant, les habitants regrettent la ville traditionnelle horizontale et ont du mal à s’approprier les nouveaux espaces construits. À cela s’ajoute une forme de perte de la dimension humaine dans la conception de ces lieux. D’un point de vue juridique c’est tout aussi compliqué, les droits de propriétés sont vendus en volumes et dépendent de statuts juridiques particuliers et complexe faisant de son entretien un véritable calvaire et le rendant quasiment impossible. Du point de vue patrimonial ses espaces ont besoin d’être revalorisés auprès de ses habitants par de la sensibilisation et de la médiation afin de remédier peut être plus simplement à ces problèmes d’obsolescence. Il va sans dire que les problèmes techniques de ces espaces sont également les plus grands freins à la conservation d’un tel patrimoine, d’autant plus que ces espaces doivent être rénovés et protégés dans le cadre d’ensembles urbains, ce qui demande alors plus de moyens et de ressources. Le caractère hétérogène, le manque de recul historique sur les espaces bâtis rendent aussi la qualification de ces espaces d’autant plus complexes. Il est effectivement nécessaire de

ENVISAGEABLEPATRIMONIAL POUR LES OPÉRATIONS DE DALLE ?

Art et Architecture ce sont pourtant recroisé dans plusieurs courants comme celui du bauhaus qui mêle beaux arts et arts appliqués, créativité et exemplarité technique, qui prône l’utilisation du béton , le travail des volumes, des formes simples et épurées et qui a un rapport étroit avec la création d’œuvres et d’architectures à la fois fonctionnelles, rationnelles et Cescientifique.quiapiqué

ma curiosité lors de l’écriture c’est le rapport qu’avait Michel Holley, architecte connu notamment à Paris pour ces opérations de dalle et le lien qu’il créait entre architecture et abstraction. L’art dans ses projets lui servait de support en utilisant les lignes et les formes comme éléments d’abstraction, offrant la possibilité de rendre les espaces modulables. Son rôle dans la création de ces quartiers était celui de créer un paysage urbain pour l’automobile en générant une esthétique du déplacement tout en respectant le centre historique de Paris. Son objectif était celui de crée de nouvelles formes et un nouveau modèle en périphérie de la ville en se basant sur l’exemple américain des architectures verticales. Il entrevoyait alors la ville comme un ensemble de fonctions, sa conception se voulait globale et dans un approche volumétrique, populaire voire même utopique. Son approche architecture permet finalement de mettre en avant la relation qu’entretient art et architecture en tant que dualité qui s’enrichi Cemutuellement.quiserapproche quelque part du développement du modèle des grands ensembles et des villes nouvelles en Allemagne, où la ville socialiste voit en même temps le jour en se basant sur quatre piliers fondateurs : créer un espace fonctionnel basé sur un système social qui offre des possibilités techniques et esthétiques. De la même manière que ces villes Allemandes, l’urbanisme de dalle montre une volonté de produire un renouveau urbain avec de nouveaux modes de vie en mettant en œuvre une nouvelle gestion des flux en ville, tout en proposant une nouvelle réflexion sur son organisation.

120 façade, ce qui est pas assez suffisant pour satisfaire les citadins.

QUEL DEVENIR

L’architecture sensible est au cœur des réflexions. L’urbanisme de dalle s’impose ici comme l’image parfaite de ce que les architectes et urbanistes appellent « reconstruire la ville sur la ville ». La dalle s’avance aujourd’hui comme une leçon, qui pousse à penser la ville comme un ensemble lié et non plus comme un centre et sa périphérie afin de fluidifier les Sonéchanges.devenir urbain semble aujourd’hui assez incertain notamment à cause des coûts liés à sa rénovation et des problèmes juridiques liés à la conception de ces Lesespaces.solutions auxquelles nous pouvons penser sont avant tout liées à de la médiation et la sensibilisation autour de ce patrimoine, afin de pouvoir le classer et obtenir des fonds pour l’entretenir. La question du réemploi est également une solution qui peut être apportée pour conserver l’essence de ces lieux. Le réemploi suggère un « déjà », symbole d’une histoire à laquelle nous donnons un second souffle, une nouvelle utilisation. De ce fait il s’agirait d’une solution qui permet d’impacter le moins possible un paysage déjà construit mais aussi d’économiser un maximum de ressources pour l’entretien du lieu désigné. La dalle agissant comme une mégastructure ne permet pas d’être démolie aujourd’hui, cela

121 Dans le but de répondre aux problèmes urbains posés par la ville moderne, l’urbanisme de dalle en a oublié une des qualités principales recherchées lors de la création d’une ville : celle de l’adaptabilité. Dans sa recherche d’une nouvelle forme, l’urbanisme vertical a fini par perdre son adaptabilité au site et à l’Homme, niant paradoxalement une évolution future des modes de vies. L’objectif de la gestion des flux en ville a fini par mener à la création d’un modèle qui se veut avant tout fonctionnel, simple avec une planification qui lui est propre. Le problème étant celui du désintéressement vis à vis du site dans lequel le projet s’installe, faisant de ces lieux des espaces qui se ressemblent entre eux, sont complètement déconnectés de leur environnement. Les formes sont brutes, froides, la ville se dessine à une échelle qui ne prend pas en compte l’humain et enfin, l’automobile a pris le pas sur tous les autres flux de circulation. La ville aujourd’hui se construit plus proche de l’homme et de la nature.

122 comporte un trop gros enjeu économique pour la ville. La requalification apparaît donc comme la meilleure position à adopter afin de proposer un lieu où l’équilibre fonctionnel est rétabli par une réorganisation programmatique, des flux, des espaces verts, par la mise en place de nouveaux équipements urbains par exemple. « Le patrimoine bâti hérité du XXe siècle, plus particulièrement celui construit après 1945, constitue une part majeure du tissu de nos villes. Il présente une grande diversité typologique et constructive qui permet d'envisager de multiples stratégies d’adaptation, de transformation, de restauration, de recyclage et de réemploi. Il constitue un gisement important en matière d'économies d'énergie, mais c'est aussi une ressource foncière, spatiale et économique, identitaire et 97 PROGRAMME PLURIANNUEL DE RECHERCHE 2016 2020, Architecture du XXème siècle, matière à projet pour la ville durable du XXIème siècle, en partenariat avec le ministère de la Transition écologique et solidaire et le ministère de la Cohésion des culturelle, qui peut être mobilisée par les différents acteurs de l'architecture et de l'aménagement97 . » Il est donc peut être même possible d’envisager qu’un tel projet soit pris en compte dans un programme comme celui cité ci dessus : « Architecture du XXème siècle, matière à projet pour la ville durable du XXIème siècle ». Ce programme a été annoncé par le ministère de la culture lors du troisième Comité interministériel à l’égalité et à la citoyenneté (CEIC). Son ambition étant de faire « émerger des stratégies innovantes d’intervention et des processus de projet adaptés, qui permettraient d’apporter des réponses significatives aux grands défis sociétaux posés par le territoires et des Relations avec les collectivités territoriales, en lien avec le Plan d’urbanisme construction architecture, l’Agence nationale pour le renouvellement urbain, la Caisse des dépôts et consignations et l’Union sociale pour l’Habitant.

123 changement global et à l’enjeu de la transition écologique98 . »

98 PROGRAMME PLURIANNUEL DE RECHERCHE 2016 2020, Architecture du XXème siècle, matière à projet pour la ville durable du XXIème siècle, en partenariat avec le ministère de la Transition écologique et solidaire et le ministère de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales, en lien avec le Plan d’urbanisme construction architecture, l’Agence nationale pour le renouvellement urbain, la Caisse des dépôts et consignations et l’Union sociale pour l’Habitant.

124

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FIG 9 : Schéma typique de la circulation d’un hôpital, d’après L’automobile dans la ville, Étude des problèmes à long terme que pose la circulation dans les zones urbaines, rapport du groupe pilote et du groupe de travail crée par le Ministre des Transports de Grande Bretagne, Imprimerie Nationale, Paris, 1965, illustration n°55, Bibliothèque de l’École d’architecture de Versailles.

FIG 3 : Projection de la ville américaine en 1950, The Wonder City You may Live to See, dans le Popular Science Monthly, 1925.

FIG 1 : Liste des différentes dalles françaises classées par leur dates de FIGcréation.2:

Principales réalisations d’urbanisme de dalle, HOAREAU BEAUVAL, Christine, Urbanisme de dalle. Urbanisme vertical : Entre utopies et réalités, Le Moniteur, Paris, 2019, 185.

FIG 4 : BUCHANAN, Colin. D, Traffic in Towns, The specially shortened edition of the Buchanan Report, Penguin Special, 1963

FIG 7 : GECUS, Maquette, Les réseaux acquis dans le sous-sol, 1937 / Maquette, Effet radiographique de la nouvelle grille souterraine, 1937

FIG 5 : Table of Fortification, Cyclopaedia, Volume 1, 1728

FIG 6 : GECUS, Maquette, Les réseaux acquis dans le sous sol, 1937 / Maquette, Effet radiographique de la nouvelle grille souterraine, 1937

FIG 8 : MÜNZERG, Josef, l 464, large concrete panel building system, Barets system.

134 ICONOGRAPHIE

FIG 18 : PERRAULT, Dominique, Rendering de l’Université de Séoul en Corée, Ewah Womans university, 2008.

FIG 20 : LANG, Fritz, Extrait de la ville dans le film Métropolis, 1927

FIG 19 : Rendering de la Scala Tower, BIG, Copenhagen, 2008

FIG 12 : HÉNARD, Eugène, La « Rue future », coupe : la verticalité des bâtiments est exploitée autant dans la strate aérienne (terrasses et plateformes) que dans la strate souterraine (évacuation des déchets, transport des personnes et de marchandises), The Cities of the Future, publié dans American City, Janvier 1911.

FIG 21 : Peinture à la gouache, San Angeles, premières esquisses préliminaires du paysage urbain pour Blade Runner, 1980. Œuvre originale

FIG 15 : NEUTRA, Richard, Rushed City, 1923

135

FIG 16 : La passerelle qui mène à l’Immeuble Gironde, Meriadeck, bordeaux, FIGmerrygraph.com17:SANCHIS, A, Dalle Part Dieu, Lyon, BMX, 2018

FIG 13 : LE CORBUSIER, Le Plan Voisin pour le redéveloppement de Paris, F1922IG14 : AURELI, Pier Vittorio, Architecture for Barbarians: Ludwig Hilberseimer and the Rise of the Generic City, AA Files, no 63 (2011): p.14.

FIG 11 : WILEY CORBETT, Harvey, Étude de circulation, pour le plan régional, The skyscraper museum, 1924.

FIG 10 : MARTIN, G, Résidence Cormontaigne, Thionville, vue d’ensemble, s.d., Archives de l’Institut Français d’Architecture, Fonds Jean Dubuisson, 224 IFA 1005/4. Doc. IFA, Paris

FIG 23 : AMARTIN LOPEZ, Alicia, Dark Matter, Kutxa Kultur Plaza, Tabakalera, San Sebestian.

136 perdue lors d’une exposition en 1991. CARDINI RIPCHIP, On the Edge of Blade Runner, Youtube, 2012.

FIG 24 : Bâtiment du Bauhaus de Dessau, Bauhaus universität weimar/archive der moderne, 1926

FIG 27 : ADDENA ARCHITECTS, Le musée du Bauhaus, Dessau, 2019

FIG 30 : Villa Henry, Van’t Hoff, 1916

FIG 29 : MONDRIAN, Piet, Composition II en rouge, bleu et jaune, Peinture, Huile sur toile, n° d’inventaire 1987/0028, 59,5 cm x 59,5 cm, 1930

FIG 28 : VAN DOESBURG, Theo, Counter Construction, Axonometric, Private House, Gouache sur lithographie, Museum of Modern Art, New York, 57,2 cm x 57,2 cm, 1923

FIG 31 : RIETVELD, Gerrit, Maison Schröder, Propriété du Centraal Museum, le musée d’art d’Utrecht, le bâtiment a été inscrit par l’UNESCO en 2000 sur la liste du patrimoine mondial, 1924

FIG 22 : Peinture à la gouache, San Angeles, premières esquisses préliminaires du paysage urbain pour Blade Runner, 1980. Œuvre originale perdue lors d’une exposition en 1991. CARDINI RIPCHIP, On the Edge of Blade Runner, Youtube, 2012.

FIG 26: Le musée du Bauhaus, Heike Hanada laboratory of art and architecture, Weimar 2018

FIG 25 : KANDINSKY, Vassily, Lithographie no. IL (roethel 186) , lithographi e , 35 x 23.5 cm , 1925

FIG 39 : Grand Place, Gare de bus, aujourd’hui également station de tramway au Sud de Grenoble, 1980

137

FIG 35 : CHAUBARD, Lou, MOURCIA, Mathilde, reconstitution d’un des quartiers sur dalle de la ville de Halle Neustadt, PFE ENSA Grenoble, 2021.

FIG 40 : CHAUBARD, Lou, MOURCIA, Mathilde, Plan masse de la ville de Halle Neustadt avec l’apparition des Wohnkomplex, PFE ENSAG, 2021

FIG 32 : MALEVITCH, Kasimir, Carré blanc sur fond blanc, peinture, huile sur toile, 79,4 × 79,4 cm, 1918

FIG 38 : Passerelle d’entrée dans la galerie commerciale de Grand Place, La Villeneuve, Grenoble, 1980.

FIG 41 : HOLLEY, Michel, Urbanigramme du secteur de rénovation Italie, quartier des Olympiades, 1966.

FIG 37 : CHAUBARD, Lou, MOURCIA, Mathilde, reconstitution d’un des quartiers sur dalle de la ville de Halle Neustadt, PFE ENSA Grenoble, 2021.

FIG 42: HOLLEY, Michel, Variations dans la formulation des bétons des différentes tours, textures d’une des façades des tours des Olympiades, 1969 1977

FIG 33 : TATLINE, Vladimir, Monument à la troisième internationale, un projet architectural en mouvement, haut de 400 mètres dont les plans ont été dessinés en 1919 1920

FIG 34 : HOLLEY, Michem, Plan masse du projet du quartier des Olympiades, 1969

FIG 36 : CHAUBARD, Lou, MOURCIA, Mathilde, reconstitution d’un des quartiers sur dalle de la ville de Halle Neustadt, PFE ENSA Grenoble, 2021.

FIG 43: HOLLEY, Michel, Plan de masse avec utilisation du zipaton, Cité de l’architecture et du patrimoine, Bobigny Pantin, 1959

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FIG 44 : Saltarello portée médiévale de musique, auteur inconnu, XIVe siècle.

FIG 45 : HOLLEY, Michel, LOPEZ, Raymond, Coupe du Front de Seine, Zoning Vertical, 1959

139

140 ANNEXES

141

Interview de PICON LEFEBVRE VIRGINIE école15/03/2022nationale

supérieure d’architecture de Belleville durée de l’entretient : 45 minutes Vous avez écrit plusieurs documents, livres sur le sujet du patrimoine sur dalle, qu’est-ce qui vous a intéressé en premier lieu dans ce choix de recherches ? J’ai passé mon diplôme en 1984. A l’école c’était le retour à une architecture inspirée de l’histoire, en exagérant un peu, tout ce qui avait été fait dans les années 50 était considéré comme vraiment inacceptable. C’était l’expression d’un point de vue politique, l’expression du pouvoir de l’argent, du capitalisme. Il y avait une idée que c’était des projets qui avaient rendu la plupart des espace laids. Il y avait eu par ailleurs une mission photographique lancé par la DATA sur le paysage français, pour documenter la France dans les années 80. Le constat fait par les photographes c’était un monde un peu désespérant où les grands ensembles côtoyaient le pavillonnaire. Et l’un et l’autre était absolument déshumanisant. Moi, j’avais envie de savoir pourquoi on avait fait ça. Notamment à Paris, pourquoi est ce qu’on avait détruit une grande partie du 13ème arrondissement, en mettant les habitants dehors ? Pourquoi est ce qu’on avait organisé la destruction du quartier de Belleville ? Il y avait un côté assez militant à travailler sur l’organisation de la ville. Pas forcément avec les architectes d’ailleurs, ça peut être la ville des faubourgs. Et puis un retour a un vocabulaire de la ville historique, une connaissance de la typomorphologie. Un peu moins ici qu’à Versailles, vraiment des projets qui devaient se fondre complètement dans l’architecture des faubourgs très modestes, bien qu’un peu modernisés. Moi, ça me semblait tout de même un peu étrange, pourquoi les architectes seraient devenus fous et auraient fait ça ?

En parallèle de l’agence, après avoir passé un concours pour devenir chercheur à Versailles, j’ai décidé de trouver un directeur de thèse pour encadrer ce sujet là et ensuite de

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143 faire une thèse sur le sujet qui alors n’était pas du tout encouragé à l’époque, ni à la mode. Il y avait de la recherche dans les écoles d’architecture mais c’était très orienté vers le retour à la ville ancienne dans l’optique d’Aldo EnRossi.1989, je me retrouve dans un poste d’enseignement chercheur à Versailles et les étudiants faisaient des projets, comme un jeu, on ne voyait pas la différence entre la ville plus ou moins dessinée des faubourgs et des projets. C’était un peu moins le cas à Belleville, où il y avait cette sorte de relation compliquée entre Henri Ciriani qui voulait continuer une architecture moderne et Bernard Huet qui était plutôt sur des positions qui avaient « introduit Louis Khan dans l’enseignement » et qui voulait revenir à la ville, mais qui n’était pas si critique que ça vis à vis de l’architecture moderne. J’ai trouvé à l’époque Françoise Choay et le sujet c’était pourquoi tout d’un coup, est ce qu’après guerre on change de vision de ce qu’est la ville et son architecture en ville ? Pourquoi on lance la politique de rénovation à Paris ? Pourquoi tout ce dont on a hérité est remis en cause ? Pourquoi vingt cinq ans après, dans les années 1975 on arrête tout ? Et donc, j’ai effectué des recherches en archive, j’ai lu les lettres et c’était difficile car ce sujet là n’intéressait pas grand monde d’une part et il y avait aussi une espèce d’état de fait que la Défense était encore en construction, il n’y avait pas d’archives concrètes, les documents étaient en cours. En 1977, le directeur de la défense, Arnaud Lacaze avait alors dit : on arrête la dalle et on revient au sol naturel. Et donc c’était trop tard pour remettre en cause plus de 60% de l’opération, mais la partie qui s’appelle la zone B derrière l’Arche, est un retour au sol naturel avec immeubles qui devaient se relier à la dalle et finalement tout avait été arrêté. Progressivement on découvre que l’intention n’était pas du tout de gagner de l’argent, capitaliste et commercial mais plutôt dans l’idée de changer la vie des gens, dans une idée progressiste. Revenir à la ville ancienne qui par certains aspects pouvait être considéré comme un projet très conservateur finalement. Au final, l’état des choses c’est que a ville ancienne est formidable et on va continuer avec d’autres moyens, ce

144 qui a été fait d’ailleurs dans les années 1989. On voit des exemples du côté de Montparnasse, avec le travail de Bernard Huet et la place des fêtes, ou un retour de Claude Nicolas Ledoux qui arrive à avoir de l’argent et des matériaux nobles, mais faire la ville ancienne sans pierres, avec des mauvais enduits, des remontés d’étanchéité, des petites portes d’entrées, des parkings quand on voit l’opération d’Antoine Grumbach à côté de la place de Catalogne, on est juste terrifiés, ce n’est pas non plus la solution. Il y a eu un moment dans ma thèse où les choses ce complexifiaient et finalement les choses n’étaient pas la meilleure solution, mais aujourd’hui ce moment là existe encore, vous voyez Fontenay par exemple qui veulent revenir à la ville Haussmannienne alors qu’ils ont la butte rouge, des choses qui peuvent tout à fait se continuer et où les gens sont très heureux mis à part que c’est pas très bien entretenu, petit et à réadapter. Ce mouvement de remise en cause de la modernité continue donc, d’une certaine manière par ceux qui se sont dit que c’était vraiment épouvantable et qu’il faut revenir à la ville ancienne. Bien qu’il faut tout d’abord, avec des moyens tellement différents et des qualités qu’on apprécie même dans la ville de faubourg, on n’est pas capables de les faire et finalement cette texture là est perdue. On a une espèce de… Visuellement des ressemblances. Des cas particuliers comme Val d’Europe existent et les architectes sont heureux d’être dans des opérations qui font penser à des places italiennes mais qui sont loin d’en avoir les qualités. Ça c’est tout le problème non réglé de la question de la réception de l’architecture qui ne repose pas sur des références connues. Moi je ne suis pas spécialement pessimiste parce que je pense que quand on rénove les appartements on s’aperçoit que finalement ils avaient des qualités d’usage, ils étaient grands, avaient des vues, avec une grande partie, pas tous, les appartements dans les immeubles modernistes avaient finalement des qualités supérieures à ce que la promotion aujourd’hui ou les bailleurs sociaux sont capables de faire. Donc voilà où nous en sommes sur le sujet. Comment vous définiriez en quelques mots les caractéristiques de l’urbanisme de dalle français ? Et Américain ?

Le modèle de Fort Worth Texas avec Peter Gruen est une référence

145 américaine notable. Le rapport Buchanan pose pas tellement à la base la question de la dalle, c’est celle de la séparation des piétons des voitures. Cette question peut prendre la forme de la dalle ou d’un quartier au sol où il n’y a plus de voiture. De toute manière, le resultat est le même d’une certaine manière puisqu’il y a une coupure entre la ville active, productive, accessible par les moyens de transport motorisés et un quartier piéton. Il y a beaucoup de petites villes de province qui sont complètement vidées de leur population qui n’a plus accès à la ville, par une espèce de surestimation des pouvoirs de la ville non piétonne dans la ville moyenne, de conserver une certaine forme d’urbanité alors que s’il n’y a plus aucune mobilité voiture dans une zone où les personnes vivent de plus en plus à l’extérieur, il y a des sortes d’effets. Le drame ou l’avantage c’est quand on commence à piétonniser, une grande partie de ce qui se faisait dans la ville où la mobilité était à peu près contrôlée ne peut plus se faire et donc l’accès à des cabinets médicaux vont se faire dans des centres commerciaux en périphérie. On déplace une partie, c’est ça qui est grave, on déplace une partie de ce qui faisait l’intérêt et la mixité de la ville traditionnelle. La ville n’est pas que des formes d’architecture, mais des formes d’accessibilité aussi et le gros risque à Paris par exemple on ne va pas construire une dalle, bien que c’était l’idée dans les années 1960/1970. Une sorte des dalles qui allait jusqu’à ce qu’on appelle aujourd’hui le centre Pompidou avec le projet de Michel Marot de la couverture de Paris Match. FIG 1 : MAROT, Maquette, remarquer la traversée du Boulevard Sebastopol commune à tous les projets de leur temps, double page dans le Paris Match

FIG 2 : APUR, Perspectives, Cahier d’études de Mai 1969, vue de la plateforme depuis la rue St Eustache, 1969

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FIG 3 : APUR, Perspectives, Cahier d’études de Mai 1969, vue vers le centre de commerce international, Quid1969 de ce qui reste autour. En fait ça fait des sortes d’enclaves piétonnes. Alors est ce que sur dalle c’est pire ? Je sais pas. On construit des rampes et des accès avec des escalators etc. Mais d’une certaine manière l’idée de la dalle est la même que l’enclave piétonne. Alors que pour la plupart des urbanistes se sont des choses complètements différentes. La question c’est que quand vous décidez de mettre une ville presque sans voiture, vous enlevez une accessibilité nécessaire aux personnes qui forcément n’ont pas toujours moyen d’avoir recours aux taxis par exemple. Si vous avez par exemple dans une ville moyenne des enfants que vous devez emmener chez le médecin dans un pavillon à quatre kilomètres, vous n’y accèderez pas en vélo. Le sujet aujourd’hui c’est ça, la ville sur dalle, la ville tranquille sans le bruit et la pollution des voitures à un prix qui encore aujourd’hui, n’a aucune réponse sur son contrôle des faits. Et la question est ouverte, j’ai pas vraiment de solution. Mais ce que je sais c’est que comme solution abordable aujourd’hui pour réparer les villes, c’est plus tellement s’intéresser au centre ville, ce serait de refaire la ville autour des centres commerciaux. Parce que c’est quand même « assez terrible d’offrir comme cadre de vie à une grande partie de personnes, des espaces qui ne sont pas conçus pour y vivre mais simplement pour y rester peu et repartir en voiture ». Ce ne sont pas des qualités d’espaces qui préfigurent une qualité de vie meilleure pour la société. Ce qui est le cas des dalles. L’idée était de cacher tous les problèmes de bruit, de pollution etc. L’imaginaire de la ville sous terraine, comme dans un cadre apocalyptique, où finalement on n’accède plus à la surface, c’est comme vivre sur Mars ou sur la Lune. Et puis, je pense que dans un souterrain, un sous dalle, le problème c’est les accès, l’entrée, il y a des problèmes de goulots d’étranglement, des rampes etc. Ce qui m’intéresse dans ces questions

Ne fonctionne pas : processus de conception souvent arrêté avant son terme, exemple de Le Notre à St Germain : on dirait que ça correspond à rien. On peut se dire aussi : on la continue. On arrêté car l’Etat c’est désinvestis de l’urbanisme. 82 : le pouvoir des

147 là, c’est à quoi on peut les raccrocher ? A mon avis la dalle c’était pour la condamner dans les années 1995. C’est vrai qu’il y avait dans les villes, comme à Marseille, quand on sort de la gare, on est sur une sorte de terrasse, qui correspond à peu près à une dalle. Et c’est beau d’être sur une terrasse et de dominer quelque chose, avec de grands escaliers. Il y a donc des références donc pour les personnes qui ont conçu ces dalles. Les références c’était les grandes terrasses, parvis, place, l’exemple de la ville Baroque avec la place du capitole à Rome par exemple où personne ne se plaint d’avoir à grimper et personne ne se plaint de ne pas avoir d’escalators. Forward texas, peter Gruen, Rapport Buchanan : séparation piéton et voiture : forme de la dalle ou quartier au sol sans voiture. Le résultat reste le même : coupure entre la ville active productive accessible par les transports motorisés et les quartiers piétons. Villes de provinces vidées de leur population qui n’y a plus accès en voiture. Le drame/avantage/inconvénient c’est que quand on piéton : déplace une partie des services qui faisait la mixité de la ville traditionnelle vers la périphérie. Dalle des halles jusqu’à Pompidou avec projet de Mauraud : couverture paris match. Quid de ce qui reste autour. Enclave piétonne. Dalle comme l’enclave piétonne même si pour l’urbaniste c’est complètement différent. Ville sans voiture : accessibilité nécessaire supprimée. Sujet : la ville sur dalle, ville tranquille qui a un prix dont on ne contrôle pas bien les effets aujourd’hui. Ne plus s’intéresser à la ville, mais la construire autour des centres commerciaux ? Peur de la ville souterraine. Sous terrain : entrée, accès problématique, rampe, étranglement. A quoi on peut les raccorder ces dalles ? Place du capitole : forme de terrasse avec des escaliers. Idée de faire de grands parvis. Qu’est ce qui fonctionnait ou pas dans ces opérations de dalle d’après vous? Quelles sont les raisons du déclin de ce type d’urbanisme selon vous ?

148 maire à délivrer des PC mis dans la loi. Ces projets aujourd’hui ne seraient plus possibles. Systèmes pas très démocratiques. Concentration des pouvoirs qui déplacent les locaux. Front de Seine : Henri Bresslaire Michel Holley & Lopez. On arrêté, puis l’APUR. Haine de cette architecture. Espace raté alors qu’il pourrait fonctionner. Raison de sous estimation très psychologique et architecturale : l’ordre des choses nobles s’opposent au moins noble (Bachelard, cave rangé, là où on met les cadavres). L’espace reste quand même pratiqué et a été sous estimé. Livre sur les Magroff, espace souterrain urbain : inventaire des espaces construits en sous-sol. Montréal. Dévitalisation de certains lieux et espaces. Le marais, la rue des frambourgeois : forme de dalle car totalement dévitalisé. Jean Millet : 72, génération touchée par la critique de la modernité, Venturi, Dan Caylé : dalle avec patios, non : enlève la possibilité d’éclairer les sous sols au profit de la dalle continue. Rue : le passage des sculpteurs : rouvrir cette rue pour remettre de la lumière sur l’accès des immeubles cachés. (Baucuns ?) Quel avenir pour la dalle ? Bobigny c’est trop tard. Certains espaces sont fichus. Déconstruire pour rejeter un type de population. Détruire des espaces commerciaux. Vanessa Fernandez colloque. Garcia Trotell. Exit la terrasse, la dalle, travail des accès et des dessous. Dalle idéologiquement sans risque de l’expression du capitalisme car réalisé par un maire communiste qui voulait libérer la ville des contraintes et danger de la pollution et de la voiture en ville. Contre l’histoire communiste que cette campagne de démolition qui a été menée. Si non, quelles solutions sont en devenir ? Est-ce que pour vous, l’urbanisme de dalle montre une évolution des modes de vie ? Pourquoi ? En quoi ? Locaux très engagés dans le maintien de ce mode de vie. D’avoir appartement avec vue et pas sur cours avec un Haussmannien. Investissement important des habitants, même des fonctionnaires municipaux. Positions idéologiques plus qu’autre chose sur ces espaces. Expression d’un déni de progrès. Playtime film : architecture épouvantable et fascinante. Journalistes qui ont convaincu que l’espace est mauvais. Alors que le

149 lieu peut être redécouvert en mieux : Lacaton et Vassal par exemple.

Grace à cette école, les étudiants sont allés voir les ateliers de Kandinsky, Magnelli, Vasarely.

150 INTERVIEW DE HOLLEY discussion11KittyAvril2022sur

Francine Holley a fait ses études en Belgique aux Beaux Arts de Lièges. Elle a par ailleurs travaillé pour Fernand Léger. Edward Kelly, Nicolas de Staël, Pollock tout le monde est passé par là. C’est réellement important de savoir ça car ça à tout son intérêt, d’une part, parce qu’effectivement c’était un brassage d’artistes de tous les pays d’une part, et après elle a fait de l’art sacré. Après elle est entrée à l’atelier d’art abstrait, dont les initiateurs étaient Jean Dewasne et Edgard Pilet. Jean Dewasne était un théoricien de l’art qui est à l’origine des couleurs des tubes de Pompidou par exemple. Sur la Défense c’est lui qui a fait tout le système des paliers d’étages, de l’intérieur de l’arche de la défense qui forme en fait un énorme tableau visible par tranches. A eux deux ils tenaient cet atelier avec un brassage de plein d’artistes dans les années 1947/1953. A ce moment là il y a tout un mouvement de peinture abstraite, ici abstraite géométrique faite à partir d’aplats et de formes qui sont proches des formes industrielles qui viennent de Fernand Léger. Dans l’atelier, une fois par semaine les élèves devaient arriver avec leurs tableaux pour avoir une discussion tous ensemble avec ce désir d’abstraction, on avait quitté, abandonné la figuration.

le travail de michel et francine holley Domicile de Kitty Holley Durée de l’entretient : 1h Est il possible de me présenter l’histoire et le parcours artistique de vos parents ?

Mon père était grand massier des architectes en même temps que César était grand massier des sculpteurs. Donc à la maison il y avait à la fois d’une part des peintres, des architectes et des sculpteurs. Ma mère, elle était pianiste. Il y avait donc des mélanges et effectivement après la guerre il y avait cette utopie de refaire le monde : on abandonnait la figuration pour faire de la peinture abstraite et on cherchait de nouvelles manières de vivre, on tentait de trouver des concepts. Pour exemple, Michel Holley a pensé au plan Lafay, qui établis la délimitation des quartiers de la ville que l’on pouvait potentiellement reconstruire. On y imaginait de nouvelles manières de vie, à faire en sorte qu’il y ait plus de lumière, pus de confort, que la vie soit plus pratique de fait. Ça c’est,

151 tout ce qu’il a animé, mais à la maison, il y avait tout ce monde d’architecte, avec d’autres amis comme Olivier Brachat (photographe), Robert Jacobsen (sculpteur et peintre), César Baldaccini, Jesús Rafael Soto, Vasarely, Magnelli… Il y avait de grandes discussions, parce que les tenants de l’abstraction pure étaient comme des écoles, des chapelles différentes. Entre les artistes géométriques et lyriques c’était deux mondes. Par exemple, il n’ont pas pardonné à Nicolas de Staël, de revenir à la figuration. Énergie d’après guerre, les trente glorieuses, énergie de penser et reconstruire autrement. Tout était permis, c’est merveilleux, on aimerait que ça recommence. Je me souviens très bien, petite fille au milieu de tout ça, ça m’intéressait beaucoup. Il faut savoir que ces artistes reconnus après, étaient fauchés à l’époque et ils venaient à la maison pour un repas commun fait par maman. Un jour, César est arrivé et a donné à maman une de ces premières sculptures. Soto jouait à l’époque à la terrasses des cafés un peu de guitare pour pouvoir se nourrir. On a oublié ça, il est vrai qu’a l’époque il y avait besoin de peu pour survivre mais aujourd’hui c’est différent, on ne peut plus bricoler. Ils avaient un idéal et se moquaient de mourir de faim pour aller vers leur truc, alors qu’aujourd’hui tout le monde a besoin de son petit confort. Il y a un vrai changement. A l’époque ils défendaient vraiment leur valeur artistique, leur idéal envers et contre tout. Cet idéal les portaient et ça se raréfie maintenant. Idéal comme influence de la pensée de tous ? Oui, comment on reconstruit le monde, la vie, la ville, l’art, la peinture, la musique. Si tu écoutes Xena Keeth, Boulez, Varez… Xena Keeth est un architecte compositeur, ce qui est intéressant. Quand j’étais petite fille, ils m’emmenaient aux concerts de musique classique. Ils étaient curieux, notamment des concerts du domaine musical, dans les années soixante, il y avait John Cage. En même temps du point de vue de la mode il y avait Courage, Rabane, Mugler arrive bien après. Même au niveau de l’ameublement, il y avait les meubles prise unique, avant c’était un magasin supermarché, où ils faisaient aussi du design. Si tu veux tout ce complète, les formes arrondies, que l’on voit dans l’architecture, la sculpture, la peinture on les retrouve dans l’ameublement aussi. Il y a cette sorte de forme molle qui sort directement d’une soucoupe volante même si j’exagère un peu. C’est une sorte d’énergie qui avait plusieurs

La conception de l’architecture c’est pas complètement un élément rigide, d’ailleurs la preuve, c’est que, en fait, ça se module suivant les périodes et ça évolue. Il y a des passerelles entre différents domaines. L’organisation de l’espace que ce soit pour une peinture ou raconter, expliquer quelque chose, tu peux trouver des formes abstraites qui les illustrent. Comment le concept est alors exprimé ? Le concept s’exprime mieux avec une forme plastique influencée par la peinture mais pas pensé comme tel. C’est une manière de penser, qui se concrétise en une forme qui s’apparente à la peinture. Je ne pense pas que ce soit pensé comme peinture, mais ça me fait penser à autre chose, à chercher des formes d’écriture pour montrer des concepts.

En fait, c’est que, il a son père et son grand père qui étaient généraux, qui ont travaillé donc dans l’armée. Pendant la guerre il avait été au service, dans le FFI, la résistance, quand les allemands tiraient à un endroit il arrivait à savoir d’où sa provenait. Il s’occupait de cette mission. Trouver leurs positions par regroupement d’axes de tir. Ça donne une idée de l’espace et de ce qui se passe au sol, c’est une idée de visualisation. Il racontait également les batailles et les faits, il y avait donc une fois de plus une délimitation des espaces qui étaient parlés dans la famille et discutés.

Mon père cherchait une représentation pour faire comprendre. Il y a les formes qu’il voit dans la peinture, mais aussi, un peu comme Zaha Hadid, les formes de la nature, organiques. Comme ci l’architecture était un organe vivant.

152 tentacules avec différentes discipline qui innervait tout un courant de pensée dans différents domaines, moi je vois ça comme ça.

On a une forme qui résume une pensée. Ce qui est amusant aussi, c’est qu’à l’époque on utilisait beaucoup le zipaton, des feuilles autocollantes avec des formes que tu découpais comme tu voulais et collait sur le plan. Entre parenthèse c’est super intéressant car beaucoup de façades, dans les années 60/90, avant l’utilisation de l’ordinateur, tous les architectes utilisaient le zipaton et du coup ça donnait des formes. Le côté pratique de la chose, avec toutes ces formes différentes, c’est qu’elle forme une trame, un élément pratique pour délimiter les zones. Comment ça fonctionnait l’élaboration des urbanigrammes ?

153 Chez un oncle il avait des soldats de plombs avec lesquels il refaisait la bataille de Waterloo, Austerlitz, donc si tu veux cette histoire de l’espace en quelque sorte est délimité par un espère d’héritage familial et en même temps mon père faisait du bateau. Le bateau demande une certaine vision de l’espace, tu sais où es ton bateau, d’où vient le courant, le vent et toi tu veux aller là bas. Chaque fois tu as un certain nombre de paramètre qui te donne ta position et te permets de visualiser l’espace. Donc je pense que tout ces éléments là qu’il possède que ce soit avec la mer ou l’armée, ça donne une visualisation qu’il a eu très tot. Donc par conséquent quand il a fait ces études d’architecture, la notion d’espace était déjà présente. Il avait une facilité à se projeter dans l’espace à l’échelle de la ville, à construire l’urbanisme. Il était capable de faire des tableaux, un graphique, une forme de déformation, même de chiffres, il fallait faire un tableau, comme un mécanisme. Comment on projette une idée et dans l’abstraction ? Elle existe pas et il faut lui donner une forme. En ce qui concerne mon père, ça a beaucoup à voir avec son expérience familiale et son rapport avec la mer ça c’est sûr. Et avec ma mère, elle avait une notion de l’espace musical, parce qu’elle était premier prix de conservatoire et jouait sept à huit heures de piano par jour une grande partie de sa vie, jusqu’à l’âge de vingt quatre ans avant de choisir la peinture. Il y a donc une structuration de l’espace qui se fait à mon avis dans les premiers temps de l’enfance qui permet après d’avoir des outils. En ce qui me concerne, je fais beaucoup de danse et une peinture très gestuelle, j’ai fait des tapis, des peintures sur d’immenses mur. L’espace à, à voir avec le corps donc moi, la figuration de la forme que je peux déployer elle tient au travail du corps. La forme qui se déploie dans chacun tient beaucoup dans sa formation. C’est une chose imprimée dans le corps très tôt. Dans mon travail je m’intéresse beaucoup aux similitudes entre les chercheurs scientifiques et les artistes et c’est très similaire. En réalité, ce qui se passe pour trouver une nouvelle forme, inventer quelque chose, c’est qu’il faut plusieurs champs de connaissance, il faut les mettre en confrontation pour qu’une idée nouvelle puisse arriver. J’avais rencontré le Professeur Testart qui a inventé le bébé éprouvette. Il était biologiste et faisait des recherches sans trouver. Mais un jour, ne trouvant rien il est parti se promener dans la forêt.

Francinesimilitudes.Holleya peint également de nombreux murs dans des halls Micheld’entrées.Holley aimait beaucoup dessiner ces premières idées sur des timbres poste pour faire une conception première sur de petits espaces. Ce qui permettait de focaliser la pensée sur une échelle resserrée pour pousser le concept encore plus loin.

154 Avant ces études il avait fait les eaux et forêts, s’intéressant alors au cervidés. Eureka, le temps de gestion des cervidés n’est pas le même, le petit arrive à naitre au moment où les conditions climatiques sont suffisantes pour qu’il puisse survivre, mais c’est pas toujours le même temps de gestation contrairement à la femme. Et là ça peut dépasser le temps, il s’est alors inspiré pour prolonger et penser son idée. Chez les idées c’est un peu la même chose. Mon père de son expérience avec l’armée et les bateaux lui ont donné cette vision de l’espace, ma mère par la musique lui a donné une notion de l’espace mental, donné une direction rigoureuse alors que moi la danse m’a donné l’image de l’espace gestuel. En fait la notion d’espace tient beaucoup aux premières expériences, passions que l’on peut développer. Ça peut être utile dans ce que l’on fait et peut devenir complémentaire. Donc quand il a confronté tous ces artistes dans l’effervescence et l’excitation, ça a certainement influencé son travail. Francine et Michel Holley se sont influencés mutuellement. Toutes leurs formes se retrouvent dans le travail de l’un et de l’autre. Francine les travaillait par l’aplat, lui utilisait le zipaton comme outil architectural pour faire les formes, il s’agit de réelles

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