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2.2 Le cas de la ville de Lille : quelles vulnérabilités ?

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certaines villes s’engagent déjà à proposer des stratégies urbaines bas carbones et à les appliquer sur les constructions et sur l’urbanisme de leur ville. En plus d’entamer la transition de manière politique, cela permet de préparer la ville à l’arrivée de la future réglementation énergétique qui risque de secouer le monde du bâtiment.

C’est le cas de la collectivité de Lille, qui s’est engagée dans cette voie depuis plusieurs années.

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2.2 Le cas de la ville de Lille : quelles vulnérabilités ?

Située dans le département du Nord, ancien berceau de l’activité minière, la ville de Lille a été fortement touchée par son histoire et son passé industriel qui lui donne aujourd’hui cette forme urbaine extrêmement dense et minérale. De par sa position à l’entrée de la Belgique et au cœur d’une métropole de plus d’un million d’habitants, elle est soumise à de nombreux flux qui contribuent à son niveau de pollution et à son engorgement. Ces éléments rendent la ville de Lille vulnérable face aux changements climatiques et contribuent aujourd’hui à une exposition importante de la population aux risques climatiques.

Figure 3 Les populations de Lille et de la métropole fortement exposés aux risques climatiques. Source : ONERC

Les changements climatiques sont déjà visibles sur la ville de Lille. Ces effets se traduisent principalement par une augmentation importante des températures moyennes, ainsi qu’une augmentation des jours de précipitation. Ces indicateurs sont calculés et communiqués à travers des rapports d’analyse des vulnérabilités :

Figure 4 Source : Le développement durable à Lille, Rapport 2018

Figure 5 Les épisodes de température extrême en hausse sensible. Source : Diagnostic territorial, MEL, 2018 L’accélération des changements climatiques amplifie donc les vulnérabilités déjà existantes sur la métropole et la ville.

Trois grands enjeux de vulnérabilités majeurs ont été identifiés sur le territoire de Lille :

• L’eau : les territoires sont majoritairement artificialisés rendant les sols trop imperméabilisés, cela entraîne un ruissellement important et une remontée des nappes (territoire construit sur une nappe phréatique subaffleurante) rendant le risque d’inondation majeur pour le territoire en périodes hivernales. Les phénomènes de

périodes intenses de précipitations ont tendance à provoquer des surcharges au niveau des systèmes d’infiltration. Le ruissellement entraîne aussi l’infiltration de nombreux polluants dans les nappes phréatiques rendant la qualité des eaux médiocre. Paradoxalement, des problématiques de sécheresses sévissent sur le territoire en période estivale, plus la quantité d’eau diminue, plus les polluants y sont condensés, rendant la qualité de l’eau encore plus déplorable. Cette vulnérabilité est très importante du fait que le territoire de la MEL est alimenté à 80% par le pompage des nappes phréatiques.

• La chaleur et la qualité de l’air : l’inconfort thermique se fait ressentir dans la ville de

Lille en période estivale que ce soit au sein des bâtiments mal isolés ou exposés mais aussi dans l’espace public. Les épisodes caniculaires amplifient les effets d’ilots de chaleur urbain, et les pics de pollution atmosphérique se multiplient, selon l’agence santé publique France, en augmentant la qualité de l’air, les Hauts-de-France pourraient éviter jusqu’à 6500 décès dus à la pollution par an7. Cela s’explique par une minéralisation extrêmement importante de la ville couplée à un manque sévère d’espaces verts et de végétation haute. En zone très urbanisée, les températures peuvent s’élever jusqu’à +3° par rapport aux zones moins denses.

Figure 6 Les ilots de chaleur urbain sur la Métropole de Lille. Source ADULM : 2017

La qualité de l’air en ville varie en fonction des températures et de la période de l’année. Globalement, la ville de Lille reste souvent au-dessus des seuils de pollution recommandés par l’OMS. Les indices de qualité de l’air au 25 Mars 2021 :

7 Bulletin de veille sanitaire Nord-Pas de Calais et Picardie. (Septembre 2016), Agence Santé Publique France) in. BIGOT A., Rapport d’expertise sur l’adaptation au changement climatique de Lille.

Figure 7 Carte pollution de l'air Lille. Source : plume labs

De Octobre à Mars :

Figure 8 Indices de pollution à Lille ces 6 derniers mois. Source : plumelabs

Légende8 :

- Vert et jaune (AQI entre 21 et 50) : pollution modérée bien que supérieure aux seuils recommandés par l’OMS pour une exposition annuelle. - Orange (AQI entre 51 et 100) : pollution élevée : supérieure à la limite maximum pour 24h établie par l’OMS, certains effets sur la santé peuvent se faire ressentir. - Rouge (AQI > 100) : tout le monde peut commencer à sentir les effets négatifs de la pollution. Une exposition à long terme constitue un risque pour la santé, les niveaux ont dépassé la limite fixée par l’OMS pour une heure.

• Milieux naturels et biodiversité : la fragilisation des milieux a impliqué un affaiblissement de la biodiversité et une reproduction des espèces invasives au détriment des plantes autochtones. La trame verte est quasi inexistante sur le territoire

8 L’indice Plume AQI (Air Quality Index) est un chiffre qui indique un niveau de pollution. « Cet AQI est d’autant plus élevé que la pollution de l’air est forte. Un AQI qui augmente signifie qu’une part croissante de la population est susceptible de ressentir l’effet de la pollution en développant des symptômes à court ou à long terme. » Source : plume labs.

ce qui a impliqué une modification de la répartition des espèces avec une fragmentation des milieux. Les enjeux liés à l’agriculture sont aussi extrêmement présents, les campagnes alentours accueillent des cultures souvent traitées chimiquement polluant les nappes phréatiques.

Ces vulnérabilités engendrent de nombreux risques sanitaires et sociaux telles que les maladies, les décès dus à la qualité de l’eau et à la chaleur. Ce sont donc sur ces vulnérabilités que se base la ville de Lille pour rechercher des solutions à l’adaptation de la ville face aux changements climatiques.

Le Plan climat Air Énergie Territorial de la MEL a donc identifié les activités les plus impactantes sur le climat et l’environnement sur le territoire. Les transports et le secteur résidentiel représentent à eux deux presque les 2/3 de cet impact :

Figure 9 Émissions directes et indirectes de gaz à effet de serre liées à l’énergie

Ces résultats montrent bien qu’une attention particulière doit être portée sur la construction et l’aménagement de la ville pour réduire d’un côté l’impact des constructions mais aussi du transport soumis à l’aménagement minéral et peu praticable de la ville favorisant l’utilisation de la voiture et accueillant de nombreux flux polluants.

PARTIE 2 : Une stratégie urbaine bas carbone pour faire évoluer les pratiques

Face à ses vulnérabilités, la ville de Lille s’est depuis quelques années engagée dans un processus de réflexion pour définir les enjeux et les actions à mener pour atténuer les effets du changement climatique et s’adapter. Pour cela, elle s’est engagée dans de nombreux projets, fait partie du Plan Climat Air Énergie Territorial de la Métropole et a même adapté son programme politique autour de ces enjeux.

Dans ce contexte, la ville de Lille s’est penchée sur la mise en place d’une Stratégie Urbaine Bas Carbone collaborative qui pourrait répondre aux exigences futures en terme de climat. Elle travaille en étroite collaboration avec la MEL et le plan climat Énergie. D’un point de vue politique, la communauté urbaine de Lille a pour but d’intégrer tous les acteurs du territoire à la stratégie urbaine bas carbone : les bailleurs, les promoteurs, les aménageurs, les bureaux d’études et les architectes pourront prendre part à cette stratégie bas carbone. Cet engagement se veut être un travail collaboratif qui soit accueilli par tous, non pas comme une contrainte, mais comme un objectif commun vers une ville bas carbone agréable pour ses habitants.

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