LB n°65 : /DESTRUCTION/

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SOMMAIRE

Quel est le meilleur truc à détruire quand on est éner vé ? p.20-21 Si même les oeuvres meurent : éloge ou blâme de la destruction artistique par une rédactrice indécise Artp.22-24mutilé et propagande d’Etat p.25-28 Réponses des mots croisés p.30 Crédits p.31 2

Edito Quandp.3la

Comment bien effacer quelqu’un de l’Histoire? p.9-12 Tuto pinata ou comment se défouler avec panache tout en restant pacifique p.13-15 Horoscope p.16-17 Mots croisés p.18-19

destruction est une passion : une introduc tion au «nouveau réalisme»! p.4-8

Courriellouvrboite.fr:journaledl@gmail.com

Couverture : Suzanne Gilles Ont contribué à ce numéro : Adrien Barbault, Angeline Wiard, Anouk Hubert, Aubin Maudeux, Axel Martin, Blandine Adam, Caroline Legendre, Cassandre Bretaudeau, Célestine Castrigno, Co ralie Gay, Daphné Lemaître, Eloïse Briand, Eve Elmassian, Flora Fief, Gabriel Barnagaud, Gabriel Schmit, Gwladys Jolivet, Hippolyte Campe, Inès Amrani, Jeanne Spriet, Jeanne Thomann, Lilou Feuilloley, Manon de Maistre, Marie Vuillemin, Mathilde Cloüet, Mathilde Rodrigues, Matteo Vassout, Mélissande Dubos, Noemie Carpentier, Pauline Drancey, Raphael Papion, Raphael Vau dourdolle, Sofiya Pauliac, Solène Roy, Suzanne De lannoy, Suzanne Gilles, Tyfenn Le Roux, Victoria ÉcoleLarrieudu

DirecteurN°TreizièmeLouvr’Boîteannée65,0,50€depublication

On se retrouve pour un nouveau numéro encore une fois, un peu spé cial: Destruction. Attendez, ne partez pas! Ce numéro n’a pas vocation à vous rendre plus cafardeux et mélancolique, mais à s’inscrire dans un trio de numéros (Création, Destruction et surprise!) et nous, en tant que rédacteurs, à repousser les limites de notre créativité pour vous écrire des numéros toujours plus loufoques et divertissants à lire! Dans ce numéro, retrouvez nos célèbres mots croisés, un tuto pour faire une piñata, un article sur la Damnatio Memoriae et pour le reste, continuez de feuilleter les pages pour découvrir toute cette destruction!

EDITO

: Eloise Briand

Rédactrice en chef : Flora Fief

Eloïse et Flora 3

Responsable communication : Alex Martin Maquette : Mélissande Dubos, Lilou Feuilloley, Co ralie Gay, Blandine Adam, Noémie Carpentier

Louvre, Bureau des élèves, Porte Jaujard, Place du Carrousel, 75038 PARIS CEDEX 01.

Facebook : fb.com/louvrboite Twitter : ISSNInstagram@louvrboite:@louvrboite1969-9611.Imprimé sur les presses de l’École du Louvre (France). Sauf mention contraire, ©Louvr’Boîte et ses auteurs. Hello tout le monde!

La destruction. Terrible constat qui fait résonner les échos sordides de ce qui n’est plus, action qui se lit par ce qu’elle retire plutôt que par ce qu’elle produit. La destruction semble être l’opposé même du geste créatif. Et pourtant, l’acte de destruction constitue parfois directe ment le processus créatif… Cet article part d’un constat : les artistes du mouvement « nouveau réalisme » aiment particulièrement détruire ! Drôle de constat me direz-vous ! Certes. Mais j’ai décidé de creuser le sujet, et d’utili ser le thème de la destruction comme prétexte à une petite présentation de ce mouvement majeur de l’art contempo rain.Il est évidemment difficile de résumer et de dresser le portrait des multiples singularités, des nombreuses individualités et des pratiques diversifiées qui composent l’identité des artistes d’un mouvement aussi important que le Nouveau Réalisme. Cependant, il y a quelques constantes qui semblent nourrir et unifier -consciemment ou non- le travail de nombre de ces artistes majeurs de la scène contemporaine. C’est à ces quelques grands principes que je m’attache, pour initier les amateurs ou amuser les connaisseurs.

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QUAND LA DESTRUCTION EST UNE PASSION : UNE INTRODUCTION AU « NOUVEAU RÉALISME » !

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LE NOUVEAU RÉALISME : QU’EST-CE-QUE QUOI ?

Tout d’abord, les nouveaux réalistes c’est qui et c’est quand ? Eh bien ce sont des artistes dont les noms vous sont probablement familiers, ou évo cateurs de quelques images. Arman, Niki de Saint Phalle, Klein, César (oui, oui comme la cérémonie ! Le prix pour les vainqueurs, c’est une copie d’une œuvre de César !). Les nouveaux réalistes se réunissent en 1960 autour de Pierre Restany, critique d’art français. Ils sont alors 9 -Yves Klein, Arman, François Dufrêne, Raymond Hains, Martial Raysse, Da niel Spoerri, Jean Tinguely, Jacques de la Villeglé- et symbolisent leurs filiations par la signature d’une déclaration commune. Dès 1961, ils sont rejoints par César, Mimmo Rotella, puis Niki de Saint Phalle et Gérard Deschamps ou encore Christo et Jeanne Claude. D’accord ! mais… ils font quoi ? Plus qu’un mouvement à l’unité stylistique, les nouveaux réalistes constituent un groupe d’artistes unis par la même conscience, le même désir et la même motivation : re-présenter, d’une nouvelle manière, une réalité changeante et nouEnsemblevelle. ils s’intéressent à la banalité du quotidien, à la nouveauté matérielle, pour tendre à capter la réalité la plus pure des années 60. Ils entendent ainsi dresser le portrait de leur époque, capturer leur présent. Pour cela, ils font des objets du quotidien leur médium au tant que leurs sujets, puisant dans la riche production industrielle qui s’offre à eux. En effet, s’il est besoin d’une remise en contexte, rappelons qu’au tournant des années 60 l’Europe se relève des horreurs de la Seconde Guerre mon diale. Les restrictions qui l’accompagnaient s’éloignent, la reconstruction est déjà bien avancée et l’heure est à la célébration. Chacun est désormais autorisé à jouir des plaisirs qu’offre la vie. L’industrie redémarre et atteint des sommets encore jamais égalés, le plastique est inventé, et le monde découvre les joies de la consommation de masse, de la production en sé rie, du tout jetable, de l’éphémère, du consommable. La société devient consumériste, encore loin d’anticiper les conséquences des abus productifs…

DÉTRUIRE, UNE NOUVELLE MANIÈRE DE CRÉER !

Et c’est cela qui m’amène à vous parler destruction ! Car oui, la destruction, c’est aussi un procédé créatif ! Arman en est probablement le repré sentant le plus emblématique : avec sa série des colères, et notamment Chopin’s Waterloo (1962) il détruit, avec une ardeur impétueuse, des instruments de musique ! Mais il n’est pas le seul : Niki de Saint Phalle, avec ses Tirs (1961-1963), fusille littéralement la toile, César écrase des carcasses de voitures pour Compression « Ricard » (1962). Ils détruisent, altèrent, modifient, déconstruisent, recomposent et déstructurent l’objet du quotidien.

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Les plus théoriques résumeront mon propos par l’expression « les Trente Glorieuses », mais je ne pouvais résister à en énumérer les idées. Les nouveaux réalistes présentent ou re-présentent donc d’une nou velle manière, en abandonnant (partiellement) les médiums tradi tionnels que sont la peinture et la sculpture, une réalité profondément modifiée. Ils ressentent le besoin de faire table rase, et de trouver de nouveaux moyens d’expressions artistiques, lassés par l’abstraction alors en vogue. Ils expérimentent et conçoivent comme jamais en core on a conçu. Arman accumule des objets usagés et jetés, dans des accumulations ou des poubelles, Spoerri pérennise des repas en conservant et fixant à l’identique tous les objets laissés sur la table dans ce qu’il appelle des « tableaux pièges », Tinguely s’improvise bri coleur et utilise des pièces métalliques rouillées pour concevoir des mécanismes autonomes et bruyants, Niki de Saint Phalle agglomère des objets du quotidien pour en questionner le sens, de la Villeglé expose des affiches publicitaires et politiques glanées dans l’espace public, Martial Raysse crée des composition par l’assemblage d’objets hétérogènes sortis tout droit du commerce.

Ils s’opposent au lyrisme de l’abstraction et entendent concevoir avec le réel, en prêtant une grande attention au processus et à l’action quoti dienne comme possible geste artistique.

Ainsi les nouveaux réalistes reprennent et s’approprient les question nements duchampiens, autrement dit la considération que tout objet peut être une œuvre d’art, si l’artiste en décide ainsi. Mais la destruction n’est pas le seul acte quotidien qu’ils considèrent comme pouvant être un geste créatif. Prendre un repas, collectionner, produire en série deviennent des processus créatifs, vivre la nouvelle réa lité devient un art : c’est le nouveau réalisme !

Mais pourquoi me direz-vous ? Eh bien pour une raison simple : les nou veaux réalistes en sont persuadés, il n’y a pas de meilleur moyen pour présenter la réalité que de rejouer les actions de cette réalité ! Fini la peinture des réalistes du XIXe qui représente passivement la réalité, ils veulent montrer la réalité dans ce qu’elle a de plus spontané et de plus concret.

Fini la représentation de l’objet, place à l’objet ! Fini le dessin des actions quotidiennes, place à la vie ! Ils s’attardent donc à reproduire les logiques et les nouvelles pratiques d’une société devenue consumériste, pour en dresser le portrait (voire pour mieux la critiquer). Ils détruisent car la société détruit, ils dé truisent pour rendre compte de l’amplification de la production de déchets. L’objet devenant consommable, son obsolescence lui impose de tomber dans une désuétude inéluctable, il est destiné à être dé truit ! La machine est lancée, les artistes l’ont compris : détruire c’est obtenir un résultat. Désormais, tout acte peut devenir acte créatif.

Voilà ! Maintenant lorsque vous serez face à une tôle de voiture froissée ou une accumulation dans un musée, vous comprendrez aisément qu’il ne s’agit pas d’un vulgaire déchet, mais que c’est bel et bien le résultat d’une complexe volonté de représenter la réalité, dans sa plus juste matérialité.

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L’ESSENTIEL QUI ? Des artistes français parmi lesquels Arman, César, Niki de Saint Phalle et Tinguely autour de Pierre Restany QUAND ? 1960-1970 OU ? En France et en Europe QUOI ? . Présenter d'une nouvelle manière une réalité nouvelle . Créer avec de nouveaux procédés et se saisir des nouvelles pratiques contemporaines . Considérer le geste quotidien comme un geste artistique . Reproduire/rejouer les logiques du capitalisme -tardif. Introduire le réel et le quotidien pour s’ancrer dans son Adrienprésent.Barbault 8

Je ne vais pas vous faire un dessin, mais tous les moyens sont bons pour endommager un monument, avec un peu de force, de volonté et d’imagination, rien ne vous résistera très longtemps. Mais ne vous emballez pas trop vite, reposez ce pied de biche ! Il faut quand même un peu d’organisation pour mener à bien sa damnatio memoriae, et puis d’abord, qu’est-ce que c’est ? Le terme nous vient du latin, il désigne à l’origine un ensemble de condamnations post mortem votées par le Sénat romain vouant un personnage politique à l’oubli après sa mort. Par extension, il s’applique à des pratiques similaires retrouvées dans un contexte non romain.Siles Romains ont excellé en la matière, ils n’ont pas été les seuls à avoir l’idée de maudire la mémoire de leurs souverains s’il se trouvait que la situation politique avait changé. En effet la damnatio memoriae est souvent un acte politique, effectuée par les autorités au pouvoir sur un défunt (bien sûr il faut être mort pour en béné Comment bien effacer quelqu’un de l’histoire?

Je n’apporterai pas de réponse à cette question, parce que c’est la destruction qui est à l’ordre du jour ! Alors, au travail, puisqu’aujourd’hui on va plutôt essayer de comprendre comment effacer quelqu’un de l’histoire, vous l’aurez compris, nous allons parler damnatio memoriae. À vos marteaux ! « Quelle joie de jeter à terre ces visages superbes, de courir dessus le fer à la main, de les briser avec la hache, comme si ces visages eussent été sensibles et que chaque coup eût fait jaillir le sang ! Personne ne fut assez maître de ses transports et de sa joie tardive pour ne pas goûter une sorte de vengeance à contem pler ces corps mutilés, ces membres mis en pièces ; à voir ces portraits menaçants et horribles jetés dans les flammes et réduits en fusion ...» (Pline, Panégyrique, 52) Tout d’abord, comment faire de la destruction efficace ?

Comment entre-t-on dans l’histoire ?

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Attention, si vous grattez un nom dans un cartouche pour le remplacer par le vôtre, c’est de la réappropriation, pas juste de la damnatio memoriae !

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Vexé des manœuvres du règne de sa tante Hatchepsout, il fait marteler son nom sur les statues et les monuments, se gardant bien de la mention ner dans ses annales. Sachant que, chez les anciens Égyptiens, être voué à l’oubli est l’un des pires châtiments puisque c’est par les images, les inscriptions et la pratique des offrandes que le défunt peut continuer à vivre dans l’au-delà.Vousl’aurez compris si on parle encore d’Hatchepsout aujourd’hui c’est qu’une inscription a échappé au processus, celle du temple de Montou à Ermant, ce qui est très pratique pour les historiens car elle énumère les chantiers menés par la souveraine. De la même manière, les trois rois d’Amarna ont vu leurs noms effacés des monuments et gommés de l’historiographie canonique de la XVIIIe à la XIXe dynastie !

-ficier).

On a retrouvé certaines formes de condamnation de la mémoire d’anciens souverains sur les statues d’Akkad en Mésopotamie, avec la destruction de stèles et l’endommagement de statues au niveau du visage et des mains. Des destructions symboliques, donc, puisque ces parties du corps sont associées au pouvoir du dirigeant. Cependant, il semblerait que bien que défigurée, l’image du roi reste à la vue de ses sujets, il s’agirait alors d’une punition de la mémoire du roi et de proclamer sa culpabilité. Nous avons donc ici une atteinte à la mémoire, mais, a priori, on garde bien le souvenir du souverain, pas de quoi faire une damnatio memoriae à proprement parler. La volonté d’effacer un sou verain un peu gênant de l’histoire était plus poussée dans l’Égypte antique, avec quelques cas assez connus. Thoutmosis III, par exemple, maîtrisait assez bien le remaniement artistique de l’histoire.

-

Il est vrai que tout ce travail donne du fil à retordre aux historiens, mais ceux qui ont assurément mis le plus d’énergie dans le processus de l’ou bli d’une personnalité sont les Romains.Sion note l’existence de condamnation de la mémoire dès la République, consignée à l’entourage du défunt, pour qui la sanction consistait, entre autres, à ne plus porter le praenomen de ce dernier, cela de vient une véritable institution sous l’Empire. Et là, ça devient trèsTouttechnique.d’abord, la condamnation qui était à l’origine une décision juridique devient décision du Sénat qui décide de l’apothéose ou de la damnatio memoriae. Si on choisit la deuxième option, s’ensuit une série de procédures assez précises. On commence par outrager le corps, que l’on prive de sépulture (le plus souvent en le jetant dans le Tibre). On détruit les statues, comme celles d’Antoine, qui avait alors été déclaré hostis publicus. On retrouve l’interdiction pour les descendants de prendre son praenomen et son nom est martelé des monuments et des documents publics. Son jour de naissance est consi déré comme corrompu et on l’empêche de figurer parmi les imagines, portraits des défunts de sa gens. On détruit un maximum d’images, outre les statues, les peintures peuvent être grattées et les monnaies à l’effigie du défunt, fondues. Ces mesures sont réservées aux empereurs et peuvent par fois toucher leur famille. Elles font suite à un procès pour crimen maiestatis. Des empereurs tels que Galba, Domitien, Geta ou Néron ont ainsi subi la damnatio memoriae. On interdit parfois de prononcer le nom du condamné dans l’espace public. Vous vous en doutez, c’est plus compliqué que cela, en effet le peuple a son mot à dire là-dessus. Ainsi les condamnations sont parfois réclamées ou décriées par le peuple, et des mesures sont prises afin d’éviter des guerres civiles. De plus, la mémoire est parfois réhabilitée, comme celle 11

gênants. C’est le cas de Nikolaï Iejov, qui a disparu de photographies qui ont au jourd’hui fait le tour du monde. Le concept de damnatio memoriae n’a pas complètement disparu de nos mentalités, mais vous l’aurez compris faire disparaître complètement quelqu’un de l’histoire est d’autant plus complexe, dans une ère de mondialisation, d’informatique et de publication à grande échelle. Vous aurez définitivement besoin d’un peu plus qu’un marteau pour faire une bonne damnatio memoriae Noémie… de Galba, qui aurait montré une attitude digne lors de son assassinat : il aurait tendu le cou à ses agresseurs et son geste a été interprété comme étant en faveur de l’ordre et de l’Empire. Certains même ont essayé d’anticiper la damnatio memoriae et tenté de l’éviter, comme Othon qui soigne particulièrement ses dernières décisions militaires avant de se suicider… Sans pour autant y échapper. La damnatio memoriae n’est pas une idée nouvelle, elle est aussi restée en usage, Staline en a ainsi usé et abusé afin de faire disparaître des docu ments officiels des opposants ou des membres du parti jugés

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Tuto piñata ou comment se défouler avec panache tout en restant pacifique Envie de délivrer le lupus de Hobbes qui rôde en vous vainement ? De détruire Cités et Monts drastiquement ? De fracasser du dur, d’une batte et d’un bond ? De pulvériser et à la fin radier (rageur, soyez-en sûr) vauriens et vils vautours ? Ni séance de psy, ni bâton dynamite, ici, point sans détour, la violence annoncée ne s’exercera que par couleurs criardes exposées sous vos Choixyeux.de la forme et du matériel : Il existe plusieurs possibilités :

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c. Le camp des Espagnols est donc le modèle dont s’inspire ce tuto dans toute cette Histoire, puisque c’est de leurs missionnaires ayant colonisé le Mexique au XVIe siècle que la piñata la plus connue a pu naître. Étoile à 7 branches décorée de papier coloré symbolisant les péchés capitaux et le Mal, la forme creuse en terre cuite suspendue doit être cassée à l’aide d’un bâton, les yeux bandés. Ainsi, le fidèle, guidé par sa foi en Dieu, peut libérer le Bien (les bonbons pour nous) lors des posadas (réjouissances entre voisins au Mexique) ayant lieu un peu avant Noël, le 16 décembre.

a. La team Extrême Orient réclamera probablement les droits d’auteur de ce tuto sans pour autant nous donner d’indication bien claire, si ce n’est un rite agraire en Chine. J’aurais peut-être dû leur demander des préci sions… ? b. Les plus romains d’entre nous privilégieront quant à eux une cruche en argile à remplir de graines, le but étant dans ce cas-là de faire tomber le vase d’un poteau à l’aide d’un bâton (merci Marco Polo, mais les lecteurs ne seront peut-être pas très emballés…).

2. Découper une multitude de bandes de papier journal de 3 à 5 cm de large sur 15 à 20 cm de long (prévoir plusieurs couches de papier mâché).

-> De la farine -> Du sel -> De l’eau

-> Soit du carton, soit un pot de fleur avec des trous au fond, soit un ballon de baudruche

> Version avec ballon : ne pas recouvrir de papier la zone proche autour du nœud du ballon.

-> Un bâton

3. Ménager un espace sans papier mâché par lequel faire passer les sur prises contenues dans la piñata pour l’étape 7.

> Version avec le pot de fleur : prévoir de nouer deux segments de corde distincts au fond du pot (bas de la piñata) s’il y a 4 trous ou plus. S’il n’y en a pas assez, faire passer une corde à travers14

N.B. Il semble que les Amérindiens soient aussi impliqués : certaines peuples auraient eu un rite incluant des pots en argile. Les missionnaires s’en seraient donc inspirés pour mieux faire accepter la religion chré tienne aux autochtones, par le biais des piñatas. Sinon, pour nous, Français moldus, il existe l’option patron en carton (des modèles sont facilement accessibles sur internet) représentant une forme selon notre gré. Ou le ballon de baudruche, pour les moins doués.

-> De la corde ou de la ficelle solide

-> Un bandeau ou un foulard Les étapes de réalisation :

Il vous faudra donc :

1. Fabriquer de la colle à papier mâché (2 tasses de farine, 2 tasses d’eau, 1 cuillère à soupe de sel)

-> Beaucoup de papier journal -> Du papier crépon pour la décoration (facultatif)

6. La déco : Pour les puristes, utiliser des franges de papier crépon de dif férentes couleurs, mais il est aussi possible de laisser s’exprimer librement votre âme d’artiste.

9. Pour le ballon et la forme en carton : percer deux petits trous autour de l’ouverture par laquelle vous avez introduit vos surprises pour y faire passer une ficelle/ corde.

>>> Variante bis destinée au flemmard puriste qui a de l’argent ou au curieux amateur de jolies choses ou à ceux qui ont tenté ce tuto mais qui l’ont foiré et qui veulent voir à quoi ressemble une piñata quand elle est réussie : Au 25 rue des Vinaigriers, vous trouverez la plus ancienne boutique de piñatas de Paris. Celles-ci sont fabriquées par des détenus dans les Yve lines, et Elena Farah, l’initiatrice de ce projet, est la première à avoir fondé une société vendant des piñatas en France. Pour en savoir plus, le site de La Piñata : https://www.lapinata.fr/boutique Solène Roy

8. Remplir la piñata de surprises, bonbons etc.

4. Tremper les bandes de papier mâché dans le mélange et les plaquer contre le ballon de baudruche / pot de fleur / le patron en carton en les entrecroisant.

5. Répéter l’opération deux ou trois fois, en laissant sécher entre chaque couche de papier.

>>> Variante pour une version plus solide : prévoir de la corde en chanvre par exemple, faire des triples nœuds (ou quadruple, ou centuple s’il le faut : ne pas lésiner !), ajouter des renforts au niveau des trous en utilisant du carton ou du bois. En bref, veiller à ce que ce soit assez solide pour ne pas que la piñata s’écrase par terre avant même le début du jeu !

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> Version avec le patron en carton assemblé : découper un trou pour pouvoir faire passer les surprises.

chaque trou et former un gros nœud au bout pour faire butoir. Puis, recouvrir le pot et son ouverture (haut de la piñata) de papier mâché, sans oublier de laisser un trou par lequel faire ressortir la corde, qui servira aussi à introduire les surprises.

7. Faire éclater le ballon

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Mots Questions horizontales : 1. Abattre un édifice  2. Pratique illégale de l’archéologie (ex : dans les tombes égyptiennes)  3. S’enflamme et renaît de ses cendres.  4. Étude scientifique des vestiges des civilisations anciennes.  5. Un Titan ayant dévoré ses enfants.  6.  Substance responsable de la mort de Cléopâtre VII. 7. Destruction lente et chimique par des acides.  8. Une des quatre saveurs.  9. Hiroshima et Nagasaki.  10. Se… un os.  11. Utilisera des explosifs pour dégager un passage. 18

Questions verticales : 1. L’usine AZF en 2001.  2. Action de guerre violente qui laisse tout de même en vie.  3. Les Arméniens et les Juifs.  4. Celle de Smaug avait de l’allure.  5. Elle peut être française, cubaine ou soviétique.  6. Vision de saint Jean.  7. Il danse pour détruire le monde.  8. Première entité de la mythologie grecque.  9. « Tuez-les tous, Dieu reconnaîtra les siens »  10. Vestige ancien.  12. Résultats d’une guerre.  13. Après le Moyen Age.  14. La spécialité du Che.  croisés 19

Eloïse : J’ai envie de lancer mon tel. Puis je me rappelle que ça coûte cher et que j’en ai besoin.20

Quel est le meilleur truc à détruire Marie : sa voix, en lâchant une énorme insulte qui fait se retourner tout le monde sur votre pas sage au Carrousel du Louvre (j’ai testé pour vous).

Lilou : écorcer une branche avant de la ré duire en morceaux (très satisfaisant, ça détend)

CHOIX DE LA

Noémie : un vase, un peu basique, extrême ment satisfaisant sur le coup (petit moins: ramas ser les éclats à quatre pattes sous les meubles, ça calme)

Flora : le mur, il est suffisamment dur pour résister à part si on est vraiment énervé

Coralie : les os de sa petite sœur… Non je rigole. Mais imaginez quand même.

LA détruireREDAC’quandonest énervé?

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Monumentales parfois. Bêtes souvent. Tu sais de quoi je parle, élève qui a déjà failli toucher de ton sac à dos une peinture de la Renaissance en TDO, badaud qui a craint de faire tomber une pile d’assiettes en porcelaine chez un antiquaire. Il arrive dans le monde de l’art qu’il y ait des erreurs, des petits pro blèmes, des accidents plus ou moins gros. Et il arrive même que cela touche des spécialistes... Petit retour dans les archives. En 2001, Stefano della Bella voit un des dessins de sa collection attribué par un expert à Léonard de Vinci. L’œuvre, représentant Orphée poursuivi par les Furies, appartiendrait à toute une série d’ébauches illustrant les poèmes de Politien. Les restaurateurs appliquent sur le dessin, de manière assez usuelle, une solution mélan geant alcool et eau distillée… et sous leurs yeux ébahis, le Léonard de Vinci se transforme en mauvais message codé de James Bond : l’encre se dissout, tout s’efface.

Amis archéologues, ne rigolez pas, il y en a aus si pour vous. Je ne vous ferai pas l’affront de vous rappe ler la perte de reliefs de Khorsabad en 1853, lors de la mis sion de Victor Place, à cause d’une attaque de bandits. Mais je ne résiste pas à conter l’histoire de ce monsieur Mykérinos, celui qui a construit une vague pyramide un peu moins connue que celle de son éminent grand-père et voisin. Non, vous n’avez jamais eu le luxe d’admirer son sarcophage.

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Si même les oeuvres meurent: Éloge ou blâme de la destruction artistique par une rédactrice indécise Il arrive dans le monde de l’art qu’il y ait des erreurs.

L’imagination, quand il faut pallier une si petite dis parition, nous restitue assez aisément la scène exacte du cra tère des Niobides, mais elle peine davantage pour le sarco phage de Mykérinos, dont seul subsiste aujourd’hui un dessin de son aspect extérieur. Et plus d’une fois, dans le fond, c’est cette copie, c’est la copie qui, faute d’original, se fait nou veau chef-d’œuvre, nouvelle relique. Le musée adopte cette fonction quasi religieuse lorsqu’il conserve, tel le Louvre, les précieux relevés permettant de se faire une idée juste des mosaïques de la mosquée Omeyyade de Damas, avant que celles-ci n’aient été restaurées de manière abusive.

Et vous ne l’aurez probablement jamais, bien que l’artefact ait été découvert par l’archéologue Howard Vyse au début du XIXe siècle. Il a en effet sombré en octobre 1838 avec le na vire anglais qui le ramenait au Royaume-Uni, afin de l’exposer au British Museum... Et quand c’est un simple détail qui dis paraît, la perte semble plus anodine mais peut s’avérer tout à fait cruciale. Des générations d’archéologues se sont perdus en hypothèses sur l’iconographie du cratère des Niobides, avant que la technologie ne permette de révéler LE détail, la base sur laquelle repose en fait le personnage d’Héraclès, et que celle-ci ne transforme du même coup ce qu’on pensait être une scène mythologique en quasi unicum exceptionnel de scène historique dans l’art grec.

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De même, qui se souvient de ce sursaut, de ce mouvement qui a suivi l’incendie de Notre-Dame : dans les régions les plus proches de Paris, se manifestait comme une fierté cachée d’avoir la «nouvelle cathédrale», celle que les tours opérateurs inscriraient désormais au programme en l’absence temporaire de l’indépassable mythe de pierre. Des églises qui ne feraient plus uniquement la fierté de Reims, Beauvais ou Amiens, mais bien du pays entier.

Et dans le fond, certaines oeuvres que nous considérons aujourd’hui comme des chefs-d’oeuvres ne sont parfois que de simples numéros deux, tributaires d’une true masterpiece elle aujourd’hui disparue (des bisous aux spé Grèce, accoutumés à l’art de la kopienkritik Et dans le fond, peut-être que leur dis parition ne rend ces œuvres que plus désirables, que plus my thifiables. L’aura de Walter Benjamin, l’aura que possèderait en exclusivité l’œuvre originale et ferait sa force, ne serait-elle pas plus forte encore à travers les maigres témoignages restants d’un chef-d’œuvre définitivement perdu? Combien de touristes se sont imaginé les bras de la Victoire de Samothrace, de l’in terprétation la plus poétique à la plus farfelue, sans jamais re garder autour d’eux, toujours en ignorant délibérément une de ces deux mains, retrouvée en fouilles et exposée pourtant à ses côtés ? La force du chef-d’œuvre disparu, c’est bien de prati quer la politique de la chaise vide, et d’en imposer par la force de son absence. «En Afrique, quand un vieillard meurt c’est une bibliothèque qui brûle» affirmait Amadou Hampâté-Bâ dans un discours à l’UNESCO en 1960. Lecteur, je pensais rédiger un petit top sym pathique sur les destructions les plus farfelues d’œuvres d’art, et les mots m’ont emmenée très loin semble-t-il. J’espère que je t’ai perdu dans cette passionnante dialectique de la destruction, et que tu te poseras avec (encore plus de) densité cette question : qu’est-ce qui disparaît lorsque c’est une œuvre qui brûle ?

Marie Vuillemin 24

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Art mutilé et propagande d’Etat

Lorsqu’enfin, votre ticket en main, vous accédez à l’entrée princi pale du Petit Palais, le parcours commence sur votre gauche. Suivant l’axe du front, l’exposition commence par les œuvres mutilées de Dunkerque pour arriver à Thann dans le Haut-Rhin. Il vous est possible d’admirer des chefs-d’oeuvres tel l’imposant Lion d’Arras, retiré de son beffroi et d’au tant plus monumental ainsi défiguré et à hauteur d’homme, ou encore les gisants du XVIe siècle conservés au château de Tilloloy.

Si la Première Guerre mondiale est connue pour ses nombreuses vies humaines arrachées, l’art, victime plus silencieuse n’a bien entendu pas été épargné. C’est ce qu’a voulu mettre en lumière l’exposition « Art Mutilé » de 1916. A seul but d’informer le public ? Outil politique de choix, elle permet également de raviver la flamme nationaliste française. Un siècle et cinq ans plus tard, visitons ensemble cette exposition et ses coulisses. Mis en lumière à l’initiative du journaliste Charles Hum bert, les dégâts des incendies et des bombardements ont fait l’objet d’une exposition au Petit Palais en 1916, quelque temps seulement après la ba taille de Verdun. 300 pièces mutilées y sont présentées, dont une bonne partie d’œuvres d’art françaises, venant en grand nombre d’églises et de cathédrales incendiées. A l’affiche, le coq de la cathédrale de Verdun attire l’œil. Cette exposition est inédite dans le paysage muséal français : toutes les autres expositions antérieures ont pour habitude d’exalter l’héroïsme des soldats et non de placer le pays en position de victime. Les recettes ont été versées pour moitié à la Fraternité des Artistes, une association de soutien de l’art en des temps si difficiles.

La volonté politique est claire : l’exposition place l’art français catholique comme victime de l’ingérence de l’Allemagne protestante, qualifiée par Jean Vignaud, journaliste pour le Petit Parisien d’ « ennemi implacable de toute civilisation », ravivant par ses mots le traumatisme de la défaite de 1870.

Ceux-ci, présentés dans une salle à part, rappellent au public la scénographie du musée des Monuments Français, ajoutant au ta bleau, comme symbole de la dégénérescence du siècle entrant, les mains mutilées, les têtes coupées et les regards suppliants des hommes autrefois si majestueux. Parmi les œuvres d’arts sont aussi présentées les armes de leur crime : des éclats d’obus sont exhibés à côté de la clo che de Reims à moitié fondue, rappelant l’incendie de sa cathédrale devenue symbole des dégâts de ces régions à l’international.

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L’effet escompté ne se fit pas attendre. Des visiteurs de l’époque ont rapporté, comme Paul Sentenac, être sortis avec quatre sentiments simultanés. En premier lieu, une grande pitié pour ces objets mutilés et ceux à jamais perdus, une admiration pour la richesse du patri moine français, un orgueil d’appartenance à ce peuple mais également une haine contre les Allemands, provocateurs de ce désastre. Alors que les combats continuent, l’exposition prend une place médiatique particulièrement grande ; le défi de revitalisation du nationalisme est accompli. Le patrimoine est présenté comme une victime silencieuse et impuissante des combats.

Cependant, attiré par un détail, l’œil d’un expert s’arrête de vant la Pietà de Soudain, le bras mutilé et la tête posée non loin du corps. La statue a été décapitée bien avant la guerre suite à un acci dent. C’est un symbole fort de ce flou volontairement entretenu entre dégâts de la guerre et dégâts du temps. En effet, l’incident exact de sa destruction n’est mentionné ni près de l’œuvre, ni dans le catalogue d’exposition présenté à l’époque comme un guide de visite. Les photo graphies ont également une place de choix dans l’exposition, permet tant de transmettre une image de l’état des lieux et toucher davantage les visiteurs. Certaines de ces œuvres ont d’ailleurs été ajoutées aux collections permanentes du musée dans une salle dédiée à ce sujet.

Cette équipe d’experts est envoyée avec l’armée pour conseiller le commandant et réduire au maximum la destruction d’œuvre d’art, cessant ainsi de dégrader l’image de l’armée allemande à l’international. Ce corps d’armée a continué d’exister durant la Seconde Guerre mondiale. Cepen dant, ce corps a longuement été accusé par les Français et les Belges d’ins trument de spoliation du patrimoine. L’après-guerre alors, comme à la suite de la chute de l’empire napoléonien, fait l’objet d’une longue période de restitution d’oeuvre et une revendication de dédommagement de la part des belges et des français.

Ce jugement oublie de prendre en compte les efforts de l’armée allemande pour prendre en compte le patrimoine français (et redorer son image !). En effet, suite à l’incendie de la bibliothèque de Louvain en août 1914, une nouvelle section est née et mise en place sur tous les fronts : la Kunstschutz (commission allemande pour la protection du patrimoine).

Cette commission s’est pourtant revendiquée comme faisant par tie de la politique de la Convention de La Haye pour la protection des biens culturels, mise en place en 1907. Cette convention signée par les grandes puissances engage les pays attaqués à indiquer clairement les lieux du patrimoine culturel, scientifique et religieux à ne pas détruire. Elle engage également les attaquants à ne pas s’y attaquer tant que ce lieu ne sert pas de base militaire. Elle montre une attache forte au patrimoine en ce début de XXe siècle. Le non-respect de cette convention en début de conflit s’explique notamment par le manque de sanctions imposées en cas de non-respect. De plus, cette convention ne prend pas en compte l’évo lution du conflit tournant vers la guerre « totale » et limitant ainsi encore un peu plus sa possible mise en place.

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Mais cette réputation des soldats allemands destructeurs de cathédrale et pilleurs de trésors est-elle véritablement justifiée ?

En clair, tout cela dépend encore du point de vue : si du côté allemand on tente tout pour se faire voir en protecteur des biens culturels, du côté français, l’image du pilleur de trésor et destructeur de cathédrales a la peau dure, d’autant plus renforcée par la propagande d’Etatet la volonté de la reprise des combats. RODRIGUES

Mathilde

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réponses réponses horizontales : 1. Démolir  2. Pillage 3. Phénix 4. Archéologie  5. Cronos 6. Poison  7. Corrosion 8. Acide 9. 14.13.12.11.10.AtomiqueCasserDynamiteraMortsRenaissanceGuérilla réponses verticales : 1. Explosion 2. Mutiler 3. Génocides 4. Désolations 5. Révolution  6. Apocalypse 7. Shiva 8. Chaos 9. 10.MassacreRuine 30

CREDITS Couverture : ©Suzanne Gilles p.4 : ©Pixabay p.12 : ©Pixabay p.13-15 : ©Blandine Adam p.16-17 : ©Coralie Gay p.20-21 : ©Pixabay p.23 : ©Marie Vuillemin p.24 : ©Pixabay p.25-27 : ©Blandine Adam p.29 : ©Pixabay 31

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