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LE MAGAZINE DU VIRTUEL ET DE LA RÉALITÉ

janvier 2022 * n°1 * www.spectre.com * 3,90 €

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Édito

e reconnecter ? Explorer ? Plonger ? Ressentir ? Contempler ? Imaginer ? Inventer ? Vivre ? Expérimenter ? Aujourd’hui, plus que jamais il est temps de prendre conscience des profondes âmes qui nous entoure, de notre écosystème, de la biodiversité à l’humanité. Portez un regard émerveillé sur la beauté de notre planète en constante évolution. Exprimer un message n’a jamais été aussi fort qu’avec la nouvelle ère des médias. Tout est possible à travers un écran : le vôtre. Ce magazine est l’écran pour vous reconnecter au vivant. Les arts médiatiques, un nouvel art qui relie la fiction à la réalité. L’art numérique est un art permettant de se re-connecter au vivant. Cet art fait vivre une expérience : un paysage d’idées, un monde d’idées, un écosystème d’idées. Prendre conscience de l’existence de chacun et de notre action sur le monde. Ici, Là-bas, Ailleurs, c’est : l’art qui relie, l’art qui reconnecte, l’art qui ressent, l’art qui ré-imagine, l’art qui ré-invente.

Installation Rainbow Panorama par Olafur Eliasson Spectre * n°1 * pages 3


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Sommaire C’est quoi ? — 1

5 — L’impermanence

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Réalité Virtuelle

Universe of Water Particles 1 8-19

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Réalité Augmentée

Musée d’art digital, TeamLab 2 0-21

Dans la peau — 2

6 — Explorer

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In the Eyes of The Animal

Festival Les Ailleurs 2 2-23

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Interview Studio Marshall

Interview Benoît Baume 2 4-25

Contempler et imaginer — 3 12-13

Nxt Museum Amsterdam

Sous l’eau — 4 14-15 16-17

Aquatic Colors

7 — Ressentir AURA, Nick Verstand 2 6-27

8 — Plonger Portrait - Olafur Eliasson 2 8-29

Portrait - Takahiro Matsuo

Installation Wander through the Crystal World par TeamLab

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Réalité Virtuelle L

a réalité virtuelle est une technologie qui permet de plonger une personne dans un monde artificiel créé numériquement. Il peut s’agir d’une reproduction du monde réel ou bien d’un univers totalement imaginaire. L’expérience est à la fois visuelle, auditive et, dans certains cas, haptique avec la production d’un retour d’effets. Lorsque la personne est équipée des interfaces adéquates, comme des gants ou des vêtements, elle peut alors éprouver certaines sensations liées au toucher ou à certaines actions (coup, impact...).

Les casques de réalité virtuelle Cette immersion se fait au moyen d’un casque de réalité virtuelle qui place un système d’affichage 3D stéréoscopique sur le nez, devant les yeux. Certains modèles sont équipés de capteurs qui détectent les mouvements de la tête pour permettre à l’utilisateur de regarder autour de lui. Les images sont alors recalculées en temps réel pour se synchroniser avec la direction du regard.

Les salles de réalité virtuelle Il existe aussi des salles de réalité virtuelle dans lesquelles les images sont projetées sur les murs, le sol et le plafond avec un système de capture des mouvements qui sert à ajuster la perspective en fonction des déplacements.

La réalité virtuelle et ses applications : jeux vidéo, simulateurs… La réalité virtuelle à destination du grand public a connu un essor à partir de 2015 avec l’arrivée de casques à la fois plus performants et abordables.Google a joué la

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carte de la démocratisation en proposant un modèle en carton baptisé Carboard qui s’utilise avec un smartphone en guise de système d’affichage. Plusieurs constructeurs dont Samsung (Gear VR), HTC (HTC Vive), Sony (PlayStation VR) et Oculus (Oculus Rift) ont sorti des casques munis de capteurs de mouvements principalement destinés aux jeux vidéo et aux applications récréatives. Plus onéreux, ils sont reliés à un ordinateur ou une console de jeu.


Réalité Augmentée L

a réalité augmentée est une technologie qui permet d’intégrer des éléments virtuels en 3D) au sein d’un environnement réel. Le principe est de combiner le virtuel et le réel et donner l’illusion d’une intégration parfaite à l’utilisateur.

Les marqueurs : première étape de la réalité augmentée mobile Les marqueurs sont des repères visuels détectés par l’appareil afin d’effectuer une action. Ils peuvent prendre la forme

d’une image ou d’un symbole mais doivent avant tout proposer un contraste important afin d’optimiser la détection. Ils servent de repères afin de fixer un élément en 3D par le biais de la caméra, indispensable au dispositif. Cependant, les marqueurs sont amenés à disparaître, grâce aux avancées technologiques proposées par Apple et Google.

Les smartphones et tablettes, étape ultime de la réalité augmentée L’avènement des téléphones mobiles, et plus particulièrement des smartphones a rendu possible la miniaturisation de ce type de dispositif : appareil photo, écran et informatique embarquée ont permis le développement d’applications réellement mobiles et pertinentes. Les marqueurs sont des repères visuels détectés par l’appareil afin d’effectuer une action. Ils peuvent prendre la forme d’une image ou d’un symbole mais doivent avant tout proposer un contraste important afin d’optimiser la détection. Ils servent de repères afin de fixer un élément en 3D par le biais de la caméra, indispensable au dispositif.

Un outil professionnel Contrairement à la réalité virtuelle, la réalité augmentée fut majoritairement développée à des fins expérimentales et professionnelles (armée, industrie, etc.). Très vite, les entreprises ont compris les enjeux de cette technologie et ont cherché à se l’approprier. Cependant les barrières technologiques ont longtemps limité son utilisation. Il était nécessaire d’utiliser un ordinateur, un écran et d’autres périphériques encombrants, difficilement utilisables sur le terrain. Avec l’arrivée des smartphones et tablettes, le secteur de la RA est en plein boom et de nombreuses entreprises y trouvent des finalités professionnelles dans leur utilisation.

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In The Eyes Of The Animal

Rentrons dans l’univers du studio Marshmallow Laser Feast, avec son expérience présentée au Festival appelé «Abandon Normal Devices», qui a eu lieu au Royaume-Uni, en 2015.

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ans In the Eyes of the Animal, un voyage à travers la chaîne alimentaire, est une interprétation artistique des perspectives sensorielles de trois espèces britanniques : une mouche, un séquoia, un atome d’oxygène. Créée à l’aide de scans Lidar, de véhicules aériens sans pilote (UAV) ou de drones et de caméras à 360° sur mesure, la pièce est placée sur un paysage sonore binauraux à l’aide d’enregistrements audio provenant de la forêt de Grizedale dans le nord de l’Angleterre. Créé par le studio de création Marshmallow Laser Feast (MLF) - qui se réjouit d’explorer la frontière entre les expériences virtuelles et réelles - cette œuvre acclamée par la critique sera lancée en ligne en septembre 2016. In the Eyes of the Animal peut également être vécu dans un environnement naturel vivant lors de sa tournée actuelle au Royaume-Uni et internationale, où les casques de réalité virtuelle sculpturaux sont suspendus aux forêts en surplomb, permettant aux explorateurs forestiers de traverser le paysage animé et réel. Plongez, marchez prudemment, entrez dans le monde de ces créatures alors qu’elles habitent le tapis forestier et la cime des arbres, et témoignez du monde à travers leurs yeux. In the Eyes of the Animal a été commandé par Abandon Normal Devices and Forestry Commission England’s Forest Art Works. L’édition en ligne a été créée en partenariat avec The Space. Produit par Abandon Normal Devices et Marshmallow Laser Feast. Soutenu par le financement public par Arts Council England et Forestry Commission England.

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Les paysages de l’expérience virtuelle.

Qui est le Studio Marshmallow Laser Feast ?

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tudio Marshmallow Laser Feast est un collectif de réalisateurs, de technologues et d’artistes. Un studio de création qui explore la technologie pour faire du travail qui réinterprète l’idée de perception humaine. L’approche de MLF est celle de la collaboration, créant souvent des logiciels et des systèmes matériels sur mesure pour réaliser leurs visions créatives.

Qui est le Festival Abandon Normal Devices ?

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e Festival Abandon Normal Devices (AND) est un commissaire nomade et un producteur numérique né qui n’a pas peur d’entrer dans de nouveaux territoires et de négocier de nouveaux partenariats. Ce dernier travaille avec des artistes pionniers, qui représentent maintenant plus de 300 artistes contemporains, dont Aram Bartholl, Brody Condon, HeHe, Oreet Ashery, Carolee Schneeman, Phil Collins…

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Interview Studio Marshall À la croisée des arts, des sciences et des techniques d’imagerie et grâce à de sublimes expériences en réalité virtuelle, le studio Marshmallow Laser Feast chamboule notre vision anthrpocentrique du monde.

Vos créations nous proposent de pénétrer dans « l’envers » du vivant. Pourquoi avoir fait ce choix dès le départ ? Ersin Han Ersin : Nous voulions raconter des histoires en portant un regard singulier sur le réel. On voulait voir ce que cela faisait de se mettre dans la peau d’un animal, voir à travers des objets ou observer des entités invisibles qui évoluent autour de nous comme l’oxygène… Toutes ces représentations ne sont possibles qu’en utilisant la réalité virtuelle. Dès le début, nous avons établi quelques règles. La principale était d’utiliser la réalité virtuelle uniquement quand l’expérience ne Spectre * n°1 * pages 10

peut pas être vécue avec nos seuls sens humains. Sans cela, nous considérons qu’il n’y a aucun intérêt à utiliser toutes ces technologies !

Ici, vous montrez le monde vu par les yeux d’animaux. Cette création a-t-elle été structurante pour vous ? C’est le premier de nos projets qui a reçu autant de retours positifs. Au départ, il s’agissait de répondre à une consigne imposée par le Festival Abandon Normal Devices : Comment faire comprendre la vue d’animaux ou d’insectes de la forêt à des yeux humains ? Tout a été tellement enrichissant, et nous avons appris notre façon de travailler. D’abord, se documenter en lisant des tas de recherches et parler avec les scientifiques. Puis métaboliser ces connaissances pour enfin les traduire en expériences. Les concepts scientifiques auxquels on se frotte sont souvent complexes, mais, pour nous, ils sont une formidable opportunité d’exploration. Depuis, l’essentiel de notre travail porte sur la science du vivant, les projets plus commerciaux sont là pour faire tourner le studio.

Comment avez-vous vécu la période de pandémie, au studio ? Ce fut l’une des années les plus chargées pour nous, car certains de nos projets sont entrés en phase de production. On a vraiment eu de la chance, car on a pu lire de nouveaux livres et tester des choses. On a tout un arsenal d’idées et de projets à concrétiser pour les années à venir.


Les animaux avec In the Eyes of the Animal, les arbres avec Treehugger, la photosynthèse avec We Live in an Ocean of Air… , votre travail semble dessiner une saga encyclopédique. Chaque chapitre semble être relié aux autres. La littérature scientifique autour de la nature et des nouvelles façons d’interagir avec elle est un champ immense. À chacun de nos travaux, nous sommes obligés de laisser de côté beaucoup d’idées. Souvent, elles formeront l’essence du projet suivant. C’est ce qu’il s’est passé entre Treehugger et Ocean of Air. Mais si nous avions des ressources illimitées, nous pourrions tout arrêter et avoir suffisamment de matière pour les vingt prochaines années !

Vous représentez le vivant au micropixel près. Pour cela vous utilisez des techniques d’imagerie réservées à certains experts : des ingénieurs, des architectes. Comment mettez-vous la main dessus ? Là encore, on suit de très près toutes les recherches en cours. Souvent, il faut attendre dix ans avant que des technologies présentées en conférences et dans les laboratoires des universités ne soient accessibles au public. À titre d’exemple, on utilise beaucoup la technologie LiDAR, une sorte de radar laser qui permet de créer facilement une représentation 3D d’un espace. Elle n’est que peu utilisée dans le monde de l’art, car elle est gourmande en temps et en coût, mais elle est ultra-précise pour capter le réel, car elle dépasse de loin l’acuité visuelle humaine ! On l’a utilisée pour scanner la forêt que l’on voit dans In the Eyes of the Animal, mais aussi dans la forêt amazonienne et dans les White Mountains (New Hampshire) l’année dernière.

Le futur de MLF, vous le voyez comment ? À terme, on espère pouvoir connecter tous nos projets, et pourquoi pas imaginer une expérience plus holistique à laquelle le public pourrait accéder à partir de n’importe quel écran. Avec les progrès de la réalité augmentée, je pense que dans les dix prochaines années, nos appareils vont totalement changer de format. Ils vont devenir presque invisibles. On accèdera à du contenu via des casques, des lentilles ou des lunettes. La vraie question qui reste, celle que nous ne devons jamais cesser de nous poser, est celle du sens. Qu’est-ce que ça fait de voir l’intérieur d’un arbre ? Qu’est-ce que ça fait d’identifier une plante en la regardant à travers des lunettes, de comprendre son fonctionnement et de voir la quantité d’oxygène qu’elle produit ? Qu’est-ce que cela aura comme impact de visualiser des phénomènes naturels qui étaient jusqu’à présent invisibles ? Est-ce que cela favorisera notre compréhension du monde, notre sensibilité au beau ?

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Nxt Museum Amsterdam

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Le musée Nxt est le premier musée des Pays-Bas dédié aux arts médiatiques. Fusionnant art et technologie, le programme du musée comprend l’évolution des expositions, des performances, de l’apprentissage et de la recherche.

ouvement. Son. Lumière. Un changement soudain dans votre environnement peut déclencher une réaction inévitable - une réponse primordiale. C'est involontaire. C'est irrationnel. C'est naturel. Nous ne pouvons pas le contrôler, c'est ainsi que le corps humain est câblé. L'art s'empare de nos sens. Il transmet des idées, des émotions et des histoires. Morpher nos perceptions et les synthétiser en nouvelles perspectives. Le musée Nxt est le premier musée des PaysBas dédié aux arts médiatiques. Nous nous concentrons sur l’art qui utilise des outils modernes pour incarner les temps modernes. Nous croyons que les outils utilisés dans l’expression artistique reflètent l’époque dans laquelle nous vivons. Cela en fait le moyen idéal de comprendre les complexités contemporaines, ce qui nous permet de reconnaître, de relier et de réfléchir à nos réalités. Basé dans le nord d’Amsterdam, l’espace est construit spécifiquement pour explorer les arts médiatiques ; un art qui élargit les possibilités et les applications techniques, est dynamique et non lié par la forme et qui génère du mouvement physique, mental ou émotionnel. L’espace fournit tous les ingrédients pour que ces formes d’art progressistes grandissent, s’épanouissent et évoluent. Le musée Nxt est un endroit où les créatifs donnent vie à leurs visions. Notre mission est de faciliter les itérations nouvelles et les prochaines d’expression créative. Tout ce que nous faisons, voulons et craignons est directement lié à l’avenir. C’est l’un des concepts les plus fascinants pour l’esprit humain. Une source d’inspiration

passionnante qui suscite des questions sans fin. Aujourd’hui, ces questions sont plus importantes et plus complexes que jamais. Quelle est la prochaine étape ? Nous ne le savons pas, mais nous sommes infiniment curieux d’explorer ensemble.

Où l’art rencontre la technologie L’exposition du Nxt Museum comprend des commandes ambitieuses et des installations artistiques multisensorielles d’artistes, de designers, de technologues, de scientifiques et de musiciens établis et émergents, devenant ainsi un creuset de collaboration interdisciplinaire. Le musée Nxt a pour mission de trouver et de présenter ce qui pourrait, devrait et est ensuite dans l’expression artistique. Ils ont une obsession pour l’avenir et recherchent un art tourné vers l’avenir qui utilise des outils modernes pour incarner les temps modernes.

Hypothèses difficiles et ouverture d’esprit L’exposition actuelle Shifting Proximities explore l’expérience et l’interaction humaines face aux changements technologiques et sociaux. Le musée présente des installations de créateurs néerlandais et internationaux, dont United Visual Artists, Rafael Lozano-Hemmer avec Krzysztof Wodiczko, Marshmallow Laser Feast, Thijs Biersteker et Heleen Blanken. Organisée par Bogomir Doringer et Jesse Damiani, l’exposition est conçue pour changer non seulement l’expérience artistique des visiteurs, mais aussi pour inspirer de nouvelles compréhensions du monde qui les entoure et de leur place au sein de celui-ci. Spectre * n°1 * pages 13


Aquatic Colors Aquatic Colors, une installation créée par le studio Lucent by Takahiro Matsuo en collaboration avec l’architecte Akihisa Hirata, pour le salon, «Salone del Mobile Milano», à Milan, en 2009.

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’installation interactive Aquatic Colors est un spectacle à voir, sans parler de l’expérience pour soi-même. Inspiré du monde sous-marin, il brille d’une lueur d’un bleu profond, transformant chaque visiteur en créature marine lui-même. Pourtant, ce sont les méduses simulées qui volent la vedette. L’installation interactive Aquatic Colors tourne autour d’une fleur de méduses, qui hypnotisera de manière magique.

les visiteurs s’approchent des murs, se déplacent et s’éloignent, le nombre et la fréquence des méduses augmentent et diminuent. Les formes organiques et la palette lumineuse de blues créent un monde sous-marin surréaliste où les mouvements ludiques et les interactions avec l’espace architectural entraînent une communication tacite entre l’artiste et le participant.

Créée par l’artiste japonais Takahiro Matsuo en collaboration avec l’architecte Akihisa Hirata, l’installation Aquatic Colors peut être une exploration à travers la lumière, les projections et l’architecture, mais c’est l’interaction qui séduira vraiment les gens. À mesure que les gens se moudrent environ plus près ou plus loin des murs de l’installation Aquatic Colors, le nombre de méduses augmente ou diminue. Nager dans une mer de méduses sous-marines brillante serait une très belle expérience. Mais, avec un accès limité à la mer profonde, cette installation interactive de l’artiste Takahiro Matsuo pourrait être considérée comme un soutien à ce genre de rencontre réelle. La chambre bleu foncé, un rappel de l’abîme océanique, est un design fluide dans lequel les téléspectateurs peuvent apprécier la beauté de ces créatures fascinantes sans avoir à courir le risque d’une piqûre de méduse. L’artiste japonais a travaillé en collaboration avec l’architecte Akihisa Hirata pour définir cette expérience spatiale 3D unique où l’exploration à travers la lumière, les projections, l’architecture et les interactions humaines est fortement encouragée. À mesure que Spectre * n°1 * pages 14

Un chroniqueur déclare :

« Grâce à l’architecture spécifique de l’espace, c’est une expérience inattendue similaire à la baignade parmi un récif corallien ».


Qui est Lucent by Takahiro ? Le Studio Lucent by Takahiro a été créé en 2012 et se situe à Tokyo, au Japon. Ils inventent des œuvres d’art lumineuses émotionnelles et des éléments de design, en utilisant diverses technologies et expressions esthétiques, qui fusionnent avec l’éclairage, les espaces, les êtres humains et l’interaction.

Qui est le Salon «Salone del Mobile Milano» ? Salone Internazionale del Mobile est un salon où l’innovation, la technologie, la culture de projet et les tendances abondent, fondé en 1961. Le salon comprend un large éventail d’articles tels que : antiquités, pièces innovatrices, pièces uniques, classiques, modernes, ethniques et la dernière technologie. Grâce à l’excellence des exposants, au large éventail de produits, aux scénographies et aux services, le salon devient un événement incontournable avec beaucoup d’activités parallèles.

Qui est Akihisa Hirata ? Après des études d’ingénieur à l’Université de Kyoto, entre 1994 et 1997, et huit années passées ensuite dans l’agence de Toyo Ito & Associates. Akihisa Hirata fonde sa propre agence à Tokyo en 2005. Dès ses premières années de collaboration avec Toyo Ito, il forge une posture conceptuelle qui cherche à réduire l’écart entre la forme construite et la nature. Plusieurs de projets de l’architecte ont été récompensés de prix. En 2012, il a notamment reçu le Lion d’Or à la Biennale d’architecture de Venise pour sa contribution au Pavillon japonais. Spectre * n°1 * pages 15


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é en 1979. Matsuo a suivi un cours de troisième cycle à l'École supérieure de design de l'Institut de design Kyushu.

Artiste Interactif Il est un créateur d'installations lumineuses qui fusionnent l'expression esthétique avec les images, l'éclairage, les objets, la technologie et l'interaction. Il construit constamment des œuvres d'art en utilisant diverses expressions et technologies grâce à l'éclairage, à la programmation et aux images autoproduites. Il produit une installation interactive dans laquelle les gens peuvent se sentir nostalgiques de jouer dans les bois ou d’explorer un monde fantastique dont ils rêvaient dans leur enfance. Actuellement, il produit activement des espaces interactifs, tels que l’installation artistique et la publicité d’images ; dirige des salles de concert et des théâtres. Avec des phénomènes et une régularité de la nature, une expression subtile de la lumière utilisant l'imagination et des œuvres d'art émotionnelles basées sur une approche participative intuitive, Matsuo produit des installations pour des expositions d'art et des espaces publics du monde entier, des œuvres d'éclairage pour des espaces commerciaux, ainsi que des œuvres d'art pour des marques de luxe. Spectre * n°1 * pages 16


Portrait Takahiro Matsuo Takahiro Matsuo, produit un travail qui est une expérience, qui plonge les spectateurs dans leurs imaginations et leurs mémoire.

Ses installations Depuis 2007, il a attiré beaucoup d’attention pour avoir exposé en permanence son travail à l’ARS ELECTRONICA, un festival international d’art médiatique, suivi d’un succès mondial dans de grands festivals et expositions d’art médiatique du monde entier. En 2009, ses installations interactives subtiles ont fait sensation dans le monde entier dans le cadre de l’exposition NEOREAL de Canon au Salone del Mobile en Italie. Matsuo a organisé une exposition personnelle intitulée LIGHT EMOTION à Pola Museum Annex à Ginza, Tokyo en 2011, et au Mitsubishijisho Artium à Fukuoka en 2012. Il a également produit des installations en collaboration avec des bijoux d’archives historiques pour l’exposition Italian Magnificence de BVLGARI à Ginza, Tokyo. Depuis lors, à commencer par l’expansion dans les grandes villes du monde entier des vitrines SEIKO produites pour Baselworld en Suisse, il a produit des créations qui recoupent l’art et le design basées sur un large éventail de technologies et de domaines tels qu’une installation permanente à Shiseido The Ginza, une installation d’éclairage pour CASSINA IX pour le siège social de Shiseido Ginza. KAWAI Crystal Rain a été exposé au Salone de Milan 2018, Italie. En 2020, Matsuo a conçu l’éclairage de TOKYO AIR, Narita Airport. Takahiro Matsuo : INTENSITY a été présenté à l’ANNEXE DU MUSÉE POLA à l’été 2020. Spectre * n°1 * pages 17


Découvrez les deux installations : Universe of Water Particles & Black Waves, créées par le studio TeamLab, toutes deux exposées au Tank, à Shanghaï en 2019.

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ompte tenu du titre, il est inimaginable qu'il ait lieu au TANK Shanghai qui expose de l'art dans d'anciens réservoirs de stockage de pétrole. L'exposition tourne autour des thèmes de la perpétuité et de l'impermanence. Deux installations distinctes illustrent de manière poignante le changement continu et le lien inexplicable des humains avec la nature. L'espace est composé de deux œuvres d'art qui s'affectent et s'influencent mutuellement.

Universe of Water Particles La première oeuvre se nomme « Universe of Water Particles in the Tank, Transcending Boundaries and Flowers and People, Cannot be Controlled but Live Together, Transcending Boundaries – A Whole Year per Hour ». La grande installation est un paysage onirique euphorique d'eau en cascade et de fleurs en fleurs. Le grand espace ultra-subjectif est une expérience interactive. Alors que les téléspectateurs franchitront le sol et touchent les murs, les fleurs s'épanouissent et se dispersent pendant que le flux de la cascade change de cap. Chaque heure, un cycle de fleurs saisonnières d'une année entière fleurit et se flétrit. Regarder le cycle de différentes fleurs fleurir et envahir tout l'espace est envoûtant. L'exposition explore le cycle constant de la vie et de la mort des fleurs et comment il est influencé par l'interaction humaine. L’eau est représentée par un continuum de nombreuses particules d’eau. L’interaction entre les particules est calculée, puis des lignes sont tracées par rapport au comportement des particules d’eau. Les lignes sont «aplaties» en utilisant ce que teamLab considère comme un espace ultrasubjectif. Lorsque les gens se tiennent debout ou touchent la cascade, ils obstruent le flux d’eau comme un rocher, et le flux d’eau change. Le flux d’eau continue de se transformer en raison de l’interaction des gens. Les états visuels précédents ne peuvent jamais être reproduits et ne se reproduiront jamais. L’eau provoque la dispersion des fleurs de fleurs et des gens, ne peut pas être contrôlée, mais l’illustration de vivre ensemble. Spectre * n°1 * pages 18

Universe of Water Particles


Black Waves La deuxième exposition, « Black Waves : Lost, Immersed and Reborn », est plus sombre mais néanmoins, tout aussi émouvante et hypnotisante. Le mouvement des vagues dans l’eau est simulé dans un espace tridimensionnel généré par ordinateur. L’eau est exprimée sous la forme d’un corps continu après avoir calculé les interactions de centaines de milliers de particules. Pour visualiser les ondes, le comportement des particules de l’eau a ensuite été extrait et des lignes ont été tracées par rapport au mouvement des particules. La vague créée dans un espace 3D est ensuite transformée en œuvre d’art conformément à ce que teamLab appelle l’espace ultrasubjectif. Dans la peinture japonaise prémoderne, les océans, les rivières et d’autres plans d’eau étaient exprimés sous la forme d’une série de lignes. Ces lignes donnent l’impression de la vie, comme si l’eau était une entité vivante.

— Black Waves

Cette forme d’expression nous amène à nous demander pourquoi les peuples prémodernes sentaient la vie dans les rivières et les océans. Aussi, pourquoi se sont-ils comportés comme s’ils faisaient eux-mêmes partie de la nature ? Peut-être que quelque chose peut être découvert en fusionnant le monde objectif fixe du savoir commun d’aujourd’hui avec le monde subjectif des peuples prémodernes. En regardant cette œuvre d’art, si nous ressentons un sentiment de vie dans la collection de lignes - ce que l’on peut appeler le monde subjectif des personnes prémodernes - alors c’est peut-être un aspect de la reconnaissance objective. En regardant cette œuvre d’art, plutôt que de regarder des vagues tournées avec une caméra vidéo, les gens peuvent sentir que la barrière entre eux et les vagues disparaît. Ils se sentent immergés dans le travail, peut-être même en ressentant la vie dans la collection de lignes, comme si les vagues les attirant. Si nous nous considérons comme une partie de la nature et considérons la nature non seulement comme quelque chose à observer, nous pourrions nous joindre aux peuples prémodernes pour percevoir les rivières et les océans comme des entités vivantes. C’est une façon de voir le monde qui nous attire et nous permet de sentir qu’il n’y a pas de frontière entre nous-mêmes et la nature. Spectre * n°1 * pages 19


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Musée d’art digital teamLab M

ori Building Digital Art Museum teamLab Borderless, le premier établissement permanent de teamLab, a ouvert ses portes le 21 juin 2018 dans le complexe Palette Town sur l’île d’Odaiba à Tokyo, au Japon. C’est un musée numérique organisé conjointement avec Mori Building Co., Ltd. Pendant leur première année d’opération, le musée a accueilli plus de 2.3 millions de visiteurs venant de plus de 160 pays. Ce qui lui a remporté le titre du musée à artiste unique le plus visité au monde en 2018, dépassant le musée Van Gogh et le musée Picasso. Leurs installations immersives sont multisensorielles, permettant aux visiteurs de découvrir des rizières saturées ou de devenir un papillon flottant dans un jardin chromatique.

TeamLab ? TeamLab se définit comme « un groupe collectif artistique et interdisciplinaire d’ultra technologues dont la pratique collaborative cherche à naviguer dans la confluence de l’art, de la science, de la technologie, du design et du monde naturel. Divers spécialistes tels que des artistes, des programmeurs, des ingénieurs, des animateurs CG, des mathématiciens et des architectes forment teamLab. » Le groupe comprend maintenant 400 créatifs multidisciplinaires concevant des œuvres immersives qui réagissent au mouvement, au toucher et à la présence humains.

2,3 millions de personnes l’ont visité en 2019 !

Le collectif artistique crée chaque œuvre d’art en équipe. Ils commencent par un concept large, puis résolvent leurs idées ; cette approche obscurcit la direction que prendra la pièce. Tout au long de leur processus artistique, ils espèrent influencer le changement sur les valeurs systémiques communes tout en contribuant au progrès sociétal à travers l’art numérique : créer des pièces uniques sans les contraintes de genre ou de matériaux bidimensionnels. Leurs expositions défient les modèles standard de la pratique curatoriale muséale en ce sens qu’il n’y a ni début ni fin d’une galerie ou d’une œuvre d’art particulière. Les créations de teamLab saignent et fusionnent les unes avec les autres. Le visiteur devient conservateur de sa propre expérience en se déplaçant dans l’espace et en s’engageant dans des pièces qui l’attirent. Dans une interview accordée à Japan Objects, teamLab souligne qu’ils ont intentionnellement conçu les expositions de sorte qu’il soit peu probable que les visiteurs rencontrent toutes les œuvres d’art au cours d’une seule visite. « Cela vise à refléter le monde : si vous regardez quelque chose dans le monde, il y a toujours autre chose que vous n’avez pas vu. »

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Festival Les Ailleurs

Nouveau festival né de la collaboration avec Fisheye, Les Ailleurs est un territoire d’expérimentation et de prise de parole sur nos modes de vie à travers le prisme des technologies immersives.

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maginez-vous dans la peau d’un spationaute marchant sur la Lune ou dans l’océan en train de danser avec les méduses. La crise sanitaire nous a privés de voyages, alors les artistes cherchent à nous transporter dans leurs univers. A la Gaîté Lyrique, une vingtaine de professionnels du jeu vidéo, de l’architecture, de la peinture ou de la création sonore proposent d’explorer de nouveaux territoires grâce à la réalité virtuelle ou augmentée. «L’idée consiste à comprendre comment ces voyages immersifs permettent de parler de notre rapport au monde en déplaçant notre perception», explique Victoire Thévenin, directrice artistique du festival Les Ailleurs.

Entre réalité virtuelle et réalité augmentée Douze oeuvres sont disposées le long de trois parcours thématiques au premier étage de la salle parisienne, rénové ces derniers mois et entièrement dédié aux écritures immersives. Muni d’un casque, le visiteur se fonde dans chaque univers grâce à une scénographie dédiée. «L’immersion permet d’aller plus loin que la simple exposition», commente Benoît Baume, président du festival et directeur de la rédaction du magazine Fisheye, partenaire de l’événement. Inspirés du VR Arles Festival qui se tient depuis 2016, Les Ailleurs veulent faire découvrir la réalité virtuelle au grand public, un médium qui intéresse de plus en plus les artistes. Les deux directeurs ont reçu pas moins de 400 candidatures du monde entier lors de l’appel à projets, des étudiants de l’école des Gobelins aux pionniers du jeu vidéo comme le Français Eric Chahi. Le concepteur à l’origine du classique Another World (exposé au MoMA de New York) est venu présenter son jeu vidéo immersif Paper Beast, sorti en mars 2020 sur PlayStation VR, où l’on se déplace

dans un monde peuplé d’étranges animaux en papier. Ici, pas question d’accomplir des objectifs ou d’affronter des ennemis, mais simplement d’errer et de s’émerveiller du décor désertique : «C’est un moyen de s’évader à la fois géographiquement et spirituellement, explique son créateur. Ce qui est intéressant avec la réalité virtuelle, c’est de composer les espaces pour communiquer des émotions. Il y a quelque chose d’assez viscéral.»

Explorer le langage des cachalots Plus immersive encore, l’oeuvre de Randall Okita, The Book of Distance, où l’utilisateur incarne Yonezo Okita, grandpère de l’artiste et immigré japonais au Canada en 1935, juste avant la Seconde Guerre mondiale. «C’est une réflexion sur le fait d’être étranger et d’éprouver physiquement le racisme», explique Benoît Baume. D’autres propositions sont plus énigmatiques, comme La Polyrythmie des cachalots, production sonore d’Antoine Bertin qui invite les participants, confortablement installés sur des poufs, à explorer le langage complexe de ces mammifères marins. Enfin, trois artistes européens se sont inspirés de l’expérience du confinement pour The Smallest of Worlds, sorte de mémoire virtuelle collective à base de «captations photogrammétriques» (modélisation 3D à partir de photos). La création sera d’ailleurs enrichie par le public au fur et à mesure du festival. A la Gaîté Lyrique, chaque visiteur doit interagir avec les oeuvres pour explorer leur univers, en chantant, en dessinant ou même en travaillant sur sa respiration. Des performances «transformatives», comme les qualifie Benoît Baume, persuadé de «l’appétence du public pour la culture». En attendant la réouverture du lieu, contexte oblige, l’expérience est disponible à distance via la plateforme HTC Vive. Spectre * n°1 * pages 23


Interview Benoît Baume Benoît Baume est le fondateur et directeur de la rédaction de Fisheye Magazine, de fisheye360, des galeries Fisheye à Paris et à Arles et du VR Arles festival, et aujourd’hui le Festival Les Ailleurs.

Les Ailleurs est le nouveau VR Arles festival. Racontez-nous cette transformation. En 2016, on a co-créé le VR Arles Festival avec BNP Paribas, les Rencontres d’Arles et Fisheye avec à l’époque une vraie volonté d’explorer le medium vraiment tout nouveau qu’était la réalité virtuelle. On s’est vraiment donnés comme mission de savoir comment est-ce que les artistes, les créateurs, les documentaristes exploraient ce nouveau medium.

Ailleurs de lieu, les Ailleurs de moments. Être ici et Ailleurs à la fois, être hier et aujourd’hui et demain, et tout ça est possible avec l’immersif.

Racontez-nous les coulisses de l’organisation du festival.

Tout ce qu’on avait fait à Arles, a été le socle de réflexion pour lancer une nouvelle initiative, peut-être plus forte, peut-être avec plus de résonance qui se trouve ici à la Gaîté Lyrique.

C’est déjà compliqué de monter une festival, de le monter avec les contraintes qu’ont été les nôtres cela a été extrêmement compliqué. Heureusement on a des partenaires qui nous ont soutenus très fortement : La Gaîté Lyrique qui a cru au projet et avec qui on a développé des choses, BNP Paribas qui évidemment nous a toujours soutenu, l’Institut Français, le CNC qui ont cru en ce projet et qui ont fait que cela a été possible.

On a voulu le nommer « Les Ailleurs », parce que c’était les Ailleurs, de sens, les

Au final, on y est arrivés, d’inventer, une scénographie qui à la fois soit

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Exposition Jelly Fish


accueillante, soit sympathique mais qui réponde aux normes du COVID, c’était aussi des vrais enjeux. La manière dont on pouvait accueillir le public avec des casques qui vont passer de personnes en personne. Finalement, on s’est aperçus qu’avec l’expérience qu’on avait, qu’on était déjà dans ces histoires de normes puisque cela fait déjà plus de 4 ans qu’on nettoie les casques après chaque passage, qu’on met des petits masques en tissus qui viennent protéger le visage, les gens se lavent les mains. Après tout ce par quoi on est passé, enfin on va pouvoir ouvrir au public, les gens vont pouvoir venir ici.

Est-ce important d’avoir des acteurs privés comme BNP Paribas à vos côtés sur le festival ? BNP Paribas a co-créé le festival avec nous, c’est-à-dire qu’à un moment ils se sont engagés sur ce qui n’existait pas, ils ont apporté une vision avec nous, en nous laissant beaucoup de liberté pour faire les choses. En 2020, il y a eu le COVID, évidemment on était dans l’impossibilité de tenir le festival et BNP Paribas a été à nos côtés, a fait en sorte que la structure du festival soit pérenne. C’est quelque chose d’extrêmement important puisqu’on est dans une industrie créative, l’immersif qui n’a pas encore de modèle économique stabilisé. Forcément on est dans un moment de construction, d’exploration et forcément il nous faut des gens à nos côtés pour soutenir cette exploration, pour inventer le monde de demain et il faut avoir une certaine vision, un certain courage pour le faire parce qu’évidemment les retombées à court terme sont moins évidentes, sont moins visibles sont moins fortes. Je crois que c’est vraiment aujourd’hui ce que BNP Paribas fait à nos côtés, c’est-à-dire nous apporter une vision à long terme et avoir ce courage-là. Spectre * n°1 * pages 25


A

URA est une installation audiovisuelle qui matérialise les émotions sous une forme physique perceptible. L’expérience émotionnelle du public se manifeste par des compositions lumineuses organiques et pulsantes de formes, de couleurs et d’intensités diverses. L’installation rend visuellement hommage aux œuvres de lumière solide de l’artiste Anthony McCall, explorant davantage la lumière comme médium. La transformation des émotions en lumière est réalisée par un système scientifique, développé en collaboration avec l’Organisation néerlandaise pour la recherche scientifique appliquée. À l’aide de multiples biocapteurs portables, le système enregistre les ondes cérébrales, la variabilité de la fréquence cardiaque et la réponse galvanique de la peau. À partir des capteurs, les «données» émotionnelles sont analysées et métamorphosées en leur représentation symbolique en tant que lumière. Les différences dans les réponses émotionnelles des individus, influencées par une composition musicale, deviennent visibles par tous ceux qui sont présents.

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AURA explore comment ce processus perceptuel influence la compréhension de nous-mêmes et les uns des autres. L’installation symbolise la matérialisation de l’espace métaphysique (interne) en espace physique (externe). Développée en collaboration avec l’Organisation néerlandaises pour la recherche scientifique appliquée, l’expérience munissait chaque visiteur de biocapteurs portables censés enregistrer leurs ondes cérébrales, la variabilité de leur fréquence cardiaque ainsi que la réponse galvanique de leur épiderme (l’activité électrique enregistrée à la surface de la peau).

Dutch Design Week ? La Dutch Design Week est le plus grand événement annuel de design en Europe du Nord. Il présente les travaux et les concepts de plus de 2 600 designers à plus de 355 000 visiteurs nationaux et étrangers. Organisé à Eindhoven, aux Pays-Bas, l’événement porte sur le design néerlandais


Aura Aura, une installation créée par Nick Verstand, pour la Dutch Design Week à Eindhoven, aux PaysBas, en 2017. Se réclamant de l’expérience audiovisuelle et émotionnelle, l’installation AURA matérialise les émotions de ses visiteurs en formes physiques presque palpables.

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N

é en 1967 au Danemark, il est diplômé des Beaux-Arts de Copenhague. Olafur Eliasson fonde son atelier à Berlin en 1995. Depuis, il expose partout dans le monde, de la Biennale de Venise à la Tate Modern en passant par le Château de Versailles, Pékin et Baltimore. Artsper revient avec vous sur le travail de l’artiste. Ses installations, pour la plupart grandioses, explorent la relation entre espace et temps, nature et science, perceptions et réalité. C’est la mise en tension de ces éléments et leur impact sur le spectateur qui intéressent l’artiste. Il qualifie volontiers son oeuvre d’expérimentale, qualification validée par les conditions de travail dans lesquelles il évolue. En effet, ses oeuvres sont conceptualisées et créées par lui-même et une équipe de plus de 90 personnes. Chaque projet est élaboré ensemble dans un atelier immense à Berlin. La composition de son équipe donne sens a cette appellation inhabituelle. Comprenant artisans, architectes, techniciens spécialisés, historiens de l’art…toutes compétences hétéroclites se rejoignent dans l’effort de création. L’ensemble de ces éléments contribuent à faire de son studio l’un des plus mémorable du monde de l’art.

Expérience immersive La notion de “recherche” est très présente dans son oeuvre, dans son processus créatif. Olafur Eliasson teste, questionne, expérimente. C’est la base de sa démarche artistique. Ses créations explorent la lumière, le mouvement, les formes, leurs effets sur l’environnement et le spectateur. Elles se caractérisent le plus souvent par Spectre * n°1 * pages 28


Portrait Olafur Eliasson

Olafur Eliasson suit une ligne directrice de pratique artistique, qui est sa fascination pour la perception, le mouvement, et les relations entre nature, architecture et technologie. Son œuvre mêle science et technologie, et plonge le spectateur dans une expérience aussi bien physique que psychologique. leur côté immersif, plongeant le spectateur dans un univers de sensations différentes. Le but est de stimuler les sens physiques comme psychiques du visiteur. Son oeuvre The Weather Project exposée à la Tate Modern en 2003, illustre précisément cette idée. Il a recréé un soleil couchant dans le grand hall du musée d’art moderne de Londres. Il s’agit d’un disque d’une quinzaine de mètres de diamètre, nimbé d’une lumière jaune-orangée provenant de multiples lampes éclairant sa surface. Tout l’espace est ainsi baigné de cette lumière, la nature est parfaitement imitée dans cette installation artificielle. Le plafond, recouvert de miroirs, renvoie les “rayons” sur les visages des spectateurs qui n’hésitent pas à s’allonger sur le sol du musée pour profiter du spectacle.

Un artiste engagé Olafur Eliasson est résolument écologiste, et dénonce une société qui souffre, égocentrique, oublieuse de ses besoins essentiels. L’artiste déplore un “manque de savoir-faire en matière de rapports humains”. Pour lui les hommes et les femmes du XXIe siècle ne savent plus comment se connecter véritablement les uns aux autres, et pâtissent de cette incapacité grandissante. Par ses oeuvres, il espère stimuler la conscience humaine et environnementale des spectateurs, les recentrer et leur ouvrir les yeux. Son oeuvre Ice Watch incarne cette idée : en 2015, Olafur Eliasson installe sur la place du Panthéon à Paris six énormes blocs de glace. Ces derniers proviennent d’un glacier du Groenland, tombés naturellement dans la mer par effet du réchauffement climatique.

Cette installation, organisée dans le cadre de la COP21, conférence sur le climat qui se déroulait à Paris à cette époque, représente un cadran solaire : les blocs fondant sur cette horloge improvisée rappellent l’urgence de la situation climatique. Spectre * n°1 * pages 29


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SPECTRE Directeur de la publication et de la rédaction : Gérald Laplanche Conception graphique et direction artistique : Maëliss Guillet maelissguillet@gmail.com Impression : Lycée Charles De Gaulle Crédits images : Google Images Abonnements : 02 20 90 90 90 spectremag@gmail.com - www.spectre.com Références : In the Eyes of the Animal, Ersin Han Ersin, Studio Marshall Laser Feast Aquatic Colors, Takahiro Matsuo, Studio Lucent Universe of Water Particles, Studio TeamLab Festival Les Ailleurs, Benoît Baume Aura, Nick Verstand Olafur Eliasson Nxt Museum Amsterdam Mori Building Digital Art Museum teamLab Borderless

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