FRANCITÉ /61

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Belgique-België P.P. Bruxelles X BC0452

FRANCITé REVUE DE LA MAISON DE LA FRANCITÉ • TRIMESTRIEL • NUMéRO 61 • 1e trimestre 2010 18 RUE JOSEPH II 1000 BXL

1 Pleins feux sur la langue française

Au cœur de la francophonie, l’Afrique

2 La langue française en fête

La politique de la langue française en marche

3 «Une rencontre africaine»

Ateliers d’écriture autour de l’Afrique

4 Un musée africain qui évolue

À la rencontre des cultures africaines

La revue Francité est écrite en nouvelle orthographe

éDITORIAL Une partie significative de la Flandre médiatique et politique a décidé de lancer une originale et subtile offensive (si l’on peut dire) contre les Bruxellois francophones. Le prétexte - l’insécurité - est quelque peu nouveau et artificiellement monté en épingle mais il s’inscrit sans que cela soit vraiment surprenant dans une certaine tradition nationale-populiste qui caractérise de très influents milieux au nord du pays. Selon ces milieux, les dirigeants et commentateurs francophones bruxellois et les Wallons à leur suite feraient preuve de laxisme à l’égard d’une violence insupportable, engendrée par les immigrés. Ce décalage, cette nouveauté dans la manière de s’en prendre aux francophones ne manque pas d’habileté dans le contexte où baigne une partie de l’opinion publique d’aujourd’hui. En réalité, l’objectif de cette péripétie téléguidée est de prendre à revers les francophones bruxellois dans leur obstination à refuser la scission sans contrepartie de l’arrondissement de BruxellesHal-Vilvorde et à revendiquer l’élargissement de Bruxelles vers sa périphérie en fonction du respect de la volonté des habitants que l’on consulterait à cet effet. Quel que soit l’angle sous lequel on aborde le problème de Bruxelles, on s’aperçoit que ce qui sous-tend les revendications flamandes c’est toujours la flamandisation de la Capitale dont on va jusqu’à contester, un peu sottement, le caractère francophone à 90 %. On croit quelque part qu’il suffit de nier les droits démocratiques des immigrés francophones pour isoler les 55 % de Bruxellois, Wallons de la première, la deuxième ou la troisième génération et prétendre que les 10 % de néerlandophones ont le même poids. La négation de toute démocratie réelle est au tournant. Le tout, à grand renfort de statistiques biaisées où les immigrés nés Belges (et ils sont des dizaines de milliers) sont tout simplement privés de leur appartenance à la francophonie. Comme ils sont ignorés dans l’emploi, le logement, les services publics alors que 34 % des emplois bruxellois sont occupés (parfois abusivement) par des Flamands. Sait-on que 10 % des emplois des habitants de la région flamande sont logés à Bruxelles ? Mais notre région serait à la fois mal gérée et dangereuse ! Pourquoi alors, s’en servir à ce point ? La question mérite d’être posée. Heureusement, tout ce remue-ménage dans la presse et les partis du nord du pays n’a eu qu’un succès très relatif. À l’exception de quelques éditorialistes et politiques spécialisés dans l’auto-dérision et l’autocritique francophones, la quasi-totalité des commentateurs et responsables wallons et bruxellois, tous partis confondus, a repoussé les tentatives saugrenues d’obliger les Bruxellois francophones à se flageller. Ceux-ci ne sont pas prêts à tomber dans les pièges qui leur sont tendus. La police bruxelloise n’a pas raflé les juifs en 1942. Celle d’Anvers bien. Il y a parfois des exemples historiques de différence fondamentale dans l’approche des problèmes fondamentaux. Ainsi, quand M. Lukas VANDER TAELEN, député Groen, friand de jugements sommaires et dénigrants à propos de l’insécurité à Bruxelles, écrit que les francophones n’ont «pas encore digéré l’idée que la Wallonie n’est plus la grande nation qu’elle fut au début du siècle dernier» il montre combien son ignorance est grande de l’absence quasi-ontologique d’un nationalisme wallon assimilable à celui de la Flandre militante. Le droit du sol et celui des gens sont antagonistes. Comment ne le comprend-il pas ? Et quand il ajoute que nous n’avons «toujours pas compris que la francophonie n’a plus le même poids au niveau culturel qu’il y a cent ans» il montre sa cécité incroyable devant le phénomène irréversible de la francisation de Bruxelles et de sa périphérie. Nier la réalité ne la modifie pas. M. VANDER TAELEN l’ignore. Sa formulation agressive relève d’ailleurs d’une inutile provocation. Car si nous savons bien que le français n’est plus la perle de l’univers, qu’il existe plus de locuteurs en chinois, en farsi, en indi, en espagnol, en anglais qu’en français ; que l’anglais, pour des raisons de domination impérialiste, tend à épouser la mondialisation économique ; nous savons aussi que le néerlandais n’existe pas sur le plan international, ce qui n’est nullement - d’après nous - une raison suffisante pour le maltraiter (comme on le fait du français en Flandre) sur le plan national et bruxellois. La conception francophone est celle du bon sens, de l’équité et du respect d’autrui. On souhaiterait beaucoup que la Flandre moderne soit capable de se hisser à ce niveau qui, seul, légitime l’État de droit auquel elle aspire.

Serge MOUREAUX

Président Honoraire du Parlement francophone bruxellois

Pleins feux sur la langue française En ce début de printemps, un air de fête plane sur la Francophonie institutionnelle : elle soufflera ses quarante bougies. Une raison supplémentaire de célébrer ce 20 mars, Journée internationale de tous les francophones ! a Francophonie ne s’est pas faite en un jour. En 1926 est fondée l’Association des écrivains de langue française et en 1950 l’Union de la presse francophone, suivie en 1955 par la Communauté des Radios publiques francophones. C’est en 1960 qu’apparait la première institution intergouvernementale : la Conférence des Ministres de l’Éducation (Confemen), dont aujourd’hui 41 États et gouvernements sont membres. Suivent en 1961 l’Association des universités francophones, en 1967 l’Association internationale des parlementaires de langue française, et en 1969 la Conférence des ministres de la Jeunesse et des Sports. Quant à elle, l’Agence de Coopération culturelle et technique voit le jour en 1970. Devenue Organisation Internationale de la Francophonie, elle rassemble aujourd’hui 70 États et gouvernements répartis sur les cinq continents. Pour améliorer sa visibilité, une Maison de la Francophonie sera ouverte à Paris au printemps 2010, tandis que Montreux accueillera du 22 au 24 octobre le Sommet de la Francophonie.

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Au cœur de la francophonie, l’Afrique En 2010, cap sur l’Afrique francophone, où 15 pays membres de l’O.I.F. célèbrent leurs 50 ans d’indépendance : le Bénin, le Burkina Faso, le Cameroun, le Congo-Brazzaville, la Côte d’Ivoire, le Gabon, Madagascar, le Mali, la Mauritanie, le Niger, la République centrafricaine, la République démocratique du Congo, le Sénégal, le Tchad et le Togo.

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Dans les décombres du colonialisme, nous avons trouvé cet outil merveilleux, la langue française », affirmait Senghor, l’un des pères fondateurs de la francophonie. Cet élan de solidarité francophone est né sous l’impulsion de trois dirigeants africains : le Sénégalais Senghor, le Tunisien Habib Bourguiba et le Nigérien Hamani Diori. Sans oublier le rôle tenu par le Cambodgien Norodom Sihanouk. Mettre le français au service de la solidarité, du développement et du rapprochement des peuples, tel est leur ambitieux projet. C’est à Niger qu’est signée le 20 mars 1970 la Convention créant l’Agence de coopération culturelle et technique. Dès sa fondation, l’Afrique est déjà largement représentée avec 14 pays membres. Aujourd’hui, sur les 70 États et gouvernements de la francophonie, 32 sont africains. De nombreux projets de l’O.I.F. sont tournés vers l’Afrique. Citons le Fonds francophone de production audiovisuelle du Sud, qui a déjà soutenu la réalisation de 1.400 œuvres audiovisuelles ; les Cen-

tres de lecture et d’animation culturelle, qui donnent accès aux livres et à la culture dans les zones rurales de nombreux pays africains ; le marché des Arts du spectacle, créé en 1993, visant à promouvoir œuvres et artistes africains sur la scène internationale. De plus, le 14e sommet de la Francophonie se tiendra à Kinshasa en 2012.

Démocratie et francophonie 2010 marque le 10e anniversaire la Déclaration de Bamako qui fonde les principes de la démocratie, des droits et libertés de la Francophonie. En vertu de ce texte, trois États africains ont récemment été suspendus de l’O.I.F. pour avoir enfreint ces principes fondamentaux : la Guinée, Madagascar et la Mauritanie. Cette dernière a cependant pu réintégrer l’O.I.F. en décembre 2009, après avoir tenu des élections présidentielles dans des conditions satisfaisantes.


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