Dr Romain Nati directeur général du Centre hospitalier de Luxembourg
« Nous sommes en train de réinventer l’hôpital » Confronté à une crise sanitaire sans précédent, le milieu hospitalier est contraint de s’adapter et de repenser, de jour en jour, sa manière de prendre en charge les patients.
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irecteur général du CHL depuis 2012, le Dr Nati est pneumologue de formation. On peut difficilement faire plus approprié face à une épidémie causée par un virus qui s’attaque aux voies respiratoires. Après les épisodes du SRAS en 2002 et du SRAS d’Orient en 2012, qui avaient épargné le Grand-Duché, le SARS-CoV-2 et la maladie qu’il provoque, le Covid-19, ont cette fois touché de plein fouet notre petit pays. Les premiers cas enregistrés au comptegouttes ont laissé place à une flambée du nombre de contaminations pour dépasser le millier au 25 mars. « C’est un moment unique dans une vie professionnelle et j’espère qu’il le restera, confie le Dr Nati à Paperjam. Un moment auquel on n’est évidemment pas préparé. C’est vrai qu’on a vu venir l’épidémie doucement, on sait ce qui va arriver dans deux semaines. Mais il y a quand même des différences entre les plans de pandémie que l’on rédige en temps normal et leur mise en œuvre devant la réalité des faits. »
UNE PÉRIODE DENSE
Depuis début mars, le Dr Nati enchaîne des journées de 12 à 16 8—
— Avril 2020
« Ce n’est pas de l’improvisation, mais la mise en œuvre de nouveaux processus qui doivent tenir la route parce qu’il en va de la sécurité des patients et du personnel. C’est un grand challenge. »
heures, sept jours sur sept, et ne se souvient plus de son dernier jour de repos. « Cela ne se fait pas dans la souffrance, mais dans un dynamisme encadré par une équipe au CHL et aussi par les équipes des autres hôpitaux et les autres directeurs au sein de la Fédération des hôpitaux luxembourgeois, avec lesquels je tiens une réunion téléphonique d’une heure tous les jours. » Une période très dense et des « échanges très intenses, aussi bien vers l’extérieur qu’au sein de nos équipes : nous sommes en train de réinventer l’hôpital pour faire face à cette nouvelle situation qui change de jour en jour. Il y a beaucoup d’aspects sur lesquels il faut être créatif, anticiper, mesurer les conséquences de ce que l’on fait. Ce n’est pas de l’improvisation, mais la mise en œuvre de nouveaux processus qui doivent tenir la route parce qu’il en va de la sécurité des patients et du personnel. C’est un grand challenge. » Il a ainsi fallu adapter le plan de crise qui partait d’un scénario d’épidémie de grippe. « Il tient la route à 90 % en raison notamment de l’envergure à laquelle nous sommes confrontés, mais aussi de la vitesse de propagation et du taux de complication, qui sont différents de ceux de la grippe, poursuit le pneumologue. Notre chance est de savoir ce qui va arriver avec un intervalle d’un mois et demi par rapport à la Chine et de trois semaines par rapport à l’Italie. Nous avons environ trois semaines de marge pour nous adapter à ce nouvel ennemi. »
UN VIRUS INCONNU
Un adversaire encore inconnu il y a quelques mois, souligne-t-il. « On en apprend tous les jours sur ses propriétés et ses dangers. Il n’est pas le plus contagieux, ni le plus générateur de complications, ni le plus mortel. Mais il n’était pas connu avant et tombe sur une population qui n’a aucune défense en termes d’anticorps. Heureusement, tout le monde n’est pas gravement atteint et la grande majorité sort indemne d’un contact avec ce virus, mais il y a quand même des personnes qui développent des complications et nécessitent une hospitalisation.