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MICHÈLE ROB

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JEANNE DUVOUX

JEANNE DUVOUX

« Un magasin comme le nôtre est voué à s’adapter »

Enseigne emblématique de la capitale et haut lieu du design, le magasin connu aujourd’hui sous le nom de Rob/Carrérouge est installé à Hollerich depuis 65 ans. Une longévité derrière laquelle on trouve une famille qui a toujours su se montrer précurseur. Michèle Rob, à sa tête depuis 30 ans, en est le meilleur exemple.

Michèle Rob est experte judiciaire assermentée pour le mobilier du 20e siècle.

Qu’est-ce qui a le plus changé depuis que vous avez repris le magasin, voici 30 ans ? Quand je suis arrivée à la tête du magasin le 1er janvier 1993, on ne proposait que 15 ou 20 marques, mais pas mal d’exclusivités. Si vous vouliez du B&B Italia ou du Cassina, vous deviez venir chez Rob. Depuis, notre portfolio s’est élargi, se diversifiant également vers des marques plus accessibles au niveau des prix, à l’image des scandinaves Hay ou Muuto. De manière à satisfaire également une autre partie de notre clientèle, au budget moins élevé. Mais le changement le plus marquant se situe au niveau de la concurrence. À une époque, nous étions pratiquement les seuls dans le créneau du design à Luxembourg. Mais avec l’ouverture des frontières, il y a eu une vraie accélération. Le nombre d’acteurs a augmenté, alors que les exclusivités ont, quant à elles, baissé. Résultat : on a aujourd’hui un marché un peu uniformisé.

Comment continuer à se démarquer dans ce nouveau contexte ? C’est le grand défi ! Il n’y a pas de recette magique. C’est une compilation de différents éléments qui, mis bout à bout, créent une différence par rapport aux autres : garder quelques exclusivités en termes de marques, offrir un service et un conseil de qualité supérieure, faire valoir que la longévité de votre affaire est gage de qualité, pouvoir compter sur un showroom d’exception, qui apporte une vraie touche d’authenticité. Dans notre secteur, le cadre dans lequel on présente nos meubles est primordial. Cependant, j’ai le sentiment que, dans les années à venir, les magasins comme le nôtre seront voués à devoir s’adapter. À mon sens, il faudra réussir à développer un concept plus complet qu’aujourd’hui, à se diversifier plus encore. En s’associant, par exemple, avec d’autres magasins de qualité issus de secteurs différents. Davantage que la présence des grandes enseignes, c’est la manière dont notre société évolue qui m’inspire cette réflexion. Elle bouge vite, tout le temps. Avec l’augmentation des frais et le développement de la vente sur internet, il va bien falloir réussir à récupérer ailleurs ce que l’on perd…

Pourquoi n’avez-vous jamais tenté de vous développer davantage, en ouvrant d’autres boutiques, voire en franchisant votre marque ? Avec mon associé, Martin Dieterle, nous y avons pensé sans jamais réussir à sauter le pas. Les raisons sont diverses : le manque de personnel qualifié pour assurer le service que nous voulons fournir, la surface qui serait nécessaire dans un pays où le mètre carré est très coûteux, le fait que – par tradition – Rob est situé à Hollerich, etc. Mais cela ne veut pas dire non plus que cela ne bougera jamais.

Vous nourrissez un projet précis ? Disons juste que Hollerich est un quartier en mutation et que, dans les 15 ans à venir, il faudra refaire notre showroom. Ce qui signifie déménager. Temporairement ou, peut-être, à plus long terme. Cela pourrait être l’occasion de créer autre chose ici.

Considérez-vous les grandes enseignes d’ameublement et de décoration, celles qui s’adressent au grand public, comme des concurrentes ? Non. Nos gammes de produits sont fort différentes. Nous, comme d’autres boutiques, restons dans une certaine niche, celle du haut de gamme. Les enseignes grand public, elles, ne font pas dans les marques de design. Si certains producteurs exposés peuvent s’en inspirer, la qualité des matériaux ou des finitions reste inférieure. Rob Vintage, votre deuxième boutique, a vu le jour en 2012. C’est un concept complémentaire à celui de Rob/Carrérouge ? Totalement. Le positionnement n’est pas le même. Si une partie de la clientèle est commune aux deux magasins, il existe, effectivement, une grosse différence : les meubles vintage que nous vendons ne sont plus en production. Donc, si vous ne l’achetez pas chez nous, vous risquez d’attendre longtemps avant de retrouver le même ailleurs. Dans ce secteur précis, la concurrence est donc quasiment

« Le pre-loved est un marché considérable et totalement inexploité chez nous. »

BIO EXPRESS

Une formation de juriste Née le 19 mai 1962 à Luxembourg, Michèle Rob a effectué ses études au lycée Michel Rodange. Avant d’entamer une formation de juriste à l’ULB, à Bruxelles.

Dans l’entreprise familiale En dernière année de droit, il lui paraît évident que sa place est dans l’entreprise familiale. Pendant neuf ans, de 1984 à 1993, elle épaule ainsi son père, Nic, avant de reprendre les rênes. Elle en est aujourd’hui codirectrice.

Une troisième génération ? Âgé de 18 ans, Kai, le fils de Michèle Rob, ne sait pas encore de quoi son avenir sera fait. Mais il n’exclut pas d’être la troisième génération à la tête de l’entreprise, la quatrième à occuper les locaux situés à Hollerich.

inexistante. Et plus un objet est rare, plus il sera cher. Mais, en marge du vintage, je pratique aussi, chez Rob Vintage, ce qu’on appelle du pre-loved.

De quoi s’agit-il ? C’est ce que l’on qualifie communément de la seconde main. Mais désormais, on préfère utiliser le terme pre-loved. Pour le haut de gamme, c’est un marché considérable et totalement inexploité au Luxembourg. Imaginez : vous possédez de belles pièces chez vous, qui ont deux ou trois ans, mais vous devez déménager à l’étranger. Que faites-vous ? Si vous allez dans une boutique classique de seconde main, vous n’en tirerez presque rien. Et passer une petite annonce vous obligera à négocier avec tous les acheteurs potentiels. Moi, avec mon concept de dépôt-vente, je viens chez vous, j’évalue vos biens, les emmène, les mets en beauté, etc. Nous nous occupons de tout grâce aux 12 professionnels qui travaillent chez nous. Ensuite, les biens sont mis en vente, à un prix en moyenne 35 à 40 % en dessous de celui du neuf. Vous n’avez qu’une chose à faire : regarder l’argent arriver sur votre compte.

Vous avez lancé Rob Vintage voici 10 ans, anticipant l’engouement que l’on connaît aujourd’hui. D’où est venue cette idée ? En réalité, le vintage commençait tout doucement à pointer le bout de son nez lorsqu’en 2011, je ne trouvais pas d’idée pour notre vitrine de Noël. J’ai alors sorti du dépôt des meubles que mon père avait rangés 40 ou 50 ans plus tôt – des invendus. Je les ai placés dans ma devanture, et le téléphone a alors commencé à sonner. Tous voulaient me les acheter. Dans un premier temps, j’ai refusé. Puis, je me suis dit que ces objets pullulaient dans nos dépôts. En vendre quelques-uns était donc une bonne chose. Résultat : tout est parti en moins d’un mois.

L’opportunité business est devenue alors une évidence ? Exactement. Même si j’avoue que je ne savais pas trop dans quelle direction aller… J’ai alors eu une autre idée, celle d’organiser une sorte d’exposition se tenant dans l’appartement qu’occupaient mes parents, à l’étage au-dessus de Carrérouge. Celui-ci a été aménagé dans les années 60. Un parfait espace vintage pour exposer du mobilier vintage. C’est d’ailleurs resté notre showroom. L’expo en question n’était pas finie que l’on revenait vers moi pour savoir si certaines pièces étaient à vendre. On était le 29 septembre 2012. Une date que je considère être comme celle de la fondation de Rob Vintage.

Au Luxembourg, le secteur vintage reste-t-il une niche ? Oui, c’est une évidence. Je nous vois deux confrères – Oddhaus, à Muhlenweg, et le regroupement Fracht 23 –, mais qui sont davantage spécialisés dans des objets de plus petite taille ou moins haut de gamme. On ne peut donc pas vraiment parler de concurrence.

Vous vendez. Mais vous devez aussi vous fournir. Comment faites-vous pour trouver les pièces ?

UNE AVENTURE QUI DURE DEPUIS PLUS D’UN SIÈCLE

Cela fait désormais 130 ans que la famille Rob occupe les mêmes lieux, à Hollerich. Une aventure qui a commencé grâce au grand-père et au grand-oncle de Michèle Rob.

1993 2012

1892 1957

Pompes funèbres et menuiserie Nicolas Rob, le grand-père de Michèle, et son frère Dominique – tous deux menuisiers – ouvrent Rob Frères. Cette entreprise de pompes funèbres est couplée à une menuiserie où les cercueils sont notamment fabriqués. Tout se passe déjà à Hollerich, où se situe aujourd’hui le magasin Rob/Carrérouge. Le premier magasin de design Nic Rob, le fils de Nicolas, reprend la menuiserie, tout en stoppant les activités de pompes funèbres. Il préfère ouvrir le premier magasin de design à Luxembourg, baptisé Nic Rob-Kahn. Il vend du sur-mesure, mais aussi des produits de grands designers comme Arne Jacobsen, Kaare Klint, etc. Rob, le mobilier contemporain Le 1er janvier, Michèle Rob prend la suite de son père et devient, à 30 ans, chef d’entreprise. Elle décide d’en changer le nom. Nic Rob-Kahn devient ainsi Rob, Le Mobilier Contemporain. Fondation de Carrérouge Michèle Rob fonde, avec le designer allemand Martin Dieterle, la société Carrérouge Édition. En 2005, cette dernière fusionnera avec Rob, Le Mobilier Contemporain afin de former Rob/Carrérouge, la boutique que l’on retrouve aujourd’hui à Hollerich. Rob Vintage voit le jour Anticipant le phénomène vintage, Michèle Rob crée Rob Vintage, une boutique située au 2e étage de l’immeuble de la rue de Hollerich, dédiée au vintage (elle y propose du mobilier historique des grands noms du design) mais aussi au pre-loved.

2001

Rob/Carrérouge Photos

Il n’existe pas de fournisseurs précis. C’est le public qui me sollicite. Je vends ce qu’on m’apporte. Il a fallu un peu de temps pour me faire connaître, mais aujourd’hui, le téléphone et les messages ne manquent pas. En provenance du Luxembourg mais aussi parfois d’Allemagne, de France ou de Belgique. Certaines pièces ne restent pas une semaine chez nous. On sent parfois l’influence de la presse sur le goût du public. À l’image des chaises Eames, de Herman Miller, voici un ou deux ans. On les a vues partout dans les magazines. Du coup, je ne les rentrais jamais assez vite…

Quelle époque est la plus demandée actuellement ? On ne peut pas définir une tendance nette. En tout cas, rien de l’ampleur de ce qu’on a connu avec les années 1960. Là aussi, les médias jouent un rôle important. Souvenez-vous de cette époque pas si lointaine, où l’on voyait partout des objets hyper colorés et pop. Aujourd’hui, on va dans une autre direction. Les années 80 ont la cote. À l’image des meubles Ettore Sottsass exposés dans les boutiques Saint Laurent, à Paris. C’est simple, désormais, le vintage court des années 1960 à la fin des années 1990.

Comment les marchés de l’ameublement et de la décoration sortentils de la crise sanitaire ? Jusqu’en 2022, nous avons clairement été gagnants. Après la fermeture due au premier confinement, les gens se sont rués sur les meubles. En 30 ans, je n’avais jamais vécu un moment aussi incroyable que celui-là. Il y avait une telle envie de sortir et de se faire plaisir ! Aujourd’hui, les choses ont changé. La crise énergétique et la guerre en Ukraine sont passées par là. Nos frais de transport ont fortement augmenté. Et si les clients achètent toujours, ils sont devenus plus compliqués, bataillant vigoureusement afin d’obtenir la remise la plus élevée. Et puis, internet a pris une place encore plus importante dans le secteur. Certains fournisseurs nous imposent des frais de transport supérieurs, alors qu’ils les offrent à leurs clients si ceux-ci commandent en direct sur le site. Désormais, ces fournisseurs sont donc aussi devenus des concurrents… On évalue à 10 % les ventes sur internet pour le secteur du meuble et de la décoration. Votre croissance estelle identique ? Sur le site web de Carrérouge, nous avons un light shop. Nos luminaires sont donc disponibles à la vente par ce canal-là. Pour le reste, il faut passer par notre showroom de 800 m2 à Hollerich. On ne m’enlèvera pas de la tête que, lorsque vous achetez un fauteuil, il est important de pouvoir le toucher, le tester. Chez Rob Vintage, la situation est différente. Je travaille beaucoup sur le net. Le secteur du vintage est fait pour ce type de vente. Ainsi, à côté de notre espace d’exposition de 120 m2, nos produits se retrouvent par ailleurs sur huit ou neuf sites spécialisés. Tandis qu’Instagram se révèle être un bon outil pour gérer le relationnel avec certains clients. En termes de chiffres de vente, si je devais faire une moyenne, je dirais que, chez Rob Vintage, 50 % de nos ventes se font sur le net ou les réseaux sociaux.

Quels sont vos chiffres d’affaires réalisés ? Je n’aime pas donner un chiffre précis. Mais je peux vous donner une idée : chez Rob Vintage, on se situe entre 100.000 et 160.000 euros. Là où le chiffre d’affaires de Carrérouge s’établit plutôt entre 2 et 4 millions, selon les années.

Vos deux boutiques sont donc aussi très différentes à ce niveaulà… Rob Vintage connaît une belle croissance depuis 2019. Et le vintage est vraiment devenu une passion. Cependant, Carrérouge reste, quant à elle, une institution à Luxembourg. Avec un emplacement historique, à Hollerich, où ma famille est présente depuis plus d’un siècle. Certes, notre secteur d’activité a bien changé depuis que mon père a ouvert, en 1957, ce qui était le premier magasin de meubles design au Luxembourg. Mais elle reste la première boutique où on a proposé des marques iconiques comme Knoll, Herman Miller, Cassina ou B&B Italia. C’est également chez nous qu’ont été fabriqués les bancs de la Chambre des députés, par exemple…

619 mrds

Si la Fédération luxembourgeoise de l’ameublement n’a pas de chiffres précis permettant d’évaluer le marché du meuble au Luxembourg, en France, l’Institut de prospective et d’études de l’ameublement le chiffrait, lui, à 14,5 milliards d’euros pour 2021. À l’échelle mondiale, une étude d’Allied Market Research l’estimait à 619 milliards en 2019.

EXPERTE JUDICIAIRE ASSERMENTÉE EN MOBILIER DU 20E SIÈCLE

Assermentée en janvier 2021, Michèle Rob est devenue la première experte judiciaire assermentée en mobilier du 20e siècle au Luxembourg. « J’étais régulièrement contactée pour effectuer des évaluations, mais ces dernières n’avaient aucune valeur juridique », expliquet-elle. C’est ainsi que l’idée a germé. Mais la réalisation de celle-ci s’est avérée compliquée. « Cela m’a pris 5 ans ! Entre les explications à fournir, les lettres de recommandation demandées, etc., je n’ai pas été loin d’abandonner à certains moments. Pourtant, le design est un domaine qui a aussi besoin d’experts. Notamment pour les assurances. Ces dernières couvrent de plus en plus les meubles haut de gamme. »

Charline Moreau (Sales & Business Development Manager) et Vincent Ulens (Country Manager)

Maison Moderne Crédits

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Vous, en tant que dirigeants de société ou indépendants, êtes obligés d’envoyer vos factures par voie électronique, comme par exemple via Open Peppol.

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VINCENT ULENS Country Manager T. +352 621 826 851 luxembourg@unifiedpost.com

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