3 minute read

MALIK ZENITI

Next Article
La liste

La liste

« La logistique est un ‘early indicator’ »

Manager du Cluster for Logistics, Malik Zeniti estime que le secteur se trouve à un tournant, après avoir été l’un des plus dynamiques lors de la reprise post-Covid.

Quel est le principal défi auquel le secteur de la logistique fait face ? C’est celui du manque de compétences, en particulier en ce qui concerne la transformation digitale et énergétique.

La logistique ne profite-t-elle pas pleinement de la reprise post-Covid, avec une forte dynamique des emplois ? L’emploi et la valeur ajoutée n’ont jamais été aussi hauts dans le secteur. Mais nous constatons également une certaine nervosité induite par la hausse des coûts de l’énergie et les tensions d’approvisionnement. Dans ce contexte, comment investir dans la numérisation et la durabilité, qui sont pourtant deux objectifs majeurs ?

Le gouvernement doit-il intervenir ? Nous attendons avec impatience la prise de position du groupe interministériel supposé définir des incitants financiers pour la transformation, début 2023. Tous les quatre ans, les entreprises remplacent jusqu’à 25 % de leur parc de véhicules. Sans visibilité sur les supports incitatifs financiers, l’adaptation en vue de se conformer aux défis climatiques ne pourra tout simplement pas se faire.

Le Luxembourg ambitionne de réduire de 55 % ses émissions de gaz à effet de serre entre 2005 et 2030. Cet objectif est-il atteignable en sachant que les transports représentent 61 % des émissions ? J’ai des doutes immenses sur cela. La guerre en Ukraine nous met face à la difficulté de nous approvisionner suffisamment en énergie, ce qui crée des goulots d’étranglement. Il y a urgence, mais je crois que si une politique est trop forcée, elle doit alors s’accompagner des investissements nécessaires.

On voit en réalité très peu de camions électriques sur les routes… Certaines entreprises misent pourtant sur l’électromobilité. Mais au niveau du transport international, nous ne sommes pas certains que l’électromobilité sera la solution. Nous souhaitons rester ouverts à toutes les technologies, comme la pile à combustible. Mais le Luxembourg ne dispose à ce jour d’aucune station d’hydrogène (elle est attendue fin 2022-début 2023, ndlr).

Avez-vous le sentiment que le gouvernement a été peu proactif en ce qui concerne le secteur de la logistique ? La logistique n’a en tout cas pas été une priorité récente.

En 2021, 77 % des ventes de diesel sur les aires d’autoroute luxembourgeoises étaient réalisées par des poids lourds. Quel impact va avoir la flambée continue du prix de ce carburant ? Le Luxembourg a clairement perdu en compétitivité. D’autant qu’une étude à paraître sur les coûts du travail dans le transport place le pays en 2e position des plus chers, juste derrière le Danemark. Cela signifie qu’un avantage éventuel lié à la très haute productivité va probablement être absorbé par les coûts de la main-d’œuvre et la différence de prix du diesel.

Quelles sont les perspectives du secteur ? La logistique est un early indicator : lorsque l’on observe un déclin dans ce secteur, cela laisse penser que l’on va vers une récession, probablement dans les six mois. D’ailleurs, certaines entreprises se montrent vigilantes dans leurs investissements.

En 2021, Cargolux a tout de même signé un bénéfice record… Absolument. Et les premiers mois de 2022 n’étaient pas mal non plus. Mais nous ne connaissons pas la reprise escomptée pour le deuxième semestre, qui est théoriquement le plus fort de l’année. Il se pourrait que 2023 soit une année plus lente, peut-être aussi une année où les entreprises trouveront du temps pour se réorganiser et envisager une nouvelle stratégie en tenant compte des émissions de CO2 et des coûts de l’énergie.

Malik Zeniti déplore le « manque de compétences » dans le secteur de la logistique.

This article is from: