« Activer les leviers de création de valeur pour demain »
ANNE-LISE GRANDJEAN ET CLAUDE MEDERNACH (BANQUE DE LUXEMBOURG)
« Des enjeux de succession de plus en plus complexes »
FRÉDÉRIC VONNER ET OLIVIER CARRÉ (PWC LUXEMBOURG)
« Considérer l’investissement sous l’angle ESG a des avantages »
ISABELLE WATY (INDOSUEZ WM)
« La technologie doit permettre d’intensifier la relation client »
MAI 2024
YVES STEIN ET ELISEO GRAZIANI (EDMOND DE ROTHSCHILD EUROPE)
Private banking & Wealth management
Empowering family offices globally
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Mike Koedinger rédacteur en chef
Thierry Labro secrétaire de rédaction
Jennifer Graglia free- lances
Sébastien Lambotte, Christophe Nadin, Michaël Peiffer photographes
Marie Russillo, Guy Wolff
correction
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Greenstressing
Greenwashing. Greenhushing. Green backtracking… À chaque difficulté d’une entreprise à se mettre en conformité avec les nouvelles règlementations ESG naît un nouveau mot pour décrire son comportement. Non seulement ce n’est pas simple, mais la pression est de plus en plus forte du côté des citoyens, qui se mobilisent plus facilement contre les « bullshiteurs de la green attitude » qu’il y a dix ans. De Nestlé et Nespresso à Coca Cola et Pespi Cola, en passant par la plupart des compagnies aériennes (mais pas Luxair), les géants pétroliers, certains géants de la tech ou des constructeurs automobiles, les recours en justice se multiplient. Les acteurs du marché ont pourtant déjà la responsabilité de formuler des allégations fondées et de communiquer des informations sur la durabilité de manière équilibrée, rappelait déjà l’Autorité européenne des marchés financiers (Esma), il y a un an, dans son rapport préliminaire. Sur 70.000 entreprises interrogées à ce sujet par le cabinet suisse South Pole l’an dernier, seules 8.000 avaient pris des engagements de type « net zéro » ou liés à l’action climatique. Et à peine un tiers de celles-ci étayaient leurs démarches par des faits scientifiquement établis… L’Esma avait aussi recommandé une plus grande transparence sur les méthodologies de données ESG, des clarifications sur l’utilisation et le calcul des estimations, la vérification et l’audit, la mise en place d’un système de labellisation fiable et bien conçu pour les produits financiers… Autant dire que le marché attend avec impatience (fébrilité ?) la version finale de ce même rapport, dont la sortie est programmée d’ici quelques jours, et qui mettra indirectement la pression à la fois sur les régulateurs et sur les législateurs : le texte devrait déjà demander certains aménagements pour remédier à ce qui ne fonctionne pas assez bien. Premiers de cordée, des assureurs craignent déjà de ne plus avoir suffisamment de produits financiers dans lesquels investir. Grenstressed.
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PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024 3 Édito #ESG
THINK EFFICIENCY olympicbankingsystem.com
08 FACE À FACE
Banquier privé et wealth management : quelles différences ?
10 YVES STEIN ET ELISEO GRAZIANI
« Activer les leviers de création de valeur pour demain »
22 EXPÉRIENCE
Se préparer à une nouvelle ère
28 À SUIVRE
S’intéresser aux tendances de fond
30 STRATÉGIE
Segmenter : le pari gagnant
32 LONG TERME
Une même ligne quelle que soit la taille du client
34 ISABELLE WATY
« La technologie doit permettre d’intensifier la relation client »
44 TECHNOLOGIE
Hyperautomatisation, l’impossible graal
46 SOLUTIONS PERSONNALISÉES
La Spuerkeess s’est transformée
48 PRÉVISIONS
Se réinventer dans un monde incertain
54 OLIVIER CARRÉ ET FRÉDÉRIC VONNER
« Considérer l’investissement sous l’angle ESG a des avantages »
60 AVANTAGES
Les atouts de la banque privée luxembourgeoise
62 ANNE-LISE VANDEVOIR
« Les mesures visent l’intérêt du client »
64 CLAUDE MEDERNACH ET ANNE-LISE GRANDJEAN
« Des enjeux de succession de plus en plus complexes »
34
70 START-UP
Colbr veut démocratiser la banque privée
72 AGENDA
Réglementation : un baromètre sous haute pression
78 FORECAST
Comment la crypto transforme-t-elle la banque privée ?
Photos Guy Wolff
Marie
et
Russillo
Sommaire Private banking & Wealth management mai 2024
Isabelle Waty, en charge de l’innovation chez Indosuez Wealth Management.
10
PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024 5
Yves Stein et Eliseo Graziani (Edmond de Rothschild), entre clientèle sophistiquée et diversité d’attentes.
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Banquier privé et wealth management : quelles différences ?
Les concepts de banque privée et de wealth management sont intimement liés. Si la plupart des banques privées offrent des services de gestion de fortune, tous les wealth managers ne sont pas forcément des banques.
Auteur SÉBASTIEN LAMBOTTE
Banque privée
Une banque avant tout
Les concepts de banque privée et de wealth management sont proches l’un de l’autre. La principale distinction s’opère au niveau du statut de l’institution. La banque privée, en effet, est avant tout une banque. À ce titre, elle accueille et sécurise les dépôts de clients fortunés et peut accorder à ces derniers des solutions de financement (crédits). La banque privée dispose donc d’une licence bancaire et, à ce titre, est supervisée en tant que telle. À côté de cela, elle offre un ensemble de services, dont certains ont trait à l’organisation ou à la planification patrimoniale.
Au service d’une clientèle fortunée
C’est au niveau de la segmentation de la clientèle que s’opère le plus souvent la distinction entre une banque de détail et une banque privée. Cette dernière s’adresse à une clientèle fortunée, à des personnes susceptibles de lui confier plusieurs centaines de milliers d’euros, voire des millions d’euros, avec pour mission de préserver ce patrimoine et, le cas échéant, de le faire fructifier. Les seuils d’accès à la banque privée varient cependant d’une institution à l’autre.
Des services personnalisés
Pour servir une clientèle fortunée, la banque privée propose des services plus personnalisés qu’une banque commerciale. Les montants confiés et gérés impliquent une autre gestion des risques et des placements. Le banquier privé, pour convaincre son client, doit établir une relation de confiance, lui permettant de comprendre ses attentes et besoins spécifiques et de mettre en œuvre des solutions ou stratégies d’investissement dédiées.
Gestion de fortune
Allouer les actifs
À l’inverse, il est possible d’offrir des services de gestion de fortune sans nécessairement disposer d’une licence bancaire. De plus en plus d’acteurs se positionnent en gestionnaires de fortune indépendants d’une banque. Le rôle du wealth manager est de veiller à la bonne allocation des avoirs du client à travers une large gamme d’actifs (dont du private equity), en tenant compte de ses ambitions, de son appétit au risque, de ses préférences en matière d’investissement durable, etc.
Mobiliser les bons outils
Les clients fortunés, servis au départ du Luxembourg, ont souvent une dimension internationale. Pour les servir, les acteurs de la gestion de fortune vont donc mobiliser un ensemble d’outils et de solutions permettant de consolider et de sécuriser l’ensemble des avoirs du client, qu’il s’agisse d’une entreprise, de titres, de biens immobiliers ou encore d’objets d’art. Ils vont aussi mobiliser les expertises requises autour du client pour l’accompagner en fonction de ses besoins.
Planification
À partir d’une compréhension globale du patrimoine de la personne ou de la famille qu’il sert, le gestionnaire de fortune va veiller à planifier la gestion du patrimoine dans le temps. Il s’agit de satisfaire aux besoins du détenteur des avoirs, de lui garantir la plus grande sérénité, mais aussi de considérer les enjeux de transmission patrimoniale vers la génération suivante en tenant compte des aspects fiscaux et légaux.
Face à face
8 PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024
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Conversation Yves Stein et Eliseo Graziani
« Activer les leviers de création de valeur pour demain »
Le métier de banquier privé se transforme, prenant en considération une plus large diversité d’attentes exprimées par une clientèle sophistiquée. Yves Stein, CEO de Edmond de Rothschild Europe, et Eliseo Graziani, head of private banking de l’institution, évoquent ces évolutions et comment aborder les ces changements.
Portrait GUY WOLFF Interview SÉBASTIEN LAMBOTTE
10 PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024
Yves Stein à gauche et Eliseo Graziani à droite.
Comment a évolué l’activité de la banque privée au Luxembourg ces derniers mois ?
YVES STEIN (Y.S.) 2023 a été une très bonne année pour la banque privée. On a en effet vu évoluer positivement les deux principales classes d’actifs qui nous intéressent, à savoir les actions et les obligations, qui ont très bien performé. La situation contraste avec l’année précédente. 2022, en effet, a été une année difficile, comme on n’en a jamais connu depuis 150 ans. Même les clients qui ont adopté une approche prudente ont été négativement impactés par la conjoncture en raison de la crise du marché obligataire.
Le retour des taux d’intérêt en territoire positif offre évidemment des perspectives plus intéressantes, tant pour le client que pour la banque…
Y.S. Nous partons de l’hypothèse que les taux d’intérêt, à leur niveau actuel, correspondent à un contexte économique normal. La place luxembourgeoise, vers laquelle on se tourne dans une optique de protection et de préservation du patrimoine financier, ainsi que de gestion de la liquidité, profite donc évidemment de ce retour à la normalité.
Luxembourg est aussi une plateforme à partir de laquelle bon nombre d’acteurs de la banque privée opèrent leur réseau européen et gèrent une clientèle internationale.
C’est le cas d’Edmond de Rothschild, à l’instar de plusieurs autres institutions. Or, on constate que les marchés domestiques en Europe ont aussi très bien évolué au fil des mois passés. Luxembourg, au regard de son positionnement, profite donc de cette croissance.
On a plutôt tendance à dire que le Luxembourg sert une clientèle très internationale. Comment la croissance au niveau des entités actives sur les marchés domestiques soutient-elle l’activité de la banque privée au Luxembourg ?
Y.S. Aujourd’hui, pour fonctionner, la banque doit s’organiser pour grandir effi-
« Nous couvrons toute la pyramide des besoins, depuis des solutions toutes prêtes jusqu’au vrai sur-mesure. »
Eliseo Graziani
cacement en veillant à répondre à une réglementation complexe et croissante. Pour répondre à ces défis, nous devons nous appuyer sur la technologie. Cela passe notamment par la mise en place de plateformes numériques au niveau de la maison mère qui permettent de soutenir le développement des succursales. Le Luxembourg profite de ces développements dans la mesure où ce sont nos équipes qui font fonctionner ces plateformes en nous donnant l’avantage de mieux accompagner nos clients sur les différents marchés.
ELISEO GRAZIANI (E.G.) La banque privée implique de rester proche des clients, de leur culture. Le numérique, dans cette optique, doit nous aider à le faire pour mieux les connaître et mieux les servir. Au-delà, Luxembourg continue de capitaliser sur sa dimension internationale, son ouverture sur l’Europe, pour accompagner cette clientèle dont l’empreinte patrimoniale dépasse le cadre d’un marché domestique en particulier. Nous sommes un pays multilingue. Plus de 50 % de la population résidant au Luxembourg n’y est pas née. Cet environnement correspond bien à la réalité de notre clientèle. Plus que jamais, nous avons besoin de collaborateurs internationaux, provenant de divers pays, pour pouvoir fournir une expérience client respectueuse de la culture de chacun.
Au-delà de cette conjoncture favorable, quels sont les grands enjeux auxquels est confrontée la banque privée au Luxembourg ?
Y.S.
À notre échelle, nous distinguons trois priorités principales qui, sensiblement, doivent être partagées par les autres acteurs de la banque privée au Luxembourg. La première se situe au niveau de l’attraction des talents. La banque privée reste un métier de personnes, d’hommes et de femmes. In fine, nous ne pouvons offrir à nos clients que ce que nos collaborateurs, en travaillant en équipe, sont en mesure d’apporter. Des questions majeures se posent aujourd’hui. Comment la Place peut-elle préserver et même renforcer son attractivité ? Comment
12 PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024
Conversation Yves Stein et Eliseo Graziani
parvenir à faire venir des gens très expérimentés tout en veillant à faire émerger et accompagner les jeunes talents ? Il est aussi important de parvenir à mobiliser l’expertise technologique, pour faire évoluer nos environnements, améliorer l’expérience proposée aux clients et soutenir nos opérations dans un environnement de plus en plus complexe.
Au-delà du défi que représente l’attraction des talents, quelles sont les deux autres priorités que vous avez identifiées ?
Y.S. La deuxième a justement trait à la nécessité de mettre la technologie au service du développement du métier. D’une part, la transformation digitale doit contribuer à améliorer les services proposés, soutenir nos collaborateurs dans leurs missions. D’autre part, elle contribue aussi à garantir la conformité de nos opérations vis-à-vis des exigences toujours plus nombreuses des régulateurs. Un des défis est de mettre en œuvre des systèmes qui intègrent ces règles, qui fluidifient la gestion des enjeux de conformité et qui contribuent à réduire les coûts inhérents à la réglementation.
La troisième priorité, enfin, réside dans la différenciation sur le marché. Chaque banque, à l’échelle du marché, doit pouvoir définir une proposition de valeur qui lui est spécifique. La place financière, la banque privée luxembourgeoise, gagne en attrait par la diversité des institutions qui y sont présentes. Chacune d’elles se distingue par sa nature, son authenticité, son offre. Nous ne proposons pas tous le même service.
En l’occurrence, sur quels aspects l’activité « banque privée » d’Edmond de Rothschild (Europe) cherche-t-elle à se distinguer ?
Y.S. Nous, nous nous définissons comme une maison de convictions fondée sur le principe de donner du sens à la richesse, qui doit servir à construire le monde de demain en anticipant les besoins de l’économie réelle et les préoccupations de tous nos clients et des générations futures.
C’est-à-dire ?
Y.S. Nous sommes une banque privée familiale. Or, la famille se définit toujours
comme étant un projet vers la prochaine génération. C’est une idée profonde que nous partageons avec nos clients. En tant que maison d’investissement de conviction, nous voulons couvrir les classes d’actifs qui intéressent les autres familles aussi. Aujourd’hui, nous avons une offre qui couvre toute la gamme classique des actifs que l’on dit liquides. Mais on s’intéresse aussi aux actifs illiquides, principalement des actifs réels. Le groupe Edmond de Rothschild s’est vu confier 163 milliards d’actifs sous gestion en tant que groupe, parmi lesquels 21 milliards ont trait à des expertises dans des actifs réels. C’est principalement à travers la gestion de ces derniers que s’exprime l’engagement de conviction porté par la banque.
Quelles sont ces convictions ?
Comment cela se traduit-il dans les faits ?
Y.S. Dans ces actifs réels, vous avez évidemment du private equity, des acteurs économiques à travers lesquels nous portons les convictions fortes de notre famille actionnaire. La démarche cherche à répondre à la question « comment bien investir pour demain ? ». Par exemple, les dernières prises de participation tournaient autour du thème de la ‘foodtech’. Je crois que nous savons que pour nourrir durablement la planète, il y aura un certain nombre d’initiatives qui devront être prises. Un autre thème important à nos yeux réside dans le développement du capital humain, qui n’est peut-être pas toujours valorisé à son bon niveau dans le bilan des entreprises. Et donc nous essayons de donner vie à des expertises qui permettent d’investir dans ces thématiques qui sont très importantes aux yeux de notre famille actionnaire, mais aussi très souvent pour nos clients.
E.G. À côté du private equity, dans les actifs réels, vous avez évidemment toutes les expertises immobilières, au travers desquelles nous portons des convictions comme le développement et la modernisation des infrastructures, la dépollution des sols ou la transition énergétique et l’économie circulaire. En permanence, nous cherchons à aider nos clients à donner du sens à leurs investissements avec une vision à long terme pour bâtir l’avenir.
LA DATA AU SERVICE DE LA CRÉATION DE VALEUR
Le futur est dans la donnée. L’un des enjeux, pour la banque privée, est d’arriver à générer davantage de valeur au départ des données dont elle dispose. « Notre principal actif, c’est notre capital humain. Notre deuxième actif, c’est notre data, c’est-à-dire notre connaissance client, explique Eliseo Graziani. Une banque se construit à la fois sur la compétence relationnelle avec ses clients et sur la compétence d’appréciation d’un risque. Aujourd’hui, tout cela se cristallise dans la gestion de la donnée. Dès lors, il est essentiel de disposer…de plateformes informatiques efficientes, qui contribuent à l’amélioration de la compréhension de la situation et des attentes du client, à mieux appréhender le risque et à pouvoir digitaliser et personnaliser l’offre. »
PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024 13
De manière générale, comment voyezvous évoluer les attentes de la clientèle vis-à-vis de sa banque privée ?
Y.S. Aujourd’hui, la clientèle que nous servons souhaite que son banquier privé puisse l’accompagner sur l’ensemble de son parcours patrimonial avec des solutions sur mesure. Nous ne sommes pas des vendeurs de produits, mais des experts qui doivent être capables d’accompagner, de supporter, d’aider, d’assister le client et sa famille vis-à-vis des divers enjeux patrimoniaux, à chaque étape de leur vie et, le cas échéant, sur plusieurs générations. Si nous considérons un client, nous cherchons à le soutenir selon des perspectives qui s’étalent en règle générale sur au moins deux générations, sinon trois.
E.G. Les clients qui viennent à Luxembourg ont des besoins de plus en plus sophistiqués, en lien avec leur situation patrimoniale qui a tendance à se complexifier. L’un des aspects qui nous différencie, à ce titre, réside dans l’alignement des intérêts entre notre actionnaire, extrêmement engagé, et les clients. C’est presque unique de voir un actionnaire bancaire qui investit à côté du client dans des stratégies spécifiques mises en place ou dans les initiatives prises.
Nous développons une vision à long terme avec une approche holistique des besoins de chacun. La capacité dont nous disposons, au départ d’un « univers » d’investissement unique, nous permet de les accompagner dans un parcours global.
Dans quelle mesure cet engagement sociétal devient-il déterminant pour le client ?
Y.S. On constate un changement important au niveau de la clientèle, qui s’exprime plus fortement d’ailleurs au sein de la nouvelle génération. S’il est question d’investissements, ce n’est plus uniquement une question de rendement. La dimension purpose , ce à quoi contribue l’investissement, compte de plus en plus. Suite à l’évolution de MiFID, nous sommes en train de vraiment cerner nos clients par rapport à leurs besoins, à leurs demandes en matière de durabilité. On ne peut pas prétendre que l’ensemble de notre clientèle souhaite investir avec une
thématique forte en matière de durabilité. Cependant, on constate une tendance importante en la matière. Nos clients sont de plus en plus sensibles à la manière dont est investi leur argent, à ce que leur démarche puisse contribuer à des enjeux sociétaux majeurs, et notamment à la lutte contre le dérèglement climatique.
Comment l’offre doit-elle évoluer pour répondre à ces nouvelles attentes ?
Y.S. MiFID exige que nous ayons une discussion avec nos clients sur leurs attentes en matière de durabilité, pour identifier dans quelle mesure cela est important à leurs yeux et pour définir ensuite les dimensions de l’ESG qui compte pour eux. Au-delà de cet échange, l’enjeu est de pouvoir déployer une offre qui répond à ces nouvelles attentes exprimées. Le défi, à l’avenir, sera de parvenir à répondre à cette clientèle de plus en plus sensible aux impacts de ses investissements, au-delà du rendement qu’ils peuvent leur apporter.
E.G. Le challenge, aujourd’hui, est d’intégrer l’ensemble de ces critères au cœur même de l’offre. L’ESG ne relève plus d’une classe d’actifs à part. Ces évolutions exigent de nos équipes, face à une clientèle particulièrement exigeante, de développer des expertises pointues autour de ces thématiques majeures. Cela vient renforcer la sophistication de nos clients. En tant que banque privée, l’ambition est de pouvoir accompagner chacun d’eux, à travers une offre étendue, proposant toutes les classes d’actifs, liquides ou illi quides, contribuant aux diverses dimensions du développement, jusqu’à les accompagner dans la mise en place de fondations philanthropiques. Nous devons pouvoir proposer des solutions sur mesure, des approches qui ne sont pas standardisées ou que l’on peut directement souscrire auprès d’autres acteurs.
Entre le souhait de faire fructifier son patrimoine, de le préserver, et le désir croissant de chacun de contribuer à une des dimensions de durabilité, comment parvient-on, en tant que banque, à mettre en œuvre des approches personnalisées pour chaque client ?
ATTIRER DE BEAUCOUP PLUS LOIN
L’année dernière, Edmond de Rothschild Europe est parvenu à renforcer son équipe commerciale de 30 %. Pour attirer, l’institution peut compter sur une marque employeur attrayante et sur les liens qu’elle a développés avec les universités pour accueillir des jeunes et les former. Cependant, les enjeux d’attractivité des talents demeurent une préoccupation majeure pour la Place. « Historiquement, c’est dans la Grande Région que l’on allait chercher les talents. Si vous suivez ce qu’on pourrait appeler le narratif de la place financière, vous allez voir qu’il a changé. Aujourd’hui, on cherche à être beaucoup plus présent, beaucoup plus visible, beaucoup plus loin, explique Yves Stein. À travers une structure comme l’Université, via des offres de formations pointues, on cherche à amener au Luxembourg des jeunes venant de très loin. À Luxembourg, nous avons désormais des masters, en wealth management par exemple, qui sont destinés à former aux besoins de la Place et dont nous sommes très proches. »
14 PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024
Conversation Yves
Stein et Eliseo Graziani
Y.S.
C’est un défi en soi. Il faut l’envisager sous différentes dimensions. Pour définir une offre, nous en considérons trois : le produit, le service qui lui est associé, l’expérience vécue par le client au sein de notre écosystème. Pour chaque solution financière proposée, nous mettons à la disposition du client un ensemble de services, notamment pour nous assurer qu’il comprend et qu’il peut suivre les performances associées au produit, qu’elles soient financières ou extrafinancières, au travers du reporting par exemple. L’expérience que nous souhaitons proposer au client, cependant, s’étend bien au-delà. La volonté est de permettre une ouverture, au-delà du produit, à un écosystème bien plus étendu, de l’inviter à prendre part à nos activités diverses, de s’engager avec nous au sein de la relation que nous entretenons. Cela s’exprime de diverses manières pour l’ensemble des segments de la clientèle. C’est en cela que la relation est personnalisée. Si nous ne pouvons proposer du réel sur-mesure qu’à partir d’un certain montant, nous souhaitons que chaque client trouve au sein de notre banque des solutions qui répondent aux demandes fondamentales et qu’il vive une expérience authentique auprès de notre banque.
E.G. Nous couvrons toute la pyramide des besoins, depuis des solutions toutes prêtes jusqu’au vrai sur-mesure, en ce compris, évidemment, les attentes des clients institutionnels, qui viennent nous voir avec des business cases très détaillés comme la signature, cette année, du partenariat avec la Bank for Investment and Development of Vietnam, la plus grande banque du pays. En fonction du client, nous pouvons mobiliser les diverses expertises autour des différentes géographies, et cela avec une grande agilité qui nous différencie aussi de certains acteurs. Cette caractéristique est liée à l’actionna riat, privé et familial, de la banque. Lors que le besoin s’en fait sentir, qu’un projet cadre avec l’ambition de la famille, nous pouvons mettre en œuvre des réponses adaptées très rapidement.
Qu’est-ce qui soutient aujourd’hui le développement de la banque privée au Luxembourg ? Sur ce métier, la Place gagne-t-elle en attractivité ?
ÉVOLUTION DE LA RÉPARTITION DES TRANCHES DE PATRIMOINE DES CLIENTS, EN % DU TOTAL
ACTIFS SOUS GESTION
Y.S. L’activité, dans un marché global en croissance, évolue au gré des cycles, sui vant les performances des marchés financiers. L’avantage du Luxembourg, par rapport aux acteurs se concentrant sur leur marché domestique, réside dans son expertise internationale, dans sa capacité à servir plusieurs marchés, à développer des politiques commerciales à large échelle. Si l’activité prospère, c’est avant tout parce que le marché croît. Le déve loppement, cependant, se situe sans nul doute dans la fourchette haute des places actives sur la banque privée.
E.G. Luxembourg peut tout de même faire valoir des atouts intrinsèques. À commencer par son cadre juridique et réglementaire, qui permet de répondre aux attentes de la clientèle de la banque privée. Le pays a été pionnier en se position-
DES
2011-2022 2012 0 % 20 % 40 % 60 % 80 % 100 % 2014 2016 2018 2020 2022 Source CSSF > 20 millions Entre 10 et 20 millions Entre 5 et 10 millions Entre 1 et 5 millions < 1 million d’euros PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024 15 59 % 58 % 56 % 54 % 51 % 43 % 8 % 8 % 19 % 22 % 8 % 8 % 18 % 15 % 8 % 8 % 17 % 13 % 9 % 9 % 16 % 10 % 9 % 16 % 7 % 10 % 10 % 9 % 15 % 7 %
nant sur ces sujets, notamment pour répondre aux besoins d’une clientèle fortunée internationale. La stabilité politique et fiscale qui prévaut soutient aussi le développement de l’activité. Pour des fortunes globales, transfrontalières, le Luxembourg continue de jouer son rôle de ‘one-stop shop’. On y trouve à la fois l’expertise et les outils permettant de structurer le patrimoine et d’en planifier la gestion sur un horizon à 10, 15, 20 années.
La clientèle évolue elle aussi. Comment l’expérience attendue de la banque privée change-t-elle au niveau de la nouvelle génération, vos futurs clients ?
E.G. Dans le cadre des relations que nous entretenons avec nos clients, avec une volonté de planifier la gestion du patrimoine sur plusieurs générations, nous sommes amenés à engager la discussion avec et autour de la NextGen. Les tendances que nous avons évoquées, autour de la digitalisation de l’expérience client, de la finance durable, de l’élargissement de l’univers d’investissement s’expriment pleinement à travers les héritiers de nos clients, hyperconnectés. On le voit souvent dans certains symposiums, leurs représentants âgés de 25 ans parlent de philanthropie, de diversification, de durabilité, d’impact… Leurs exigences en la matière sont d’ailleurs souvent plus précises que celles de leurs parents. Notre rôle est de pouvoir soutenir et accompagner les clients qui, en famille, sont amenés à discuter de tout cela en apportant des expertises qui collent avec chaque thématique soulevée. Nous pouvons aussi jouer un rôle de chef d’orchestre, articuler les solutions répondant aux attentes des divers membres de la famille, anticiper les transitions et coordonner les différentes contreparties.
Y.S. On voit clairement que les choses ont changé. Il n’y a pas si longtemps, l’unique préoccupation des clients résidait dans la performance qu’on allait chercher à travers des investissements liquides. Aujourd’hui, il faut pouvoir les accompagner dans les différentes classes d’actifs existantes. En tant que banque privée familiale, nous devons être attentifs et surtout ouverts vis-à-vis de ces nouvelles attentes exprimées et portées par les jeunes qui se
trouvent en face de nous. Pour cela, nous devons nous appuyer sur des banquiers privés expérimentés, mais aussi pouvoir mettre des jeunes à leur service. Notre cœur de clientèle, en outre, réside dans les familles entrepreneuriales. À ce titre, c’est un enjeu-clé. Les entrepreneurs, en effet, sont en moyenne de plus en plus jeunes. Aussi, la moyenne d’âge de nos cibles a tendance à baisser. Elle est inférieure à la moyenne d’âge des clients de la Place. La banque privée, ce n’est plus par définition un monde d’anciens.
On sait que le métier de la banque subit une pression réglementaire coûteuse.
Comment cela est-il vécu et appréhendé au niveau de la banque privée ?
Y.S. Face aux enjeux réglementaires, comme évoqué, il faut pouvoir apporter des solutions technologiques efficaces. C’est-à-dire qu’aujourd’hui, vous ne pouvez pas être conformes si vous devez tout faire à la main. Bon nombre de réglementations, notamment ESG, impliquent que nos banques de données soient interfacées avec des banques de données spécialisées, qui fournissent les classifications, les informations exigées par les clients comme par les régulateurs. Le futur est dans la data.
La réglementation, cependant, ne va-t-elle pas trop loin ?
Y.S. L’objectif de toute banque est de rester durablement rentable et conforme. Or, ces deux dimensions sont sous pression. Pour ce qui est de la rentabilité, je crois que tout le monde veut que les prix soient justes, attractifs. Et pour être durablement conforme, il faut investir énormément, beaucoup plus que par le passé.
E.G. On peut en effet se demander si l’amplitude de la réglementation n’est pas supérieure à la capacité de production des experts nécessaires dans les domaines de la technologie et de la conformité. Dispose-t-on des expertises suffisantes pour continuer à croître durablement ? Les transformations à l’œuvre engendrent un besoin énorme en spécialistes qui sont déjà actuellement difficiles à trouver. Je crois que nous avons la chance, à Luxembourg, d’avoir un très bon régulateur, dont l’objectif est de s’assurer que tout le
16 PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024
Conversation Yves Stein et Eliseo Graziani
CIO of the year
« La stabilité, les compétences et la flexibilité de la place du Luxembourg ont été des atouts majeurs permettant son essor. Notre ambition est de continuer à nous développer sous ces valeurs. »
Antonella Michelino, CEO
Pour la 2 e année consécutive Midas Wealth Management a été récompensé « CIO of the year » lors des Luxembourg Wealth Management Awards 2024 organisés par Hubfinance. Midas
« Notre rôle est d’assurer la gouvernance dans la gestion des patrimoines familiaux dans un univers de produits d’investissement de plus en plus nombreux et complexes (Private Equity, Dette Privée, Cryptomonnaies, Investissements thématiques comme l’IA,Smart Beta…). »
Jean-Paul Vermeulen, Directeur Commercial
« Opter pour des placements de qualité, acquis à une valorisation attractive, garantit une performance robuste au fil des cycles économiques, particulièrement en temps d’incertitude. »
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« À un moment donné, ça devient tellement réglementé que tout le monde prend la même voie de la facilité. »
Eliseo Graziani
monde soit conforme. Toutefois, si l’amplitude du changement ne peut plus être digérée, il y a lieu de voir s’il ne faut pas lever le pied.
Où voyez-vous la limite ?
Y.S. Si nous voulons favoriser l’investissement dans l’économie réelle, il faut que ça reste possible. À un moment donné, ça devient tellement réglementé que tout le monde prend la même voie de la facilité. Aujourd’hui, la majorité de l’offre de gestion d’actifs mondiale est passif. Parce que le passif est le plus ‘streamlined’, moins cher et plus facilement conforme. À tel point que les valeurs de certaines sociétés sont portées par le besoin qu’ont des gestionnaires passifs d’investir. Est-ce cela que l’on cherche ? Au niveau de la banque privée, ce n’est pas ce que nous cherchons à faire. Nous sommes dans la gestion active, nos démarches répondent en permanence à la question : « où sont les meilleurs investissements ? ». Nous cherchons les leviers de création de valeur pour demain. On constate que, si les exigences réglementaires ne sont pas adaptées, elles sont les mêmes pour un investisseur averti, qui maîtrise le niveau de risque, que pour un investisseur retail. On ne s’y retrouve pas. Ce sont des discussions qui méritent attention.
Comment voyez-vous évoluer l’activité dans les mois à venir ? Quelles sont vos ambitions ?
Y.S. Notre priorité, étant donné la spécificité de notre modèle, la profondeur de
notre offre et l’importance de la culture de la maison, nous oriente plutôt vers la croissance organique. Nous cherchons donc à élargir les équipes, comme nous l’avons fait en 2023. Les résultats de l’année dernière nous permettent d’investir dans nos collaborateurs. C’est aujourd’hui la priorité de notre actionnaire et nous allons poursuivre dans cette voie. Si on ne peut pas nourrir le marché, en lui apportant tout le talent qu’il requiert, on ne peut pas espérer soutenir une croissance pour demain. Le marché est là. Il faut avoir les cerveaux et les mains pour le servir. Edmond de Rothschild Europe veut se concentrer sur son cœur de métier dans la mise en place et la gestion de fonds dédiés pour des clients privés fortunés et partenaires stratégiques. Dans la mise en place de ces structures, Edmond de Rothschild veut pouvoir s’appuyer sur des partenaires spécialisés ayant la taille critique dans l’administration de fonds.
E.G. Je rajouterais, si on parle des défis, que nous entendons continuer à améliorer, à renforcer l’offre et la qualité de service autour des clients. Donc, chaque année, on introduit quelque chose qui améliore la qualité et l’offre.
SE RECENTRER SUR L’ACTIVITÉ « CŒUR »
La banque privée change, réinvente ses modèles opérationnels. En décembre dernier, Edmond de Rothschild (Europe) cédait son activité d’asset servicing pour compte de tiers à Apex Group. « Ce deal répond notamment à une volonté de concentrer nos efforts sur les attentes de notre clientèle, à savoir la construction et la gestion de SIF et de RAIF, la traduction des convictions de la banque dans des investissements illiquides. Dans cette optique, la volonté est de s’appuyer sur des services providers comme Apex, à même de répondre à notre niveau d’exigence en matière d’administration de ces véhicules », explique Yves Stein.
18 PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024 Conversation Yves
Stein et Eliseo Graziani
For those who think further. It’s time for a new generation of ideas. Discover the entrepreneurial side of private banking. efginternational.com EFG International’s global private banking network operates in around 40 locations worldwide, including Zurich, Geneva, Lugano, Lisbon, London, Monaco, Luxembourg, Dubai, Hong Kong, Singapore, Sydney, Miami, Bogotá, Montevideo, Tel Aviv, São Paulo and Rio de Janeiro. EFG Luxembourg includes its branches in Portugal and Greece. In Luxembourg, EFG Bank (Luxembourg) S.A., 56, Grand-Rue P.O. Box 385 – L-2013 Luxembourg, RCS B113375, T +352 26 454 1.
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Se préparer à une nouvelle ère
L’innovation numérique, la multiplication des réglementations, l’intensification de la concurrence, les pressions liées au développement durable et les changements démographiques vont redéfinir les besoins et l’expérience des investisseurs et remodeler le secteur dans les années à venir.
Au niveau mondial, le secteur de la gestion de patrimoine est aujourd’hui confronté à des mégatendances convergentes qui redéfinissent les besoins des investisseurs et remodèlent le secteur dans un contexte d’incertitude économique et géopolitique croissante. « Ces tendances comprennent une innovation technologique rapide, une réglementation de plus en plus stricte, une concurrence accrue et de vastes changements démographiques », peut-on lire dans l’étude Building a Future-Ready Investment Firm, publiée fin 2023 par ThoughtLab, avec la collaboration d’un groupe d’experts de l’industrie du patrimoine. Dans le futur, « disposer d’une stratégie d’intelligence artificielle (IA) et de transformation numérique sera un impératif. Aussi, une nouvelle réflexion s’impose, car la segmentation traditionnelle des investisseurs ne reflète plus correctement le marché hétérogène d’aujourd’hui. La démographie évolue rapidement, créant un mélange d’investisseurs en fonction du patrimoine, de l’âge, de la source de revenus, de la localisation, du sexe et du style de vie. Les fournisseurs ont besoin d’une compréhension plus approfondie de leurs clients et de leurs besoins et comportements changeants ».
« Pour relever ces défis, les banques privées européennes doivent rapidement réimaginer la couverture des clients et leur offrir une expérience remarquable grâce à
la technologie, reconfigurer le modèle opérationnel et intégrer un objectif social dans leurs choix d’entreprise », détaille une autre étude menée par McKinsey & Compagny, intitulée The future of private banking in Europe: Preparing for accelerated change.
Une expérience client remarquable Alors que la demande des utilisateurs pour des interactions numériques à distance avec leur banque augmente, celles-ci doivent de toute urgence repenser leur modèle et leur proposition de services.
« Les banques doivent partir du point de vue du client et travailler à rebours pour voir comment l’expérience pourrait être fournie à distance par le biais de canaux d’omnicommunication sécurisés – tels que les vidéoconférences, les webinaires et les chats sécurisés – et investir dans la cybersécurité pour s’assurer que ces canaux peuvent être utilisés en toute sécurité », explique-t-on chez McKinsey. Les banques privées devront offrir des points de contact mobiles transparents avec un accès à tout moment et en tout lieu.
En raison de la simplicité et du coût réduit des plateformes numériques en libre-service et des solutions d’IA, de nombreux investisseurs préfèrent aujourd’hui faire appel à des machines plutôt qu’à des conseillers personnels pour de nombreuses
Expérience
22 PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024
Auteur MICHAËL PEIFFER
activités d’investissement. « Alors que la plupart des investisseurs d’âge moyen et plus âgés continueront à s’appuyer sur des conseillers, on observe un changement générationnel : 60 % des jeunes ne pensent pas qu’ils auront besoin d’un conseiller personnel d’ici 2030. À l’heure actuelle, seul un cinquième des jeunes investisseurs fait appel à un conseiller. Cette proportion augmentera au cours des trois prochaines années, mais elle restera inférieure à quatre sur dix, contre environ sept sur dix pour les investisseurs plus âgés », nous apprend l’étude de ThoughtLab.
On le voit, la technologie transforme le rôle des conseillers. « À mesure que les plus anciens prennent leur retraite, les entreprises doivent utiliser la technologie pour combler les lacunes en matière de talents et augmenter le nombre d’investisseurs que les conseillers peuvent gérer. Les entreprises doivent confier les tâches banales liées à l’investissement à des machines, libérant ainsi les conseillers pour ce qu’ils font le mieux : fournir des conseils fiables, spécialisés et holistiques », poursuit l’étude de ThoughtLab. Les entreprises gagnantes seront celles qui mettront en œuvre des approches hybrides rentables associant haute technologie et contact direct avec les clients, pour une expérience transparente.
Des conseillers aussi diversifiés que les clients
L’objectif doit être de faire passer l’expérience client numérique au niveau supérieur. Près de 70 % des investisseurs s’attendent à ce que les expériences numériques soient comparables à celles de leur entreprise numérique préférée. « Pour satisfaire leurs attentes et rester à la pointe de la concurrence, les sociétés de gestion de patrimoine devront offrir des vues consolidées des comptes de tous les fournisseurs, des ouvertures et des transferts de comptes en ligne simples, des chatbots vocaux et textuels facilités par l’IA, et une communication rapide avec les conseillers par la voix et le chat. Les investisseurs s’attendront à des expériences hautement personnalisées dans la paume de leur main et à un engagement vidéo pour fournir une assistance à distance », toujours selon ThoughtLab.
À l’avenir, les investisseurs seront encore plus diversifiés en termes d’âge, de
localisation, de sexe, de niveau de richesse et de mode de vie. Il sera vital pour les entreprises d’exploiter la technologie et les données pour mieux comprendre les besoins et les comportements des investisseurs, trouver des niches de marché et personnaliser les solutions, tout en constituant une base de conseillers sensibles aux différences entre les investisseurs. Pour ce faire, les entreprises devront recueillir des données à partir de sources internes et externes, y compris les médias sociaux. Et comme les investisseurs aiment travailler avec des personnes aux profils similaires, les entreprises d’investissement devront s’assurer que leurs conseillers sont aussi diversifiés que leurs clients.
« Le succès des médias sociaux et des plateformes de vente au détail a démontré la puissance du contenu personnalisé et adapté, constate-t-on de la même manière chez McKinsey. Les banques privées devraient s’inspirer de ce succès pour personnaliser le contenu et l’expérience de conseil sur tous les canaux, et pas seulement pendant le processus de conseil périodique délivré par le chargé de relation, comme c’est le cas traditionnellement. Ce contenu personnalisé peut aller du conseil en investissement à la planification holistique du patrimoine et au-delà, y compris des expériences de style de vie (par exemple, des conseils en matière de santé ou des visites virtuelles de galeries privées). »
Investir dans l’intelligence artificielle Les entreprises ont fait d’énormes progrès dans la mise en place des fondations numériques pour la transformation – et constatent déjà d’importants retours sur ces investissements. « Dans les années à venir, les entreprises devront doubler leurs investissements dans l’IA et la cybersécurité, tout en investissant dans d’autres solutions numériques, telles que l’infrastructure et les services cloud, les robo-advisors, les plateformes API ouvertes, les plateformes de bout en bout, les systèmes de collaboration vidéo et les outils de planification financière. Cela permettra aux entreprises de dégager la plus grande valeur, en développant des expériences et des conseils personnalisés et holistiques pour les investisseurs dans l’ensemble de leurs activités, au coût le plus bas. Pour réussir, les
PRIORITÉS STRATÉGIQUES POUR LES BANQUES PRIVÉES EUROPÉENNES
OFFRIR UNE EXPÉRIENCE CLIENT REMARQUABLE GRÂCE À
LA TECHNOLOGIE
1 Offrir une expérience client multicanal de nouvelle génération
2 Réimaginer le conseil et la gestion des relations grâce à la technologie
3 Accélérer le rythme de l’innovation
RECONFIGURER LE MODÈLE OPÉRATIONNEL
4 Redéfinir le modèle de couverture
5 Mise à zéro des fonctions centrales
6 Adopter des méthodes de travail souples et s’efforcer d’accroître la flexibilité de la main-d’œuvre
INTÉGRER UN BUT DANS LES CHOIX DE L’ENTREPRISE
7 Réflexion approfondie sur la vision de la banque
8 Adopter une approche holistique de la création de valeur pour les clients
9 Insuffler un objectif aux offres
Source McKinsey & Company
PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024 23
RECALIBRER
LES MODÈLES DE TARIFICATION
Selon l’étude menée par ThoughtLab, la réduction des frais et la simplification des structures de paiement seront les principales raisons pour lesquelles les investisseurs changeront de prestataire au cours des trois prochaines années. Pour conserver leurs clients – et en attirer de nouveaux –, les sociétés d’investissement devront repenser leur tarification et leurs modèles d’entreprise. Cela peut se traduire par une réduction, un plafonnement ou une renégociation des frais pour des services tels que la gestion discrétionnaire, ou par la justification des frais en pourcentage des actifs sous gestion par l’ajout de services de planification holistique. Les entreprises devront envisager d’intégrer à leurs produits et services une tarification basée sur la performance afin de répondre à la demande croissante, en particulier de la part des millennials orientés vers la croissance.
entreprises devront faire le tri entre les capacités techniques, la viabilité commerciale et les besoins des clients, et créer des analyses de rentabilité claires qui pourront être suivies en permanence », détaille l’étude de ThoughtLab.
Environ sept entreprises sur dix interrogées dans l’étude pensent que l’IA va révolutionner le mode de fonctionnement de leur organisation au cours des cinq prochaines années, et celles qui l’utilisent aujourd’hui en tirent des bénéfices considérables. Les entreprises devraient envisager leurs activités sous l’angle de l’IA, en l’adoptant pour soutenir une série d’activités en contact avec les clients, telles que le conseil en investissement, la gestion et la planification financière, et pour renforcer leurs opérations internes, en particulier la cybersécurité, la détection des fraudes et l’analyse des clients. Pour que l’IA fonctionne au mieux, les entreprises doivent s’assurer que les données sousjacentes sont exactes, intégrées et disponibles en temps réel, et qu’elles sont sécurisées et exemptes de biais indésirables. Un contrôle de la qualité sera nécessaire à la fois pour les données entrant et sortant des modèles d’IA, qui devront être formés pour fournir des résultats fiables.
La démocratisation des produits et des services augmentera à mesure que les entreprises offriront aux investisseurs davantage d’options pour accroître les rendements et gérer les risques. « Les produits et services à forte valeur ajoutée –investissements alternatifs, introductions en bourse, fonds indiciels personnalisés, investissements discrétionnaires, planification fiscale et services de banque privée –seront tous au menu. Mais pour garantir l’utilisation efficace de ces nouvelles offres, les entreprises devront fournir aux investisseurs l’éducation financière nécessaire pour comprendre ces offres, ainsi qu’aux conseillers les outils requis pour les évaluer. » Pour démocratiser leurs offres, les entreprises devront aussi utiliser des solutions numériques afin de réduire le coût des services.
L’ESG deviendra la norme Dans les années à venir, avec l’émergence de normes pour les données ESG et
l’augmentation des incitations commerciales, les considérations de durabilité deviendront aussi importantes que les considérations financières pour la plupart des investisseurs. Il ne suffira pas de recommander des fonds axés sur l’ESG. Les conseillers devront garder à l’esprit les objectifs durables des investisseurs lorsqu’ils géreront leurs investissements dans toutes les catégories d’actifs. Les entreprises tournées vers l’avenir proposeront des investissements thématiques dans des domaines spécialisés de la durabilité.
Alors que les millennials occupent le devant de la scène et que l’innovation numérique à grande vitesse devient la norme, les nouveaux venus dotés de pouvoirs numériques, qu’ils soient internes ou externes au secteur, vont bouleverser les règles du jeu. Les gagnants seront les entreprises d’investissement dotées de plateformes ouvertes et compatibles avec les API, qui leur permettront d’intégrer des solutions fintech de manière rapide et transparente. Dans le même temps, les entreprises coincées entre les nouveaux entrants numériques et les opérateurs historiques à grande échelle risquent d’être évincées ou englouties par la prochaine vague de consolidation. Pour nombre d’entre elles, la solution pourrait consister en des partenariats, plutôt qu’en une concurrence, entre les nouveaux acteurs et les acteurs établis.
Expérience 24 PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024
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Banque
The power of partnerships
Building powerful partnerships to better serve its clients is part of Quintet Private Bank’s DNA. Quintet’s 2023 cooperation agreements with BlackRock and Moonfare are in line with this approach, supporting the bank’s investment capabilities as it builds portfolios that meet its clients’ needs.
Quintet works with well over 50 asset managers worldwide, but its cooperation agreement with BlackRock is uniquely important. “Working with BlackRock enhances our reach, efficiency and flexibility, supporting our ability meet the long-term investment needs of each client we serve,” said Ilario Attasi, Head of Investment & Client Solutions, Luxembourg, and Group Head of Client Investment Specialists at Quintet Private Bank.
“It reflects our ability to leverage our open-architecture approach to offer clients a wider range of innovative products as part of a diversified portfolio.”
As the world’s largest asset manager, BlackRock is recognised for its investment insight and organisational efficiency. This cooperation agreement, covering multiple regions, is contributing to the full investment value chain across Quintet, spanning the definition of Quintet’s capital market assumptions to portfolio implementation. This enables Quintet to tap into dedicated pools of
expertise, providing access to investment tools, trade sizing, portfolio analytics, products and solutions.
Blend of experience
“Client relationships are always at the heart of everything we do,” said Mr Attasi.
“In May 2024, we will mark the 75th anniversary of our founding in Luxembourg. We take pride in being recognised as a
“ We leverage our open-architecture approach to offer clients a wider range of innovative products as part of a diversified portfolio.”
26 PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024
Photo Romain Gamba
Ilario Attasi, Head of Investment & Client Solutions, Luxembourg, and Group Head of Client Investment Specialists at Quintet Private Bank.
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Helping us to increase our reach, efficiency and flexibility in delivering what each client seeks.”
leading private bank here in the Grand Duchy and across Europe and the UK. Our heritage sets us apart, as do our close relationships with the families we serve and the time we dedicate to them. We understand their aspirations, which is why we retain full control over investment decision-making when working with any partner. In this regard, BlackRock provides world-leading technology, products and risk-management solutions that enhance our ability to deliver robust client outcomes, superior client experience and ongoing investment innovation.”
“Since the signing of our cooperation agreement last year, we have benefited from additional economies of scale that we can pass on to our clients, reflecting BlackRock’s negotiating power with asset managers,” Mr Attasi added. This relationship thus aims to generate significant long-term benefits for Quintet’s clients.
Innovative partnership
“BlackRock is recognised for the depth and quality of its investment expertise, and the advice they provide on our asset-allocation strategy supports our ability to deliver performance for our clients,” Mr Attasi added. This support includes selecting and monitoring thirdparty managers, which allows Quintet to offer its clients access to a broader universe of investment opportunities.
While focused on the delivery of investment alpha for Quintet’s high-net-worth individual clients and the family offices it serves, the relationship supports the entire investment value chain. “Our cooperation also covers the selection of instruments, governance and the deployment of processes,” said Mr Attasi.
Quintet’s teams work closely with their BlackRock counterparts on an ongoing basis. This work is overseen by Quintet’s own investment committee, which reviews and fine-tunes the approach. Alongside access to BlackRock’s advice, Quintet will use Aladdin, BlackRock’s proprietary investment technology platform, for its risk analytics and reporting.
As well as being a state-of-the-art tool for managing risk, it also facilitates reporting related to Quintet’s funds and discretionary solutions.
Enhanced investment opportunities
When it comes to private markets, Quintet announced last autumn an investment partnership with Berlin-headquartered Moonfare, giving suitable clients access to an end-to-end digital investment platform offering top-tier private-market funds –initially focusing on private equity and infrastructure strategies – selected and approved by Quintet.
“This platform provides our clients and client advisors with a wealth of tools and information related to private markets,” said Mr Attasi, noting that this includes product information, paperless subscriptions, client reporting, and portfolio analytics.
This is yet another example of how Quintet’s open-architecture approach facilitates partnerships with best-in-class specialists to enrich overall client experience – in this case, enhancing its alternative-investment proposition, making private-market investing more accessible and efficient for its clients.
“Our organisational agility allows us to be innovative and open to the best products and advice available anywhere. Our clients appreciate the difference we can make through our relationships with firms such as BlackRock and Moonfare,” concludes Attasi.
ASSETS UNDER MANAGEMENT
FACTS
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PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024 27
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(USD
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Quintet signed an important cooperation agreement with BlackRock in 2023
In May, Quintet will celebrate the 75th anniversary of its founding in Luxembourg
14,817.8
Quintet last year formed a private-markets partnership with Berlin-headquartered Moonfare
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S’intéresser aux tendances de fond
Dans un monde en constante évolution, les investisseurs à la recherche de rendement doivent s’intéresser à plusieurs tendances de fond. Guy Ertz, chief investment advisor chez BNP Paribas Wealth Management, apporte son éclairage sur les secteurs à tenir à l’œil en 2024.
Depuis la fin 2021, l’univers des taux d’intérêt connaît un changement de paradigme radical. Les banques centrales ont renoncé à leur politique de taux zéro, tandis que les emprunts d’État ont enregistré leur plus forte hausse de rendement ainsi que leur plus forte baisse de prix depuis la fin des années 1970. Sous l’effet de la hausse des taux, l’inflation est aujourd’hui en diminution et les investisseurs découvrent un choix de plus en plus large d’opportunités pour générer des revenus intéressants.
« Au-delà de ces considérations globales, les investisseurs doivent être attentifs à certaines tendances de fond , explique Guy Ertz, chief investment advisor chez BNP Paribas Wealth Management. L’évolution de l’environnement nous oblige à revoir la façon dont nous construisons et diversifions nos portefeuilles. Les investisseurs doivent ainsi se demander quelles classes d’actifs peuvent réellement offrir une diversifica tion supplémentaire pour élargir et optimi ser leurs portefeuilles dans un monde en perpétuel mouvement. »
Le défi de la décarbonation
La dynamique autour de la transition énergétique continue de s’accélérer,
« La clé de la transition énergétique est l’électrification, qui nous permet de sortir progressivement de la dépendance aux combustibles fossiles. »
amplifiée par les vagues de chaleur inédites enregistrées en différents points du globe en 2023. Les progrès insuffisants enregistrés jusqu’à présent pour atteindre les objectifs climatiques et l’importance accrue accordée à la sécurité énergétique obligent les gouvernements mondiaux à engager d’énormes ressources financières pour réduire notre dépendance aux énergies fossiles. « Depuis les températures record de l’été 2023, le besoin urgent de décarboner l’économie mondiale s’est accéléré, constate Guy Ertz. La clé de la transition énergétique est l’électrification, qui nous permet de sortir progressivement de la dépendance aux combustibles fossiles. L’attractivité de l’économie, la prise de conscience de la société et les nombreuses initiatives de soutien des gouvernements devraient contribuer à encourager les lourds investissements initiaux nécessaires dans les infrastructures électriques, notamment dans la production, la transmission et le »
D’autre part, l’essor des véhicules électriques destinés à la logistique et au transport des personnes exige d’importants investissements de départ pour produire les matières premières nécessaires,
À suivre
Photo BNP Paribas Wealth Management
Auteur MICHAËL PEIFFER
28 PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024
puis pour les transformer en produits finis tels que les voitures, mais également les câbles et les panneaux solaires. « Dans ce contexte général, l’efficacité énergétique est aussi un axe majeur de cet effort de transition, car cela reste beaucoup moins cher d’économiser l’énergie que de la produire. C’est pourquoi nous recommandons une politique d’investissements multi-actifs : actions, obligations, infrastructures et matières premières », précise le chief investment advisor.
L’IA : une révolution accessible
La nécessité pour les investisseurs d’élargir le type d’actifs pour atteindre une véritable diversification doit les conduire à s’intéresser à l’intelligence artificielle. « La surperformance spectaculaire des sept méga-caps technologiques américaines, à savoir Amazon, Apple, Google, Meta, Microsoft, Nvidia et Tesla, depuis 2020 et encore en 2023, a entraîné une concentration des portefeuilles d’investissement mondiaux dans ces valeurs, phénomène qui n’a pas été observé depuis la bulle technologique de l’an 2000 et l’épisode des Nifty Fifty des années 1970. Dans les deux cas, les groupes de valeurs prisées qui ont fait l’objet de valorisations extrêmes avaient vu leur cours chuter au cours des années suivantes, entraînant des pertes importantes au sein des portefeuilles », explique le chief investment advisor. Pour notre expert, les investisseurs doivent accélérer la diversification des portefeuilles, potentiellement surexposés à ces sept géants technologiques américains. « Aux côtés de ces leaders de la révolution de l’intelligence artificielle générative, il est crucial de chercher à identifier les secteurs et les industries qui peuvent tirer d’énormes bénéfices des applications de l’IA. »
Démographie : la révolution du bien-être « Le secteur de la santé a sous-performé en 2023 car l’attention s’est focalisée sur l’IA et les valeurs technologiques ‘Magnificent Seven’. Aujourd’hui, à mesure que l’économie ralentit, les possibilités de croissance et les caractéristiques défensives du secteur pourraient devenir plus attractives », souligne Guy Ertz. Selon les prévisions, la part de la population de plus de 60 ans doublera pour atteindre 2,1 milliards d’ici
2050. Par ailleurs, le nombre de cas d’obésité a presque triplé dans le monde depuis le milieu des années 70. Depuis la pandémie, dans un contexte de vieillissement de la population et d’augmentation des revenus, le bien-être est plus que jamais au centre des préoccupations des consommateurs, ainsi que l’allongement de l’espérance de vie « en bonne santé ».
« L’IA peut réduire le coût de la mise au point de médicaments et stimuler l’innovation dans le secteur. Les enjeux autour d’une alimentation durable et saine, les technologies médicales, les traitements au service du bien-être et l’innovation dans les produits pharmaceutiques, y compris les traitements pour lutter contre le surpoids, vont provoquer une rupture majeure par rapport aux pratiques actuelles, créer de la volatilité et être une source importante d’opportunités », précise Guy Ertz.
Les principaux enjeux des années à venir sont liés à la réduction des émissions de CO2 et aux innovations liées à la santé. Dans ces deux domaines, les récents développements en matière de robotique et d’intelligence artificielle ouvrent de nouvelles perspectives. En effet, l’utilisation de l’intelligence artificielle va permettre d’accélérer le développement de nouveaux médicaments, notamment pour les maladies liées à l’obésité. Et les solutions liées à l’électrification et à l’efficacité énergétique offrent elles aussi un énorme potentiel.
AUTRES PRINCIPALES TENDANCES
L’impact des hausses de taux cumulées ne se fait pas encore pleinement sentir sur la croissance économique et l’inflation, surtout aux États-Unis. De plus, les banques centrales réaffirment leur volonté de conserver des taux élevés pendant une période prolongée, ce qui laisse entendre qu’elles ne baisseront pas les taux d’intérêt tant qu’elles ne seront pas convaincues que l’inflation enregistre un ralentissement significatif.
Le mouvement de bascule observé de la globalisation au profit des intérêts nationaux va se poursuivre, ce qui pourrait entraîner des pénuries de matières premières et de biens. Ce changement a également pour effet de renforcer les relocalisations et les productions de proximité afin de consolider les chaînes d’approvisionnement, en particulier dans les secteurs stratégiques clés tels que les semi-conducteurs.
Les modes de vie ont probablement changé de façon permanente après la pandémie de 2020 : le travail à domicile ou le temps libre sont désormais mis sur un pied d’égalité avec le salaire et toute autre compensation financière. Cette situation a de profondes répercussions sur les modes de consommation ainsi que sur la demande de bureaux dans les grandes villes.
Nouveaux traitements contre l’obésité : la lutte contre l’obésité avec la mise sur le marché de médicaments efficaces par Novo Nordisk et Eli Lilly pourrait être le principal progrès pour augmenter l’espérance de vie depuis les campagnes mondiales antitabac des années 1970.
Les géants de la tech ont consolidé leur position dominante sur les marchés d’actions internationaux, ce qui représente un risque de concentration croissant au sein de portefeuilles censés être diversifiés.
PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024 29
Segmenter : le pari gagnant
Les conseillers en investissement qui segmentent leurs clients peuvent personnaliser leurs services, se développer plus rapidement et générer davantage de revenus.
Auteur MICHAËL PEIFFER
1Développer un avantage concurrentiel
Les investisseurs s’attendent aujourd’hui à profiter d’une marketplace personnalisée, à l’image de ce qui se fait déjà dans la vente de produits ou de services en mode retail. Les arguments en faveur de la segmentation sont clairs. Selon plusieurs études, les entreprises financières qui segmentent leur clientèle dépassent celles qui ne le font pas en termes d’actifs sous gestion, de croissance des actifs, ou encore de rémunération annuelle des conseillers. La segmentation peut non seulement profiter à l’entreprise, mais elle peut surtout offrir une expérience client exceptionnelle et différenciée.
3
Soutenir l’expérience client
Pour bien segmenter sa clientèle, il faut d’abord bien la connaître. Un classement basé sur la seule richesse financière n’est pas suffisant. Il est important de prendre en compte d’autres facteurs tels que la trajectoire patrimoniale, la situation géographique du client ou la probabilité de recommandation... Ces niveaux peuvent aider à gérer le temps que les conseillers consacrent à chaque client, et à prioriser les missions. Autre point important, plus le chargé de clientèle et son client auront d’intérêts communs (technologiques, loisirs, cause particulière…), plus ce dernier sentira que le service a été personnalisé.
5
Transférer les clients : le moment crucial
Lorsque le moment est venu de transférer un client vers un segment personnalisé, la prudence est de mise.
Certains clients peuvent avoir l’impression qu’une relation précieuse prend fin, tandis que les conseillers peuvent se sentir lésés. Il est important d’informer les deux parties sur les avantages qu’elles tireront du changement. Elles doivent repartir avec le sentiment d’avoir tiré un profit significatif de la transition. En fin de compte, l’avenir du secteur consiste à apprendre à connaître ses clients et à créer pour eux des programmes échelonnés et sur mesure.
2
Définir les objectifs
Avant d’entamer ce processus de segmentation, il est conseillé de prendre le temps de définir clairement les objectifs à atteindre. Le but est-il d’attirer de nouveaux clients ou de consacrer davantage de ressources aux clients actuels à forte valeur ajoutée ? Une fois ces objectifs définis, il faut penser à organiser les équipes en conséquence, en consacrant plus de temps aux investisseurs qui correspondent à la clientèle idéale définie en amont. De manière générale, il est important d’adapter ses services aux besoins de ses clients. Tous les investisseurs n’ont pas besoin ou ne souhaitent pas le même niveau de service.
4
Recueillir, gérer et analyser la donnée
Des données de qualité aident à segmenter efficacement les clients. Celles-ci se présentent sous diverses formes : relations personnelles, courriers électroniques, documents administratifs, etc. Il est important d’approfondir la connaissance du client, en allant même jusqu’à connaître ses préférences en matière d’alimentation et de vacances. Tout est dans le détail. Un système dynamique de gestion des données, qui permet de suivre toutes ces informations, peut s’avérer essentiel. Des données de qualité ne servent à rien si elles ne sont pas disponibles facilement.
Stratégie
30 PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024
Investir dans un monde fragmenté
Le monde actuel est déchiré par des divisions géopolitiques croissantes, avec des conséquences pour l’économie mondiale et les marchés financiers. Comment les investisseurs doiventils réagir dans un tel contexte ?
La croissance économique ne s’interrompt pas dans un monde fragmenté. Toutefois, la sécurité et la fiabilité des chaînes d’approvisionnement ont pris de l’importance. Une situation qui encourage les partenariats commerciaux entre pays « amis », tandis que certaines puissances rivales tentent de s’empêcher mutuellement de prendre l’avantage dans des secteurs stratégiques.
Nos projections de croissance pour les marchés développés se situent entre 1 et 2 % en 2024. Pour être durable, la croissance dépendra majoritairement de forces distinctes, notamment de fondamentaux budgétaires sains, de marchés de l’emploi flexibles et de la capacité à s’adapter aux chocs.
Dans les portefeuilles d’investissement, ce contexte exige d’accroître l’exposition aux actifs domestiques et des éléments de diversification additionnels, comme l’or et, pour ceux qui disposent d’un horizon temporel
et d’une tolérance au risque appropriés, les actifs non cotés.
UNE INFLATION PLUS VOLATILE
Un monde fragmenté n’est pas nécessairement synonyme d’inflation élevée, mais potentiellement plus volatile. Aujourd’hui, l’inflation des biens s’est normalisée et le prix des services suit le mouvement. Toutefois, les événements politiques peuvent changer rapidement la donne, par exemple dans le cas d’une hypothétique seconde administration Trump.
Lorsque les perspectives d’inflation deviennent plus incertaines, les marchés des taux exigent une prime de risque. Non seulement les taux directeurs des banques centrales ont atteint des niveaux d’équilibre plus élevés, mais les rendements obligataires affichent aussi une prime de risque et sont plus rigides. À la fin du cycle de baisse des taux en 2025, les taux directeurs américains devraient atteindre 3,5 %, et ceux de la zone
euro, du Royaume-Uni et de la Suisse atteindre respectivement 1,5 %, 2,5 % et 1 %.
DE NOMBREUSES ALTERNATIVES AUX ACTIONS
Pour 2024, nous prévoyons des rendements moyens à un chiffre pour les actions des marchés développés. Les bons du Trésor américain et les Bunds allemands pourraient générer des rendements similaires aux niveaux actuels, voire supérieurs. Les obligations devraient donc faire leur grand retour dans les portefeuilles, tout comme les investissements alternatifs. Les investisseurs disposent de nombreuses alternatives pour construire un portefeuille bien diversifié, avec une volatilité et un risque moindres.
LOMBARD ODIER (EUROPE) SA Dr Nannette Hechler-Fayd’herbe Responsable de la stratégie d’investissement, durabilité et recherche, CIO EMEA luxembourg@lombardodier.com
: «
nombreuses
pour construire un portefeuille bien diversifié .»
Nannette Hechler-Fayd’herbe
De
alternatives existent
PARTNER CONTENT
Une même ligne quelle que soit la taille du client
Lazard Frères Gestion a développé ces trois dernières années au Luxembourg l’activité de gestion d’actifs avec un savoir-faire éprouvé. La volonté est de déployer une stratégie à long terme.
Installée depuis trois ans sur la Place, Lazard Frères Gestion bénéficie d’une expérience séculaire en France. Là-bas, l’activité de conseil financier y côtoie celle d’asset management. C’est la gestion d’actifs pour le compte de clients privés qui est développée au Grand-Duché. « Notre présence physique était réclamée par des clients à la recherche de proximité. Cela nous a permis d’élargir notre réseau », témoigne Julien Thibault-Liger, directeur général d’une succursale située au boulevard Royal qui s’adresse à une clientèle composée de familles et d’entrepreneurs luxembourgeois ou principalement européens, attirés par la stabilité et la pérennité de la Place.
Pas de segmentation commerciale « Nous sommes reconnus pour notre activité de gestion sous mandat. Nous acceptons des clients à partir de 3 millions d’euros sans pratiquer de segmentation commerciale. Quelle que soit la taille du client, il n’y a pas de différence en matière d’accompagnement ou d’offre de gestion. » Cette politique puise ses racines dans l’histoire. « Lazard Frères Gestion était initialement le family office de nos associés-gérants. Leur argent était confié à des gestionnaires de portefeuille très expérimentés. Au fil des années, le cercle des bénéficiaires s’est élargi aux amis des associés-gérants, puis à des clients exté-
rieurs, avec comme spécificité une offre de gestion identique, donc un véritable alignement d’intérêts. »
La stratégie d’investissement a pour but de s’inscrire dans la durée sur un modèle à la Warren Buffett. « La philosophie est de conserver les investissements sur longue période. À titre d’exemple, le taux de rotation du portefeuille actions européennes est de l’ordre de 18 % par an. »
L’un des principaux objectifs des clients de Lazard Frères Gestion est de lutter contre l’érosion de leur capital. Avec l’inflation, il est nécessaire d’aller chercher de la performance sur le long terme. « Nous privilégions une gestion active en implémentant dans les portefeuilles des investissements que nous connaissons parfaitement en les passant au crible de nos analyses. Cela nous permet de maîtriser le risque. »
La société a constaté une évolution dans sa clientèle. Les grandes familles industrielles avec un patrimoine accumulé de génération en génération ont progressivement fait place à des personnes plus jeunes qui se sont enrichies plus rapidement avec des montants significatifs.
40 milliards d’encours
Pour les accompagner, l’équipe luxembourgeoise se compose à ce jour de quatre personnes : deux côté gestion, et deux côté développement, avec le support des back et middle-offices en France. Le turnover
modéré chez Lazard (entre 12 et 13 ans d’ancienneté en moyenne) laisse le temps de cibler des profils de banquiers toujours difficiles à dénicher avec deux leitmotive : exigence et excellence. Une croissance des effectifs au compte-gouttes pour une entreprise qui a atteint en 2024 le chiffre de 40 milliards d’euros sous gestion pour la France, la Belgique et le Luxembourg, répartis entre la gestion institutionnelle (25 milliards) et la gestion privée (15 milliards), cette dernière comptant 2.400 clients, soit une moyenne de 6,2 millions d’euros par client privé.
JULIEN THIBAULT-LIGER
Directeur général Lazard Frères Gestion
« La philosophie est de conserver les investissements sur une longue période. »
Long terme
Photo Guy Wolff (archives)
Auteur CHRISTOPHE NADIN
32 PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024
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Bingo.lu
La nouvelle plateforme immobilière qui place vos désirs au premier plan.
« La technologie doit permettre d’intensifier la relation client »
La banque privée opère aussi sa mue numérique. Comment le digital redéfinit-il l’expérience client ? Comment la technologie soutient-elle le développement de l’activité ?
Isabelle Waty, directrice de l’innovation et de l’expérience client au sein d’Indosuez Wealth Management Europe, évoque ces enjeux.
Interview SÉBASTIEN LAMBOTTE
Portrait MARIE RUSSILLO
34 PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024
Conversation Isabelle Waty
Pour Isabelle Waty, il faut repenser les parcours pour être mieux au service du client.
À l’échelle de la banque privée, comment définir l’expérience client ? Et comment évolue-t-elle ?
L’expérience client comprend l’ensemble des interactions que nos clients entretiennent avec la banque. Elle passe par les canaux numériques, interface e-banking ou application, mais pas uniquement – rendez-vous physiques, entretiens téléphoniques ou événements. Alors que l’activité se transforme, considérant les nouvelles attentes des clients et les possibilités offertes par les solutions digitales, l’enjeu est d’utiliser au mieux la technologie pour qu’elle soit créatrice de valeur, à la fois pour nos équipes et pour nos clients. Celle-ci doit nous permettre de fluidifier l’ensemble des parcours client et faciliter les interactions entre nos différents départements. Étant donné ma fonction, mon objectif est de soutenir cette transformation et d’identifier comment l’innovation peut permettre d’améliorer l’expérience vécue par chaque client. C’est aujourd’hui un enjeu-clé pour la banque.
Qu’est-ce qui oriente cette transformation ? En quoi est-elle cruciale ?
Ce mouvement, Indosuez l’a engagé il y a cinq ans, avec la volonté d’accélérer la transformation numérique de l’activité. La banque de détail avait déjà entamé ce virage technologique il y a plus d’une dizaine d’années. Au niveau de la banque privée et de la gestion de fortune, cependant, l’urgence était moindre, l’expérience attendue par le client n’étant pas tout à fait la même, le marché étant différent. La qualité de la relation interpersonnelle entre le client et son conseiller prime toujours à l’heure actuelle. Toutefois, nos clients étant désormais habitués à utiliser des solutions numériques pour la plupart des aspects de leur quotidien – pour se déplacer, au travail, pour leurs loisirs –, la banque privée doit, elle aussi, leur proposer des solutions qui correspondent à ces standards. Dans un marché concurrentiel, pour rester compétitifs, capter une nouvelle clientèle, nous devions donc faire évoluer notre approche, accélérer notre transformation, marquer une rupture dans la manière de faire évoluer la banque et nos services.
Quels sont les principaux enjeux en lien avec la transformation de l’expérience utilisateur ?
Cela ne se limite pas à proposer une interface conviviale via une application mobile ou une interface web banking. Cette transformation est beaucoup plus profonde. Elle représente une opportunité de repenser notre modèle, notre fonctionnement interne, la manière dont nous interagissons régulièrement avec nos différents clients dans l’optique de renforcer l’intensité relationnelle avec eux, valeur chère au Crédit Agricole. L’une des forces de la banque, comme l’a révélé une enquête de satisfaction menée l’année dernière, réside dans la proximité que nous entretenons avec nos clients. C’est notamment pour ce sens du relationnel que nous sommes reconnus et recommandés.
Comment bien aborder cette transformation ?
Il s’agit de repenser le parcours des clients et, pour cela, le parcours du collaborateur. Une telle démarche va avoir des répercussions sur l’ensemble de la chaîne de valeur, en positionnant le client au centre de nos réflexions. Il faut donc avant tout bien connaître cette chaîne, identifier comment les diverses équipes y contribuent, identifier les systèmes et processus impactés, pour in fine, repenser le parcours pour mieux servir le client. On comprend alors que cette démarche au service de l’amélioration de l’expérience client est transversale. Si cette transformation est profonde, elle nous permet aussi de mieux faire prendre conscience à chaque collaborateur de l’importance de son rôle, au service du client et de sa satisfaction.
Quel est le principal apport de la technologie au service de l’amélioration du parcours client ?
Elle est avant tout là pour faciliter les interactions, les échanges que l’on a en interne, pour nous aider à mieux servir le client. Elle doit aussi nous permettre de gagner en agilité, d’être plus rapides dans la mise sur le marché de nouvelles solutions, de nouveaux services et fonctionnalités, ou même de nouveaux produits. Aujourd’hui, les possibilités offertes par le numérique sont nombreuses. Cependant, lorsqu’on est
BIO EXPRESS
C’est en 2019 qu’Isabelle Waty rejoint Indosuez Wealth Management. Elle se voit confier la direction de l’innovation et de la transformation digitale de la banque pour le Luxembourg, la Belgique, l’Italie, l’Espagne et le Portugal. Depuis l’année dernière, elle est aussi responsable de l’expérience client pour l’ensemble des entités d’Indosuez. Ces deux casquettes, complémentaires, lui permettent d’accélérer la dynamique de digitalisation qui anime l’institution. Au fil de sa carrière dans le domaine de la finance au Luxembourg, Isabelle Waty a souvent exploré, en se rapprochant du monde des start-up notamment, comment la technologie pouvait être mise au service de la création de valeur et contribuer à améliorer l’expérience des utilisateurs.
36 PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024
Conversation Isabelle Waty
une banque privée, il est important de les maîtriser : la technologie doit être bien comprise de nos collaborateurs, pour leur permettre de trouver les leviers afin d’améliorer leur quotidien pour un meilleur service client. C’est dans cette optique, notamment, que nous avons mis en place des équipes dédiées à l’innovation pour insuffler une nouvelle culture d’entreprise et adapter nos méthodes de travail. C’est aussi dans cette perspective que nous nous sommes rapprochés de l’écosystème fintech, dont les membres développent des expertises technologiques sur des sujets bien précis. Ils nous permettent d’avancer beaucoup plus rapidement que si nous devions les envisager à travers des projets de développement toujours menés en interne. Dans cette démarche, l’idée est de pouvoir nous appuyer sur des logiciels existants, et de pouvoir tester plus facilement de nouvelles solutions et technologies. Le rapprochement de nos équipes avec des acteurs de la fintech permet aussi à nos collaborateurs de monter en compétences plus efficacement sur certains sujets numériques.
Travailler avec les acteurs de la fintech n’est pas toujours apparu comme quelque chose d’évident pour les acteurs traditionnels de la finance…
En effet. Pour une banque privée, dont l’activité s’appuie sur des systèmes hérités, parfois peu malléables, pouvoir travailler avec ces sociétés innovantes, pouvoir facilement intégrer leurs solutions a impliqué d’opérer un changement d’état d’esprit. D’abord, il faut accepter d’adopter des solutions clés en main, sans vouloir à tout prix « trop les tordre » pour les faire correspondre à un besoin précis. D’autre part, ces acteurs technologiques, pour beaucoup, ont été perçus comme des « ennemis ». Il a fallu changer cette perception de love and hate relationship, pour les considérer comme des partenaires, des leviers de création de valeur. Enfin, il faut que l’architecture informatique de la banque évolue pour faciliter l’intégration de ces solutions. Considérant notre dette technologique, le défi a été de la faire évoluer, notamment
« Repenser le parcours des clients et, pour cela, le parcours du collaborateur.»
au travers du déploiement d’interfaces de programmation permettant à l’ancien monde et au nouveau de s’interfacer facilement. Au-delà, il y a aussi un défi culturel, qui vise à faire travailler ensemble les équipes de la banque – qui évoluent dans un cadre contraint – et des talents numériques issus des fintech, où tout va beaucoup plus vite. Cela prend du temps. Mais les avantages, en termes d’agilité et d’évolutivité de nos services, sont importants.
Avez-vous des exemples illustrant la manière avec laquelle la collaboration avec des acteurs de la fintech a contribué à améliorer l’expérience client ?
Dès 2019, nous avons noué une collaboration avec Wealth Dynamix, qui développe une solution client relationship management (CRM) et client lifecycle management (CLM) intégrant un ensemble de fonctionnalités qui contribuent justement à l’amélioration de la relation entre son banquier et son client. Elles permettent à nos conseillers de disposer d’une vue à 360 degrés des familles que nous servons et soutiennent leur accompagnement tout au long de leur cycle de vie au sein de la banque, de l’onboarding à la réalisation du KYC ainsi que dans le suivi du parcours de chaque client ou encore l’identification des opportunités commerciales. Un tel outil permet de fluidifier les échanges et de personnaliser la relation. Cette collaboration a contribué à améliorer la solution pour, in fine, mieux accompagner nos clients. L’année dernière, Indosuez Wealth Management a acquis une participation majoritaire (70 %, ndlr) dans Wealth Dynamix.
On parle d’un CRM, soit d’une solution stratégique, dans le cadre de votre métier…
Oui. Le déploiement d’une telle solution a un impact sur l’ensemble des départements de la banque, qui gravitent autour du client. C’est un outil central. On comprend dès lors que l’enjeu, à travers un tel projet, n’est pas uniquement technologique. Sa mise en œuvre a impliqué de repenser nos façons de travailler, les processus et les workflows, l’assignation des tâches qui incombent à cha-
PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024 37
cun pour gagner en efficience de manière transversale. Tout projet de transformation digitale a des composantes organisationnelles, culturelles et humaines importantes.
Il faut les considérer bien en amont du projet, pouvoir expliquer pourquoi on les met en œuvre, quels sont les bénéfices attendus. Il ne faut pas négliger les enjeux d’accompagnement du changement en étant proches des équipes sur le terrain.
Comment vos clients, nés avec un smartphone dans les mains, souhaitent-ils voir évoluer l’expérience que leur offre la banque privée ?
Les attentes, eu égard au numérique, aux nouvelles fonctionnalités proposées via nos interfaces, ne concernent pas uniquement les plus jeunes. Nous avons une clientèle dont la moyenne d’âge demeure élevée, ce qui ne l’empêche pas d’être aujourd’hui très à l’aise dans l’utilisation des outils digitaux. Une grande part de nos clients souhaitent interagir avec nous, consommer les services bancaires autrement, notamment sur base des expériences dont ils profitent par ailleurs dans leur vie quotidienne. À travers nos canaux numériques, une interface d’e-banking ou une application mobile, ils veulent pouvoir accéder facilement à leurs données, notamment celles liées à la valorisation de leurs actifs de toute nature, que celles-ci évoluent de manière dynamique, en temps réel. Pour un certain nombre d’éléments, ils souhaitent pouvoir initier des transactions de manière autonome ou encore facilement rentrer en contact avec leur conseiller et les expertises de la banque.
Via les canaux numériques, qu’est-ce qui est attendu de la clientèle d’une banque privée au-delà des fonctionnalités proposées par l’e-banking d’une banque de détail ?
Nos clients souhaitent accéder à un contenu qualitatif, directement lié à notre expertise dans le domaine du conseil en investissement et en gestion patrimoniale. L’année dernière, nous avons donc lancé une nouvelle plateforme sur laquelle nos clients accèdent à toute notre expertise, aux analyses et recommandations de nos conseillers et gestionnaires. Cela leur est proposé sous la forme d’articles, de pod-
casts ou encore de vidéocasts, selon la profondeur de l’information souhaitée (accès au détail des différents actifs financiers, ndlr), de manière simple et ergonomique.
Le fait de partager cette information précieuse ne déforce-t-il pas le rôle du conseiller ?
Au contraire. On se rend compte que le partage de cette information permet au client de mieux préparer le rendez-vous suivant et, lors de la discussion avec son conseiller, d’approfondir la relation. Le client, globalement, est mieux informé. Notre valeur ajoutée, au départ de son niveau de connaissance et de sa situation patrimoniale, réside dans l’accompagnement que nous lui offrons. On peut aller davantage dans la personnalisation de la relation.
Le numérique vient supporter la relation, permet d’aller davantage au fond des choses. De la même manière, la technologie permet de réduire les contraintes liées aux aspects administratifs. Le temps que l’on gagne en évitant de devoir imprimer, consulter et signer une pile de papier lors d’un rendez-vous, grâce à la signature électronique notamment, permet des échanges plus qualitatifs et fluides. C’est avant tout ce que le client attend de son conseiller en gestion de fortune.
Le sujet du moment, si l’on parle de technologie, c’est l’intelligence artificielle. Comment cette technologie peut-elle contribuer à améliorer l’expérience client ?
À nos yeux, l’intelligence artificielle doit avant tout supporter les métiers, nos collaborateurs, dans la réalisation de leurs missions au quotidien. L’IA est un levier que nous explorons dans cette perspective, mais il n’est pas le seul. L’automatisation, à travers le déploiement de robots, contribue aussi à améliorer notre efficacité opérationnelle. L’intégration de ces technologies à l’échelle de la banque implique de questionner nos processus, de pouvoir les identifier de bout en bout afin d’envisager de faire mieux en procédant autrement ou en recourant à la technologie. On peut se demander, pour chaque tâche, si celle-ci doit être forcément exécutée par un humain. Si non, quelles sont les alternatives ? Actuellement, au sein de la banque, nous avons
DANS TOUTES
LES LANGUES
Pour répondre aux besoins de traduction – importants lorsque l’on sert une clientèle internationale – Indosuez s’appuie sur l’intelligence artificielle. En l’occurrence, il s’agit aussi d’une histoire de rapprochement entre la banque privée et une fintech incorporée au sein de la Luxembourg House of Financial Technology, à savoir Lingua Custodia. La startup a aussi rejoint le programme d’accélération Le Village by CA. Aujourd’hui, le moteur d’intelligence artificielle de la start-up spécialisée dans le traitement automatique du langage naturel est utilisé à travers les entités du groupe partout en Europe, contribuant grandement à accélérer la productivité des équipes dans la traduction ou la retranscription de paroles dans toutes les langues.
38 PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024 Conversation Isabelle Waty
une quinzaine de robots qui exécutent des tâches et qui nous permettent de gagner du temps, de concentrer des efforts sur la création de valeur aux yeux des clients.
L’IA, d’autre part, doit nous permettre aussi d’explorer plus en profondeur nos données, afin de mieux comprendre nos enjeux et d’ouvrir de nouvelles perspectives, d’envisager de nouvelles solutions ou de nouveaux produits. Le préalable, pour avancer dans cette direction, est de s’assurer de disposer de données de qualité. On constate une forte appétence des métiers autour de ces développements.
Qu’en est-il de l’IA générative ?
Au niveau des équipes, des collaborateurs qui ont pu expérimenter les capacités de ChatGPT souhaitent aussi pouvoir travailler en s’appuyant sur de tels outils. Nous explorons les possibilités de les déployer à l’échelle de la banque, pour produire du contenu, rechercher et synthétiser de l’information, mettre en page des documents ou les enrichir au moyen de graphiques. À travers cette technologie, il est possible d’aller plus loin dans la personnalisation des services proposés aux clients. Cependant, il faut se doter d’une gouvernance ad hoc, pouvoir accompagner ce changement, en considérant des enjeux de conformité et en veillant à garantir la préservation de la confiance que nous accordent nos clients. À la fin, c’est l’humain qui doit avoir le dernier mot. Il faut avancer progressivement, en veillant à fixer le cadre. C’est au niveau du Lab Innovation d’Indosuez, actuellement, que nous envisageons ces développements futurs.
Quel est le rôle de ce Lab ?
Ces démarches d’innovation et de transformation digitale s’appuient sur une équipe internationale. J’ai des homologues dans d’autres entités d’Indosuez, en France, à Monaco, en Suisse. Au départ du Luxembourg, le groupe pilote la succursale belge, l’italienne, l’espagnole et, depuis février, la succursale portugaise. À travers toutes ces entités, l’idée est de renforcer un écosystème qui soutient l’innovation, en faisant remonter des besoins et des idées, en se rapprochant des start-up. Cet écosystème est une source importante d’inspiration. Au niveau de notre Lab
LA DIGITALISATION DU MIDDLE ET BACK OFFICE
Les domaines dans lesquels les prestataires de services de gestion de patrimoine investissent le plus dans les technologies de middle et de back-office.
Source Building a Future-Ready Investment Firm - ThoughtLab
Cyberinformation et cybersécurité
Gestion des données et analyse
Traitement et règlement des opérations commerciales
Gestion et acheminement des ordres de transaction
Centre de contact Finances et audit
Gestion des risques, juridique
Comptabilité de portefeuille
Rapport sur les clients
Conformité réglementaire
Gestion des comptes clients
Gestion de l’identité et de l’accès des clients
PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024 39
0 % 10 % 20 % 30 % 40 % 50 % 60 % 70 % 80 %
Maintenant Dans trois ans 62 % 48 % 45 % 40 % 34 % 32 % 27 % 26 % 22 % 21 % 41 % 20 % 21 % 25 % 29 % 36 % 32 % 30 % 57 % 59 % 35 % 65 % 17 % 17 %
« L’intégration de ces technologies à l’échelle de la banque implique de questionner nos processus, de pouvoir les identifier de bout en bout afin d’envisager de faire mieux en procédant autrement ou en recourant à la technologie.»
FACILITER LA COMMERCIALISATION
DES ACTIFS PRIVÉS
Le rapprochement de la banque avec des fintech permet aussi d’accélérer sa transformation auprès des clients professionnels. À côté de Wealth Dynamix, Indosuez Wealth Management est par exemple aussi entrée au capital de la start-up AirFund, dont la plateforme digitale vise à simplifier la mise en relation entre sociétés de gestion et distributeurs de fonds de private markets (actifs non cotés) auprès des particuliers. Amundi est montée au capital de la start-up en même temps que la banque privée. Pour Indosuez, ce rapprochement doit faciliter la commercialisation des fonds d’actifs privés gérés par la banque privée et simplifier les opérations de souscription et rachat dans ces fonds.
Innovation, nous explorons ces idées et les possibilités que nous offre la technologie autant que nous envisageons de nouvelles manières de travailler, de nous organiser, afin de soutenir la transformation à l’échelle du groupe. C’est à ce niveau que nous cherchons à mettre en place les nouvelles solutions, en développant des partenariats avec nos équipes ou des fintech par exemple. Les équipes du Lab sont en full agile et ont développé de nouveaux services digitaux pour nos clients – et ce, dans un temps très court. C’est toute la promesse du Lab : délivrer un produit en trois mois. L’enjeu, à ce niveau, est de valider la valeur ajoutée que ces nouvelles solutions apportent à nos clients, et ce, en les impliquant désormais directement dans nos démarches d’innovation.
Dans quelle mesure la technologie transforme-t-elle le métier de la banque privée ?
Depuis 20 ans, nos métiers ont considérablement évolué. La gamme des produits proposés s’est élargie et complexifiée. La réglementation s’est accrue. Nous devons aujourd’hui considérer d’autres dimensions, notamment autour de la finance et de ses impacts sociétaux et environnementaux. L’enjeu est de se doter des capacités pour évoluer plus rapidement. La volonté est de gagner en agilité, à travers nos laboratoires, mais aussi en se rapprochant des start-up, d’itérer beaucoup plus pour faire évoluer nos solutions, nos organisations. L’objectif est de pouvoir se transformer suivant des cycles de développement beaucoup plus courts et, de cette manière, d’améliorer en continu toutes nos solutions. Dans cette optique, la volonté est d’être beaucoup à l’écoute du terrain, de nos collaborateurs comme de nos clients, pour identifier les besoins et valider les hypothèses. Nos clients sont d’ailleurs très heureux d’être impliqués de la sorte dans la démarche. C’est aussi une manière d’intensifier la relation et, in fine, de s’assurer que l’on pourra continuer à enchanter chacun d’eux.
40 PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024 Conversation Isabelle Waty
Who truly “owns” the client relationship with HNWIs?
In the high-stakes world of wealth management, this question looms large. Recent personnel shifts in major banks have intensified this debate. As seasoned professionals switch allegiances, their HNWI clients find themselves at a crossroads.
Sanel Muranovic, Senior Private Banker at Banque Havilland S.A.
THE DANCE OF TRUST AND CONTINUITY
The banker and the bank play pivotal roles in the delicate dance of wealth management. On the one hand, the banker, with their personalised service, deep understanding of client needs, and ability to build strong relationships, becomes the confidant. The bank, on the other hand, provides the institutional framework, financial products, and stability. If the banker changes employers, the stakes rise. HNWIs must weigh trust, continuity, and personal connections against the allure of a new banking environment. It is a high-stakes game where loyalty and pragmatism collide. Trust is the currency of wealth management. HNWIs entrust their fortunes, relying on expertise, discretion, and commitment. When a banker switches banks, the client faces a dilemma: do they follow their trusted advisor, risking disruption, or stay with the familiar institution?
THE TUG-OF-WAR:
CONTINUITY VS. PERSONAL CONNECTIONS
Transitioning to a new banking environment involves more than just moving accounts. Change disrupts established routines, relationships and processes. HNWIs value continuity – knowing that their financial affairs will be handled seamlessly, regardless of personnel changes.
Personal connections matter too. The rapport between a banker and their client transcends transactions. It is about shared goals, mutual understanding, and a history of successful collaboration.
SOLVING THE CONUNDRUM
Banks must recognise that HNWIs are not mere accounts; they are relationships. To retain clients, banks should:
Empower private bankers: invest in training, technology, and resources to enhance bankers’ capabilities.
Institutionalise relationships: develop robust CRM systems that outlast individual advisors.
Collaborate across teams: a team-based approach ensures clients benefit from collective expertise.
IN THE END, IT IS NOT ABOUT WHO “OWNS” THE RELATIONSHIP – IT IS ABOUT NURTURING IT COLLECTIVELY
Banks that prioritise trust, continuity, and personal connections will win the loyalty of HNWIs, ensuring a prosperous future for both clients and employees.
Crédit Banque Havilland S.A. FOR MORE INFORMATION Banque Havilland S.A. info@banquehavilland.com www.banquehavilland.com PARTNER CONTENT
Luc
Innovation & Regulation go hand in hand
The expectations of wealthy clients are constantly evolving, driven by the need for innovation and hyper-personalisation, as well as by the appeal of sustainable investment. Despite these trends, the human factor and expertise remain central to our ability to provide exclusive wealth support.
Within the Luxembourg life insurance sector, two trends are taking shape that are impacting not only the way insurance companies interact with partners and clients, but also the products and services they offer. The first trend, linked to clients’ expectations, is innovation, which must be supported by the entire Luxembourg ecosystem. With a little hindsight, we can say that “the first wave of innovation we experienced dates back to the 1990s, and concerned the regulatory aspect. The second took place in the 2000s and enabled insurance companies to adapt their wealth management solutions. In the 2010s, these same companies sought to improve their efficiency. We were talking about operational innovation. Finally, in the 2020s, innovation has taken on a technological and digital dimension,” explains Luc Rasschaert, CEO of WEALINS. These innovations must now be continued and accelerated to help Luxembourg’s financial centre stand out in the face of competition from other European countries. For example, some of the proposed changes to the law are likely to have an impact on the rules governing professional secrecy. Accordingly, the use
Photo Marie Russillo
(Maison Moderne)
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42 PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024
Rasschaert, CEO & Flavia Micilotta, ESG Investment Specialist.
of the cloud should multiply the opportunities available to the life insurance and wealth management sector.
Focus on a client-centric approach
This innovation is all the more necessary as it enables us to meet the expectations of wealthy clients. Both the younger generation and some older policyholders now want solutions that meet their specific needs. “We’re talking about a personalised, tailor-made approach. They also want greater responsiveness and flexibility in accessing and exchanging information. For a company like WEALINS, it’s important to be resilient, to adapt quickly to innovation, to the use of new technologies, and to adopt the ATAWAD (anytime, anywhere, any device) concept. We call our unique approach ‘Wealth Insurance as a Service’. This encompasses both the products and the services we offer our partners and clients, including our expertise and know-how in wealth management and structuring, and our digital offering.”
With this in mind, the company has wiped the slate clean of its multiple IT systems to offer a single digital platform (eWealins) to its partners and their clients. It offers a number of advantages, including responsiveness, efficiency and reliability in data management. For example, it also gives the broker the opportunity to answer a client’s questions, or to obtain information about his or her insurance policy. The platform is constantly evolving to meet the current and future needs of WEALINS’ partners and clients.
Combining positive impact and financial performance
Several studies have offered the evidence that the sustainable finance regulatory framework has been developed at such a rapid pace that much of the industry is still pondering on the most relevant implications and their impacts on their business models. One of the latest survey in this respect, published by Oxford Risk 1 , has in fact shown that only 13% of asset managers, who are the main partners of insurance companies, really understand these ESG laws and requirements. “They are at a loss as to how to integrate the impacts into their work and
communicating them clearly to their clients. All these considerations need to be understood, translated, and transposed into investment products,” comments Flavia Micilotta, ESG Investment Specialist.
Another challenge concerns the demands of regulators. These require asset managers to ask clients about their sustainability preferences. Although over 90% of them (always according to the Oxford Risk report1) consider this “mapping” to be the most important part of their work, the time devoted to it remains limited.
The ESG movement has become more than just a trend. “More and more families want to make a commitment to ESG when it comes to their investments, especially the younger generation. Managing the evolution of clients’ preferences, which sometimes differ within the same family, is particularly complex for managers.”
Convinced that the integration of ESG criteria and financial performance can go hand in hand, WEALINS takes a close interest in this subject, which influences the way we develop products, reach clients, and interact with partners. The company intends to be a valuable support for partners. “We want to act as a facilitator and help them improve their knowledge of legislation to make it easier to understand sustainable finance and their clients’ preferences, and integrate them into their policy. We help them assimilate this information and meet the expectations of clients and regulators, we offer them trainings through our webinars and other presentations. Our e-Wealins platform also makes it easier for our partners to capture clients’ sustainability preferences.”
Once again, WEALINS has a leading role to play. “We want to be useful and support our partners as they face the challenges ahead. We are working in an increasingly complex environment, which is why data management, knowledge sharing, and wealth support will be more than ever necessary,” concludes Luc Rasschaert.
1 Source of the survey https://www.wealthbriefing.com/html/ article.php/The-ESG-Phenomenon%3A-Oxford-Risk-Study
THE FOUR PHASES OF INNOVATION
1990s - Regulatory innovation
The life insurance industry needed a regulatory framework.
2000s - Wealth management innovation
Creativity was needed to interpret the regulations and come up with appropriate wealth management solutions.
2010s - Operational innovation
These solutions needed operational efficiency.
2020s - Technological/digital innovation
An omnichannel approach (human and digital) had to be implemented to enable insurance companies to respond to the current and future wealth expectations of their clients.
BRAND VOICE PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024 43 TO FIND OUT MORE, VISIT WWW.WEALINS.COM
Hyperautomatisation, l’impossible graal
Plus simple, plus réactif, plus rigoureux, plus intelligent, plus disponible, plus personnalisé : l’industrie rêve d’un « all-in ». Mais, en fin de course, chaque acteur devra se réinventer de manière très ciblée.
Et si l’hyperautomatisation n’était pas un « must have » lorsque l’on est gestionnaire de fortune ? « J’aime d’abord examiner le problème, puis déterminer quelles sont les bonnes technologies pour aider à le résoudre. De nombreuses technologies utilisées par les conseillers au fil du temps concernaient l’automatisation… mais je constate une grande tendance vers la technologie pour réellement prendre en charge les conseils centrés sur le client. »
Au moment où tout le monde ne parle que d’intelligence artificielle et de quelques innovations de pointe, le fondateur et CEO de d1g1t, Dan Rosen, est l’un des rares qui fasse entendre une voix différente. Pour ce professeur adjoint de finance mathématique à l’Université de Toronto et premier directeur du Centre des institutions financières du Fields Institute, la vérité est surtout dans le « diagnostic du patrimoine » des clients fortunés, à partir duquel le fournisseur de service peut construire une relation et une stratégie à long terme. Son postulat est double : d’un côté, les acteurs traditionnels ont du mal à actualiser leur « vieille » technologie pour délivrer à leurs clients les meilleurs conseils ; de l’autre, les robo-advisors ont quasiment tous été construits de manière simpliste sur la baisse des frais et des conseils d’investissement très basiques. Il n’est pas le seul à partager cette idée. Au point que, depuis quelques années, a surgi
une nouvelle dynamique qui consiste, dans le cadre de la transformation digitale des acteurs du wealth management – encore très loin d’être aboutie –, non pas à proposer le graal qui permettrait de tout régler en un seul endroit, mais une solution qui permette d’identifier à quels endroits améliorer quels processus pour rendre chaque acteur plus performant, que ce soit pour l’onboarding des fortunés clients, pour tout le back-office sur le passage des ordres ou dans la détection de nouvelles opportunités d’investissement. Non pas pour tout automatiser mais pour libérer l’humain et le mettre au service de l’humain beaucoup plus fortuné. Rien de neuf sous le soleil ? Peut-être. Mais cela se complique. Exemple ? Les systèmes d’automatisation intelligents peuvent utiliser l’automatisation des processus robotiques (RPA) et la reconnaissance optique de caractères (OCR) pour numériser et extraire les données des documents de clients, rationalisant la configuration et la maintenance des nouveaux comptes… Mais qui garantit que ces données personnelles restent absolument à l’abri des regards dans un contexte de compliance accrue, de KYC et de lutte contre le blanchiment ? Quid de l’intelligence artificielle qui assiste la détection des opportunités d’investissement ? Comment savoir ce qu’elle « favorise » et ce qu’elle délaisse ?
KIDBROOKE ET L’ESPRIT
MONTE CARLO
Née à Londres et émigrée à Stockholm, Kidbrooke a pivoté pour créer un cadre de transformation numérique à trois niveaux : gestion des données moderne, nouvelle approche de réponse aux questions financières pour donner de la cohérence aux stratégies élaborées pour les clients, et « omni-channel business », où la solution aligne toutes les méthodes de calculs de probabilité pour rendre l’avenir… plus probable.
Technologie
Journaliste THIERRY LABRO
44 PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024
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Private Equity Outlook
Avec un environnement réglementaire favorable, une économie résiliente, un accent mis sur l’investissement durable, l’innovation numérique, les opportunités transfrontalières et la demande croissante des investisseurs, le Luxembourg est bien positionné pour capitaliser sur le marché florissant du private equity.
Avec la participation de Alain Kinsch (Luxembourg Stock Exchange), Giuliano Bidoli (BC Partners), Helene Noublanche (Coller Capital), Yannick Oswald (Mangrove Capital Partners), Clarisse Leduc (European Investment Funds), Peter Brown (Aztec Financial Services), Alain Rodermann (Expon Capital), Martine Kerschenmeyer (Korn Ferry) et Gisèle Duenas Leiva (Blackrock)
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MARDI�� JUIN���� General partner
La Spuerkeess s’est transformée
Face à la demande grandissante de la clientèle, en recherche de prestations qui répondent toujours plus adéquatement à ses attentes, les institutions qui offrent des services de banque privée s’organisent. Alain Uhres, head of private banking à la Spuerkeess, et Fred Kutten, son adjoint, témoignent de cette transformation indispensable.
La personnalisation des services est aujourd’hui un axe de développement et de différenciation majeur pour les banques privées en quête de nouvelles sources de revenus. Si les grands acteurs entièrement dédiés à la gestion de fortune ont tendance à s’orienter vers une clientèle disposant d’avoirs de plus en plus élevés, les banques plus traditionnelles ne restent pas les bras croisés. Voici deux ans, par exemple, la Spuerkeess a réorganisé son offre en se dotant d’un nouveau département Private banking dans le but de mieux servir cette clientèle aux attentes particulières. « Jusqu’en 2022, l’activité de banque privée était placée sous la responsabilité de notre réseau d’agences. Aujourd’hui, il s’agit d’une entité à part entière, aux côtés de nos trois autres pôles que sont le retail banking, la clientèle institutionnelle et le corporate banking, témoigne Alain Uhres, head of private banking à la Spuerkeess. Cette nouvelle organisation traduit une volonté de personnalisation de nos services de private banking à destination d’une clientèle essentiellement de résidence luxembourgeoise et frontalière. »
« Aller davantage vers cette personnalisation, qui exige de maîtriser de nombreux sujets, à la fois en matière de compliance, mais aussi au niveau des produits et services. »
En tant que banque universelle, détenue à 100 % par l’État luxembourgeois, la Spuerkeess présente une très large gamme de services bancaires, qui sert directement l’activité des clients plus fortunés. « Au niveau de nos services de base, on retrouve les services daily banking comme les comptes courants, les cartes de paiement, notre application S-Net, qui rassemble plus de 300.000 utilisateurs aujourd’hui, explique Alain Uhres. Notre département, qui se situe plus haut dans la pyramide des besoins, peut puiser dans cette offre et cette infrastructure développées par la banque, ce qui nous permet de profiter d’économies d’échelle importantes. »
Une gestion discrétionnaire de haut niveau
Pour servir au mieux sa clientèle, le département Banque privée peut également s’appuyer sur l’expérience acquise depuis de nombreuses années par la banque dans la À ce niveau, nous proposons aujourd’hui trois approches distinctes, execution only, l’advisory et la gestion discrétionnaire… À partir d’un certain seuil d’avoirs, nous pouvons réellement
Solutions
personnalisées
Auteur MICHAËL PEIFFER
46 PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024
offrir un conseil très personnalisé, jusqu’à la mise à disposition d’un gestionnaire professionnel dédié qui prendra, dans le cas de la gestion discrétionnaire, toutes les décisions d’investissement pour le compte du client, en fonction de son profil de risque et de ses attentes très précises, en termes d’impact environnemental notamment », continue Alain Uhres.
Comme dans beaucoup d’autres institutions, la personnalisation est d’abord conditionnée par le niveau des avoirs sous gestion (AuM) que le client est prêt à confier à son banquier privé. « Bien que la clientèle de la Spuerkeess diffère de celle des pures maisons de banque privée, nous sommes pleinement engagés à développer des solutions avec lesquelles on peut aborder les clients family office ou ultra high net worth (UHNW), partage Fred Kutten, deputy head of private banking à la Spuerkeess. À ce niveau, notre atout est de pouvoir puiser dans toute l’expertise déjà en place au sein de la banque, et tout particulièrement celle des équipes de Spuerkeess Asset Management, notre filiale spécialisée en gestion de portefeuilles. Au niveau le plus prestigieux de la gestion discrétionnaire, nous avons le privilège de pouvoir mettre à disposition de nos clients les plus fortunés un gestionnaire dédié et expérimenté de Spuerkeess AM, pour prendre en compte les contraintes individuelles en matière de politique d’investissement. »
L’avantage d’une banque universelle est de pouvoir accompagner ses clients tout au long de leur vie. « Grâce à cette organisation, qui se matérialise à travers les quatre activités commerciales, nous pouvons offrir à ces clients un service à 360 degrés et identifier, le moment venu, les clients qui disposent du profil et des ressources pour frapper à la porte de notre département, souligne Fred Kutten. C’est notamment le cas de nos clients corporate. Au commencement, nous sommes là pour financer leur projet et, une fois que leur activité se développe, leurs besoins évoluent. Le niveau de fortune du chef d’entreprise ou du titulaire d’une profession libérale peut augmenter. On entre petit à petit dans la sphère des placements, de l’accompagnement et, au final, de la banque privée. En outre, compte tenu de leur parcours, ces personnes sont souvent d’une grande fidélité. »
Afin de mieux servir sa clientèle de banque privée, la Spuerkeess étoffe encore sa gamme de services, notamment dans le domaine du financement. « Notre banque est très bien positionnée sur ce sujet, mais nous voulons aller plus loin pour répondre aux besoins spécifiques des plus fortunés. Nous avons donc mis en place une équipe dédiée. On pense souvent, à tort, que ces personnes n’ont pas besoin de solutions de financement. Or, c’est souvent le contraire. Et leurs besoins en la matière sont très spécifiques », reprend Alain Uhres. Enfin, même si la structuration patrimoniale n’a jamais été au cœur des services de la banque, là encore, une petite équipe est désormais en place pour analyser en profondeur la situation du client, l’accompagner par exemple au niveau de questions de succession, de fiscalité, de philanthropie, le plus souvent en partenariat avec des experts externes.
Un seuil d’entrée augmenté
En parallèle de toutes ces actions, et afin de garantir le niveau de personnalisation attendu par les clients, la Spuerkeess a décidé récemment d’augmenter le seuil d’entrée à la banque privée. « Alors que les coûts sont en augmentation constante, notamment d’un point de vue réglementaire, et que le métier de chargé de relation se complexifie, nous souhaitons limiter le portefeuille de chacun de nos conseillers, afin de les rendre plus disponible, précise Alain Uhres. L’idée n’est pas d’exclure les gens, mais véritablement d’aller davantage vers cette personnalisation, qui exige de maîtriser de nombreux sujets, à la fois en matière de compliance, mais aussi au niveau des produits et services que nous proposons à cette clientèle, qu’il faut apprendre à connaître et à servir sur le long terme. »
L’APPÉTIT AU RISQUE EN GUISE DE SEGMENTATION
La spécialisation d’une banque privée passe par la segmentation de sa clientèle. Banque 100 % luxembourgeoise, détenue par l’État, la Spuerkeess concentre ses efforts principalement sur ses clients locaux luxembourgeois et ceux qui ont un lien direct avec le pays, comme les frontaliers. « Cette segmentation touche directement à l’appétit au risque de la banque. Considérant l’investissement nécessaire et le risque encouru, élargir notre cible à d’autres zones géographiques trop ‘exotiques’ ne nous semble pas opportun, tout simplement parce que cela demande une expertise dont nous ne disposons pas. Nous avons donc décidé de nous concentrer sur ce que nous connaissons le mieux, avec l’avantage qu’il est plus facile aujourd’hui d’onboarder un client résident luxembourgeois qu’un ressortissant d’une zone géographique lointaine, notamment au regard des exigences de compliance (KYC, lutte contre le blanchiment d’argent ou le financement du terrorisme, reporting financier et extra-financier, etc.) », confie Alain Uhres.
Vient ensuite la prise en compte du niveau de sophistication du client. « Si, aujourd’hui, je m’occupe d’une personne physique résidente luxembourgeoise, l’entrée en relation sera différente que si nous devons ouvrir un compte pour une holding, détenue par d’autres holdings ou par un trust, et présente dans plusieurs juridictions à travers le monde. Chaque banque doit ainsi se poser la question de son appétit au risque et de ses affinités pour certains sujets ou certaines zones géographiques », ajoute le head of private banking
Cette préoccupation rejoint un autre enjeu-clé, qui est celui du time consuming. « Notre département rassemble environ 70 personnes. La moitié sont des chargés de relation. L’autre moitié est là pour leur apporter tout le support nécessaire à leur activité de conseil. Si nous souhaitons consacrer tous nos efforts à la satisfaction de cette clientèle de banque privée, nous devons nous limiter dans le scope choisi », conclut Alain Uhres.
PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024 47
Se réinventer dans un monde incertain
Portés par des prévisions 2023 de très bonne facture, les acteurs de la banque privée doivent absolument oser investir, notamment dans la technologie au service de la personnalisation de l’offre et expérience client mais également dans un objectif d’efficience et résilience organisationnelles et opérationnelles, et ce malgré les nombreuses incertitudes qui pèsent aujourd’hui sur l’économie mondiale.
Les résultats financiers 2023 de la plupart des banques privées luxembourgeoises s’annoncent sous les meilleurs auspices. Le contexte économique global, soutenu par la remontée des taux d’intérêt, a donné une bouffée d’oxygène à tous les acteurs de la place financière, qui disposent de nouvelles capacités d’investissement. Ce tableau, certes positif, est toutefois contrebalancé par la situation macroéconomique actuelle, plutôt tendue. « Le principal challenge des banques privées est aujourd’hui d’oser investir, et ainsi s’assurer de leur pérennité dans un monde incertain , constate Pascal Martino, partner, banking leader au sein de Deloitte Luxembourg. Il est en effet difficile de savoir jusqu’à quand les taux d’intérêt vont rester à un tel niveau. Une baisse est attendue, mais à quel moment interviendra-t-elle ? Ensuite, nous sommes confrontés à une situation géopolitique globale dont il est difficile de cerner tous les contours. Qui peut dire aujourd’hui comment vont évoluer les conflits en cours, au Moyen-Orient ou en Ukraine, dans les prochains mois, sans oublier les échéances électorales à venir, notamment aux États-Unis ? »
« Si je veux être un peu challengeant, la question est aujourd’hui de savoir ce que le conseiller de clientèle va amener en plus que l’intelligence artificielle. »
Pour Pascal Martino, les banques privées, malgré les doutes qui pèsent sur l’économie mondiale, n’ont pas d’autre choix que de délier les cordons de la bourse pour investir si elles veulent continuer à servir une clientèle fortunée présente à l’international. « Les défis à relever sont nombreux. En premier lieu, il est aujourd’hui nécessaire d’investir dans la relation clientèle, d’apporter des solutions de pointe, toujours plus personnalisées. Cela demande de s’appuyer sur des outils informatiques modernes, mais aussi sur les talents humains, qui restent au cœur de la relation entre la banque privée et son client », souligne Pascal Martino.
Pour répondre aux attentes de ces clients, les banquiers doivent aussi renforcer leur capacité à innover, afin de participer activement à la concurrence de plus en plus grande qui se joue à l’échelle européenne et mondiale. « En termes de technologie, et toujours dans l’objectif d’améliorer la qualité des échanges, l’intelligence artificielle, l’automatisation de certains processus et la digitalisation dans son ensemble doivent permettre aux banques d’être plus agiles, efficientes, mais aussi de répondre à
Prévisions
Photo Matic Zorman (archives)
Auteur MICHAËL PEIFFER
PASCAL MARTINO Partner, banking leader Deloitte Luxembourg
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des enjeux réglementaires toujours plus contraignants », complète le partner.
À cela s’ajoutent des attentes toujours plus élevées émanant des clients quant au niveau de service escompté, tendance qui s’accompagne logiquement d’une pression sur les tarifs. « Le challenge est donc de continuer à générer des revenus, en ayant conscience que les taux d’intérêt risquent de ne pas se maintenir à un tel niveau très longtemps », analyse le banking leader de Deloitte. D’autant que la base des coûts des acteurs de la banque privée a considérablement augmenté, sous l’effet de l’inflation et du système d’indexation des salaires propre au Luxembourg.
Dans cette situation complexe, les banquiers privés doivent prendre des décisions stratégiques importantes. « Il est notamment crucial pour chaque acteur de définir un positionnement clair. Il est devenu quasi impossible pour un private banker de servir tous les marchés, notamment d’un point de vue géographique, mais aussi en termes de segmentation de la clientèle. Accompagner un client qui dispose d’un, de dix ou de cent millions implique des approches très différentes , tant au niveau de la relation que des produits et des services qu’on doit être capable de lui proposer. On assiste donc aujourd’hui à un repositionnement des acteurs. » Celui-ci s’accompagne d’une revue de l’offre globale. La question étant de savoir quels services et quels produits proposer, à quel prix, pour quel type de clientèle. « L’autre levier sur lequel les banquiers privés luxembourgeois doivent travailler a trait aux coûts, ou au ‘cost to serve’. À ce niveau, le défi est aujourd’hui d’analyser la rentabilité de chaque service ou produit, selon le profil du client. Et de faire, là encore, des choix », commente Pascal Martino.
Mutualisation et outsourcing
Afin de réduire les coûts, de plus en plus d’initiatives voient le jour, à travers la mise en œuvre de plateformes ou de produits innovants. « Tout le monde ne peut plus tout faire. On entre donc dans une logique de partenariat, notamment avec des acteurs de la fintech ou d’autres entreprises spécialisées dans un domaine particulier. On constate également une volonté grandissante de mutualiser une partie de la
chaîne de production. C’est notamment le cas dans des domaines tels que le reporting réglementaire, le KYC, le reporting fiscal, etc., avec la naissance de solutions. Cela peut aller jusqu’au recours à des solutions d’outsourcing de plus grande ampleur, que ce soit de l’IT ou de tout le back-office », constate Pascal Martino.
Le rôle du relationship manager doit lui aussi évoluer. « Si je veux être un peu challengeant, la question est aujourd’hui de savoir ce que le conseiller de clientèle va amener en plus que l’intelligence artificielle, interroge notre expert. Demain, la banque privée va devoir s’appuyer sur des personnes qui comprennent la technologie et savent l’utiliser. Cela nécessite également une certaine remise en question afin de définir où se situe la plus-value de l’humain dans ce nouvel écosystème. »
Ce qu’attend un client de son banquier privé, c’est avant tout une relation de confiance et un partenariat sur le long terme. « Aujourd’hui, et c’est heureux, on place davantage sa confiance en l’homme qu’en la machine, relève Pascal Martino. Par contre, il est important que ce relationship manager s’équipe des bons outils. Il s’agit d’amener à son client l’expertise financière qu’il attend, qui vient en partie de son expérience, mais qui peut aussi émaner de l’intelligence artificielle de plus en plus pertinente. D’autre part, il faut pouvoir lui proposer un service personnalisé. Par ailleurs, le client attend encore de son banquier une grande transparence. »
Il y a donc une nécessité de former, d’adapter les compétences et d’équiper les banquiers privés avec les meilleurs outils du moment. Mais le défi se situe tout autant dans la capacité des acteurs luxembourgeois, souvent de taille réduite, d’investir dans ces technologies et de profiter de tous les avantages qu’elles offrent. D’où cette nécessité d’opter pour des solutions d’outsourcing ou de mutualisation de certaines solutions, et de réfléchir davantage en tant que place financière, plutôt qu’en tant qu’acteur isolé.
Une équation difficile à résoudre L’équation reste complexe. D’un côté, l’Europe incite les banques à participer activement au financement de l’économie réelle, à mobiliser les capitaux pour soutenir le
UNE VISION FUTURE DE L’INDUSTRIE
D’ici 2028, le secteur du patrimoine aura changé, selon 250 cadres supérieurs interrogés.
Source Deloitte
69 %
L’IA modifiera considérablement la façon dont leurs entreprises travaillent.
58 %
Les conseillers en investissement personnel resteront nécessaires à l’avenir.
55 %
Les entreprises numériques nées vont transformer le secteur du patrimoine comme elles l’ont fait pour le marché de détail.
52 %
La plupart des produits seront banalisés, ce qui obligera les fournisseurs à proposer des services à valeur ajoutée pour défendre leurs tarifs.
48 %
Les modèles de tarification basés sur les commissions disparaîtront largement au fur et à mesure que les modèles basés sur les honoraires se généraliseront.
47 %
La blockchain et les technologies connexes réduiront le besoin d’intermédiaires, tels que les dépositaires et les chambres de compensation.
39 %
Les investisseurs se tourneront principalement vers les prestataires de services d’investissement pour les revenus de retraite, l’assurance maladie et la planification de la longévité.
39 %
Les frontières entre la gestion de patrimoine, la banque et l’assurance s’estomperont à mesure que les investisseurs exigeront des services plus globaux.
PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024 49
« Les cinq prochaines années vont être passionnantes, notamment en termes de transformation du paysage bancaire luxembourgeois. »
Pacte vert et la transition énergétique. De l’autre, elle impose un cadre réglementaire de plus en plus contraignant, qui réduit les marges de manœuvre des acteurs de la finance. « En réponse, on voit une tendance très forte à la consolidation du marché, avec des acteurs désireux d’atteindre une taille critique suffisante pour adresser tous ces sujets et bénéficier de la capacité d’investissement nécessaire pour répondre à ces enjeux. J’aime dire que ‘difficult roads lead to beautiful destinations’, partage Pascal Martino. Les 5 prochaines années vont être passionnantes, notamment en termes de transformation du paysage bancaire luxembourgeois. Les acteurs présents en 2030 seront sans doute très différents d’aujourd’hui. Et j’espère qu’ils seront bien plus forts et innovants. La seule certitude est que le statu quo n’est pas possible. »
D’ici 5 à 10 ans, notre expert s’attend donc à une consolidation des banques privées sur le marché. « Le niveau de collaboration entre banques ainsi qu’avec des fintech et d’autres acteurs sera beaucoup plus grand. On fonctionnera davantage dans un écosystème global, afin d’apporter le meilleur service possible au client. On assistera également à l’émergence du digital et de l’ESG ‘by design’. Nous sommes encore au début du chemin qui doit nous mener vers l’investissement durable et responsable. Enfin, à l’image de ce que nous pouvons déjà faire avec notre téléphone pour acheter tout et n’importe quoi sur Amazon, la
banque privée sera accessible à tout moment, avec une gamme de services disponible 24 h/24, avec du conseil en temps réel, via un conseiller, mais aussi par l’intermédiaire d’une intelligence artificielle. »
Élargir le scope de la clientèle Afin de diversifier leurs revenus et de se distinguer de la concurrence, certaines banques privées cherchent à se positionner sur de nouveaux segments porteurs.
« Pour donner un exemple, le segment très haut de la banque retail, qui est aussi le segment très bas de la banque privée, est désormais pris en considération par certaines institutions de la Place. Jusqu’ici mal servis par leur conseiller retail et peu ou pas pris en compte par la banque privée, sinon à des prix très élevés au regard des services offerts, ce segment peut être synonyme de nouveaux revenus, à condition d’investir dans des solutions digitales », explique Pascal Martino.
Si l’on regarde au-delà de l’éternelle segmentation établie en fonction du niveau de fortune et des volumes d’assets sous gestion, une autre approche consiste à s’intéresser davantage à certaines typologies de clients. « L’ancienne ou la nouvelle génération, les personnes qui désirent plus d’autonomie ou celles qui attendent une gestion discrétionnaire, les entrepreneurs, les retraités… Toutes ces personnes ont des besoins différents. Une segmentation à la fois comportementale ou par type de métiers peut alors être envisagée. »
DIGITAL ET ESG « BY DESIGN »
Demain, la finance durable sera intégrée à tous les niveaux des organisations. « On surestime souvent l’impact d’une réglementation, d’une technologie ou d’une nouvelle tendance à court terme. À l’inverse, on sous-estime cet impact à un horizon plus lointain. Voici 2 ans, tout le monde disait qu’il fallait aller vers l’investissement durable, écologique, responsable parce qu’on allait assister à une vague extrêmement forte et rapide d’investissements soutenue par des clients engagés. Or, ce n’est pas le cas », analyse Pascal Martino. La masse de la clientèle a besoin d’être rassurée. Elle cherche toujours un retour financier et, parfois, en supplément, va demander de l’impact. Actuellement, ceux qui demandent des produits ESG sont avant tout les plus grands clients, qui disposent d’un volume d’actifs très important. « Par contre, à l’avenir, l’ensemble des acteurs va comprendre qu’il ne s’agit plus de faire un arbitrage entre retour économique et ESG, poursuit le banking leader de Deloitte Luxembourg. Les deux vont aller de pair, et les portefeuilles construits et gérés selon une approche plus responsable présenteront potentiellement un meilleur rendement. Au-delà de ces considérations, le Luxembourg est aujourd’hui une place forte de la finance. Nous devons tout mettre en œuvre pour préserver cette position. Cela doit venir de la capacité des acteurs de la Place à travailler ensemble, avec les différences instances comme l’ABBL, le PBGL, le régulateur, les consultants, etc. Nous sommes convaincus que nous pouvons faire de ce pays une petite place ayant un gros impact au niveau mondial, en surfant sur cette vague à l’unisson. »
Prévisions
50 PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024
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Luxembourg Finance 2035
Pour rester une place financière internationale, Luxembourg applique un processus de transformation continue. À l’horizon 2035, le paysage financier luxembourgeois aura fortement évolué, sous l’effet de l’ innovation technologique, de l’évolution des attentes des clients et influencé par les nouvelles tendances mondiales. À quoi ressemblera notre place financière dans une dizaine d’années ? Dix experts exprimeront un avis sur l’avenir des métiers de la finance au Luxembourg.
Luxembourg is undergoing a process of continuous transformation as an international financial centre. By 2035, Luxembourg’s economic landscape will have evolved considerably, driven by technological innovation, evolving customer expectations and shifting global trends. What will our financial marketplace look like in a decade’s time? Ten experts offer their views on the future of finance in Luxembourg.
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Perspectives
Une croissance soutenue et des convictions fortes
Présent depuis 12 ans au Luxembourg, Generali enregistre une croissance continue et renforce ses engagements en faveur d’une société plus durable et inclusive, comme nous l’explique Paul Lecoublet, son directeur général.
Quel regard portez-vous sur le développement de l’assurance-vie luxembourgeoise à l’échelle du marché européen, aujourd’hui ?
PAUL LECOUBLET L’assurance-vie de droit luxembourgeois est devenue, au fil du temps, un outil privilégié de planification patrimoniale pour les HNWI. Cette solution d’investissement est toujours autant plébiscitée par les acteurs de la gestion de fortune, notamment en France et en Italie où nos solutions proposées par nos partenaires bancaires, family offices et CGP rencontrent un grand succès.
Chez Generali Luxembourg, nous nous distinguons en offrant à nos clients un fonds euros à capital garanti et des unités de compte innovantes disponibles sur notre plateforme digitale MyWings. De plus, nous offrons un service client haut de gamme avec des solutions
TEMPS
FORTS DE GENERALI DEPUIS 2011
d’ingénierie patrimoniale pour accompagner les clients dans leur mobilité.
À l’avenir, notre volonté est de continuer à grandir pour servir les clients des marchés de Generali en Europe.
Quels sont les principaux défis auxquels vous êtes confrontés ?
La pression règlementaire actuelle nous demande de rester vigilants. Pour ne citer que quelques textes, le règlement sur la protection des données (GDPR), la règlementation DORA sur la résilience opérationnelle numérique ou l’IA Act, qui vient encadrer l’utilisation de l’intelligence artificielle, font peser de lourdes contraintes sur le développement de nos activités en termes de coûts, mais aussi de flexibilité. À ce titre, la loi sur le secret professionnel des assurances nous freine encore, même
Je suis convaincu que la diversité est un facteur-clé de performance. »
si de judicieux aménagements ont été apportés grâce à la nouvelle loi 8184. En effet nous souhaitons pouvoir recourir plus largement à des solutions cloud, nécessaires pour veiller à maintenir notre compétitivité dans un monde toujours plus digital et utiliser demain massivement l’intelligence artificielle. En matière de concurrence, nous devons constater que l’Irlande a développé, depuis quelques années, un modèle
2011
Création de Generali Luxembourg, filiale de Generali France.
2019
Nomination de Paul Lecoublet en tant que directeur général.
2020
Création de la plateforme digitale MyWings pour les intermédiaires d’assurance.
2021
Generali Luxembourg est labellisée « Entreprise Responsable » par l’INDR.
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Photo Marie Russillo (Maison Moderne)
Contenu sponsorisé par GENERALI LUXEMBOURG
« BRAND VOICE
Paul Lecoublet, directeur général de Generali Luxembourg, présente son expertise du marché.
très similaire à celui de l’assurance-vie luxembourgeoise, à la nuance près que ce pays n’applique pas de TVA sur les fonds internes dédiés (FID). Ces éléments exigent que lle marché de la libre prestation de services (LPS) et l’ensemble des compagnies d’assurance-vie au Luxembourg demeurent attentifs à ces évolutions afin de garantir la compétitivité du secteur.
Quelle a été l’évolution de Generali depuis votre nomination en 2019 ? Nous sommes passés de 35 à plus de 65 collaborateurs. À mon arrivée, notre objectif était d’étendre la présence de la société, à la fois géographiquement et opérationnellement, et de structurer la compagnie pour une croissance rentable. Aujourd’hui,
2022
Création de l’association « The Human Safety Net Luxembourg » dans le but de venir en aide aux réfugiés entrepreneurs.
2023
La compagnie devient signataire de la charte « Luxembourg Women in Finance ».
nous distribuons nos contrats en LPS sur six marchés européens, Luxembourg y compris. En 2023, malgré un contexte global difficile, nous avons collecté 874 millions d’euros, avec une part toujours plus importante de fonds en unités de compte et nos encours totaux s’élevaient à près de 6 milliards d’euros.
Aussi, dans le but d’offrir un cadre de travail plus agréable à nos collaborateurs, nous avons emménagé depuis le mois d’octobre à Howald, dans le nouveau bâtiment CUBUS, où nous occupons environ 1.000 mètres carrés. Cet emmé nagement, qui constitue une étape importante pour nous tous, vient renforcer notre ancrage luxembourgeois.
2024
Inauguration du nouveau siège social en présence du ministre des Finances, Gilles Roth.
CHIFFRES-CLÉS 2023
874
874 millions d’euros collectés, à 82 % en unités de compte (UC).
Augmentation de 7 % de la part UC collectée par rapport à 2022.
5,8
Fin 2023, les encours totaux s’élèvaient à 5,8 milliards d’euros (79 % UC).
Augmentation de 12 % de la part UC sur les encours par rapport à 2022.
6
Generali Luxembourg distribue ses contrats d’assurance-vie et de capitalisation en France, en Italie, au Luxembourg, en Espagne, en Belgique et à Monaco.
Quels sont les valeurs, les engagements qui vous tiennent à cœur, aujourd’hui ?
Notre volonté est de renforcer notre engagement RSE au niveau local.
Je suis convaincu que la diversité est un facteur-clé de performance. C’est pourquoi nous sommes aujourd’hui membres de la Task Force « Gender Finance », lancée par le gouvernement et également signataires de la charte « Women in Finance ». Ces initiatives ont pour objectif de parvenir à une plus grande parité et une meilleure inclusion dans l’ensemble du secteur des services financiers au Luxembourg. Enfin, nous avons lancé, en mai dernier, l’initiative « The Human Safety Net », avec Generali Employee Benefits et Generali Investments Luxembourg, afin d’apporter notre soutien aux réfugiés présents au Luxembourg. L’idée est de les accompagner dans leur parcours professionnel et entrepreneurial, notamment avec l’appui de l’association microlux. Notre mission est, aujourd’hui, d’aider ces créateurs d’entreprise à surmonter leurs difficultés et à réussir leurs projets, témoignant une fois encore l’engagement de nos collaborateurs en faveur de la solidarité et de l’inclusion sociale.
PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024 53
RENDEZ-VOUS SUR GENERALI.LU POUR PLUS D’INFORMATIONS
Conversation
« Considérer l’investissement sous l’angle ESG a des avantages »
Pour Olivier Carré, deputy managing partner, technology & transformation leader, et Frédéric Vonner, sustainable finance & sustainability leader au sein de PwC Luxembourg, la clientèle fortunée n’a pas attendu l’évolution de Mifid pour développer des convictions durables.
Portrait GUY WOLFF Interview SÉBASTIEN LAMBOTTE
54 PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024
Olivier
et Frédéric
Carré
Vonner
Frédéric Vonner à gauche et Olivier Carré à droite.
Conversation
Depuis quelques années, à la suite de l’adoption de plusieurs réglementations, la finance est invitée à opérer un virage « durable ». Comment cela se traduit-il au niveau de la banque privée ?
FRÉDÉRIC VONNER (F. V.) Aujourd’hui, ces aspects se traduisent au niveau d’une double obligation. Un premier paquet réglementaire, avec l’évolution de Mifid, a contraint les banquiers, y compris les banquiers privés, à s’enquérir des préférences de leurs clients en matière d’investissement durable. Cette nouvelle obligation, qui est entrée en vigueur il y a un an et demi et qui est complémentaire à la Sustainable Finance Disclosure Regulation (SFDR), a poussé les banquiers privés à réfléchir au développement d’une offre de produits ou de mandats susceptibles de répondre à ces préférences exprimées par les clients. D’autre part, ces acteurs sont aussi contraints de mener une réflexion autour de leurs propres impacts sociétaux et environnementaux. C’est ce que promeut la directive sur les reportings extra-financiers, la Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD), qui est venue plus tardivement et qui commence seulement à produire ses effets.
Dans quelle mesure ces deux réglementations jouent-elles ensemble ?
F. V. Des éléments de la réglementation CSRD vont nécessiter d’établir des rapports sur la manière dont certains produits financiers sont conçus. Par exemple, les composants ESG de certains produits financiers qui sont mis en avant par un établissement peuvent peser au niveau de l’empreinte environnementale dont l’établissement doit rendre compte, en tant que corporate, à travers la préparation d’un reporting extra-financier comme l’exige CSRD.
OLIVIER CARRÉ (O. C.) Un autre aspect, très intéressant, réside dans le fait que la CSRD ne s’applique pas uniquement aux acteurs de la finance, mais à toutes les entreprises qui, au sein de l’Union européenne, ont un chiffre d’affaires significatif. Ces reportings CSRD vont permettre de combler une des lacunes de la situation actuelle en matière de transition durable, à savoir le manque de données. Aujourd’hui, il reste difficile de construire des produits d’in-
vestissement ou de placement qui répondent aux attentes des investisseurs simplement parce qu’il est compliqué d’obtenir les données relatives aux impacts environnementaux ou sociétaux des sociétés. À l’avenir, toutes les entreprises au-delà d’une certaine taille devront rendre compte d’un ensemble d’indicateurs environnementaux, sociétaux et de bonne gouvernance (ESG).
La difficulté, aujourd’hui, c’est que l’on n’a pas fait les choses dans l’ordre… O. C. On a un peu mis la charrue avant les bœufs. On a demandé au secteur financier de considérer ces aspects ESG au niveau des choix d’investissement et dans le conseil apporté aux clients sans qu’il soit possible d’évaluer les cibles, les entreprises dans lesquelles investir, sur la base de ces critères. Il y a là un gap d’information que la CSDR doit contribuer à combler.
Cela prendra toutefois encore du temps…
O. C. Nous allons dans la bonne direction. L’obligation de reporting extra-financier entre progressivement en application. À partir de là, le banquier privé va pouvoir plus facilement répondre à cette double obligation et construire des offres ou établir des stratégies d’investissement en phase avec les attentes exprimées par ses clients en matière de durabilité, pour peu que ces derniers émettent de telles préférences.
« Pour l’instant, c’est principalement la réglementation qui impose la voie à suivre. »
Olivier Carré
Est-ce que les produits ou les stratégies d’investissement proposés par la banque ont un impact sur l’empreinte environnementale ou sociétale dont elle doit rendre compte à travers son reporting extra-financier ?
F. V. Oui, mais il y a beaucoup de nuances à apporter à ce niveau. Concrètement, la banque, en tant qu’entité, va devoir établir deux rapports complémentaires en la matière. Jusqu’à présent, nous avons essentiellement parlé du reporting extra-financier, lié à la CSRD. Celui-ci rend compte de l’empreinte ESG de l’or-
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Olivier
Carré
et Frédéric Vonner
ganisation, ce qui inclut des éléments liés à son activité et à ses clients. Par exemple, lorsqu’elle finance des projets au départ de sa clientèle, à travers son livre de crédits, elle devra effectivement faire remonter des indicateurs environnementaux au niveau de son reporting extra-financier. Les impacts liés à la gestion des portefeuilles d’investissement de ses clients, étonnamment, ne sont pas ou très peu traduits en tant que tel au niveau du reporting extra-financier CSDR. Ils devront cependant faire l’objet d’une déclaration, exigée au niveau de la SFDR. La banque, pour l’activité de gestion discrétionnaire et la gestion-conseil, doit établir une déclaration de Principal Adverse Impact (PAI) dans laquelle elle consolide les principales incidences négatives en fonction d’une liste définie par la réglementation.
C’est sur la base de ces éléments que le marché, le client ou le partenaire d’une banque va pouvoir évaluer l’approche plus ou moins vertueuse qu’elle met en œuvre…
O. C. Tout à fait. On peut se faire une bonne idée des engagements qu’elle prend en tant qu’organisation responsable, des actions qu’elle met en œuvre pour réduire son empreinte à son échelle et au travers de ce qu’elle finance directement. D’autre part, on obtient aussi une vue sur ce qu’elle fait pour le compte de ses clients, à travers les mandats qu’elle gère. À partir de là, en tant que partie prenante de cet écosystème, que l’on soit partenaire ou client de la banque, on pourra opérer des arbitrages en tenant compte de ces critères.
Maintenant qu’on a posé le cadre, comment les banques privées appréhendent-elles ces enjeux ? Ces nouvelles exigences ont-elles un impact sur le marché ? Poussent-elles les acteurs à faire évoluer leur positionnement ?
O. C. La situation est, pour le moment, un peu ambivalente. Cela est sans doute dû au fait qu’il s’agit d’un changement majeur, qui reste difficile à appréhender. Pour répondre à votre question, je pense qu’il faut considérer les trois parties prenantes principales du marché : la banque elle-même, le régulateur qui impose des règles spécifiques, souvent politiquement
motivées, et enfin le client ou l’investisseur. Lorsque l’on mène ces réflexions autour de la transformation de la finance, on a souvent tendance à oublier ce dernier, à tort. Car finalement, c’est quand même son argent, ses choix et, globalement, son attitude vis-à-vis de ces enjeux qui vont être déterminants dans l’aboutissement de ces politiques.
Comment ces évolutions, cependant, invitent-elles les banques privées à bouger ?
O. C. Pour l’instant, c’est principalement la réglementation qui impose la voie à suivre. La Commission européenne s’est fortement engagée pour que l’Union européenne soit alignée sur le protocole de Paris et a fait de la finance, et plus largement de la responsabilité des entreprises, un instrument-clé d’activation de cette transformation. Cela s’est traduit par la mise en œuvre d’une réglementation essentiellement contraignante, pénalisante, pour l’ensemble des acteurs concernés.
À travers l’évolution de Mifid, il y a tout de même une volonté de sensibiliser le client final, non ?
O. C. C’est vrai. Mais cela part d’une démarche contrainte, en invitant le client à se prononcer par rapport à des éléments précis, prescrits au niveau de la réglementation. Les questions posées font référence à des éléments techniques, envers lesquels le client ne dispose pas du niveau de connaissances adéquat. Et quand bien même, au-delà du questionnaire, les banquiers se retrouvent rapidement coincés. En raison du manque de données disponibles sur le marché, il est difficile, voire impossible, de trouver des produits alignés sur les préférences du client. Le banquier est contraint d’expliquer à son client que, au regard de nombreux critères, à commencer par l’alignement sur la taxonomie verte, il n’a pas de produits qui y correspondent.
En résumé, l’offre ne suit pas la demande…
O. C. C’est tout à fait cela. Cela va sans doute s’améliorer dans les années à venir, au fur et à mesure que les données permettront de créer de nouveaux produits. Mais en attendant, la situation est compliquée,
Selon l’étude Future-Ready Investment Firm de ThoughtLab, 43 % des répondants appartenant à la Gen Z/Y prévoient pour les trois prochaines années que les critères ESG deviendront aussi essentiels que les critères financiers lorsqu’ils prendront des décisions d’investissement, contre 61 % pour les boomers et la génération silencieuse.
43 % PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024 57
notamment pour les banquiers privés, dont la priorité est avant tout de veiller à satisfaire les exigences de leurs clients.
F. V.
D’autre part, il faut dire aussi que les banquiers privés ne sont pas incités à créer des produits ou en tout cas à intégrer des dimensions ESG dans leurs produits. Cela fait maintenant un an et demi, voire deux ans, qu’ils se sont attelés à revoir chacun de leurs clients pour les interroger quant à leurs préférences en matière de durabilité, mettre à jour le profil des investisseurs. Ils ne vont pas tout recommencer maintenant, sous prétexte que de nouvelles données ou informations sont disponibles.
Qu’est-ce que cela signifie ?
Les préférences sont désormais connues. Ne pourraient-ils pas développer les produits qui y répondent ?
F. V. Dans la perspective de création de nouveaux produits, autour d’une dynamique ESG, la démarche impliquerait de retourner voir les clients, de les consulter de nouveau sur leurs préférences au regard de la nouvelle offre. C’est une démarche très laborieuse. Aussi, on constate un tiraillement au niveau des acteurs, qui ne les pousse pas forcément à avancer rapidement dans cette voie.
O. C. D’autre part, nous n’avons pas encore abordé un point essentiel, qui est celui de l’attitude du client. Ce que l’on entend dire chez nos clients banquiers, c’est que l’appétit des clients par rapport à des choix d’investissement durable, si l’on parle de la grande masse, pas de la frange de la clientèle particulièrement sensible à ces enjeux, reste limité.
Comment expliquer cela ?
O. C. On peut évoquer plusieurs raisons. La première est que l’offre n’est pas forcément à la hauteur des attentes du client. Le fait que le banquier soit limité à ce niveau se ressent rapidement lorsque l’on aborde le sujet. D’autre part, les concepts évoqués sont complexes. La taxonomie, l’investissement durable, les impacts négatifs, la classification des produits : tout cela est même atrocement complexe. Il y a de quoi
« Beaucoup de clients ont leur propre conception de la durabilité. »
Frédéric Vonner
perdre certains clients qui, tout simplement, ne comprennent pas ce qu’on leur demande. Enfin, il y a l’attitude proprement dite du client. Certains ne souhaitent tout simplement pas émettre de choix particuliers en matière d’investissement autour de ces sujets. D’autres continuent à cibler avant tout la performance financière. Or, le rendement de ces produits durables, en raison des choix limités et des limitations déontologiques qui sont imposées, n’est pas nécessairement au même niveau de performance que les autres produits, qui ne sont pas limités par rapport à toutes ces contraintes. Cela s’est notamment vu l’année dernière. Les marchés n’étaient pas favorables, sauf sur un segment : le pétrole.
Pourtant, dans le discours des banquiers privés au service des familles fortunées, n’a-t-on pas justement tendance à prôner des approches à long terme, à prendre en considération les préoccupations de la next gen autour d’approches portées par des convictions fortes ?
F. V.
Certainement. Mais ce que l’on entend aussi, lorsque l’on discute avec ces banquiers, c’est que, pour ces clients qui ont construit leur fortune sur le temps long, la durabilité est intrinsèque à leur patrimoine. Autrement dit, s’ils n’avaient pas inscrit leurs investissements dans une démarche de durabilité, leur patrimoine ne se serait pas accru de cette manière. Alors, oui, il y a des enjeux générationnels que les acteurs bancaires ne doivent pas négliger. Il y a aussi des questions relatives à la mesure de l’impact des investissements, pour lesquelles il est difficile d’apporter des réponses. Être capable de mesurer et d’identifier précisément l’impact que peuvent avoir 1 million d’euros investis à travers un mandat de gestion privée, par exemple, en termes de réduction des inégalités sociales ou encore des émissions de gaz à effet de serre, est très compliqué.
Ce que vous dites, c’est que ces clients n’ont pas attendu Mifid pour investir suivant une approche durable si cela répondait à leurs convictions…
58 PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024
Olivier
et Frédéric Vonner
Conversation
Carré
ÉVOLUTION DES ACTIFS SOUS GESTION DE LA BANQUE PRIVÉE AU LUXEMBOURG
De 2007 à 2022, en milliards d’euros.
F. V. Je pense que, pour une grosse majorité de ces clients, ce n’est pas Mifid ou d’autres réglementations qui vont les faire fondamentalement changer de point de vue sur la durabilité de leurs investissements. Beaucoup ont déjà leur propre conception de ce qu’est la durabilité et celle-ci ne correspond pas forcément, comme le disait Olivier, à la définition d’un investissement durable au sens de la taxonomie, par exemple.
O. C. Un des vrais points faibles de l’approche Mifid réside dans la conviction du législateur que le client n’a qu’un seul choix, qu’un seul portefeuille et, à travers lui, qu’un seul objectif d’investissement. Ce qui peut être vrai pour le petit épargnant – et cela reste encore à prouver – ne l’est pas pour un client fortuné. On se heurte, dès lors, à des contraintes réglementaires qui n’ont pas lieu de s’appliquer. Les clients des banquiers privés accepteront d’investir
durablement, mais sur une partie de leurs investissements uniquement.
On a beaucoup parlé des contraintes. Cette transition, cependant, ne pourrait-elle pas être appréhendée comme une opportunité pour les banquiers privés ?
O. C. Nous sommes convaincus que le fait de considérer l’investissement selon des dimensions autres que le rendement financier, comme l’impact social ou environnemental, présente des avantages. Pour le moment, les marchés se portent bien. Les banquiers sont plus à l’aise devant leurs clients. C’est souvent moins le cas lorsque les performances ne sont pas au rendez-vous. À l’avenir, au-delà des rendements, ils pourront évoquer d’autres thèmes, liés aux impacts sociétaux et environnementaux des investissements. Ces transformations sont aussi un vecteur d’innovation
et de différenciation. Le problème est que, aujourd’hui, les banquiers se montrent encore prudents, en raison des enjeux évoqués précédemment, mais aussi d’un manque de maîtrise de ce nouvel environnement en termes de données et de produits, donc aussi en termes de risques.
F. V. Le métier évolue et, progressivement, va intégrer ces dimensions « durables ». Cela ne se fait toutefois pas en un claquement de doigts. Accompagner ce changement et sensibiliser les clients à ces aspects présuppose que le banquier privé soit à l’aise pour s’engager sur ces sujets. On a beaucoup parlé des aspects réglementaires, des aspects de timing, des problèmes liés à la constitution de l’offre, mais il ne faut pas négliger les enjeux liés à la formation. Il est important que, par rapport à cela, le banquier privé soit suffisamment en confiance, notion fondamentale de la relation du banquier privé vis-à-vis de sa clientèle.
100 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 2022 200 300 400 500 600 0 Source Clarity on performance of Luxembourg private banks, KPMG-ABBL (2023)
271 225 262 269 289 303 307 318 351 361 363 395 466 508 599 585 PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024 59
Les atouts de la banque privée luxembourgeoise
Si Luxembourg est parvenu à se positionner comme premier hub international de la banque privée en Europe, cela ne doit rien au hasard. Mais quels sont les principaux acteurs de la Place au service d’une clientèle de plus en plus fortunée ?
« Au cœur de l’environnement bancaire européen, les banques privées luxembourgeoises jouent un rôle décisif. »
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Expertise multijuridictionnelle
Plateforme européenne
JERRY GRBIC CEO ABBL
C’est principalement au départ d’une expertise multijuridictionnelle que la banque privée luxembourgeoise est parvenue à se positionner en Europe. Il est fréquent que l’envergure du patrimoine du client fortuné que sert la banque privée dépasse aujourd’hui les frontières de son marché domestique. Il dispose souvent de biens et d’investissements situés à l’étranger, il a des intérêts économiques dans diverses régions du monde. Ses enfants peuvent aussi vivre dans un autre pays. La gestion et la planification du patrimoine, dès lors, revêtent une réelle complexité au niveau légal comme fiscal. Selon la situation de chaque client, il faut pouvoir évaluer les enjeux et proposer les solutions adaptées. La banque privée luxembourgeoise, ouverte à l’international, a développé toute l’expertise requise pour répondre à ces besoins.
Les principaux acteurs de la gestion de fortune à l’échelle globale utilisent Luxembourg comme plateforme pour servir leur clientèle en Europe. 85 % de la clientèle de la banque privée luxembourgeoise provient de l’Union européenne. Il s’agit surtout de clients qui, au niveau de leur portefeuille ou de leur situation familiale, ont une dimension internationale, dont l’empreinte patrimoniale dépasse le cadre de leur marché domestique. « Au cœur de l’environnement bancaire européen, les banques privées luxembourgeoises jouent un rôle décisif en protégeant et en faisant fructifier le patrimoine de milliers de familles et d’entrepreneurs européens et en canalisant les flux de fonds privés disponibles pour le financement de nos économies », commentait Jerry Grbic, CEO de l’ABBL, lors de la présentation des résultats de la dernière enquête ABBL/KPMG sur l’évolution de la banque privée.
Avantages
Auteur SÉBASTIEN LAMBOTTE
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Stabilité rime avec sécurité
Dans un environnement géopolitique incertain, face à la montée des populismes un peu partout en Europe, et considérant les niveaux d’endettement des États, Luxembourg brille par sa stabilité politique, sociale et économique. C’est l’un des principaux atouts du pays aux yeux de la clientèle fortunée internationale que sert la banque privée. Celle-ci, en effet, cherche une localisation sûre à partir de laquelle positionner et gérer ses avoirs. Dans un monde en proie à de nombreux changements, Luxembourg et son triple AAA, que le pays veille à préserver autant que possible, apparaissent comme une île de tranquillité, une zone sécurisée permettant à des clients fortunés de gagner en sérénité.
4
Un écosystème bien outillé
Pour répondre aux besoins de la banque privée et de ses clients, Luxembourg a développé un écosystème particulièrement bien outillé. Au-delà de l’expertise en gestion de fortune adossée à une réelle maîtrise des enjeux multijuridictionnels, le pays dispose aussi d’une vaste gamme de produits dans le domaine des fonds et offre de nombreuses possibilités de structuration qui intéressent particulièrement la clientèle cible.
À cela s’ajoute un ensemble de services, autour de la philanthropie, ou dans le domaine de l’assurance-vie au service de la planification patrimoniale, qui viennent répondre à de nouvelles attentes exprimées par la clientèle fortunée.
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Une capacité à se renouveler
L’un des atouts de la banque privée luxembourgeoise réside dans sa capacité à se renouveler et à fédérer ses acteurs pour mieux relever les défis à venir. Si Luxembourg est actuellement bien positionné, la concurrence a tendance à se renforcer. Pour préserver son attractivité, c’est l’ensemble du métier qui s’organise, notamment au niveau du Cluster Private Banking de l’ABBL et des groupes de travail qu’il met en place, ou encore en organisant des démarches de promotion commune de la place financière. La banque privée luxembourgeoise, au fil de son histoire, a démontré sa résilience, faisant preuve d’une capacité unique à s’adapter et à se renforcer. C’est une dynamique qu’il faut continuer à entretenir.
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Multilinguisme et diversité
Enfin, il ne faut pas négliger la diversité culturelle et le multilinguisme qui caractérise le pays. La banque privée au service d’une clientèle internationale implique de disposer de talents capables de comprendre la culture de chaque client, de pouvoir s’exprimer dans sa langue. Il est important, pour les grands groupes internationaux, de s’assurer de pouvoir trouver et d’attirer les bonnes compétences. Cet environnement cosmopolite et la qualité de vie dont on profite au Luxembourg y contribuent grandement. L’attraction des talents, plus que des clients, constitue toutefois l’un des défis majeurs du secteur. Cette diversité, en outre, est source de richesse, d’idées, d’innovations. C’est au départ des talents que l’on peut imaginer la banque privée de demain, se réinventer.
2022, UNE ANNÉE RENTABLE
En novembre dernier, sur base des données de l’exercice 2022, KPMG Luxembourg et le Cluster Private Banking de l’Association des banques et banquiers du Luxembourg (ABBL) ont à nouveau uni leurs forces pour produire une nouvelle édition du KPMG-ABBL Private Banking Report, qui vise à identifier les tendances significatives ainsi qu’à sensibiliser les acteurs aux enjeux qui les concernent. De la reprise postpandémique à la nouvelle dynamique du commerce mondial, sur fond de craintes d’escalade de la guerre, l’enquête a permis d’examiner en profondeur l’état actuel, les stratégies et les performances du secteur de la banque privée au Luxembourg.
LES RÉSULTATS DE L’ENQUÊTE
On y découvre que, si la hausse des taux d’intérêt a eu un impact positif significatif sur la rentabilité des banques, elle a également pesé sur la valeur totale des actifs, quelle que soit la répartition entre actions, obligations et immobilier. La croissance annuelle des actifs sous gestion, qui prévalait depuis 2008, a été interrompue. Entre 2008 et 2021, le volume total d’actifs sous gestion a presque triplé, passant de 225 milliards d’euros en 2008 à 599 milliards d’euros d’ici à 2021. En 2022, les actifs sous gestion ont diminué d’un peu moins de 14 milliards d’euros pour atteindre 585 milliards d’euros, en raison de la contre-performance des marchés. Cela dit, malgré une diminution de 2,3 % du total des actifs sous gestion, l’attractivité du Luxembourg a été démontrée avec un apport total d’argent frais net de 31,7 milliards d’euros, contre 45 milliards d’euros pour les banques privées suisses. 2022 s’est en outre avérée être une année rentable pour le secteur de la banque privée luxembourgeoise, avec un revenu net en hausse de 24 %, principalement en raison de l’augmentation de la marge d’intérêt nette.
PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024 61
« Les mesures visent l’intérêt du client »
La senior associate, Investment funds, chez Clifford Chance Luxembourg, Anne-Lise Vandevoir, revient sur les conséquences des nouvelles réglementations apparues ces dernières années dans le secteur des banques privées.
Quel est l’impact des réglementations qui ont vu le jour ces dernières années sur le private banking et en général sur la Place au Luxembourg ?
La mise en œuvre des nouvelles réglementations représente un coût et une charge considérables en termes d’effectifs. Il en découle une plus grande conformité réglementaire. La majorité de ces règles ont été promulguées au niveau européen, garantissant une harmonisation à travers l’Union européenne et une application similaire dans tous les pays membres. Le Luxembourg n’a donc pas été plus impacté qu’un autre pays. Au contraire, sa position en tant que hub européen pour les banques privées et les fonds d’investissement lui a permis de tirer profit de cette nouvelle donne. L’objectif étant de simplifier le secteur et de mettre en place des mesures de protection renforcées pour les investisseurs. Malgré des conditions de marché économiques difficiles ces dernières années, l’année a été globalement profitable pour le secteur luxembourgeois du private banking, avec un résultat net en hausse de 24 % (selon un récent rapport publié par l’industrie).
Ces réglementations ont-elles freiné les investissements venant hors de la zone euro et ont-elles favorisé une fuite vers les marchés étrangers ?
Non. Les fonds d’investissement domiciliés au Luxembourg jouissent d’une accessibilité mondiale, tant en Europe qu’à l’international. Une multitude de produits luxembourgeois sont investis à l’étranger, notamment les OPCVM (ou « Ucits »), qui sont distribués en Amérique du Sud ou en Asie. Les clients internationaux apprécient les mesures de protection, la stabilité économique et politique du Luxembourg, qui bénéficie d’une notation triple A par S&P. Concernant l’ouverture aux marchés étrangers, la nouvelle réglementation européenne ne restreint pas explicitement l’accès aux pays tiers, bien qu’elle manifeste une préférence pour le marché européen. Des directives telles que Mifid ou l’AIFMD vont être accompagnées d’un passeport européen, permettant la libre prestation de services au sein de l’Espace économique européen.
Interview CHRISTOPHE NADIN
Conversation Anne-Lise Vandevoir
Photo Clifford Chance
Les banques privées et les gestionnaires d’actifs externes doivent-ils réfléchir à de nouvelles solutions d’investissement ?
Il est impératif de maintenir une compétitivité accrue face à l’évolution constante du marché. Les banques privées doivent s’assurer que les produits proposés restent innovants. Cela représente un défi, mais également une opportunité considérable, notamment dans le domaine de la digitalisation. Au niveau des produits, nous notons une tendance vers une démocratisation de l’accès à certaines solutions financières, en particulier avec les Eltif (ou fonds européens d’investissement à long terme). Le Luxembourg se positionne en leader en tant que pays de domiciliation pour ces fonds.
À quoi faut-il faire attention en particulier quand on vend des produits ? Le gestionnaire doit-il davantage se demander quel produit il peut vendre plutôt que celui qui est le mieux ?
La réglementation en vigueur exige une connaissance approfondie et une catégorisation précise du client, afin de saisir son profil d’investissement et le niveau de risque qu’il est prêt à assumer. Cela correspond aux exigences des règles de suitability établies par Mifid II. Une évolution législative notable à surveiller dans les années à venir est la Retail investment strategy (Ris), lancée par la Commission européenne. La Ris a pour objectif de stimuler l’engagement des investisseurs particuliers, en mettant notamment à jour un certain nombre de lois et de réglementations existantes afin d’y intégrer davantage de mesures de protection. Par exemple, cela inclut l’amélioration de la transparence au niveau des coûts supportés par les investisseurs dans les fonds d’investissement, ainsi que des mesures de gestion des conflits d’intérêts.
Le rôle du gestionnaire de fortune n’est-il pas devenu celui d’un détective privé, avec une étude approfondie du profil du client ?
Le volet administratif induit par cette nouvelle réglementation peut s’avérer complexe et parfois difficile à expliquer à une clientèle fortunée. Il convient de l’appréhender comme une collaboration étroite
entre le banquier privé et son client. Une connaissance approfondie des besoins du client par le banquier privé lui permettra de répondre efficacement à ses attentes et de lui proposer un portefeuille sur mesure. Toutes les mesures instaurées visent ultimement l’intérêt du client.
Avec le recul, quelles sont les réglementations qui ont posé le plus de problèmes en termes d’implémentation ?
Le secteur financier luxembourgeois, reconnu pour sa maturité, est habitué à intégrer et à appliquer de nouvelles réglementations. En général, l’adaptation se déroule sans encombre, bien que certains cadres réglementaires, tels que les critères ESG (environnementaux, sociaux et de gouvernance), présentent des défis particuliers. À l’échelle européenne, l’application de la Sustainable Finance Disclosure Regulation (SFDR) a posé des difficultés pratiques quant à son intégration effective dans le secteur.
« Une évolution législative à surveiller est la Retail investment strategy. »
Au cœur de l’activité conseil, il y a le besoin de s’assurer de l’adéquation du profil de risque du client au niveau de risque de son portefeuille et des conseils y afférents. A-t-on évolué vers des méthodes modernes de contrôle ?
Il s’agit plutôt d’une problématique opérationnelle. D’un point de vue légal, le banquier privé est tenu de segmenter et d’évaluer sa clientèle de façon continue. À titre d’exemple, un banquier privé doit catégoriser son client selon des critères de connaissances financières, profil de risque, horizon d’investissement, critères de durabilité, etc. Ces critères de segmentation sont particulièrement détaillés. L’intelligence artificielle apporte une aide précieuse aux banques privées pour synthétiser ces informations. Sur le volet AML (lutte contre le blanchiment d’argent), l’Association des banques et banquiers Luxembourg développe une initiative autour de la digitalisation du processus AML/KYC.
LE FACTEUR HUMAIN DEMEURE CRUCIAL
« L’impact de l’intelligence artificielle (IA) est indéniable dans tous les secteurs, y compris la banque privée. Cependant, elle ne saurait remplacer l’expertise et le rôle essentiel d’un banquier privé. Le facteur humain demeure crucial, car un client sophistiqué privilégie le dialogue et l’échange personnel. Néanmoins, l’IA peut grandement faciliter le traitement des requêtes et des données, ainsi que l’application des aspects réglementaires, représentant ainsi un gain significatif en termes de temps et de coûts. »
PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024 63
Conversation
« Des enjeux de succession de plus en plus complexes »
La transmission du patrimoine est une préoccupation majeure pour la plupart des familles fortunées. Celle-ci implique de prendre en considération de nombreux éléments si l’on souhaite préserver ou accroître le patrimoine, garantir la pérennité d’une entreprise familiale et éviter des déconvenues fiscales.
Claude Medernach, legal counsel Grands Clients, et Anne-Lise Grandjean, tax & estate planner, de la Banque de Luxembourg, évoquent ces enjeux avec nous.
Portrait GUY WOLFF Interview SÉBASTIEN LAMBOTTE
64 PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024
Claude Medernach et Anne-Lise
Grandjean
Anne-Lise Grandjean et Claude Medernach, de la Banque de Luxembourg, préconisent d’effectuer un bilan du patrimoine à l’échelle mondiale.
Conversation
La transmission du patrimoine entre la génération des baby-boomers et leurs descendants s’apparente au plus grand transfert de richesse de l’histoire. Cela représente-t-il un défi pour la banque privée ?
CLAUDE MEDERNACH (C.M.)
Il y a lieu de relativiser cette notion de « plus grand transfert de richesse de l’histoire ». Il est vrai que la masse d’actifs appelée à être transmise d’une génération, en l’occurrence celle des baby-boomers, à la suivante est la plus importante jamais connue. Cependant, cela s’étale dans le temps. Tout d’abord, les membres de cette génération sont nés entre 1946 et 1964. Ils ont aujourd’hui entre 60 et 80 ans. D’autre part, considérant l’amélioration du niveau de vie et l’augmentation de l’espérance de vie, nous n’assistons pas à un transfert unique et global, mais à une transmission progressive.
Les bénéficiaires de cette transmission, d’autre part, se trouvent souvent euxmêmes dans des situations confortables, et même très avantageuses. Ils sont bien installés dans leur vie, parfois à la tête d’entreprises florissantes. Ils ne sont pas dans une situation de dépendance financière vis-à-vis de leurs parents.
Ce transfert, bien que progressif, ne représente-t-il cependant pas un défi pour la banque ?
C.M. Si. Bien évidemment. Le plus important, pour nous, est de nous tenir prêts pour accompagner cette nouvelle génération, qui est plus exigeante et, sans doute, moins fidèle. Si ses représentants souhaitent toujours pouvoir s’appuyer sur les conseils et l’accompagnement d’un interlocuteur privilégié en matière de gestion patrimoniale, ils comparent davantage, nous challengent vis-à-vis de la concurrence, sont susceptibles de changer plus facilement de partenaires bancaires. Ils veulent plus de transparence. Ils souhaitent comprendre les tenants et les aboutissants de la relation, les coûts associés à un service. L’enjeu, pour nous, est de continuer à servir les parents, avec lesquels nous avons développé des relations de confiance solides, tout en préservant la NextGen dans le giron de la banque, cela en les accompagnant dès que possible vis-à-vis de ces enjeux de transmission, de planification et de gestion patrimoniale.
Vous dites que la génération qui suit celle des baby-boomers n’est pas forcément dans l’attente de l’héritage de ses parents. La génération suivante, les petits-enfants, émettent-ils pour leur part le désir d’en profiter ?
ANNE-LISE GRANDJEAN (A.-L.G.) Jusqu’à présent, nous n’avons été que peu confrontés à ce genre de situation. Au Luxembourg, les successions qui s’opèrent en ligne directe suite au décès d’un aïeul s’opèrent en principe en exonération fiscale. Une donation du vivant au bénéfice de ses enfants comme de ses petits-enfants implique en principe de payer des droits de donation. Ce cadre fiscal, spécifique au Luxembourg, peut entraîner certaines frustrations ou un sentiment d’injustice.
Comment cela ?
C.M. Prenons l’exemple d’un enfant qui a repris les rênes de l’entreprise de son père. En raison de l’allongement de la durée de vie, l’enfant est susceptible d’œuvrer longtemps à la tête de l’entreprise sans la détenir à proprement parler, sans disposer des actions. Le parent pourrait décider de donner ses parts de l’entreprise. Mais cela impliquerait des droits de donation. Dans beaucoup de cas, cela coûte nettement moins cher, malheureusement, de patienter jusqu’au décès. De la même manière, il est regrettable que le parent soit freiné dans la possibilité de transmettre de son vivant une partie de ses parts d’entreprise, qui reviendra de toute façon à ses descendants en cas de décès.
En matière de succession, quels sont les grands enjeux auxquels sont confrontées les familles ?
C.M. Ils sont de plusieurs ordres. L’un d’eux a trait à la dilution et au partage du patrimoine. La succession, dans la plupart des cas, devra s’organiser entre plusieurs branches familiales. Cela peut s’avérer complexe, surtout lorsque la masse successorale est constituée d’avoirs patrimoniaux plus ou moins liquides et distribuables. Dès lors, il est important de pouvoir identifier les attentes de l’ensemble des personnes concernées au regard du patrimoine familial. Souvent, une branche de la famille va souhaiter obtenir son indépendance financière et davantage de flexibilité par rapport
RÉSERVE HÉRÉDITAIRE
Au-delà des aspects fiscaux, la transmission implique de prendre en considération un ensemble de règles émanant du droit civil, qui détermine par exemple l’ordre de succession, les droits du conjoint survivant, la répartition du patrimoine en fonction du régime matrimonial. C’est aussi au niveau de la législation civile qu’est fixée la réserve héréditaire, cette part du patrimoine que l’on ne peut pas soustraire aux héritiers légaux réservataires. Il n’est en l’occurrence pas possible de déshériter un de ses descendants.
66 PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024
Claude Medernach et Anne-Lise Grandjean
aux frères et sœurs. Si ce n’est pas le cas, une gestion commune de l’indivision successorale a des avantages. Elle permet d’accéder à de meilleures opportunités d’investissement en raison d’un volume plus important, d’obtenir de meilleures positions sur le marché ou de bénéficier de coûts réduits. D’autre part, on constate aussi que les situations familiales sont de plus en plus hétérogènes et complexes. Dans le cadre des familles recomposées, en fonction du conjoint qui décède en premier, une partie de la fortune peut passer dans l’autre branche de la famille. Cela peut créer un sentiment d’amertume dans le chef des héritiers du conjoint qui est décédé le premier.
Au-delà de l’évolution des situations familiales, en quoi les problématiques de transmission sont-elles plus complexes que par le passé ?
A.-L.G. Les patrimoines sont aussi plus complexes et plus internationaux que par le passé en raison de la mobilité croissante des personnes et des biens. Ils sont constitués d’actifs de diverses natures. Au-delà des portefeuilles titres, on y trouve de l’immobilier, parfois situé à l’étranger, des contrats d’assurance-vie, des investissements en private equity, mais aussi des œuvres d’art, des bijoux, des collections. Les héritiers, par ailleurs, sont souvent partis vivre à l’étranger. Les règles applicables à la transmission peuvent varier en fonction des situations. Dans une démarche de planification, il est dès lors important de prendre en considération l’ensemble des éléments d’extranéité, afin de pouvoir trouver des solutions adaptées aux objectifs poursuivis, et de pouvoir suivre l’évolution de la famille et du patrimoine dans le temps.
Comment, dans cette perspective, accompagnez-vous vos clients ?
A.-L.G. La première étape est de faire un bilan du patrimoine à l’échelle mondiale, de l’évaluer et de considérer son empreinte géographique. Il faut tenir compte de la situation familiale autant que des besoins et souhaits du client. Souvent, nos clients
« Les situations familiales sont de plus en plus hétérogènes et complexes
Claude Medernach
sont multibancarisés et n’ont pas toujours conscience de l’étendue précise de leur patrimoine. En cas de souhait, nous pouvons accompagner nos clients dans leur démarche de consolidation de leur patrimoine bancaire et extrabancaire, afin de les conseiller au mieux sur leur stratégie d’investissement ainsi que sur les solutions juridiques et fiscales à mettre en œuvre.
Comment la localisation des actifs impacte-t-elle la fiscalité sur la transmission ?
A.-L.G. Pour une famille luxembourgeoise dont le patrimoine est localisé au Luxembourg, la situation fiscale est relativement simple. En effet, le pays est connu pour ne pas appliquer de droits de succession en ligne directe. Cependant, cela concerne uniquement les biens mobiliers, peu importe leur lieu de situation et les biens immobiliers situés au Luxembourg. Cependant, si les héritiers habitent dans un État qui taxe aussi les bénéficiaires, comme la France ou l’Allemagne, des droits de succession seront dus en France ou en Allemagne. Par ailleurs, une distribution inégalitaire entre tous les enfants peut également avoir des conséquences fiscales au Luxembourg. Au-delà, il faut considérer la situation de chacun au cas par cas pour évaluer les impacts fiscaux et légaux inhérents à la succession. Pour un bien immobilier situé en France, en raison de la législation fiscale, des droits de succession vont s’appliquer sur la valeur du bien. Si le Luxembourg a conclu de nombreuses conventions visant à éviter une double imposition, celles-ci concernent uniquement la fiscalité directe. Le Luxembourg n’a signé aucune convention de double imposition en matière de droits de succession ou de donation. Il faut en avoir conscience.
Dans certains cas, la donation peut donc s’avérer plus intéressante… A.-L.G. Sur une partie du patrimoine, selon la situation, cela peut être vrai. Si l’on considère un bien immobilier en France, une donation de son vivant peut être plus intéressante qu’une transmission à la suite d’un décès. Notre rôle, dans une
. »
PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024 67
démarche de planification patrimoniale, est d’apporter cette connaissance des cadres civils et fiscaux qui s’appliquent à leur situation pour leur permettre de mieux appréhender le futur. Cette maîtrise du contexte international et transfrontalier demeure l’une des forces du Luxembourg et de nos experts internes dans le domaine de l’ingénierie patrimoniale.
Il arrive souvent qu’une entreprise représente une part conséquente du patrimoine. Comment appréhender la transmission dans ce contexte ?
C.M. En effet, beaucoup de clients que nous accompagnons ont construit leur fortune au départ d’une entreprise familiale prospère. Dans de nombreux cas, elle constitue le cœur du patrimoine. Si partager des actifs liquides entre héritiers paraît plus simple, ce n’est pas le cas d’une entreprise familiale. L’enjeu premier, souvent, est de maintenir la pérennité et la profitabilité de cette dernière. Cependant, les bénéficiaires ne sont pas forcément tous impliqués dans la gestion de celle-ci et ne développent pas forcément le même attachement à l’entreprise.
Comment, dès lors, appréhender ces enjeux ?
C.M. Il est essentiel d’anticiper et de préparer en amont la transmission d’une entreprise familiale. Plusieurs pistes peuvent être explorées. Il est par exemple possible de scinder la société d’exploitation de l’immobilier, afin de permettre que seuls les enfants actifs dans l’entreprise reçoivent des parts de la société d’exploitation. Cela peut toutefois soulever quelques problèmes juridico-fiscaux. Cette scission peut avoir des répercussions fiscales considérables, notamment en raison de la plus-value latente de l’immobilier. Si l’on souhaite exclure certains héritiers de l’exploitation, il faut s’assurer de disposer d’autres biens, hors entreprise d’exploitation, pour compenser ces enfants et éviter une violation de leur réserve légale. Enfin, pour garantir la pérennisation de l’activité, il est aussi nécessaire de trouver un compromis, entre l’immobilier et l’exploitation, relatif au bail, par exemple en recourant à la mise en place d’un bail emphytéotique.
« Les patrimoines sont plus complexes et plus internationaux que par le passé. »
Anne-Lise Grandjean
Quelles autres pistes peut-on envisager ?
A.-L.G. Une autre solution, plus structurelle, réside dans la mise en place d’une ou plusieurs sociétés de tête regroupant les sociétés opérationnelles et dans lesquelles siégeront tous les enfants, qu’ils travaillent ou non dans l’exploitation. Les enfants seront alors tous actionnaires de la société holding. Ce genre de structure peut être mis en place lorsque l’on souhaite opérer une gestion commune de l’indivision successorale. Autour de cela, on peut aussi envisager des solutions plus contractuelles, par la mise en place d’une gouvernance familiale, à travers laquelle on peut par exemple déterminer les méthodes d’évaluation de l’entreprise familiale, la politique de distribution des dividendes, ou encore un pacte d’actionnaires. L’enjeu est de fixer les règles visant à atteindre les objectifs communs fixés et à anticiper certaines problématiques, liées par exemple à la cession de parts au niveau d’une branche, et à ne pas léser l’un ou l’autre des héritiers.
Il faut aussi tenir compte des cas particuliers ?
C.M. Oui, par exemple, la succession d’une exploitation agricole fait l’objet d’un régime particulier. Nous nous sommes récemment demandé si ces règles étaient transposables à la transmission d’une parcelle forestière. Il s’avère que, vraisemblablement, ce n’est pas le cas. Dans chaque juridiction, il y a des exceptions de cette nature. Il est important, dès lors, de nous entourer des expertises fiscales et légales, en les intégrant au niveau de nos équipes ou en nous appuyant sur des partenaires présents dans certains pays, pour permettre à nos clients d’envisager cette transmission sereinement.
68 PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024 Conversation Claude Medernach et Anne-Lise Grandjean
Table
Ronde
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La réputation de notre place financière en matière d’investissements socialement responsables et d’impact est internationalement reconnue et constitue un environnement idéal pour les fonds de la finance climatique. Des experts discuteront de la stratégie de financement climatique, des moyens mis en oeuvre, des véhicules de placement et de la plate-forme LGX lancée par la Bourse de Luxembourg.
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Colbr veut démocratiser la banque privée
Colbr ambitionne de transformer l’industrie de la gestion de patrimoine en donnant accès aux mêmes moyens à tous. Rencontre avec Gustav Sondén, co-fondateur de la wealthtech française.
Comment est née Colbr ?
Mes associés, Romain Joudelat et Mickael Juvenelle, et moi-même venons de la gestion d’actifs. En tant que professionnels de la finance, mais aussi en tant que jeunes épargnants, nous rencontrions une vraie frustration sur la qualité des produits à notre disposition, mais également sur l’expérience client qui nous était proposée. Cette frustration a été le point de départ de notre aventure entrepreneuriale. Notre idée est de proposer les bons produits d’investissement sur une plateforme, construite en no code, à l’époque. Nous avons immédiatement collecté pas mal d’argent. Cette bonne réponse du public nous a permis de réussir une première levée d’un million d’euros et de poursuivre le développement de notre agrégateur d’investissement, intuitif et 100 % gratuit.
Que proposez-vous aux utilisateurs ?
Notre offre se divise en trois axes. La première, c’est une plateforme d’agrégation en , qui permet de suivre l’ensemble de votre situation patrimoniale en temps réel. Nous sommes connectés à plus de 6.000 établissements financiers en Europe, mais également à dif-
férentes bases de données. À cela s’ajoute un ensemble d’outils qui permettent de réaliser votre propre bilan patrimonial. Cette vue globale donne ensuite la possibilité de prendre les premières décisions d’investissement, et c’est le deuxième axe de notre projet. Notre première offre démarre à 1.000 euros et s’adresse à peu près à tout le monde. Nous avons développé quatre mandats, où le mode de gestion définit le profil de risque, avec des objectifs de performance compris entre 4 et 10 %, annualisés. Nous avons notamment un mandat 100 % en actions, dont l’objet est de refléter la croissance mondiale des marchés financiers. Nous savons que les ETF seront le socle de l’épargne financière des nouvelles générations. Ça l’est déjà en Allemagne, au Royaume-Uni et aux États-Unis, et c’est en train d’arriver en France. En matière d’investissement, nous proposons d’autres produits haut de gamme. Nous sommes notamment des pionniers dans le domaine du private equity, notamment grâce à des feeders qui ont émergé sur le marché, mais aussi avec des fonds de fonds et notamment des fonds communs de placement. On commence ainsi à pouvoir proposer une offre
Interview MICHAËL PEIFFER
Gustav Sondén
Photo Colbr Conversation
institutionnelle au retail, à savoir qu’au moins 90 % du passif de ses fonds sont détenus par des investisseurs institutionnels. Enfin, la dernière partie de notre offre, c’est le conseil, et c’est vraiment quelque chose qu’attendaient les épargnants. C’est ce qui nous différencie et fait notre réussite.
Quelle est la place du conseiller ?
Elle est centrale. Au-delà des utilisateurs, nous nous adressons à une nouvelle génération de conseillers qui souhaitait s’appuyer sur un outil en ligne, avec tout ce que la technologie peut offrir aujourd’hui. Nos conseillers ont accès à une seule base de données pour tous les applicatifs métiers. Ça peut paraître banal, mais ce n’est pas la norme sur le marché. Obligations de compliance, outil de souscription, suivi des clients, tout est accessible au même endroit.
Vous considérez-vous comme une fintech ou comme une néobanque ?
Notre vision est de devenir la banque privée de demain. Mais, aujourd’hui, ce serait présomptueux de parler de néobanque, dans le sens où nous ne proposons pas de services bancaires classiques comme des ouvertures de compte ou des prestations de crédit. Dans l’univers des fintech, nous nous positionnons dans le compartiment wealthtech, avec une vision patrimoniale forte. Aujourd’hui, la plupart des grandes fintech sont actives sur le segment mass market, avec des solutions qui s’adressent à un énorme marché. Pour nous, qui voulons être actifs dans l’investissement et la gestion de fortune, tout reste à faire.
Qui sont vos clients, aujourd’hui ?
Ils sont ceux que nous avions imaginés au départ. Il s’agit d’une clientèle de flux (affluent en anglais, ndlr), des gens qui ont entre 200.000 euros et 2 millions d’euros de patrimoine, mais qui ont surtout des revenus importants et la possibilité d’épargner. En français, on parle de gestion de patrimoine, mais le terme anglais de wealth planning est plus approprié. Notre client a en moyenne 38 ans et le ticket moyen est toujours légèrement au-dessus de six chiffres.
Votre volonté est de démocratiser la banque privée. Comment comptez-vous vous y prendre ?
Autrefois, les contraintes réglementaires et opérationnelles étaient d’une telle importance que ce n’était juste pas possible. Aujourd’hui, grâce à la technologie et à la rationalisation des bases de données, on peut avoir accès facilement aux bonnes informations, créer des applicatifs avec des API fonctionnelles, etc. L’investissement est un pan de notre métier qui, quelque part, est démocratisable à l’extrême. En revanche, le conseil patrimonial ou successoral et la structuration fiscale sont d’autres domaines qui ne sont pas démocratisables de la même manière, mais on peut faire beaucoup mieux, selon nous, que ce qui est proposé par les acteurs traditionnels.
Quel est votre business model ?
« Les ETF seront le socle de l’épargne financière des nouvelles générations. »
La plateforme est gratuite. Elle nous permet de faire connaissance avec nos clients, et inversement. Nous nous rémunérons dans le cadre des prestations d’investissement. C’est du courtage, et c’est la formule qu’ont plébiscitée nos clients. Maintenant, notre spécificité, par rapport au marché, c’est la transparence. Les gens veulent plus de conseil, plus de digital, mais pas forcément au prix le moins cher possible. Ils veulent surtout comprendre ce qu’ils paient.
Votre activité est aujourd’hui concentrée sur la France. Quels sont vos objectifs de développement ?
Nous sommes effectivement concentrés sur le marché français, qui est déjà énorme. Aujourd’hui, les fintech actives dans le domaine de l’investissement représentent moins de 1 % de part de marché. Il y a un véritable enjeu à capter plus de clients, et les wealthtech ont aujourd’hui le vent en poupe. Après, environ 20 % de nos clients sont des expatriés. Il s’agit de profils assez jeunes, qui ont de l’argent, qui profitent parfois de régimes fiscaux qui leur permettent d’épargner beaucoup. C’est une première manière de nous internationaliser et de nous familiariser avec d’autres marchés. Récemment, par opportunité, nous avons aussi demandé une extension d’agrément pour servir des clients en Belgique.
L’IA AU SERVICE DU CONSEIL
« L’IA prend une place grandissante dans cet univers, ajoute Gustav Sondén. Nous sommes en train de bâtir les fondations. Et pour l’IA, les fondations, c’est la data. Sans data, vous ne pouvez rien faire. Il faut bien sûr une grande quantité d’informations, mais il faut surtout structurer ces données pour en retirer le meilleur. Notre équipe technique travaille aujourd’hui sur l’intégration de l’IA à l’expérience utilisateur. Cela va permettre d’introduire une couche de conseil dès les premières décisions d’investissement. Un bon conseil demande de bien connaître le contexte. ChatGPT et d’autres solutions d’IA générative, étant donné la base de données qu’elles exploitent, sont capables d’expliquer très facilement le contexte : historique de performance, volatilité… Les premières prestations d’investissement peuvent être guidées par cette intelligence artificielle, ce qui amène un avantage pour l’utilisateur, en complément de l’intervention des conseillers qui peuvent intervenir sur les questions à plus forte valeur ajoutée. L’enjeu est de rendre le conseil le plus modulable possible, et l’IA va le permettre. »
PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024 71
Réglementation : un baromètre sous haute pression
La pression réglementaire qui pèse sur les banques privées et les gestionnaires de fortune va se maintenir à un niveau élevé en 2024. Tour d’horizon des principales réglementations à l’agenda du régulateur avec la partner, Risk consulting chez KPMG, Anne-Sophie Minaldo.
Au Luxembourg comme ailleurs en Europe, le secteur de la banque privée est soumis à un feu nourri de nouvelles réglementations et se doit d’être irréprochable sur des sujets très sensibles et variés comme la prévention de la fraude et des cyberattaques, la lutte contre le financement du terrorisme ou encore l’application des sanctions dans un contexte de guerre en Ukraine… Il se doit également de suivre les attentes du régulateur en matière de finance durable, d’assets digitaux et de protection des investisseurs dans un monde en mouvement où la technologie prend de plus en plus de place au quotidien. « Afin d’évaluer la pression réglementaire qui pèse sur les différents acteurs du secteur financier, nous éditons chaque semestre notre Regulatory Barome ter, dans le but de maintenir notre niveau de connaissances et de pouvoir accompa gner au mieux nos clients , partage la partner, Risk consulting chez KPMG, Anne-Sophie Minaldo. Différents axes sont explorés, comme l’ESG, la résilience financière et opérationnelle, la finance digi tale, l’industrie des paiements, la protec tion des investisseurs… Au total, sur les
« L’arrivée des robo-advisors, et maintenant de l’IA générative, est suivie de près par le régulateur. »
huit thèmes identifiés, la pression réglementaire est aujourd’hui évaluée à 7,3 sur 10, ce qui est tout de même assez élevé. »
Afin d’établir ce baromètre, les experts analysent, d’une part, le volume d’informations généré au départ des textes qui émanent des régulateurs, comme les directives, les règlements, ainsi que les regulatory technical standards (RTS). D’autre part, le baromètre est également calculé sur la base du nombre de visites sur site réalisées par le(s) régulateur(s) sur des sujets donnés et des amendes infligées aux différents acteurs pris en défaut de conformité.
Pression maximale sur la finance durable
Au regard de ce baromètre, plusieurs thèmes impactent plus particulièrement l’activité des gestionnaires de banque privée ou des gestionnaires de fortune indépendants au Luxembourg. « Le premier sujet qui nous occupe touche à la finance durable et aux critères ESG. La pression, évaluée à 8,4/10 au premier semestre 2024, est relativement constante depuis 2022 et provient essentiellement des instances euro », explique Anne-Sophie Minaldo. Aujourd’hui, les banquiers privés doivent
Agenda
Photo KPMG
Auteur MICHAËL PEIFFER
72 PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT
LE NIVEAU DE PRESSION DES RÉGLEMENTATIONS SUR LES ACTEURS FINANCIERS
Basé sur une échelle de 1 à 10
Fournir des services financiers durables et ESG Maintenir la résilience financière Réglementer la finance numérique Renforcer la résilience opérationnelle Paiements Renforcer la protection des consommateurs Marchés de capitaux en pleine croissance Accès aux marchés Renforcer les attentes en matière de gouvernance
tenir compte des critères ESG dans leur offre, au niveau de leur gamme de produits. Ils doivent aussi être très prudents, voire sceptiques, par rapport à ce que les grands manufacturiers leur présentent comme étant des produits ESG. « Par rapport à 2022, dans un contexte où la réglementation s’affine, on assiste à une déclassification de produits qui, voici un an ou deux, étaient présentés comme conformes à la réglementation ESG et ne le sont plus aujourd’hui. Ils sont délistés par crainte d’être attaqués pour greenwashing », précise Anne-Sophie Minaldo, la responsable du regulatory consulting et du forensic chez KPMG. Dans ce contexte, le principal challenge des acteurs de la banque privée ou de la gestion de fortune, si l’on s’en tient aux produits d’investissement, est d’arriver à effectuer une bonne sélection en amont.
Le régulateur est aussi de plus en plus attentif aux aspects de due diligence. Sur les questions liées à l’environnement, de nombreux critères ont été établis pour évaluer l’impact écologique des investissements. Mais l’Union européenne va très certainement s’intéresser d’ici peu à la
deuxième lettre d’ESG, c’est-à-dire l’impact sociétal des produits. « L’Europe a été très productive concernant l’environnement, avec des critères de décarbonation, d’émissions de CO2, de part d’énergie renouvelable. Maintenant, sur la question sociétale, il sera sans doute plus ardu de trouver un trait d’union commun entre les pays européens, relève Anne-Sophie Minaldo. Les niveaux de salaires comme le coût de la vie sont très variables, la notion d’égalité hommes-femmes diffère selon les pays et leur culture, l’accès à l’éducation n’est pas le même partout, etc. On constate toutefois une réelle volonté d’avancer sur ce point, tout comme sur la gouvernance d’ailleurs. En la matière, même si cela concerne moins les banquiers privés que les entités faîtières, les critères ESG doivent être considérés au plus haut niveau de l’organisation. Le régulateur a d’ailleurs remis un bon coup de pression sur les bonnes pratiques de gouvernance en ce début d’année 2024. Le baromètre était tombé à 5 points sur cette question fin 2023, mais il est remonté à 6,9 aujourd’hui. »
Toujours en relation avec l’offre d’investissement durable, au-delà de la bonne compréhension des produits qu’ils
proposent, les conseillers en investissement doivent aujourd’hui apprendre à mieux connaître les besoins et les attentes de leurs clients. « Le focus se porte sur le conseil en investissement, tant pour les banques que pour les PSF d’ailleurs. À partir du moment où vous proposez ces prestations de services, vous êtes une Mifid firm, relève Anne-Sophie Minaldo. Sur ce sujet, au-delà des exigences fixées autour des produits, les prestataires doivent redoubler d’efforts afin de collecter les préférences ESG de leurs clients. Le but est de s’assurer d’atteindre le meilleur alignement possible entre leur offre et les attentes de la clientèle. On voit que les régulateurs mettent à la fois un coup de pression sur ces Mifid firms, mais aussi sur les management companies, qui font de la gestion à un niveau plus collectif. »
En ce sens, l’Autorité européenne des marchés financiers (Esma) a notamment publié de nouvelles guidelines, applicables depuis octobre 2023. « Après une phase de préparation, l’Esma a annoncé qu’elle allait lancer ce que l’on appelle les common supervisory actions dès 2024. Elle demande aux autorités locales et européennes de lancer des missions d’inspection afin de voir comment
Source KPMG Regulator Barometer –H1 2024 9 8,5 H2 2022 H1 2023 H2 2023 H1 2024 8 7,5 7 6,5 6 5,5 5
5,6 6,9 6,8 7 7 7,5 8 8,4 8,5 PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024 73
Agenda
QUEL POSITIONNEMENT STRATÉGIQUE POUR LA BANQUE PRIVÉE LUXEMBOURGEOISE
L’OFFRE DE PRODUITS
Demain, comment l’offre de produits de la banque privée va-t-elle évoluer ? « Sur ce point, il faut distinguer sans doute les banques qui ont la capacité de développer des produits d’investissement en interne, et d’autres qui ont une architecture plus ouverte et s’appuient sur des prestataires externes, explique Anne-Sophie Minaldo. Mais, en règle générale, toutes sont confrontées aux mêmes enjeux, qui sont de trouver les bons produits, de répondre aux préférences de leurs clients, de s’inscrire dans une démarche RSE, de s’appuyer sur des outils digitaux pour simplifier les process dans un univers réglementaire toujours plus complexe. »
L’AVENIR DES BANQUES
Quel avenir pour les banques qui n’ont pas la taille critique pour répondre à l’ensemble de ces défis ?
« Il est effectivement important, pour certaines banques privées, de réfléchir à leur positionnement futur, poursuit la head of regulatory services de KPMG. Pour certaines grandes institutions, cela peut faire du sens de rester actives sur tous les terrains. Pour les acteurs de plus petite taille, des choix devront être faits. Soit ils investissent massivement sur les sujets où ils sont déjà très performants afin de devenir les meilleurs, soit ils souhaitent se diversifier et explorer de nouveaux horizons. Dans ce cas, il faut être prêt à assumer les coûts associés. »
LE DÉFI DU PAIEMENT INSTANTANÉ
les critères de durabilité sont intégrés dans les stratégies d’investissement, comment est mené le suitability assessment du client et de vérifier, in fine, si la gouvernance autour des produits est à la hauteur des attentes. »
Un cadre pour la finance digitale Après l’ESG, le deuxième grand axe sur lequel une pression constante est mise par les organes de surveillance depuis 2022 concerne la finance et les assets digitaux.
« Selon notre baromètre, le niveau est de 7 sur 10. Ces sujets, s’ils ne sont pas moins importants que la finance durable, sont étroitement liés à la technologie et à l’innovation, domaines qui exigent une montée en compétences dans les rangs du régulateur », précise Anne-Sophie Minaldo. Mais il faut s’attendre à une montée en gamme des compétences du régulateur en la matière, et donc de ses exigences réglementaires.
« On s’est par exemple aperçu que tout ce qui touche aux digital assets, aux tokens, à la technologie des registres distribués ou à la digital ledger transaction, autrement dit, le fait de pouvoir organiser différemment la détention ou l’échange de titres, crée une nouvelle gamme de risques qui doit être adressée de manière plus transversale. Si vous prenez par exemple la nouvelle directive européenne sur la résilience opérationnelle, elle inclut très largement l’aspect risque cyber et IT. »
Avec le règlement Mica , qui entrera en vigueur dès cette année, l’Union européenne se dote pour la première fois d’un cadre réglementaire harmonisé pour le marché des crypto-actifs. Celui-ci s’applique à la fois aux établissements traditionnels du secteur financier et aux nouveaux acteurs qui émergent au niveau de l’écosystème crypto, qui sont engagés dans l’émission, l’offre au public et l’admission à la négociation de crypto-actifs ou qui fournissent des services associés au sein de l’UE.
Sur ces sujets digitaux, le régulateur est encore en quête de solutions, conscient de l’ampleur de la tâche et du fait que la technologie s’immisce dans toutes les strates de l’économie. « D’une part, il est important de réguler de manière spécifique la finance digitale. D’autre part, il faut aussi revoir l’ensemble du cadre réglementaire. Pour vous donner un exemple, un sujet comme la résilience opérationnelle doit obligatoirement inclure le risque IT, avec des garanties à apporter quant à la sécurité de l’infrastructure, mais aussi des données et des accès », précise la head of regulatory services
Le paiement instantané fait partie des sujets stratégiques liés au développement de leur offre sur lesquels les banques luxembourgeoises doivent se positionner. « Lorsqu’on observe le marché, la plupart des banques privées luxembourgeoises sont membres de la zone Sepa, alors que le paiement n’est pas leur cœur de métier. Le paiement instantané, qui devient la norme, introduit de nouvelles exigences, ajoute l’experte. Il faut pouvoir contrôler de façon immédiate le donneur d’ordre, le receveur, le but de la transaction… Cette faculté implique de nouveaux développements en matière d’automatisation et des coûts. »
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La dématérialisation du monde de la finance oblige ses acteurs à mieux contrôler la technologie mise en œuvre, les infrastructures et les données utilisées, afin d’en garantir la sécurité. « Aujourd’hui, pour les banquiers privés et les asset managers, le développement de la finance digitale est source d’opportunités. Ces nouvelles catégories d’actifs permettent de diversifier l’offre, en complément des actifs traditionnels ou ESG. Néanmoins, nous les encourageons à se former à ces nouveaux sujets et aux risques associés, y inclus celui relatif au blanchiment d’argent. Les crypto mixers représentent notamment un risque élevé de blanchiment en raison de la non-traçabilité des transactions. La nouvelle réglementation Mica est l’une des réponses du régulateur, tout comme la révision des textes européens liés à la lutte contre le blanchiment et la création de l’AMLA », constate Anne-Sophie Minaldo.
Dans cet univers de plus en plus connecté et ouvert, les banquiers privés comme les gestionnaires de fortune doivent redéfinir leur stratégie pour profiter des atouts de la technologie, tout en veillant à garantir la sécurité et la résilience de leur modèle. « Aujourd’hui, la question est de voir comment saisir au mieux les nouvelles opportunités. Les assets digitaux permettent aux banques privées d’élargir leur offre, avec un time-to-market accéléré et une gestion à moindre coût. L’intérêt de se diversifier sur ces actifs est bien réel. Toutefois, il faut aussi être bien conscient des risques encourus et des coûts associés, que l’on parle de data protection ou de cybersécurité. Au regard de ces enjeux, à l’avenir, chaque acteur va devoir réfléchir à son positionnement sur le marché et à la plus-value qu’il peut apporter », confie Anne-Sophie Minaldo.
La protection du consommateur Le troisième grand sujet à l’agenda des banquiers privés est celui de la protection de l’investisseur. La Commission européenne a présenté l’an dernier son Retail Investors Protection Package. Son objectif
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Dans son Regulatory Barometer, qui permet d’évaluer en permanence la pression réglementaire qui pèse sur les différents acteurs du secteur financier, KPMG évalue à 8,4/10 le niveau de pression relatif à la finance durable au 1er semestre 2024.
est de donner aux investisseurs retail les moyens de prendre des décisions d’investissement en adéquation avec leurs besoins et leurs préférences, tout en veillant à ce qu’ils soient traités équitablement et, surtout, dûment protégés. « En ce début d’année 2024, la pression réglementaire sur ce sujet était évaluée à 6,8 sur 10. À ce propos, il est important de noter que cet aspect de protection du consommateur s’imbrique à tous les niveaux, que l’on parle de finance classique, durable ou digitale. Mais il est clair aussi que plus le banquier privé va mettre en place des moyens de communication ou de gestion des actifs innovants, plus ces questions de protection de la donnée et de l’investisseur vont devenir centrales », partage Anne-Sophie Minaldo. À l’avenir, l’un des défis sera de s’assurer qu’une instruction, donnée au travers d’une plateforme dématérialisée, reste sûre, fiable, sous contrôle. « L’arrivée des robo-advisors, et maintenant de l’IA générative, est suivie de près par le régulateur. Son rôle est de s’assurer que l’intérêt commercial des acteurs de recourir à de telles technologies ne se fasse pas au détriment de l’intérêt ultime de l’investisseur. »
Pour terminer ce tour des grands sujets réglementaires qui occupent les banquiers privés luxembourgeois, impossible de ne pas s’arrêter un instant sur la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. Si tous les acteurs connaissent le sujet, la pression est aujourd’hui placée sur le know your transaction (KYT). « Il faut être bien conscient aujourd’hui qu’il est de la responsabilité du banquier privé ou du wealth manager, en première ligne, de suivre les transactions de ses clients. En la matière, il est demandé à la banque d’identifier la fraude avant que l’opération ne soit approuvée par le système », partage Anne-Sophie Minaldo. Des règles de base ont été édictées. Par exemple, une transaction doit générer une alerte si elle dépasse un montant donné ou si un nouveau pays apparaît soudainement dans l’écosystème du client. « Il est aussi important de souligner que, dans cette matière, le régulateur pousse pour que les acteurs mettent en place des solutions technologiques de détection de fraude, agissant de manière préventive, en ayant notamment recours à l’IA pour imaginer des
analyses de plus en plus fines des transactions », ajoute-t-elle. Les cybercriminels ont souvent un coup d’avance et sont à l’affût de toutes les failles possibles. Ils utilisent l’intelligence artificielle pour tromper leurs victimes. En réponse, il est devenu indispensable d’utiliser les mêmes armes pour se défendre.
Toutes ces réglementations ont beaucoup d’implications au niveau des organisations, en ayant un impact sur les opérations quotidiennes jusqu’à la gouvernance de l’entreprise, en passant par sa capacité de mettre en œuvre la technologie. « Tous les sujets évoqués ont un impact fort sur la stratégie des banques et des assets managers. Pour exister demain, il faut se plonger très sérieusement dans le sujet de la finance durable. De la même manière, les acteurs vont devoir s’aventurer sur le terrain complexe des digital assets, sans quoi leurs clients iront chercher cette offre ailleurs. En Europe, d’où provient encore 80 % de la clientèle de banque privée au Luxembourg, le principal concurrent reste la Suisse. Pour une clientèle à l’empreinte internationale, l’Asie est historiquement connue pour son appétence au risque plus élevée, avec des règles de gouvernance moins exigeantes sur des produits plus risqués. Il revient donc au Luxembourg, et à l’Europe en général, à se positionner pour préserver sa compétitivité à l’échelle mondiale. » Une Europe qui veut, d’une part, accélérer les mouvements financiers, dynamiser le marché et placer l’investissement au service de l’économie réelle et qui, d’autre part, met une pression réglementaire de plus en plus forte sur les acteurs financiers, qui doivent mener leur barque entre ces deux courants contraires.
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76 PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024
Le classement des décideurs économiques les plus influents au Luxembourg
Tous les deux ans, Maison Moderne produit le « Paperjam Top 100 – le classement des décideurs économiques les plus influents au Luxembourg ». Ce classement est le fruit du travail d’un jury diversifié et indépendant, il est dévoilé en exclusivité durant une soirée de gala au cours de laquelle le jury présente sur scène les dix premiers classés.
Cette 10ème édition de la cérémonie du Paperjam Top 100 est organisée dans le cadre d’un dîner assis.
Mardi 10 décembre 2024
17:00-22:30
Rockhal Esch-Belval
General Partners
Comment la crypto transforme-t-elle la banque privée ?
La banque privée opère sa transformation numérique. En la matière, la technologie blockchain et les actifs numériques ouvrent de nouvelles perspectives, contribuant à la fois à améliorer l’efficacité opérationnelle des acteurs et à l’élargir l’univers d’investissement.
TOBIAS
SEIDL Co-founder Stokr
Le développement et l’intégration de la technologie crypto au niveau de la banque privée s’opèrent de deux manières distinctes. Tout d’abord, au niveau de la tokenisation des actifs, il y a lieu de mettre en place des solutions qui contribuent à améliorer l’expérience des utilisateurs. Ces solutions, en particulier, doivent se conformer aux cadres réglementaires et même faciliter et améliorer la gestion de ces enjeux de conformité. Cela se traduit dans le recours à des systèmes à la fois conviviaux et strictement conformes aux normes légales. Également, les banques privées doivent évoluer pour incorporer le bitcoin ainsi que des dérivés de bitcoin dans les portefeuilles d’investissement de leurs clients. La demande pour ces actifs particuliers augmentera avec la nouvelle génération de clients high net-worth individuals.
OLIVIER PORTENSEIGNE
CEO
FundsDLT
La blockchain, et plus particulièrement la technologie DLT, renforce les activités de banque privée et de banque de détail en améliorant considérablement la collaboration entre les banques et les gestionnaires de patrimoine, grâce à un partage sécurisé et transparent des données. Cela favorise une expérience bancaire et des offres de produits plus personnalisées, basées sur la connaissance des besoins et des comportements des clients. À l’avenir, la blockchain pourrait démocratiser l’accès aux actifs privés, élargissant ainsi la base de clients. En outre, la blockchain rationalise les opérations de back-office, réduisant les coûts et renforçant l’efficacité. Globalement, elle permet d’optimiser de nombreux aspects opérationnels de la banque grâce aux caractéristiques de sécurité, de transparence et d’efficacité qui lui sont inhérentes.
CEO
Tokeny
La technologie crypto est en train de révolutionner la banque privée. Les actifs numériques, tels que le Bitcoin, peuvent offrir une diversification de portefeuille. Mais surtout, la blockchain, la technologie sous-jacente, assure des transactions sécurisées, rapides et transparentes. Elle permet d’agréger progressivement un catalogue d’actifs tokenisés en tous genres sur un même réseau. Cette digitalisation permet une liquidité accrue et une accessibilité améliorée pour les investisseurs. Les clients peuvent plus directement acheter, vendre et gérer ces actifs numériques via une infrastructure interopérable. Les smart contracts permettent aussi d’automatiser les processus. Toutefois, il est important de noter que cette évolution nécessite une gestion des risques différente et une certaine compréhension de la réglementation des différents types d’actifs numériques.
Forecast
Photos Matic Zorman (archives), Romain Gamba (archives) et Guy Wolff (archives)
LUC FALEMPIN
78 PRIVATE BANKING / WEALTH MANAGEMENT MAI 2024
Propos recueillis par SÉBASTIEN LAMBOTTE
VOTRE VISION L’AVENIR NAÎT DE
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La banque d’un monde qui change
BGL BNP PARIBAS S.A.50, avenue J.F. Kennedy L-2951 Luxembourg, R.C.S. Luxembourg: B 6481Communication Marketing avril 2024
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