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Des épices et des Hommes
Texte : Corine Tellier Lithographies : Antoine Roussin
Des épices et des Hommes, PIERRE POIVRE ET JOSEPH HUBERT
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La vie est parfois une succession de rencontres heureuses. Pierre Poivre et Joseph Hubert, deux hommes passionnés de botanique et de nature vont par leur amitié et leur passion favoriser le commerce des épices dans les Mascareignes et ainsi concurrencer le monopole hollandais sur ce commerce véritable booster du développement de ces îles.
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En 1741, parti en mission évangélique en Extrême-Orient Pierre Poivre y découvre les épices et leur importance dans le commerce mondial dominé à l’époque par les Hollandais. Après de nombreuses péripéties, il regagne la France avec, dans sa malle, des plants de muscadiers et de girofliers. En 1766, il est nommé intendant de l’Isle de France (Ile Maurice). A partir de là, il impulse un véritable développement économique dans l’archipel des Mascareignes où il organise des plantations qui se développent également aux Seychelles, dans l’île Bourbon et même en Guyane française. Sur l’île Bourbon, il introduit entre autres le giroflier, le letchi, l’anis étoilé, l’avocatier du Brésil. Il souhaite ainsi briser le monopole hollandais du commerce des épices en favorisant le libre-échange qui « contribue à l’adoucissement des mœurs et à une meilleure connaissance des droits de l’humanité » Botaniste et homme des Lumières, il
condamne l’esclavage et son inhumanité. Si Pierre Poivre s’est beaucoup intéressé à la culture des épices, il a également porté son attention sur les arbres fruitiers tels que le manguier, le mangoustan, le cacaoyer… Une gloire qui demeure vivante de nos jours. En vous promenant au Jardin des Pamplemousses, souvenez-vous que c’est Pierre Poivre qui en fut l’instigateur. Citons encore le thé de la gamme du jardin de thé mauricien Bois-Chéri qui a été récemment placé sous son patronage.
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Joseph Hubert (1747-1825) : le savant créole
Originaire de Saint-Benoît, Joseph Hubert est un botaniste, autodidacte. On peut le considérer comme le premier savant réunionnais, avec ses travaux sur les épices, et plus particulièrement sur la girofle. En 1770, devenu ami avec Pierre Poivre, il favorise les cultures du café et de la muscade. Les espèces qu’il a introduites à La Réunion sont légion : le safran oriental (curcuma), le muscadier des Moluques, le cannelier de Ceylan, le ravensara de Madagascar, le letchi de Chine, le mangoustan, l’arbre à pain des Philippines, l’évi ou fruit de Cythère apporté d’Otaïti par le célèbre Commerson ou encore l’avocatier. Mais sa plus grande gloire reste la multiplication d’une espèce de giroflier. Le premier arbre s’éleva à une hauteur de « quarante pieds au moins et produisit dans une année jusqu’à cent vingt-cinq livres de clous. ».Une culture qui enrichît
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la Côte au vent durant un demi-siècle. Il est l’un des premiers à expliquer le mécanisme des cyclones tropicaux. Toutes ses connaissances ont été acquises en observant la nature, et notamment le Piton de la Fournaise, dont il assura une veille. Bory de Saint-Vincent trouvera auprès de lui, de nombreuses informations sur l’île et le Volcan. Il réalise également en 1801, l’une des premières excursions au Piton de la Fournaise en compagnie de Commerson. Il a été l’un des créateurs du quartier de Saint-Joseph en 1785 véritable projet politique et économique. L’objectif était d’insérer des Blancs pauvres, de coloniser des terres vierges et d’encourager de nouvelles cultures afin de diversifier l’économie et donc de contribuer au développement de Bourbon. Ce nouveau quartier prit le nom de « nouvelles Moluques ».