Béatrice Witwoet

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ÉCONOMIE MARITIME

L’Asie du Sud-est est riche en opportunités pour l’industrie maritime française

Entretien avec MARIE-NOËLLE TINÉ Responsable des relations extérieures du Cluster maritime français Propos recueillis par ERWAN STERENN

Marie-Noëlle TINÉ

Conseillère du commerce extérieur de la France, Secrétaire générale de Wista France (Réseau international de 2000 femmes occupant des postes à responsabilité dans le maritime, dont une centaine en France) et Capitaine de corvette dans la Réserve citoyenne de la Marine nationale. Contact : mn.tine@cluster-maritime.fr

■ Vous

avez activement participé à la mise en place, à Singapour, d’une première déclinaison du cluster maritime français à l’étranger. Pourquoi Singapour et quelles sont les ambitions de cette nouvelle antenne ? Singapour c’est le plus grand hub maritime d’Asie et l’un des ports les plus importants au niveau mondial. L’industrie maritime est l’un des piliers économiques de la CitéÉtat qui compte plus de 130 groupes de shipping internationaux et plus de 5 000 établissements maritimes. Le secteur maritime emploie plus de 170 000 personnes et contribue à hauteur de 7 % du PIB de Singapour (chiffre d’affaires de 16 milliards de dollars américains).

Avec Gilles Bonavita, directeur de Seaowl Asia (SeaOwl est membre du Cluster maritime français), exattaché de Défense près l’Ambassade de France à Singapour, nous avons eu l’idée en 2014 d’ouvrir une antenne à Singapour, née des échanges que nous avions avec une trentaine des filiales d’entreprises membres du Cluster, implantées sur place. Les dirigeants de ces filiales ont exprimé leur souhait et le besoin de créer un Comité maritime, afin de réunir, en réseau, les industriels français du secteur en s’appuyant sur la Chambre de commerce française à Singapour (FCCS) et le Cluster maritime français. Depuis sa création en 2006, le Cluster maritime est au service de ses membres et répond à leurs besoins en France métropolitaine et Outre-mer. Il est donc apparu pertinent de les suivre à l'international. Afin de s’adosser à une structure professionnelle existante bien organisée localement, le Cluster maritime s’est donc associé à la FCCS. Avec l’appui du Cluster et de la FCCS, le comité mis en place a été baptisé French Maritime Cluster Committee in Singapore (FMCCS). Gilles Bonavita, son président s’est entouré de deux vice-présidents, Nicolas Maurisset de Technip et Pierre Benoist d'Anthenay d’Eutelsat Asia. L’ambition du FMCCS est d’être un lieu de réflexion et d’échanges, de networking, de lobbying et un outil de promotion des entreprises françaises du maritime, travaillant sous forme de club d'affaires en relation avec les comités plus sectoriels de la FCCS. Outre Singapour, sa zone de couverture s’étend à

toute la zone ASEAN1 où les perspectives de business sont nombreuses et prometteuses. ■ Vous revenez de la Cité-état, quelle en est l’atmosphère sur le plan économique et quelles opportunités offre-t-elle aux entreprises françaises du secteur maritime ? Tout d’abord, après bientôt une année d’existence, je témoigne que ce comité a fait un travail remarquable pour développer ses activités : plusieurs soirées networking avec une cinquantaine de participants, des rencontres avec l’Information Fusion Center sur la sécurité maritime en Asie, ou encore avec la Maritime Port of Authority (MPA), la visite d'un navire de Bourbon, ou celle du Hub Maritime Innovation de Thales. Une présentation du projet Kaombo est également prévue. Il s’agit de deux VLCC2, transformés dans le chantier Sembawang, par TOTAL/Saipem, en FPSO3 qui seront stationnés en Angola. En outre, ce comité a encadré six étudiants de l’ESSEC Singapour qui ont réalisé pendant six mois une étude sur les entreprises françaises du maritime dans l’ASEAN. À l’occasion de la présentation finale de cette étude dans le nouveau campus de l’ESSEC Singapour, je me suis rendue sur place. J’ai pu également participer à la Maritime week et à une réception à bord du Dixmude, le BPC du groupe école Jeanne d’Arc qui était en escale. L’étude a permis d’identifier plus de 80 entreprises françaises de l’économie maritime implantées en ASEAN ou ayant développé des activités dans la zone. Au travers d’interviews

réalisées au sein des entreprises, complétées par un travail de recherches approfondi, l’étude montre que le marché d’Asie du Sud-Est est riche d’opportunités pour l’industrie maritime notamment dans les cinq secteurs suivants : la construction et les activités navales (notamment pour les navires de croisière, les yachts et les navires spécialisés) ; les services et équipements pour l’Oil & Gas ; le transport maritime ; la défense et la sécurité maritime ; les services périphériques. Il faut aussi retenir que dans le domaine maritime et portuaire, Singapour investit plusieurs millions de dollars dans des programmes de R&D pour trouver de nouvelles technologies et innovations dans le green shipping, le clean, green, sustainable and smart port. ■ En tant que Responsable des relations extérieures du Cluster maritime français et Conseiller du commerce extérieur de la France, vous travaillez à soutenir les forces vives du maritime à l’étranger. Quels moyens et quelles actions mettez-vous en œuvre pour cela ? Le Comité créé à Singapour est une des actions dont le Cluster maritime est fier car le bilan est très positif pour les entreprises membres. Récemment, lors d’un workshop sur l’ASEAN, dans le cadre du programme Océans 21 porté par le GICAN, j’ai fait profiter aux PME présentes de mon expérience de Singapour, en compagnie d’un Conseiller du commerce extérieur de la France (CCEF) spécialiste de la Malaisie. D’autres antennes du Cluster dans le monde sont envisageables, là où il y a des opportunités pour les entreprises du maritime et où elles sont implantées en nombre. Avec l’appui de Conseillers du commerce extérieur de la France, je travaille aussi à la création d’une Task Force des CCEF de l’économie maritime, qui proposerait des actions et des services aux PME pour les soutenir dans leur développement à l’international. ■ Les femmes sont-elles, selon

vous, suffisamment présentes dans l’univers de l'économie maritime ? Le baromètre publié par Odyssées Développement, membre du Cluster maritime, montre que la part des femmes dans le secteur maritime est de 21 %, contre 49 % en moyenne pour l’ensemble des secteurs. Au lieu de percevoir ce retard comme une fatalité, le groupe synergie « Égalité professionnelle » du Cluster que j’anime, a choisi d’y voir des perspectives de progrès qui montreraient le dynamisme et l’attractivité de notre secteur. Pour cela, le groupe a lancé l’Observatoire « Cap sur l’Égalité », un outil de mesure qui va durer trois ans et qui permettra de voir globalement ce qui se pratique dans une trentaine d’entreprises du maritime. À ce stade, une vingtaine d’entreprises ont déjà accepté d’être partenaires, de répondre une fois par an à un questionnaire et de participer à une demi-journée d’échanges de bonnes pratiques. J’encourage les entreprises à rejoindre cet Observatoire, et à participer à la première journée d’échanges, prévue fin septembre, sur les formations dans le secteur maritime afin de les rendre plus attractives pour les lycéennes. ■ Quel est le bilan, dix ans après sa création, de l’association Wista

Le parc Merlion et, en arrière-plan, l’hôtel Marina Bay Sands (MBS), deux symboles de Singapour. « L’industrie maritime est l’un des piliers économiques de la Cité-État qui compte plus de 130 groupes de shipping internationaux et plus de 5000 établissements maritimes » Marie-Noëlle Tiné.

France dont vous êtes la secrétaire générale ? Depuis que j’ai rejoint Wista en 2009 et du fait de l’ouverture de Wista aux métiers de toute l’économie maritime, le nombre d’adhérentes a été multiplié par cinq. Nous avons organisé la Conférence annuelle de Wista Internationale à Paris en 2012. Nous organisons des visites de sites, des cocktails networking pour faciliter les échanges entre membres, des petits-déjeuners avec des dirigeants du monde maritime. Le dernier en date était avec la représentante pour la France de la lutte anti-piraterie, Véronique Roger-Lacan qui a, depuis, adhéré à Wista. Nous avons aussi déployé le réseau Wista en région PACA, avec une antenne qui est très active. Après une conférence Wista sur le maritime en janvier 2014, de nombreux rendezvous networking ont été organisés à Marseille et à Toulon. Nos efforts se poursuivent aussi pour développer Wista à Monaco, et dans le Grand Ouest. Pour suivre toute notre actualité, j’invite vos lecteurs à découvrir le site internet de Wista France : www.wista.fr . ■

1. ASEAN : Singapour, Malaisie, Indonésie, Thaïlande, Vietnam, Philippines, Myanmar, Laos, Cambodge et Brunei. 2. Very large crude carrier (Très grand pétrolier transporteur de brut) 3. Floating production storage and offloading (Unité flottante de production, de stockage et de déchargement).

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MARINE&OCÉANS N° 247 - AVRIL-MAI-JUIN 2015

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