3RVE_2010_mars:3RVE
08/03/10
23:23
Page 1
HIVER 2010, Printemps/été 2007,vol. vol.53no no31
ENTREVUE avec
Line
Beauchamp Convention de la poste-publications no 41122591
ministre du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs Sur le projet de politique de gestion des matières résiduelles :
Un projet ambitieux, mais réalisable ! Enjeux transitionnels à considérer Les mêmes obligations partout au Québec, mais des réalités différentes ! www.maya.cc
3RVE_2010_mars:3RVE
08/03/10
23:23
Page C2
3RVE_2010_mars:3RVE
08/03/10
23:23
Page C3
3RVE_2010_mars:3RVE
08/03/10
23:23
Page 4
HIVER 2010, vol. 5 no 3
tête-à-tête
sommaire CHRONIQUES
13
UN PROJET AMBITIEUX, MAIS RÉALISABLE !
14
INFRASTRUCTURES URBAINES BIOMÉTHANISATION : PAS AUSSI SIMPLE QU’ON LE CROIT !
16
10
HORIZON 2015
ACCEPTATION SOCIALE PROJET DE POLITIQUE DE GESTION DES MATIÈRES RÉSIDUELLES : ALLIER ÉCONOMIE, ENVIRONNEMENT ET SOCIÉTÉ !
« Je crois que cette nouvelle politique nous permet de croire que c’est possible de conjuguer environnement et économie. Depuis trop longtemps, l’environnement est associé à ce qu’il est interdit de faire. Aujourd’hui, l’objectif est de mettre fin au gaspillage. Pas seulement au gaspillage de matière, mais également au gaspillage de création d’emplois et de croissance économique. Récupérer ou recycler un produit plutôt que de l’enfouir représente 10 fois plus d’emplois, c’est majeur. Le virage, c’est d’avoir choisi une vision économique pour travailler ce dossier. » — Line Beauchamp
17
COLLECTE SÉLECTIVE
19
LE TOUR DU MONDE
NOUVELLE POLITIQUE SUR LA GMR : UN RÔLE ACCRU DÉVOLU À L’INDUSTRIE
PLAN D’ACTION 2010-2015… ET L’EUROPE AUSSI
20
EN RÉGION LES MÊMES OBLIGATIONS PARTOUT AU QUÉBEC, MAIS DES RÉALITÉS DIFFÉRENTES !
22
ASSOCIATION LA PLACE DE L’INDUSTRIE DANS LA GESTION DES MATIÈRES RÉSIDUELLES AU QUÉBEC : UN COMBAT DE TOUS LES INSTANTS
23
CENTRES DE TRI LA NOUVELLE POLITIQUE DE GESTION DES MATIÈRES RÉSIDUELLES : LORSQUE L’ENFER EST PAVÉ DE BONNES INTENTIONS…
LE JURIDIQUE
24
G E STI O N H U M A I N E D E S R E S S O U R C E S
26
ASSURANCE
27
Éditeur et rédacteur en chef : André Dumouchel adumouchel@maya.cc
LE S B O N S C O NTA CTS
28
Chroniqueurs : Cédric Bourgeois Jean-Louis Chamard Dominique Dodier Nathalie Drapeau Christine Duchaine Léo Fradette Michel Marcotte Perry Niro Benoit Payette Frédéric Potvin Maryse Vermette
L’ E N V E R S D U D É C O R
30
Ce magazine est imprimé sur papier à contenu recyclé grâce à la participation financière de Tricentris.
Direction artistique : MAYA communication et marketing Designer graphique : S’AMI graphie (Syma) Photos de la page couverture et de l’entrevue : Studio Point DeVue Révision linguistique : Annie Talbot Impression : Carpe diem
Coordination des ventes : Grégory Pratte Tél. : 450 508-6959 gpratte@maya.cc Abonnement et administration : MAYA communication et marketing 457, montée Lesage Rosemère (QC) J7A 4S2 Téléphone : 450 508-1515 Télécopieur : 450 508-1514 info@maya.cc www.maya.cc
© Tous droits réservés. Droits d’auteur et droits de reproduction : toute demande de reproduction doit être acheminée à MAYA communication et
4
Le magazine des matières résiduelles au Québec 3RVE VOL. 5 NO 3 HIVER 2010
marketing aux coordonnées figurant ci-dessus. Les opinions et les idées contenues dans les articles n’engagent la responsabilité que de leurs auteurs. La publication d’annonces et de publicités ne signifie pas que le magazine 3Rve recommande ces produits et services. Convention de la poste-publications no 41122591. Retourner toute correspondance ne pouvant être livrée au Canada aux coordonnées figurant ci-dessus. Dépôt légal : 1er trimestre 2005. ISSN 1712-9117. Le magazine 3Rve est publié 3 fois l’an.
3RVE_2010_mars:3RVE
08/03/10
23:23
Page 5
3RVE_2010_mars:3RVE
08/03/10
23:23
Page 6
É D I TO R I A L
De l’importance d’une politique Enfin, elle est là ! Depuis le temps que nous l’attendions... Je parle ici de la nouvelle Politique québécoise sur la gestion des matières résiduelles ou plutôt, devrais-je dire, le projet de politique. En effet, le document que nous a présenté la ministre Beauchamp le 16 novembre dernier devait être soumis à une consultation publique de 90 jours, laquelle a pris fin en février dernier. Les associations, les regroupements de toutes sortes, les municipalités, les entreprises et même les citoyens qui le désiraient étaient invités à soumettre leurs mémoires. Tous ces gens avaient le loisir de faire part au gouvernement de leurs doléances concernant les orientations contenues dans le projet. Ils pouvaient également y aller de suggestions et commentaires autant sur les grandes lignes que sur le fond du projet de politique afin de la bonifier. Bref, c’était une façon de dire : « Si quelqu’un s’y oppose, qu’il se manifeste maintenant ou se taise à jamais ! » « Qu’il se taise à jamais » est peut-être un peu fort puisque la politique est assortie d’un plan d'action qui, lui, n'aura pour horizon qu’un délai de cinq ans, soit jusqu’en 2015. Ce qui est différent des horizons à long terme proposés par les deux politiques précédentes, soit 1989-1998 et 1998-2008. Je dois avouer que j’aime bien l’idée d’un plan quinquennal. D’une part parce que l’industrie et ses réalités changent rapidement et qu’une politique, pour être efficace, doit justement s’ajuster à ces mutations. Si tel avait été le cas avec la dernière mouture, il y a fort à parier que le tir aurait été réajusté. Au lieu de ça, après quelques années seulement de ce plan de 10 ans, nous savions d’ores et déjà qu’il n’y avait aucune chance que les objectifs soient atteints. D’autre part parce que les objectifs de courte durée permettent de garder les gens mobilisés et concentrés sur les moyens pour les atteindre. Il s’agit là d’un simple précepte psychologique de base. Si vous êtes partisan des Canadiens de Montréal, vous avez assurément entendu les joueurs et la direction affirmer : « On se concentre sur un match à la fois… » Bien sûr, les grandes dynasties des années 1960 et 1970 ne tenaient pas un tel discours. Faut-il y voir un lien avec la faiblesse des récentes éditions de l’équipe et ses difficultés à atteindre ses objectifs autrement ? Bien sûr ! Lorsqu’on éprouve de la difficulté, toutes les béquilles sont fort utiles. Or, tout comme pour la société québécoise, si c’est ce que ça prend, soit ! Peu importe la stratégie, la fin justifie toujours les moyens.
André Dumouchel
6
adumouchel@maya.cc
Cela dit, l’une des raisons pour lesquelles cette politique est grandement attendue réside dans la période de flottement que son absence a fait et fait toujours vivre aux gens de l’industrie. On ne sait toujours pas si la dernière politique prenait fin avec la tourtière du 31 décembre 2007 ou si c’était plutôt celle de décembre 2008. Peu importe, ce qui est certain, c’est que depuis et pour encore plusieurs mois, le Québec se retrouve sans direction officielle pour sa gestion des matières résiduelles. En entrevue pour notre magazine, la ministre Beauchamp nous a assuré qu’il ne s’agirait que de quelques mois tout au plus avant que le projet de politique en soit un à part entière, le temps de lire et de prendre en compte tous les mémoires. Et pourquoi ne pas faire quelques petites retouches au passage ? C’est à souhaiter ! Mais pourquoi une telle politique revêt-elle une si grande importance ? Pourquoi attendre une politique avant de bouger ? Le citoyen ordinaire n’est pas en cause puisqu’il n’est même pas au courant de tout ce
Le magazine des matières résiduelles au Québec 3RVE VOL. 5 NO 3 HIVER 2010
branle-bas de combat. L’importance que prend une telle mesure ne l’est donc que pour les acteurs de l’industrie directement touchés par son contenu, soit les municipalités, les entreprises productrices de déchets et les entreprises prestataires d’équipements ou de services. Les premiers attendent de savoir la direction qui leur sera imposée et les seconds, les moyens dont les premiers disposeront. Parce qu’en fin de compte, ce qui importe, ce sont les bidous ! Prenez par exemple le programme de traitement des matières organiques mis en place par le gouvernement. Il offre un soutien financier aux municipalités et aux entreprises privées pour l’installation d’infrastructures permettant de traiter ces matières. Toutefois, l’initiative ne permet que l’utilisation de deux procédés pour pouvoir profiter d’une subvention : la biométhanisation ou le compostage. L’effet sera donc direct sur le choix des municipalités en regard de la technologie utilisée. Croyez-vous un instant qu’une municipalité se privera d’une aide aussi substantielle pouvant représenter 66 % des coûts d’un projet d’investissement pour utiliser une autre technologie comme celle au plasma, pour ne nommer que celle-là ? Poser la question, c’est y répondre. Et si une autre technologie était mieux adaptée ou plus efficace (et peut-être même moins dispendieuse) pour une municipalité donnée ? Malheureusement, nous ne le saurons jamais, car les projets seront en ligne avec ce programme sans même qu’on ait bien évalué les autres options, réalité budgétaire oblige. Soit dit en passant, si j’étais promoteur de l’une des solutions autres que celles subventionnées, je serais en beau fusil. À ce sujet, la ministre nous révèle en entrevue les raisons qui l’ont poussée à agir ainsi. Et quoique discutable, sa réponse est tout de même très intéressante. Les sommes allouées aux quatre plus importants programmes d’aide financière de la politique ont aussi attiré mon attention. Les voici en ordre croissant : • 10 M$ pour les entreprises d’économie sociale de gestion des matières résiduelles; • 20 M$ supplémentaires au Programme d’aide financière pour les centres de tri québécois 2009-2011; • 30 M$ pour les programmes visant à améliorer la récupération des matières résiduelles recyclables générées hors du foyer, pour le développement technologique et pour l’implantation de centres de tri des résidus de CRD; • 650 M$ pour le programme d’infrastructure de biométhanisation et de compostage. Suis-je le seul à avoir sursauté en voyant ces chiffres ? Je comprends parfaitement qu’une usine de biométhanisation coûte très cher et que, sans cette aide, bien peu verraient le jour. Mais je me demande si nous en sommes collectivement rendus à cette étape, si cette somme ne serait pas plus efficace si dépensée différemment, notamment dans la mise sur pied d’un programme agressif visant à aider les ICI à prendre le train du recyclage... Bien sûr, la politique touche beaucoup d’autres sujets que les matières organiques qui semblent toutefois être la cible numéro 1. La nouvelle redevance sur l’enfouissement et la responsabilité élargie des producteurs en sont là de bien beaux exemples. D’ailleurs, je vous invite à lire les différentes chroniques de ce numéro riche en opinions diverses. Certains de nos experts de l’industrie applaudissent la nouvelle politique, d’autres y mettent des bémols. Mais une chose est certaine, qu’on soit d’accord ou non avec les orientations de la ministre, cette dernière aura eu le très grand mérite de trancher bien des sujets et de donner une direction claire pour les cinq prochaines années. Et c’est ça qu’on attend d’une politique. En ce sens, elle peut dire « mission accomplie ». ■
3RVE_2010_mars:3RVE
08/03/10
23:23
Page 7
08/03/10
tête-à-tête
3RVE_2010_mars:3RVE
23:23
Page 8
Line
Beauchamp
Entrevue réalisée par André Dumouchel
E N POSTE DEPUIS 2007, LA MINISTRE DU DÉVELOPPEMENT DURABLE, DE L’E NVIRONNEMENT ET DES PARCS A FAIT FACE À PLUSIEURS DÉFIS D’ENVERGURE DEPUIS SA NOMINATION. LES DOSSIERS DES CHANGEMENTS CLIMATIQUES ET DES ALGUES BLEUVERT ONT CERTAINEMENT OCCUPÉ UNE GRANDE PARTIE DE SON EMPLOI DU TEMPS. TOUTEFOIS, L’INDUSTRIE DE LA GESTION DES MATIÈRES RÉSIDUELLES N’A PAS ÉTÉ EN RESTE DANS SON AGENDA PUISQU’ELLE A PRÉSENTÉ UN AMBITIEUX PROJET DE POLITIQUE EN NOVEMBRE DERNIER. FORT ATTENDUE PAR LES DIFFÉRENTS ACTEURS DE L’INDUSTRIE, CETTE POLITIQUE PRÉVOIT NON SEULEMENT UN IMPORTANT CHANGEMENT DE CAP, MAIS LES MOYENS POUR Y ARRIVER. C OMMENT
LA MINISTRE B EAUCHAMP COMPTE-T-ELLE STIMULER L’INDUSTRIE ET LES MUNICIPALITÉS À DÉPLOYER UN EFFORT ADDITIONNEL DANS LA RÉDUCTION DU VOLUME DE MATIÈRES ENVOYÉ À L’ENFOUISSEMENT ? Q UELS SONT LES MOYENS FINANCIERS ET RÉGLEMENTAIRES MIS À LEUR DISPOSITION ? LE MAGAZINE 3R VE L’A RENCONTRÉE POUR VOUS.
De quel endroit êtes-vous originaire ? Je suis née et j’ai grandi dans le village de Saint-Timothée, qui est situé sur le bord du fleuve Saint-Laurent, entre Valleyfield et Beauharnois. Je suis la sixième d’une famille de sept enfants. J’ai habité à cet endroit jusqu’à l’âge de 19 ans, l’âge où j’ai déménagé à Montréal pour étudier à l’université. D’ailleurs, j’habite à Montréal depuis cette époque. Quelle était l’occupation de vos parents ? Mon père possédait un commerce au détail à Valleyfield. Il vendait des vêtements et des chaussures pour toute la famille ainsi que des articles de sport. Ma mère s’occupait des enfants et aidait également mon père au magasin. Quel est votre domaine d’études ? Tout d’abord, j’ai étudié en sciences humaines au Cégep de Valleyfield. J’étais et je suis toujours une mordue d’histoire. À cette époque, je voulais devenir professeure d’histoire ou travailler dans le domaine des communications. J’ai fait mon baccalauréat en psychologie à l’Université de Montréal. J’ai par la suite commencé une maîtrise en psychologie, que je 8
Le magazine des matières résiduelles au Québec 3RVE VOL. 5 NO 3 HIVER 2010
n’ai malheureusement pas terminée, faute de temps. Je travaillais à temps plein en même temps. Je croyais à tort pouvoir tout faire… Je n’ai par contre aucun regret et je considère que mes études en psychologie m’ont toujours aidée. Quel a été votre parcours professionnel ? J’ai tout d’abord travaillé chez Option consommateurs. C’était à l’époque de l’éclosion du mouvement Nouvel-Âge. J’avais pour tâche de mettre en place un service de recherche et d’information sur les centres de croissance personnelle appelés Info croissance. Notre approche visait essentiellement la protection du consommateur en lui fournissant des outils pour faire des choix judicieux, et ce, sans jugement sur les croyances et les valeurs des gens. Il faut dire que certains centres développaient, avec le temps, des allures sectaires. Vous avez également travaillé dans le monde de la radio… Oui, après mon passage chez Option consommateurs, j’ai occupé le poste de directrice chez CIBL FM. Il s’agissait d’un
3RVE_2010_mars:3RVE
08/03/10
23:23
Page 9
tête-à-tête gros défi, car la station est passée du statut de radio communautaire à celle de station de radio pouvant diffuser dans le Grand Montréal. Il faut dire que je connaissais bien l’ampleur de la tâche puisque j’y faisais de la radio bénévolement depuis des années en plus d’être également membre du conseil d’administration avant de devenir directrice de station. J’avais véritablement une passion pour la radio. Passion que j’ai toujours. Et par la suite ? J’ai œuvré pour une société de développement économique nommée Pro-Est. Nous travaillions en étroite collaboration avec les organismes de l’est de la Ville de Montréal afin de coordonner toutes les actions. C’est à ce moment que j’ai commencé à travailler d’un peu plus près avec des gens de la classe politique tels que des maires, des députés, etc. J’y suis demeurée durant six ans. Comment avez-vous fait le saut en politique ? C’est monsieur Charest qui m’a approchée en 1998 pour devenir candidate pour le Parti libéral. Il m’a invitée à réfléchir à sa proposition, mais ne m’a laissé que quatre jours pour prendre ma décision. J’ai été élue dès ma première mise en candidature. J’avais alors 35 ans. Aviez-vous déjà milité pour un parti politique ? Non, aucunement. Par contre, les gens qui m’ont connue plus jeune ne sont pas surpris de mon implication politique puisque j’ai toujours été une personne engagée. Cela dit, je n’avais aucun plan ou stratégie en ce sens. Comment se sont déroulés vos débuts en politique ? Notre parti n’a pas remporté l’élection de 1998; j’ai donc débuté dans l’opposition. Comme j’avais développé beaucoup de contacts avec le milieu artistique et journalistique lors de mon passage à CIBL, je suis devenue porte-parole du « cabinet fantôme » en matière de culture et de communications. Était-il normal pour vous d’obtenir le ministère de la Culture par la suite ? Non, au contraire. Il est plutôt rare que quelqu’un qui a été critique sur un sujet obtienne le ministère une fois au gouvernement. On dit souvent en riant qu’on a trop vu et critiqué les travers d’un ministère pour ensuite porter les chaussures du ministre. Mais j’ai été très chanceuse de mon côté. J’avais des idées très précises sur ce que je voulais accomplir et j’ai eu la chance de garder mon ministère durant tout notre mandat de quatre ans. À titre de ministre de l’Environnement, vous avez récemment déposé un projet de politique sur la gestion des matières résiduelles avec pour horizon 2015... En fait, les grands objectifs sont fixés pour plus longtemps, mais ils se déclinent avec des plans d’action s’échelonnant sur cinq ans.
Plusieurs éléments importants de ce projet de politique diffèrent des deux politiques précédentes. De plus, elles étaient basées sur des échéances de 10 ans chacune. Peut-on interpréter ces changements comme un constat d’échec des deux politiques précédentes ? Non, je ne crois pas. Le Québec a tout simplement évolué. Si l’on tient compte de notre point de départ, on peut comparer notre évolution à un escalier. Et avec le temps, on a franchi plusieurs paliers. Les statistiques le démontrent bien : les Québécois n’ont jamais autant recyclé. D’un autre côté, ils génèrent plus de matières résiduelles… Cependant, on oublie que, depuis 2005, il y a eu d’importants mécanismes économiques mis en place, notamment la notion de pénalité pour ceux qui vont porter des matières résiduelles dans un site d’enfouissement. Ou encore la compensation versée par le secteur privé au secteur municipal pour toutes les matières retrouvées dans le bac de recyclage. Cette notion de compensation est récente dans l’histoire du Québec, et je suis d’avis qu’il faut se laisser du temps avant de mesurer le plein impact de ces mécanismes. On commence d’ailleurs à voir leurs effets en constatant la bonne performance en matière de recyclage. L’absence de mécanismes économiques dans les deux dernières politiques représentait-elle une lacune dans ces dernières ? J’ai de la difficulté à être extrêmement sévère. Je préfère voir la situation comme une évolution par étapes. Et maintenant, nous en sommes rendus à fixer des objectifs environnementaux. Ces objectifs sont extrêmement ambitieux : on parle du bannissement de l’enfouissement des matières organiques pour 2020 et de 2013 pour le papier et le carton. Ces objectifs sont-ils trop ambitieux ? Non, pas du tout ! Ça m’a frappée, lorsque j’ai fait l’annonce du projet de politique. On m’a dit : « Enfin ! Non seulement vous fixez des objectifs ambitieux, mais ils sont accompagnés de moyens concrets pour y arriver. » Il y a d’abord les moyens financiers, car jamais le monde municipal n’aura eu autant de moyens financiers pour gérer les matières résiduelles. Le nouveau programme d’infrastructure de gestion des matières résiduelles pour des sites de compostage ou de biométhanisation en est un bon exemple. Ensuite, il y a les outils réglementaires. Je crois que cette nouvelle politique nous permet de croire que c’est possible de conjuguer environnement et économie. Depuis trop longtemps, l’environnement est associé à ce qu’il est interdit de faire. Aujourd’hui, l’objectif est de mettre fin au gaspillage. Pas seulement au gaspillage de matière, mais également au gaspillage de création d’emplois et de croissance économique. Récupérer ou recycler un produit plutôt que de l’enfouir représente 10 fois plus Le magazine des matières résiduelles au Québec 3RVE VOL. 5 NO 3 HIVER 2010
9
3RVE_2010_mars:3RVE
08/03/10
23:23
Page 10
tête-à-tête
[…] plusieurs maires de petites municipalités ne se disaient pas en mesure de faire l’analyse exhaustive de ce qu’ils devraient faire avec leurs déchets organiques. J’ai donc compris que les municipalités et leurs représentants demandaient au gouvernement du Québec une orientation claire quant aux choix technologiques.
d’emplois, c’est majeur. Le virage, c’est d’avoir choisi une vision économique pour travailler ce dossier. Avez-vous bénéficié d’un appui fort de la part du Cabinet ? Je suis très chanceuse, car le premier ministre porte beaucoup d’intérêt aux dossiers de l’environnement. En tant qu’ancien ministre fédéral de l’environnement, il place une saine pression sur moi. [Rires.] Je dirais même que M. Charest m’incite à proposer des éléments encore plus ambitieux. Pourquoi avoir prévu autant de moyens financiers pour la gestion des matières organiques ? Ce choix a été motivé à travers l’évaluation de la politique 19982008. Il est clair que c’est au niveau de la gestion des matières organiques que le Québec accuse le plus de retard. Le dernier chiffre en ma possession à ce moment était un taux de 7 % de valorisation des matières organiques. Je voulais donc un projet fort sur la gestion de ces matières. Pourquoi la biométhanisation et le compostage ont-ils été privilégiés comme procédés de traitement de ces matières ? Premièrement, plusieurs maires de petites municipalités ne se disaient pas en mesure de faire l’analyse exhaustive de ce qu’ils devraient faire avec leurs déchets organiques. J’ai donc compris que les municipalités et leurs représentants demandaient au gouvernement du Québec une orientation claire quant aux choix technologiques. Deuxièmement, je souhaitais une approche qui pouvait intégrer plusieurs dimensions : une dimension de développement économique et d’emploi, mais également la dimension des changements climatiques. À la lumière de ces deux éléments de réflexion, la filière de la biométhanisation est celle que nous avons décidé de privilégier. Elle permet de créer des emplois, mais elle nous permet également d’avoir accès à des sommes en vertu du Plan d’action sur les changements climatiques pour le programme d’infrastructures. C’est que la biométhanisation permet de récupérer le méthane et d’en faire une forme de biocarburant. Il peut être utilisé dans une flotte de véhicules; le projet de Rivière-du-Loup en est un bon exemple. La municipalité a choisi d’utiliser ce biocarburant pour remplacer carrément l’essence. De plus, à la fin du processus de biométhanisation, il nous reste un compost que l’on peut écouler sur le marché. Cette filière était donc la plus porteuse pour nous du point de vue économique et environnemental. Par contre, un certain volume est nécessaire pour rentabiliser une usine de biométhanisation, ce qui n’est pas à la portée de l’ensemble des municipalités. C’est pourquoi la filière traditionnelle du compostage a aussi été retenue pour les plus petites municipalités. La politique semble favoriser davantage un système public plutôt qu’un système privé… Le privé n’a pas été écarté. C’est simplement qu’en termes de 10
Le magazine des matières résiduelles au Québec 3RVE VOL. 5 NO 3 HIVER 2010
gestion des matières résiduelles, nous croyons qu’il s’agit d’une responsabilité municipale. Le monde municipal est notre principal partenaire pour atteindre les objectifs que l’on s’est fixés. Est-ce plus facile de travailler avec les municipalités que les entreprises ? Notre programme est ouvert au secteur privé. Par contre, on le finance à un niveau moindre. C’est en fait une demande du monde municipal qui manifestait le désir d’établir un partenariat avec le privé, et que ce soit le secteur privé qui fasse les investissements nécessaires. Le monde municipal ne voulait pas s’endetter davantage. C’est pourquoi je n’ai pas proposé un modèle unique. J’ai voulu donner le plus de souplesse possible au programme. Le secteur privé peut donc obtenir une subvention pour mettre en place un centre de biométhanisation, mais bien entendu, pour ce faire, il doit avoir un lien ou un contrat avec le secteur municipal. Avec l’introduction de la responsabilité élargie des producteurs, le secteur privé est une fois de plus interpellé. Ça veut donc dire que pour certains produits que l’on ne peut pas mettre dans un bac de recyclage – par exemple un cellulaire, un ordinateur, une lampe fluocompacte ou un réfrigérateur –, c’est le secteur privé qui doit mettre en place son propre système de collecte et qui doit assurer la récupération et le recyclage de ce qu’il vend. C’est une manière de décharger le monde municipal et le compte de taxes du citoyen. Nous voulons plutôt dire à l’entreprise : « Surveille ce que tu vends, assure-toi que c’est facilement récupérable et recyclable, car c’est maintenant ta responsabilité. » Certaines municipalités ont été beaucoup plus proactives que d’autres qui ont affiché de pauvres résultats en matière de recyclage. Que prévoit la politique pour que ce soit différent cette fois-ci ? Premièrement, je suis d’avis que les programmes mis en place sont de puissantes mesures incitatives en elles-mêmes. Deuxièmement, il va y avoir un aspect réglementaire qui amènera les municipalités à bouger. Par exemple, il y aura un règlement interdisant l’enfouissement du papier ou du carton. On est également ouverts à ce qu’il y ait des critères de pondération selon la performance des municipalités pour la redistribution de la redevance à l’enfouissement. On va aussi instaurer un système de critères afin de récompenser la performance des municipalités. C’est une demande des municipalités et on va y répondre. Quels seront les délais ? En ce qui concerne la redistribution de la redevance que touche le gouvernement du Québec pour ce que l’on envoie à l’enfouissement, l’établissement des critères devrait se faire au cours des prochains mois. Pour ce qui est de la compensation par rapport au bac de recyclage, ça fait l’objet d’une négociation de gré à gré entre le monde municipal et Éco-Entreprise Québec. J’ai annoncé que, par loi, nous allions déterminer ce qui serait reconnu comme des coûts directs pour la gestion du bac de recyclage. Nous nous sommes engagés à déposer le projet de loi dès le printemps 2010.
3RVE_2010_mars:3RVE
08/03/10
23:23
Page 11
Qui voudrait
des arbres virtuels ?
Chaque année, 140 000 tonnes de déchets électroniques finissent dans nos sites d’enfouissement FCM Recyclage est à l’avant-garde de la réglementation et des standards de l’industrie pour recevoir, séparer et recycler le matériel informatique et électronique désuet. Une fois le processus terminé, 100 % de l’appareil retourne en matière première. Ainsi, les matières toxiques, tels le mercure et le plomb, sont détournées des sites d'enfouissement. Qui peut se vanter d'en faire autant ? Consciente de la valeur stratégique de vos informations, FCM Recyclage remet un certificat attestant la destruction complète des informations.
Votre entreprise doit disposer de son matériel informatique ou électronique en fin de vie utile ? Contactez-nous pour de plus amples informations. FCM Recyclage 91, chemin Boisjoly Lavaltrie (Québec) J5T 3L7 450 586.5185 info@fcmrecyclage.com
3RVE_2010_mars:3RVE
08/03/10
23:23
Page 12
tête-à-tête
Comment avez-vous déterminé le montant de 9,50 $ pour la redevance sur l’enfouissement ? Tout d'abord, il s’agit d’une redevance imposée sur cinq ans et elle est liée à notre programme de soutien des infrastructures de biométhanisation et de compostage. Pour arriver à ce chiffre, on a d’une part évalué les besoins du monde municipal pour le programme et d’autre part vérifié les sommes disponibles dans notre plan d’action sur les changements climatiques. L’idée était de couvrir avec la redevance ce qui manque pour offrir au monde municipal un programme d’infrastructure. Croyez-vous que cette nouvelle surtaxe sera difficile à avaler pour les entreprises en ce temps de morosité économique ? En fait, la solution est simple : diminuer le volume de matière envoyé à l’enfouissement. [Rires.] Il faut que les entreprises, et certaines le font déjà, réalisent que c’est plus avantageux de trier et de récupérer sa matière que de tout jeter dans un conteneur à déchets, dont le contenu sera dirigé vers un site d’enfouissement. Le système de collecte sélective municipal est très bien développé pour le secteur résidentiel, ce qui n’est pas le cas pour les ICI. La nouvelle politique comporte-t-elle des incitatifs en ce sens ? Nous voulons favoriser l’intégration des ICI dans le plan de gestion des matières résiduelles des municipalités. Ainsi, les municipalités
qui couvriront ce secteur seront bonifiées via des incitatifs financiers afin qu’il y ait un meilleur lien de partenariat entre les municipalités et les ICI. Quelles sont les prochaines étapes du projet de politique ? Cette politique a été soumise pour consultation. Nous en sommes à recevoir des mémoires, que l'on analysera. L’adoption de la politique sera officialisée au cours des prochains mois. Elle fera l’objet d’un décret dans la Gazette officielle du Québec. Je suis très heureuse de voir l’accueil que la politique a reçu. Mais maintenant, le diable est dans les détails ! Êtes-vous fière de ce projet de politique ? Oui, vraiment. Je suis fière parce que je la crois complète et cohérente. Comment s’annonce l’avenir de cette politique ? Je suis très confiante. Trop souvent, on oublie de mentionner l’un des ingrédients principaux du succès d’une politique : la volonté des citoyens à faire leur part. Les gens sont prêts. Madame la Ministre, merci ! ■
On la cuisine pour vous! Devrait-on s’inspirer davantage de l’Europe ou des États-Unis pour la gestion de nos matières résiduelles ? Je suis plus au fait de certains modèles européens. Par exemple, je crois qu’il y a un plus grand nombre de projets de biométhanisation européens qu’américains. Du côté américain, on entend plus souvent parler des villes qui appliquent le système de la consigne. Mais ce qui saute aux yeux, c’est que ces villes n’ont pas encore de bacs de recyclage à la maison. Je crois que nous pouvons être très fiers du modèle que nous avons développé. Dans votre vie, quelle est votre plus grande réussite ? Mes amours et mes amitiés. Pourriez-vous délaisser complètement la politique ? Il faut toujours faire les choses en accord avec ses valeurs profondes. On doit se donner cette liberté. Quel type de véhicule conduisez-vous ? Je sais que mon véhicule de fonction en est un de type hybride. Mais je ne saurais dire la marque ou le modèle. Un grand nombre de postes-clés dans l’industrie est occupé par des femmes, notamment chez RecycQuébec, Éco-entreprise Québec, Réseau environnement de même qu’au 3R MCDQ et au CPEQ. S’agit-il que d’une coïncidence ? Je n’y avais jamais pensé. Ça veut simplement dire qu’aujourd’hui, les femmes peuvent être partout, et c’est tant mieux ! Avez-vous eu un mentor ? En ce moment, c’est assurément Jean Charest. Il est doté d’une telle capacité de résilience, et ce, autant du point de vue professionnel que personnel. 12
Le magazine des matières résiduelles au Québec 3RVE VOL. 5 NO 3 HIVER 2010
L’industrie des matières résiduelles a-t-elle beaucoup souffert de la crise économique ? Oui, les centres de tri en sont un exemple éloquent en raison de la chute des prix de la revente des matières. Les impacts ont été directs. Quel est votre film favori ? Encore à ce jour, Rabbi Jacob me fait rire aux éclats. Il y a aussi Mon oncle Antoine de Claude Jutras, ne seraitce que pour les images de l’hiver québécois. Pour moi, c’est l’artefact du cinéma québécois. Qui est votre artiste favori, toutes catégories confondues ? Denise Filliatrault. C’est une femme pour qui j’ai une admiration sans bornes. En plus d’être une grande meneuse d’hommes et de femmes, elle est un modèle d’aînée active absolument extraordinaire. J’ai aussi énormément d’admiration pour Patrick Huard. Je ne serais pas étonnée qu’il réussisse une carrière
internationale. Certains lui ont reproché de tout faire, mais à mon avis, lorsque tu as autant de talents, il faut que tu les exploites. Pour quel ministre de votre équipe avez-vous le plus grand respect ? J’ai une affection certaine pour Claude Béchard, surtout à la suite de ce que l’on a appris dernièrement [son combat contre le cancer]. Claude est un gars drôle, extrêmement attachant, un collègue de travail tellement agréable ! Quel politicien de l’histoire vous a le plus impressionnée ? Robert Bourassa. À mon avis, il a été un premier ministre à l’image des Québécois, très respectueux des valeurs humaines. J’ai beaucoup d’admiration pour ce qu’il a fait pour le Québec. La vision qu’il a eue avec le projet hydroélectrique de la Baie-James est le meilleur exemple. Ne pas être issu du milieu pour lequel on est ministre représente-t-il un handicap ? Non, je ne crois pas. De toute façon, il serait impossible que chaque ministre ait une feuille de route en ce sens. Je pense qu’un bon ministre doit s’entourer d’une bonne équipe pour l’aider au niveau des connaissances. Il doit bien communiquer ses visées et être un bon motivateur pour amener son équipe à les réaliser. En somme, être un bon ministre est davantage une question de jugement que de connaissances. Si vous deviez vivre ailleurs qu’au Québec, où serait-ce ? Je ne me vois pas vivre ailleurs qu’au Québec. [Rires.] Quel est le plus bel endroit que vous ayez visité ? Le fjord du Saguenay. Pour moi, c’est un des plus beaux endroits au monde.
3RVE_2010_mars:3RVE
08/03/10
23:23
Page 13
HORIZON 2015
UN PROJET AMBITIEUX, MAIS RÉALISABLE !
Léo Fradette M. A. conseiller, gestion des matières résiduelles, Écoservice leo.fradette@ecoservice.ca
Le nouveau projet de politique de gestion des matières résiduelles déposé en novembre dernier par Mme Line Beauchamp, ministre du Développement durable, de l’Environnement et des Parcs (MDDEP), a du panache ! Le plan d’action proposé est ambitieux et la ministre mérite notre appui pour favoriser l’adoption de cette politique. Les attentes sont élevées car, disons-le, la Politique 19982008 ne se donnait pas les moyens de ses petites ambitions. Contrairement à cette ancienne politique, le nouveau projet de loi vise, pour une rare occasion dans l’histoire du ministère, les enjeux liés à la surconsommation et à la surproduction de déchets. En prenant position sur des sujets difficiles, le g o u v e r n e m e n t a n n o n c e n é a n m o i n s u n ch a n g e m e n t d’orientation. C’est une bonne nouvelle !
En prenant position sur des sujets difficiles, le gouvernement annonce néanmoins un changement d’orientation. C’est une bonne nouvelle ! Statistiques à l’appui, il est devenu évident au cours des dernières années que les Québécois accumulent de grandes quantités de déchets, et ce, malgré l’augmentation des taux de récupération. Dans les faits, nous participons volontiers aux différents programmes de récupération, mais résistons aux changements lorsqu’il est question de modifier nos habitudes de consommation, et plus encore s’il est question de sous. Nous sommes favorables à l’idée de protéger l’environnement, mais à la condition que les activités qui la sous-tendent se déroulent ailleurs que chez soi. Dans les circonstances, comment réaliser un projet de société où les comportements et les habitudes de consommation n’ont pas été, ou si peu, remises en question ? Comment valoriser des déchets de table si les équipements pour les traiter sont inexistants ou sous-exploités ? En s’attaquant de front au modèle de l’enfouissement des déchets (simple et peu dispendieux) et, par extension, à la production et à la consommation excessives, le gouvernement indique clairement les choix souhaités, soit des modes de gestion ayant peu d’impact sur le climat et pouvant produire de l’énergie renouvelable. Pour y parvenir, il met de l’avant des mesures incitatives comme l’ajout d’une redevance supplémentaire de 9,50 $ la tonne sur les tarifs d’élimination, l’interdiction d’enfouir le papier et le carton à partir de 2013 et, en fin de compte, les matières organiques d’ici la fin de la décennie. Ces orientations sont d’autant plus stratégiques que les sommes perçues en redevances supplémentaires au cours des cinq prochaines années seront utilisées pour financer la Ce texte vous fait réagir ? Pour nous faire part de vos commentaires, rendez-vous au www.maya.cc, sous l'onglet 3Rve, ou envoyez-nous un courriel à info@maya.cc
nouvelle politique et le nouveau programme d’infrastructures. Fait à souligner : le gouvernement mise sur l’implication des organismes publics dans la gestion et le financement des infrastructures de traitement de matières organiques pour en assurer la pérennité. Ce choix est sans aucun doute motivé par, entre autres, les déboires des dernières années des exploitations de sites de compostage. L’aide financière varie s e l o n l e t y p e d e t r a i t e m e n t ch o i s i ( c o m p o s t a g e o u biométhanisation) et selon le type d’organisme (public ou non). L’ajout des redevances et des compensations liées à la performance des programmes devrait par ailleurs stimuler l’annonce de nouveaux projets dans les mois à venir. Pratiquement ignorés dans la politique précédente, les grands producteurs sont invités par le gouvernement à la table de travail non plus comme spectateurs, mais comme acteurs de changement. Ceux-ci devront se responsabiliser en assumant une b onne partie des coûts associés à la valorisation, au recyclage et au réemploi de leurs produits à la fin de leur vie utile. D’abord, les producteurs d’emballage devront dorénavant assumer 100 % des coûts nets de la collecte sélective, comparativement à un peu moins de 50 % dans la politique précédente. Dans ce cas-ci, il s’agit plutôt d’une mise à niveau avec la province voisine. La mesure devrait néanmoins décourager la production de produits de courte vie ou peu recyclables tout en encourageant l’écoconception. M esure t rès at t endue égal e m e n t, ce l l e vi s an t l e s producteurs d’une pléiade de produits de consommation courante, souvent associés aux résidus domestiques dangereux, tels les produits électroniques, les piles et les lampes au mercure. À ce chapitre, le Québec vient s’adosser, avec un peu de retard, aux politiques de l’Ontario, et avec beaucoup de retard à celles de la Communauté européenne. L’exemple vient souvent d’ailleurs. Le gouvernement avait-il le choix ? La consommation de ces divers produits est en progression constante dans tous les pays de la planète. La vie utile de nombre de ces objets est souvent très courte, car les réparer s’avère souvent plus onéreux que de les remplacer. Jetés dans les bacs à déchets ou collectés avec les encombrants, ils sont devenus dangereux pour l’environnement et dispendieux à gérer. En attendant de meilleures solutions, ces produits doivent être récupérés et mis en valeur. En associant les producteurs à cette démarche, comme cela se fait ailleurs, les résultats seront sans doute meilleurs d’un point de vue environnemental, mais aussi social et économique. Les deux mesures précédentes devraient réjouir les organismes municipaux, surtout ceux qui avaient mis en place des écocentres. Les mesures devraient les aider à compenser les coûts associés à la gestion et au traitement de ces nombreux produits de consommation. Au bout du compte, les changements annoncés seront, rappelons-le, assumés par le consommateur ou le contribuable. Il n’en demeure pas moins que le projet proposé rejoint des préoccupations de la population. Le gouvernement s’ajuste et se positionne. La nouvelle politique s’articule autour d’une vision intégrée, associée aux préoccupations environnementales, sociales et économiques. Les choix de société qu’il nous propose auront pour effet à court et à moyen termes d’amener, souhaitons-le, le Québec dans la nouvelle industrie « verte ». Ramené sur un horizon de 5 ans au lieu de 10, le plan d’action est réaliste et les objectifs atteignables si les mesures proposées sont au rendez-vous. C’est un pas dans la bonne direction ! ■ Le magazine des matières résiduelles au Québec 3RVE VOL. 5 NO 3 HIVER 2010
13
3RVE_2010_mars:3RVE
08/03/10
23:23
Page 14
INFRASTRUCTURES URBAINES
B I O MÉTH A N I S ATI O N : PA S A U SS I S I M PLE
Jean-Louis Chamard M.Sc. Env. président Chamard et Associés inc. j l . c h a m a rd @ c h a m a rd e t a s s o c i e s . c o m
À l’automne 2009, la ministre du Développement durable, de l’Environnement et des Parcs annonçait une nouvelle politique québécoise de gestion des matières résiduelles et un programme d’aide financière pour l’implantation d’infrastructures de biométhanisation et de compostage. L’objectif le plus ambitieux de cette politique est de valoriser 60 % de la matière organique, toutes origines confondues. On précise que l’on souhaite interdire son enfouissement en 2020. Rappelons que la dernière politique a permis de valoriser moins de 10 % de la matière organique. En janvier dernier, les gouvernements du Québec et du Canada y allaient d’annonces publiques d’aide financière pour des projets de biométhanisation dans les régions de Montréal et de Québec, sans oublier celle de Rivière-du-Loup. Soulignons que, cette fois, le gouvernement a mis en place l’aide financière avant la politique. On a cependant cerné des moyens limités pour atteindre un objectif louable que tout le monde souhaite. Alors qu’au début des années 2000 on n’en avait que pour le compostage, aujourd’hui on s’enflamme pour la biométhanisation. C’est le danger. On mise sur une seule technologie sans laisser d’ouverture au développement de techniques de valorisation originales qui pourraient mieux convenir à certains milieux.
14
Le magazine des matières résiduelles au Québec 3RVE VOL. 5 NO 3 HIVER 2010
qu’on le croit ! Or, maintenant que ces annonces sont faites, il faut les concrétiser. C’est la tâche la plus difficile. Analysons quelquesunes des embûches auxquelles les décideurs seront confrontés pour concrétiser cet objectif. Même si les annonces de financement sont réalisées, la majorité des projets annoncés en sont encore à l’étape d’avant-projet. Une des principales difficultés est de définir quels seront les intrants : les matières organiques d’origine résidentielle, bien sûr. Mais comment inclure celles des commerces, des institutions et des industries agroalimentaires ? Qui va payer ? Qui va faire la collecte de ces matières ? Les municipalités vont-elles faire de ces secteurs une responsabilité municipale ? À Montréal, on indique que les installations sont uniquement prévues pour les matières organiques d’origine résidentielle. Et les boues municipales ? Et les boues industrielles ou agroalimentaires? Et les résidus agricoles ? Ce sont pourtant là d’excellentes sources d’intrants pour la digestion anaérobie, qui risquent d’être exclues. Toutes ces questions sont importantes pour définir les quantités et la qualité des matières organiques que l’on traitera. En effet, certaines matières organiques se dégradent plus facilement que d’autres. À la limite, certaines sont carrément inutiles. Par exemple, les feuilles mortes que l’installation pourrait recevoir durant quatre à six semaines ne sont pas reconnues pour générer beaucoup de biogaz. Cela nous amène à nous questionner sur les différences de production saisonnière... Dans certaines régions, on ne fait la collecte sélective de la matière organique qu’une fois par mois durant la saison froide parce que
3RVE_2010_mars:3RVE
08/03/10
23:23
Page 15
B I O MÉTH A N I S ATI O N : PA S A U S S I S I M P L E Q U’O N L E C R O IT !
les quantités sont insuffisantes pour justifier un rythme plus soutenu. Par quoi combler ce manque d’intrants lorsque l’on veut produire du biogaz pour une flotte de véhicules qui, elle, fonctionne toute l’année durant ? L’exemple est tout aussi valable si le biogaz produit est plutôt utilisé pour le chauffage d’infrastructures commerciales ou industrielles avoisinant l’usine de biométhanisation. Peuventelles se permettre des fluctuations périodiques dans la production du biogaz ? Le programme d’aide financière prévoit subventionner l’achat de bacs roulants et de camions spécialisés dans la collecte sélective des matières organiques. Comme si un troisième bac et une troisième collecte étaient un gage de succès et d’atteinte de l’objectif ! Dans le meilleur des cas, on va faire la collecte d’environ 50 % des restes de table et d’une plus grande proportion de résidus verts. Mais là où on incite à l’herbicyclage, cette proportion de résidus verts est réduite d’autant. Il ne reste plus que les résidus verts du ménage du printemps et les feuilles mortes.
et la sensibilisation. Dans la nouvelle politique, il n’y a qu’une enveloppe de 600 000 $ par année prévue pour l’information et la sensibilisation. Cette somme est beaucoup trop timide pour changer les comportements d’une population. Finalement, il faut souligner le dépôt de la nouvelle politique et les aides financières qui y sont associées. Mais, encore une fois, on privilégie quelques moyens ciblés aux dépens de la créativité et du développement. Comme tout projet de gestion des matières résiduelles, ceux de biométhanisation doivent être conçus avec attention, en tenant compte des intrants et des extrants, avec transparence et consultation de la population, c’est-à-dire sans précipitation. Parce que ce sont les citoyens qui paieront et qui vivront avec les choix des décideurs d’aujourd’hui. Dans certains cas, on semble privilégier l’approche des puristes plutôt que celle des pragmatiques. Dans tous les cas, il faudra informer et sensibiliser la population. C’est le point faible de la nouvelle politique et de son principal programme d’aide financière. ■
De toute façon, les procédés de biométhanisation exigent de traiter la matière organique avant de l’incorporer dans le digesteur. Dans le cas de la collecte des résidus alimentaires, il faut ouvrir les sacs – parce qu’il y aura des sacs, n’en déplaise aux puristes –, enlever les impuretés et broyer les intrants. Sachant que les techniques de tri biomécanique se raffinent de plus en plus et qu’elles sont plus efficaces, on pourrait faire l’économie de cette troisième collecte et mettre les sommes ainsi épargnées ailleurs. En effet, on pourrait valoriser une quantité plus grande de matière organique et ainsi faciliter le travail des citoyens. Ces derniers n’auront pas à payer pour cette troisième collecte, mais ils devront, de toute façon, payer pour l’exploitation des infrastructures de valorisation des matières organiques. De cette façon, on fait aussi l’économie de combustible fossile et d’émissions de gaz à effet de serre pour la collecte ainsi évitée. Précisons : la matière organique de grande qualité est souvent valorisée directement en compostage ou directement utilisée dans le digesteur. Outre le biogaz, la biométhanisation produit également un digestat. Celui-ci devra être valorisé soit par épandage, soit par compostage. Ainsi, le projet de biométhanisation devra inclure un volet compostage conforme aux dernières exigences du Ministère. Il faudra aussi disposer de ce compost. Il y a toujours les risques d’odeurs associés à quelque procédé que ce soit. Dans les faits, on transporte et on traite de la matière organique qui a séjourné dans un bac roulant puis dans un camion à benne tasseuse, et qui arrive à une installation industrielle. Et, qu’elle soit ramassée dans le cadre d’une collecte sélective spécifique ou autrement, les risques sont toujours présents. Ainsi, le site de l’infrastructure devra être judicieusement choisi afin de limiter au maximum les nuisances possibles. On souhaite modifier le comportement des citoyens en lui fournissant des outils pour trier à la source leurs matières organiques, ce qui est une bonne chose. Par contre, il n’y a pas d’argent prévu au programme d’aide financière pour l’information Le magazine des matières résiduelles au Québec 3RVE VOL. 5 NO 3 HIVER 2010
15
3RVE_2010_mars:3RVE
08/03/10
23:23
Page 16
A C C E PTATI O N S O C I A LE
PROJET DE POLITIQUE DE GESTION DES MATIÈRES RÉSIDUELLES : ALLIER ÉCONOMIE, ENVIRONNEMENT ET SOCIÉTÉ !
Cédric Bourgeois M. Env. président Transfert Environnement c b o u rg e o i s @ t ra n s e n v i ro n n e m e n t . q c . c a
Fort probablement à l’instar de tous les acteurs du domaine de la gestion des matières résiduelles au Québec, j’ai lu avec empressement et analysé avec minutie le nouveau projet de politique québécoise de gestion des matières résiduelles, dont la période consultative s’est terminée le 24 février dernier. Alors, qu’en ressort-il ?
Un travail sérieux de concertation qui mérite d’être reconnu Intitulé Allier économie et environnement, le projet de politique peut assurément être considéré comme une opération de consultation et de concertation impressionnante. Il s’agit en fait d’un travail conduit avec rigueur et développé dans un esprit d’ouverture, parsemé ici et là de compromis et d’accommodements permettant de rallier et de mobiliser les multiples parties prenantes intéressées au dossier de la saine gestion des matières résiduelles. Cet exercice de haute voltige n’est évidemment pas révolutionnaire, puisque l’objectif premier est de rallier un large spectre d’idées, d’opinions et de positions qui sont souvent différentes, voire antagonistes. Certains verront alors le verre à demi plein et d’autres, à moitié vide… Dans sa globalité, le projet de politique semble a priori être un document phare, son plan d’action 2010-2015 balisant et orientant les activités à déployer afin d’atteindre l’objectif fondamental de n’éliminer que les déchets réellement ultimes.
En se fondant sur le principe hiérarchique des 3RV, le principe fondateur de la politique 1998-2008, il semble pourtant clair que tout type de valorisation énergétique telle la gazéification, la torche plasma, etc., doit toujours demeurer une alternative de dernier recours et non une solution utilisée en amont. Les technologies qui misent sur la valorisation énergétique pallient en fait notre incapacité à concevoir des produits facilement recyclables et à instituer des programmes de récupération réellement performants. Lorsque les citoyens participeront encore plus activement aux efforts de récupération tout en consommant mieux, lorsque les entreprises seront poussées, au-delà de leur bonne volonté, à concevoir leurs produits afin d’en assurer leur recyclabilité, et finalement lorsque des débouchés stables et viables seront développés à l’échelle nationale pour les matières jugées problématiques, les quantités de plastique, de papier et de carton à valoriser seront radicalement diminuées. Sans ce combustible, le potentiel de croissance de l’industrie de la valorisation énergétique en sera d’autant limité. En fait, seule notre inaptitude à déployer des mesures respectant réellement la hiérarchie des 3RV pourrait assurer son essor. À court terme, le recours aux technologies de valorisation énergétique s’avère probablement une alternative logique et viable pour traiter par exemple les rejets de centres de tri ou les ballots de matières mélangées actuellement exportés pour incinération. À long terme cependant, ce type de technologie dite « verte » ne pourra qu’enliser le Québec dans l’immobilisme en limitant son spectre d’action en amont. Alors, il sera difficile de parler d’une gestion durable et intégrée des ressources…
Au-delà de la visée consensuelle du projet de politique, les trois enjeux majeurs de la gestion des matières résiduelles au Québec ont particulièrement retenu mon attention :
Un autre aspect problématique de la réduction des GES est relié aux calculs. De fait, la réduction des émissions d’un projet est toujours évaluée en fonction de l’utilisation d’un carburant alternatif et non en fonction des ressources nécessaires pour produire un produit de remplacement à la matière valorisée. Tant et aussi longtemps que des analyses de cycle de vie (ACV) complètes, rigoureuses et indépendantes n’auront pas prouvé le contraire, il sera difficile de qualifier les technologies de valorisation énergétique de réellement « vertes ».
1. mettre un terme au gaspillage des ressources; 2. contribuer aux objectifs du plan d’action sur les changements climatiques et à ceux de la stratégie énergétique du Québec; 3. responsabiliser l’ensemble des acteurs concernés par la gestion des matières résiduelles.
Dans ce contexte, l’enjeu concernant la lutte aux changements climatiques devrait s’inspirer d’une prise de décision s’appuyant sur l’ACV et sur une approche favorisant l’écoconception de produits afin d’en assurer la recyclabilité plutôt que de simplement s’en tenir à viser, de manière absolue et sans égard à la façon, la réduction des GES.
Des ACV s'il vous plaît !
Sans vouloir entrer dans le jeu pernicieux de la dénonciation ou lancer un débat sur la sémantique des enjeux sélectionnés, il appert à propos de questionner la pertinence du second enjeu et du fait qu’il semble, de par son caractère multidimensionnel, faire office de primus inter pares. De quelle façon le fait de contribuer aux objectifs du plan d’action sur les changements climatiques et à ceux de la stratégie énergétique du Québec peut-il réellement représenter l’un des trois principaux enjeux du domaine de la gestion des matières résiduelles ? Ne s’agit-il pas plutôt d’un catalyseur, voire d’une retombée positive d’une saine gestion des matières résiduelles ? N’existe-t-il pas une certaine incohérence entre le premier enjeu et celui de vouloir miser à tout prix sur une réduction immédiate et unidimensionnelle des émissions de gaz à effet de serre (GES) ? L’engouement municipal entourant le recours aux technologies de valorisation thermique autres que la biométhanisation pour le traitement des matières résiduelles, des technologies qui permettent justement de réduire la quantité de GES émis dans l’atmosphère, n’est-il pas un exemple flagrant de cette discordance entre les deux enjeux ?
Le citoyen : au cœur d’une nouvelle économie verte Les citoyens devraient être amenés à s’approprier et à appliquer de façon personnelle et collective le concept de saine gestion des matières résiduelles, d’empreinte écologique et d’économie verte, à la manière des collectivités qui en ont fait une priorité comme l’Allemagne, la Californie, l’Oregon, etc. Pourtant, cette identification du citoyen/consommateur, comme étant l’acteur clé, à titre de participant, mais aussi et surtout comme souscripteur et promoteur d’une vision de développement, a été le talon d’Achille de l’approche québécoise de la dernière décennie. Est-ce que les Québécois sont aujourd’hui culturellement prêts à changer leurs habitudes de consommation ? À modifier leurs comportements et à déployer les efforts suffisants ? À subir certaines contraintes au bénéfice de l’environnement et de la communauté ? Probablement plus qu’on ne l’imagine. Cependant, c’est aux citoyens de définir, en concertation, comment ils désirent allier économie et environnement afin d’assurer un développement durable de notre collectivité. Et vous ? Êtes-vous prêts à changer ? ■
16
Le magazine des matières résiduelles au Québec 3RVE VOL. 5 NO 3 HIVER 2010
Ce texte vous fait réagir ? Pour nous faire part de vos commentaires, rendez-vous au www.maya.cc, sous l'onglet 3Rve, ou envoyez-nous un courriel à info@maya.cc
3RVE_2010_mars:3RVE
08/03/10
23:23
Page 17
COLLECTE SÉLECTIVE
NOUVELLE POLITIQUE SUR LA GMR :
Maryse Vermette B.Sc., MBA présidente-directrice générale Éco Entreprises Québec mvermette@ecoentreprises.qc.ca
un rôle accru dévolu à l’industrie
Avec la collaboration de Mathieu Guillemette Conseiller, services techniques et environnement
Pour un meilleur contrôle des coûts nets de la collecte sélective Avec le dépôt de la nouvelle politique de gestion des matières résiduelles, le gouvernement accorde une plus grande part de responsabilité à l’industrie. La politique impose à l’industrie une prise en charge croissante des matières et des produits qu’elle met en marché tout en lui demandant d’améliorer son propre taux de récupération, bien que celui-ci, à 53 % selon le dernier bilan de Recyc-Québec, soit déjà plus élevé que le taux de récupération du secteur municipal (à 36 % seulement). Par ailleurs, les mesures du plan d’action prévoient un financement par l’industrie à hauteur de 135 millions de dollars au cours des 5 prochaines années pour ce qui est de la redevance temporaire à l’élimination, tandis que les retombées se feront surtout sentir dans le secteur municipal. Cette orientation générale qui fait appel à une plus grande contribution de l’industrie devra impliquer un droit de regard accru de celle-ci à l’égard de la gestion des matières résiduelles. Nous commenterons ici deux stratégies de la nouvelle politique : la stratégie 5 « Responsabiliser les producteurs » et la stratégie 8 « Choisir le système le plus performant ».
Ce texte vous fait réagir ? Pour nous faire part de vos commentaires, rendez-vous au www.maya.cc, sous l'onglet 3Rve, ou envoyez-nous un courriel à info@maya.cc
Bien que la loi confie la responsabilité de la gestion des matières résiduelles aux municipalités, les regroupements municipaux revendiquent, depuis plusieurs années, la pleine compensation des coûts liés à la collecte sélective. Dès 1989, l’industrie a posé des gestes concrets, sur une base volontaire, pour assumer sa part de responsabilité dans la récupération des contenants, emballages et imprimés qu’elle met en marché, avec la création de Collecte sélective Québec qui a permis de financer les équipements de récupération d’un nombre important de municipalités. Par la suite, avec l’entrée en vigueur du régime de compensation pour la collecte sélective en mars 2005, Éco Entreprises Québec a agi avec diligence et rigueur afin de déterminer avec les associations municipales quels seraient les coûts de collecte sélective efficace et performante à compenser. Les premières années du régime de compensation ont été caractérisées par l’absence de sources de données fiables des coûts nets de la collecte sélective et ont fait l’objet de négociations longues et ardues. Dans le contexte où l’industrie
Le magazine des matières résiduelles au Québec 3RVE VOL. 5 NO 3 HIVER 2010
17
3RVE_2010_mars:3RVE
08/03/10
23:23
Page 18
N O U V E L L E P O L I T I Q U E S U R L A G M R : U N R Ô L E A C C R U D É V O L U À L’ I N D U S T R I E
L’industrie refusera toujours la signature d’un chèque en blanc ! Les montants versés devront être proportionnels à l’efficacité et à la performance des programmes municipaux. serait appelée à assumer une part plus importante des coûts nets de la collecte sélective, il est crucial de mettre en place des mécanismes de reddition de comptes et de contrôle des coûts. L’industrie refusera toujours la signature d’un chèque en blanc ! Les montants versés devront être proportionnels à l’efficacité et à la performance des programmes municipaux.
À titre d’exemple, pour avoir droit à une compensation, les municipalités devront déclarer les coûts reconnus et les informations sur les rendements, tonnages collectés, nombre et type d’unités desservies, matières collectées par le programme, etc. Ces informations serviront à l’étalonnage des programmes et la compensation pourra ainsi être modulée en fonction des rendements. La publication d’un palmarès annuel des municipalités, tel qu’on peut le retrouver par exemple dans la province voisine sur le site Internet de Waste Diversion Ontario, serait également une b onne façon de reconnaître l’excellence des municipalités performantes et efficaces, tout en incitant celles dans le bas du classement à s’améliorer. Les modifications législatives et réglementaires sur le régime de compensation devront prévoir ces mécanismes de reddition de compte et de contrôle.
La fin prochaine du dédoublement inutile des collectes Dans la suite logique des conclusions tirées par la Commission des transports et de l’environnement en 2008, la politique envisage l’abolition prochaine de la consigne sur les contenants à remplissage unique (CRU). Dans la mesure où les contenants de boisson dans la collecte sélective sont récupérés à un taux équivalent à celui de la consigne et que la desserte hors foyer est adéquate, le gouvernement envisagera de mettre fin à un dédoublement inutile et coûteux des systèmes de récupération de ces contenants. Déjà, le taux de récupération à la maison des contenants de boisson non consignés (bouteilles d’eau, de vin, etc.) est de 67 %, un taux comparable à celui de la consigne en 2008 (68 %). L’abolition éventuelle de la consigne est une excellente nouvelle pour le contribuable et le consommateur québécois, puisque la consigne est un système dispendieux. Il en coûte au moins trois fois plus cher de récupérer un contenant via la consigne que par la collecte sélective. De plus, la consignation des CRU prive la collecte sélective de quelque 13 millions de dollars de revenus nets par année. Si l’on combine le coût pour les consommateurs à la perte en revenus des municipalités, c’est environ 1 000 $ la tonne que coûte la consigne aux Québécois chaque année !
En conclusion Avec l’avènement de cette nouvelle politique, ÉEQ poursuivra, dans un effort de collaboration renouvelé, sa contribution à l’amélioration de la collecte sélective, qui est le système le plus efficace pour récupérer les matières recyclables. ÉEQ entend également maintenir son rôle de premier plan dans la gestion des matières recyclables. ■
18
Le magazine des matières résiduelles au Québec 3RVE VOL. 5 NO 3 HIVER 2010
3RVE_2010_mars:3RVE
08/03/10
23:23
Page 19
LE TOUR DU MONDE
Michel Marcotte ing., M.Sc.A. directeur, Genivar michel.marcotte@genivar.com
En Europe, près de 2 milliards de tonnes de déchets de toutes provenances sont produits chaque année dans les États m e m b r e s , y c o m p r i s d e s d é ch e t s particulièrement dangereux. Ceci représente plus ou moins 4000 kg de déchets par personne, par année. En 10 ans, cette production a augmenté de plus de 10 % et continue de croître. La production de déchets de tous ordres explose. En termes de déchets domestiques, les Européens en ont généré, en 2007, 522 kg par habitant, dont près de 40 % ont été recyclés ou compostés, c’est-à-dire 313 kg qui ne l’ont pas été. Le Danemark, l’Irlande et Chypre arrivent en tête du classement avec plus de 750 kg de déchets domestiques par habitant. Ils sont suivis par le Luxembourg, Malte et les Pays-Bas où la quantité de déchets par habitant est comprise entre 500 et 600 kg. Les volumes les plus bas, inférieurs à 400 kg par personne, ont été relevés en Roumanie, en Lettonie, en Pologne, en Slovaquie et en République tchèque. À titre de comparaison et selon une étude du Conference Board du Canada en 2007, le producteur de déchets par excellence de la classe canadienne est le Québec avec 466 kg de déchets par habitant. Il dépasse toutes les provinces, incluant l’Ontario (363 kg) et l’Alberta (372 kg).
PLAN D’ACTION 2010-2015… ET L’EUROPE AUSSI l’utilisation des ressources et permet donc la réduction de la consommation de carburants fossiles. Dans le contexte actuel, les notions de développement durable, de gestion des ressources, de rareté des matières premières et de production des « déchets » sont étroitement liées. Sans doute la meilleure solution consiste-t-elle encore à prévenir, à réduire la production de ces « déchets » et à réintroduire l’inévitable quantité produite dans le cycle économique via le recyclage de leurs composants lorsque des solutions écologiquement et économiquement viables existent. Aussi le Conseil a-t-il adopté, à l’automne 2008, sous présidence française, une directive qui crée un nouveau cadre pour la gestion des déchets au sein de l’UE afin d’encourager le réemploi et le recyclage des déchets et de simplifier la législation actuelle. « Moins de gaspillage, plus de recyclage » : c’est l’idée maîtresse de la nouvelle législation européenne sur la gestion des déchets adoptée en seconde lecture par Strasbourg. En identifiant le déchet comme ressource secondaire, la nouvelle législation vise à réduire leur mise en décharge. La directive introduit une nouvelle approche qui met l’accent sur la prévention et la réduction des volumes de produits à usage unique. Les États membres devront donc élaborer et mettre en œuvre des programmes de prévention de la production de déchets, et la Commission européenne fera périodiquement un
rapport sur les progrès réalisés dans ce domaine. En outre, la directive établit une hiérarchie en matière de traitement des déchets, applicable dans le cadre de la définition des politiques nationales de gestion des déchets, qui prévoit les cinq actions suivantes par ordre de priorité : ● prévention de la production de déchets (solution à privilégier); ● réemploi; ● recyclage; ● valorisation (y compris la valorisation énergétique); et ● élimination des déchets, en dernier recours. Une étude de la Commission européenne publiée au début de février recommande de créer une Agence européenne chargée de veiller à la mise en œuvre de la législation relative aux déchets et d’assurer le contrôle de son application. Il s’agit de créer un réseau intégré d’installations d’élimination, avec les meilleures technologies disponibles. Une nouvelle structure ? Oui, car sans structure qui collige les chiffres, pas de suivi ni de podiums. Le marketing a rendu les chiffres menteurs en ce qu’ils servent toujours le propos de ceux qui les citent et justifient les structures qui les produisent, pour le meilleur et pour le pire. Mais à défaut d’incitatifs appropriés, dépenser de l’argent « politique » est rarement un investissement payant. À preuve, en Europe, les pays pauvres produisent moins de déchets que les pays riches qui dépensent plus pour en limiter la production. En quoi serions-nous différents ? ■
Tirée du site de www.toutelEurope.fr, la carte suivante présente la quantité de déchets générée chaque année par habitant de l’Union. Elle comprend les déchets collectés par ou pour le compte des autorités municipales et éliminés par le système de gestion des déchets. S’il est convenu que leur stockage n’est pas une solution viable, la mise en décharge y est pourtant depuis longtemps la principale méthode de traitement des déchets domestiques. Par ailleurs, leur destruction par incinération ne l’est pas plus vu les rejets et les résidus hautement concentrés et polluants produits en contrepartie. Pourtant, le nouvel acte législatif considère l’incinération des d é ch e t s c o m m e u n e o p é r a t i o n d e valorisation. Cela promeut l’efficacité de Le magazine des matières résiduelles au Québec 3RVE VOL. 5 NO 3 HIVER 2010
19
3RVE_2010_mars:3RVE
08/03/10
23:23
Page 20
LES MÊMES OBLIGATIONS PARTOUT AU QUÉBEC, MAIS DES RÉALITÉS DIFFÉRENTES !
EN RÉGION
Nathalie Drapeau Nordikeau n . d ra p e a u @ g l o b e t ro t t e r. n e t
raison des distances à parcourir. Pour ajouter au malheur, dans la MRC du Rocher-Percé, le roc se trouve à environ quatre pieds de la surface et l’argile rare. En fin de compte, les coûts à l’enfouissement s’élèvent à 1 0 0 $/tonne tandis que ceux du transport peuvent atteindre 30 $/tonne.
Mme Drapeau travaille depuis plus de 13 ans pour Nordikeau, et plus particulièrement depuis 4 ans à l’implantation du PGMR pour la MRC du Rocher-Percé. Elle a travaillé, entre autres, aux dossiers suivants : l’implantation de la collecte regroupée par système multibox, l’implantation de trois déchetteries, l’étude pour l’optimisation de la récupération, le projet-pilote et les études économiques pour le compostage, la rédaction de devis et de mémoires….
Pour vivre quotidiennement avec le casse-tête de la gestion des matières résiduelles, pour avoir fait diverses recherches et avoir harcelé plusieurs confrères avec mes questions, je vous présente ici non pas des plaintes, mais plutôt des constats. En région, nous devons développer les solutions de gestion des matières résiduelles en respectant les mêmes règles du jeu qu’ailleurs au Québec, mais nos réalités sont fort différentes. En voici quelques exemples.
Le coût de l’enfouissement En région, la compétition est plus rare, les volumes à enfouir plus petits et les coûts de matériel et de main-d’œuvre plus élevés en
20 3RVE VOL. 5 NO 3 HIVER 2010
La redevance à l’enfouissement… et ses aberrations Pour la redistribution des redevances, le MDDEP utilise un critère de distance de plus ou moins 100 km pour ranger une municipalité dans une catégorie ou dans l’autre. Ainsi, une municipalité se trouvant à 150 km de Québec, qui peut tout de même bénéficier d’un accès à un marché concurrentiel, se retrouve dans la même catégorie qu’une municipalité située à 1000 km de tout marché viable ! La pondération des indicateurs ne tient pas compte des particularités régionales. Par exemple, en Gaspésie, la production des résidus verts est marginale comparativement aux grands centres et à leurs banlieues. Toutefois, un facteur de 30 sur 100 lui a été attribué pour la redistribution de la redevance ! Il faudrait également tenir compte de l’affluence touristique d’une région par rapport à sa population. En octroyant le remboursement sur la base de « l’habitant », notre région de 18 000 habitants, qui voit passer 600 000 touristes pendant l’année dont 450 000 pendant la période estivale, est nettement pénalisée puisque cette clientèle génère des déchets sans être tributaire de la dépense.
Ce texte vous fait réagir ? Pour nous faire part de vos commentaires, rendez-vous au www.maya.cc, sous l'onglet 3Rve, ou envoyez-nous un courriel à info@maya.cc
3RVE_2010_mars:3RVE
08/03/10
23:23
Page 21
L E S MÊM E S O B L I G ATI O N S PA RTO UT A U Q UÉB E C, M A I S D E S RÉA L ITÉS D I F FÉR E NTE S !
La récupération et le régime de compensation
Les matières organiques
Le régime de compensation en vigueur est l’un des rares outils financiers soutenant les coûts annuels de la gestion des matières résiduelles. Cependant, les critères ne tiennent pas compte des réalités des régions plus éloignées.
L’annonce de la nouvelle politique et surtout des leviers financiers qui l’accompagnent vont clairement stimuler la gestion de cette matière. Pour des régions plus éloignées couvrant de grands territoires et dotées d’une faible population, le compostage sera probablement privilégié à la biométhanisation, question de volume et de coûts.
Les distances à parcourir entre le centre de tri et les marchés Le coût de transport des matières recyclables à lui seul est de 35 $/tonne. Il faut ajouter à cela les coûts de collecte et de traitement. Ces coûts de transport n’ont pas à être assumés par la majorité des municipalités au Québec, lesquelles se trouvent à proximité des marchés. Il y a donc désavantage pour nous.
L’accès à un marché compétitif En raison des petits volumes de matières générés, des importantes distances à parcourir et de la faible densité populationnelle, la concurrence s’avère quasi inexistante. Dans ce contexte, il nous est difficile de profiter de coûts de traitement ou de transport compétitifs équivalents à ceux offerts dans les grands centres. En effet, les coûts actuels du recyclage s’élèvent chez nous à plus de 110 $/tonne. L’enfouissement était moins cher en 2009 !
Les coûts de production et de réalisation de travaux d’amélioration Chez nous, la main-d’œuvre, l’expertise, les matériaux coûtent plus cher à cause de la grande distance et de l’accès limité. Ceci génère des coûts d’investissement supérieurs pour des quantités plus réduites, donc des coûts par tonne plus élevés et une rentabilité plus faible qu’ailleurs.
Pourquoi, dans ce cas, le ministère du Développement durable, de l’Environnement et des Parcs (MDDEP) favorise-t-il partout la biométhanisation aux dépens d’autres solutions plus rentables et tenant compte des particularités régionales ? Ce qui importe, ce n’est pas de recevoir en subvention l'équivalent de la moitié ou des deux tiers des coûts du projet, mais plutôt qu’au final le coût de revient par tonne de déchets soit équitable pour tous. Depuis trois ans, la MRC du Rocher-Percé a réalisé toutes les démarches en vue d’implanter le compostage sur son territoire, mais les paramètres proposés par l’actuel projet de politique sont insuffisants. Les élus ont donc décidé de passer leur tour ! Depuis plus de trois ans, nous avons fait tous nos devoirs, mais force est de constater que les régions sont défavorisées en raison des grandes distances à parcourir pour le transport des matières vers les marchés, la faible concentration de la population et l’absence de concurrence à proximité. Les régions affrontent les mêmes obligations que les grands centres et leurs banlieues sans pourtant bénéficier d’outils et de critères susceptibles d’atténuer les effets liés aux distances. Lorsque des municipalités consacrent près de 18 % du budget municipal à la gestion des matières résiduelles, que 80 % du budget annuel de 3 M$ est assumé par les citoyens même si le principe d’utilisateur-payeur est implanté… c’est qu’il y a un problème ! Mais ce n’est pas une plainte… c’est un constat ! ■
Le magazine des matières résiduelles au Québec 3RVE VOL. 5 NO 3 HIVER 2010
21
3RVE_2010_mars:3RVE
08/03/10
23:23
Page 22
LA PLACE DE L’INDUSTRIE DANS LA GESTION DES MATIÈRES RÉSIDUELLES AU QUÉBEC :
A S S O C I ATI O N
Perry Niro M.Sc. président-directeur général, Conseil des entreprises de services environnementaux p n i ro @ c e s e . c a
À peu près tout le monde au Québec a applaudi au dépôt du projet de Politique sur la gestion des matières résiduelles. Fort attendue, cette proposition gouvernementale fait suite aux travaux de 2008 de la commission parlementaire sur le sujet. Mais à y regarder de plus près, on s’aperçoit que certaines dispositions menacent l’industrie québécoise des services environnementaux. En effet, on note un déséquilibre flagrant entre les fournisseurs de services privés et publics, ces derniers étant nettement privilégiés en obtenant une aide financière disproportionnée pour le financement des projets de biométhanisation par exemple. Il en est de même pour les organismes à but non lucratif qui auront droit à des subventions et conditions de financement exclusives. À ce chapitre, il est à noter que l’industrie a gagné un combat majeur en juin dernier alors que la ministre des Af f a i r e s m u n i c i p a l e s a m o d i fi é l e processus de soumissions des municipalités de manière à ce que les contrats municipaux de 25 000 $ et plus en matière de collecte, de transport, de
un combat de tous les instants résiduelles pour répondre aux exigences de la nouvelle politique. La hausse subite du coût d’enfouissement risque aussi de favoriser l’exportation ou l’enfouissement clandestin au détriment du recyclage et de la valorisation. À cet effet, il serait plus approprié d’imposer la redevance aux postes de transbordement.
Pour une véritable collaboration L’ i n d u s t r i e des services environnementaux dispose d’un savoirfaire unique développé avec les années et enrichi par la présence de grandes sociétés qui ont mis sur pied des projets avec succès aux quatre coins de la planète. Plusieurs des entreprises présentes au Québec ont construit, mis en œuvre et exploité des projets de mise en valeur énergétique à partir des déchets et des matières organiques. Le gouvernement aurait avantage à utiliser l’enveloppe de 650 M$ pour favoriser l’expansion des entreprises innovantes québécoises et à faire appel à l’expertise et au savoir de l’industrie québécoise des services environnementaux pour la réalisation et l’exploitation des usines de valorisation énergétique. Les expériences américaines et européennes démontrent d’ailleurs des économies de coût importantes en associant étroitement l’industrie des services environnementaux dans la planification des solutions environnementales.
Nous avons une occasion unique de stimuler l’innovation et le développement économique régional en utilisant cette Politique comme levier de croissance de la richesse.
Une invitation à la mobilisation et à l’action À la lumière de ce projet de Politique, force est de constater la nécessité d’une présence accrue et soutenue du savoirfaire de l’industrie à l’étape de l’élaboration de mesures et d’orientations gouvernementales. Cela permettrait d’éviter des écueils dans la mise en œuvre des actions gouvernementales. Nous avons une occasion unique de stimuler l’innovation et le développement économique régional en utilisant cette Politique comme levier de croissance de la richesse. Au-delà des discours sur l’économie verte, des mesures réglementaires et législatives peuvent stimuler les entreprises de services environnementaux à augmenter leurs investissements. Cela ne peut se faire que si l’environnement d’affaires dans lequel évolue l’industrie est basé sur un juste équilibre entre les différents acteurs de la chaîne de valeur de la gestion des matières résiduelles au Québec. Il appert que l’industrie doit faire front commun et partager une vision commune de son développement au Québec et sur les marchés d’exportation. Elle doit se m o b i l i s e r e t d é fi n i r S O N p l a n d e développement et non plus agir en réaction aux changements de son environnement d’affaires. C’est pourquoi l’industrie sera bientôt conviée à un forum pour mieux définir ses besoins et définir son plan d’action. La présence des leaders de l’industrie autour de cette table est un incontournable et je serai heureux d’en discuter avec ceux qui veulent s’associer à cet exercice. ■
transbordement, de recyclage et de récupération des matières résiduelles ne soient plus accordés de gré à gré à un OBNL, mais uniquement à la suite de l’application des règles d’adjudication des contrats. Plusieurs autres dispositions devront être révisées afin de faciliter l’atteinte des objectifs de la Politique, au premier chef la date de mise en vigueur de l’application de la redevance au 1er avril de cette année. Il apparaît hasardeux une telle date butoir, alors que plusieurs contrats sont déjà en vigueur et qu’il faut par ailleurs développer un système de traçabilité des matières 22
Le magazine des matières résiduelles au Québec 3RVE VOL. 5 NO 3 HIVER 2010
Connaissez-vous le bdd ? Ce texte vous fait réagir ? Pour nous faire part de vos commentaires, rendez-vous au www.maya.cc, sous l'onglet 3Rve, ou envoyez-nous un courriel à info@maya.cc
3RVE_2010_mars:3RVE
08/03/10
23:23
Page 23
CENTRES DE TRI
Frédéric Potvin, ing. directeur général Tricentris fpotvin@tricentris.com
Après 20 ans dans le milieu de la gestion des matières résiduelles et au service des municipalités, j’en ai vu passer des plans, des promesses, des consultations, des annonces. Nous avons eu droit, en novembre dernier, faisant suite à la Politique 1998-2008, à l’annonce d’une nouvelle politique assortie d’un plan ambitieux sur la gestion des matières résiduelles au Québec. Je devrais peut-être me réjouir, mais je n’y arrive pas…
C’est l’intention qui compte ? Loin de moi l’idée de critiquer la politique dans ses intentions premières, fort louables par ailleurs, de vouloir réduire l’enfouissement et les émissions de gaz à effet de serre, valoriser la matière organique et responsabiliser les producteurs tout en stimulant l’économie québécoise. L’expérience nous a toutefois démontré que fixer des objectifs ne garantit pas qu’ils seront atteints et qu’annoncer des subventions ne signifie pas que ceux qui en auront besoin en bénéficieront. D’où vient donc cet intérêt subit pour la récupération des matières organiques ? La Politique 1998-2008 visait déjà un objectif de récupération de 60 %. Le bilan réalisé en 2008 a révélé un maigre résultat de 12 %. À mi-chemin du plan 1998-2008, il était déjà clair qu’on n’y arriverait pas. Pourtant, aucun effort supplémentaire n’a été fait. La Belle Province vise maintenant 100 % en 10 ans, dont 60 % en 5 ans. Vous y croyez, vous ?
À l’assaut des 3R-V Cet intérêt subit va certainement de pair avec le soudain engouement de Québec pour les projets d’usine de biométhanisation. Quelqu’un a-t-il seulement réalisé une étude environnementale, un bilan des émissions, ne serait-ce qu’évalué la faisabilité et la rentabilité de la collecte, du transport et de la valorisation des déchets organiques ? Je ne suis pas contre le principe, au contraire; je me demande seulement sur quoi le gouvernement se base, tout à coup, au moment d’engager tout cet argent dans la valorisation. Le principe des 3R-V, reconnu par tous, demeure simple : d’abord réduire à la source, réemployer si possible, sinon recycler puis valoriser. Au moment du bilan de la dernière
LA NOUVELLE POLITIQUE DE GESTION DES MATIÈRES RÉSIDUELLES :
lorsque l’enfer est pavé de bonnes intentions… politique, la société québécoise rejetait encore, dans ses dépotoirs, 12 % plus de déchets que lors de sa mise en vigueur. La province se lance aujourd’hui dans la valorisation alors qu’elle ne maîtrise pas encore la base; nous nous retrouvons dans une situation où très peu de fonds sont dirigés vers la construction et la consolidation de cette base, pourtant essentielle au processus entier.
Les faits Au lancement de sa politique en 1998, le gouvernement avait promis 35 M$ pour implanter la collecte de matières organiques; il en a versé 1 M$. Après une promesse de 20 M$ pour un programme d’éducation, la somme réellement engagée a été de 1,9 M$. Un programme de soutien à la recherche de 15 M$ dans le domaine de la mise en valeur des matières résiduelles ? Le gouvernement a donné 1 M$. Des 30 M$ annoncés pour le soutien d’entreprises d’économie sociale, Québec a injecté 18,7 M$. Au total, des engagements de 100 M$ pour une somme déboursée de 22,6 M$.
procédait dans la même période à un appel d’offres et à l’octroi de contrats pour l’achat d’électricité issue de la biomasse. L’enveloppe de 650 M$ ne comprend que 368 M$ en subsides gouvernementaux (provinciaux et fédéraux), dont une partie proviendra de l’augmentation des redevances sur l’enfouissement. Ce n’est pas très clair, mais il semble, et cela aussi d’après les annonces déjà faites, que le reste sera fourni par les municipalités pour une valeur totale de 650 M$. Faites le calcul : des projets annoncés de 57 M$ à Québec, de 15 M$ à Rivière-du-Loup et de 559 M$ pour Montréal, Laval, Longueuil et la Montérégie, tout ça dans les trois mois précédant et suivant « l’annonce » de la Politique et du plan d’action en novembre dernier. La ministre a eu beau nous dire, à l’occasion de son annonce, que les formulaires étaient disponibles, je serais très curieux de l’entendre nous préciser aujourd’hui ce qu’il subsiste exactement de l’enveloppe.
Si les promesses n’ont pas été respectées quand l’économie allait bien, j’ose à peine imaginer le portrait dans un contexte économique plus difficile. Alors quand la ministre annonce cette fois-ci 30 M$ pour un programme de soutien à la récupération hors foyer, 20 M$ de plus pour les centres de tri et 10 M$ pour les entreprises d’économie sociale, je me permets de douter. Premièrement, ces sommes sont nettement insuffisantes pour soutenir l’atteinte des objectifs fixés. Deuxièmement, je crains, et pour cause, de ne jamais voir la couleur de cet argent. Si les promesses n’ont pas été respectées quand l’économie allait bien, j’ose à peine imaginer le portrait dans un contexte économique plus difficile.
Qui paiera donc la note pour les nouveaux objectifs de réduction de l’enfouissement ? Vous et moi, citoyens des autres municipalités. Québec doublant ses redevances pour l’enfouissement, les centres de tri vont devoir débourser l’équivalent de 1 M$ supplémentaire par an. Les municipalités qui auront manqué le bateau des subventions (car l’augmentation des redevances servira à les financer) devront vraisemblablement elles aussi contribuer et pour cela puiser en majeure partie, comme dans les 10 années de la politique précédente, directement dans leurs impôts fonciers.
Sitôt annoncé, sitôt dépensé !
Pour finir
Pourquoi donc, en plus, ai-je l’impression d’être seul à m’offusquer du fait qu’une enveloppe de 650 M$ pour des infrastructures de biométhanisation et de compostage soit annoncée au moment même où des projets de valeur correspondante sont déjà en marche – choix de technologie, estimations détaillées des coûts et calendriers de construction compris ? Comble du hasard, Hydro-Québec
À l’instant où je me retrousse les manches – parce que la protection de l’environnement, ça reste ma mission, comme pour tant de collègues partout au Québec –, je m’octroie quand même le plaisir de dire ce que je pense avant de poursuivre le travail. … avant de remplir aussi, à tout hasard, quelques-uns de ces formulaires. ■
Ce texte vous fait réagir ? Pour nous faire part de vos commentaires, rendez-vous au www.maya.cc, sous l'onglet 3Rve, ou envoyez-nous un courriel à info@maya.cc
Le magazine des matières résiduelles au Québec 3RVE VOL. 5 NO 3 HIVER 2010
23
3RVE_2010_mars:3RVE
08/03/10
23:23
Page 24
LA N O UVE LLE PO LITI Q U E : E NJ E UX TRAN S ITI O N N E LS À C O N S I DÉR E R
LE JURIDIQUE
Me Christine Duchaine Avocate en droit de associée chez Sodavex, cabinet juridique spécialisé en environnement cduchaine@sodavex.com
Outre les défis de taille que propose le projet de politique québécoise sur la gestion des matières résiduelles (la « nouvelle Politique »), certains enjeux susceptibles de s’avérer problématiques pour plusieurs ne semblent pas faire l’objet de débats jusqu’à présent. La question se pose pourtant simplement : comment s’effectuera la transition entre l’ancienne et la nouvelle Politique ? La réponse est pour sa part complexe et mérite qu’on s’y attarde. D’aucuns seraient tentés de répondre que l’adoption de la nouvelle Politique se fera sans heurts puisque l’objectif de réduction de la quantité de matières à enfouir a été adouci par rapport à la Politique 1998-2008. En effet, il est passé de la valorisation de 65 % des matières résiduelles valorisables à une réduction des matières éliminées de 810 à 700 kilogrammes par personne annuellement. Qui plus est, il ne s’agit que d’une politique, n’est-ce pas ? La réalité risque malheureusement d’être tout autre étant donné l’effet domino des divers mécanismes prévus à la Loi sur la qualité de l’environnement (LQE) et les difficultés d’arrimage découlant des délais intrinsèques de chacun de ses éléments. Il importe de clarifier que la politique québécoise sur la gestion des matières résiduelles revêt une importance quasi réglementaire puisqu’elle est imposée spécifiquement par la LQE. Ainsi, la ministre du Développement durable, de
24
Le magazine des matières résiduelles au Québec 3RVE VOL. 5 NO 3 HIVER 2010
l’Environnement et des Parcs, Mme Line Beauchamp, doit proposer une politique au gouvernement, laquelle est publiée dans la Gazette officielle pour commentaires. Après lecture et analyse de ceux-ci, la politique corrigée est adoptée et la ministre voit à son application. Parallèlement, la LQE impose aux MRC l’obligation d’adopter des plans de gestion des matières résiduelles (PGMR), lesquels régissent les activités de gestion de ces matières sur leur territoire en fonction de leurs besoins. Or, ces besoins et objectifs doivent être déterminés conformément à la politique, puisque les municipalités et MRC sont tenues d’exercer les attributions qui leur sont conférées par la loi avec l’objectif de favoriser la mise en œuvre de la politique. D’ailleurs, les PGMR doivent recevoir l’approbation de la ministre qui ne l’octroiera que dans la mesure où ceux-ci sont conformes à la politique en vigueur. Ce qui revient à dire que l’ensemble des PGMR applicables établissent leurs besoins d’élimination et déterminent les activités de gestion requises en présumant de l’atteinte de l’objectif de valorisation de 65 % de la Politique 1998-2008. Nous savons maintenant que non seulement cet objectif n’a pas été atteint, mais que la quantité de matières éliminées a augmenté depuis l’adoption de la Politique en 1998. De ce constat découlent la mise à l’écart de l’objectif de 65 % et son remplacement par un objectif de réduction plus réaliste. La nouvelle Politique prévoit également la mise en place de diverses mesures visant à détourner certaines matières de l’enfouissement, dont l’interdiction d’enfouir le papier et le carton d’ici 2013 et les matières organiques d’ici 2020, de même que l’établissement d’usines de biométhanisation pour valoriser ces dernières. Or, ces nouveaux objectifs n’ont nullement été pris en considération lors de l’élaboration des PGMR présentement
3RVE_2010_mars:3RVE
08/03/10
23:23
Page 25
LA NOUVELLE POLITIQUE : ENJEUX TRANSITIONNELS À CONSIDÉRER
applicables, et les nouvelles activités n’y sont pas prévues. De plus, l’analyse des besoins de ces PGMR présuppose une réduction marquée des besoins d’enfouissement, ce qui ne s’est nullement avéré dans la réalité.
de la nouvelle Politique requerront une autorisation de la ministre. Or, la LQE prévoit spécifiquement que dans l’exercice de ses pouvoirs d’autorisation, le gouvernement et la ministre doivent s’assurer du respect des dispositions des PGMR applicables.
[…] pendant toute cette période transitoire, la nouvelle Politique nous dictera une philosophie et des objectifs qui, pour la plupart, ne pourront être mis en pratique […]
Par conséquent, les projets issus de la nouvelle Politique – telles les usines de biométhanisation – ne pourront être autorisés que lorsque les PGMR auront été modifiés. De plus, pendant la période transitoire, tout projet d’établissement ou d’agrandissement de lieu d’élimination sera évalué en fonction de besoins d’enfouissement et de limitations territoriales édictés par des PGMR obsolètes dont les énoncés divergent de la réalité et des objectifs de la nouvelle Politique.
À la lumière des impératifs de la LQE, les MRC n’auront d’autre choix que de modifier leur PGMR pour s’harmoniser à la nouvelle Politique, ne serait-ce que lors de la mise à jour quinquennale imposée par la LQE. Malheureusement, le processus d’amendement des PGMR implique des délais importants à partir du moment où il est enclenché afin notamment de publier les projets de PGMR, de procéder à des consultations publiques sur ceux-ci et d’obtenir l’approbation de la ministre. Ces étapes précèdent obligatoirement l’entrée en vigueur de même que l’adoption par les municipalités des règlements permettant la mise en œuvre des PGMR.
On peut aisément déduire les difficultés réelles que vivront tant les concepteurs et promoteurs de tels projets au stade de la planification que les décideurs lors de l’analyse des demandes et de la prise de décision : doit-on retenir les données, objectifs et mesures prévus à la nouvelle Politique ou appliquer des PGMR que l’on sait désuets ? Étant donné les coûts importants reliés à l’implantation de tels projets, les joueurs vont probablement préférer attendre que les règles du jeu soient clarifiées dans quelques années, ce qui risque de se traduire par un ralentissement marqué des projets dans l’intervalle et le report de l’atteinte des objectifs de la Politique.
Ainsi, pendant toute cette période transitoire, la nouvelle Politique nous dictera une philosophie et des objectifs qui, pour la plupart, ne pourront être mis en pratique puisque les PGMR ne permettront pas l’essentiel des activités qui seront requises pour ce faire. De plus, la plupart des initiatives visant la mise en œuvre
Souhaitons que cet aspect soit pris en considération par le gouvernement afin que des ajustements soient rapidement apportés à la LQE et à la nouvelle Politique pour permettre un arrimage harmonieux et efficace de tous ces outils et favoriser leur mise en œuvre. ■
Le magazine des matières résiduelles au Québec 3RVE VOL. 5 NO 3 HIVER 2010
25
3RVE_2010_mars:3RVE
08/03/10
23:23
Page 26
G E STI O N H U M A I N E D E S R E S S O U R C E S
Dominique Dodier directrice générale EnviroCompétence dominique.dodier@envirocompetences.org
« Le meilleur manager est celui qui sait trouver les talents pour faire les choses, et qui sait aussi réfréner son envie de s’en mêler pendant qu’ils les font. » – Theodore Roosevelt Les organisations, au Québec comme ailleurs, ont de moins en moins de marge de manœuvre en ce qui concerne le maintien de leur rentabilité étant donné la compétition qu’opposent les pays émergents disposant d’une maind’œuvre bon marché et abondante. Cette abondance ne caractérise pas vraiment le Canada; avec une relève insuffisante pour prendre le relais des 10 millions de Canadiens qui partiront à la retraite sur un horizon de cinq ans, les organisations d’ici devront faire face à une importante pénurie de main-d’œuvre qualifiée. En effet, les baby-boomers sont nés entre 1946 et 1965 et vont, de ce fait, commencer à prendre leur retraite en 2010, si ce n’est pas déjà fait. En 2006, un Canadien sur trois était né durant cette période, selon Statistique Canada. La gestion intelligente et humaine des ressources devient donc un facteur incontournable pour assurer la productivité, la rentabilité et la pérennité des organisations. Vous me direz que ce sont les problèmes du secteur privé... Eh bien non, la fonction publique prévoit 14 251 départs à la retraite d’ici 2014, d’où l’importance d’une réflexion globale sur le sujet, mais aussi particulière. Toutefois, avant de mettre en place toutes sortes de stratégies pour contrer la pénurie qui se fait déjà sentir dans certains secteurs, il convient de s’adonner à un exercice d’introspection organisationnelle. Que possède mon organisation de plus que les autres ? Qu’avons-nous à offrir ? Quel type de culture est véhiculé ici ? Qu’offrent les entreprises de ma région et de mon secteur d’activité ? Quels sont mes avantages concurrentiels sur l’axe des ressources humaines ? Pourquoi les gens partent-ils de chez nous, pourquoi 26
Le magazine des matières résiduelles au Québec 3RVE VOL. 5 NO 3 HIVER 2010
DÉMOGRAPHIE ET RENTABILITÉ DES ORGANISATIONS restent-ils ? Ces questions, simples en apparence, sont cruciales au développement des affaires, car leurs réponses, plus complexes, sont à la base de toute réflexion stratégique organisationnelle. Car comment procéder à une optimisation si on ne connaît pas le ciment de nos ressources humaines ? En examinant vos forces et vos faiblesses, vous pourrez établir et prioriser les cibles à atteindre pour favoriser la rétention de vos ressources et en attirer de nouvelles – la problématique étant double. Gérer les ressources de façon humaine, ça signifie optimiser le système de reconnaissance, l’organisation du travail, la communication, le développement des compétences, la formation, la santé et la sécurité au travail et l’approche de
pratiques RH. Ne pensez pas que ceci prend trop de temps ou demande trop d’argent; pensez plutôt que le personnel reste une des charges les plus importantes des entreprises, puisqu’il peut représenter jusqu’à 50 % des dépenses dans le secteur des services. Ce facteur humain apparaît donc de plus en plus comme un des leviers essentiels de la performance. La direction des ressources humaines ne doit plus être perçue comme une fonction dans laquelle sont englouties des sommes dont on ne mesure jamais tout à fait les retombées. La DRH représente plutôt un investissement qui concourt au succès de l’organisation à court et long termes. Sans être une liste exhaustive de mesures, solutions ou suggestions, voici quelques exemples qui pourront vous mettre sur la piste : horaires variables,
La solution concernant les salaires doit être abordée avec finesse, car les générations montantes ne sont pas si avides de gros salaires, mais bien d’une meilleure qualité de vie et d’une plus grande capacité à évoluer au sein de l’organisation. gestion. Cependant, vos décisions ou stratégies devront s’articuler autour de l’humain et de ses besoins. Dans un marché d’employeurs, ce sont ces derniers qui dictent les règles; les ressources humaines ont alors peu de pouvoir de négociation. Or, dans un marché d’employés, ce qui devrait arriver plus vite qu’on le pense, c’est l’employé qui détient le pouvoir. On estime que, dans un futur rapproché, une personne qualifiée recevra entre trois et cinq offres d’emploi. Alors, quel sera son choix ? Le futur employé choisira sans doute l’employeur offrant les meilleures conditions d’emploi et d’exercice.
politiques de vacances, conciliation travail-vie privée, télétravail, programmes de formation axés sur le développement des compétences, gestion des carrières, programmes de reconnaissance, etc. La solution concernant les salaires doit être abordée avec finesse, car les générations montantes ne sont pas si avides de gros salaires, mais bien d’une meilleure qualité de vie et d’une plus grande capacité à évoluer au sein de l’organisation. Une chose est sûre : avant de mettre en place des solutions ou actions, consultez vos gens, car qui de mieux placés que vos employés pour décider de ce qu’ils veulent ?
La filière de l’environnement ne sera pas en reste, car elle doit en plus concurrencer d’autres secteurs de l’activité économique; la tarte reste de la même grosseur, mais les pointes de tarte varieront en fonction de la visibilité du secteur, de sa notoriété et des conditions de travail offertes. Après avoir mesuré l’écart entre votre position et celle désirée, vous aurez à établir un plan d’action visant l’amélioration de vos
Et pour mesurer les retombées de l’implantation des nouvelles conditions, préparez un questionnaire que devront remplir vos employés avant et après la mise en place de la politique. Cette façon de faire pourra vous donner des indicateurs très intéressants qui vous permettront d’ajuster votre offre au fur et à mesure que les résultats se feront sentir du côté de la productivité et de la rentabilité. ■
3RVE_2010_mars:3RVE
08/03/10
23:23
Page 27
ASSURANCE
L’EFFET DE LA MOROSITÉ FINANCIÈRE Benoit Payette FPAA, Cim SAGE md Solutions d'assurances générales aux entreprises inc. bpayette@sagemd.ca
sur vos assurances
La crise boursière a directement affecté les revenus de placements des assureurs durant la débâcle du marché financier. C’est qu’habituellement, dans un contexte en croissance, les recettes provenant du placement des primes d’assurances souscrites représentent une source appréciable de revenus. Or, durant une période économique anémique faisant régner un climat insidieux et erratique, l’ensemble des compagnies d’assurance et de réassurance à l’échelle du globe doit s’adapter. À cet effet, les résultats publiés en septembre dernier par Carpenter & cie, firme d’envergure internationale, indiquent que les taux du marché mondial de la réassurance augmenteront en moyenne de 8 % au cours de la prochaine période de renouvellement des contrats. Cette réalité se traduira inévitablement par une augmentation des primes de vos assurances lors de leur renouvellement. Ainsi, depuis la publication des résultats du dernier trimestre de 2008, cette récession historique a eu pour effet d’entraîner une sévère décote pour certains joueurs majeurs du domaine des assurances. De plus, nos assureurs doivent conjuguer avec une croissance marginale des primes, l’augmentation de leurs frais d’exploitation et la hausse des coûts des sinistres. Cette effervescence a donné lieu à une augmentation radicale du nombre de révisions à la baisse des cotes des agences de notation à l’ensemble des intervenants de cette industrie. Ainsi, plongé dans cette tourmente, le gouvernement américain a été contraint de procéder à des injections de capitaux titanesques sans précédent au sein de la compagnie d’assurance AIG pour lui éviter la débâcle. Chez nous, à la lumière des rapports financiers des assureurs qui sont quant à eux étroitement surveillés par notre gouvernement fédéral par l’intermédiaire du Bureau du surintendant des institutions financières (BSIF), l’industrie de l’assurance accuse une perte technique d’environ 35 M$ pour 2008 comparativement à un bénéfice de 1,5 milliard de dollars l’année précédente. La détérioration des résultats de fin d’exercice de 2008 des assureurs pourrait accentuer ce qui était perçu jusqu’à présent comme un resserrement modéré du marché des assurances des entreprises. Il est généralement admis qu’un durcissement progressif du marché des entreprises est en cours, et il vous paraîtra plus concret avec des taux plus élevés et des recommandations plus contraignantes au moment de vos prochains renouvellements.
Votre courtier doit vous informer des autres facteurs constituant des éléments d’appréciation de vos affaires d’assurances. La stabilité financière des assureurs proposés, la constance dans l’approche du règlement des sinistres et l’engagement à long terme quant aux risques associés aux secteurs issus de l’environnement en sont de bons exemples. Il y aura toujours des fournisseurs d’assurances à des taux plus bas dans des conditions de marché moins défavorables. Cependant, votre entreprise pourrait également être la première à voir être modifiées certaines modalités relatives à vos propres conditions de renouvellement lorsque les résultats techniques escomptés ne rejoindront plus les attentes de votre assureur. En définitive, ce scénario ne vous place certainement pas dans une position de négociation avantageuse. Votre courtier se doit donc d’agir avec vigilance en ce qui concerne l’évolution du marché de l’assurance et d’être proactif. Si vous vous retrouvez aux prises avec des décisions financièrement difficiles, vous serez peut-être tenté de réduire l’assurance au point de sous-assurer votre entreprise, ce qui aurait pour effet d’affaiblir davantage sa situation financière en cas de sinistre malencontreusement exclu. La nature même des opérations en matière de gestion de risques environnementaux exige de votre courtier qu’il soit en mesure de maîtriser vos propres risques et de fournir de bons conseils afin d’optimiser le rapport coût/bénéfice de vos primes. C’est dans un tel contexte que l’on appréciera toute l’importance d’une expertise judicieuse en gestion de risques. Avec l’instabilité financière de l’ensemble des différents intervenants, votre gestionnaire de risques a le devoir d’examiner attentivement la force financière et la stabilité des assureurs avec lesquels il compte établir une relation en votre nom. De cette façon, la valeur ajoutée que représentent les rares firmes de courtage en mesure d’offrir de réels services de gestion des risques parce que disposant de services actuariels et d’ingénierie constitueront un atout appréciable dans vos prises de décisions en cette période difficile. ■
Surveiller le bdd
Devant les défis que doit assumer votre gestionnaire de risques, combinés aux contraintes que vous devez également gérer en tant qu’administrateur, vous serez alors tenté de réévaluer vos dépenses afin d’en contrôler l’augmentation.
Ce que vous êtes en droit de vous attendre de votre courtier d’assurance dans ce contexte En matière d’assurance, il subsiste dans l’esprit des chefs d’entreprises un corollaire entre le coût et la valeur. Cette analogie est beaucoup plus obscure en matière de gestion de risques. Le magazine des matières résiduelles au Québec 3RVE VOL. 5 NO 3 HIVER 2010
27
3RVE_2010_mars:3RVE
08/03/10
23:23
Page 28
LE S B O N S C O NTA CTS
STÉPHEN DAVIDSON, ing. Directeur de projets Environnement 1205, rue Ampère, bureau 310 Boucherville (Québec) J4B 7M6 Tél. : 450 655-9640, poste 237 Téléc. : 450 655-7121 stephen.davidson@bpr.ca www.bpr.ca
28
Le magazine des matières résiduelles au Québec 3RVE VOL. 5 NO 3 HIVER 2010
3RVE_2010_mars:3RVE
08/03/10
23:23
Page 29
LE S B O N S C O NTA CTS
organisation d’évènement identité d'entreprise publicité dépliant affiche site Web développement stratégie
Le magazine des matières résiduelles au Québec 3RVE VOL. 5 NO 3 HIVER 2010
29
3RVE_2010_mars:3RVE
08/03/10
23:23
Page 30
L’ E N V E R S D U D É C O R
Sources : Umour.com et l’équipe de 3Rve.
es, ouvell ets n s e j d des su avez Vous ecdotes ou aire part ? des anêt à nous f tout à d’intér parvenir le Faites aya.cc m @ o f in
LES CAMIONS DANS LA PEAU Le 17 décembre dernier, quelque 40 personnes se sont réunies pour souligner le départ à la retraite de leur ami Robert Roberge de Groupe Labrie. Organisé par ses amis Pierre Mercier, Gaétan Bolduc et André Dumouchel, l’événement s’est tenu à la Galerie d’art Séguin-Poirier. L’artiste, M. Bernard Séguin-Poirier, a réalisé une œuvre personnalisée pour le nouveau retraité. Lorsqu’il lui a demandé sur quelle thématique il voulait que soit réalisée l’œuvre, Robert lui a dit : « Un camion avec bras automatisé ! » Comme quoi il aura été passionné par ses produits jusqu’au bout…
DU CHANGEMENT AU CESE Le CESE a dernièrement vu son directeur général partir à la retraite. Ainsi, M. Pierre Lachance a été remplacé par M. Perry Niro. Nous souhaitons remercier chaleureusement M. Lachance pour sa précieuse collaboration et son apport à l’industrie. Nous voulons également féliciter M. Niro pour sa nomination.
L’OR POUR EBI !
UN FRANC SUCCÈS ! La pression sociale…
Le 3R MCDQ tenait récemment son 13e rendez-vous annuel. Le thème de cette année était « Développer des opportunités d’affaires profitables dans le cadre de la nouvelle politique québécoise et du plan d’action 2010-2015 ». Il aura permis à plusieurs centaines d’intervenants de l’industrie de se réunir et d’échanger en plus d’assister à des conférences de qualité. Nous vous invitons à visiter le site Internet de l’association afin de connaître les détails du rendez-vous de l’an prochain. www.3rmcdq.qc.ca
ALLONS À LYON ! La dernière édition du salon Pollutec qui s'est tenue à Paris en décembre dernier a été un grand cru… Cette année, l’important salon international se tiendra du 30 novembre au 3 décembre 2010 à Lyon. Les organisateurs attendent plus de 75 000 visiteurs et 2 400 exposants. Le pays à l’honneur sera le Chili. Nous vous encourageons à participer à l’événement à titre d’exposant ou même de simple visiteur. Vous pouvez obtenir de l’information en écrivant à sylvain.stcyr@export-environnement.com ou sur le site Internet du salon : www.pollutec.com
30
Le magazine des matières résiduelles au Québec 3RVE VOL. 5 NO 3 HIVER 2010
Vous avez probablement suivi les exploits de nos athlètes canadiens à l’occasion des Jeux olympiques de Vancouver. Aussi, à moins de vivre sur une autre planète, vous avez vu la performance magistrale et courageuse de Joannie Rochette en patinage artistique. Peut-être avez-vous reconnu René Sylvestre lorsque la caméra a montré le père de Joannie se réjouir pour sa fille. C’est que René et le groupe EBI commanditent l’athlète depuis de nombreuses années. Nous tenons donc à décerner notre médaille d’or à la famille Sylvestre pour son implication auprès de notre championne.
Le printemps est à nos portes… Le printemps est à nos portes, le golf aussi… Avez-vous réservé votre départ pour le tournoi de golf annuel de votre magazine 3Rve ? Si vous croyez qu’il est trop tôt pour ce faire, détrompez-vous. L’événement est très couru et se déroule à guichet fermé année après année. Encore une fois, il se tiendra au prestigieux Club de golf Glendale. Inscrivez le jeudi 2 septembre à votre agenda et dépêchez-vous de remplir le formulaire d’inscription sur www.maya.cc. Four !
3RVE_2010_mars:3RVE
08/03/10
23:23
Page 31
3RVE_2010_mars:3RVE
08/03/10
23:23
Page C4