3RVE VOL 20 NO 2

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MATREC S'ATTAQUE AUX RÉSIDUS DE CRD

Convention de la poste-publications n o 41122591 Le magazine des matières résiduelles au Québec PRINTEMPS2024, vol. 20, n o 2 www.magazine3rve.cc
24 Les minéraux de la transition énergétique 20 (Re)penser le processus d’autorisation environnementale au Québec 28 Ça va mieux qu’on pense : le balado qui fait du bien REPORTAGE EXCLUSIF

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« À lui seul, le centre de tri réservé aux résidus de CRD sera le plus gros au Québec, et peut-être même le plus gros au Canada. Il pourra traiter jusqu’à 300 000 tonnes de matières par année. »

chroniques

Ce magazine est imprimé sur papier à contenu recyclé.

sur le radar

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SHERBROOKE OEM AU CŒUR DE LA RÉVOLUTION DES RÉSIDUS DE CRD

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Impression

Héon et Nadeau

Le magazine des matières résiduelles au Québec PRINTEMPS2024, vol. 20, n o 2 reportage SOMMAIRE CETEQ (RE)PENSER LE PROCESSUS D’AUTORISATION ENVIR ONNEMENTALE AU QUÉBEC 20 10 CTTÉI LES MINÉRAUX DE LA TRANSITION ÉNERGÉTIQUE 24 ÉCONOMIE CIRCULAIRE L'ÉCONOMIE CIRCULAIRE POUR LE SECTEUR DE LA CONSTRUCTION 26 LE JURIDIQUE LES EXTRANTS DES CENTRES DE TRI DE CRD 32 ÇA VA MIEUX QU’ON PENSE : LE BALADO QUI FAIT DU BIEN 28 ÉCO ENTREPRISES QUÉBEC : UNE PETITE RÉVOLUTION À GRANDE VITESSE 30 DIX ANS DE PRODUCTION DE GNR : RETOUR VERS LE FUTUR AVEC ENVIRO CONNEXIONS 31 ©Tous droits réservés. Droits d’auteur et droits de reproduction : toute demande de reproduction doit être acheminée à MAYA communication et marketing aux coordonnées figurant ci-dessus. Les opinions et les idées contenues dans les articles n’engagent que leurs auteurs. La publication d’annonces et de publicités ne signifie pas que le magazine 3Rve recommande ces produits et services. Convention de la poste-publications n 41122591. Retournez toute correspondance ne pouvant être livrée au Canada aux coordonnées figurant ci-dessus. Dépôt légal : 1 trimestre 2005. ISSN 1712-9117. Le magazine 3Rve est publié trois fois l’an.
LE MAGAZINE DES MATIÈRES RÉSIDUELLES AU QUÉBEC 3RVE VOL. 20, N O 2 PRINTEMPS 2024 4
REPORTAGE
LES AMIS DE 3RVE S LESBONS
33
CONTACTS
LIEN AVEC
8 EN
LE MINISTRE
En marche vers un système de collecte sélective modernisé

Janvier 2024

Lancement de sa marque citoyenne Bac Impact.

Lancement de sa campagne nationale visant à informer, sensibiliser et é duquer l’ensemble de la population.

À venir en 2024

Des outils de communication destinés au public qui seront mis à la disposition des municipalités. Éco Entreprises Québec respecte ses engagements à titre d’organisme de gestion désigné :

De la collecte sélective à l’économie circulaire :

Ensemble pour un monde durable.

Vous avez des questions, nous avons les réponses !

Consultez notre site web au eeq.ca

ou écrivez-nous à modernisation@eeq.ca

LES RÉSIDUS DE CRD:

négligés depuis trop longtemps

Certaines matières résiduelles sont clairement négligées au Québec, et les résidus de construction, de rénovation et de démolition (CRD) en sont un exemple probant.

Cela fait plus de 30 ans que le système de collecte sélective résidentielle des matières recyclables a été mis en place. Le bac bleu est devenu depuis un incontournable des foyers et des ICI québécois. Depuis, les matières qui y sont déposées sont majoritairement récupérées, triées ou valorisées. Pour ce qui est de la filière structurée et efficace vouée à la récupération et à la valorisation des résidus de CRD, elle tarde toujours à voir le jour.

L’enjeu mérite pourtant qu’on s’y attarde. Près de la moitié des 3,5 millions de tonnes de résidus issus du secteur de la construction (bois, ciment, bardeaux d’asphalte, agrégats et autres) a été acheminée directement à l’élimination plutôt que dans un centre de tri, selon le Bilan 2021 de la gestion des matières résiduelles de RECYC-QUÉBEC. C’est beaucoup trop ! Imaginez un instant le tollé si on nous apprenait que la moitié des imprimés, des contenants et des emballages prenait le chemin de l’enfouissement.

Ce qui explique ce triste bilan ? C’est plutôt simple. L’enfouissement des CRD coûte moins cher que toute autre façon d’en disposer, en plus d’être la coutume. Et si rien n’oblige les différents acteurs de la chaîne à agir autrement, le choix n’est pas difficile à faire.

Afin que le recyclage de ces matières soit priorisé, une partie de la solution repose inévitablement sur la mise en place de nouvelles mesures

Un certain nombre de centres de tri de résidus de CRD sont en place au Québec. Mais faute d’un volume suffisant de matières, leur rentabilité est mise à mal. Et, dans la foulée, leur développement, voire leur modernisation, est souvent mis sur la glace.

Ce contexte peu favorable n’a pas empêché Matrec-GFL de sortir des sentiers battus et de miser sur les résidus de CRD en investissant plusieurs millions de dollars dans la construction d’un nouveau centre de tri dans l’est de Montréal. L’entreprise annonce ses couleurs !

Mais pour que le jeu en vaille la chandelle, pour ce propriétaire de centres de tri comme pour les autres, la chaîne de valorisation des résidus de construction doit faire l’objet d’une véritable révolution.

Priorité

L’avenir s’annonce malgré tout prometteur, car le milieu politique est conscient de la problématique. Il semble d’ailleurs vouloir en faire une priorité, comme le souligne dans nos pages le ministre de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs, Benoit Charette.

Autre bonne nouvelle : la présidente-directrice générale de la société de récupération et de recyclage RECYC-QUÉBEC, Emmanuelle Géhin, affirme pour sa part que les acteurs de cette filière sont plus que jamais mobilisés pour trouver des solutions.

Parmi ceux-ci, les entrepreneurs en construction. Ils sont prêts à apporter leur contribution, assure le directeur des affaires publiques et des relations gouvernementales de la Corporation des entrepreneurs généraux du Québec, David Dinelle.

André Dumouchel adumouchel@maya.cc

Le dépôt d’un plan de match est attendu prochainement. La mise en application des mesures s’échelonnera peut-être sur quelques années. Mais il est plus important que jamais de joindre le geste à la parole.

Dans cet esprit, pourquoi d’ailleurs ne pas s’inspirer de la collecte sélective des matières recyclables, qui fait actuellement l’objet d’une modernisation ?

Quand verra-t-on la mise en place d’un organisme sans but lucratif, semblable à Éco Entreprises Québec, organisme de gestion désigné responsable de la collecte sélective, mais expressément pour les résidus de CRD ?

La responsabilité élargie des producteurs (REP), ce principe selon lequel les entreprises qui mettent sur le marché des produits au Québec doivent les récupérer et les gérer en fin de vie, s’applique à un nombre croissant de catégories de produits. Les piles et les batteries, les appareils ménagers et de climatisation ainsi que les appareils électroniques font partie de la liste.

Une REP sur les matériaux de construction et de rénovation comporterait à mon avis de nombreux avantages. En favorisant l’économie circulaire, les débouchés pour les différents résidus seront sûrement appelés à se multiplier.

Bref, assurément un dossier à suivre. n

ÉDITORIAL Ce texte vous fait réagir? Faites-nous part de vos commentaires en écrivant à info@magazine3rve.cc LE MAGAZINE DES MATIÈRES RÉSIDUELLES AU QUÉBEC 3RVE VOL. 20, N O 2 PRINTEMPS 2024 6

PARTAGER LES CONNAISSANCES ET FAIRE RAYONNER LES INITIATIVES

Benoit Charette

Ministre de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs, ministre responsable de la région des Laurentides

Cette année, le magazine 3RVE fête ses 20 ans. C’est une belle occasion de souligner la contribution des nombreux spécialistes qui ont participé à faire évoluer positivement l’industrie des matières résiduelles au Québec au cours des deux dernières décennies, notamment en partageant leur expertise à travers les pages de cette publication unique.

À pareille date l’an dernier, j’y saluais, entre autres, les efforts déployés ces dernières années pour moderniser les systèmes de consigne et de collecte sélective. Bien qu’il reste du travail à faire pour concrétiser tous les aspects de ces importantes réformes, déjà, nous pouvons être fiers des avancées réalisées pour améliorer ces chaînes de valeur et réduire l’élimination des matières.

Dans les années à venir, un des secteurs prioritaires est celui de la construction, de la rénovation et de la démolition, qui est un grand générateur de matières résiduelles au Québec, dont une part encore trop importante va à l’élimination. Par l’entremise de sa Stratégie gouvernementale de développement durable 2023-2028, le gouvernement du Québec compte montrer l’exemple en ce qui concerne l’écogestion des résidus de chantiers pour les bâtiments publics. Par exemple, dans les contrats publics, des conditions et des critères d’écoresponsabilité visant la récupération, le recyclage et la traçabilité des matériaux sont maintenant ajoutés, lorsque cela est possible.

Cette stratégie est complémentaire à la Stratégie de valorisation de la matière organique, dans le cadre de laquelle plusieurs actions ont été réalisées depuis 2020 pour relever les défis touchant la mise en valeur de certaines matières, dont le bois, qui se retrouvent dans les résidus de construction, de rénovation ou de démolition (ex. : peu de tri à la source et contamination des matériaux, peu de débouchés pour les matières triées, valorisation peu concurrentielle versus élimination). Avec les investissements importants consentis ces dernières années pour créer le réseau d’écocentres de récupération du bois, améliorer

le tri à la source et moderniser les centres de tri, et avec les réflexions du comité d’experts visant à proposer d’autres actions concrètes à réaliser prochainement, nous sommes sur la bonne voie pour que ce secteur contribue pleinement à la transformation en cours au Québec.

D’autres leviers financiers, stratégiques et juridiques se sont également ajoutés cette année aux incitatifs existants. Par exemple, la Loi sur la performance environnementale des bâtiments et modifiant diverses dispositions en matière de transition énergétique vient tout juste d’être adoptée. Elle vise à améliorer la performance environnementale de tous les bâtiments afin de réduire leur consommation d’énergie et leurs émissions de gaz à effet de serre, et ce, de leur conception à leur déconstruction ou leur démolition. L’État souhaite aussi faire preuve d’exemplarité dans ce domaine. C’est pourquoi des travaux importants de rénovation sont à prévoir d’ici 2030 afin que les infrastructures publiques concourent à l’atteinte des objectifs climatiques. Ces projets sont autant d’occasions de mettre en valeur notre patrimoine bâti, de développer nos savoir-faire et de participer à la transformation de l’économie québécoise.

En terminant, je suis fier que notre gouvernement s’engage auprès de partenaires comme les éditeurs et les collaborateurs de ce magazine, qui contribuent à partager les connaissances et à faire rayonner les initiatives porteuses dans un domaine essentiel à la transition économique en cours. La feuille de route en économie circulaire sera d’ailleurs notre nouveau levier stratégique dans ce domaine. L’amélioration de notre indice de circularité est une autre priorité du Québec, pour laquelle l’industrie de la gestion des matières résiduelles est appelée à se mobiliser activement dans les années à venir, et je l’en remercie. n

EN LIEN AVEC LE MINISTRE LE MAGAZINE DES MATIÈRES RÉSIDUELLES AU QUÉBEC 3RVE VOL. 20 N O 2 PRINTEMPS 2024 8

MATREC S'ATTAQUE AUX RÉSIDUS DE CRD

Marie-France Létourneau Collaboration spéciale

L’importance de s’attaquer aux résidus de construction, de rénovation et de démolition (CRD) et d’en détourner le plus possible des sites d’enfouissement n’est plus à démontrer. Le dossier est même loin d’être nouveau. Mais pour y arriver, tous les acteurs de cette filière devront mettre la main à la pâte, estime la présidente-directrice générale de RECYC-QUÉBEC, Emmanuelle Géhin.

Un défi de taille, reconnaît-elle. Mais les choses sont appelées à bouger prochainement.

« On est en mode solutions, affirme M me Géhin. Et je pense que le marché est prêt à poser des gestes. »

Elle rappelle qu’un comité d’experts a été mis sur pied en 2022, à la demande du gouvernement. Il a d’emblée été recommandé de mettre en place des modifications réglementaires « pour encourager les acteurs autres que [ceux de] l’enfouissement à créer une filière solide ».

Et le plan de match devrait se préciser, car le dépôt d’un rapport détaillé est attendu d’une semaine à l’autre au moment d’écrire ces lignes.

« J’ai bien hâte de voir cette feuille de route », affirme Martin Létourneau, directeur à la Direction

générale des politiques en milieu terrestre au ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs (MELCCFP).

Selon les données de RECYC-QUÉBEC, pas moins de 3,5 millions de tonnes de résidus de CRD ont été générées dans la province en 2021. Du lot, un peu moins de la moitié a pris le chemin du centre de tri et le reste a été envoyé au site d’enfouissement, une solution moins coûteuse pour les générateurs de matières. D’où l’importance d’agir pour renverser la tendance.

Un rôle clé pour les centres de tri

S’il n’en tient qu’à Kevin Morin, directeur général du Conseil des entreprises en technologies

environnementales du Québec (CETEQ), les centres de tri pour résidus de CRD sont appelés à jouer un rôle clé pour l’atteinte de cet objectif.

Des gestes concrets doivent être posés afin que l’option du recyclage soit plus attrayante d’un point de vue économique, ce qui n’est pas le cas actuellement. Dans cet esprit, le CETEQ croit encore que l’augmentation des coûts d’élimination des résidus de CRD doit être mise en œuvre.

« On table sur cette action-là, mais on travaille aussi pour la réalisation d’autres mesures qui visent toutes à ce que le recyclage soit plus compétitif, comparativement à l’élimination, dit M. Morin. C’est avec ça qu’on va y arriver. »

Dans ce contexte, les orientations qui seront privilégiées à la suite du dépôt du rapport du comité

REPORTAGE
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d’experts sont attendues avec impatience. Dans un monde idéal, le gouvernement annoncera « ses couleurs » plus tôt que tard, souhaite le directeur général du CETEQ.

Selon lui, l’incertitude actuelle freine des projets d’investissement, voire de modernisation, dans certains centres de tri de résidus de CRD, car l’approvisionnement des matières premières doit être au rendez-vous pour assurer la rentabilité des exploitations. Kevin Morin dit également vouloir éviter la fermeture de centres de tri.

Bouquets de mesures

Selon la PDG de RECYC-QUÉBEC, Emmanuelle Géhin, un « mix » de mesures devrait pouvoir être mis en place.

En plus des mesures réglementaires attendues, il serait par exemple possible d’envisager que les contrats des grands donneurs d’ordres soient dotés de clauses spécifiques à la disposition des résidus de CRD. Davantage d’informations pourraient en outre être partagées sur les chantiers.

« Ce sont des mesures qu’on connaît déjà et qu’on sait qu’on doit appliquer, précise Mme Géhin. Mais on veut vraiment se donner une feuille de route pour coordonner la mise en œuvre de ces actions. »

Tout se mettra en place de façon graduelle, précise néanmoins Martin Létourneau du MELCCFP. Selon

lui, les volets environnemental, social et économique représentent les trois piliers incontournables sur lesquels s’appuie le développement durable.

« Avec les quantités de matières dont on parle, 3,5 millions de tonnes, ce sont des centaines de millions de dollars qui sont en jeu, dit-il. Les décisions que le gouvernement pourrait prendre vont avoir d’importantes répercussions économiques, environnementales et sociales. »

« Il faut s’assurer que les solutions qu’on met en place le soient de façon graduelle pour ne pas avoir de chocs tarifaires et que l’industrie soit prête, ajoute M. Létourneau. […] Si, du jour au lendemain, on dit que tout doit être trié, il faut avoir les infrastructures [les centres de tri] pour prendre cette matière-là. »

Prêts à bouger

Plusieurs acteurs sont prêts à participer aux changements souhaités. C’est entre autres le cas de la Corporation des entrepreneurs généraux du Québec (CEGQ), dont les membres réalisent 85 % des projets institutionnels, commerciaux et industriels dans la province.

« On regarde le bilan annuel de RECYC-QUÉBEC en matière de résidus de CRD et ça continue à monter d’une année à l’autre. Les membres cherchent de plus en plus des façons de faire pour éviter cette situation », affirme le directeur des

MATREC Y CROIT ET INVESTIT

affaires publiques des relations gouvernementales de la CEGQ, David Dinelle.

Selon lui, la CEGQ a mis sur pied un comité interne à l’automne 2023 pour permettre aux membres de s’exprimer et de s’informer sur le sujet. La Corporation fait également partie du comité d’experts formé par RECYC-QUÉBEC.

« Je suis convaincu que ça va changer tranquillement, surtout si on accompagne les gens et [qu’]on leur offre de l’aide et de la formation », dit M. Dinelle.

Alors que certains réclament une exemplarité de l’État, le gouvernement dit s’être doté de normes « d’écogestion ». Certaines villes sont également prêtes à bouger.

Pour l’heure, il y a néanmoins des inégalités dans les « écosystèmes territoriaux », souligne Emmanuelle Géhin. Certaines régions sont moins bien organisées que d’autres. « Dans un monde idéal, on ne veut pas que la matière voyage, dit-elle. On ne veut pas que du bois qu’on récupère, par exemple, à Saguenay aille se faire trier à Québec. »

Martin Létourneau dit par ailleurs rêver du jour où le mot démolition sera remplacé par le mot « déconstruction ». Cela permettra une meilleure gestion des résidus de CRD.

Bien qu’il y ait encore beaucoup à faire pour optimiser la gestion environnementale des résidus de CRD, l’entreprise

Matrec a pour sa part décidé d’envoyer un signal fort. Elle a investi plusieurs dizaines de millions de dollars pour reconstruire son centre de tri de Montréal-Est, ravagé par les flammes en juin 2022.

« La direction locale a beaucoup de latitude. Mais j’ai dû vendre le projet»

— Yazan Kano, vice-président stratégie pour l’est du Canada chez Matrec

REPORTAGE LE MAGAZINE DES MATIÈRES RÉSIDUELLES AU QUÉBEC 3RVE VOL. 20 N O 2 PRINTEMPS 2024 11

La cause du sinistre n’a pas officiellement été identifiée. Toutefois, la présence de produits non destinés au recyclage, dont du chlore et des batteries lithium-ions, pourrait être à l’origine de l’incendie. Quelque 150 pompiers ont combattu les flammes durant de longues heures.

« L’incendie nous a donné la possibilité de dire : qu’est-ce qu’on fait ?, explique Yazan Kano, vice-président stratégie pour l’est du Canada chez Matrec, une division de GFL Environmental. On a décidé de réinvestir dans les CRD. »

« C’est un domaine difficile financièrement au Québec parce que la réglementation est actuellement déphasée de la réalité, ajoute-t-il. On fait concurrence à l’enfouissement, qui est beaucoup moins dispendieux. Il faut y croire pour faire un projet comme ça. Et j’y crois depuis longtemps. »

M. Kano dit être à l’origine de l’ouverture des deux premiers centres de tri de résidus de CRD au Québec, en 2012 : l’un à Saint-Hyacinthe, l’autre à Pierrefonds, tous deux acquis depuis par Matrec. Le premier est toujours en activité, contrairement au deuxième. Ce dernier a été fermé il y a quelques années en même temps que le site d’enfouissement qui se trouvait sur place.

Yazan Kano reconnaît malgré tout que la partie n’était pas gagnée d’avance pour la réalisation du projet dans l’est de Montréal, sur la rue Sherbrooke Est. « La direction locale a beaucoup de latitude. Mais j’ai dû vendre le projet, confirme-t-il. On [Matrec-GFL] s’est construit sur des stratégies d'économie circulaire. Ça rentre dans l’ADN de la compagnie. »

La gestion des matières résiduelles (collecte sélective, CRD, matières organiques et compostables), des matières dangereuses et des sols contaminés ainsi que l’exploitation de sites d’enfouissement font partie des services offerts par Matrec-GFL.

« Sans prétention, on doit être la compagnie la plus verticalement intégrée et la plus diversifiée en termes d’environnement, avec l’enfouissement et surtout les autres solutions alternatives », avance M. Kano.

Cette diversification de l’entreprise lui permet, pour l’heure, de rentabiliser l’investissement lié au nouveau centre de tri, dont les activités ont pleinement démarré à la mi-avril 2024. Le projet a profité d’une subvention de 500 000 $ de RECYC-QUÉBECpour l’acquisition d’équipements de tri.

À long terme, le gestionnaire de Matrec dit y voir un potentiel important, ne serait-ce que pour la biomasse, issue des matériaux de construction.

Selon Yazan Kano, outre l’augmentation des redevances à l’enfouissement, il importe malgré tout que des mesures soient mises en place pour favoriser davantage le tri des résidus de CRD. « Il faudrait que les matières de CRD non triées soient bannies des sites d’enfouissement », dit-il.

« Je pense que les promoteurs de construction vont aussi devoir augmenter leurs standards de sélection de transporteurs et de gestion des déchets de construction, ajoute-t-il. […] Il faudrait qu’ils puissent s’assurer que le fournisseur de conteneurs dirige les matériaux ramassés vers des centres de tri certifiés par RECYC-QUÉBEC. »

Une traçabilité des matières est souhaitée, relèvent certains intervenants sondés dans le cadre de ce reportage, pour mettre fin au marché parallèle observé. Des matériaux sont encore entreposés ou éliminés dans des sites illégaux.

RECYC-QUÉBECa mis en place un programme de reconnaissance des centres de tri de résidus de CRD. Actuellement, une quinzaine d’installations de ce type sont reconnues en vertu du programme.

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« On est partout au Canada et aux États-Unis, relève le dirigeant de Matrec. Mais, comme on favorise l’économie circulaire, on privilégie les fabricants québécois pour nos installations. »

De son côté, Matrec exploite neuf centres de tri de résidus de CRD.

« C’est un secteur qui a besoin d’être modernisé et d’être secoué un peu », résume le vice-président des affaires publiques et du développement durable à Matrec, Richard Mimeau.

Ce dernier dit vouer beaucoup de respect à Yazan Kano. Il l’a connu alors que tous deux travaillaient au sein du CETEQ. « Je le regardais aller et je le trouvais inspirant, dit M. Mimeau. Il a de bonnes idées. C’est un développeur et il est innovateur. »

Expertise québécoise

Selon M. Kano, le nouveau centre de tri de résidus de CRD à MontréalEst fait partie d’un imposant complexe environnemental d’un million de pieds carrés, où un nouveau centre de tri pour les matières recyclables est également en construction. La mise en activité de ce dernier est prévue au début de l'année 2025.

Avec ces installations, l’est de l’île de Montréal est appelé à devenir une « plaque tournante de l’économie verte », avait souligné M. Kano l’an dernier.

À lui seul, le centre de tri réservé aux résidus de CRD sera « le plus gros au Québec, et peut-être même le plus gros au Canada », avance-t-il. Il pourra traiter jusqu’à 300 000 tonnes de matières par année.

Dans le cadre de l’élaboration des plans de l’endroit, M. Kano explique avoir visité différents centres de tri, dont certains aux États-Unis. Il a travaillé sur le projet montréalais avec le vice-président régional de Matrec, David Gendreau, et le consultant Frédéric Fortin.

Le centre de tri adapté aux besoins de Matrec-GFL a ainsi pris forme. Un fabricant québécois, Sherbrooke OEM, a été retenu pour la fourniture des équipements. « On est partout au Canada et aux États-Unis, relève le dirigeant

de Matrec. Mais, comme on favorise l’économie circulaire, on privilégie les fabricants québécois pour nos installations. C’est avec cette vision que le centre de tri adapté aux besoins de Matrec-GFL a pris forme. Un fabricant québécois, Sherbrooke OEM, a été retenu pour la fourniture des équipements. »

Pour l’heure, les équipements du nouveau centre de tri sont davantage d’ordre mécanique que technologique. Contrairement aux centres de tri de matières issues de la collecte sélective, les robots n’y ont pas encore leur place. Mais les avancées en la matière sont très rapides et la technologie fera bientôt son entrée.

Tout sera prêt aux installations de Montréal-Est le moment venu. « Le centre de tri [pour les résidus de CRD] a été construit pour ajouter des équipements technologiques dans d’autres phases », dit M. Kano.

Résumé simplement, disons que l’endroit est équipé de convoyeurs heavy duty, de plusieurs types de séparateurs de matières, de tamis et d’autres équipements magnétiques.

Selon Richard Mimeau, ce nouveau centre de tri se distingue toutefois de tous les autres centres de tri québécois par l’ampleur des installations. « C’est possiblement avant-gardiste parce que les autres centres de tri sont plus petits, dit-il. Les gens sont impressionnés quand ils viennent ici, à Montréal-Est. »

« Le premier convoyeur qui monte avec les matières qui y sont déposées par une grue, c’est un peu comme le manège Le Monstre, à La Ronde », illustre avec amusement le vice-président des affaires publiques et du développement durable chez Matrec.

« Après, la matière se met à descendre et le convoyeur shake , explique Richard Mimeau. Les petits morceaux tombent dans certains espaces et s’en vont vers une autre ligne. En cours de route, le métal est aspiré et les autres morceaux s’en vont. Le bois prend une direction, les agrégats, une autre, et ainsi de suite. »

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Dans le processus, des trieurs terminent à la main le travail de séparation des résidus de CRD. L’endroit compte environ 70 employés.

Actuellement, une bonne partie des matières récupérées (agrégats, bois, verre, métaux) est acheminée vers les filières du recyclage et de la valorisation énergétique. Yazan Kano est cependant persuadé que les débouchés seront appelés à augmenter dès que le secteur des résidus de CRD sera mieux encadré.

« Si le passage par les centres de tri devient obligatoire, il va y avoir plus de volume, calcule le dirigeant de Matrec. Et je crois beaucoup en la créativité québécoise. Elle va savoir trouver de nouvelles façons de traiter ces matières-là et de les recycler. Toutefois, le volume est actuellement insuffisant pour faire ce travail de R&D. »

Construction par étapes

Détail important : la construction du nouveau centre de tri de résidus de CRD de Montréal-Est

n’a pas occasionné de bris de services, se félicite M. Kano. La construction des nouvelles installations a été réalisée par étapes, dit-il.

Dans les faits, le bâtiment qui accueillait le centre de tri avant l’incendie était situé sur une propriété de Matrec-GFL où se trouvent également deux autres immeubles, aux allures de hangars.

Rapidement, tout a été mis en œuvre pour utiliser l’un de ces bâtiments afin de continuer à honorer les contrats en cours et de traiter les matières provenant du grand Montréal, des écocentres ainsi que des différents entrepreneurs. Les installations n’étant toutefois pas optimales au départ, seule une première séparation des résidus était réalisée sur place.

« C’était un tri minimal, explique Yazan Kano. Les équipements lourds enlevaient les gros morceaux, les rejets qui ne sont pas triables, et la matière recyclable était envoyée dans nos autres centres de tri, dont à Saint-Hyacinthe et à Argenteuil, pour pouvoir les récupérer. »

Les nouvelles lignes de tri – quatre au total – ont ainsi été installées et mises en activité de façon graduelle au cours des derniers mois. Déjà, après l’installation de la première ligne, la capacité de tri excédait celle d’autres centres de tri québécois, note Richard Mimeau.

Avec la mise en marche du nouveau centre de tri de Montréal-Est, et l’investissement majeur qu’il a entraîné, Yazan Kano affirme que les attentes sont élevées. Il souhaite que les astres soient bien alignés cette fois-ci pour la mise en place d’une filière solide dans ce secteur.

« Si, après ce projet-là, on ne réussit pas à faire quelque chose d’extraordinaire, je vais peut-être arrêter d’y croire », fait-il valoir sans détour. n

« Je crois beaucoup en la créativité québécoise. Elle va savoir trouver de nouvelles façons de traiter ces matières-là et de les recycler. Toutefois, le volume est actuellement insuffisant pour faire ce travail de R&D. »

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REPORTAGE
LE MAGAZINE DES MATIÈRES RÉSIDUELLES AU QUÉBEC 3RVE VOL. 20 N O 2 PRINTEMPS 2024

SHERBROOKEOEM

AU CŒUR DE LA RÉVOLUTION DES RÉSIDUS DE CRD

Le manufacturier d’équipements de recyclage Sherbrooke OEM n’a pas attendu le dépôt du plan québécois visant à encadrer davantage le recyclage et la valorisation des résidus de construction, de rénovation et de démolition (CRD) pour s’imposer parmi les joueurs incontournables de cette filière.

Non seulement Sherbrooke OEM (sigle de OriginalEquipmentManufacturer) est bien implantée aux États-Unis, où la réglementation est plus sévère pour la gestion des résidus de CRD, mais l’entreprise a récemment mis la touche finale à un projet d’importance au Québec.

Elle a conçu, fabriqué et installé les équipements du nouveau centre de tri de résidus de CRD de Matrec-GFL, à Montréal-Est.

Matrec, une division de GFL Environmental, a en effet investi plusieurs millions de dollars pour reconstruire son centre de tri de la rue Sherbrooke Est, rasé par un violent incendie en 2022. Ce faisant, l’entreprise environnementale a donné un signal clair sur l’importance qu’elle accorde à la valorisation des matières résiduelles issues de la construction.

Il s’agit d’un projet unique pour le marché québécois, estime le propriétaire et président de Sherbrooke OEM, Alain Brasseur. Les nouvelles installations montréalaises se distinguent de la majorité des centres pour résidus de CRD de la Belle Province par leur capacité de tri accrue et leurs équipements à la fine pointe de la technologie. Pouvant traiter jusqu’à 300 000 tonnes de matières par année, le nouveau centre de tri de Montréal-Est sera le plus imposant du genre au Québec.

Selon Alain Brasseur, les premiers centres de tri québécois de résidus de CRD ont fait leur apparition autour de 2005. Leur capacité de tri était plutôt modeste à l’époque. « C’étaient de petites usines de 20, 25 tonnes à l’heure, 100 % manuelles,

et avec peu d’infrastructures », explique le grand patron du manufacturier québécois. Avec leur capacité de tri de 100 tonnes de résidus de CRD à l’heure, les nouvelles installations montréalaises sortent assurément du lot. « Cette usine est vraiment la première à faire du gros débit », souligne-t-il. Selon lui, son client a littéralement troqué une bicyclette pour une voiture de « Formule 1 ».

Mission valorisation

Quelque 3,5 millions de tonnes de résidus de CRD ont été générées dans la province en 2021, selon les données de RECYC-QUÉBEC. Près de la moitié des matières a pris le chemin du centre de tri, tandis que le reste a été envoyé au site d’enfouissement, une solution moins coûteuse pour les générateurs de matières.

« L’approvisionnement n’est pas un problème, analyse Alain Brasseur. J’ai vu les rapports de RECYC-QUÉBEC. Ça fait trois ans qu’on jette près d’un million de tonnes de bois à l’enfouissement. C’est le niveau de valorisation pour chacune des matières qui est difficile à atteindre », ajoute-t-il.

À ce sujet, au moment d’écrire ces lignes, le rapport d’un comité d’experts mis en place par RECYC-QUÉBEC en 2022, à la demande du gouvernement, est attendu d’une semaine à l’autre. Les objectifs : mettre en place différentes mesures pour renverser la tendance et valoriser une plus grande proportion de résidus de construction, de rénovation et de démolition.

REPORTAGE LE MAGAZINE DES MATIÈRES RÉSIDUELLES AU QUÉBEC 3RVE VOL. 20 N O 2 PRINTEMPS 2024 16
Marie-France Létourneau Collaboration spéciale

Alain Brasseur est convaincu que Matrec-GFL peut désormais tirer son épingle du jeu avec ses nouvelles installations de Montréal-Est. La variété et la qualité des matières triées sont grandement bonifiées avec les équipements en place, dit-il.

CRD et autres

Cofondée en 1997 par Alain Brasseur, Sherbrooke OEM n’évolue pas que dans le secteur des résidus de CRD. L’entreprise fabrique également différents types d’équipements de recyclage, dont ceux voués à la collecte sélective. Pas moins de 80 % du chiffre d’affaires de l’entreprise est réalisé aux États-Unis.

La proportion des projets de Sherbrooke OEM liée aux résidus de CRD varie d’une année à l’autre. Ce segment d’activités a cependant rempli une bonne partie du carnet de commandes de la PME en 2023 : elle a réalisé des projets dans 10 centres de tri en Floride au cours de cette seule année.

L’entreprise sherbrookoise est active dans le Sunshine State depuis près de 25 ans. Les centres de tri de résidus de CRD y sont devenus incontournables, car cette partie des États-Unis est fréquemment frappée par des catastrophes naturelles.

Sherbrooke OEM est d’ailleurs bien enracinée en Floride, avec la présence d’OEM Florida.

Alain Brasseur y passe désormais plusieurs mois par année.

La réglementation en matière de recyclage et de valorisation des CRD y est beaucoup plus stricte qu’au Québec, souligne de son côté le viceprésident aux ventes de l’entreprise sherbrookoise, Ian Levasseur.

« Du côté américain, il y a de moins en moins de sites d’enfouissement, dit-il. Même si ce n’est pas dans tous les États, il y a aussi de la législation qui oblige à passer par un centre de tri, par exemple quand on démolit un bâtiment. »

Pour le moment, l’entreprise est surtout active sur la côte est américaine. Et elle ne manque pas de travail. Selon Alain Brasseur, cinq manufacturiers, y compris Sherbrooke OEM, se partagent le marché nord-américain.

« C’est peu de joueurs pour l’Amérique, calcule-t-il. C’est un immense marché, en ébullition. Les gens veulent toujours faire mieux. Mais la croissance de ce marché-là est actuellement limitée par la capacité de manufacturer. »

Le carnet de commandes de Sherbrooke OEM, dont le chiffre d’affaires demeure confidentiel, est éloquent à ce sujet. Il est rempli jusqu’à la mi 2025.

L’entreprise, qui compte une centaine d’employés, a par ailleurs développé au fil du temps des partenariats avec d’autres entreprises pour la conception de certains équipements. « J’ai, par exemple, un partenariat avec une entreprise coréenne pour développer sur mesure nos propres équipements magnétiques afin de servir le marché nord-américain », explique Ian Levasseur.

Un endroit qui répond aux besoins

Ian Levasseur souligne que le nouveau centre de tri de résidus de CRD de Montréal-Est fera office de vitrine technologique au Québec pour le manufacturier d’équipements de recyclage.

« On s’améliore à chaque usine qu’on fait, dit-il. Et on s’inspire toujours de la dernière pour travailler sur la prochaine. »

À preuve, dans le cadre de la préparation de leur plus récent centre de tri, des dirigeants de Matrec se sont rendus en Floride, où la PME des Cantonsde-l’Est a réalisé plusieurs projets au cours des dernières années.

Les options offertes par les concurrents de Sherbrooke OEM aux États-Unis ont été analysées dans la foulée. Mais les avantages liés à la proximité du manufacturier québécois ont, semble-t-il, contribué

« Ce qui distingue le projet de Montréal Est de l’usine traditionnelle, ce sont la qualité et la variété des matériaux qui vont en sortir. »

Alain Brasseur, président de Sherbrooke OEM

REPORTAGE LE MAGAZINE DES MATIÈRES RÉSIDUELLES AU QUÉBEC 3RVE VOL. 20 N O 2 PRINTEMPS 2024 17

à faire pencher la balance du côté de ce dernier pour le projet de Montréal-Est.

En cours de route, Sherbrooke OEM a également convaincu son client québécois d’opter pour une usine à gros volume, à l’instar de celles désormais aménagées au sud de la frontière. Parmi les avantages : le taux de récupération des matières « nettement supérieur » atteint avec pratiquement le même nombre d’employés, souligne Alain Brasseur.

Selon lui, ce sont désormais 80 % des résidus de CRD qui peuvent, au bout du compte, avoir une deuxième vie, contrairement à 45 % avec une usine à plus petit volume.

« À 100 tonnes à l’heure, tu peux installer des équipements, comme des tamis vibrants et autres séparateurs aérauliques, qui peuvent faire la séparation des fines [NDLR : résidus fins ou poussiéreux issus de la construction, de la rénovation et de la démolition] et des petits agrégats. Mais à 25 tonnes à l’heure, ça ne se rentabilise jamais », dit-il.

Autrement dit, « ce n'est pas économiquement viable d'extraire les agrégats de la portion mesurant deux pouces ou moins si le volume n’est que d’une tonne par heure. Cependant, la situation change radicalement lorsque ce volume passe à 50 tonnes par heure », illustre le président de Sherbrooke OEM.

Qualité et variété

Détail technique : l’installation des nouveaux équipements dans l’usine de la rue Sherbrooke Est a été réalisée par étapes au cours des derniers mois. Quatre lignes de tri y ont été mises en fonction l’une après l’autre, de façon graduelle. L’ensemble des équipements y est désormais à l’œuvre depuis la mi-avril 2024.

Pour le moment, les équipements du centre de tri de Montréal sont davantage mécaniques que technologiques. Le travail de tri est achevé manuellement par les 70 employés de l’endroit.

L’usine a néanmoins été conçue et aménagée pour que des équipements technologiques y soient ajoutés lors d’autres phases. Une décision éclairée, car les progrès en matière d’automatisation, particulièrement avec l’intelligence artificielle, se sont accélérés au cours de la dernière année, fait remarquer Alain Brasseur.

Pour l’heure, les camions de transports déposent les résidus de CRD en vrac à l’entrée du centre de tri. Une grue se charge de retirer les gros morceaux qui ne peuvent être valorisés, comme les toiles et les encombrants. Le reste des matières est ensuite déposé sur une ligne de tri.

Durant leur parcours sur un long convoyeur, et sous l’impulsion de différents types d’équipements (séparateurs, trieuses automatiques, tamis vibrants, etc.), les matériaux (agrégats, bois, plastiques, bardeaux d’asphalte, matériaux ferreux et non ferreux, cartons et papiers et déchets divers) prennent différentes directions, selon leur taille et leurs caractéristiques.

« Ce qui distingue le projet de Montréal Est de l’usine traditionnelle, ce sont la qualité et la variété des matériaux qui vont en sortir, explique Alain Brasseur. Plusieurs variétés de bois vont pouvoir y être triées. Les fines seront également valorisées. »

Ce modèle d’usine pour les résidus de CRD aménagé au Québec est appelé à devenir « la norme » au Canada, selon M. Brasseur.

Révolution de l’IA

Selon Ian Levasseur, l’ajout de l’intelligence artificielle aux systèmes de tri optique, qui fonctionnent à l’infrarouge à l’heure actuelle, est par ailleurs sur le point de révolutionner les activités des centres de tri.

Et Sherbrooke OEM est aux premières loges de cette révolution grâce à Eagle Vizion, une entreprise dont Alain Brasseur est actionnaire. Eagle Vizion

REPORTAGE LE MAGAZINE DES MATIÈRES RÉSIDUELLES AU QUÉBEC 3RVE VOL. 20 N O 2 PRINTEMPS 2024 18

est justement spécialisée dans le développement de technologies de tri optique.

« Les avancées qu’on a faites dans la dernière année et demie sont plus grandes que tout ce qu’on a réalisé depuis 30 ans », s’enthousiasme Alain Brasseur.

« Avec l’intelligence artificielle, on peut faire beaucoup plus de choses pour le CRD qu’avec l’infrarouge, explique de son côté Ian Levasseur. Ce qu’on peut distinguer avec l’œil humain, on peut le faire avec l’IA. Et on est en plein là-dedans. »

Avec l’intelligence artificielle, le bois, l’une des principales matières des résidus de CRD au Québec, pourra par exemple être réparti selon son grade.

« Les différents types de bois pourront aussi être identifiés, comme le plywood ou les panneaux gaufrés, avance M. Levasseur. Présentement, la chose hot pour ceux qui travaillent dans les [résidus de] CRD, c’est d’essayer d’intégrer l’intelligence artificielle pour diminuer la main-d’œuvre. »

Selon le vice-président aux ventes de Sherbrooke OEM, l’intelligence artificielle commence par ailleurs à faire son entrée dans les centres de tri de

collectes sélectives, où des robots trieurs fonctionnant à l’infrarouge sont déjà à l’œuvre depuis quelques années.

Éventuellement, « les postes de trieurs dans les centres de tri pourraient être appelés à disparaître »,estime M. Brasseur. C’est un grand vent de changement qui s’en vient », laisse-t-il tomber.

Une première « console », essentiellement une caméra à laquelle est intégrée l’IA développée par Eagle Vizion, sera d’ailleurs prochainement installée en Floride dans l’une des usines où Sherbrooke OEM a des équipements.

Une base de données sera constituée dans un premier temps afin d’identifier le matériel, selon des

critères de couleurs, de textures et de composition. Ces informations permettront, dans un deuxième temps, de peaufiner les activités de tri.

Dans les faits, les contrôles de qualité, actuellement réalisés par des trieurs, pourront être assurés par l’intelligence artificielle, précise Alain Brasseur.

Pour la petite histoire, M. Brasseur a cofondé Sherbrooke OEM avec un partenaire américain, Bryan Sinram. Mais il en est désormais l’unique propriétaire. La relève semble néanmoins assurée, puisque ses quatre enfants travaillent au sein de l’entreprise. Deux d’entre eux font d’ailleurs partie de l’équipe de direction. n

LE MAGAZINE DES MATIÈRES RÉSIDUELLES AU QUÉBEC 3RVE VOL. 20 N O 2 PRINTEMPS 2024 19 REPORTAGE
Waste Management, Miami

n début d’année, le ministère de l'Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs (MELCCFP) a évité à l’entreprise Northvolt le processus du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) pour son projet, par crainte de le voir s’implanter ailleurs. Cet aveu, qui est lourd de sens, met en lumière un enjeu vécu à divers degrés par des dizaines d’entreprises membres du Conseil des entreprises en technologies environnementales du Québec (CETEQ) : celui de la lourdeur de la procédure d’autorisation environnementale.

Les longs délais d’attente pour obtenir une autorisation environnementale freinent les entreprises qui souhaitent bâtir une économie plus verte et plus prospère. Pourtant, le processus d’autorisation fait partie des avantages concurrentiels qui peuvent faire pencher la balance lorsque les investisseurs sont à la recherche d’un secteur pour s’établir. Ceux qui ont un processus d’autorisation efficace, prévisible et minutieux créent un climat d’affaires compétitif et encouragent le développement de projets qui mettent l’acceptabilité sociale au cœur de leur conception.

UN OPTIMISME DÉCONSTRUIT

Devant la lenteur d’analyse des autorisations environnementales, le MELCCFP a entrepris en 2020 de décongestionner le chemin des autorisations. Il a alors cocréé, avec les intervenants du milieu, un régime basé sur le risque environnemental. À l’époque, le CETEQ avait salué l’initiative puisque sur papier, nous avions des raisons de croire que cette nouvelle mouture insufflerait un vent d’optimisme chez nos membres.

On parlait alors d’une meilleure procédure pour l’identification du risque environnemental, d’une diminution des exigences administratives et du regroupement de l’encadrement par activité. On exemptait de la procédure les projets ayant des risques environnementaux négligeables et faibles, ce qui devait permettre d’analyser plus rapidement les autres projets.

Cependant, trois ans plus tard, le sombre constat est que le processus présente des failles importantes qui requièrent des améliorations immédiates. Malgré les récents efforts d’amélioration, il demeure déficient et menace de retarder ou de simplement contrecarrer des projets.

Les entreprises avec lesquelles je parle ne voient pas d’améliorations. Pire encore, certaines constatent même un recul notable. Cette nostalgie de l’ancien système s’explique par le manque de prévisibilité soutenu et l’incapacité d’observer des améliorations dans le temps nécessaire pour traiter les demandes. Par exemple, une fois qu’une demande est déposée, nul ne peut véritablement savoir si elle sera ouverte pour son étude dans deux semaines ou dans six mois. De plus, si le demandeur ne réussit pas à répondre aux demandes d’informations supplémentaires dans un délai souvent excessivement serré, il est renvoyé à la case départ et doit en assumer les frais.

CETEQ E (RE)PENSER LE PROCESSUS D’AUTORISATION ENVIRONNEMENTALE AU QUÉBEC Ce texte vous fait réagir ? Faites-nous part de vos commentaires en écrivant à info@magazine3rve.cc LE MAGAZINE DES MATIÈRES RÉSIDUELLES AU QUÉBEC 3RVE VOL. 20, N O 2 PRINTEMPS 2024 20 Centre de traitement & lieu d’enfouissement de sols contaminés > 844.212.8484 > pdacruz@signaterre.com > 175, chemin de la Cabane-Ronde Mascouche (Qc) J7K 0P1 Pour nous contacter

AMÉLIORER LE PROCESSUS : PAR OÙ S’Y PRENDRE ?

Une chose qui est claire, mais qui mérite d’être répétée : améliorer l’évaluation des projets ne signifie pas qu’il faille tourner les coins ronds. Nous devons éviter toute suggestion qui implique d’affaiblir les exigences du processus : celles-ci lui confèrent sa légitimité et renforcent le lien de confiance avec le public. Il est plutôt question de s’assurer que le souci du détail ne cède pas la place à un enchevêtrement de requêtes et à un manque de prévisibilité. Il faut impérativement établir des balises de temps claires pour le traitement des projets et revoir la procédure actuelle, qui ne prévoit aucun remboursement des sommes consenties par les demandeurs dont les projets ne réussissent pas à respecter les courts délais associés aux demandes d’informations complémentaires.

Devant la complexité du processus, l’une des solutions pourrait passer par un accompagnement personnalisé du MELCCFP auprès des demandeurs en amont du dépôt de leurs demandes afin de s’assurer que celles-ci sont complètes. Mathématiquement parlant, on gagnerait en efficacité, car une rencontre d’une heure avec un demandeur éviterait les dépôts ainsi que des analyses multiples par le MELCCFP. Toutefois, il ne faut pas que ce dernier mette en œuvre son accompagnement uniquement pour les projets à fort potentiel économique. Cela se ferait au détriment de plusieurs autres projets qui sont, eux aussi, importants pour bâtir des communautés, pour créer des emplois durables et pour protéger l’environnement.

Faire mieux en coopérant avec les gens sur le terrain, c’est dans l’ADN du CETEQ. C’est pourquoi nous avons annoncé que nous créerons prochainement un chantier dans le cadre duquel les membres de plusieurs secteurs pourront collaborer à cet enjeu transversal. Comme organisation,

nous ne pouvons pas nous concentrer uniquement sur les avancées réglementaires si, en fin de compte, nos membres n’ont pas les autorisations environnementales pour les mettre en place.

Finalement, le processus d’autorisation environnementale actuel n’est pas propice à la réalisation de projets. Si l’on souhaite véritablement développer l’économie verte québécoise, des changements s’imposent. La bonne nouvelle, c’est que le gouvernement du Québec a annoncé dans le dernier budget un investissement de 8,5 millions de dollars sur 5 ans. Maintenant que les sommes sont au rendez-vous, il ne manque que le courage politique d’avouer que le nouveau régime est incomplet et que des rectifications sont nécessaires. n

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Elisabeth Viry

Ph. D., chercheure

Centre de transfert technologique en écologie industrielle (CTTÉI)

info@cttei.com

DES MINÉRAUX D’IMPORTANCE CRITIQUE

Les minéraux critiques et stratégiques, ou MCS, sont des composants indispensables pour fabriquer des technologies et des infrastructures jugées nécessaires pour décarboner les activités économiques québécoises : éoliennes, panneaux solaires, batteries de voiture électrique, équipements de captage et de stockage du CO2, mais aussi appareils électroniques, instruments chirurgicaux, moteurs d’avion, etc.

Toutes ces technologies sur lesquelles nos gouvernements misent pour assurer la transition énergétique et la décarbonation des activités industrielles ont besoin d’intrants, comme le cuivre, le graphite, le nickel, le cobalt, le niobium, le lithium et les éléments de terres rares.

Les MCS sont majoritairement issus de l’extraction minière, et leur criticité est à la fois due aux incertitudes politiques liées à leur approvisionnement et au caractère intensif des opérations minières permettant leur production. Le Québec a la chance de maîtriser une partie des données de ce cassetête en disposant d’un vaste territoire, riche en ressources naturelles.

Ainsi, les acteurs du milieu tels que les entreprises privées, les organisations de recherche et les agences de soutien à la recherche provinciales et

fédérales ont tout intérêt à proposer des solutions aux utilisateurs de ces minéraux critiques et stratégiques afin que leur approvisionnement soit sécurisé, qu’il réponde à des exigences environnementales et sociales cohérentes et que ces impacts soient mesurés afin d’être connus et modérés.

La vision des projets menés au CTTÉI permet de répondre à ces objectifs en s’inscrivant dans un système local de production, de valorisation et d’utilisation optimale des ressources au service d’instances provinciales et d’acteurs industriels privés québécois.

CONNAÎTRE ET MESURER L’UTILISATION DES MCS

AU QUÉBEC

En 2022, le CTTÉI a mené une étude de caractérisation de la chaîne de valeur des MCS au Québec et analysé les catégories de produits contenant des MCS dans la province. L’étude a mis en valeur des MCS à fort potentiel de récupération et de valorisation en utilisant des critères tels que les types d’utilisation, la criticité, la recyclabilité et la possibilité de substitution des minéraux. Par exemple, les analyses ont démontré que les piles et les batteries lithium-ion de systèmes industriels et de véhicules hors route (VHR) ont un bon potentiel de seconde vie, de récupération et de valorisation.

Toutefois, l’étude a jeté la lumière sur l’importance de structurer les filières de récupération, de favoriser le développement et l’implantation de procédés de recyclage innovants et de favoriser la rétention des MCS en augmentant la résilience de la chaîne d’approvisionnement québécoise face aux économies étrangères.

CTTÉI LES MINÉRAUX DE LA TRANSITION ÉNERGÉTIQUE Ce texte vous fait réagir ? Faites-nous part de vos commentaires en écrivant à info@magazine3rve.cc LE MAGAZINE DES MATIÈRES RÉSIDUELLES AU QUÉBEC 3RVE VOL. 20, N O 2 PRINTEMPS 2024 24

Le CTTÉI prend activement part à la recherche appliquée afin de réduire à la source, de réutiliser, de recycler et de valoriser les MCS. En effet, c’est toute la chaîne de valeur qui doit être le sujet de nos efforts si l’on ne souhaite pas réduire la circularité à la seule question du recyclage.

ASSURER L’APPROVISIONNEMENT GRÂCE

AU RECYCLAGE

De ce point de vue, le CTTÉI a travaillé sur des procédés de conditionnement (broyage, séparation gravimétrique, séparations magnétiques et électrostatiques) de piles alcalines et de piles lithium-ion en vue de séparer la poudre d’électrode (ou black mass) et les matières enveloppantes, comme le plastique et l’acier, avec pour objectif de pouvoir les recycler séparément. Nous avons également recherché, avec succès, des pistes de valorisation de fractions de matériaux issus du recyclage de batteries lithium-ion, qu’il s’agisse des plastiques ou de l’aluminium.

Bien que les opérations de conditionnement de batteries alcalines ou de batteries lithium-ion en fin de vie aient donné des résultats tout à fait prometteurs, d’autres voies sont à explorer, telles que l’écoconception, y compris l’utilisation de constituants moins difficiles à extraire et la fabrication de batteries plus aisément recyclables, réparables et réutilisables.

IL N’Y A PAS QUE LES BATTERIES

L’univers des possibles est grand en matière de récupération de MCS !

Du côté des résidus postconsommation, en 2023, nous avons par exemple travaillé sur la récupération de néodyme et d’éléments de terres rares à partir d’aimants permanents de disques durs HDD en fin de vie grâce à un financement de recherche du gouvernement du Québec. De nombreux produits électroniques fabriqués durant les vingt dernières années, comme les ordinateurs, les téléphones cellulaires et les écouteurs, contiennent eux aussi des aimants. Ils constituent donc autant de gisements de néodyme et de terres rares. Le cuivre et l’or sont eux aussi des minéraux récupérables à partir de déchets électroniques, tels que les circuits imprimés d’ordinateurs.

Du côté de l’industrie métallurgique, les sous-produits, comme les poussières d’aciérage ou les scories, constituent en 2024 des gisements de plus en plus exploitables. Cette exploitation est notamment possible grâce à des technologies innovantes faisant appel aux fluides supercritiques et à de nouveaux procédés d’hydrométallurgie ou de solvométallurgie, pour récupérer, séparer et recycler les minéraux. Les procédés développés cherchent à intégrer davantage de matériaux biosourcés et biodégradables afin de diminuer le potentiel de toxicité des procédés tout au long de la chaîne de production. En particulier, la solvométallurgie promet une moins grande utilisation de ressources en eau et une meilleure gestion en aval des effluents miniers. Mais ce n’est pas tout !

L’ÉCONOMIE CIRCULAIRE DES MCS

La recherche de pistes de valorisation des sous-produits avant même la mise en place du procédé de production applicable est aussi possible.

Diminuer l’impact environnemental et la perte de matières premières tant sur les plans des procédés d’exploitation et de production que d’utilisation des MCS permet une gestion plus durable des ressources. Cette diminution permet également une plus grande résilience de la chaîne d’approvisionnement des MCS. En intégrant l’économie circulaire à sa vision globale du développement de la filière batterie et de l’exploitation des MCS, le Québec aurait une occasion en or de se positionner comme un chef de file à l’international. On le fait ? n

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Hortense Montoux

Chargée de projet – Lab Construction

Centre d’études et de recherches intersectorielles en économie circulaire (CERIEC) hortense.montoux@etsmtl.ca

CONCRÈTEMENT, QU’A PU DÉMONTRER LE LAB ?

Le Lab construction a fait émerger 19 projets qui se sont déployés sur l’ensemble de la chaîne de valeur et sur diverses stratégies de circularité.

Ils ont ainsi permis de démontrer la faisabilité de certaines stratégies et de mieux comprendre des freins et leviers en travaillant sur les blocages réglementaires, techniques, pratiques, voire économiques à la mise en place de la circularité.

l’échelle mondiale, le secteur de la construction est responsable de plus de 40 % des émissions de gaz à effet de serre (GES). Il consommerait annuellement plus de 42 milliards de tonnes de ressources, ce qui en fait le plus grand consommateur de ressources, tous secteurs confondus 1. Au Québec, cette industrie génère plus de 3,5 millions de tonnes de matières résiduelles chaque année, dont seulement 25 % sont recyclées ou valorisées 2. Il convient donc de réduire les quantités de ressources exploitées dans le secteur de la construction, de les utiliser plus intensément et plus longtemps ainsi que d’optimiser leur fin de vie, tout en réduisant les émissions de GES et en limitant les autres impacts sur l’environnement. C’est ce que propose l’économie circulaire.

Inconnue en Amérique du Nord il y a à peine dix ans, ce nouveau modèle de production-consommation suscite aujourd’hui un très fort intérêt. Le modèle et les stratégies pour sa mise en œuvre font de plus en plus partie du débat public, et ses notions sont de mieux en mieux comprises par les différents acteurs de la société.

QU’EST-CE QUE L’ÉCONOMIE CIRCULAIRE ?

Par opposition à l’économie linéaire, fondée sur l’approche « extrairetransformer-distribuer-utiliser-jeter », l’économie circulaire est un modèle qui vise à découpler la croissance économique de l’exploitation des ressources vierges et des impacts sur l’environnement. Ce modèle est fondé sur deux mécanismes principaux :

1)En amont, repenser nos modes de production-consommation pour consommer moins de ressources et protéger les écosystèmes qui les génèrent.

2)En aval, optimiser l’utilisation des ressources qui circulent déjà dans nos sociétés en permettant, notamment, la création de boucles remettant en circulation des flux de matières négligés.

Pour le secteur de la construction, l’ensemble des 12 stratégies d’économie circulaire identifiées 3 peuvent s’appliquer. Cependant, pour enclencher une réelle transition du Québec vers une économie circulaire, il est nécessaire que la filière (ainsi que l’ensemble des autres secteurs clés de la province) soit mobilisée vers un objectif commun d’accroître la productivité et la circularité des ressources qu’elle utilise.

LE LAB CONSTRUCTION : INNOVER POUR ACCÉLÉRER LA TRANSITION

Dans ce contexte, le Centre d’études et de recherches intersectorielles en économie circulaire (CERIEC) porte un écosystème de laboratoires (labs) sectoriels d’accélération en économie circulaire. Il a propulsé le tout premier Lab pour le secteur de la construction entre 2021 et 2024.

Les laboratoires d’accélération ont pour but de réunir les acteurs clés d’une chaîne de valeur avec des chercheurs de différentes disciplines pour identifier les blocages à la circularité des ressources et concevoir leurs solutions. Concrètement, il s’agit de mettre en place, dans une approche concertée avec les acteurs (approche living lab), des projets d’expérimentation visant à lever les freins identifiés, puis à transférer les apprentissages de ces projets à l’ensemble de la chaîne de valeur du secteur de la construction pour accélérer sa transition vers l’économie circulaire.

Pour les projets qui touchent directement les résidus de construction, de rénovation et de démolition (CRD), on peut citer trois exemples. Notons d’ailleurs que d’autres projets ont travaillé plus en amont sur la conception, sur les outils pour les donneurs d’ouvrage et sur la construction modulaire, qui ont également un effet direct sur la quantité et la qualité des résidus de CRD en fin de cycle.

= Le projet de démantèlement de portes et fenêtres 4 a permis de démontrer qu’il est techniquement faisable de séparer les composantes des portes et fenêtres issues de la déconstruction et d’envoyer les matériaux ainsi séparés vers les bonnes filières de recyclage. Le projet a aussi constaté qu’au vu des contextes économique et réglementaire actuels, la rentabilité de cette filière n’est pas assurée.

= Le projet de déconstruction en Gaspésie 5 a démontré la faisabilité technique d’une déconstruction efficace et orientée vers le réemploi (84 % des matières ont évité l’enfouissement), à un coût équivalent à celui du couple démolition-enfouissement.

= Le projet de tri à la source en Estrie a lui aussi fait la démonstration qu’avec des outils bien pensés et un accompagnement des participants, il est possible de mettre en place un tri à la source efficace permettant de détourner de l’enfouissement 75 % des matières.

Ces trois exemples, ainsi que l’ensemble des projets du Lab, démontrent que la circularité est atteignable et permettent d’identifier les leviers à activer pour accélérer la transition. Pour diffuser l’ensemble des connaissances issues des projets, une série de huit webinaires est organisée en mai-juin 2024. Une plateforme Web est en cours de préparation et mettra à disposition de manière simple l’ensemble des résultats, livrables et outils issus des projets.

Ce n’est pas fini ! L’équipe du Lab construction est aujourd’hui en réflexion pour poursuivre ses activités et ainsi continuer d’épauler l’ensemble des acteurs du milieu pour accélérer la transition vers l’économie circulaire. n

Consultez les ressources du Lab construction : https://miro.com/app/board/o9J_lTyxiCU=/

1 Circle Economy (2024). Building a circular construction sector is hard, but it is happening. https://www.circle-economy.com/news/building-a-circular-construction-sector-is-hard-but-it-ishappening

2 RECYC-QUÉBEC(2023). Bilan 2021 de la gestion des matières résiduelles au Québec.

3 Québec circulaire (2024). Stratégies de circularité. https://www.quebeccirculaire.org/static/strategies-de-circularite.html

4 La fiche projet et la fiche bilan sont disponibles ici : https://miro.com/app/board/uXjVOTz8iYk=/?moveToWidget=3458764582080423203&cot=14

5 La fiche projet et la fiche bilan sont disponibles ici : https://miro.com/app/board/uXjVOTz8iYk=/?moveToWidget=3458764582079790931&cot=14

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ÉCONOMIE CIRCULAIRE
L’ÉCONOMIE CIRCULAIRE POUR LE SECTEUR DE LA CONSTRUCTION
À
info@magazine3rve.cc LE MAGAZINE DES MATIÈRES RÉSIDUELLES AU QUÉBEC 3RVE VOL. 20, N O 2 PRINTEMPS 2024 26
Article écrit en collaboration avec
Alice Rabisse
© Lucile Parry-Canet, gracieuseté RITMRG Chantier de déconstruction en Gaspésie, projet du Lab Construction

Marie-France Létourneau Collaboration spéciale

ÇA VA MIEUX QU’ON PENSE : LE BALADO QUI FAIT DU BIEN

Parler d’environnement, c’est loin d’être ennuyant, selon Bianca Bernard et Grégory Pratte. Et, contrairement à ce que certains croient, ce ne sont pas les bonnes nouvelles ni les initiatives inspirantes qui manquent en lien avec la santé de notre planète. Le duo s’est justement donné pour mission d’en faire la démonstration avec le balado Ça va mieux qu’on pense, lancé en février dernier.

Pour y arriver, les deux coanimateurs misent sur leur complémentarité, mais également sur leurs différences. Différence d’âge d’abord : l’une a 32 ans, l’autre, 52 ans. Puis, différence de caractère. Alors que Grégory Pratte a des opinions tranchées et bien assumées, Bianca Bernard, grande curieuse aux multiples questions, fait davantage dans la nuance.

Tous deux se passionnent cependant pour les sujets et enjeux environnementaux d’horizons multiples. Ils prennent surtout beaucoup de plaisir à relayer les histoires de ceux et celles « qui décident de prendre le taureau par les cornes et qui choisissent de faire des actions à hauteur humaine », explique Grégory Pratte, expert en sensibilisation environnementale.

Un exemple ? La tomate étant parmi les fruits et légumes les plus gaspillés au monde (au Canada seulement, il s’en jette 1,1 million chaque jour), l’entreprise québécoise Pretty Ugly Company a décidé de combattre ce gaspillage alimentaire une tomate moche à la fois en produisant, entre autres, une gamme de… salsas.

Bref, une bonne raison de croire que « ça va mieux qu’on pense », non ?

C’est d’ailleurs la rencontre entre Grégory Pratte, Bianca Bernard et les cofondateurs de Pretty Ugly Company, Pierre-Olivier Gendron et Lysanne Bourret, qui lance la série de balados de 10 épisodes, disponibles sur toutes les plateformes de baladiffusion ainsi que sur YouTube.

ESPOIR ET ACTION

« Pour nous, Çavamieuxqu’onpense est bien plus qu’un simple podcast. C’est notre manifeste pour un avenir dans lequel l’espoir et l’action vont de pair, affirme Bianca Bernard, également productrice chez Mom Studio, à Montréal. Nous croyons fermement que chaque geste, aussi petit soit-il, compte dans la lutte pour un environnement plus sain. »

« Ce balado est notre moyen de partager cette conviction et de propager cette énergie positive à tous ceux qui veulent faire une différence », ajoute-t-elle.

Il faut préciser que les deux coanimateurs n’en sont pas à leur première collaboration. Ils se sont

rencontrés dans le cadre de la série de capsules vidéo environnementales, ludiques et éducatives, baptisée Green ta vie, lancée en 2016 par Bianca Bernard et Érika Roy.

Grégory Pratte travaillait à l’époque comme responsable des relations publiques chez Tricentris. Cette entreprise et la société VIA, toutes deux engagées dans le recyclage au Québec, s’étaient unies, en marge de Green ta vie, pour promouvoir le tri efficace des matières recyclables.

« Le message qu’on envoyait à l’industrie, c’est que c’est possible de parler de gestion des matières résiduelles sans que ça soit plate », fait valoir M. Pratte, qui agit également comme chroniqueur et conférencier.

Grégory Pratte et Bianca Bernard ont pris des routes différentes après les deux saisons de Green ta vie. Mais le hasard a voulu que leurs chemins se croisent à nouveau quelques années plus tard. Leur amitié a grandi au fil du temps, et l’idée de réaliser un projet commun s’est imposée.

La table était ainsi mise pour que le balado Ça va mieux qu’on pense voie le jour.

SUR LE RADAR
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Un balado épaulé par Enviro Connexions

PARTENAIRE PRINCIPAL

Dans l’élaboration de leur projet, Grégory Pratte et Bianca Bernard ont pu compter sur l’appui immédiat et enthousiaste d’Enviro Connexions, expert en gestion intelligente des déchets, à titre de partenaire principal.

L’entreprise leur a donné carte blanche, ce qui réjouit les animateurs, qui coproduisent également le balado.

« Ce projet s’inscrit parfaitement dans notre démarche, qui vise à participer à l’enrichissement des discussions en environnement », souligne AnneMarie Hallé, directrice des affaires publiques à Enviro Connexions.

« Il y a des gens de cœur, des projets et des initiatives qui donnent espoir et qui méritent d’être sous les projecteurs, poursuit-elle. C’est ce que proposent Bianca et Grégory, en privilégiant les nuances, et ce, dans la bonne humeur. C’est une chance de pouvoir appuyer ce duo intelligent et sympathique. »

Pour la production de leur série de balados, les deux communicateurs peuvent par ailleurs compter sur la collaboration d’une petite équipe à l’efficacité redoutable, entre autres pour le montage de chaque épisode et leur diffusion sur différentes plateformes. Une gestionnaire des réseaux sociaux participe également au projet.

Pour l’heure, les épisodes, d’une durée de 60 à 90 minutes, sont mis en ligne toutes les deux semaines. Le coup d’envoi de la série a été donné de façon symbolique le 14 février dernier, question de « donner un peu d’amour à l’environnement », relève Mme Bernard.

Les invités du balado proviennent de différents horizons. Même chose pour les thèmes abordés. Détail : les conversations débordent largement du bac bleu, auquel ont d’abord été associés les animateurs. On passe par exemple du gaspillage alimentaire à l’économie circulaire et de l’engagement citoyen à l’innovation sociale.

Le tout est présenté de façon « ultravulgarisée », précise la coanimatrice. Un élément essentiel, selon elle, pour que Ça va mieux qu’on pense rejoigne et intéresse un large public.

EN MODE CONVERSATION

Outre les fondateurs de l’entreprise Pretty Ugly Company, Grégory Pratte et Bianca Bernard ont rencontré les journalistes et coautrices du livre Vivre avec une seule planète , Camille Dauphinais-Pelletier et Élizabeth Ménard, de même que le metteur en scène et militant écologiste Dominic Champagne.

À l’origine du Pacte pour la transition, lancé il y a un peu plus de cinq ans, M. Champagne revient, avec franchise et lucidité, sur cette expérience. Même s’il est davantage effacé du débat public, l’actualité continue à l’interpeller. Il se fait d’ailleurs critique à l’endroit du gouvernement actuel, entre autres sur sa gestion du dossier de la filière des batteries.

Mais c’est en mettant les mains dans la terre que l’artiste, qui a notamment travaillé avec le Cirque du Soleil à Las Vegas, affirme avoir retrouvé un certain « sens du rapport à la vie ». « L’année passée, j’ai parti 200 plants dans mon potager, raconte-t-il. Je mange encore mes légumes aujourd’hui. J’ai planté environ 500 arbres pour partir une forêt nourricière. »

Parmi les autres invités : le populaire jardinier maraîcher Jean-Martin Fortier ; l’architecte Pierre Thibault, qui a travaillé sur le concept du Lab-École ; Fauve Doucet, à l’origine de Partage Club, l’application mobile de prêts d’objets ; ainsi que la directrice corporative du développement durable à Cascades, Marie-Ève Chapdelaine.

Le format balado, qui met de l’avant les discussions, cadre bien avec les aspirations des animateurs. « Ça nous permet d’approfondir les sujets, relève Bianca Bernard. On peut vraiment laisser de la place aux experts ou aux personnes qu’on reçoit et les laisser détailler leur pensée. »

Gregory Pratte, qui se définit comme un « connecteur » dans le milieu de l’environnement, affirme pour sa part que le balado lui offre un mode de communication supplémentaire pour propager les bonnes nouvelles, alors qu’il est déjà présent à la radio, à la télévision ainsi que dans les médias sociaux.

À ce jour, le plus grand défi du duo demeure cependant de faire connaître l’existence de Ça va mieux qu’on pense

Qu’à cela ne tienne, le balado rejoint un auditoire jusqu’en France par le biais de la plateforme YouTube. En fait, selon les statistiques récoltées après la diffusion des trois premiers épisodes, près de la moitié des écoutes a été réalisée au pays de l’Hexagone.

SUITE À PRÉVOIR

Le plus grand souhait de Gregory Pratte et de Bianca Bernard, c’est par ailleurs que l’aventure se poursuive au terme de la première saison. Ce ne sont pas les bonnes histoires à raconter ni les invités inspirants qui manquent, font-ils valoir.

Dans un monde idéal, la conversation se poursuivra éventuellement avec le biologiste, océanographe et humoriste Boucar Diouf, ou encore avec l’actrice et dramaturge Christine Beaulieu. Cette dernière a signé la pièce de théâtre J’aime Hydro et la série télévisée Déconstruire

Qui sait, des épisodes pourraient également être réalisés en France, question de s’inspirer des histoires d’ailleurs mises de l’avant par des acteurs de changements, font valoir les animateurs.

« C’est sûr qu’on a une vision à long terme avec le projet », laisse tomber M. Pratte.

Les commentaires reçus à ce jour sont très positifs, se félicite Bianca Bernard. Elle estime que les sujets abordés atteignent leur cible. « Plus on va semer des histoires différentes, plus on va toucher les gens », calcule-t-elle.

« C’est un beau legs de donner un peu de lumière, conclut Grégory Pratte. Quand on lit les journaux, on a l’impression que ça va mal. Mais quand on creuse juste un peu, on trouve des affaires qui vont bien et qui ne font pas le front page. Nous, c’est ce qu’on met en lumière. » n

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SUR LE RADAR

ÉCO ENTREPRISES QUÉBEC : UNE PETITE RÉVOLUTION À GRANDE VITESSE

À partir de janvier 2025, la modernisation de la collecte sélective entrera formellement en vigueur. Éco Entreprises Québec (ÉE Q) assumera pleinement son rôle de grand donneur d’ordres. En tant qu’organisme de gestion désigné (OGD) de la collecte sélective sur l’ensemble du territoire québécois depuis octobre 2022, ÉEQ s’apprête en effet à orchestrer un important changement. Il est d’ailleurs sur le point de conclure la ronde d’ententes qui amènera la totalité des municipalités de la province à prendre le cap de la modernisation. Tour d’horizon avec Maryse Vermette, présidente-directrice générale de l’organisme.

Parmi les changements attendus, notons que les matières recyclables seront désormais la propriété des producteurs, représentés par ÉEQ. Les citoyens auront dorénavant une seule et même liste de matières à récupérer, partout au Québec.

Mais avant la date butoir de janvier prochain, soit d’ici l’été 2024, ce seront plus de 120 ententes de partenariat avec des organismes municipaux qui auront été conclues en moins d’un an par ÉEQ afin de couvrir l’ensemble des services de collecte sélective sur le territoire québécois.

Objectif : moderniser le système québécois, lui donner plus d’agilité et de cohérence et permettre à l’ensemble de la population de récupérer partout les mêmes matières, qu’on vive à Bromont ou dans Rosemont. « Enfin ! », diront plusieurs.

Pour Maryse Vermette, ce tour de force s’apparente ni plus ni moins à une révolution : « Au Québec, la responsabilité de la collecte repose actuellement sur plus de 560 organismes différents, explique la PDG d’ÉEQ. Cependant, dans le système modernisé, il faut réduire et optimiser. À terme, il n’y aura plus que quelque 120 interlocuteurs, ce qui constitue une petite révolution pour parvenir à un grand changement ! »

Cela place donc ÉEQ dans la position du chef d’orchestre, qui laissera à ces quelque 120 organismes municipaux le soin de contracter la collecte et le transport des matières recyclables vers les centres de tri, selon des critères et modalités convenus avec l’OGD de la collecte sélective.

Ce changement de paradigme, ÉEQ le fait toutefois en collégialité avec les municipalités concernées, selon un modèle établi en fonction des besoins et critères propres au Québec. En effet, ailleurs au Canada, l’organisme de gestion désigné implante un nouveau système de collecte de manière indépendante, qui évacue complètement les villes de l’équation. Au Québec, on a voulu faire autrement.

Ici, les spécificités de chaque municipalité et MRC sont prises en compte, et les villes continueront de faire un travail de premier plan pour le citoyen, ce qui a certainement facilité la négociation des ententes : « Les villes continueront de remplir le rôle dans lequel elles sont les meilleures et dans lequel la population a le plus besoin d’elles, soit le service de première ligne au citoyen », rapporte la présidente-directrice générale.

Elle explique que pour ÉEQ, l’important était de parvenir à réduire le nombre d’interlocuteurs responsables de la collecte, et que les moyens pour y parvenir étaient assez flexibles : « Nous travaillons tous dans le même objectif, donc nous avons réellement mis la concertation au cœur de nos préoccupations. »

Pour preuve, ÉEQ a réalisé une tournée du Québec en 2023 pour aller à la rencontre des divers intervenants concernés et s’assurer que les joueurs impliqués se sentent confiants et entendus. « Nous voulons faire la démonstration que le modèle québécois va fonctionner et que la relation entre ÉEQ et les organismes municipaux en est une de confiance », confie Maryse Vermette.

La PDG et son équipe sont allées sur le terrain à la rencontre des élus et des directeurs généraux de municipalités et de MRC dans nombre de régions, comme l’Outaouais, l’Estrie et la Gaspésie, pour ne nommer que celles-là. Elles ont de plus pris part aux grands rendez-vous tenus tant par l’Union des municipalités du Québec (UMQ) que par la Fédération québécoise des municipalités (FQM). Également, plus d’un millier d’élus et de gestionnaires municipaux ont participé à l’un ou l’autre des six webinaires sur la modernisation de la collecte sélective, réalisés en collaboration avec Réseau Environnement.

Autre volet important mené de front au cours des douze derniers mois : établir des ententes avec les centres de tri dispersés un peu partout au Québec. Effectivement, dans le cadre de son nouveau rôle, ÉEQ devient propriétaire de toute la matière collectée jusqu’à ce que celle-ci trouve sa deuxième vie. L’organisme a donc la responsabilité d’établir le pont – de signer des

ententes contractuelles – avec les centres de tri et d’assurer que la modernisation de la collecte se traduise aussi par une modernisation du tri et de la transformation.

ÉEQ vise la conclusion de toutes ces ententes avec les centres de tri avant la fin de l’été 2024. Encore une fois, la collaboration est au rendez-vous pour parvenir à élever le degré de maturité du tri au Québec : « Notre préoccupation première est de rehausser la qualité de la matière triée pour répondre aux spécifications des recycleurs. L’objectif est que ça fonctionne, donc nous ne sommes pas dogmatiques sur le modèle d’affaires », soutient Mme Vermette.

Signe que les choses vont bon train de ce côté, ÉEQ a donné en 2023 un contrat pour la construction d’un centre de tri ultramoderne dans l’est de l’île de Montréal. Le centre, qui sera en service début 2025, créera des emplois de qualité et sera le deuxième plus avancé technologiquement en Amérique.

Ce genre de complexe vise notamment à répondre à l’objectif gouvernemental souhaitant que d’ici 2030, tous les résidents de la province aient accès à un centre de tri, peu importe leur lieu de résidence.

Pour ÉEQ, cette exigence amène déjà beaucoup de pain sur la planche puisque certaines régions éloignées du Québec posent de grands défis, surtout en matière de transport. « On pense notamment aux communautés autochtones ou encore aux villages du Grand Nord. Nous avons de gros défis et ils nous tiendront occupés toute cette année. Mais nous avons confiance que les résultats seront au rendez-vous », conclut Maryse Vermette. n

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Maryse Vermette, présidente-directrice générale d'ÉEQ

DIX ANS DE PRODUCTION DE GNR :

RETOUR VERS LE FUTUR AVEC ENVIRO CONNEXIONS

Enviro Connexions est l’une des pionnières dans la valorisation de biogaz au Québec. En 2024, son usine de production de gaz naturel renouvelable (GNR) située au complexe environnemental intégré de Terrebonne souffle d’ailleurs ses dix bougies. Au moment où le GNR figure p armi les solutions les plus accessibles et prometteuses dans la stratégie de transition énergétique, Michèle-Odile Geoffroy et Anne-Marie Hallé, respectivement spécialiste régionale – environnement et directrice des affaires publiques à Enviro Connexions (division Québec), reviennent sur la genèse de cette usine avantgardiste et discutent des perspectives du GNR au Québec.

Enviro Connexions a commencé à capter les biogaz et à les valoriser pour en faire de l’électricité en 1996 à son site de Terrebonne. Au milieu des années 1990, Hydro-Québec était en surplus énergétique. Le besoin d’accueil de nouvelles sources d’énergie était donc restreint. Une proportion du gaz capté par l’entreprise à cette époque était donc brûlée, comme l’impose la réglementation.

Michèle-Odile Geoffroy explique que c’est dans ce contexte qu’est née l’idée de mettre sur pied une usine de production à grande échelle qui valoriserait 100 % des gaz d’enfouissement captés : « Nous avons rapidement vu le potentiel du biométhane. Nous produisions quelque quatre mégawatts par année, mais avions la capacité d’en générer beaucoup plus. »

En se dégradant, les déchets enfouis qui contiennent de la matière organique génèrent des biogaz composés de plus de 50 % de biométhane. La spécialiste rappelle qu’une molécule de méthane a un pouvoir de réchauffement climatique 25 fois plus élevé que le CO2, d’où la nécessité de l’incinérer ou, préférablement, de le valoriser, comme le prévoit le Règlementsurl’enfouissementetl’incinération des matières résiduelles.

Les biogaz produits contiennent toutefois des impuretés, qui doivent être éliminées pour que le gaz soit utilisable. La future usine de production de GNR devrait donc pouvoir purifier le biométhane pour l’injecter dans le réseau de distribution de gaz existant.

Pas une mince tâche puisqu’entre l’idéation et la mise en service, en 2014, quelque 20 ans se sont écoulés afin de mettre au point un projet qui s’alignerait avec la vision audacieuse d’Enviro Connexions, tout en répondant à des critères de qualité satisfaisants.

Dix ans plus tard, les 700 puits de captage de l’usine d’Enviro Connexions valorisent plus de 95 % des gaz récupérés. Fonctionnant 24 heures sur 24, l’usine a une capacité de production de 8 000 gigajoules par jour, soit l’équivalent des besoins énergétiques d’environ 23 000 maisons. Cette puissance en fait la plus grande productrice de GNR au Québec et l’une des plus importantes du genre en Amérique du Nord.

Le complexe environnemental intégré duquel l’usine fait partie inclut également un bioréacteur pour le traitement des matières organiques issues des bacs bruns de Terrebonne et de Mascouche, une plateforme de compostage de résidus verts, un écocentre et une usine de traitement des eaux. Au total, le complexe, qui embauche quelque 80 personnes, dont 20 pour l’usine seulement, reçoit environ 48 % des déchets générés dans le grand Montréal.

Michèle-Odile Geoffroy explique que contrairement aux gaz fossiles, qui demandent des procédés complexes d’extraction à travers la roche, le GNR produit à partir du biogaz d’enfouissement entraîne une réduction nette supplémentaire de GES. À ses yeux, la captation des GNR fait donc partie des meilleures pratiques actuelles pour la décarbonation et s’inscrit dans une stratégie efficace de transition énergétique. L’experte cite en exemple les véhicules lourds ou les grandes infrastructures comme les usines, qui sont difficilement électrifiables, mais qui peuvent facilement être alimentés au gaz.

Parce que les matières organiques ont une capacité de générer des biogaz durant quelque 30 ans, la valorisation énergétique est une solution efficace et concrète à la décarbonation et, ultimement, aux changements climatiques.

La stratégie québécoise de gestion des matières organiques mise en place est donc un excellent pas dans la bonne direction. Selon Anne-Marie Hallé, il faudra reconnaître l’apport de différentes technologies puisqu’il faut miser sur une diversité de solutions. n

Par son projet novateur, l’équipe d’Enviro Connexions a ainsi contribué à écrire l’histoire de la transition énergétique au Québec. En effet, les ingénieurs de l’entreprise ont participé à l’élaboration de la norme BNQ, qui établirait les critères de qualité de production de gaz dans la province : « La stabilité du gaz produit doit être très constante, mais il n’existait pas de standards à l’époque ! Nous avons donc dû voir avec les décideurs ce qu’il était possible d’injecter à partir d’un lieu d’enfouissement technique », confie Anne-Marie Hallé.

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Boîte qui protège un puits de captage des biogaz
LE RADAR
SUR

Me

Avocat associé, LL. B. Daigneault, avocats inc. thibaud.daoust@daigneaultinc.com

Les centres de tri de matériaux de construction, de rénovation et de démolition (CRD) sont maintenant bien établis dans l’écosystème de la gestion des matières résiduelles. Selon les plus récentes données de RECYC-QUÉBEC, un peu plus de 50 % des résidus de CRD du secteur du bâtiment transitent par ces centres de tri spécialisés 1. Par contre, malgré leurs efforts, ces derniers envoient toujours d’importantes proportions de ces matières à l’élimination 2. Également, les processus de tri, de criblage et de tamisage de ces centres de tri engendrent des résidus fins (également appelés les « fines » de CRD) qui contiennent généralement un mélange de matières (béton, gypse, bardeau, bois, etc.) ayant une granulométrie trop fine pour être recyclés adéquatement 3. Au cours des dix dernières années, ces rejets et résidus fins ont capté l’attention du gouvernement. Dans ce cadre, nous nous proposons de revenir sur deux modifications réglementaires récentes touchant précisément la question des résidus fins et des rejets des centres de tri de CRD.

ADMISSIBILITÉ POUR L’ENFOUISSEMENT

Au début septembre 2022, le paragraphe 3.1 de l’article 10 du Règlement sur l’enfouissement et l’incinération de matières résiduelles4 est entré en vigueur. Cet article décrit certains types de matières résiduelles qu’un exploitant de lieu d’enfouissement technique est tenu de recevoir à ses installations. Le paragraphe 3.1 précise que les « rejets d’un centre de tri de matériaux de construction et de démolition » générés sur tout territoire doivent alors être reçus par un lieu d’enfouissement technique, sauf dans le cas où un autre lieu d’enfouissement technique se trouve plus près de ce centre de tri de CRD.

L’utilisation de l’expression « rejets d’un centre de tri » de CRD laisse perplexe : elle n’est pas utilisée ailleurs dans la réglementation québécoise et ne semble pas tout à fait viser le même concept que les « résidus fins ». En effet, un « rejet », dans son sens commun, vise toute matière qui est écartée ou refusée au centre de tri parce qu’elle est non admissible ou qu’elle ne peut faire l’objet d’un traitement utile à ce centre. Les résidus fins sont plutôt le résultat des procédés de tri, de criblage et de tamisage effectués dans ces centres de tri. Ils constituent donc des matières résiduelles découlant de ces procédés, mais pas des matières que l’on refuse ou que l’on écarte bêtement.

À notre avis, il aurait été souhaitable qu’un langage plus précis soit adopté, comme celui de l’article 3 du Règlement sur les redevances exigibles pour l’élimination de matières résiduelles5. En effet, dans sa rédaction actuelle, le paragraphe 3.1 de l’article 10 du Règlement sur l’enfouissement et l’incinération de matières résiduelles laisse plutôt place à l’interprétation. Par exemple, l’expression « extrants » englobe plus clairement, à notre avis, les concepts de « rejets » et de résidus fins.

REDEVANCES TEMPORAIRES

Depuis le 23 janvier 2023, une disposition spécifique aux résidus fins est en vigueur au sein du Règlement sur les redevances exigibles pour l’élimination de matières résiduelles . Sommairement, ce règlement prévoit que

des redevances doivent être payées par certains lieux d’élimination de matières résiduelles pour chaque tonne métrique de matière résiduelle reçue pour élimination. L’article 3 de ce règlement établit le coût de ces redevances.

Les résidus fins de CRD sont nommés ainsi, au deuxième paragraphe du deuxième alinéa de cet article : « résidus fins de construction, de rénovation ou de démolition issus du criblage ou du tamisage effectué par les centres de tri de matières résiduelles issues de travaux de construction ou de démolition ». Les résidus fins de CRD sont précisément abordés à cet article 3 afin de soustraire l’utilisation de ces fines au paiement de la redevance. Cela s’applique seulement si les fines sont utilisées à titre de recouvrement journalier dans un lieu d’enfouissement technique, de recouvrement mensuel dans un lieu d’enfouissement de débris de construction ou de démolition, ou pour la construction de chemins d’accès dans les zones de dépôt de matières résiduelles de ces deux types de lieux d’enfouissement.

Un « rejet », dans son sens commun, vise toute matière qui est écartée ou refusée au centre de tri parce qu’elle est non admissible ou qu’elle ne peut faire l’objet d’un traitement utile à ce centre.

En somme, l’élimination pure et simple des résidus fins de CRD dans ces lieux reste assujettie au paiement de la redevance. Toutefois, aucune redevance n’est due lorsque l’on valorise ces résidus à certaines fins qui leur sont spécifiques dans ces lieux d’élimination.

Il nous faut noter qu’il s’agit là d’une mesure temporaire. En effet, alors même qu’il introduisait ce paragraphe sur les résidus fins, le gouvernement annonçait que cet article cesserait d’avoir effet le 31 décembre 2025 6 Après cette date, et à moins d’une autre modification réglementaire, les résidus fins valorisés à titre de recouvrement ou pour la construction de chemin dans les lieux d’enfouissement seront assujettis à la même redevance que n’importe quelles autres matières résiduelles utilisées pour les mêmes fins.

Vraisemblablement, le gouvernement a décidé de créer cette soustraction temporaire de redevance afin d’encourager les exploitants de lieux d’enfouissement à utiliser massivement ces résidus fins et ainsi permettre aux centres de tri d’écouler les grandes quantités de ceux-ci, accumulés sur leur site pendant plusieurs années, faute de débouchés. À notre avis, il y a quand même, dans le caractère temporaire de cette soustraction, un message important envoyé aux exploitants de centres de tri de CRD de la part du gouvernement : d’autres débouchés de valorisation devront être identifiés rapidement puisque la valorisation des résidus fins dans les lieux d’enfouissement n’est pas l’avenue que l’on veut privilégier à long terme. n

1 RECYC-QUÉBEC (2023). Bilan 2021 de la gestion des matières résiduelles au Québec.

2 Ibid.

3 RECYC-QUÉBEC (2018). Fiche informative - Résidus de construction, de rénovation et de démolition.

4 RLRQ, c. Q-2, r. 19.

5 RLRQ, c. Q-2, r. 43.

6 Décret 1458-2022, article 12.

LE JURIDIQUE
TRI
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