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LES PFAS: DES POLLUANTS « ÉTERNELS » , OMNIPRÉSENTS ET TRÈS PRÉOCCUPANTS

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FACE DES PFAS

FACE DES PFAS

Jean Paquin n’est pas le premier venu dans l’univers des contaminants émergents. Ingénieurchimiste et biochimiste de formation, il évolue depuis 45 ans dans le domaine de l’environnement. M. Paquin maîtrise plusieurs dossiers relatifs aux contaminants émergents dont font partie les PFAS, et il est une ressource technique hors pair pour Réseau Environnement à titre de bénévole.

« Ce que les gens d’analyse de risques et les toxicologues expriment au sujet des PFAS, c’est que ce sont des composés chimiques pernicieux, dont les milliers de molécules différentes se retrouvent partout à travers le monde, que ce soit sur terre, dans l’air ou dans l’eau, et que ces produits chimiques dits “éternels” ont des effets nocifs sur l’environnement et la santé humaine », ajoute-t-il. Et le Québec n’y échappe pas...

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Mais avant d’aller plus loin, remettons le curseur au début et apprenons à mieux connaître cet étrange univers rempli d’acronymes et de mots étranges.

Des milliers de molécules différentes

« PFAS » — à prononcer « pifass » — est l’acronyme anglais de « per- and polyfluoroalkyl substances », que l’on traduit en français par « substances perfluoroalkyliques et polyfluoroalkyliques » et que l’on désigne par l’acronyme « SPFA ». Toutefois, puisque presque partout dans le monde on utilise l’acronyme anglais « PFAS » pour parler de cette famille de molécules chimiques, c’est donc ce terme qui sera employé dans ce reportage.

Les PFAS sont des substances chimiques dont les propriétés spécifiques expliquent leur utilisation commerciale et industrielle dans plusieurs produits de la vie courante. Des emballages alimentaires jusqu’aux vêtements en passant par les ustensiles de cuisine, les textiles, les cosmétiques, les produits phytosanitaires, les revêtements antiadhésifs et les mousses anti-incendie, les PFAS jouent un grand rôle dans l’efficacité de différents produits et sont largement utilisés à travers le monde depuis les années 1950.

Toutefois, comme ces milliers de molécules — différentes, mais appartenant à la même famille — ne se dégradent pas dans l’environnement (de là leur attribut d’« éternels »), les PFAS finissent par contaminer les organismes vivants, dont les populations humaines qui les ingèrent en respirant, en mangeant et en buvant de l’eau, par exemple.

La quasi-indestructibilité de ces molécules entraîne la contamination de tous les milieux. Ainsi, les sédiments, les sols (dont les terres agricoles vouées à l’alimentation), l’eau et l’air en contiennent tous, d’autant plus qu’elles peuvent être transportées par air et par eau sur de très longues distances, ce qui explique qu’elles polluent même des milieux aussi extrêmes que l’Arctique et l’Antarctique. Et comme ces substances chimiques sont de surcroît bioaccumulables, l’inquiétude ne cesse de grandir concernant leurs effets nuisibles sur la santé des organismes vivants, dont l’humain fait évidemment partie.

Des substances inquiétantes

Selon un document récent de Santé Canada1, les PFAS forment un groupe de plus de 4700 substances synthétiques utilisées comme surfactants, lubrifiants et répulsifs (pour les poussières, l’eau et les graisses).

À travers le monde, de plus en plus de substances appartenant à la famille des PFAS sont interdites, mais l’industrie chimique les remplace par d’autres substances de la même famille, non encore réglementées, qui pourraient avoir des effets tout aussi néfastes, voire toxiques, sur l’environnement et sur la santé humaine.

« Nous répertorions aujourd’hui plus de 20 000 de ces substances, révèle Jean Paquin. Par ailleurs, il faut faire attention au mot “toxique”. On ne parle pas ici d’une toxicité classique. Par exemple, quand on parle de micropolluants, on les évalue en milligrammes par litre d’eau. Pour ce qui est des PFAS, on parle plus souvent de nanogrammes par litre, donc de concentrations beaucoup plus basses. C’est pour cela que les PFAS sont passés sous le radar, qu’il a fallu du temps avant de les découvrir. »

M. Paquin souligne que lors des années 1970 à 1990, et même après, ces substances étaient utilisées absolument partout, industriellement et commercialement, parce que leur détection était passée à travers les mailles du filet. « Ces composés n’avaient pas été identifiés comme étant toxiques, ajoute-t-il. Maintenant, le gouvernement du Canada a une définition pour ces composés chimiques, laquelle utilise davantage les mots “dommageable” ou “néfaste” et non plus uniquement le mot “toxique”, qui est incorrect lorsqu’on parle de composés perturbateurs.

« Dommageables », « néfastes », « toxiques », « perturbateurs » : les épithètes négatives accolées à ces composés chimiques ont de quoi inquiéter, d’autant plus que ces molécules sont bioaccumulables et presque impossibles à éliminer dans l’environnement. Soulignons que la bioaccumulation se définit par l’accumulation d’un contaminant dans les tissus d’un organisme vivant, absorbé à partir de son milieu de vie. Elle survient quand l’organisme ne parvient pas à éliminer le contaminant.

Selon Jean Paquin, la situation est inquiétante non seulement concernant les PFAS, mais concernant l’ensemble des composés organohalogénés, lesquels représentent une vaste famille de produits qui va des pesticides jusqu’à des composés pharmaceutiques, en passant par des composés persistants et bioaccumulatifs tels les BPC et le DDT.

« J’ai passé 35 ans de ma carrière à l’élimination des BPC, lesquels étaient ciblés parce que l’on sait qu’ils sont extrêmement nocifs pour le vivant, déclare Jean Paquin. Mais ce que j’ai trouvé de vraiment choquant, c’est que pendant tout ce temps, on a autorisé toutes sortes de composés similaires qui sont devenus omniprésents dans l’environnement, ce qui a induit une variété de problèmes populationnels chez les humains. Plusieurs observations sont actuellement faites au sujet de ces substances en rapport avec certains cancers, des dérèglements hormonaux et des conséquences neurologiques, et maintenant que l’on découvre ces effets, eh bien, comme société, on devrait réagir promptement pour corriger ces problèmes, pour s’attaquer à ces erreurs du passé. »

Pourtant, l’urgence d’agir ne semble pas encore exister, puisque les restrictions à l’utilisation de certains PFAS dans le monde ont conduit à l’exploitation de substances de substitution issues de l’industrie chimique appartenant, elles aussi, aux PFAS.

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