2 minute read
conflit russo-ukrainien Les différentes responsabilités en droit international
Depuis le mois de mars 2022, les nouvelles technologies médiatiques font de nous les témoins d’un conflit armé international en direct.
Par Miriam Cohen, professeure agrégée et titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur les droits humains et la justice réparatrice internationale
Advertisement
De ce fait, les images du conflit russo-ukrainien soulèvent de plus amples questions concernant la protection des victimes, la justice internationale et la responsabilité des auteurs de violations des droits humains. Mais que signifie cette « responsabilité » en droit international?
Précisons d’abord que, sur le plan sémantique, le concept de « responsabilité » est polysémique, d’où sa variabilité linguistique. En français, son sens est plus englobant, pouvant autant référer à la responsabilité sociale qu’à la responsabilité pénale ou à la responsabilité civile et même à la responsabilité morale. En anglais, ce concept coexiste avec d’autres – liability, responsibility et accountability –, lesquels ont chacun leur sens propre.
De plus, sur le plan terminologique, le sens du concept de « responsabilité juridique » n’équivaut pas à celui de « responsabilité internationale ». En droit interne (tel qu’au Québec), la responsabilité civile peut être contractuelle ou extracontractuelle et mener à une réparation sous diverses formes. En droit international, la responsabilité pénale internationale (individuelle) coexiste avec la responsabilité étatique pour fait internationalement illicite, les réparations étant alors de différents ordres.
Concernant la responsabilité pénale internationale (individuelle), l’idée qu’un individu puisse être tenu pénalement responsable d’un crime en droit international a été introduite suite à la Deuxième Guerre mondiale. Depuis, en droit pénal international, le Statut de Rome de la Cour pénale internationale consacre ce principe (art. 25) et prévoit les formes de réparation en faveur des victimes d’un crime relevant de sa compétence (art. 75), de même que les peines applicables (art. 77-80). En droit international humanitaire coutumier, les règles 102 et 151 reprennent ce principe de responsabilité pénale individuelle.
Concernant la responsabilité étatique (pour fait internationalement illicite), c’est la Commission du droit international qui a opté pour la responsabilité de nature civile (et non de la responsabilité pénale) d’un État en cas de violation de ses obligations internationales. Cette idée de responsabilité étatique découle du Projet d’articles sur la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite, une codification de la coutume en la matière. Son article 40 prévoit la responsabilité internationale qui résulte d’une violation grave par l’État d’une obligation découlant d’une norme impérative du droit international général, tandis que son article 31 dispose qu’un fait internationalement illicite de la part d’un État entraîne son obligation de réparer les préjudices ainsi causés. En droit international humanitaire coutumier, les règles 149 et 150 reprennent ces principes de responsabilité étatique et de réparation intégrale de la perte ou du préjudice causé.
À titre d’exemple, dans le cas du conflit armé russoukrai nien, ce sont autant la responsabilité individuelle pour crimes internationaux (crimes de guerre) que la responsabilité étatique qui devront être examinées sous la loupe de la justice internationale. Par ailleurs, au-delà de ces concepts juridiques, il y a aussi la responsabilité morale envers les multiples victimes de ce conflit, dont témoigne la crise humanitaire actuelle. ◆