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Briser les règles
On dit que plus de 60 % des jeunes assis sur les bancs d’école feront des métiers qui n’existent pas aujourd’hui. À première vue, ce chiffre peut sembler exagéré.
Par Marie Amiot, LL. B. 1987, présidente-directrice générale et cofondatrice de La Factry
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Mais au-delà du nombre, force est d’admettre qu’il y a à peine quelques décennies, il aurait été impensable de faire carrière comme pilote de drone ou encore de demander à des designers et à des ingénieurs de concevoir des organes humains artificiels. Le monde du travail se transforme à une vitesse inégalée, et ce, dans tous les secteurs d’activité. J’insiste… dans tous les secteurs. On ne peut plus continuer à former la relève de la même manière, sur la base des mêmes compétences. Parce qu’on ne peut plus se contenter d’apprendre. Il faut maintenant transformer. Ou plutôt apprendre à transformer : la façon de faire de la construction, de la médecine, de l’agriculture, de la production manufacturière... la liste est infinie.
Pour celles et ceux qui se préparent à intégrer le marché du travail, ce simple constat peut glacer le sang. Comment se projeter dans un monde à construire, voire à déconstruire? Les études sont unanimes. Le marché du travail nécessite maintenant des compétences différentes de celles de l’ère industrielle qui nous précède. Le gouvernement du Canada a récemment défini neuf compétences pour réussir jugées essentielles pour participer à une société moderne. Le Québec a publié son référentiel des compétences du futur. Le Forum économique mondial publie une liste similaire depuis plus d’une décennie. Sans grande surprise, plus de la moitié des compétences énumérées dans ces rapports sont des compétences générales (soft skills). Le genre de compétences qu’on arrive à concevoir, mais qui demeurent complexes à expliquer en détail et encore plus complexes à mesurer : créativité, adaptabilité, résolution de problèmes, collaboration et communication, pour ne nommer qu’elles.
Après plus de sept années à la tête de l’école de créativité La Factry, je n’hésite pas une minute à affirmer que la créativité est une alliée incroyable dans un monde en transformation. La créativité n’est pas un métier spécifique limité à quelques individus. Elle n’est pas non plus synonyme de capacité artistique. La créativité est une posture mentale, un état d’esprit. Une capacité à embrasser l’inconnu. Cette créativité s’apprend et s’enseigne. Elle augmente la mobilité à l’emploi, donne des ailes aux cultures d’entreprise et propulse l’innovation. Qui aurait cru, il y a quelques années à peine, que les procès virtuels, les greffes numériques et le télétravail seraient le quotidien d’une industrie, avouons-le, plutôt traditionnelle ? En quelques mois, le monde juridique a fait un pas de géant vers l’accès et la modernisation.
Dans cet univers en transformation, les juristes deviennent des alliés inestimables s’ils embrassent cette nouvelle réalité. Une réalité où il faut accueillir le risque et l’audace à pleines portes, où le passé n’est pas garant du futur. Dans ma nouvelle vie de gestionnaire, j’ai plus que jamais besoin d’avocats lorsque je dois me lancer, sans jurisprudence et dans les situations où le filet de sécurité est mince. La posture d’observateur et de conseiller, bien intégrée à la pratique du droit, doit faire place à une posture de créateur et d’agent de changement. Les juristes sont maintenant mes meilleurs alliés quand il faut changer le statu quo et quand j’ai besoin (au sens figuré évidemment) de briser les règles. ◆