MILLE ET UNE HISTOIRES 130

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n°130 la musique

Le chant de l’oiseleur

Petiot et son pipeau

Le troubadour et les brigands

Le loup et le chien

Un roi capricieux rêve qu’un doux chant le berce et le rend très heureux. L’oiseleur saura-t-il retrouver l’oiseau de son rêve ?

Petiot est tout petit, si petit que ses parents ne savent pas quoi faire de lui... Un jour, il aide une étrange vieille dame.

Pierre, le fier troubadour, rentre chez lui après un long voyage. Mais il tombe nez à nez avec de terribles brigands !

Le loup et le renard ont le ventre vide. Ils croisent un chien dodu qui leur parle de sa vie auprès de son maître...

Mille et une histoires

Les plus beaux contes du monde entier

N°130 - juin 2011 - 5,50 € - Bel/Lux/Dom : 6,50 € - Suisse : 11 CHF - Tom : 500  XPF - CAN : 5,50 CAD - Tunisie : 5,50 TND Maroc : 35 MAD - Zone CFA : 2000 CFA - ISSN : 1297-0662


P. 3

Le chant de l’oiseleur P. 11

Petiot et son pipeau P. 21

Le troubadour et les brigands P. 29 Ma fable  :

Le loup et le chien P. 34

34 Ma poésie : « Saltimbanques »

de Guillaume Apollinaire 36 Ma BD : Les aventures de Loulou 40 La famille Perlimpinpin à l’Opéra 42 Mon petit musée : « Le concert » de Mathieu Le Nain

P. 45

Parents

46 Les troubadours, ces musiciens

qui inventèrent l’amour 50 Une histoire qui fait du bien : Le chant de l’oiseleur


La musique est très présente dans les contes orientaux. Ici, un roi mélomane et capricieux est sous le charme d’une « mélodie du bonheur » impossible à retrouver. Voyez page 50 comment l’oiseleur musicien lui permettra de renouer avec ses émotions et avec sa part d’humanité.

Le chant de l’oiseleur

Une nuit, un roi fit un rêve. Sur une branche d’olivier, un oiseau chantait. Son chant, si beau, toucha son cœur. Au petit matin, il fit appeler son oiseleur : - Cette nuit, j’ai fait un rêve merveilleux, lui dit-il. Dans le jardin, un oiseau chantait et son chant m’a transporté au paradis. Va, cours, oiseleur, et rapporte-moi l’oiseau de mon bonheur !

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- Certainement Sire, balbutia l’oiseleur, mais comment s’appelle l’oiseau ? Il en existe des milliers ! - Je ne le sais pas. Tu as sept jours pour le retrouver, sinon je te fais jeter en prison. Hâte-toi ! L’oiseleur obéit car il connaissait les caprices et les colères du roi.

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Dans le jardin, il réfléchit, puis il se cacha derrière un muret. Avec sa flûte, il joua le chant du merle et attendit. Longtemps. Soudain, le merle sortit de son nid. L’oiseleur l’attrapa avec son filet, si délicatement qu’il ne lui fit aucun mal. Il mit l’oiseau dans une cage et l’apporta au roi. - Sire, voilà l’oiseau de votre rêve. C’est le merle. Il dit à l’oiseau : - Chante pour le roi. L’oiseau chanta, mais le roi hocha la tête : - Ce n’est pas lui, ce chant est triste et fade.

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Alors le lendemain, l’oiseleur retourna au jardin. Il se cacha dans une haie. Avec sa flûte, il joua le chant de l’alouette et attendit. Longtemps. Soudain, l’alouette sortit de son nid. L’oiseleur l’attrapa avec son filet, la mit dans une cage et l’apporta au roi. - Sire, voilà l’oiseau de votre rêve. C’est l’alouette. Puis il dit à l’oiseau : - Chante pour le roi ! L’oiseau chanta, mais le roi tourna les talons avant la fin du chant et grogna : - Ce n’est pas lui. Son chant est ennuyeux comme la pluie ! L’oiseleur était inquiet. Le jour suivant, il se cacha derrière un rocher, au bord de la rivière. Avec sa flûte, il joua le chant du loriot. Quand l’oiseau sortit de son nid, il l’attrapa et l’apporta au roi. - Sire, voilà l’oiseau de votre rêve. C’est le loriot. L’oiseau chanta, mais le roi tapa du pied : - Ce n’est pas du tout ça ! Son chant me casse les oreilles !

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Le jour d’après, l’oiseleur lui apporta une grive. Mais cette fois, quand l’oiseau chanta, le roi gronda d’un ton sévère : - Ce n’est pas lui ! Son chant est trop aigu. Je commence à m’impatienter, oiseleur. Trouve l’oiseau de mon bonheur ou bien il va t’arriver malheur ! Le lendemain, dès l’aube, l’oiseleur retourna au jardin. Puis, tout tremblant, il se présenta devant le roi, avec un roitelet. L’oiseau chanta, mais le roi entra dans une colère terrible : - Triple idiot. Ce n’est toujours pas cet oiseau-là. Son chant est trop maladroit. Le sixième jour, l’oiseleur apporta un rossignol. Désespéré, le pauvre homme supplia l’oiseau : - S’il te plaît, rossignol, mon ami, chante pour le roi de ta plus jolie voix. L’oiseau chanta du mieux qu’il put mais le roi prit un ton grave : - Ce n’est toujours pas lui. Demain est ta dernière chance, oiseleur. Tu finiras en prison si tu échoues encore.

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Le septième jour, l’oiseleur ne savait plus quel oiseau capturer. Assis sous les fenêtres du roi, il était triste à mourir : - J’ai tout essayé ! Aujourd’hui, le roi va prendre ma flûte, mes notes et mes chansons, et me jeter en prison. C’est sans doute la dernière fois que je joue de la musique… L’oiseleur respira l’air du printemps et se mit à souffler dans son instrument. Il joua son air préféré, c’était une douce berceuse que sa maman lui chantait, quand il était petit. Tous les oiseaux se turent pour l’écouter. Sa mélodie, si belle, parvint aux oreilles du roi qui s’exclama : - Voilà le chant que j’ai entendu dans mon rêve ! Aussitôt, il fit appeler l’oiseleur : - Où est l’oiseau ? Je viens de l’entendre, c’est lui, j’en suis sûr ! - Sire, il n’y a pas d’oiseau. C’est mon propre chant que vous avez entendu, répondit l’oiseleur en montrant sa flûte.

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Alors le roi se calma. Il sourit et demanda au musicien de jouer cette douce musique une fois encore, juste pour lui. Il en fut si heureux qu’il souhaita même l’entendre chaque jour de sa vie et il ne fit presque plus de caprices ! Quant à l’oiseleur, il gagna la liberté de jouer à sa guise, selon son bon plaisir, tous les airs qu’il aimait.

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Plusieurs versions de ce conte circulent en France et en Espagne. Comme souvent, dans ce type d’histoires, le « petit » dont on se moque retrouve sa dignité grâce à son audace et à sa bonté. Si elle ne le conduit pas à l’amour, la musique tient ici un rôle de révélateur et lui offre la confiance en lui.

Petiot et son pipeau

Il était une fois un homme et une femme qui n’arrivaient pas à avoir d’enfant. Un jour, enfin, la femme mit au monde un garçon, grand comme un pouce. Les parents étaient ravis, mais un peu déçus : - Il est si petit, disait la femme. Si petit, qu’on l’appela Petiot. Sa mère le promenait dans la poche de son tablier. Et à quatre ans, il était à peine plus grand qu’une fleur des champs ! - Qu’allons-nous faire de lui ? soupirait son père.

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Pourtant, le jour de ses quinze ans, Petiot dit à ses parents : - Il est temps que je parte pour chercher du travail. J’aime les bêtes, je garderai les chèvres ! La mère embrassa longtemps son enfant et le regarda s’éloigner : - Prends soin de toi, mon fils, tu es si petit. Petiot trouva du travail chez un fermier et sa femme. Il devint un bon berger. Dans les champs, il écoutait le chant du vent et s’amusait à fabriquer des petits instruments de musique avec des bouts de bois. Ainsi, il ne s’ennuyait jamais. Mais le soir, quand il rentrait à la ferme, ses maîtres étaient méchants avec lui. Ils lui donnaient à peine de quoi dîner et le faisaient dormir dans l’étable. Un jour qu’il gardait les chèvres près du ruisseau, une vieille femme s’approcha : - Bonjour mon garçon, dit-elle, sais-tu où est le pont pour franchir ce ruisseau ? - Il n’y a pas de pont, dit le petit berger. Montez sur mon dos et je vous ferai traverser. Je suis Petiot, mais costaud !

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La vieille femme monta sur le dos de Petiot, qui traversa le ruisseau sans peine. - Tu es bon et courageux, lui dit-elle. Pour te remercier, je t’offre ce pipeau. - Merci, dit Petiot, en prenant l’instrument en bois décoré. Je n’ai jamais rien reçu d’aussi beau ! Il s’empressa de souffler dans l’instrument : « Flui... flui... flui... » Et, incroyable, ses chèvres se mirent à danser sans pouvoir s’arrêter. Petiot comprit alors que la flûte était magique. Ceux qui l’entendaient ne pouvaient cesser de danser. Petiot fit encore danser ses chèvres deux ou trois fois, puis il rentra à la ferme.

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Ce soir-là, ses maîtres furent encore plus méchants que d’habitude. La fermière le traita de paresseux et menaça de lui donner des coups de bâton. - Va te coucher, s’écria-t-elle. Tu ne mérites même pas de dîner ! Au lieu de partir la tête basse, Petiot tira le pipeau de sa poche, et joua. « Flui... flui... flui... » Aussitôt, le fermier et sa femme se mirent à danser, malgré eux. Quel spectacle ! Les voilà qui sautent et tourbillonnent, emportés par la musique. - Arrête ça ! hurla le fermier. Promis, tu auras à manger ! Mais Petiot les fit danser jusqu’à minuit. Quand il arrêta, le fermier et sa femme étaient si fatigués qu’ils allèrent se coucher sans dîner, et Petiot mangea avec gourmandise tout ce qui était sur la table.

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Le lendemain matin, un bon petit-déjeuner l’attendait. Pour une fois, Petiot partit aux champs le ventre plein. Vers midi, il entendit soudain le galop d’un cheval. Un cavalier, entouré de ses chiens de chasse, s’arrêta devant lui : - Hé, toi ! As-tu vu passer un sanglier ? Comme Petiot ne répondait pas, le cavalier s’énerva : - Es-tu sourd ? - Je ne suis pas sourd, dit Petiot, mais vous avez oublié de me dire bonjour.

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Le cavalier se mit en colère : - Sais-tu à qui tu parles ? Je suis le fils du marquis ! Un moins que rien comme toi ne va pas me donner des leçons de politesse ! Tu m’as fait perdre la trace du sanglier, pour la peine, mes chiens vont te dévorer. Attaquez-le !

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Vite, Petiot attrapa son pipeau et se mit à jouer. Il était temps ! Un peu plus, et les chiens se jetaient sur lui ! Dès les premières notes de musique, « Flui... flui... flui... » la meute, le cheval et son cavalier se mirent à danser. Petiot était sauvé. Quand il s’arrêta de jouer, tout ce petit monde repartit la queue basse.

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L’après-midi, alors qu’il faisait la sieste, Petiot entendit le trot léger d’un cheval. Quand il ouvrit les yeux, une ravissante cavalière se tenait devant lui. Petiot en fut ébloui. Elle lui dit avec curiosité : - Je suis Éléonore, la fille du marquis. Mon frère vous a rencontré ce matin alors qu’il chassait le sanglier. Ce nigaud est rentré épuisé et m’a parlé de votre flûte extraordinaire, mais je ne l’ai pas cru. Montrez-la moi donc ! Petiot ne résista pas au charme de la belle. Il allait lui tendre timidement son pipeau quand il eut l’idée de demander : - D’abord un baiser ! Donnez-moi un baiser, jolie demoiselle.

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- Un baiser ! se moqua Eléonore, comment oses-tu ? Je préférerais embrasser un crapaud plutôt qu’un avorton comme toi ! Petiot la laissa dire, il porta son pipeau à ses lèvres et joua : « Flui... flui... flui... » La jeune fille cessa de se moquer et se mit à danser. Bientôt, elle supplia Petiot d’arrêter : - S’il te plaît, cesse de jouer et je te donnerai le baiser que tu me demandais. Mais Petiot continua à la faire danser. Quand il s’arrêta, Éléonore ne tenait plus sur ses jambes. Rouge, essoufflée, elle s’approcha pour l’embrasser, mais Petiot la repoussa : - Gardez votre baiser. Je n’en veux plus. Et si vous m’offriez de l’or, je n’en voudrais pas non plus. Ce pipeau est magique. C’est le cadeau d’une vieille dame que j’ai portée sur mon dos pour traverser le ruisseau. Vous, vous n’êtes ni bonne ni gentille, jolie marquise !

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Alors qu’elle le regardait, stupéfaite, Petiot ajouta : - Vous ne me méritez pas. Celle que j’aimerai saura comprendre mon cœur et m’aimera tel que je suis. Sur ce, Petiot tourna les talons. Pour la première fois de sa vie, il se sentit fier et fort. Il partit sur les routes, son pipeau dans sa poche, bien décidé à découvrir le monde.

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Pierre de Châteauneuf (ou Peire de Castelnou), troubadour et seigneur de Mollégès, a vraiment existé. Ce musicien et poète au bel esprit vivait au XIIIe siècle. Sa mésaventure est devenue une légende que l’on raconte encore durant les veillées provençales...

Le troubadour et les brigands

Il était une fois en Provence, un chevalier troubadour qui revenait d’un long voyage. Parti en croisade, il avait guerroyé de l’autre côté des mers. Ce troubadour se nommait Pierre. C’était un grand musicien et son luth l’avait accompagné partout. Qu’il était heureux de retrouver sa Provence ! Et surtout de revoir les belles dames qui l’attendaient ce soir au château, sur la route des Alpilles.

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En traversant une épaisse forêt au milieu des montagnes où souffle le mistral, il pensait déjà aux chansons qu’il allait leur chanter. Il leur raconterait ses aventures à la guerre, bien sûr, mais leur chanterait aussi des poèmes d’amour qu’il destinait à la jolie Béatrix, fille du seigneur du château. Sur la route, il chantonnait tout seul, pour son cheval et pour les petits oiseaux : Dame ! De loin, votre seigneur revient, Ses pas résonnent sur le chemin, Avec au cœur tant d’amour. Dame ! toutes les forêts, il passera. À la fin du jour, près de vous, il sera... là, là, là...

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Au détour d’un sentier, il s’arrêta pour boire à une fontaine. En s’agenouillant, il remarqua une rose plus belle que les autres. Comme par magie, celle-ci s’ouvrit et se mit à lui parler : - Bonjour mon beau seigneur ! Te voilà de retour au pays... - Bonjour la rose, répondit Pierre, un peu surpris. Dis-moi, je suis bien sur la route du château des comtes de Provence ? - Oui, Monseigneur. Mais prends garde à toi. Et surtout, n’oublie pas que ta musique est ton bien le plus précieux... - Merci la rose, mais pourquoi me dis-tu cela ? demanda Pierre. La rose sembla sourire puis se referma. Intrigué, Pierre remonta sur son cheval et lui chuchota à l’oreille : - C’est étrange, tu ne trouves pas, mon fidèle ami ? Mais ce seigneur troubadour avait connu tant de dangers qu’il n’avait plus peur de rien, ou presque.

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Il chevaucha encore longtemps en pleine forêt. Au crépuscule, les oiseaux cessèrent de chanter, son cheval hennit et, tout à coup, sept brigands armés jusqu’aux dents sortirent des buissons en hurlant ! - Saute de cheval et donne ta bourse et ton épée ! cria leur chef, qui était sale, barbu et vêtu d’habits troués. - Pardieu, non, j’en ai vu d’autres ! répondit le chevalier avec courage. - Faites-le descendre alors ! gronda le chef à sa bande de brigands. Zou ! les brigands sautèrent sur Pierre, lui attrapant les jambes, les bras et le faisant tomber de cheval.

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Après une grosse, très grosse bagarre, Pierre dut renoncer. Seul contre tous, il ne pouvait venir à bout des brigands. - Prenez son or, son cheval et ses habits ! cria le chef. - Et ça, on le prend ? demanda un brigand en montrant le luth du troubadour. - Hum, je ne sais pas à quoi ça sert, mais prenons-le et nous le revendrons, dit le chef, tout en sortant son poignard. Quand il vit briller sous la lune le poignard du brigand, Pierre, nu comme un ver, comprit que sa dernière heure était venue... « Après toutes ces batailles, pensa-t-il, voilà que je vais mourir près du château de ma bien-aimée, dans ce pays que j’ai tant voulu retrouver... Ma foi, je ne dois pas me laisser faire ! » Songeant aux paroles de la rose, il s’agrippa à son luth et dit : - Messires les brigands, ceci est un luth ! C’est un instrument de musique et... - Et alors ? grogna un des brigands qui n’avait plus qu’une seule dent et qui n’avait jamais entendu de musique de sa vie.- Eh ! bien avant de mourir, je veux vous en - -

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- Eh bien, avant de mourir, reprit Pierre, je voudrais en jouer un air. Car je suis chevalier, mais aussi troubadour. Et je ne peux vivre ni mourir sans ma musique. Laissez-moi jouer une dernière fois. Après, vous pourrez me tuer si vous le voulez. Les brigands se regardèrent. Le chef fit un signe de tête comme pour dire « d’accord », car il était sauvage et brutal, mais plutôt curieux. « Un peu de repos ne nous fera pas de mal », pensa-t-il. Alors tous s’assirent autour du troubadour et dès que Pierre se mit à jouer du luth, quelque chose de magique se passa. Les feuilles des arbres et les oiseaux de nuit lui firent écho et les brigands semblèrent fascinés. Il leur chanta ses voyages, la beauté de la mer, le plaisir d’être libre. Et il chanta aussi pour eux, parlant de leur courage, de leur force et des dangers qui les guettaient. « On dirait que ce musicien comprend notre vie », pensaient les bandits de grands chemins. Quand la musique cessa, les oreilles mais aussi le cœur des brigands avaient été touchés. Ils applaudirent très fort : - Gloire à toi, Pierre le troubadour ! s’écrièrent-ils. Et ils lui rendirent ses habits de velours, sa bourse et même son cheval. Pierre n’en revenait pas.

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- Pourquoi menez-vous cette vie ? demanda-t-il  aux brigands. Le monde est si beau, il y a tant de choses à voir... - Parce que nous avons faim, voilà tout, répondit le chef, et que nous ne savons rien faire d’autre... Alors Pierre eut une idée : - Venez avec moi au château, leur dit-il. Vous mangerez à votre faim et si vous voulez, vous apprendrez le jonglage, la musique et la danse... C’est ainsi que Pierre, le chevalier troubadour, franchit le pont-levis du château des comtes de Provence, entouré d’une troupe de brigands mal fagotés et chantant à tue-tête... Les belles dames en furent bien surprises mais, elles aussi, savaient que la musique peut faire des miracles...

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« Je me sers d’animaux pour instruire les hommes », disait La Fontaine. Cette fable célèbre est une leçon d’indépendance. Protégé par Fouquet, le prince de Conti et le duc de Bourgogne, fréquentant la cour de Louis XIV, le poète en subissait les avantages comme les inconvénients... et savait le prix de la liberté !

Le loup et le chien

Un matin, deux amis, le loup et le renard, se promènent dans la forêt en jouant à saute-mouton. « Brr... Qu’il fait froid ! » dit le loup. « J’ai si faim ! dit le renard, comme la vie est dure par ici... »

Sur le chemin, ils rencontrent un chien... bien beau, bien gras.

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Le loup lui dit : « Eh, bonjour le chien ! Tu as l’air en forme ! « Eh oui ! lui répond le chien. Il faut dire que j’ai beaucoup de chance... » « Ah ? Et quelle chance ? » lui demande le loup.

« Eh bien, j’ai un maître ! » « Mais qu’est-ce qu’un maître ? » demande le renard, curieux.

« C’est un homme adorable « Vraiment ? » dit le loup. « Et quand il fait froid, poursuit le chien, je peux me réchauffer devant sa cheminée. » Le renard roule de gros yeux : qui me donne à manger tous les jours », dit le chien. « Incroyable ! » « Là, ajoute le chien, mon maître me fait des caresses...

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... et il me dit : Tu es vraiment mon « Oh, ça ! c’est un collier que mon maître m’a donné. seul ami ! » Le renard l’interrompt : C’est un cadeau ! » Le renard et le loup s’écrient : « Et ce collier autour de ton cou ? » « Nous aussi on veut ce maître ! Montre-le nous ! »

Là-dessus, un cri résonne dans la forêt : « Sac-à-puces ! » « Tiens, qui appelle-t-on ? » demande le loup. Le chien ne répond pas.

Mais le cri recommence : « Sac-à-puces ! Ici ! Au pied ! » Le chien baisse la tête et dit : « Suivez-moi et rendez-vous ce soir ! » Puis il se dirige vers la voix.

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De loin, le loup et le renard épient le chien qui va vers son Le soir, les compères retrouvent le chien maître. Celui-ci crie : « Plus vite, Sac-à-puces ! » et il accroche qui les attend derrière la grille. Il dit : « Alors, je vous présente mon maître ? » une laisse à son collier avant de rentrer à la maison.

Le loup répond : « Tu as peut-être de la chance mais moi, je préfère faire ce que j’ai envie... Et tant pis si, parfois, j’ai un peu faim ! »

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« Et tant pis si j’ai froid ! » ajoute le renard. La lune brille, les amis retournent à la forêt en songeant : « Comme la vie est douce quand on est libre...  »


Saltimbanques Dans la plaine les baladins S’éloignent au long des jardins Devant l’huis des auberges grises Par les villages sans églises

Le mot « saltimbanque » de l’italien saltimbanco,  « qui saute de banc en banc », évoque la liberté des gens du voyage. Apollinaire (1880-1918), chantre de toutes les avant-gardes artistiques, forgea le terme « surréaliste » au début du XXe s. Spontanéité et imagination sont à la source de son art poétique. Ce poème sans ponctuation, empreint de musicalité, semble se dire au rythme de la marche des baladins...

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Et les enfants s’en vont devant Les autres suivent en rêvant Chaque arbre fruitier se résigne Quand de très loin ils lui font signe Ils ont des poids ronds ou carrés Des tambours des cerceaux dorés L’ours et le singe animaux sages Quêtent des sous sur leur passage Guillaume Apollinaire, Alcools, 1913

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La fête de l‘école

Aujourd’hui, c’est jour de kermesse à l’école de Loulou. Les mamans des élèves ont préparé des gâteaux et la maîtresse a installé des stands de jeux dans la cour.

À la pêche aux bonbons, Loulou est sur le point d’attraper la plus grosse papillote...

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... mais un des frères cochons lui fait des chatouilles et zut, c’est raté !


Au chamboule-tout, Ziboulette a renversé trois boîtes. « À mon tour ! » dit Rocco.

Alors il lance la pelote et badaboum ! il renverse toutes les boîtes d’un coup.

De son côté, Igor essaie de planter la queue de Hélas, quand il enlève son bandeau, l’âne au bon endroit, guidé par Mireille la taupe. le résultat n’est pas très satisfaisant…

Eddy, le moniteur de sport, arrive avec une longue corde.

Il explique : « Les deux équipes tirent de chaque côté de la corde et celle qui dépasse cette ligne a perdu. »

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Les garçons se placent d’un côté, les filles de l’autre. « Du nerf, les gars ! » lance Loulou pour encourager son équipe. « Allez les filles , on va les battre ! » crie Gudule pour motiver ses troupes.

Les deux équipes tirent tant et si bien que crac ! la corde casse et tous les enfants se retrouvent sur leur derrière ! « Bravo ! s’exclame Eddy. Tout le monde a gagné ! »

« Maintenant, j’ai prévu une petite surprise », dit la maîtresse.

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Et elle emmène les enfants dans la classe. Là, Papalou les attend avec des instruments de musique.


« Exceptionnellement, le papa de Loulou est venu avec la fanfare des pompiers », explique la maîtresse.

Papalou sourit. Il montre les enfants et dit : « Ils sont à côté de vous, voyons ! »

Tout à coup, elle réalise : « Mais, mais… où sont les autres musiciens ? »

« Mes élèves vont jouer ? » s’étonne la maîtresse. Alors les enfants s’écrient : « Surprise ! »

La maîtresse est ravie. Les élèves se précipitent sur les trompettes, trombones à coulisse, tuba, cymbales, flûte, grosse caisse, et tsim ! boum ! dzing ! musique ! En avant la fanfare de l’école !

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Retrouve toute la famille Perlimpinpin cachée dans l’image !

Mamie Sorcière

a famille Perlimpinpin à l’Opéra

Papy Fantôme

L


Dragounet

B é b é D ia b o l

o

P r i n ce s s e M i m i

Ti’lutin

Maman Fée

Papa Ogre


Musique en famille Dans ce beau tableau, chacun porte une grande attention à son instrument, mais une chose réunit tous ces personnages : la musique qu’ils font ensemble… Regarde bien ces détails. L’homme au chapeau à plumes est peut-être le papa de l’enfant. Il joue du luth, un instrument assez compliqué.

Vois la position de ses doigts : sa main droite gratte les cordes du luth, tandis que la gauche les pince.

La jolie dame en bleu tient une guitare. Elle pourrait être la maman.

Mathieu Le Nain (1607-1677) est le frère cadet de Louis et Antoine Le Nain. Tous trois étaient peintres et il est parfois difficile de distinguer les œuvres de chacun. Il règne dans leurs toiles une atmosphère étrange et poétique. Ici, la musique, intemporelle, relie les personnages qui figurent les trois âges de la vie (enfance, maturité, vieillesse). L’univers des frères Le Nain illustre notamment le quotidien des paysans du Laonnois. On peut admirer ce célèbre tableau au Musée d’Art et d’Archéologie de Laon (02).

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Derrière, se tient celui qui est sans doute le grand-père, au visage tout ridé. Il joue du flageolet, un instrument qui ressemble à une flûte.

Tous entourent l’enfant comme s’ils le protégeaient. Il tient une partition que regarde aussi le vieil homme. On dirait qu’il s’apprête à chanter…


Le concert, Mathieu Le Nain. XVIIe siècle 43


SPÉCIAL ! VACANCES

Le 1er juillet chez ton marchand de journaux

La Belle au Bois dormant… en musique

Si vous aimez les contes – et la musique ! – ne manquez pas le Festival Radio Classique qui s’ouvrira le samedi 18 juin à 16 h avec un grand concert pour enfants : La Belle au Bois dormant, mis en musique par Tchaïkovski. Le célèbre conte de Perrault devient une féerie musicale racontée sur la scène de l’Olympia à Paris, par Élodie Fondacci, qui touche déjà le jeune public chaque soir de la semaine avec ses histoires diffusées à 20 h sur Radio Classique. Rés. : 0 892 68 33 68 0 892 68 36 22 (0,34 E/min.)

Pour retrouver l’ensemble des magazines rendez-vous sur : www.fleuruspresse.com

Concert “famille” : samedi 18 juin, 16 h - Prix des billets : 29 E.


ur un air de musique « L’amour de la musique mène toujours à la musique de l’amour », disait Jacques Prévert... Ainsi, notre fier troubadour touche le cœur des bandits de grands chemins, ainsi le sultan capricieux retrouve une part d’humanité, ainsi, depuis la nuit des temps, les hommes chantent leurs peines et leurs bonheurs, exaltant la vie, sublimant leurs sentiments et leurs combats. C’est au début du XIIe siècle, que s’épanouit l’art des troubadours, ces musiciens aux semelles de vent qui inventèrent « l’amour courtois » et écrivirent des textes d’une grande puissance poétique. Musique et histoires semblent liées depuis toujours, pour le plaisir des petits et des grands... Le 21 juin, on fêtera la musique, alors, laissez s’ouvrir vos oreilles et, avec vos enfants, entrez dans la danse ! Valérie Chevereau Tablette d’ivoire représentant deux musiciens (XIVe siècle).

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Les troubadours ou

Qui étaient les troubadours ? Chanteurs, poètes, musiciens ? En les mettant en musique, ils ont permis de mémoriser les récits d’une époque où peu de gens savaient lire...

À droite, deux musiciens, l’un jouant du luth, l’autre de la vièle, extrait des Cantigas de Santa Maria, XIIIe siècle. Ci-dessus, lettrine ornant un chansonnier provençal du XIIe s. On y voit la comtesse Beatrix de Die, l’une des plus célèbres femmes troubadours. Ci-contre, une gracieuse jeune femme danse au son de la vièle du troubadour, dont on voit les armes sur l’écu et le heaume. Chansonnier de la famille Manesse, XIIIe s.

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vec le lancement des croisades, en 1095, les récits épiques exaltent la foi religieuse et le sentiment patriotique. Loyauté, honneur, courage, voilà les valeurs que propagent les premières chansons de geste médiévales, ces longs poèmes qui relatent les prouesses des rois et des chevaliers. Dans cet univers littéraire très préoccupé par les vertus guerrières, il semblait qu’il n’y aurait jamais de place pour une poésie inspirant des mœurs plus courtoises. Et pourtant !

La révolution troubadouresque

Dans la première moitié du XIIe siècle apparaissent les troubadours, à ne pas confondre avec les trouvères, même si les deux termes ont la même origine étymologique, le verbe latin tropare qui signifie « trouver », « inventer », c’est-à-dire « composer ». Troubadours et trouvères ont en commun d’être des « trouveurs de rimes ». Mais alors que les troubadours exercent leur art en pays de langue d’oc, au Sud de la Loire, les trouvères sont originaires des régions où l’on parle la langue d’oïl, le Nord de la France actuelle. Les troubadours sont surtout des précurseurs. Ce sont eux qui ont inventé un style poétique novateur, la « lyrique ». Cette œuvre est indissociable de la musique car, à une époque où peu de gens savent lire, la pratique du chant permet de mémoriser


l’invention de l’amour les récits. Ce nouveau genre d’expression artistique est une révolution car les troubadours écrivent en langue vulgaire, et non plus en latin, et leurs chansons traitent d’amours profanes. Les troubadours chantent en solo, accompagnés le plus souvent d’un jongleur jouant de la vièle, un instrument muni de 5 à 7 cordes, ancêtre de notre violon. Des rois, des grands seigneurs, des nobles ou de simples chevaliers

s’essayèrent à cet art délicat. Quelques femmes, les trobaïritz, se glissent dans la liste des 250 noms qui nous est parvenue. L’une des plus célèbres est la comtesse Beatrix de Die. Mais la plupart des troubadours sont de basse extraction sociale, formés dans des écoles de musique liturgique ou auprès d’autres troubadours. Ils se produisent devant les cours seigneuriales, vivant de la générosité de quelques mécènes. Certains se mettent au service d’un grand personnage, célébrant ses actions, propageant ses opinions.

Ci-dessous, une cour de musique, où un maître enseigne à ses jeunes élèves l’art des troubadours. Sur son écu et sur son heaume, figure le portrait de la dame de son cœur (Codex Manesse, XIVe s.).

Des poètes de l’amour

Enfants de cette Occitanie qui va de l’Aquitaine à l’Italie et du Poitou à la Catalogne, les troubadours chantent leurs terres écrasées par les chaleurs estivales, lavées par de violents orages, enivrées par mille vents lancés des quatre points cardinaux. Ils trempent leurs plumes dans les embruns et l’émulsion des garrigues. La douceur de vivre inspire leur poésie. À l’heure où la noblesse du Nord ne jure que par la violence virile des tournois, les troubadours chantent le courage, la générosité et la passion de la jeunesse. « Est jeune celui qui brûle sa vie et qui distribue sans compter », écrit Bertran de Born (1140-1215 env.), troubadour et seigneur de Hautefort, un fief situé entre Limousin et Périgord.

À g., un preux chevalier couronné par sa belle. « Dame, adieu ! Je ne puis rester davantage : Malgré moi je dois partir; Combien m’attriste l’aube ! (... ) » Raimbaud de Vacqueyras.

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Le Jardin des plaisirs, miniature du Roman de la Rose, poème courtois de Guillaume de Lorris et Jean de Meung XIIe-XIIIe s. Un joueur de luth enjôle les dames, tandis que l’Amant pénètre dans le verger avec sa belle. Dans Le Roman de la Rose, dédié à celle qui est digne « d’estre rose clamée, l’art d’amours est toute enclose »...

Les croisades auxquelles certains troubadours participent comme chevaliers vont ouvrir les portes d’autres imaginaires. Dans le Sud de l’Espagne actuelle, à Grenade ou à Cordoue, ils lisent les vers enchanteurs des poètes arabes. Auprès des courtisanes élevées dans les harems, ils goûtent au raffinement des califes et vont se métamorphoser en chantres de l’amour à une époque où les femmes sont cantonnées au rôle de mère. Contre l’ordre moral imposé par l’Église, ces poètes inventent un code de valeurs dans l’art d’aimer. C’est la fin’amor.

uand je vois voler l’alouette Quand vois l’alouette mouvoir De joie ses ailes face au soleil, Que s’oublie et se laisse choir Par la douceur qu’au cœur lui va, Las ! si grand envie me vient De tous ceux dont je vois la joie, Et c’est merveille qu’à l’instant Le cœur de désir ne me fonde. Hélas! tant en croyais savoir En amour, et si peu en sais. Car j’aime sans y rien pouvoir Celle dont jamais rien n’aurai. Elle a tout mon cœur, et m’a tout, Et moi-même, et le monde entier, Et ces vols ne m’ont rien laissé Que désir et cœur assoiffé... Bernar de Ventadour, 1130-1195 (extrait) Écrite par Bernar de Ventadour (qui apparaît sur la lettrine ci-dessus), cette « canso » évoque le désarroi amoureux. Ce troubadour serait vraisemblablement de basse extraction sociale, ses parents auraient servi au château des seigneurs de Ventadour. C’est le vicomte Ebles II, “Lo Cantador” (le chanteur) qui semble l’avoir initié à l’art troubadouresque. Cet amour courtois constitue une révolution des mœurs. Dans les chansons des troubadours, l’amoureux devient le vassal de sa bien-aimée, allant jusqu’à acquérir de bonnes manières. L’homme calme ses ardeurs, se civilise, car l’objet de son désir est souvent marié. Il faut alors préserver le secret.

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L’amour se transforme en quête mystique et la femme devient l’objet d’un culte entretenu à travers les chants. « Pour elle je frissonne et je tremble car de tant bon amour je l’aime je crois qu’il n’en est jamais née de semblable en beauté dans le lignage du seigneur Adam », écrit Guilhem IX de Poitiers, duc d’Aquitaine, premier troubadour connu de l’Histoire, excommunié à plusieurs reprises pour ses propos jugés scandaleux.

Disparus comme par enchantement

Les troubadours jouèrent aussi un rôle de ciment social, culturel et politique. Ils ont éveillé les consciences de leurs contemporains. Mais à la fin du XIIIe siècle, leur mouvement avait totalement disparu. Pourquoi ? D’abord parce que les seigneurs occitans ont été considérablement affaiblis par la croisade contre les Cathares. Cette dernière a également renforcé le puritanisme de la société. L’amour n’était plus vraiment à la fête ! Un autre facteur a certainement joué dans la disparition de la culture orale des troubadours : la multiplication des livres. Entre le

XIIe et le XIVe siècle, l’abandon progressif du parchemin pour le papier a entraîné le développement de l’édition. Outils de diffusion des connaissances, les livres ont facilité la lecture silencieuse et favorisé d’autres types d’expression artistique comme le roman et le théâtre. Privés de riches donateurs autant que de public, les troubadours ont sombré dans les limbes du temps, laissant 264 mélodies et 2500 poèmes comme seules preuves de leur passage. Pourtant, le message de ces passeurs de rêves éveillés, sans doute les premiers chanteurs à texte de l’histoire, n’a jamais cessé de nous inspirer. Plus de 800 ans après Bernar de Ventadour qui déclarait « L’amour améliore l’homme », Aragon clamait encore « La femme est l’avenir de l’homme ». Un vers que tous les troubadours auraient souhaité accrocher à leur cœur… ■ Serge Tignères

lusieurs types de récits ont été créés par les troubadours, répartis en une vingtaine de genres comme : La Canso (la chanson) : Genre majeur de la lyrique, il traite du “fin’amor”, l’amour courtois. L’Alba (l’aube) : Dialogue entre deux amoureux éperdus surpris par l’aube. Le Planh (la complainte) : composée à l’occasion de la mort d’un prince. Les Sirventès : Poèmes politiques ou moraux exprimant les sentiments de plusieurs personnes. La Pastourelle : Elle décrit les amours entre un chevalier et une bergère plutôt difficile à séduire. En haut, lettrine extraite d’un chansonnier provençal figurant Guillaume IX d’Aquitaine, XIIe siècle. En haut, une scène galante où un faucon, symbole de hardiesse, est offert en gage d’amour. Ci-contre, de retour des croisades, le chevalier accueilli par sa dame (Codex Manesse).

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UNE HISTOIRE QUI FAIT DU BIEN

Le chant de l’oiseleur

Cette jolie fable philosophique amuse beaucoup les enfants avec son défilé d’oiseaux. On y trouve l’idée que la musique, et l’art en général, sont reliés au monde intime de chacun, ainsi que nous l’explique la psychologue Dominique Naeger. Cette histoire commence par un doux rêve. Quelle influence va-t-il avoir sur ce roi ? Le rêve agit comme le révélateur d’un manque, d’une insatisfaction, qui tourmentent le roi. Il semble que les richesses matérielles qui sont les siennes ne suffisent plus à le combler. Ici, il ne sera pas question de princesse ni de baguette magique mais d’un chant à

retrouver : chant issu à la fois des profondeurs d’un rêve, et d’un jardin. Ce jardin, monde clos d’où vibre la petite musique de l’oiseleur, n’est pas sans évoquer un lien avec l’enfance, monde idéal, éloigné des préoccupations du roi et des exigences de sa charge. C’est donc un monde caché, ou occulté, que ce souverain porte en lui qui demande à se réanimer avec l’aide de l’oiseleur.

représentation de l’âme, et son chant délivre une parole. Notre roi n’est plus dans l’action ou le paraître, mais dans l’introspection. D’une certaine façon, ce chant recherché lui permet de se reconnecter à des émotions enfouies, sans passer par les mots. Car, comme toute expression artistique, la musique nous amène dans le mouvement, dans la vie !

Justement, quel va être son rôle ? Il est à la fois le repère et partenaire de la quête du roi. Il est un médiateur. Il a fait naître chez le souverain le désir vital de renouer avec l’émotion ressentie au son de la musique. Leur aventure artistique va permettre au roi de se raccorder à cet espace de sensibilité dont il s’est détourné. Grâce à l’oiseleur, le roi va engager avec lui-même une recherche intime et émotionnelle.

Quel enseignement peut-on tirer de cette fable ? Et qu’est-ce qui touchera les enfants ? L’enfant peut ressentir qu’il y a un danger pour soi-même à ce que force et puissance prennent le pas, aliénant, sur toutes les autres composantes de la personnalité. Il peut aussi percevoir qu’il a fallu des tâtonnements au roi, et aussi du temps et de la ténacité à l’oiseleur pour l’aider à trouver la paix... Enfin, l’histoire montre aussi aux adultes que nous sommes, que c’est en restant à l’écoute de sa propre musique, c’est-à-dire de ses ressentis ou de sa créativité, que l’on trouve des bienfaits... n Propos recueillis par Valérie Chevereau

Qu’est-ce que symbolisent ici l’oiseau et son chant tant désiré ? On pourrait y reconnaître l’illustration d’une résonance intérieure, d’un souffle, d’autant que l’oiseau est la

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Et deux jolis contes de princesses et de chevaliers ! La princesse prisonnière Le chevalier au fier destrier


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