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Florence CESTAC, VOUTCH & BLUTCH rendent HOMMAGE À TOMI
KHALID BOUTAÏB DU RACING À LA Coupe d’Afrique des nations
strasbourg
#210 janvier 2017
LES WEEPERS ATOMIK CIRCUS
INÈS DE ROCKY ELECTRO PUNCHY
Illustration de Jennifer Yerkes pour Mix
ÉDITO
UN JOUR SANS FIN Les lumières s’éteignent. Chut, la séance commence. Nous voilà dans la pénombre de L’Odyssée, magnifique salle du centre-ville où l’on ne projette pas simplement des films, mais ses envies, des idées pour appréhender le présent, des projets pour demain. Un lieu qui ne cherche pas à tout prix à booster sa fréquentation, mais à fédérer les cinéphiles désirant revoir leurs classiques et à séduire les aficionados d’événements bouillonnants au cœur de la cité. Sur l’écran géant, pas d’énième redif’ d’Hannah et ses sœurs (super film au demeurant), pas d’Almodovar qui nous mettrait au bord de la crise de nerf (et que nous avons déjà en DVD), mais de plus ou moins longs métrages répondant à des thématiques ambitieuses et défricheuses. On se marre, on discute, on frissonne, on vibre tous ensemble, en compagnie de réalisateurs ou comédiens apportant leur éclairage. The End. Générique. Arrêtons de nous faire un film : les Rencontres cinématographiques d’Alsace (RCA) qui gèrent L’Odyssée depuis 25 ans ont été reconduites par la Ville (conseil municipal du 12/12/2016) pour une Délégation de service public de cinq ans. Nous rêvions d’un établissement indépendant d’esprit, allergique au train-train, transformant le ciné en spectacle vivant, avec rencontres studieuses ou apéros / débats enflammés, mixant films et musique live, œuvres du patrimoine mondial et découvertes inédites ou, pourquoi pas, bobines et bibine comme vient de le faire le cinéma Nova de Bruxelles qui a brassé sa propre bière pour célébrer ses 20 ans. Un modèle de dynamisme qu’il aurait
16 rue Teutsch - 67000 Strasbourg - www.magazinemix.fr
fallu suivre… Nous espérions du changement, du mouvement, de l’émulation… mais la municipalité a opté pour le Statu quOdyssée. En 2016 comme il y a cinq ans, un collectif construit autour de l’équipe dirigeante des cinémas Star présentait pourtant un projet ayant pour but, selon Stéphane Libs, de « redonner tout son prestige à la plus belle salle de France », d’enrayer « l’érosion de la fréquentation constatée depuis une quinzaine d’années » et de « faire de chaque programmation un véritable événement ». Pour l’unique collectif concurrent des RCA (pour six en 2011), il était question de nouer un solide partenariat avec la Cinémathèque, de proposer un tarif unique (5 €) et de « recréer un plaisir spontané de cinéma » non plus tourné vers des programmes conçus avec les Consulats et Ambassades, mais vers les spectateurs, citoyens, associations et organisateurs de festivals. « Nous désirions tendre la main aux Strasbourgeois, notamment aux plus jeunes, afin qu’ils puissent s’accaparer » un outil qui leur est – normalement – dédié. Stéphane Libs et son équipe avaient « la naïveté d’y croire : c’est un mal local d’être perdant d’avance ! » Cependant, on se frotte les yeux : nous sommes en 2017 et c’est le jour de la marmotte. Nous vivons Un jour sans fin, nettement moins poilant que dans le film.
Emmanuel Dosda
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BRÈVES
L’Institut supérieur des Arts appliqués de Strasbourg est une école que l’on apprécie particulièrement chez Mix, nos brillantes graphistes en étant issues. Formant des étudiants dans les domaines du graphisme, de l’édition, de la pub, de l’archi d’intérieur, du paysage et de l’agencement, Lisaa (1A rue Thiergarten) organise ses Journées Portes Ouvertes (28 & 29/01). Une belle occasion pour découvrir sa pédagogie tournée vers le monde professionnel ainsi que les projets de ses élèves. # E.D. www.lisaa.com
© Jean-Louis Hess
LISAA OUVRE SES PORTES
CHINER ! C’est le plus beau de Strasbourg ! Pour sa 11e édition, le Salon Européen de l’Antiquité, de la Brocante et du Design (28 & 29/01, Salle de la Bourse) propose un plateau de haut niveau, rassemblant généralistes et spécialistes comme un vendeur d’appareils photos anciens et de daguerréotypes rares, un expert mondialement reconnu des faïences de Sarreguemines, un aficionado du tapis ou encore un marchand d’Art africain. La grande classe ! # H.L. www.brocantes-strasbourg.fr
Décalé
Originaires de l’Ouest américain, créées en 1984, ces conférences 2.0 se sont aujourd’hui développées partout dans le monde, loin de leur Californie natale. L’idée des TEDx ? « Échanger des idées novatrices », nous éclaire Valérie Peraro, membre de l’équipe organisatrice de TEDx Alsace. Ses domaines de prédilection ? Présents dans le nom de l’organisation – Technology-EntertainmentDesign –, ils sont étudiés et développés par « des esprits brillants pour partager leurs idées avec le monde », dixit une organisation conviant régulièrement « des cerveaux », des têtes bien pleines et autres humanistes contemporains à traiter d’un sujet, sous un angle précis, durant 18 minutes, montre en main ! Après le temps de la conférence, les vidéos des différentes interventions sont mises en ligne et consultables par tous. Pour Valérie, les conférences TEDx sont comparables à « une machine à laver cérébrale et émotionnelle », permettant de faire évoluer les opinions, de casser les préjugés et d’ouvrir les esprits de chacun. La liste des noms des douze “speakers” nous donnant rendez-vous à la Cité de la Musique et de la Danse de Strasbourg (21/01) demeure encore secrète, mais le thème abordé sera “Est-ce la limite ?”. Les différents intervenants, durant les cinq heures de l’événement, partageront des « expériences de vie » afin de nous aider à dépasser nos propres limites, à pousser les frontières technologiques ou économiques, à « sortir des sentiers battus ». Soutenu par Strasbourg - Eurométropole et d’autres partenaires publics et privés, l’événement s’annonce comme un moment exceptionnel pour toutes les personnes en quête de sens. # E.D. www.tedxalsace.com 4—
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www.lacastine.com www.scenes-du-nord.fr l’abus d’alcool est dangereux pour la santé, à consommer avec modération
TEDx : AU-DELÀ DES LIMITES
La Castine de Reichshoffen présente une pièce intitulée La Mate de Flore Lefebvre (14/01). L’actrice embarque le spectateur dans son enfance en déroulant ses souvenirs familiaux. Des rires aux peurs enfantines, les spectateurs se retrouvent dans ce récit proposé dans le cadre du festival Décalages (12/01-24/01), offrant une programmation éclectique misant sur l’originalité des créations contemporaines. # C.D.
DÉCOUVERTES VINICOLES Les Vignerons Indépendants organisent la 24e édition de leur Salon à Strasbourg (17 - 20/02). Cet événement est l’occasion de découvrir de nouveaux vins et de pouvoir échanger avec les vignerons. Dans un parcours mélangeant les grandes appellations avec les moins connues, les visiteurs ont la possibilité de goûter la variété des productions vinicoles françaises. # C.D. www.vigneron-independant.com
© René Habermacher
INTERVIEW
WE WILL ROCK YOU
ces à
Pla r ! gagne voir p.30
Uppercuts pop-soul, directs du droit dans les basses, crochets house : ROCKY nous balance dans les cordes avec Soft Machines, premier album punchy à découvrir sur scène à l’Espace culturel Django Reinhardt. Entretien avec Inès Kokou, chanteuse “gracejonessienne” du quatuor lillois. # Emmanuel Dosda Face à l’univers de ROCKY, difficile de ne pas songer au boxeur incarné par Stallone, à l’esthétique de JeanPaul Goude et aux sonorités synthétiques eighties… Fan des années 1980 ? C’est une décennie où débutent de nombreux croisements entre les musiques, par exemple le punk-rock qui rencontre la house avec Primal Scream. Sinon, je suis très fan de Goude, d’ailleurs [elle fait une pause, gênée]… Non rien, j’allais vous faire une confession… Allez-y, je suis votre confident… Bon, d’accord. Il y a quelques années, je lui ai fait un mail pour lui déclarer mon amour et lui demander de faire les photos de mon album. Un mail resté sans réponse… Il y a quelque chose d’afrobeat sur votre titre Edzinefa Nawo, dont le refrain est chanté en mina, langue togolaise. Est-ce un moyen de renouer avec vos racines africaines ? Je suis d’origine togolaise et ce morceau est un hommage à mes parents. Il s’agit d’un clin d’œil élargissant encore le spectre de ROCKY. Nos goûts sont très vastes et nous 6—
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écoutons beaucoup de musique africaine qui, sans vouloir faire cliché, engage le corps et le bassin. Le clip de Big South a été tourné à Johannesburg… Nous avons eu la chance de travailler avec le réalisateur sud-africain Travys Owen et les membres du V.I.N.T.A.G.E. Cru, collectif de danse que j’adore. Je trouve qu’il y a un intéressant contraste entre notre musique et les danseurs de voguing noirs. On leur a fait écouter le morceau et ils sont partis en freestyle… Vous être danseuse ? De salon [rires]. Petite, j’ai beaucoup fait de remakes des chorés de Madonna ou de Michael Jackson et aujourd’hui, je ne suis jamais la dernière sur le dancefloor ! L’ordinateur est très présent, mais il y a aussi du chant gospel et du saxo sur votre album, mélange entre électronique et organique… Notre premier EP était très electro et nous souhaitions changer la donne. Pour le gospel, j’aurais pu sampler ma voix et créer des couches, mais nous avons eu la chance
de travailler avec Rouge Mary d’Hercules and Love Affair qui a écrit les arrangements du chœur et nous a permis d’enregistrer avec toute une chorale qui apporte une réelle émotion. Qu’est-ce qui vous inspire ? La mode, un domaine d’où je viens professionnellement, travaillant encore pour le bureau de tendances Peclers. J’adore passer d’Acne Studios à Prada, d’un look très streetwear à une allure glamour sur douze centimètres ou déconstruite jouant sur les volumes. Si je me ruine en fringues ? Plutôt maline, je trouve toujours tout pour une bouchée de pain. Mais bon, je suis aussi adepte du craquage… quand le compte en banque le permet ! Soft Machines, édité par G.U.M. www.label-gum.com Espace culturel Django Reinhardt (Strasbourg) 24/02 (20h) www.espacedjango.eu
Š RenÊ Habermacher
Portrait de Stéphane Louis pour Mix
RACING CARRÉ Auteur de dix réalisations en championnat, Khalid Bouta b est l’actuel meilleur buteur du Racing Club Strasbourg Alsace. Doué balle au pied, le longiligne attaquant franco-marocain – sélectionné pour la Coupe d’Afrique des Nations dans l’équipe des Lions de l’Atlas – a aussi la bosse des maths. Portrait. # Hervé Lévy
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SPORT
La Ligue 2 est un univers impitoyable où tous les « gros sont au rendez-vous cette saison », résume Khalid Boutaïb, un des artisans du beau parcours alsacien puisqu’à la veille de la vingtième journée (14/01, déplacement à Amiens), le Racing est quatrième du classement, à trois points du leader brestois. Auteur de 40% des buts de son équipe en championnat, l’attaquant franco-marocain va manquer à son club en ce début d’année, puisqu’il fait partie des 23 joueurs retenus par Hervé Renard dans la sélection des Lions de l’Atlas pour la Coupe d’Afrique des Nations (au Gabon, 14/01-05/02). Il prend ce challenge avec philosophie et confiance, lui qui est venu au foot un peu par hasard : « Je m’en foutais au début. C’était du plaisir de jouer avec les collègues du quartier, à Bagnolssur-Cèze », où il est né le 24 avril 1987. Après son Bac Sciences et Technologies de Laboratoire, il passe même un BTS Mesures physiques, « au cas où ça ne marche pas avec le foot. Je m’étais donné deux ou trois ans pour réussir », s’amuse-t-il. Son truc ? Les maths : 20 / 20 au Bac et au BTS, qui dit mieux ? « J’ai accroché tout petit.
Mon beau-père me donnait des cours. Avec lui, j’ai appris les inconnues avant de les découvrir à l’école. Maintenant, j’aide des collègues qui passent des diplômes en leur expliquant les primitives ou les dérivées. » Si ça lui sert sur le terrain ? « Vite fait. Mes coéquipiers disent que je calcule tout », se marre-t-il. Passé par Uzès-Pont du Gard, Istres et Luzenac – il fut de l’épopée de la “montée” en Ligue 2 qui s’acheva tristement devant les tribunaux – il découvre le monde pro sur le tard, en 2014, avec le Gazélec Ajaccio avec qui il accède en Ligue 1. À l’époque, le coach se nommait Thierry Laurey… On espère que les mêmes protagonistes arriveront à un résultat similaire avec le Racing, cette saison, mais « il faut prendre match par match, rester à l’affût », résume le joueur. À Strasbourg, Khalid Boutaïb a découvert le froid du climat – « c’est la première fois que je dépasse Lyon » – et la chaleur des supporters, « un truc de dingues. À Ajaccio, on jouait souvent à guichets fermés, mais Ange Casanova est tout petit (capacité de 8 000 places réduite à 4 050
pour raisons de sécurité, NDLR). Ici, il y a au moins trois fois plus de spectateurs à chaque match. Contre Lens, c’était la folie. Le kop est toujours plein et nos supporters nous suivent à l’extérieur : ils ont mis le feu à Sochaux ». Discret dans la vie, le joueur concède aimer se « balader dans le centre de Strasbourg, écouter de tout, surtout du rap français et du R’n’B américain, regarder des films d’action et des comédies, adorer l’humour de [s]on pote Malik Bentalha », un ancien du Jamel Comedy Club, également natif de Bagnols-sur-Cèze. Sur le terrain c’est une autre affaire… Précis, pointu, affûté, Boutaïb – admiratif de « Zizou et Ronaldinho » – affole les défenses adverses avec son gabarit élancé (1,90 m pour 80 kg, un physique à la Javier Pastore auquel on pourrait le comparer dans ses déplacements), n’hésite pas à revenir défendre pour servir le collectif et préfère « jouer pour l’équipe. Si je ne marque pas pendant dix matches et que le Racing gagne, ce n’est pas grave. Je ne veux pas forcément la lumière sur moi. »
La saison de Khalid Boutaïb EN QUELQUES DATES 07/07. Signature au Racing 12/08. Premier but sous ses nouvelles couleurs et premier triplé pour une victoire à l’extérieur contre Tours (1- 3) 15/11. Doublé avec le Maroc dans un match amical contre le Togo (2-1) 16/12. Marque deux des trois buts de la victoire contre Niort 23/12. Appelé dans le groupe des 26 de l’équipe nationale du Maroc pour le stage de préparation aux Émirats Arabes Unis 04/01. Intègre la liste des 23
Photo de Franck Kobi / RC Strasbourg Alsace
16/01. Premier match du Maroc dans la CAN 2017 contre la République démocratique du Congo
Les prochains matches à la Meinau 20/01 03/02 10/02 24/02
RCSA-Tours RCSA-Ajaccio RCSA-Orléans RCSA-Clermont
www.rcstrasbourgalsace.fr 210 l
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TRIBUTE TO TOMI
FOR TOMI WITH LOVE Ils font partie des artistes participant à l’expo Tomi Ungerer Forever : nous avons interrogé Rémi Courgeon, Peter Knapp, Voutch, Jochen Gerner et Blutch. Ils expliquent leur attachement à l’illustrateur alsacien. # Emmanuel Dosda & Hervé Lévy
Voutch
Blutch
auteur de Bientôt l’hiver, édité chez Le Genévrier
auteur culte du Petit Christian, édité par L’Association
« Tomi a tout réussi dans sa vie, mais demeure une petite frustration : il n’a jamais été connu du grand public en France, en dehors de l’Alsace, alors qu’il est célèbre partout dans le monde ! Pour moi, c’est une star, un des plus grands. Je ne réponds jamais aux différentes sollicitations car je n’ai pas le temps, mais là, il fallait que je lui rende hommage. J’adore The Party et je m’en suis nourri, même si je ne suis pas capable d’une telle acidité. Il détruit l’Amérique triomphante et arrogante avec de l’encre et du papier : quelle férocité ! Je me moque également de la bourgeoisie dans mes dessins, mais c’est parce qu’il s’agit d’un milieu que je connais bien, que j’ai côtoyé ayant travaillé dans la pub : il faut bien que le dessin d’humour repose sur quelque-chose et donc fasse une victime. »
« Je suis de Strasbourg : Tomi est “dans le paysage” depuis mon enfance, parce que j’ai vu des affiches de lui, qu’on parle régulièrement de lui… Je me souviens, lorsque j’avais une quinzaine d’années de L’Aqueduc de Janus, une fontaine érigée pour le bimillénaire de Strasbourg. Pour résumer, il est une présence familière qui m’entoure depuis de longues années. Je ne l’ai pas connu par ses livres pour enfants : je les ai découverts bien plus tard et les ai fait aimer aux miens qui s’en sont emparés de manière effrénée… C’est la figure qu’il incarne – j’avais été le voir dans les années 1980 à la Librairie Kléber, pour une rencontre – et sa manière de dessiner qui me fascinent. C’est un véritable caméléon : son trait est toujours différent, mais c’est du Ungerer à chaque fois ! »
http://voutch.blog.lemonde.fr Chouette parachutiste, 2016, collection de l’artiste © Voutch
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Acimera Reregnu, 2015 © Blutch, Photo : Musées de la Ville de Strasbourg / Mathieu Bertola
Jochen Gerner
Rémi Courgeon
explorateur des frontières entre BD et art contemporain
auteur de Passion et Patience, édité chez Milan
« Enfant, les dessins de Tomi Ungerer m’ont marqué comme des surgissements de couleurs dans la nuit. Je percevais cela à la fois comme une vision directe de la réalité du monde et comme un scintillement chaleureux et réconfortant. Je voyais représenté dans ces grands livres souples l’évocation du mal et du bien, mais aussi et surtout la superposition brumeuse de ces deux notions. Des lavis de couleurs chaudes cernés de contours tremblés s’inscrivaient au milieu de profondes masses noires. Les Trois Brigands, Le Géant de Zéralda et La Grosse Bête de Monsieur Racine sont trois livres immenses. Mais depuis, j’ai sans cesse découvert de nouvelles strates dans l’œuvre de Tomi Ungerer, des dessins de la période américaine jusqu’aux derniers livres parus. La série des Mellops datant des années 1950 - 60 et racontant les aventures d’une famille de cochons fut rétrospectivement une grande découverte. Le trait fin de cette œuvre de jeunesse semblait déjà contenir ce qui constitue la spécificité de l’univers d’Ungerer : acéré, pointu et sensible. »
« Pour Bergson, “le comique c’est du mécanique plaqué sur du vivant” : chez Tomi, fils d’horloger, il y a ce rapport de l’être humain à la mécanique. Dans ses séries érotiques et SM, c’est tout à fait ça ! » www.remicourgeon.blogspot.com Sans titre, 2016, collection de l’artiste © Rémi Courgeon. Photo : Musées de la Ville de Strasbourg
www.jochengerner.com Les Trois Brigands, collection de l’artiste / courtesy Galerie Anne Barrault © Jochen Gerner Photo : Musées de la Ville de Strasbourg
Peter Knapp photographe, réalisateur, graphiste… « Nous avons tous les deux 85 ans et avons démarré en même temps. Dans les années 1960, alors que j’étais directeur artistique du magazine Elle, nous nous sommes rencontrés une première fois grâce au dessinateur André François. Nous nous sommes revus à New York avant de nous perdre de vue et de nous retrouver dans un hôtel de Baden-Baden, trente ans plus tard ! Pour lui rendre hommage, j’ai choisi un de mes dessins, dans l’esprit de Tomi, où un homme dit “C’est très bien de se revoir”… Chez lui, le style n’est pas une manière ou une répétition. Le style, chez lui, c’est l’homme ! » www.peterknappphotography.com Peter Knapp, Ich bin so glücklich, dich wieder zu sehen (Je suis heureux de te revoir), collection de l’artiste © Peter Knapp. Photo : Musées de la Ville de Strasbourg 210 l
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© Rita Scaglia
TRIBUTE TO TOMI
Hommage à Tomi, 2015 © Florence Cestac
au pif Pour les 85 ans du papa des Trois Brigands, le Musée Tomi Ungerer expose plus de 85 hommages rendus par des artistes qui sont ses rejetons. Parmi eux : Florence Cestac, fondatrice des influentes éditions Futuropolis (Tardi, Swarte, F’murr…) et auteure de BD (Le Démon de midi…) habitées par des héros aux gros nez. # Emmanuel Dosda Quel est le lien entre votre travail et celui de Tomi Ungerer ? Tomi Ungerer a bercé mon enfance. Il m’a accompagnée à tous les âges de la vie, il est dans ma tête et fait partie de mon monde. Je ne saurais pas trop vous expliquer en quoi il m’influence, mais c’est le cas : je l’admire depuis toujours et suis très heureuse d’avoir pu lui rendre hommage au musée qui porte son nom. Tomi Ungerer change sans cesse de style, en fonction des sujets, du public visé. À contrario, qu’il s’agisse de la bio un peu trash de Charlie Schlingo (Je voudrais me suicider mais j’ai pas le temps) ou de votre enfance passée au pensionnat racontée dans Filles des Oiseaux, votre univers graphique reste identique… Tous mes personnages ont la même tronche, avec de gros nez : c’est ma marque de fabrique ! On reconnaît du Cestac grâce au gros nez. Je décline tout de cette manière, alors que chez Tomi, c’est radicalement différent. Peut-être que si je faisais du cul, je ferais autrement, mais bon, je suis trop vieille pour changer ! Il n’est jamais trop tard pour changer… Si on me demande de faire “réaliste” et de supprimer les nez, ça ne va pas ! Qu’on s’adresse aux adultes ou aux enfants, comme je l’ai fait dans le Journal de Mickey, pour moi, c’est la même chose : je raconte une histoire. Pour l’exposition, cependant, vous avez réalisé un collage… Je me suis concentrée sur Ungerer et j’ai composé un personnage avec ses différentes expressions, un être fantomatique fait de tous les genres graphiques dont il s’est servi. 12 —
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Dans votre dernier album autobiographique, Filles des Oiseaux, vous décrivez une institution religieuse stricte, mais finalement pas si horrible que ça. Les sœurs n’étaient pas les tortionnaires qu’on aurait pu imaginer, notamment à la lecture de la préface de Teulé ? Teulé dit que cette période sentait les chaussettes du Général de Gaulle et le slip de Tante Yvonne ! Ça n’était pas horrible, mais on s’emmerdait il y a cinquante ans : tout était gris et l’avenir était bouché car on allait vivre comme nos parents. Les bonnes sœurs n’étaient pas spécialement méchantes, mais elles étaient connes et nous abrutissaient. C’était différent dans les pensionnats de garçons où ils étaient dressés ! On nous apprenait à être de bonnes épouses ou des servantes du Seigneur. En sortant de là, il ne fallait surtout plus nous parler de Dieu tant nous en avions fait une overdose. Pour moi, ça reste l’école de la révolte, de la contestation : je faisais tout pour les faire chier ! C’est peut-être pour cette raison que je suis allée aux Beaux-Arts après ça. Tomi Ungerer Forever, + de 85 artistes pour ses 85 ans au Musée Tomi Ungerer Centre International de l’illustration (Strasbourg), jusqu’au 19/03 www.musees.strasbourg.eu Filles des Oiseaux (tome 1/2, 13,99 €) et Harry Mickson & Co (24,95 €), édités par Dargaud www.dargaud.com www.cestac.com
Tomi Ungerer, L’Homme aux Lunettes, 1963, Sammlung Würth, Inv. 6098
FOIRE
LES 1 001 VISAGES DE TOMI Quatorzième du nom, art KARLSRUHE 2017 s’annonce très dense. Plongée dans la foire internationale d’Art moderne et contemporain où est présentée une belle exposition dédiée à Tomi Ungerer. # Hervé Lévy Des chiffres à donner le vertige et une qualité qui positionne la manifestation dans le peloton de tête du bassin rhénan, tout juste derrière Art Basel : 35 000 m2, 210 galeries venues de 12 pays présentant la crème de la crème de l’Art moderne et contemporain, 50 000 visiteurs attendus… Le cru 2017 d’art KARLSRUHE promet d’être particulièrement riche avec des invités de prestige (comme l’iconoclaste Jonathan Meese) et des expositions de haut niveau au nombre desquelles figure Retour de Paris rassemblant les œuvres des artistes boursiers allemands qui ont pu, depuis trente ans, séjourner dans la Cité internationale des Arts de la capitale française. Pour son 85e anniversaire, Tomi Ungerer sera sous le feu des projecteurs avec une rétrospective mettant en lumière son talent protéiforme à travers la prestigieuse collection de l’entrepreneur allemand Reinhold Würth qui compte 240 pièces de l’artiste alsacien à qui il est lié par une belle amitié.
On y apprécie la multiplicité des moyens utilisés par le prolifique créateur qui juge qu’avec les collages « on peut taper plus dur ! J’en ai fait au moment de la Guerre du Vietnam ». Il s’y est remis récemment : on avait découvert cette nouvelle facette de son talent dans l’exposition de 2010 intitulée Éclipse que la Kunsthalle Würth de Schwäbisch Hall lui avait dédiée, la plus importante de la planète jusqu’à présent (avec 650 œuvres présentées). Dans la série En Attendant Godot d’inspiration clairement surréaliste, on voit par exemple détourné avec finesse le logo de Pathé-Marconi, la fameuse Voix de son Maître : une douzaine de chiens regardent, dubitatifs, un tournedisque évoquant une poubelle. Impavides et apaisés, ils semblent attendre… la mort. Également présentés, des sculptures – un aspect de l’art de Tomi trop mal connu – et autres assemblages d’objets comme des pelles anthropomorphes qui semblent vous regarder, l’œil mouillé. On allait oublier
les dessins représentatifs du « caméléonisme » de l’artiste : manifeste politique en forme de critique acerbe de la société de consommation avec femmes mortifères et angoissantes en robe de soirée, un cocktail à la main, huiles post-expressionnistes des années 1960 comme le très bel Homme aux lunettes, sexy dominas ou encore compositions réalisées pour des livres destinés aux enfants au succès mondial comme Otto ou Les Trois brigands. En quelques mètres carrés, le visiteur peut arprenter toute la création de Tomi… ou presque.
S ENTRÉàE VIP
r ! gagne .30 voir p
16-19/02 Parc des expositions (Karlsruhe) www.art-karlsruhe.de
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OUVRE-MOI TA PORTE
WEEPERS CIRCUS Les Strasbourgeois ont mis en stand-by leur activité “rock pour adultes” pour se consacrer à Weepers Circus chante n’importe nawak !, livre / CD de chansons déjantées pour enfants de 3 à 103 ans. Incruste chez Christian Houllé, claviers et porte-parole du groupe, qui a choisi quelques-uns de ses objets emblématiques. # Emmanuel Dosda 1. Mon mélodica « Denis, le clarinettiste, me l’a offert il y a une dizaine d’années. On dit que l’accordéon est le piano du pauvre. Et bien, le mélodica est l’accordéon du pauvre ! Ça sonne faux et tout le groupe est réfractaire au fait que je l’utilise. J’ai cependant réussi à le placer sur Je connais tous tes secrets, titre de l’album Planète des songes. Cet instrument est sous-estimé ! »
3. Des disques des Beatles « Les frères Georges, qui ont créé le groupe en 1988, ont été très inspirés par les Beatles. Au début, ils chantaient d’ailleurs en anglais, comme John et Paul. À l’image des Beatles, nous aimons les albums plus conceptuels ou expérimentaux : N’importe où et hors du monde par exemple, avec Jean Rochefort récitant du Baudelaire sur les ondes Martenot de Christine Ott. »
2. L’album The Wall « On a souvent dit que Weepers Circus était un groupe de scène, mais nous ne sommes pas d’accord, accordant autant d’importance au live qu’au studio, comme Pink Floyd. Plus jeunes, nous avons été marqués par The Wall qui contient des morceaux orchestraux : c’est peut-être pour cette raison que le groupe a eu envie de jouer avec l’Orchestre philharmonique de Strasbourg, en mars 2016. »
4. Un poupon « Faisant partie de notre spectacle Le grand bazar, il représente le côté anti-Henri Dès des Weepers. Sur scène, nous nourrissons un dragon : nous lui donnons un os à ronger, un lapin et… ce bébé ! Nous avons créé un horrible bruitage à l’aide de spaghettis crus que l’on broie : ça fait hurler les enfants et se marrer les parents. Les Weepers sont de sales gosses qui vont jusqu’à se donner des coups de gourdin sur le crâne sur scène… On y a laissé des neurones ! »
5. Un objet-mystère « Je préfère ne rien dire de cet étrange instrument… » Weepers Circus chante n’importe nawak ! livre / CD (avec Anne Sylvestre, Richard Gotainer ou Tcheky Karyo), illustré par Clotilde Perrin, édité par Gallimard Jeunesse (24,90 €) www.weeperscircus.com
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Liv r ! gagne voir p.30
En concert : 24/03 à Colmar, 21/06 à Strasbourg et 01/07 à Sélestat
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© Bartosch Salmanski
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ACTUS
© Élisabeth Carecchio
Humain trop humain RAVEL PARTY
Maurice Ravel a sauvé Claude Duparfait. Il narre cette catharsis dans La Fonction Ravel présenté dans le cadre de L’Autre saison du TNS (19-21/01, entrée libre sur réservation). Picardie, morne plaine. Dans les années 1970, « en grand désarroi scolaire et affectif », La Valse, entendue sur un transistor, le transcende. Le spectacle mis en scène par Célie Pauthe narre cet électrochoc fondateur qui a métamorphosé l’acteur en “ravelolâtre” compulsif. Ce « coup de foudre pour un artiste possédant un fond mélancolique, mais qui n’a de cesse d’enchanter et d’embellir le monde a engendré une dynamique qui m’a en quelque sorte amené au théâtre », explique-t-il. Les mots de Claude Duparfait, les notes de l’auteur du Boléro interprétées par le pianiste François Dumont, les chorégraphies imaginées par Thierry Thieû Niang et les vidéos de François Weber notamment tournées dans la maison familiale tourbillonnent et s’entremêlent, montrant avec grande délicatesse que l’Art peut être salvateur. # H.L.
Double actualité de l’excellente chorégraphe Maguy Marin en janvier avec tout d’abord un solo composé pour son fils David Mambouch (Singspiele, Pôle Sud, 19-20/01). Une errance dans un couloir, face au public du comédien dont la tête est cachée derrière un calepin dont il égrène les feuilles imprimées de portraits de gens plus ou moins connus. Il multiplie ainsi les instants fugaces de vie, enfilant et enlevant chemises, vestes et accessoires. Des histoires s’ébauchent dans l’instant, tissées dans l’infime d’un bouton qui se ferme, d’une cravate qui se noue ou de talons qui s’enfilent avant que ne se croisent des jambes dont on oublie la pilosité. Puis Maguy Marin s’attaque à l’humanité et ses travers dans Umwelt (Maillon-Wacken, 17-19/01). Neuf danseurs errent au milieu d’une scène toute en largeur, cisaillée de sept ouvertures sur un fond de miroirs que d’énormes souffleries font vaciller et tanguer. Un jeu d’apparitions fugaces et impromptues de toute beauté : les personnages s’agrippent par le colback, se déshabillent et s’enlacent, se braquent avec un flingue ou s’essuient comme s’ils sortaient de la douche dans un jeu de canon, d’écho et de répétition rythmé. # J.J. www.maillon.eu – www.pole-sud.fr
Umwelt © Hervé Deroo
www.tns.fr
Singspiele © Stéphane Rouaud
Maudit ! La compagnie Munstrum Théâtre présente sa dernière pièce, Le Chien, la nuit et le couteau de Marius von Mayenburg (Taps Laiterie, 31/01-04/02). L’histoire d’un protagoniste naïf et enfantin nommé M – comme M le Maudit ! – qui mène une quête obstinée de la vérité. Deux jeunes comédiens originaires de Mulhouse, Louis Arene (pensionnaire de la Comédie-Française) et Lionel Lingelser inventent une scénographie impressionnante laissant une grande place à des masques formant de saisissantes secondes peaux. M passe de la proie au prédateur dans ce qui ressemble à voyage initiatique dans toute la noirceur de la nature humaine. Le public est plongé dans le rêve de M. À ne pas manquer ! # J.J. www.taps.strasbourg.eu 210 l
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sélection de la rédaction scolaires (14/01) : une comédie hilarante sur la problématique contemporaine du divorce et des familles recomposées. www.le-preo.fr
LA CASTINE REICHSHOFFEN
Knee Deep (28/01) du Casus Circus : un spectacle pour toute la famille, qui tourne autour de l’agilité du corps, de sa fragilité et de sa poésie. www.lacastine.com
La chanteuse ivoirienne Dobet Gnahoré © Nicolas Baret
SCHILTIGHEIM Elle(s), pièce de théâtre rock (21/01 Le Brassin), se penche sur le défi d’être femme au XXIe siècle. Toutes des guerrières insoumises ? www.ville-schiltigheim.fr
Nord
la Wantzenau) ses plus belles chansons. www.lefildeau.fr
LA SALLE DU CERCLE RELAIS CULTUREL BISCHHEIM
Le groupe de musique irlandaise Toss’n Turn (20/01) est accompagné sur scène par deux danseurs de claquettes pour une chorégraphie aérienne. www.salleducercle.fr
MAC ROBERT LIEB BISCHWILLER
The Glenn Miller Memorial Orchestra propose un passionnant Hommage à Frank Sinatra (21/01), entre swing et jazz. www.mac-bischwiller.fr
LE FIL D’EAU WANTZENAU
Yves Jamait présente avec son nouvel album Je me souviens (10/02 Le Fil d’eau à 16 —
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www.relais-culturel-haguenau.com
MOULIN 9
NIEDERBRONN-LES-BAINS Dans la comédie à succès Ma colocataire est encore une garce, mis en scène par Anne Roumanoff, les mésaventures d’Hubert Chataigneau se poursuivent (27/01). www.niederbronn-les-bains.fr
LE PRÉ’O
OBERHAUSBERGEN Un week-end sur deux, et la moitié des vacances
www.ville-erstein.fr
L’ILLIADE
ILLKIRCH-GRAFFENSTADEN La chanteuse ivoirienne Dobet Gnahoré (12/01) chante en plusieurs langues du continent noir sur des sonorités panafricaines. www.illiade.com
LA MAISON DES ARTS LINGOLSHEIM
Au pied de la lettre #2 (28/01) spectacle de danse (à partir de 8 ans), réunit deux générations de chorégraphes, il se base sur le mythe de l’Odyssée.
ESPACE CULTUREL
www.lingolsheim.fr
VENDENHEIM
ESPACE ATHIC
Dans King du Ring (19/01), Muhammad Ali se livre en plein combat à travers un monologue intérieur. Il fait part de sa lutte contre l’Amérique blanche, guerrière et consommatrice.
OBERNAI
Macbeth Experience (27/01), une version moderne du classique shakespearien dans une mise en scène surréaliste.
www.vendenheim.fr
Sud
HAGUENAU
La Compagnie des Dramaticules : un Ubu roi (31/01 Théâtre de Haguenau) à l’extrême de l’absurdité, de l’abus et de la laideur du monde.
principal se couronne roi d’un soir, roi de la nuit, roi de sa vie.
MUSÉE WÜRTH ERSTEIN
Être ou paraître (03/02), pièce forte où le personnage
www.espace-athic.com
LE POINT D’EAU OSTWALD
Fratries (12-14/01) plonge le public dans les souvenirs d’enfance de frères et de sœurs qui se mêlent avec des récits mythologiques. www.lepointdeau.com
Yves Jamait © Wagram / G. Favre pour T. Nowak Consulting
scènes
SÉLESTAT
Cœur cousu (15 & 16/01 dans le cadre des Régionales) : un cadeau de famille mystérieux qui traverse les générations. www.tanzmatten.fr
Strasbourg ESPACE CULTUREL DJANGO REINHARDT
LES TAPS
Stendhal (11-15/01) en spectacle de danse selon Uwe Scholz. Un chef-d’œuvre.
Play Loud de Falk Richter (1113/01) parle des trentenaires d’aujourd’hui, entre crise économique et existentielle.
www.operanationaldurhin.eu
ORCHESTRE PHILHARMONIQUE
www.taps.strasbourg.eu
TJP
Leif Segerstram, le maître finlandais est de retour avec Soleils du Nord (19 & 20/01, PMC) pour illuminer ce début d’année.
Poudre Noire (31/0102/02, Grande Scène) raconte l’histoire d’un enfant, confronté aux fantômes de sa famille. www.tjp-strasbourg.com
www.philharmonique-
THÉÂTRE NATIONAL de strasbourg
strasbourg.com
Le Mountain Men + Flo Bauer Blues Project (01/02) pour une soirée sous le signe du blues teinté de rock.
Dans le cadre de l’Autre Saison, La fonction Ravel (19-21/01) raconte la rencontre entre le comédien Claude Duparfait et la musique de Maurice Ravel.
www.espacedjango.eu
Au Brassin de Schiltigheim, Elles © Alessia Contu
CENTRE SOCIOCULTUREL DU FOSSÉ DES TREIZE Avec Dadada, Roberto Negro, Émile Parisien et Michele Rabbia (14/01) présentent leur nouveau projet jazz, inspiré par le peintre catalan Joan Mirò. www.jazzdor.com
LE MAILLON Cold Blood (24-26/01), un film réalisé en direct sous les yeux du public. Un voyage poétique où des doigts se baladent dans un décor miniature. www.maillon.eu
LES MIGRATEURS Femme sans nom (04 & 05/02 Théâtre de Hautepierre) : l’animal comme témoin de la folie des hommes.
ESPACE K Dans Rebelles (24-28/01), Karine Lyachenko revoit l’histoire des femmes à travers les siècles en Marie Antoinette, BB ou Jackie Kennedy. www.espace-k.com
www.tns.fr
THEÂTRE DU CUBE NOIR La Réunification des deux Corées de Joël Pommerat (1117/01), une pièce sur la complexité et les impasses de l’amour. www.trois14.org
ZÉNITH Inclassable, les Dropkick Murphys, fortement liés à leur patrie irlandaise (04/02) sont des stars de la scène punk avec leur touche bien à eux. Your Spirit’s Alive !
Divine Comedy
LES TANZMATTEN
LA LAITERIE Quand il aime, The Divine Comedy (28/01 La Laiterie) ne compte pas : il est prêt à toutes les folies, par exemple celle de bâtir un monde imaginaire, un palais fastueux, un merveilleux Foreverland (PIAS) à ceux que le dandy chérit. Avec son nouvel album, Neil the Great accompagne ses hôtes en un charmant manoir irlandais décoré avec outrance, mais goût. Dans les pièces éclairées à la bougie, résonnent notes de clavecin et chansons orchestrées façon Scott Walker. Les habitués se sentiront comme chez eux. Les autres seront séduits par le divin musicien. www.artefact.org
www.thedivinecomedy.com
www.zenith-strasbourg.fr
ces à
Pla r ! gagne voir p.30
www.lesmigrateurs.eu
PÔLE SUD Avec Moeder (Mère) la compagnie belge Peeping Tom poursuit sa trilogie sur la famille et explore le rôle de la mère en voie de disparition (01-03/02). www.pole-sud.fr
Dropkick Murphys
OPÉRA NATIONAL DU RHIN Le Rouge et le Noir de 210 l
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EXPORAMA Jean-Paul Ehrismann expose avec Mes chemins de traverse (07/01-12/02 Cour des Boecklin) ses aquarelles qui invitent à la flânerie. www.ville-bischheim.fr
Dans Archi-Paysage on découvre les œuvres de cinq artistes (07-28/01, Galerie Bertrand Gillig) qui travaillent sur le thème de l’architecture et son intégration dans le paysage.
© Clément Montolio
www.bertrandgillig.fr
Brice d’Andlau-Boutry au Ciarus
La photographe Françoise Saur (13/01-26/02, La Chambre) se concentre dans son travail sur le motif de la fleur. www.la-chambre.org
Rac’hell Calaveras (13/0113/02, Two Aces Tattoo Club) expose ses sculptures en plâtre
qui s’inspirent de l’art populaire mexicain.
tagent leurs impressions par la peinture.
www.twoacestattooclub.com
www.ciarus.com
Arbor et Sens (16/0116/02 Ciarus) réunit Valérie Demenge et Brice d’AndlauBoutr y, deux ar tistes passionnés par la randonné, les Vosges et l’Alsace qui par-
Après une première exposition en 2015, l’artiste phocéen Nicolas Nicolini revient en Alsace (Vernissage 15/01 à 15h, jusqu’au 19/02). La Galerie Le Point Fort à Mittelhausbergen
lui donne carte blanche pour présenter ses peintures et dessins récents. www.lepointfort.eu
Dans Petits mondes (jusqu’au 16/01 Musée de l’Œuvre Notre-Dame) on découvre les Miniatures du cabinet des estampes, genre méconnu du début du XVIIe siècle. À visiter une loupe à la main ! www.musees.strasbourg.eu
Dans Hug Life (Vernissage 19/01 à 18h, jusqu’au 09/02, PopArtiserie), l’artiste strasbourgeois pluridisciplinaire SekuOuane, qui a fait ses premiers pas dans le graffiti, montre aujourd’hui ses peintures et illustrations. www.lapopartiserie.com
Les Ombres (jusqu’au 28/01 Médiathèque Tomi Ungerer, Vendenheim) présente les photographies de Simon Woolf, qui capture des silhouettes nocturnes avant qu’elles ne disparaissent à l’aube. www.mediatheque. vendenheim.fr
Prospérité, série Les porteurs, 2015 © Delphine Gatinois chez Stimultania 18 —
l 210
Dans le cadre de la Régionale 17, Stimultania présente Manège à images et autres ensembles #2 (jusqu’au 29/01), une exposition collective avec des artistes français,
EXPORAMA
www.regionale.org
Saru, les singes du Japon (jusqu’au 04/02, Médiathèque Malraux) expose les photographies d’Alexandre Bonnefoy faites à travers tout le Japon. www.mediatheques. strasbourg.eu
EYE CATCH, dans le cadre de la Régionale 17 (jusqu’au 19/02 au Ceaac) réunit huit artistes qui travaillent sur le pouvoir captivant des images. www.ceaac.org
Régiments de papiers (jusqu’au 24/02 Musée Historique) se penche sur des petits soldats en papier dits de Strasbourg. www.musees.strasbourg.eu
States of enchantment, Laurent Impeduglia
L’exposition Héritage inespéré. Objets cachés au cœur des synagogues (jusqu’au 24/02 Galerie Heitz) présente les trésors des commu-
Paradis perdu
www.musees.strasbourg.eu
Lumière ! Explorez l’impossible (jusqu’au 12/03 Musée Zoologique), une exposition interactive passionnante avec des instruments scientifiques, des spécimens naturalisés et des documents visuels. www.musees.strasbourg.eu
Tomi Ungerer Forever (jusqu’au 19/03 Musée Tomi Ungerer) rend hommage au dessinateur alsacien pour ses 85 ans (voir interview Mix n°209). Un must ! www.musees.strasbourg.eu
Hétérotopies. Des avantgardes dans l’Art contemporain (jusqu’au 30/04, MAMCS et Aubette 1928) oppose les précurseurs des années vingt et des artistes contemporains, qui se sont inspirés de cette période. www.musees.strasbourg.eu
© Mathieu Bertola
www.stimultania.org
nautés juives rurales, suite aux découvertes fabuleuses sous les planchers de la synagogue de Dambach-la-Ville.
ESPRIT, ES-TU LÀ ? Dans la série Effroyables gardiens (jusqu’au 31/03 La Villa de Dehlingen), Mathieu Bertola, photographe pour les Musées de Strasbourg, jette son regard sur des objets très particuliers, conservés au Musée alsacien : les dégorgeoirs fixés aux moulins, des sculptures en bois censées éloigner les mauvais esprits. Une anthologie à mi-chemin entre superstition et folklore. # S.M.K. www.cc-alsace-bossue.net
« We Fade To Grey » 2015 © SUMO
allemands et suisses qui produisent des œuvres-matières.
CRAZY COLOURS
Paradis terrestre, l’Eden est un lieu dans lequel règne le bonheur. C’est également le nom de la prochaine exposition (06–21/01) présentée par la galerie Jean-François Kaiser : quatorze artistes semblent y dessiner une vision bien sombre de notre monde. Damien Deroubaix avec ses peintures expressionnistes sur fond noir, la violence omniprésente dans les tableaux d’Antoine Bernhart ou encore les vanités de Frodo Mikkelsen, composées de crânes en argent surmontés de paysages, donnent à voir un univers bien loin de l’Eden imaginé. # C.D.
Première exposition monographique du graffeur Christian Pearson en Alsace (11/01-11/02, Pôle Culturel de Drusenheim) : The Beginning is Near, autour de la notion du temps et de l’infini. L’artiste anglais est un acteur incontournable de la scène graffiti, alternant entre interventions en milieu urbain et œuvres d’atelier. Ses influences, il les puise dans la pop culture et les pochettes d’album depuis les années 1990. Sa peinture –couleurs vives et coups de pinceau épais – est peuplée de nombreux personnages dont l’omniprésent Crazy Balhead. # S.M.K.
www.jeanfrancoiskaiser.com
www.pole-culturel.drusenheim.fr
HABILLER LA VILLE
Le Syndicat Potentiel présente Jardin public divers- Espace autobloquant et espace vacant (vernissage, 13/01 à 18h, jusqu’au 28/01), installation de sculptures du collectif Gariste Gatené. Une nouvelle esthétique pour l’espace public, face au pavé autobloquant devenu le symbole de l’uniformité de nos villes. # S.M.K. www.syndicatpotentiel.free.fr 210 l
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JE TE LIKE ! Les carnets d’amitié, pratique vieille de 500 ans, sont mis à l’honneur à la BNU dans un parcours qui retrace leur évolution. L’exposition Alter Ego permet d’aller à la découverte de l’ancêtre des réseaux sociaux. # Charlaine Desfete
Utiliser Facebook, inscrire sur le mur d’un ami l’affection que nous lui portons est aujourd’hui un acte banal. Cette volonté de partager ses amitiés est cependant une tradition qui remonte au XVIe siècle à travers des carnets personnels où les amis du propriétaire inscrivaient des mots ou intégraient des illustrations. L’exposition Alter Ego tente, à travers deux cents livres d’amitié, illustrations et objets, de montrer le développement de ces écrits à travers les âges. Apparus dans le milieu étudiant, ces productions permettent d’appréhender le mode de vie de l’époque ainsi que la mobilité de cette population. Par la suite, la noblesse va s’emparer de la vogue estudiantine tout en y apportant des modifications, avec notamment l’apparition de blasons. Il est également possible de se rendre compte des réseaux de sociabilité à travers ces écrits. Les femmes issues de la bourgeoisie, quant à elles, vont s’intéresser à ce type d’écriture au XIXe siècle. La majorité des dédicaces et inscriptions rappellent les vertus et les devoirs des femmes, tels que la fidélité ou encore l’obéissance. Enfin, les XXe et XXIe siècle apportent un changement dans la conception de ces livres. Le public visé se trouve, en effet, être de plus en plus jeune avec une commercialisation des livres pré-remplis. L’exposition se termine par des œuvres contemporaines. Des vidéos de Baptiste Desmonts y sont présentées, montrant des témoignages et des souvenirs réels autour de ces livres et de l’utilisation numérique. Tout au long du parcours il est possible de voir la diversité de ces cahiers, à la fois dans l’illustration, allant de l’anecdote à l’allégorie en passant par le portrait, mais également dans les décorations. On peut y découvrir une broderie en soie représentant la conversion de Paul, des paysages en papier découpé, un livre en forme de cœur, des dédicaces sur papier à musique, des pièces brodées par des passementiers, de la calligraphie ou encore des réalisations en cheveux tressés faisant preuve d’une grande minutie et témoignant d’un réel travail, bien loin de nos messages numériques. Bibliothèque Nationale et Universitaire de Strasbourg, jusqu’au 12/02 www.bnu.fr 20 —
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GASTRONOMIE
SANS
FJORD EN GOÛT
LACT’ÔSE
Appréciez la chair délicate, ferme et fondante de la Truite des fjords de Norvège pendant quelques jours (16-29/01) dans différents établissements de Strasbourg : Au Crocodile, À bout de Soufre, La Hache, La Vignette, Au Pont Corbeau et la poissonnerie Cap d’Hag. Les chefs ont imaginé des recettes originales magnifiant un produit de haute qualité élevé dans les eaux froides et limpides des fjords, à l’endroit où l’eau de mer rencontre les eaux fraîches des glaciers enneigés. Une véritable découverte gustative en perspective ! # H.L.
Depuis un an, Sarah Abitan propose dans sa Pâtisserie Gat’Ô (55 avenue des Vosges) un concept unique en Alsace : les grands classiques de la pâtisserie française 100 % sans lactose. Confiseries, chocolats et macarons complètent l’offre de cette jeune entrepreneuse qui répond aux demandes d’une clientèle qui souffre de plus en plus d’intolérances alimentaires. Ses gâteaux mettront tout le monde d’accord : c’est bÔn ! # S.M.K.
www.poissons-de-norvege.fr
FAST & FABULOUS
/pâtisserie-gatô
Une nouvelle adresse à Strasbourg pour déguster des burgers classiques ou végétariens, des frites cuites dans de l’huile parfumée au thym, une salade de choux à l’aneth, des hot dogs saupoudrés de mini-frites et des desserts : Mr and Mrs Bun (3 rue du 22 novembre). Du fait maison et des produits locaux, des recettes simplement bonnes. # S.M.K.
DU BIO,
DES BOCAUX Une nouvelle épicerie écologique vient d’ouvrir à Strasbourg, Le Bocal (21 rue de la Krutenau). Sa jeune fondatrice, Morgane Messmer, propose près de 400 références, pour la plupart bio : pâtes, fruits secs ou épices mais aussi produits cosmétiques et d’entretien, vendus en vrac. Avec notre propre bocal ou un de ceux acquis sur place, nous pouvons acheter les quantités exactes nécessaires, pour ne jeter ni emballages, ni aliments. # S.M.K. www.lebocalzerodechet.com
Explosion de
/mrandmrsbun
saveurs #2
Gourmets attention ! Le Street Bouche Festival revient après une première édition très réussit en septembre pour une journée Street Bouche Corner (15/01 Hall du Marché à Neudorf). Au menu ? Spécialités américaines, asiatiques et françaises, cuisinées à base de produits locaux avec entre autres : les bentos de Niko Niko et le jus de pommes de Moi, moche et bon. Le tout sur un fond de musique hip-hop. On se régalera ! # S.M.K. www.streetbouche.com /streetbouche 210 l
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SANTÉ !
GOOD VIBRATIONS À vingt ans, son père lui confie les clefs d’un domaine fondé en 1966, une fois arrivé à la taille jugée critique de trois hectares. Avant cela, le paternel vendait son raisin à la coopérative et exerçait un autre métier – moniteur d’auto-école – pour subsister. André Ostertag se souvient de ce début des années 1980 et d’une liberté grande : « Je pouvais faire tout ce que je voulais dans une maison jeune, sans être écrasé par le poids des traditions. Tout et n’importe quoi, parce que les expérimentations malheureuses permettent de savoir ce qui ne fonctionne pas. J’ai pu trouver ma voie et mon style. » Le vin a coulé dans les cuves, mais à l’époque André casse les codes… et ça ne passe pas dans une région corsetée et ultra formatée : « Le vin est un langage, un projet créatif. Avec un tel postulat, vous prenez le risque de vous opposer à la pensée collective », s’amuse un homme aujourd’hui à la tête de 14,4 hectares en Alsace. Rapidement, ce représentant d’une génération écolo, celle de la lutte contre Fessenheim, prend conscience de la nécessité de 22 —
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« travailler sans chimie ». Un « cheminement doux » l’entraîne vers la biodynamie, mais plus que la théorie, c’est la praxis qui l’a convaincu : « Lire Steiner est une chose, mais le plus intéressant est de faire un essai comparatif en séparant une vigne en deux, un côté en bio, l’autre en biodynamie*. Certaines choses se passent qu’on ne peut expliquer, mais elles se passent. Une vigne en biodynamie produit un raisin infiniment plus vibrant. » Vérification faite avec des flacons dont le classement s’ordonne selon une tripartition distinguant vins de fruit « où s’exprime le goût du raisin », vins de pierre avec la puissance de la « roche mère » et des terroirs, comme un fort affûté Riesling Fronholz 2015 (26 €, départ domaine), et vins de temps. Ces derniers, résultant de l’alliance « du “temps climat” et du “temps durée”, sont les grands liquoreux ». Pour André Ostertag, la vinification est « un acte méditatif. Il faut influer le moins possible sur le vin, tout en le dirigeant, lâcher prise sans laisser faire, être dehors tout en étant dedans. Nous sommes sur une délicate ligne de crête », résume-t-il. Le résultat ? De très
grands blancs, puissamment complexes, raffinés et subtils en diable, mais aussi étonnamment vibratoires imaginés par un esprit fécond et intranquille, véritable tête chercheuse œuvrant désormais en connivence avec son fils : « J’avais rêvé d’un Gewurztraminer de macération, il y a trente ans. Échec complet. Arthur s’y est remis avec des résultats plus que prometteurs cette année. » L’aventure continue… Domaine Ostertag 87 rue Finkwiller (Epfig) www.domaine-ostertag.fr
Depuis 2003, André Ostertag produit aussi un pinot noir exceptionnel au Chili, avec quelques amis, dont le photographe Julio Donoso qui a longtemps vécu en exil en France. www.montsecano.com Fondé sur les écrits de Rudolf Steiner, la biodynamie va plus loin que l’agriculture biologique qui obéit à un strict cahier des charges européen (pas de produit chimique pour traiter les vignes, pas d’herbicide, etc.). Elle postule un meilleur échange entre la terre et la plante, prend en compte les influences lunaires, etc.
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L’abus d’alcool est dangereux pour la santé, à consommer avec modération
Pionnier de la biodynamie en Alsace, André Ostertag est un des premiers à avoir « libéré le vin » dans la région. Rencontre avec un philosophe du terroir adepte de crus vivants et vibrants, passé en quelques décennies du statut de rebelle à celui de modèle. # Hervé Lévy
saint-valentin
« Attention, mettez vos lunettes, mes grenouilles sont faites pour sauter aux yeux », prévient Tomi Ungerer. On n’en croa effectivement pas ses mirettes en feuilletant le Kamasutra des Grenouilles, bestiaire érotique de l’illustrateur alsacien composé de dessins (19821985) de batraciens placés dans des postures méritant le carré blanc. À l’heure du thé ou du déjeuner, sur un nénuphar ou en compagnie d’un motard, dans les roseaux ou sous l’eau, les souples bestioles rehaussées au lavis vert d’Ungerer font des parties de cuisses en l’air, en solo, à deux ou même à la queuleuleu. Amphibiens pervers et autres crapo-masochistes ont de quoi se rincer l’œil. # E.D. Édité par les Musées de Strasbourg (9 €). En vente au Musée Tomi Ungerer et bientôt à nouveau disponible en librairie www.musees.strasbourg.eu
© Francesca Mantovani / Gallimard
CROAMASUTRA
POUR L’AMOUR DE LA CUISINE Auteure associée au TNS, Marie NDiaye signe un livre portraiturant une (nouvelle) femme puissante. Avec La Cheffe, roman d’une cuisinière, elle décrit un personnage qui connaît « cette enivrante solitude de la création », trouvant « excessives les louanges dont on s’est mis à couvrir sa cuisine ». Le parallèle avec l’écrivain est tout tracé… Un homme (l’amoureux sans retour et l’ancien assistant de l’étoile des fourneaux) narre la destinée d’une femme discrète détestant la lumière des projecteurs. Par ses silences, elle a fait naître de navrantes rumeurs. Il compose une lettre d’amour, presque une vie de Sainte qui se dédia toute jeune à son Art (considéré comme une épopée spirituelle) à l’image d’une religieuse abandonnant tout pour se consacrer à Dieu. # H.L. Paru chez Gallimard (17,90 €) – www.gallimard.fr
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SEXY MOTHER LOVER
La bande-son de notre Saint-Valentin ? Elle est toute trouvée, il suffit de survoler 2016 où sortaient des sommets du r’n’b, musique ô combien sensuelle ayant été reloadée par des têtes chercheuses plongées dans le mainstream, à la fois arty et (Hotline) blingbling. Un génie impertinent se trouvant dans les chorés de Drake et ses clips évoquant les installations plastiques de James Turrell ou chez son “copaintriote” canadien The Weeknd qui a livré LE tube imparable de l’année écoulée en compagnie de Daft Punk, Starboy. Le chanteur au crucifix pendu à son cou, mi Lover, mi Bad (You know it !), est prêt à mourir pour toi : on ne lui en demandait pas tant… Évoquons encore les sucreries pop de Frank Ocean qui m’collent encore au cœur et au corps ou les titres mielleux de son collègue californien Childish Gambino qui parvient presque, en ce début de mois de janvier frisquet, à nous consoler de la disparition de Prince avec l’album Awaken, my Love ! # Emmanuel Dosda www.universalmusic.fr Concert de The Weeknd , à Paris (AccorHotels Arena, 28/02) Concert de Drake, à Paris (AccorHotels Arena, 13-14/03) www.accorhotelsarena.com
Rencontre avec Marie NDiaye à la Librairie Kléber (14/01, 17h)
Concert de r’n’b hybride strasbourgeois avec Bo*Johnson, dans le cadre du festival Scènes d’ici, à La Laiterie (26/01)
www.librairie-kleber.com
www.artefact.org
Portrait d’Hélène Ulm par Laetitia Piccarreta
DOUX COMME UN LOUP La graphiste et designeuse strasbourgeoise Hélène Ulm a choisi un nom hitchcockien pour sa griffe de bijoux aux motifs animaliers L’Amour aux trousses. Interview dans son appart ressemblant à un cabinet de curiosités flippant et kawaï. # Emmanuel Dosda Vos créations sont à la fois très artisanales avec de la broderie, un aspect handmade évident, et aussi industrielles, avec l’utilisation du laser… Vous vous situez entre le DIY et le high-tech ? J’aime les grands écarts, c’est au cœur du concept de ma marque. Je collectionne aussi bien les statuettes du film Alien que les petits poneys et, dans mon travail, j’adore rassembler les extrêmes : il y a un côté vanités avec têtes de mort et crânes d’animaux, mais “adouci” grâce à une allure plus girly, légère. J’ai commencé en 2013 par des pochettes brodées avec des éléments lugubres et aussi des perles, paillettes ou fleurs en dentelle. Dans le nom, L’Amour aux trousses, on trouve cette ambivalence qui me ressemble. Les contrastes sont également présents dans les matériaux que j’utilise : mon mobile en bois, très brut, est par exemple attaché à une petite chaîne dorée, presque “joaillerie”. Vous dites avoir créé L’Amour aux trousses afin de donner vie aux « chimères de papiers » que vous dessiniez sur les nappes des restos, depuis l’enfance… Ma maman était prof d’Arts plastiques et j’avais l’habitude de dessiner tout le
lliers à
Co r ! gagne voir p.30
temps. J’ai encore mes carnets de croquis de quand j’étais toute petite et continue à en remplir. J’avais envie de les transposer sans passer par la case illustration : j’ai ainsi commencé à broder, de manière intuitive, et à proposer des séries de pochettes.
Le ciné, surtout celui de Burton, est-il votre source d’inspiration principale ? Tim Burton est mon réalisateur préféré, c’est un exemple de fantastique un peu effrayant avec un côté mignon. J’ai été bercée par Walt Disney et Bambi, mais j’adore aussi l’univers du tatouage.
Vos mobiles et bijoux sont découpés et gravés au laser. C’est votre côté geek ? Oui, c’est quelque chose qui m’a intéressé dès l’âge de quatre ans où je me suis mise aux jeux vidéo. D’ailleurs, je suis designer industriel de formation. L’an passé, j’ai assisté à un FabLab au Shadok et réalisé le mobile Sioux avec des têtes de loup et des crânes de buffle. L’équipement disponible en ce lieu m’a ouvert les portes de nouvelles possibilités de création.
D’où les Tatou-sages, bijoux reprenant des motifs old school que l’on trouvait aux bras des taulards ou des flibustiers… Il y a les ancres de marine, mais avec des petites joues et un sourire, le diamant, etc. Les modifications corporelles étaient mon sujet de projet de fin d’études.
C’est alors que vous avez créé des bijoux où se côtoient bestioles terrestres et aquatiques ? Ils découlent de mes premiers mobiles, car chaque breloque est devenue un pendentif. En bois (peuplier et okoumé) ou en plexi, ils sont découpés et gravés par la machine, mais je me charge de tout : dessin, scan, réalisation du fichier informatique, paramétrage, découpe et assemblage.
L’utilisation du plexiglas fait que vos bijoux sont parfois invisibles… Il y a quelque chose de conceptuel dans mes créations qui vont ressortir sur un vêtement sombre et disparaître sur la peau. En vente chez : Curieux? (6a Quai Kellerman) Baptiste et Garance (6 rue des Veaux) Underground Ink Family (12 rue Sainte-Hélène) Pêle-Mêle (9 rue des Veaux) www.etsy.com/fr/shop/lamourauxtrousses 210 l
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saint-valentin ACTUS
Les pin-up ont la
PLAISIR DES ANGES banane !
Retour dans les années folles avec les Pin-up d’Alsace (14/02, L’Illiade, Illkirch-Graffenstaden. Inscription jusqu’au 10/02), pendant une soirée de Saint-Valentin vintage, glamour, humoristique et érotique. Luna Moka, Coco Das Vegas et leurs complices font monter la température de la salle avec un spectacle de danse et d’effeuillage sexy plein de finesse accompagné d’un dîner très love. # S.M.K.
www.amorino.com
www.illiade.com
© Touch Arts
Rien de mieux qu’une glace pour faire fondre votre bien aimé(e). Pour la Saint-Valentin, le glacier italien Amorino (11 rue Mercière à Strasbourg) propose en édition limitée (0115/02) une composition en forme de rose, goût vanille ou framboise. Un macaron et un cœur en chocolat couronnent cette douceur à partager en amoureux. # S.M.K.
CADEAUX DU
LOVE STORY
Strasbourg mon amour transforme pour la cinquième fois la capitale européenne en destination de choix pour les couples (10 -19/02). De nombreuses manifestations permettent de découvrir l’aspect romantique de la cité : dîner avec les Étoiles d’Alsace dans un lieu inédit, baignade romantique au clair de lune à la piscine du Wacken ou encore concert de l’Orchestre philharmonique de Strasbourg. Love is in the air… # S.M.K. www.strasbourg-monamour.eu 26 —
l 210
CœUR
1,2,3…PARTEZ !
Le Marché des Créateurs (21/01, 1422h, Pub Mac Carthy à Strasbourg) organisé par l’Association de promotion artistique Touch-Arts, est l’occasion pour acheter des produits en série limitée ou pièces uniques auprès d’artistes locaux. Parmi les photographies, bijoux, céramiques, peintures, lithographies et pièces de prêt-à-porter on trouve facilement le cadeau idéal pour son / sa Valentin(e). # S.M.K.
Tous ceux qui rêvent déjà de vacances en ce début d’année peuvent faire leur choix à Tourissimo (29-31/01, Parc des Expositions), salon du tourisme qui donne envie d’évasion et de détente. Tous les types de vacanciers s’y retrouvent : farniente au bord de la mer, sport en montagne, découverte de la région ou dépaysement à l’autre bout du monde… Goûtez un bout de liberté avec l’espace camping-car pour des voyages spontanés et sur mesure. # S.M.K.
www.touch-arts.com
www.tourissimo-strasbourg.com
JEUNE PUBLIC
LES PAS
MINIONS © CCAB
Dans le ventre du grand méchant loup, il y a des petits cochons apeurés ou encore un Chaperon rouge et sa mamie, pas rassurées : une terrifiante “scène gastrique” ! Comment le sait-on ? Nous l’avons exploré, grâce au livre de Clotilde Perrin, ex-Arts déco strasbourgeois, qui invite les enfants à s’aventurer À l’intérieur des méchants (le loup, la sorcière et l’ogre), grâce à des flaps et autres trappes de papier, à un livre animé, ludique et pédagogique, au format XXL. Clotilde est déjà en train de travailler sur un second volet, se penchant sur les gentils… qui eux aussi, ont des secrets bien cachés. Édité par le Seuil jeunesse (18 €, dès 4 ans). # E.D.
GOÛTER À L’HISTOIRE Un cours d’Histoire d’un autre genre est proposé à La Villa à Dehlingen (15/01) avec l’atelier Du grain au pain : après la découverte des céréales cultivées dans l’Antiquité, petits (à partir de 5 ans) et grands peuvent produire de la farine à l’aide de deux modèles de moulin. Avec la farine obtenue, on fabriquera des petits pains avant de déguster le fruit de son travail. # S.M.K.
DÉSIR D’AVENIR
Avec Raiponce (11-13/01 au Centre culturel Marcel Marceau, 27 & 28/01 au Point d’Eau Ostwald et 28/02 au Pôle Culturel de Drusenheim), comédie musicale pour les enfants à partir de 6 ans, en français et en allemand, le BAAL novo Theater Eurodistrict interprète le conte des frères Grimm de manière contemporaine : la princesse doit se libérer de l’emprise de sa mère omniprésente pour trouver le bonheur avec son prince. Une parabole sur le désir de grandir. # S.M.K.
www.seuiljeunesse.com
www.cc-alsace-bossue.net
www.baalnovo.com www.lepointdeau.com
FACE AUX FANTÔMES
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ET MOI, ET MOI,
ET MOI
© Eric Chevalier
© G&&D
Poudre Noire © Tiphaine Monroty
www.pole-culturel.drusenheim.fr
C’EST PAS MOI,
C’EST LES AUTRES
Dans Poudre Noire (31/01, 01 & 02/02, TJP Grande Scène), Simon Delattre raconte avec son théâtre de marionnettes contemporain, la véritable histoire de Sarah Winchester, descendante du tristement célèbre fabriquant d’armes : l’héroïne construit une maison qu’elle agrandit sans cesse pour y accueillir les âmes des victimes que ses ancêtres ont causés. Secrets de famille, responsabilité et héritage… un mélange explosif ! # S.M.K.
Zoom Dada du Théâtre Bascule (01/02 Salle du Cercle) : une pièce de théâtre gesticulé avec des éléments de danse hip-hop pour jeune public (à partir de 3 ans) dans le cadre du Festival Momix (26/01-05/02). Elle raconte l’histoire de deux personnages qui cherchent l’inspiration pour faire leur portrait. Cette quête d’inspiration les confronte au corps, à la création, l’expression et l’enfance. # S.M.K. www.salleducercle.ville-bischheim.fr
Dans ma tête (25/01 à L’Ilà liade d’Illkirch-Graffenstaden) Places ! ner g a g raconte l’histoire de Romain voir p.30 Poisson. Il est méthodique et n’aime pas les surprises. Il voit des détails que d’autres ne voient pas et n’aime pas communiquer. Ce spectacle poétique (à partir de 7 ans) aborde la question de l’autisme et de la différence avec beaucoup de sensibilité. # S.M.K.
www.tjp-strasbourg.com
www.momix.org
www.illiade.com
l 210
MIXTAPE
© Luna Lazzarini
ÇA SENT LE SAPIN
L’ALSACE, PUISSANCE CINQ Dans leur communication vers l’extérieur, l’Alsace en général et Strasbourg en particulier se résument trop souvent aux fameux “Cinq C” : choucroute, colombages, cathédrale, cigogne & coiffe. NotreDame, par exemple, est partout. Il suffit de voir une récente campagne pour Strasbourg mon amour installant en outre cette merveille gothique… en plein cœur de la Krutenau. Nous en avons ras-le-bol de cette réduction à des fondamentaux un peu trop caricaturaux ! S’ils ne doivent évidemment pas disparaître, il est dommage que l’image que nous renvoyons au monde soit faite de simples fragments de folklore vidés de leur sens, totalement essorés à force d’être ressassés ad nauseam. Plongeons dans notre passé pour en extraire d’autres éléments signifiants (de la Neustadt aux œuvres de Sebastian Stoskopff) et explorons le présent (de l’architecture contemporaine aux Prix Nobel, en passant par l’inventivité des viticulteurs) pour dresser les contours d’un avenir, d’une nouvelle Alsace qui nous ressemble plus que ces totems, certes sympathiques, mais un peu légers. # Hervé Lévy
Comme un arbre dans la ville : abandonnés entre béton et bitume, des centaines de sapins de Noël jonchent les rues de Strasbourg. Tout secs, épicéas et nordmanns renvoient à une certaine mélancolie qui suit les “fêtes” : après le coït consumériste, l’animal contemporain est tout triste et jette, nonchalant, ses résidus. Ce comportement de porc peu civique (du reste sanctionné par une amende de 150 € si la patrouille prend le contrevenant ; on peut toujours rêver) est navrant, d’autant qu’existent de multiples solutions, qui nécessitent néanmoins que le propriétaire du conifère se bouge le cul fasse preuve de responsabilité. Il est si simple d’apporter son arbre dans une déchetterie ou, encore mieux, de prendre part à différentes collectes organisées par des associations permettant de recycler le Roi des forêts désormais déchu. Que d’efforts néanmoins : il faut se renseigner, se déplacer… À l’heure des discours écolos sur la nécessaire implication individuelle, les actes ne suivent pas toujours. # Hervé Lévy
TOP 4 1
LA MAISON DES SECRETS Une nouvelle salle d’escape game, DoOz, vient d’ouvrir à Strasbourg, permettant au public de se plonger dans un univers digne de Sherlock Holmes ! Sur les traces de l’organisation secrète DoOz, des équipes de 2 à 6 joueurs (à partir de 14 ans) peuvent remonter le temps dans une des trois pièces – correspondant à trois épisodes de l’histoire – dont ils doivent sortir à coup d’indices, d’énigmes et de codes. En outre, le lieu propose un reportage photo de votre mission de détective et un espace de restauration. Le tout dans un cadre inspiré par l’univers de Jules Verne. # S.M.K. www.doozescape.com
Jouez sur... www.magazinemix.fr ou sur
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Happy Birthday Link ! La 23e édition de la Japan Addict Pocket (21 & 22/01, Espace Marceau), organisée par l'association Kakemono, est dédiée à la saga de Zelda pour les 30 ans de ce jeu mythique : un espace de jeu vidéo, des concours, du cosplay et les dernières nouveautés en matière de gaming ainsi que des expositions liées à la culture nippone pour un week-end mémorable. # S.M.K. www.asso-kakemono.fr
/mgzmix 3 x 2 places pour Dans ma tête le 25/01 à l’Illiade à Illkirch-Graffenstaden
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www.illiade.com 3 x 2 places VIP pour ART KARLSRUHE www.art-karlsruhe.de 2 x 2 places pour le concert des Dropkick Murphys le 04/02 au Zénith de Strasbourg www.zenith-strasbourg.fr 2 cartes cadeau d’une valeur de 25 euros, chez Gagao www.gagao.eu
3 colliers de L’Amour aux trousses www.etsy.com/fr/shop/lamourauxtrousses
2 x 2 places pour le concert de ROCKY, en concert le 24/02 à l’Espace culturel Django Reinhardt www.espacedjango.eu 5 livres-CD Weepers Circus chante n’importe nawak ! www.gallimard-jeunesse.fr
MIEUX VAUT LET’S PLAY
EN RIRE
La Revue Scoute (14/0120/02, Salle des Fêtes de Schiltigheim, puis en tournée en Alsace jusqu’au 20/05) est une institution permettant de bien commencer l’année… En 2017, les Gauche Busters sortiront l’artillerie lourde pour tirer sur : l’état d’urgence et les CRS, les primaires, la présidentielle, Donald Trump… Tout y passe et on se marre déjà ! # S.M.K. /la-revue-scoute
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Alsace Digitale et Game Dev Group Strasbourg organisent la Global Game Jam 2017 strasbourgeoise (20-22/01 au Shadok sur inscription). Pendant 48h, des équipes composées de membres aux compétences les plus diverses – développeurs, créatifs, artistes, infographistes – doivent créer un jeu vidéo ou de plateau en lien avec le thème surprise de cette année. Une soirée festive avec remise des prix et présentation des jeux au public complètera l’événement (30/01 au Shadok). # S.M.K. www.globalgamejam.org www.shadok.strasbourg.eu