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Profitez des sensations fortes
Facilitez les transitions peaux, ascensions et descentes avec les tout nouveaux sacs de ski-alpinisme. Un système d’organisation optimisé pour la neige et un harnais de style gilet ultra-stable soutiennent toute mission hivernale. De plus, leur système de transport innovant, de type lasso et utilisable des deux côtés, vous permet de fixer vos skis sans avoir à retirer le sac et ainsi rester en mouvement continu.
L’HIVER DE FORCE
« Qu’est-ce que le spasme de vivre », pleurait Nelligan en s’abîmant dans le rêve. C’est l’étrange impression que nous avons eue au matin du quatrième jour lorsque nous nous sommes réveillés dans une tente anormalement chaude : le thermomètre était remonté à 4 oC durant la nuit. Toute la journée, nous avons skié sur la surface du lac qui se liquéfiait, d’abord en sloche, puis carrément en eau. Au moins, les traîneaux qui flottaient étaient soudainement plus faciles à tracter. Puis, la pluie battante s’est mise de la partie. L’hiver que nous avions cherché jusqu’au 51e parallèle nous avait abandonnés. Les 48 heures suivantes ont été parmi les plus intenses de notre vie. De 4 degrés, la température a plongé jusqu’à -26 en l’espace de quelques heures. Le ciel devenu menaçant déferlait sur nous à 75 km/h. Nos corps comme notre matériel, mouillés la veille puis gelés, étaient à nouveau sous la souveraine emprise du froid. Il fallait agir. Le vent rageait du sud-ouest : si nous restions près des îles au centre du lac, nous pouvions espérer être protégés. Nous avons repris la progression sur la surface du lac transformée en véritable patinoire et avons pu, contre toute attente, aller planter notre tente 20 km plus au nord.
Il devenait impossible de compléter la boucle initialement prévue, mais un plan de sortie était néanmoins envisageable. Avec notre boussole, nous avons tracé un azimut d’environ 6 km dans le sens du vent afin d’atteindre la rive est et de gagner la décharge du lac Albanel, situé tout près. Mais les eaux n’étaient pas gelées dans ce passage enclavé où se forment des rapides. Pour passer, nous n’avions d’autre choix que d’improviser un portage de 5 km dans la forêt. Avec nos skis étroits mal adaptés à la neige profonde de la forêt boréale, l’entreprise était périlleuse. Les traîneaux qui nous paraissaient si légers sur la glace vive ne voulaient plus se soustraire de la gravité au moment de les hisser avec nos cordes de sauvetage en haut d’une pente à 45 degrés.
Le portage est une épreuve autant mentale que physique. Au moment où nous désespérions le plus, le bois s’est clairsemé et nous a permis de gagner le lac Albanel en nous faufilant entre les silhouettes décharnées des épinettes. Après plus de 125 km en huit jours, nous avons atteint le camping du lac Albanel — fermé pour la saison, faut-il le dire —, où nous avons pu, par un immense coup de chance, nous faire embarquer par un camionneur, qui nous a ramenés sains et saufs à Mistissini sur la route 167.
Le bois sentait le printemps, la neige mouillée et l’humus en ce début du mois de mars. Il aurait dû faire -20 oC en permanence à cette latitude. Les érables avaient commencé à couler dans le sud du Québec. Les saisons s’écroulaient.
Mais pendant quelques jours, l’hiver nous avait ouvert le portail temporel du lac Mistassini et de ses glaces de légende. Ce faisant, nous nous remémorions les paroles de Louis-Edmond Hamelin : « On s’imagine que le territoire, c’est d’abord un espace, une étendue — que ça commence à un endroit et que ça mène plus loin. C’est beaucoup plus profond. Le territoire, c’est une âme, un esprit. Ce n’est pas seulement une distance. »