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EN PRATIQUE

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SOMMAIRE

N°32 - NOVEMBRE 2009

Dossier

Assurances Le développement du risk management est parti de la gestion des assurances mais s'en est peu à peu affranchi. Dans nombre d'entreprises, le lien entre les deux se révèle plus distant. Finance Management le renoue.

FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°32 - NOVEMBRE 2009


FISCALITÉ: OPTIMISATION DES COÛTS DOSSIER TEXTE : LAURENT CORTVRINDT

Assurances:

les conseils de deux CFO 2

Pour le CFO, les enjeux en termes d’assurances, au sens large, se révèlent majeurs pour la vie et la survie de l’entreprise. Qu’ont-ils décidé d’assurer? Quels indicateurs existent pour vérifier que les couvertures sont suffisantes? Quels conseils peuvent-ils donner pour optimiser les couvertures d’assurances et la collaboration avec les courtiers? Partage d’expériences avec Marc Smeets, CFO d’Infrabel, et Vincent Vandenbroeck, CFO de Ginion Group.

E

ntreprise publique gérant l’infrastructure fer-

personnel contractuel est couvert par une assurance légale.

roviaire sur l’ensemble du territoire belge, In-

Tandis que concernant le personnel statutaire, comme pour

frabel connaît des missions publiques pures et

les fonctionnaires de l’Etat, nous fonctionnons, là aussi, com-

simples, sans aucun aspect commercial. Histori-

me notre propre assureur. »

quement, le rail belge n’était pas assuré. Mais, peu à peu, il s’est investi à conclure des polices d’assurances pour couvrir certains

POUR LES EXPERTS

domaines. Le premier concerne la responsabilité civile de l’entre-

Infrabel collabore avec différents courtiers, régulièrement mis

prise, pour toute éventuelle faute d’Infrabel pouvant causer des

en concurrence. Autrefois sur un rythme annuel, aujourd’hui

dommages à un tiers. Le deuxième chapitre touche aux dom-

avec des contrats de type cadre d’une durée de trois ans. « Le

mages au patrimoine pour les fautes causées par un tiers ou un

chemin de fer belge étant composé de trois entités formant

incendie. Une sorte d’assurance omnium. Enfin, avec un bud-

un groupe, nous suivons une politique cohérente: ces adjudi-

get d’investissement supérieur à un milliard par an, les risques

cations sont concrétisées par les services du holding et les col-

chantiers sont assurés par une police « tous risques chantiers ».

laborateurs spécialisés en assurance. » Afin de s’assurer d’une

Néanmoins, chaque chantier est assuré au cas par cas.

bonne couverture, tant qualitative que quantitative, Infrabel

« Nous avons l’habitude de nous assurer pour les grands tra-

procède minutieusement. « Pour chaque police, une adjudica-

vaux, où plusieurs entrepreneurs travaillent ensemble, confie

tion officielle – donc une mise en concurrence – est engagée,

Marc Smeets, CFO d’Infrabel. Nous concluons personnelle-

à travers une publication dans le journal européen. Nous de-

ment la police. Par contre, pour les plus petits chantiers, nous

mandons alors une remise de prix et les conditions d’assurance

demandons aux entrepreneurs de prévoir leur police, dont ils

à plusieurs acteurs. Les offres sont comparées par nos experts

incluront bien entendu le prix dans le budget des travaux. »

internes mais aussi par des spécialistes externes qui collabo-

Ces trois types de polices fondamentales sont, bien enten-

rent avec nos équipes au sein de la holding. »

du, complétées par d’autres. Pour son parc de 1.700 véhi-

Marc Smeets dit avoir confiance dans les assurances de l’entre-

cules, Infrabel fonctionne comme son propre assureur, sauf

prise. Pour optimiser la couverture, il souligne que le besoin, en

pour les déplacements à l’étranger. « Pour nos ressources

interne, de posséder des spécialistes se révèle tout à fait capi-

humaines, nous possédons également un système mixte. Le

tal. Bien entendu, les petites structures peuvent difficilement

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« Les taux varient parfois – et jusqu’à 30% – aussi à l’intérieur d’une même compagnie, pour deux entités différentes! » stratégie de gestion des risques plus poussée que celle que nous connaissons actuellement. Cela prend du temps et les priorités sont nombreuses. » En matière d’assurances, la principale préoccupation de Vincent Vandenbroeck, Chief Financial Officer de Ginion Group, consiste à contrôler que les couvertures mises en place contre les risques, et notamment les plus importants et les plus spécifiques au commerce d’automobiles, se révèlent optimales. Elément crucial de ce travail: parvenir à identifier ces fameux risques auxquels le groupe peut être amené à faire face. Pour y parvenir, Vincent Vandenbroeck travaille en étroite collaboration avec son CEO, la personne qui connaît le mieux le business, en passant en revue

Marc Smeets: « En permanence, des risques se manifestent et nous confrontent avec des cas particuliers pour lesquels nous avons besoin de nos propres spécialistes. Ils sont un peu les intermédiaires entre le business et les courtiers ou assureurs. »

l’ensemble du patrimoine (biens et activités). « Les choses évoluent rapidement. Aussi nous répétons régulièrement l’exercice, précise-t-il. Au moins une fois par an, indépendamment d’autres activités comme l’incorporation d’une nouvelle filiale, l’ouverture d’un point de vente ou, plus simplement, un garage qui développe ses activités. Il y a dix ans, notre concession de Wavre vendait 250 véhicules neufs par an. L’an

se permettre ce luxe. « Mais, dans une entreprise de notre taille,

passé, nous en avons écoulé plus de 900. A volumes différents,

s’occuper des assurances fait partie intégrante de notre quoti-

les implications sur les assurances ne sont, bien entendu, pas

dien. En permanence, nous travaillons sur des chantiers. Et donc,

les mêmes… Si vous ne prévenez pas votre courtier ou votre

en permanence, des risques se manifestent et nous confrontent

compagnie, ils ne pourront le deviner. Il faut donc veiller à res-

avec des cas particuliers pour lesquels nous avons besoin de nos

ter proactif par rapport aux couvertures. »

propres spécialistes. Ils sont un peu les intermédiaires entre le

La loi belge oblige les entreprises à s’assurer contre certains

business et les courtiers ou assureurs. » Pour Marc Smeets, grâce

de ces risques. Parmi les polices obligatoires, on retrouve

aux adjudications publiques, la compétition joue pleinement.

l’assurance-loi, qui couvre les accidents durant l’exercice du

Plus vous aurez de candidats et d’offres à comparer, plus vous

travail ainsi que les accidents sur le chemin du travail et tou-

augmentez vos chances d’être bien assuré.

tes les activités auxquelles les travailleurs sont occupés par l’employeur. Sont uniquement concernées les personnes sur

EXERCICE RÉGULIER

le payroll de l’entreprise. Autre assurance essentielle dans le

Sur ses chantiers, Infrabel connaît de nombreuses situa-

métier: la responsabilité civile exploitation. Ces deux premiè-

tions à risques. Aussi, l’entreprise publique est activement

res polices peuvent d’ailleurs intervenir pour un même acci-

occupée à la mise sur pied d’une organisation pour la gestion

dent, en cas de lien de cause à effet démontré. Ce sera par

des risques, avec comme objectif d’éviter qu’un risque ou un

exemple le cas si un mécanicien se blesse en laissant tomber

accident puisse se produire. « L’assureur est là pour indemni-

un moteur et que ce dernier se voit endommagé. L’ouvrier

ser et faire face aux conséquences financières si un risque s’est

sera couvert par l’assurance-loi et le moteur, par la RC ex-

manifesté et a débouché sur un accident. Une entreprise doit

ploitation. Imaginons qu’une incapacité de travail résulte de

néanmoins s’organiser pour maîtriser ses risques. Le rail est une

cet exemple. L’assurance-loi couvre les frais liés à l’incapacité

matière très complexe. Aujourd’hui, chaque département/ser-

et rémunère l’employé à la place de l’employeur, durant son

vice/ingénieur en chef gère le risque inhérent à son domaine

absence. Toutefois, cette couverture légale est plafonnée (un

d’activité. Mais la situation n’est sans doute pas encore opti-

peu moins de € 37.000). Or, on peut imaginer que l’employé

male. Nous sommes convaincus que nous devons adopter une

blessé bénéficie d’une rémunération supérieure. « Pour éviter FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°32 - NOVEMBRE 2009

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DOSSIER : OPTIMISATION DES COÛTS FISCALITÉ

tout éventuel manque à gagner, nous avons décidé d’assurer

la main d’œuvre en atelier, l’immobilisation des voitures, etc.,

nos employés à hauteur de leurs rémunérations réelles. »

ne sera pas couvert. Un manque à gagner important peut rapidement découler de ce genre de mésaventure. » Dans ce cas

ASSURER LES CONSÉQUENCES

également, un petit délit, comme le « simple » vol d’une roue,

Parmi les autres responsabilités civiles obligatoires, retenons

d’un pare-choc ou encore d’un airbag… mais perpétré sur de

encore la RC objective incendie ou explosion qui, comme

nombreux véhicules de la flotte, peut engendrer un impact

son nom l’indique, couvre les lieux accessibles au public et

financier colossal.

indemnise les victimes d’incendie ou d’explosion même si

Au sein de Ginion Group, différentes entités exercent la

aucune faute civile n’a été commise par l’exploitant, ainsi que

même activité: la vente, l’entretien et la réparation d’auto-

la RC livraison qui couvre un incident pouvant survenir à une

mobiles neuves et d’occasion. Aussi, une réflexion a été me-

voiture dont un client vient de prendre possession. A côté de

née concernant l’assurance perte d’exploitation. Si, du jour

cela, pour Ginion Group, le très large volet d’assurances qui

au lendemain, un site ne pouvait plus fonctionner norma-

couvre le vol, les incendies, la perte d’exploitation, les inon-

lement, une partie du chiffre d’affaires pourrait être sauvé,

dations et les catastrophes naturelles est, lui aussi, extrême-

notamment la livraison des véhicules neufs qui pourrait être

ment important.

assurée par un des autres sites ou encore le travail en ate-

« Pour les incendies, il faut veiller tout particulièrement à ce

lier, en délocalisant une partie des services. « Nous suivons

que la couverture des bâtiments soit suffisante pour une éven-

comme politique d’assurer l’ensemble du groupe et non cha-

tuelle reconstruction à neuf. Autre point à surveiller: les assu-

que entité, de manière indépendante. L’exercice est énergivore

rances contre le vol ne vous couvrent pas, strico sensu, contre

mais les synergies que l’on peut trouver permettent d’éviter

les conséquences de ce vol. Exemple, si on vous vole votre

une ‘surcouverture’, en adaptant la police ».

coffre-fort, où vous rangez vos clés de voitures, la compagnie

Plus généralement, pour chaque volet de risque, Vincent

d’assurance vous les remboursera. Mais les nouveaux barillets,

Vandenbroeck examine si la couverture peut être prise en

4 « DEMANDEZ À VOTRE COURTIER DE SE FAIRE RÉMUNÉRER PAR DES HONORAIRES » Le risk management: une tâche de plus en plus affectée au directeur financier? Selon Benoît van Wassenhove, Associate chez Expense Reduction Analysts (ERA), la tendance se généralise. Tout dépend, bien entendu des entreprises, mais si on remonte à peine de quelques années dans le temps, cette activité était le domaine quasi exclusif du risk manager. Et dans les plus petites structures, il n’était pas rare de voir la tâche quelque peu laissée de côté ou dévolue à un assistant financier. Mais certainement pas au CFO. En matière d’assurance et de couverture de risques, Benoît van Wassenhove conseille aux CFO de se poser, régulièrement, deux questions importantes: de quand datent la dernière réunion avec leur courtier et la dernière proposition spontanée de celui-ci pour faire baisser la prime d’une police d’assurance? « Si cela dépasse un an, il y a un problème avec le courtier, souligne-t-il. Il faut éviter qu’un courtier se batte pour obtenir un marché et puis qu’il s’endorme sur ses dossiers. Je

Benoît van Wassenhove: « Pour vérifier si les couvertures et les polices proposées restent à jour, remettre tout son portefeuille sur le marché, tous les trois ou quatre ans, me semble être une bonne moyenne. »

préconise toujours, pour les portefeuilles importants, de travailler simultanément avec deux courtiers, pour faire tra-

de se faire rémunérer par des honoraires passibles de TVA

vailler la concurrence, et les conserver en alerte. Et pour véri-

au lieu de prendre une commission comprise dans la prime

fier si les couvertures et les polices proposées restent à jour,

d’assurance et sur laquelle des taxes non déductibles sont

remettre tout son portefeuille sur le marché, tous les trois

appliquées. Economie de l’opération: la taxe assurance sur

ou quatre ans, me semble être une bonne moyenne. Evitons

10% à 15% de la prime. Pour les gros portefeuilles, à partir

également les contrats de trop longue durée. Les petits avan-

de € 75.000 de prime, les économies peuvent rapidement

tages qu’ils peuvent procurer risquent d’en faire manquer

se montrer intéressantes et les courtiers ne se montrent,

d’autres. » Autre piste d’économie: demander au courtier

normalement, pas réfractaires à l’idée.

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charge par l’entreprise, si l’intervention d’une compagnie d’assurance est nécessaire ou si un mix des deux solutions serait préférable. « Je considère que mon métier n’est pas d’être expert en assurances, mais bien de trouver les bons partenaires. Le premier réflexe à avoir en cas de sinistre consiste à appeler son courtier et non la compagnie d’assurance. Est-on couvert? Quel type d’assurance doit jouer? Comment faire la déclaration? Il ne s’agit pas de mentir à la compagnie, mais la formulation du déroulement du sinistre peut influer sur la couverture et l’assurance qui va intervenir. Il faut donc se montrer prudent et précis. D’où l’importance du partenariat avec le courtier. »

ECONOMIES D’ÉCHELLE Selon le CFO, outre les échanges avec le CEO, les indicateurs pour s’assurer de la bonne couverture de l’entreprise se révèlent, néanmoins, plutôt limités. Aussi, Vincent Vandenbroeck s’adresse uniquement à des spécialistes. « Le rôle fondamental du courtier est de bien connaître le métier de son client et de rester à son écoute pour lui proposer les produits qui lui conviennent parfaitement. Le choix de son courtier est vrai-

Vincent Vandenbroeck: « Il ne faut pas se forger une image de client volatile, qui cherche avant tout le dernier centime, sous peine de ne pouvoir établir cette fameuse relation de confiance… qui peut jouer en votre faveur en cas de coup dur. »

ment fondamental pour le business de l’entreprise car cette personne reste le premier point de contact par rapport à la

travaux dans les bâtiments, une visite des lieux en compa-

compagnie d’assurance. Travailler avec deux courtiers s’avère,

gnie d’un expert de la compagnie. « Outre le côté proactif de la

selon moi, la stratégie gagnante. Cela permet de conserver

proposition qui va aider à renforcer votre relation avec la com-

une saine émulation, à partir du moment où la transparence

pagnie d’assurance, les conseils d’un spécialistes en matière de

règne dans les relations. Il ne faut toutefois pas se forger une

prévention – tant en incendie qu’en vol – vous aideront aussi

image de client volatile, qui cherche avant tout le dernier cen-

à diminuer les risques. Pensez toutefois à vérifier auparavant

time, sous peine de ne pouvoir établir cette fameuse relation de

avec votre courtier que la visite n’engage à rien… »

confiance… qui peut jouer en votre faveur en cas de coup dur. Et

En outre, et cela concerne notamment le volet d’assurances

quand un marché s’ouvre, le meilleur rapport couverture-prix

vol, incendies, perte d’exploitation, inondations et catastro-

remporte le marché. »

phes naturelles, Vincent Vandenbroeck a mis en pratique

Point plus spécifique à la situation de Ginion Group et de

la suggestion d’un de ses courtiers, à savoir privilégier une

ses six points de vente répartis sur des sites différents, le re-

assurance qui, plutôt que de définir de manière exhaustive

groupement des polices, rendu possible par le « poids » de la

tous les objets couverts par l’assurance… et courir le risque

nouvelle structure, a permis des économies substantielles. La

d’en oublier l’un ou l’autre, prend en charge « tous les risques,

croissance du groupe s’est, en effet, réalisée par des acquisi-

sauf… ». « En inversant le processus, la charge de la preuve se re-

tions successives et relativement rapprochées dans le temps.

trouve dans le chef de la compagnie. L’optique est fondamenta-

« Nous nous étions retrouvés avec plusieurs assurances, cour-

lement opposée et bien plus sécurisante car les contrats, beau-

tiers et compagnies que nous n’avions pas choisis ou dont les

coup moins épais, gagnent en clarté. De plus, en cas de sinistre,

contrats n’étaient plus adaptés à notre structure grandissan-

la compagnie possède 30 jours pour effectuer les démarches. »

te. » Une harmonisation s’imposait donc. Premier constat sai-

Par ailleurs, pour déterminer leurs primes de RC, les compa-

sissant, si l’on peut s’attendre à découvrir des taux différents

gnies d’assurances peuvent utiliser deux types de calculs.

d’une compagnie à l’autre, en réalité, ceux-ci varient – jusqu’à

Soit le taux se base sur le chiffre d’affaires, soit il se fonde

30% – aussi à l’intérieur d’une même compagnie, pour deux

sur la base salariale. « Théoriquement parlant, les deux raison-

entités différentes. Les causes sont multiples: poids du cour-

nements se tiennent: le premier considère que plus on vend,

tier dans la négociation, exposition géographique, etc.

plus le risque augmente; tandis que le second présume que

Pour réaliser des économies intéressantes, Vincent Vanden-

plus le personnel croit, plus le risque de le voir commettre une

broeck conseille de négocier des participations bénéficiaires,

faute grandit. Intuitivement, nous avons privilégié la seconde

dès qu’un certain volume le permet. Le principe est relative-

possibilité: notre chiffre d’affaires devrait connaître une crois-

ment simple et on peut l’envisager quasiment pour toutes

sance plus rapide que la masse salariale. » Enfin, pour ce qui

les polices. Si la sinistralité est bonne, sans tenir compte des

concerne la flotte des véhicules, les statistiques prouvent

valeurs aberrantes, un retour de 10% calculé sur les primes de

qu’au-delà d’un certain volume, l’assurance omnium globale

l’année précédente est tout à fait envisageable. Autre conseil:

n’est plus nécessaire car les éventuels sinistres des uns sont

organiser de temps à autre, et plus spécifiquement lors de

couverts par les économies engrangées par les autres. FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°32 - NOVEMBRE 2009

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FISCALITÉ: OPTIMISATION DES COÛTS DOSSIER TEXTE : LAURENT CORTVRINDT

Viser le subtil équilibre Le monde des affaires est de plus en plus volatile, avec des marchés financiers instables, une compétition sans cesse accrue et un coût du risque qui augmente. Dans ce contexte, le CFO doit compléter sa connaissance de l’entreprise par une perception et une maîtrise des risques auxquelles elle est confrontée, souligne Philippe Poulain, Directeur Risk Management chez PricewaterhouseCoopers Belgium.

6

A

ujourd’hui, et plus encore qu’avant, le CFO doit

s’adapter à quelque chose que l’on ne maîtrise pas totalement.

donner du confort à la direction effective de son

On touche ici pleinement à la gestion des risques. Pour un CFO,

entreprise en lui expliquant sa vision de l’évolution

sur le moyen terme, connaître son entreprise et sa sensibilité

des affaires et la sensibilité de l’entreprise à divers

aux facteurs internes et externes se révèle tout à fait capital.

facteurs tant internes qu’externes. Une double nécessité se dresse

Entre autres choses, il lui faut connaître les risques qui sont liés

face à lui: il doit non seulement pouvoir anticiper le retour attendu de

à la stratégie (compétition, processus d’innovation, évolutions

valeur de son produit ou de ses services, mais aussi pressentir l’inat-

de la réglementation, géopolitique,…), et ainsi déterminer si

tendu susceptible de détériorer sa marge bénéficiaire. Si vous n’êtes

l’entreprise possède des atouts qu’il sera possible de préserver

pas certain d’avoir raison, le risque est d’avoir tort. Une problématique

sur le moyen à long terme.

délicate, mais l’appréhender efficacement fournit un atout majeur

« Il est essentiel d’identifier toute déviation par rapport aux ob-

vis-à-vis de la concurrence. La crise a frappé et frappe encore, bien

jectifs que l’on a pu se fixer ainsi qu’il est important de réguliè-

que l’on sente les premiers signes d’une relance. Le temps est venu

rement réévaluer si ces objectifs restent appropriés au devant

maintenant de se projeter et d’anticiper la sortie de crise. C’est en ces

de l’évolution des marchés, dit-il. Mais j’insiste également for-

périodes que l’on peut se construire ou renforcer une franchise.

tement sur l’importance pour l’entreprise d’identifier l’ensemble

Au départ, on pense à survivre face à un assèchement de la liqui-

des risques et de ne surtout pas s’arrêter à ceux directement liés

dité dans le marché, à une augmentation des coûts de finance-

aux activités que l’on conduit et aux matières que l’on connaît

ment, à une baisse de la demande et à des cycles industriels et

bien. » Par exemple le risque industriel… pour une entreprise

financiers qui se croisent. Pour toute entreprise, le premier objec-

de production industrielle.

tif a été de préserver la pérennité des activités. Ainsi, sur le court

« C’est une forte tentation mais une entreprise se voit rarement ‘tuée’

terme, une approche simple a consisté à essayer de se récupérer

par un seul facteur. C’est très souvent une conjonction de vulnérabi-

en limitant les coûts. Très vite, certaines entreprises ont taillé dans

lités et d’effets divers. Ainsi, le risque de réputation et une mauvaise

les dépenses de manière drastique, celles qui leur paraissaient fa-

empreinte de l’entreprise au niveau sociétale sont certainement des

cultatives comme la consultance ou la sous-traitance.

éléments essentiels dans l’érosion d’une franchise. Identifier les risques, c’est tout un métier. Une fois appréciés, faut-il encore définir quelles

AVOIR DE L’APPÉTIT

sont les attentes vis-à-vis de ces risques, souhaite-t-on y être exposé,

D’autres ont été plus innovantes et ont revu leur structure de

veut-on ne pas les connaître, peut-on les assurer? C’est ce que l’on ap-

coûts de manière à asseoir l’entreprise dans son futur. « En effet,

pelle l’appétit au risque, sachant que l’objectif n’est évidemment pas de

en coupant de la sorte, le CFO doit veiller à ne pas dégrader les forces

les éliminer complètement. Mais, même si c’est un métier, c’est aussi

et atouts de sa société ce qui serait clairement un mauvais position-

et surtout une responsabilité claire du Conseil d’administration ou du

nement dès lors que la reprise se fera, souligne Philippe Poulain. En

Comité stratégique. Pour les sociétés cotées et les financières, c’est dans

fait, ce qui a manqué au marché et aux entreprises en particulier,

la loi. Pour les autres, c’est une question de bonne pratique et un avan-

c’est souvent cette capacité à anticiper la crise et à réagir de manière

tage concurrentiel de plus en plus important. »

appropriée. Force est de constater que nous n’étions pas, de manière

Une fois les risques déterminés et son appétit défini vis-à-vis de

générale, préparés. Face à un obstacle, il est trop tard pour vérifier la

ceux-ci, il reste à l’entreprise à les contenir. C’est à ce niveau qu’in-

capacité de ses freins ou la souplesse de la direction. »

tervient la question de la tolérance. Une tolérance zéro, à savoir

S’adapter à un marché, selon Philippe Poulain, c’est avant tout

de ne jamais dévier par rapport aux attentes et objectifs n’est pas

FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°32 - NOVEMBRE 2009


viable, mais trop de tolérance tue. Pour réduire son exposition au risque, l’entreprise dispose de divers outils que le CFO aura à cœur de choisir et combiner de manière efficace: couverture financière, assurance, transfert de risque, etc. « Prendre une assurance pour un risque que l’on ne contrôle pas n’a pas de sens. Il est préférable d’augmenter son niveau de contrôle, ce qui permettra par ailleurs de négocier de meilleures primes. Tout est dans la démonstration que le contrôle est efficace. Contrôler, cela a un coût. Vouloir éliminer tous les risques auxquels on est exposé, cela a un coût aussi et c’est impayable. C’est le subtil équilibre entre performance, risque et coût qui fera de l’exercice une réussite », indique Philippe Poulain.

MAÎTRISER LES 4 ÉLÉMENTS

Philippe Poulain: « Prendre une assurance pour un risque que l’on ne contrôle pas n’a pas de sens. Il est préférable d’augmenter son niveau de contrôle, ce qui permettra par ailleurs de négocier de meilleures primes. »

- © Emile Luider / agence Rapho

Depuis quelques mois, Philippe Poulain sent néanmoins que les mentalités commencent à changer. Traditionnellement, dans

« On connaît la conscience des membres d’un Conseil pour la perfor-

une entreprise, le CFO assure les questions financières. « Mais

mance de l’entreprise mais on la perçoit aujourd’hui de plus en plus

le besoin de pouvoir expliquer clairement les facteurs, qui soit

affûtée vis-à-vis des risques et des contrôles y afférents, conclut-il.

contribuent à une érosion de la franchise, soit influencent direc-

Prouver que l’on est performant à court terme n’a plus de sens. Est-ce

tement les revenus, est sans cesse plus grand. C’est aussi essentiel

que cela permettra d’éviter une crise? Non, tout comme il est impos-

pour la communication des entreprises. Et puis, depuis 2008, C’est

sible d’en évaluer l’ampleur. Mais anticiper une crise et se préparer,

aussi une question légale pour certaines, une bonne pratique

c’est possible. Celui qui se fera prendre la prochaine fois se trouvera

pour d’autres qui se valorise sur le marché ». Depuis 2008, une

très clairement en difficultés de devoir s’expliquer. Voilà un rôle pour le

direction effective ne peut plus se permettre de ne pas avoir du

CFO qui fait de lui de plus en plus un acteur majeur de l’entreprise, le

confort sur le contrôle interne de l’entreprise, à savoir les quatre

point d’orgue entre l’entreprise et son Conseil. A lui de s’investir main-

éléments majeurs que sont la qualité du reporting financier, de

tenant et de savoir s’entourer des équipes et compétences nécessaires.

l’audit interne, de l’audit externe, et du risk management.

C’est une profonde mutation qui attend l’industrie. »

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FISCALITÉ: OPTIMISATION DES COÛTS DOSSIER TEXTE : LAURENT CORTVRINDT

Les anciennes conditions,

c’est du passé! Pouvons-nous parler de sortie de crise, voire d’amorce de reprise? Les conditions en matière d’assurances-crédits vont-elles changer? Quels points d’attention les CFO doivent-ils avoir dans le collimateur? Réponses avec trois acteurs majeurs du marché.

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Comment, en tant qu’assureur-crédit, avez-vous vécu les

sont mises en place à l’international. Le travail a progressé en

derniers mois?

efficacité, les frais opérationnels ont diminué, la concurrence

Christophe Cherry, Country Manager BeLux d’Atradius Credit

entre les acteurs s’est accrue et celle-ci a poussé les primes à la

Insurance: « D’octobre 2008 à mars 2009, la conjoncture ne

baisse, de manière significative, au fil des années. Sans doute

fut vraiment pas bonne. Nous avions pris des mesures res-

même de façon exagérée compte tenu du risque de crédit in-

trictives au niveau des risques que nous couvrons mais aussi

trinsèque couvert… Avec la crise, les circonstances économi-

concernant la souscription aux polices d’assurances. Nous avi-

ques se sont dégradées et les primes ont grimpé. En moyenne,

ons élevé notre sélectivité à partir de novembre et cela s’est

sur tout le portefeuille, on note une hausse de 15%. Mais évi-

matérialisé vers avril-mai par une stabilisation des impayés.

demment tout dépend du cas personnel de l’assuré. »

Cela dit, nous restons à un niveau structurellement haut en matière d’impayés dans les entreprises. Mais cela n’a plus rien

Avons-nous atteint la fin d’une certaine ère?

à voir avec ce que nous avons connu en plein cœur de la crise,

Christophe Cherry: « Jamais nous ne reviendrons aux anciens

entre octobre et février. La mer reste agitée mais nous ne som-

niveaux, comme ceux de 2005 à 2007, c’est certain. La tarifi-

mes plus dans la tempête. Toutefois, je préfère parler de stabi-

cation a été relevée et si une entreprise n’est pas prête à payer

lisation que d’amélioration. La légère tendance positive n’est

le prix nécessaire pour la couverture d’un risque, autant ne

pas encore assez marquée pour tirer des conclusions. »

pas concrétiser l’affaire. La leçon a été tirée de cette mésaven-

Vic Verbist, CEO de TCRe: « Dans notre activité, le credit-ma-

ture: il n’est jamais sain de se montrer exceptionnellement

nager de notre assuré détermine lui-même ses limites, sur

bon dans l’acceptation des risques. De manière structurelle,

base des renseignements commerciaux et de l’expérience

des mauvais risques existent sur un marché. Il n’est pas nor-

des paiements qu’il a pu obtenir. Notre formule se destine

mal de les accepter presque tous. »

aux entreprises dont le chiffre d’affaires est supérieur à € 15

Paul Becue: « A court terme, et sans doute à moyen terme éga-

millions, environ. Nous n’avons donc fermé aucune porte.

lement, nous ne retrouverons pas les conditions d’assurances

Néanmoins, les conditions et les primes à payer évoluent à

que nous avons pu connaître. Les deux derniers trimestres

la hausse. Tout comme l’ont fait les probabilités de sinistres.

se sont révélés meilleurs, mais cette tendance doit encore se

Ce qui a entraîné, pour nous, une légère augmentation des

confirmer car les prévisions pour 2010 semblent, jusqu’ici, mé-

indemnités à payer. Mais, grâce à la surveillance stricte de la

diocres. Les risques devraient encore être élevés et, dans ces

part de nos clients, notre ‘loss ratio’ (sinistres/primes) a pu

circonstances, je ne vois pas les primes repartir à la baisse. »

être maintenu entre 50% et 55%. »

Vic Verbist: « Jusqu’à preuve du contraire, notre formule nous

Paul Becue, General Manager Euler Hermes Services Belgium:

a permis de passer la crise. Par rapport à ce qu’ont pu vivre

« Il y a dix à quinze ans, l’assurance-crédit était un marché plu-

certains de nos confrères, nous avons conservé des taux très

tôt local ou national. Chaque pays possédait ses propres socié-

raisonnables, malgré l’augmentation effective de la sinistra-

tés d’assurance. Ensuite, une consolidation et des synergies se

lité en 2008 et 2009. »

FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°32 - NOVEMBRE 2009


Christophe Cherry: « La mer reste agitée mais nous ne sommes plus dans la tempête. Toutefois, je préfère parler de stabilisation que d’amélioration. »

Paul Becue: « Le manque d’information mène à l’incertitude. A l’heure actuelle, cela nous incite à nous montrer plus restrictifs. Si l’entreprise joue la transparence, nous pouvons éviter ce type de scénario. »

Vic Verbist: « Nombre de clients élaborent des stratagèmes pour repousser le paiement. Or, une convention porte sur le montant du prix, mais aussi sur son délai de paiement. »

Qu’avez-vous constaté en matière d’impayés auprès des en-

‘normaux’ de paiement. Elles doivent les faire respecter de

treprises?

manière draconienne par leurs clients. Car, dans la pratique,

Vic Verbist: « Nous n’avons pas été confrontés à des grosses

nombre de clients élaborent des stratagèmes pour repousser

‘catastrophes’. Mais plutôt à l’augmentation de la fréquence

le paiement. Or, une convention porte sur le montant du prix,

des incidents. »

mais aussi sur son délai de paiement. En France, très récem-

Paul Becue: « Nous observons une certaine stabilisation

ment, le Gouvernement a décidé de légiférer sur le délai de

après une forte dégradation fin 2008-début 2009. Les gran-

paiement, dans l’optique d’une harmonisation. Certains sec-

des entreprises semblent encore tenir le coup. Mais, là aussi,

teurs ont demandé des exceptions car tout ne se règle pas du

il faut rester mesuré: il y a un taux d’endettement assez élevé.

jour au lendemain. Mais l’idée est bien présente. Le respect de

Ceci veut dire que les grosses structures ont également été

la totalité des paramètres d’une convention aide à conserver

touchées par la crise financière – par exemple, rupture des

une relation saine de travail. L’effet domino doit absolument

covenants bancaires. Du côté des PME, par contre, la situation

être évité. C’est possible, par exemple, en examinant la valeur

s’est dégradée. »

du crédit d’un client et les retombées éventuelles de non-paie-

Christophe Cherry: « Les bilans des entreprises reçus au 30

ment d’un de ses acheteurs. On peut de la sorte éviter les en-

juin 2009 ne se révèlent, finalement, pas si mauvais. Au 31 dé-

cours délirants connus par le passé. Si je vends, je dois pouvoir

cembre 2008, la dégradation des chiffres était pourtant for-

encaisser. Si je n’encaisse pas, je ne pourrai plus vendre... »

tement marquée par rapport à 2007. Nous nous attendions à

Paul Becue: « Il faut nous fournir toute l’information néces-

ce que cette tendance se confirme ou se renforce, mais cela

saire aussi vite que possible. Nous avons l’impression que

ne semble pas le cas. C’est plutôt une bonne surprise, même

notre activité n’est pas toujours bien connue. Nous sommes

si, après les PME, les plus grosses entreprises tendent, à leur

une sorte de banque invisible dont l’intervention permet de

tour, à se montrer défaillantes. »

maintenir le crédit-fournisseur. Sans notre appui, l’entreprise risquerait de rencontrer des ennuis pour financer son fonds

Quel conseil pourriez-vous donner en matière d’assurance-

de roulement et, finalement, de connaître des problèmes de

crédit? Sur quel point d’attention faut-il, actuellement, ab-

liquidité. Le manque d’information mène à l’incertitude. Et, à

solument se concentrer?

l’heure actuelle, dans des conditions économiques délicates,

Christophe Cherry: « Notre métier reste la couverture de bons

cela nous incitera à nous montrer plus restrictifs. Par contre,

risques et de débiteurs qui tombent en faillite de manière

si l’entreprise joue la transparence, nous pouvons éviter ce

inattendue. Les entreprises, de leur côté, doivent également

type de scénario. Cela ne veut pas dire que si l’information

tirer les leçons du passé en gardant leur bon sens et en redou-

communiquée n’est pas bonne, nous allons rompre immédia-

blant de prudence. Il ne faut plus tabler sur des croissances

tement la collaboration. Bien au contraire, nous pourrons tra-

improbables au risque de mettre en péril les moyens propres

vailler ensemble sur des solutions. En outre, les sociétés doi-

de l’entreprise, à cause de risques inconsidérés. »

vent se rendre compte que tous leurs fournisseurs sont des

Vic Verbist: « Les sociétés qui vendent des biens et/ou prestent

partenaires importants. Elles doivent respecter leurs délais

des services, qui distribuent des produits devraient se montrer

de paiement, pour que leurs fournisseurs puissent participer

particulièrement attentives pour ce qui concerne les délais

au financement du fonds de roulement de l’entreprise. » FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°32 - NOVEMBRE 2009

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DOSSIER FISCALITÉ TEXTE : LAURENT CORTVRINDT

Quatre regards sur la gestion des risques

D

ans un secteur d’activité comme celui des nouvelles technologies, les métiers et les risques changent d’année en année et de façon considérable. Surtout pour une entre-

prise comme Belgacom, dont la taille joue également un rôle. « Nous devons dès lors travailler avec des couvertures d’assurances sur mesures, confie Olivier Moumal, Vice-president Risk Management chez Belgacom. Nous ne pouvons nous contenter de conditions standard, comme peuvent parfois le faire les PME. Il nous faut procéder à une analyse de risques

10

extrêmement précise, afin d’éviter que notre couverture ne soit pas en phase avec la réalité. Notre métier consiste à identifier où se trouvent ces risques et à développer des simulations de scénarios défavorables ou contraires. Par risque, j’entends toute possibilité de perte ou de sinistre qui pourrait impacter la satisfaction des clients, le cash flow ou les employés. » Les scénarios permettent d’imaginer les impacts – notamment financiers – possibles des risques sur les trois volets. « Nous prenons à chaque fois en considération les ‘worst cases’ pour déterminer ce qui est assurable et ce qui ne l’est pas. En règle générale, il faut considérer que seuls 20% des risques peuvent être couverts par une police car l’assurance se limite aux événements accidentels et aléatoires. » Ces scénarios permettent également de délimiter la couverture d’assurances et le

Olivier Moumal: « En règle générale, il faut considérer que seuls 20% des risques peuvent être couverts par une police car l’assurance se limite aux événements accidentels et aléatoires. »

texte de la police qui interviendra en cas de sinistre. « Tout y est important, même la ponctuation. Un seul mot peut faire en

ment est parti de la gestion des assurances, il y a de cela plus

sorte que vous serez assuré… ou que vous ne le serez pas. »

de vingt ans. En effet, les sociétés assurances étaient les premières à se doter d’un système d’analyse et d’identification des

LIEN PLUS DISTANT

risques organisés et formalisés. A force de développement, le

Le marché d’assurance est un marché financier. L’analyse des

risk management s’est affranchi des assurances. C’est pourquoi,

risques se fait aussi pour ce qui concerne les investissements

aujourd’hui, la gestion de ces deux volets d’affaires se retrouve,

internes et externes. Lorsqu’une entreprise se lance dans de

le plus souvent, dans des services ou des départements sépa-

nouvelles technologies, il est en effet important de mesurer

rés. Le risk management est actuellement considéré comme

les risques auxquels elle va devoir faire face. Pour ces raisons,

une matière à traiter par les Conseils d’administrations via un

en tant que Vice-president Risk Management, Olivier Mou-

comité spécialisé, souvent proche du Comité d’audit interne. Et

mal rapporte directement au CFO. La gestion des risques –

assez étrangement, dans nombre de groupes, le lien entre assu-

opérationnels, crédits et financiers – occupe la quasi-totalité

rance et risk management se révèle plus distant qu’auparavant.

de son agenda. Au contraire de la partie assurances qui ne

L’assurance est un des moyens de gestion des risques et reste

représente qu’une fraction de son emploi du temps.

une matière rattachée à la direction financière, alors que le risk

Comme le rappelle Daniel Bertaux, Senior Expert en Risk Mana-

management devient de plus en plus une matière de gouver-

gement chez ArcelorMittal, le développement du risk manage-

nance d’entreprise. « Le risque, c’est tout événement pouvant

FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°32 - NOVEMBRE 2009


R I S Q U E

D E

N O N - P A I E M E N T

Assurance-crédit :

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« prêt-à-porter » ou

sur mesure » ?

«

L’assurance-crédit : un « prêt-à-porter » parfois très contraignant Une faillite d’entreprise sur cinq survient à cause de la défaillance de paiement d’un ou plusieurs clients. Aujourd’hui la plupart des responsables d’entreprise souhaitent véritablement protéger leur bilan contre ce danger. Cependant, avec les formules d’assurance-crédit classiques ils sont soumis à un certain nombre de contraintes : des tarifications standard, des limites de crédit imposées, une ingérence dans leur relation-client lors de récupérations de créances. Un nombre croissant de responsables sont donc à la recherche d’une solution qui les sécuriserait, sans toutefois leur imposer de contrainte dans leur gestion habituelle du crédit.

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DOSSIER FISCALITÉ

prémunir en privilégiant la solution de l’assurance. Mon passé d’avocat et de courtier m’aide dans cette prise de décision, afin d’apprécier si les risques identifiés seront bien assurés. Une évaluation des sinistres des années antérieures donne également, généralement, de bonnes tendances. » Néanmoins, les assurances ne peuvent pas prémunir une entreprise contre tous les problèmes. Par exemple, le risque de pandémie, actuellement l’un des plus craints, est, tout bonnement, impossible à assurer à un prix raisonnable. Le vaccin contre la grippe est d’ailleurs produit chez GSK Biologicals. Mais qu’adviendrait-il de la production si le personnel de GSK venait à être largement touché? Selon Annick D’hont, tout risk manager d’une multinationale se doit d’assurer un plan d’un BCP (business continuity planning). « Avant que le vaccin ne soit au point, nous avions déterminé quels effectifs se révélaient tout à fait indispensables pour assurer le maintien des activités internes de première importance. Nous avons établi un ordre des priorités. Si nous venions à perdre un tiers du personnel à cause de la grippe, il ne faudrait pas que la production diminue. Nous avons imaginé quels changements apporter dans l’organisation pour conserver

12

Daniel Bertaux: « Beaucoup d’entreprises se cantonnent à la délimitation du risque générique, sans approfondir sa définition permettant d’aboutir à des éléments tangibles qu’elles pourront alors contrer. »

un effectif suffisant pour produire les vaccins. A ce moment, nous ne pouvions vacciner nos employés, avant le reste de la population. Nous devions attendre le feu vert du Gouvernement belge. »

GESTION INTÉGRÉE porter négativement atteinte à la réalisation des objectifs d’une

Dans les hôpitaux, les risques ont toujours été traités, plusieurs ac-

organisation, en les affectant négativement. Pour identifier les

teurs au sein de l’institution étant concernés. Néanmoins, avec la

risques, différentes méthodes existent: listes, brainstorming,

tendance au regroupement hospitalier, d’autres risques apparais-

benchmarking, etc. Il faut ensuite les classer en les exprimant le

sent. L’ISPPC (Intercommunale de santé publique du pays de Char-

plus précisément possible afin de trouver des parades. »

leroi) est, par exemple, composée de 4 hôpitaux, de plusieurs mai-

Par exemple, il ne suffit pas d’identifier que les entreprises

sons de retraites, de centres de jours, etc. Plus de 5.000 personnes

concurrentes génèrent des risques ou les nommer, il faut connaî-

y effectuent des prestations professionnelles (membres du person-

tre leur positionnement géographique, leur image de marque, la

nel, médecins, étudiants…) et, de par leurs activités, génèrent des

qualité et la composition de leurs produits, etc., insiste-t-il. « Et,

risques. De nombreux risques. On pense bien entendu en premier

à partir de cela, imaginer des scénarios de risques. Or, beaucoup

lieu à l’erreur médicale. Mais il y a aussi le risque médicamenteux,

d’entreprises se cantonnent encore à la délimitation du risque gé-

le risque infectieux, ceux liés aux prestations, les risques énergéti-

nérique, sans approfondir sa définition permettant d’aboutir à des

ques ou environnementaux et naturels, les incendies, etc.

éléments tangibles qu’elles pourront alors contrer. » Les couvertu-

« Notre objectif est de les recenser de façon claire, pour les évaluer et

res d’assurances restent un des outils de gestion des risques – par

les classer dans un ordre de priorité, de manière à prendre les mesures

transfert payant auprès de spécialistes – mais uniquement pour

nécessaires afin de réduire les accidents et les pertes dans le cadre de

une certaine partie d’entre eux. « Cela ne rend pas les assurances

notre activité, explique Jean-Claude Vandecasteele, responsable du

inutiles mais entre exclusions et limitations de garanties, le trans-

service de gestion des risques du CHU de Charleroi. La gestion des

fert se révèle uniquement partiel. Cela comporte donc toujours un

risques a pour avantage, notamment, d’apporter certaines garanties

certain danger. Les assureurs, même s’ils se montrent de bonne foi,

– légales et extralégales – à l’assureur, qui sera plus enclin à nous cou-

ne prennent que ce qu’ils veulent bien couvrir. L’assurance n’est pas

vrir à moindre prix. » A l’ISPPC, la gestion des assurances s’avère par-

un remède miracle et son prix reste élevé. Le meilleur moyen de gé-

ticulièrement intégrée au risk management. Par exemple, en tant

rer un risque consiste à l’éviter, ensuite à le réduire. »

qu’établissement public, lors de chaque renouvellement de marché, les assureurs doivent prendre connaissance des lieux et par-

BCP

ticiper à une information sur le risk management mis en place au

Pour Annick D’hont, Risk Manager chez GSK Biologicals, un

sein du groupement. « Le fait de créer un risk management permet

« risk mapping » permet de déterminer avec précision les im-

de rassembler l’information. Car, bien souvent, dans une entreprise

pacts potentiels des différents risques qu’une société peut

composée de plusieurs sites d’exploitation, cette info circule difficile-

courir et, de la sorte, vérifier l’efficacité de ses couvertures.

ment. Nous demandons à notre personnel de ‘dénoncer’ l’incident,

« Ensuite, pour certains de ces risques, on peut décider de se

pour éviter que le problème ne réapparaisse. »

FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°32 - NOVEMBRE 2009


DOSSIER FISCALITÉ TEXTE : LAURENT CORTVRINDT

Administrateurs, sortez-vous (assez) couverts? Il y a une dizaine d’années, les assurances pour dirigeants de droit et de fait se trouvaient presque exclusivement dans les portefeuilles de polices des sociétés cotées en Bourse et/ ou possédant des filiales aux Etats-Unis. Désormais, les PME et même les ASBL n’hésitent plus à en contracter! Pourquoi? Tout simplement parce que la loi et les marchés exposent désormais davantage les administrateurs. Quand la D&O a le vent en poupe…

S

ur un sujet parfois encore tabou, avancer des

nistratives comme les frais de défense. Pour les actions péna-

chiffres ne constitue pas un exercice aisé. On

les, seuls les frais de défense sont pris en charge.

peut néanmoins raisonnablement considérer qu’au cours des douze derniers mois, quelque

PATRIMOINE PRIVÉ EN JEU

5.000 entreprises ont contracté une assurance responsabi-

Pourquoi se prémunir? La raison est simple. « Tout chef d’en-

lité administrateur, communément appelée « police D&O ».

treprise peut voir sa responsabilité individuelle mise en cause

Et, pour cette année, le cap des 5.000 devrait être dépassé,

par la justice, au civil comme au pénal, à l’occasion d’une sim-

selon les premières estimations du métier. Il faut dire que la

ple faute de gestion ou d’une faute plus grave s’il y a délit ou

presse, en relatant en long et en large quelques malheureu-

violation du Code des Sociétés ou encore des statuts de l’en-

ses aventures, comme celles vécues par les administrateurs

treprise, indique David Preneel. La loi du 4 mai 1999 prévoit

de Fortis, a donné un véritable coup de fouet à la vente de

d’ailleurs que la responsabilité pénale des entreprises peut être

ces assurances.

engagée et sanctionnée. Ceci expose clairement le dirigeant:

« Aujourd’hui, nous ne devons même plus en faire la publicité,

il peut être poursuivi pénalement en cas de faute personnelle,

explique David Preneel, responsable du Département Financial

commise notamment dans l’exécution de son mandat. »

Lines de Chartis. Alors qu’avant, ce n’était qu’un produit de ni-

Le dirigeant peut alors se voir condamné à réparer la totalité

che! » La D&O est une assurance du type « tous risques sauf ».

des dommages en puisant, si nécessaire, dans son patrimoine

Elle assure donc l’administrateur au bénéfice duquel les dom-

privé. De plus, les dommages peuvent également résulter de

mages et intérêts réclamés à son encontre, à titre personnel,

fautes commises par d’autres administrateurs. Ajoutons en-

seront remboursés par la compagnie d’assurances – même en

core que la responsabilité des dirigeants a été renforcée par

cas de montants élevés – pour autant que les fautes aient été

la loi-programme du 20 juillet 2006 qui simplifie la récupéra-

commises pendant l’exercice d’un mandat d’administrateur.

tion des arriérés d’impôts et de cotisations ONSS sur le patri-

Soulignons que cette police couvre les actions civiles et admi-

moine propre des administrateurs de sociétés et d’ASBL. FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°32 - NOVEMBRE 2009

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DOSSIER FISCALITÉ

« Ce cadre légal, décuplé par les difficultés économiques et finan-

A nouveau, avancer un chiffre précis relève de l’exercice d’équi-

cières apportées par la crise, explique pourquoi les administra-

libriste. Mais on peut tabler sur une base de mille euros par an

teurs se voient de plus en plus confrontés à des réclamations en

et par mandat d’administrateur pour les PME jusqu’à quelques

dommages et intérêts, notamment lors de faillites. Et toutes les

millions pour les « géants » cotés en bourse. Les montants des

organisations y sont exposées: grandes structures comme PME,

couvertures se voient plafonnés, généralement à hauteur de

voire ASBL. » Il ne s’agit donc pas uniquement du syndrome

25 millions d’euros. Néanmoins, rien n’empêche les entre-

des procès « made in USA » qui débarquerait subitement sur

prises de multiplier les polices. Une trentaine d’entreprises

notre continent. « Les administrateurs indépendants, actifs au

belges débourseraient ainsi plus de trois millions d’euros afin

sein de Conseils d’administration, sont, eux aussi, demandeurs

de porter la couverture de la responsabilité individuelle de

d’une D&O. Au même titre que pour les CEO ou les membres

leurs administrateurs de 200 millions à 300 millions d’euros.

des Conseils d’administration, la police fait d’ailleurs désormais

« S’il n’y a pas vraiment de taille critique pour envisager de se

généralement partie de leur package de rémunération. »

prémunir ou de secteur d’activité plus ou moins exposé qu’un autre, le risque se révèle moins élevé pour une PME. Néanmoins, il reste présent partout et personne ne se trouve réellement à

Pour déterminer les primes, les assureurs se basent sur la

l’abri. » S’il ne se passe rien pendant vingt ans, la 21e année

taille de l’entreprise, son bilan, son chiffre d’affaires ou en-

d’activité peut, en effet, être marquée par une catastrophe…

core son secteur d’activité. En règle générale, les contrats

« Par contre, les entreprises actives également aux Etats-Unis

se concluent pour une durée de douze mois et couvrent les

doivent absolument s’assurer que les mandats y soient égale-

actions introduites durant l’exercice, sans tenir compte de la

ment couverts. Car, de l’autre côté de l’océan, les demandes de

date réelle où la faute à l’origine de la réclamation aurait été

dommages et intérêts sont généralement exclues. L’entreprise

commise. Bien entendu, comme dans toute assurance, les

devra donc contracter une assurance distincte. » Une idée par-

fautes intentionnelles ne sont pas couvertes. Avec la crise,

ticulièrement judicieuse quand on sait que chez l’Oncle Sam,

les primes ont sensiblement augmenté pour les institutions

50% des entreprises cotées ont déjà été confrontées à des

financières mais pas pour les autres entreprises.

plaintes d’actionnaires...

Répartition des types de sinistres des assurances responsabilité des administrateurs de brevet

13% 12% 11% 10% 9% 8% 7% 6% 5% 4% 3% 2% 1%

Ab

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DE € 1.000 À 3 MILLIONS

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