EN PRATIQUE SOMMAIRE
N°35 - MARS 2010
Dossier
Transmission d'entreprise Transmettre ou reprendre une entreprise constitue un exercice complexe. Et la crise n’a rien arrangé dans l’art délicat de la négociation. Conseils.
FISCALITÉ: OPTIMISATION DES COÛTS DOSSIER TEXTE : LAURENT CORTVRINDT
Les ingrédients d’une cession/ reprise réussie 2
Transmettre ou reprendre une entreprise constitue un exercice particulièrement complexe. Bien souvent, cédant et repreneur sous-estiment l’ampleur et la durée des travaux. Et la crise n’a rien arrangé dans l’art délicat de la négociation. Jean-Pierre Di Bartolomeo, président de Sowaccess, Serge Peffer, enseignant à la Solvay Brussels School (ULB), Hugues Lamon, Partner chez PricewaterhouseCoopers (PwC) et Véronique Gillis, Director Transactions chez PwC, nous livrent leurs conseils.
Comment un cédant doit-il aborder la transmission de son entreprise? Jean-Pierre Di Bartolomeo: « Son travail préparatif est d’ordre multiple. Il doit, bien sûr, se préparer personnellement, afin d’éviter tout clash que l’on vit de temps en temps lors d’une cession d’activité. Je pense, par exemple, à un patron qui souhaite vendre, pour toute une série de raisons extrinsèques qu’il a fini par faire siennes, sans toutefois en être réellement
« Il ne faut pas rêver et s’attendre à de plantureux bénéfices en l’espace de quelques années. »
persuadé. Cette personne va donc avancer à reculons et rencontrer des dizaines de candidats acquéreurs sans jamais
les choses se passent. Il n’y a rien de pire qu’assister au dé-
en choisir un. Il aura toujours une bonne excuse à avancer
part d’un patron ‘one man show’ sans transition organisée. Il
pour ne pas lâcher son entreprise. Pour y arriver, un patron
s’agit vraiment d’un point fondamental que la littérature ne
doit donc être intrinsèquement vendeur. Sinon, les deals
souligne pas suffisamment. De tels manquements peuvent
capotent. Le cédant doit aussi préparer certaines personnes
déboucher très rapidement sur de gros problèmes. Après le
clés dans l’entreprise – les commerciaux, la comptabilité, les
nettoyage des comptes et s’être adressé aux membres du
experts techniques… – pour le rôle qu’elles seront, peut-être,
personnel, le cédant doit s’apprêter à avertir ses partenaires
amenées à jouer dans le cadre d’un rachat par une personne
financiers de ses intentions. Mais aussi et surtout ses parte-
externe. Objectif de la manœuvre: les impliquer davantage
naires commerciaux. Il les préviendra en fonction du niveau de
dans la prise de décision, le temps de permettre au nouveau
confiance qu’il entretient avec eux. Parfois, certains entrepre-
patron de prendre ses marques et de comprendre comment
neurs décident de se taire tant que rien n’est signé. Si le cédant
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savent clairement ce qu’ils veulent faire. Les dossiers les plus compliqués viennent des candidats ‘à la recherche de quelque chose’. Ces personnes, souvent mal à l’aise dans leur quotidien, pensent reprendre une entreprise comme un véhicule d’occasion. Si l’acquéreur provient d’une grande entreprise, il doit être conscient de sa démarche. Il ne pourra plus appeler le help desk en cas de problème avec son clavier d’ordinateur… Dans une PME, le patron porte toutes les casquettes à la fois: celle de responsable opérationnel, de directeur des ressources humaines, de comptable, etc. Les gens ne sont pas toujours conscients que dans une PME, il n’y a pas de réceptionniste. Tout le monde répond au téléphone. Mon conseil serait donc, au minimum, de s’éveiller à la réalité et au quotidien d’une entreprise dans le secteur que l’on vise. Dans le même ordre des choses, il ne faut pas rêver et s’attendre à de plantureux bénéfices en l’espace de quelques années. Les déconvenues sont parfois lourdes à digérer. Les projets qui tiennent la route sont avancés par de futurs patrons qui viennent nous trouver avec une idée précise: ils sont intéressés par un secteur, ils témoignent d’une expérience en la matière, ils ont déjà identifié un certain potentiel ou une cible, ils veulent se positionner pour répondre à telle niche dans tel secteur, etc. Néanmoins, il existe un second bon profil d’acquéreur: le repreneur industriel. Au lieu d’investir, ce dernier souhaite grandir par croissance externe et recherche une entreprise qui lui permettra de se montrer rapidement opérationnel tout en réduisant son risque. Le repreneur industriel veut éviter les risques à tous les niveaux: recherche d’un terrain, démarches pour obtenir les autorisations et les permis d’exploitation, formation de
Jean-Pierre Di Bartolomeo: « Dans un dossier de transmission d’entreprise, la valorisation se révèle bien moins importante que l’on aurait pu le penser. Cela peut paraître un peu surprenant dans la bouche d’un financier, mais les aspects humains priment. »
son personnel, démarchage clientèle, etc. En reprenant une entreprise, il rachète également des murs, un carnet de commande, un fichier clientèle, du personnel formé, du matériel en état, un siège d’exploitation, etc. De quoi lui permettre, en tant que patron, de répondre beaucoup plus vite au besoin du marché. J’aime cette approche car, en plus, elle rend possible la création de pôles d’activité. En effet, en doublant un chiffre
est certain de son souhait, tel ne serait pas mon conseil. Au
d’affaire, une entreprise peut redéfinir certaines politiques,
contraire, je préconiserais d’en parler au plus tôt, pour observer
comme sa philosophie de croissance externe avec des acqué-
les réactions et en tirer un maximum d’enseignements. Si tout
reurs stratégiques. Pour ce type de transaction, la Sowalfin ne
le monde est averti, les partenaires financiers sont preneurs
connaît, aujourd’hui, aucun sinistre parmi les 60 à 80 trans-
dans la démarche, les fournisseurs et les clients sont associés
missions d’entreprises financées par an. »
à la transmission et vont considérer le nouveau patron comme une personne à soutenir et l’équipe interne sera mise en valeur
Comment peut-on diagnostiquer une entreprise à reprendre?
car on lui confie une responsabilité à porter au sein de l’entre-
Serge Peffer: « Il faut passer tous les aspects en revue: l’aspect
prise lors du passage de témoin. En réalité, dans un dossier de
stratégique, le financier, le commercial, le marketing, le juri-
transmission d’entreprise, la valorisation se révèle bien moins
dique, la fiscalité, les ressources humaines, etc. Le volet stratégie
importante que l’on aurait pu le penser. Cela peut paraître un
reste, néanmoins, l’élément clé: quelle est la mission de l’entre-
peu surprenant dans la bouche d’un financier, mais les aspects
prise? Quelle est sa vision? Où se voit-on dans cinq ans? Quelles
humains priment. Ceci explique également pourquoi la trans-
valeurs culturelles véhicule-t-elle? Le repreneur procèdera bien
mission d’entreprise reste un exercice extrêmement compli-
entendu à une analyse personnelle mais il convient de se mon-
qué. »
trer attentif aux facteurs qui ont connu le succès. Sans même encore tout connaître de l’entreprise, dès le départ, je conseille
Quel cheminement pour le candidat repreneur?
de fixer une ligne stratégique pour forger la pérennité de l’af-
Jean-Pierre Di Bartolomeo: « Nous aimons les acquéreurs qui
faire et se donner un avantage concurrentiel durable. GénéFINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°35 - MARS 2009
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Hugues Lamon: « Dans certains cas, les risques liés à la taxation d’un avantage qui n’aurait pas été déclaré se révèlent gigantesques. Les latences fiscales pourront même dépasser la valeur de la société… et rendre la vente impossible. »
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ralement, le repreneur oublie cette démarche. Il ne prend pas
fasse trop facilement marche arrière. »
suffisamment de recul et voit uniquement le résultat à court
Et de son côté, que doit faire le cédant?
terme. Ensuite, on peut analyser le commercial et le marketing:
Serge Peffer: « On dit habituellement qu’une cession se pré-
existe-t-il une demande pour les produits ou services? Quelle
pare trois ans à l’avance. Tout se doit donc d’être transparent et
est la concurrence? Les prix sont-ils compétitifs et sont-ils gérés
adapté à la législation pour le jour J. Ce qui n’est pas toujours
par les commerciaux de la maison ou par des intermédiaires?
le cas, avec des aspects parfois discutables. Il faut vraiment
De même, il convient d’analyser la courbe du produit : connaît-il
montrer la réalité des choses et officialiser le chiffre d’affaire
une demande croissante ou un déclin? Des outils très pratiques
réel et payer ses impôts sur ses bénéfices. Cela permettra de
sont disponibles sur le marché pour savoir très rapidement si
mieux valoriser l’entreprise. Le vendeur doit, en tout cas, s’en
l’on pourra se positionner correctement sur le marché. Troi-
préoccuper. Dans l’ensemble, le patron doit réfléchir en com-
sième réflexion: l’analyse administrative. En termes d’environ-
pagnie de son expert comptable à dissocier les éléments pri-
nement ou d’exploitation, suis-je dans le respect des normes
vatifs de l’entrepreneur et les éléments propres à l’entreprise
imposées? Ensuite, l’aspect social n’est pas sans importance,
– pas de confusion de patrimoine. Et, lorsque tout est lissé,
surtout en Belgique. Quand on reprend une entreprise, il faut se
il peut commencer à contacter des intermédiaires. Première-
pencher sur les ressources humaines qui la font avancer: aurais-
ment, travailler de manière anonyme avec des intermédiaires
je de lourds préavis à payer? Quel est l’âge moyen? Le transfert
est toujours préférable afin de ne pas ‘effrayer’ inutilement le
de connaissance a-t-il été effectué? Le repreneur doit veiller à
marché qui apprendrait la mise en vente de l’entreprise. Aux
respecter les normes sociales des commissions paritaires en
Etats-Unis, cette ‘publicité’ constitue une pratique habituelle.
matière de traitement, au risque de devoir les réajuster… alors
Sous nos latitudes, elle ne rencontre pas vraiment de succès.
que les comptes de résultats prévisionnels n’étaient peut-être
Deuxièmement, dans les négociations, l’intermédiaire se mon-
pas basés sur ces éléments. La synthèse de tout ce travail ré-
trera bien moins émotif que le patron qui vend son ‘bébé’. »
sulte, bien entendu, dans l’élément financier où il faut examiner les comptes des trois dernières années et des trois bilans
La crise a-t-elle stimulé ou freiné les acteurs?
et comptes de résultats prévisionnels. A moins d’être soi-même
Jean-Pierre Di Bartoloméo: « Le nombre d’acquéreurs affi-
expert comptable ou reviseur, je recommande de se faire assister d’un spécialiste pour réaliser une due diligence. Si je devais donner un seul conseil, ce serait de s’entourer d’experts: en fiscalité, en comptabilité et pour les aspects juridiques. Mieux vaut dépenser € 5.000 et finalement ne pas reprendre une entreprise que de perdre des centaines de milliers d’euros parce qu’on a voulu économiser quelques billets sur la partie audit. Attention toutefois: lancer les opérations uniquement lorsqu’on a signé une lettre d’intention avec le cédant, afin d’éviter que celui-ci ne FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°35 - MARS 2010
« Si des litiges sont en cours, il faut essayer de les régler car toute incertitude peut avoir un impact sur le prix. »
Véronique Gillis: « Nous observons un fossé entre les attentes des vendeurs et celles des acheteurs. Ces derniers s’attendent à devoir payer moins, avec des multiples d’EBITDA et des prix à la baisse. Les vendeurs ne semblent pas, pour le moment, l’entendre de cette oreille. »
Quels conseils donner aux cédants pour ce qui concerne les
la société… et rendre la vente impossible. Deuxièmement,
aspects légaux et juridiques?
assurez la pérennité du management. Et troisièmement,
Véronique Gillis: « D’une manière générale, il faut commen-
rédigez une documentation précise sur toutes les relations
cer par une préparation exemplaire, notamment en mettant
avec les entreprises, les clients et les fournisseurs. »
la documentation à jour. Cela peut paraître simpliste. Mais
Véronique Gillis: « Un accompagnement professionnel du-
dans une transaction, il ne suffit pas de dire: J’ai des contrats
rant toute la transaction me semble indispensable. Cette
avec des clients. Il faut le prouver. Ces contrats sont-ils signés?
aide va permettre de commencer par un bon diagnostic
Les documents légaux sont-ils en ordre? Possédez-vous une
et de connaître le travail de préparation à accomplir avant
propriété intellectuelle, des brevets ou des marques sur vos
de vraiment se lancer dans un processus de vente. J’ai sou-
produits? Autre exemple, l’immeuble/le bâtiment dans le-
vent constaté des pertes de valeur pour le vendeur, tout
quel vous travaillez fait-il partie de la vente? Si oui, respec-
simplement parce que la société n’était pas prête pour la
te-t-il toutes les normes environnementales? Si non, il faut
transaction. D’où l’importance de se faire assister (vendor
prévoir sa sortie sur un laps de temps suffisant, afin de res-
assistance) dès le début du processus de vente. Surtout que
ter ‘neutre’ fiscalement. Autre point, si des litiges sont en
la partie adverse sera, elle aussi, certainement assistée. »
cours, il faut essayer de les régler car, de manière générale,
Hugues Lamon: « Dans les cas extrêmes, quand une société
toute incertitude peut avoir un impact sur le prix. Ces ques-
doit absolument être vendue mais que des avantages en
tions, et bien d’autres, sont fondamentales car elles soulè-
nature excessifs n’ont pas été déclarés, l’amnistie fiscale se
vent des problèmes qui peuvent mettre des mois à se résou-
profile comme une solution envisageable. Le cédant déclare
dre. Et en cas de manquement(s), leur impact peut se révéler
tout en une fois à l’administration fiscale, sur cinq/sept ans,
fatal, même pour le meilleur des business. »
et paye l’impôt, avec en supplément 10% de pénalité. Il sera
Hugues Lamon: « Souvent, dans les sociétés patrimoniales,
alors exempté de sanction pénale. Cette solution reste inté-
personnelles ou privées, on observe un mix entre le patri-
ressante à considérer parce que les investisseurs étrangers,
moine privé et le patrimoine professionnel. Quand on envi-
comme les japonais ou les américains, possèdent une aver-
sage une cession, premièrement, la société doit être libérée
sion au risque totalement nulle. De plus, reprendre une so-
de tout actif privé. Là aussi, en pratique, cela peut prendre
ciété qui a connu un passé fiscal délicat expose le nouveau
plusieurs années. Les confusions privé-professionnel sont
Comité d’administration à des sanctions pénales. Enfin,
parfois telles que la séparation des actifs privés – souvent
pour assurer la pérennité de l’équipe, je conseille de met-
immobiliers – peut générer des coûts fiscaux importants.
tre en place des outils de gestion. Une entreprise court à sa
Dans certains cas, les risques liés à la taxation d’un avan-
perte si, par exemple, elle vient à perdre son patron dont le
tage qui n’aurait pas été déclaré se révèlent gigantesques.
know-how n’a jamais été couché sur papier. Une entreprise
Les latences fiscales pourront même dépasser la valeur de
a besoin de continuité et donc d’un plan de succession. »
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une valeur de transaction correspondant à un multiple d’EBITDA de dix, on trouvait facilement un financement à 60%80%. Ce n’est plus le cas. Les acheteurs revoient donc leurs ambitions à la baisse. Mais les vendeurs ont encore en tête les prix pratiqués il y a quelques années. » Parmi les nombreux acteurs qui peuvent aider à trouver un financement, certains se démarquent-ils? Serge Peffer: « Certainement. Pour rester majoritaire, l’investisseur doit, naturellement, apporter la majeure partie du capital. Mais des sociétés comme les Invest sont intéressantes à contacter, à condition de se situer dans leur zone géographique d’influence. Ces financiers ne cherchent pas à écraser l’actionnaire principal ou patron de l’affaire. Ils sont intéressés par un développement de l’emploi dans leurs régions. Ils accompagnent pour développer l’entreprise, et pour réaliser une plus-value à terme. Prendre les rênes de l’entreprise ne les intéresse pas. Les moyens financiers des Invests sont considérables. Et ils cherchent en permanence de bons projets. Outre les banques qui apportent toujours une expertise intéressante, dans le domaine du crédit je vois également un autre contact
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Serge Peffer: « Souvent, les structures n’ont pas été mises en place, faute de temps, d’argent ou de connaissances. Il existe rarement une balance scorecard ou un tableau de bord. Le repreneur passera alors beaucoup de temps à professionnaliser son nouvel environnement. »
que je qualifierais de maître achat: le Fonds de participation. Même s’il commence à monter en termes de quantité de dossiers, je trouve que ce mode de financement n’est pas assez connu. Cette banque fédérale a pour mission de soutenir le développement et la création d’entreprises. C’est pourquoi elle met au point des produits comme Starteo pour les starters ou
liés à nos services a augmenté de 50% au cours des douze der-
Optimeo pour ceux qui développent leurs entreprises ou qui
niers mois. Des candidats très certainement attirés par l’espoir
veulent en racheter une. Les conditions d’intérêt se révèlent
de réaliser une bonne affaire. Mais, a contrario, j’ai observé
nettement inférieures à celles du marché. Seule nuance: avec
une réduction de 25% des propositions de vente. En effet, les
le Fonds de participation, on ne peut pas demander la tota-
cédants souhaitent attendre que l’économie redémarre avant
lité du crédit. Il faut donc passer aussi par une banque, sous
de vendre. Malgré cette baisse, notre portefeuille conserve une
forme de cofinancement. Mais en règle générale, le Fonds de
répartition identique. Or, je m’attendais à voir certains secteurs
participation réclamera moins de garanties qu’un organisme
industriels mis à la vente. Ce n’est visiblement pas le cas. Les
bancaire et un taux d’intérêt plus faible. Enfin, on peut aussi
gérants de société qui craignent perdre de l’argent en vendant
aller chercher son complément financier auprès des business
aujourd’hui reportent leur idée, s’ils en ont la capacité. Je dirais
angels. Ces personnes peuvent toujours apporter une réflexion
donc qu’il n’y a pas vraiment de secteur porteur actuellement.
intéressante sur un secteur qu’ils maitrisent. Et eux aussi, en
En tout cas, cela ne transparait pas dans nos chiffres. »
règle générale, recherchent uniquement la plus-value et non la
Hugues Lamon: « En 2008, et certainement en 2009, le
prise de contrôle de la société. »
nombre de transactions a chuté de façon drastique, essentiellement suite aux difficultés d’accès au financement ren-
Racheter une PME: une acquisition spécifique?
contrées par les candidats acheteurs. Le marché des PME et
Serge Peffer: « Je le pense, en effet. Pour le patron d’une PME,
entreprises familiales s’est recentré sur ses activités principa-
en général, c’est une partie de sa vie qu’il vend. L’aspect émo-
les. Les candidats à une cession qui ne sont pas arrivés à réali-
tionnel y joue un grand rôle. De plus, le vendeur souhaite
ser une sortie en 2008 devront encore attendre deux ou trois
obtenir un prix généralement surfait par rapport au marché,
ans ou, peut-être, faire appel à des fonds de capital à risque,
justement à cause de cette valeur affective qu’il attribue à son
dont le regain d’activité se remarque sur le marché. »
entreprise. Or, cette valeur affective n’a pas de sens par rapport
Véronique Gillis: « Depuis quelques mois, du côté des ache-
à l’acheteur. Je vois également une autre spécificité au rachat
teurs, on s’attend à devoir payer moins, avec des multiples
d’une PME. Bien souvent, les affaires tournent grâce au patron.
d’EBITDA et des prix à la baisse. Mais les vendeurs ne sem-
Si le patron part, une partie de l’intuition, du know-how, du
blent pas, pour le moment, l’entendre de la même oreille. Très
relationnel l’accompagne. Dans une grande entreprise, cette
clairement, nous observons un fossé entre les attentes des
tendance se marque moins. L’expertise n’est pas détenue par
vendeurs et celles des acheteurs. Il y a encore deux ans, pour
une seule personne et les clients continuent à venir. La reprise
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d’une PME n’est pas toujours évidente pour le repreneur s’il ne
entendu, un rôle pour les start-up mais est aussi très active
bénéficie pas des bons outils. Souvent, les structures n’ont pas
dans le développement de l’entreprise. Personnellement,
été mises en place, faute de temps, d’argent ou de connais-
j’anime un atelier sur le rachat des PME. Solvay Entrepre-
sances. Il existe rarement une balance scorecard ou, au mini-
neurs essaye d’assurer un maximum de formation et de
mum, un tableau de bord. Le repreneur passera donc peut-être
coaching, en ce compris sur la reprise et la cession d’activi-
beaucoup de temps à professionnaliser son nouvel environne-
tés: due diligence, recherche de financement, etc. En fait,
ment. Les TPE, quant à elles, se révèlent encore plus délicates
l’apport se révèle très complet dans l’approche du monde
à revendre. Elles sont composées d’une poignée d’employés
entrepreneurial et de ses multiples facettes. Grâce aux
qui peuvent quitter le navire avec le patron. Le repreneur se
nombreux intervenants, Solvay Entrepreneurs permet aux
retrouve alors face à une structure vide. Quand on reprend une
entrepreneurs de gagner du temps en les orientant immé-
entreprise, il faut lister ses facteurs de risques et ceux liés au
diatement vers les personnes adéquates. Enfin, il est pro-
secteur d’activité et déjà prévoir les solutions à mettre en route
posé également des incubateurs. Pour un loyer modeste,
par rapport aux risques listés. »
l’entreprise bénéficie de locaux et d’un encadrement en termes de conseils. »
Quels types d’accompagnement peuvent faciliter le processus? Jean-Pierre Di Bartoloméo: « Avant tout, nous souhaitons in-
Pour accéder au questionnaire d’autodiagnostic:
former au maximum les candidats, acquéreurs et vendeurs.
www.sowaccess.be/questionnaire/inscription.html
Des professionnels dans le service et l’accompagnement faisant partie de notre réseau de partenaires agréés sont à leur écoute. Nous essayons de les y sensibiliser car trop de
Quels conseils donner aux repreneurs pour ce qui
dossiers ont capoté parce qu’un vendeur ou un acquéreur,
concerne les aspects légaux et juridiques?
qui pensait tout savoir a loupé une clause, une garantie, une
Véronique Gillis: « Je conseillerais au candidat acqué-
autorisation, etc. Nous essayons également de faire prendre
reur de demander, le plus vite possible, une exclusivité
conscience aux patrons qu’une transmission ne se concrétise
sur le dossier. Discuter seul avec la cible est toujours
pas en deux coups de cuillère à pot. Les étapes à franchir se
préférable. Cette période d’exclusivité peut se prévoir
révèlent très nombreuses. C’est pourquoi, avec l’Université
dans la lettre d’intention. »
de Liège, nous avons développé et mis en ligne un système
Hugues Lamon: « Car les cédants, surtout s’ils sont
d’autodiagnostic du cédant. En 80 questions, celui-ci peut
conseillés par une banque d’affaire, organisent souvent
prendre conscience de ses points forts et de ses points plus
un marché pour créer une concurrence sur le prix. »
faibles. En fonction du résultat et des pistes de réflexion/
Véronique Gillis: « Il faut également veiller au contenu de
recommandations immédiatement fournies par le logiciel,
cette lettre d’intention. Vérifiez qu’elle soit bien non-con-
Sowaccess propose d’intervenir financièrement, à hauteur
traignante, qu’elle ne vous engage pas déjà sur un prix. Il
de 70%, pour les deux premiers jours d’un audit réalisé par
faut aussi qu’elle contienne les définitions des éléments
un spécialiste agrée par nos soins – près de cent références.
cités dans la lettre. La plupart du temps, un prix s’entend
Etape suivante, sur base d’un profil précis du vendeur, nous
‘debt free-cash free’. Mais encore faut-il définir ces ter-
identifions parmi nos acquéreurs ceux qui pourraient être
mes, pour éviter une différence de compréhension. Et si
intéressés par la reprise de l’entreprise et qui ont les compé-
les parties ne s’entendent pas, mieux vaut s’en rendre
tences, l’expérience et les fonds suffisants. J’insiste sur le fait
compte immédiatement et arrêter les frais avant de se
que le vendeur garde toujours la main dans l’opération. Confi-
lancer inutilement dans la due diligence. Assez rapide-
dentialité et discrétion en sont les maitres-mots. Ensuite, les
ment, l’acheteur doit aussi parler des garanties qu’il va
acteurs peuvent se rencontrer et commencer à négocier. Et
demander. Une partie du prix d’achat devra, sans doute,
s’ils se mettent d’accord sur un prix, nous pouvons aussi les
être bloqué pour un certain temps, comme garanties
aider à boucler le dossier financier. »
pour couvrir d’éventuels problèmes liés au passé, par
Véronique Gillis: « Nous accompagnons la préparation de la
exemple. Cela peut être sujet à discussion si le vendeur
vente ou de l’achat. Nos clients n’ont, généralement, pas l’ha-
croit recevoir le montant total à la signature du deal. »
bitude de ce genre de négociation. Nous pouvons leur amener
Hugues Lamon: « Dans tous les cas où le précédent ac-
notre expertise dans le domaine de la cession, de la reprise
tionnaire doit rester dans l’activité, même pour un temps
mais aussi dans le secteur d’activité concerné. »
limité, le montant qu’il recevra sera bloqué à 60% ou 70%
Hugues Lamon: « Nous ne nous occupons pas uniquement
du prix de la vente. Le solde ouvert assure que cette per-
de grandes transactions qui génèrent des sommes impor-
sonne en question remplira sa part du contrat. J’ajouterai
tantes. Nous adaptons nos équipes en fonction de la quan-
encore que l’investisseur corporate possède souvent une
tité de travail ou pour intervenir uniquement sur l’un ou
connaissance du secteur, de l’industrie visée, une vision
l’autre point spécifique. »
personnelle. Il peut la faire valoir dans l’acquisition. »
Serge Peffer: « L’équipe de Jean-Claude Ettinger joue, bien FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°35 - MARS 2009
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FISCALITÉ: OPTIMISATION DES COÛTS DOSSIER TEXTE : LAURENT CORTVRINDT
Oser ses coups de cœur et muscler sa perspicacité 8
D’ici dix ans, une entreprise européenne sur trois devra trouver un repreneur. A Bruxelles, si l’on considère l’âge moyen des propriétaires et chefs d’entreprise, la situation serait encore plus critique. Il existe donc nombre d’opportunités pour le directeur financier désireux de se lancer dans l’entrepreneuriat. Promoteur d’ICHEC-PME, administrateur et auteur de Réussir la relève, Jean Mossoux livre ses conseils.
Q
ue l’on souhaite créer une nouvelle entreprise
mière. Le candidat repreneur est-il prêt à accepter le choc cultu-
ou reprendre une activité existante, l’esprit en-
rel qu’il va vivre en s’engageant dans une activité dont la taille
trepreneurial reste le même. Seule différence
correspond au service des photocopies de l’ancienne multina-
élémentaire: avec une activité déjà sur pied, on
tionale pour laquelle il travaillait? « Celui qui possède l’esprit PME
ne part pas de zéro. Encore faut-il procéder à une bonne analyse
appréciera sans doute le potentiel de l’affaire. Mais en attendant,
de la situation. La cible est-elle saine? Quelles sont ses perspec-
la réalité du terrain et le quotidien peuvent se révéler difficiles à
tives? Quel est son bilan financier? Ensuite, il conviendra d’ana-
vivre. Comme souvent, tout est une question de choix… »
lyser scrupuleusement son capital humain. Consacrer assez de temps à l’équipe qui forme l’entreprise constitue, en effet, un
COMPLÉMENTARITÉ ET PRUDENCE
élément essentiel de la (future) réussite du projet.
En cas de réponses positives, d’autres questions seront à soulever:
Quand on lui parle d’esprit d’entreprendre et de reprise d’entre-
comment juger et jauger l’entreprise? Que me disent et que me ca-
prise, Jean Mossoux fait immédiatement la différence entre les
chent les chiffres? Est-ce que ce type d’activité et les collaborateurs
« rêveurs » et ceux qui n’hésiteront pas à « passer à l’acte ». Tout
en place me conviennent? Pour vérifier les chiffres, Jean Mossoux
de suite, une première question se pose: quelle somme est-on
préconise, dans un premier temps, une approche de type compta-
disposé ou peut-on mettre sur la table? Jean Mossoux scinde le
ble, avec l’appui d’un réviseur d’entreprise. Ensuite, il conviendra de
marché en deux divisions: une première sous la barre du million
se pencher sur les tableaux de bord et les indicateurs qualitatifs et
d’euros et une seconde au-delà. Pour un particulier, un million
quantitatifs qui doivent permettre de cerner l’activité: ai-je en ma
d’euros constitue déjà une somme importante. « Les montants
possession le suivi des retards clients et fournisseurs, quel est le
traditionnels qu’ils apportent tournent habituellement autour
taux d’absence, l’entreprise possède-t-elle des brevets, est-elle déjà
des € 300.000. Or, quel type d’entreprise peut-on espérer reprendre
présente dans la grande distribution… « Le candidat acquéreur doit
pour un tel prix? Certainement pas une boîte de 30 employés ou
tester ces indicateurs et se montrer personnellement capable de cer-
une usine de production. Il s’agira plutôt d’un fonds de commerce
ner si la couverture s’avère suffisante. »
ou, au mieux, d’une activité de services avec quelques salariés. »
Autre interrogation, dans une transmission, le patron cédant
La seconde question à se poser est immédiatement liée à la pre-
saura-t-il conserver sa motivation? Oui, dans de nombreux cas.
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Mais pas toujours… « La question mérite donc d’être posée dans le chef du repreneur: quid de ma relation avec le cédant? Et que faire avec les collaborateurs. Si je rachète une pâtisserie, ferais-je un bon pâtissier? Si ce n’est pas le cas, j’aurai tout intérêt à conserver l’ancien pâtissier dans sa fonction. De manière générale, le noyau de base doit rester en place. » Par contre, si d’emblée le repreneur sait qu’il sera amené, pour l’une ou l’autre raison, à se séparer de certains collaborateurs, idéalement, le montant des préavis sera déduit de la valorisation. « Deux mots résument bien la situation: complémentarité et prudence. Quand un cédant met son entreprise sur le marché, il s’agit d’un geste fort vis-à-vis de son personnel. Et soit ce dernier prend peur parce qu’il voit son patron sur le départ, soit il lui témoigne toute sa confiance parce qu’il se rend compte que son patron veille à la pérennité de l’entreprise. »
Jean Mossoux: « Cent mille questions se posent lors d’une reprise. Mais il n’y a qu’une seule démarche pertinente: il faut poser les bonnes questions, dans le bon ordre et se focaliser sur les principales. »
CLARTÉ ET TRANSPARENCE Pour avoir accompagné un certain nombre d’entreprises, du dé-
enseigne d’un fonds de commerce localisée dans un endroit
but de leur croissance vers la maturité, Jean Mossoux conseille
prestigieux. Dans le bilan, celle-ci ne sera pas nécessairement
de construire son affaire de sorte qu’elle soit cessible à tout
valorisée parce qu’on occupe les lieux depuis des décennies. Or,
moment. En d’autres mots, sa gestion doit se montrer claire et
il est évident qu’intrinsèquement cette enseigne représente une
transparente. « Si le cédant veut conclure un deal aisément, il en
coquette somme.
va de son intérêt. Parce que si, à l’inverse, la cession n’est qu’une
« Nommer, identifier et cerner les rentes de situation, complémen-
succession de surprises – généralement toujours dans le mauvais
tairement à l’actif net corrigé, constitue une étape importante,
sens – pour l’acquéreur, le cédant va systématiquement faire fuir
conclut-il. Poste par poste, il faut discuter avec intelligence. En
tous ses candidats. »
réalité, cent mille questions se posent lors d’une reprise. Mais il n’y
Aussi, pour préparer la transmission de son entreprise, le cédant
a qu’une seule démarche pertinente: il faut poser les bonnes ques-
devrait s’y prendre trois ans en amont, notamment en instau-
tions, dans le bon ordre et se focaliser sur les principales. Un prix,
rant des indicateurs de gestion à l’historique vérifiable. « Il faut
par contre, sera toujours la charnière entre passion et raison. Un
à tout prix éviter de travailler uniquement pour la cession propre-
ancien cadre aura parfois intérêt à payer un peu plus cher et re-
ment dite. Ce formalisme fait intrinsèquement partie de la ges-
prendre rapidement une entreprise parce que son carnet d’adresse
tion. Il se révèlera donc bénéfique pour l’entrepreneur, dans son
est encore opérationnel… »
quotidien, comme lors de la cession. » Pour réussir l’après, Jean Mossoux recommande de respecter la culture de l’entreprise et de faire en sorte que les ressources
QUELQUES CHIFFRES
qui tiennent à l’entreprise, collaborateurs comme fournisseurs, puissent continuer à la soutenir. « Le repreneur doit donc, à ce
* 30% des entreprises seront à reprendre d’ici 2020 en Europe.
moment, se demander s’il est en état d’activer avec intelligence
* En Belgique, un chef d’entreprise sur trois est âgé de
un rapport de force efficace. Deux scénarios s’offrent à lui. Soit il rassure ses partenaires clés, externes ou internes, et envisagera uniquement des changements lorsque la mayonnaise aura pris. Soit il y a urgence et il faut immédiatement mettre la pression sur les fournisseurs pour obtenir de meilleurs prix ou sur les employés pour obtenir un meilleur rendement. »
plus de 50 ans. * La durée idéale pour une transmission réussie est estimée à trois ans. * L’écart maximum acceptable entre le prix de base du cédant et le prix souhaité par le repreneur est de 20%. * L’analyse financière passée et future de l’entreprise visée doit être réalisée sur cinq ans.
LE JUSTE PRIX
* 63% des patrons de PME souhaitent une transmission familiale.
Reste alors à déterminer un « juste prix » pour la valorisation de
* Le poids des actifs immatériels dans le prix moyen de
l’entreprise. De son côté, le cédant espère légitimement obte-
reprise du fonds de commerce s’élève à 51%.
nir un prix maximum. En face, le candidat repreneur souhaite
* D’ici 2015, les entreprises à reprendre concerneront le
bénéficier des meilleures conditions. « L’idéal reste, dans un pre-
secteur industriel (61%), le commerce (55%), la construc-
mier temps, de s’accorder sur un référentiel. A ce sujet, le cédant
tion (54%) et les services (51%).
devrait se pencher sur la valorisation de l’actif net corrigé. Ensuite, on peut se lancer dans les argumentaires sur la valeur d’éléments
Source: Dexia
de nature extra-comptable. » Entendons par là, par exemple, une FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°35 - MARS 2009
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DOSSIER FISCALITÉ TEXTE : LAURENT CORTVRINDT
La conjoncture est propice aux affaires intéressantes Au-delà des règles de bonne conduite, en théorie communes à toutes les transmissions d’entreprises, chaque expérience se révèle différente. A chacun son histoire, en somme: en raison d’un contexte économique particulier, de la sensibilité du cédant, de la motivation du candidat acheteur ou de bien d’autres critères. Retour d’expériences.
10
F
iliale à part entière du Crédit Mutuel Nord Eu-
que-t-il. Aussi, nous avons été amenés à demander une auto-
rope (CMNE), première banque euro-régionale au
risation à la Commission bancaire pour pouvoir fonctionner
Nord de la France, BKCP s’appuie sur la stabilité
comme une entité unique. Cette autorisation arrive en 2006.
d’un groupe solide. Grâce à son caractère coopé-
Les banques régionales conservent alors l’activité clientèle et le
ratif et décentralisé, le Crédit Mutuel agit en tant que banque
Crédit Professionnel dispense les activités de support pour les
de proximité. En 1999, quand il prend une participation majori-
banques régionales. »
taire dans le Crédit Professionnel, le Crédit Mutuel Nord Europe le fait uniquement dans l’organe central du réseau. A l’époque,
DEUX ÉTAPES
autour de ce réseau, on retrouve neuf banques satellites, indé-
L’absorption des banques régionales s’est suivie à un rythme
pendantes pour leur fonctionnement.
soutenu: sept entités en sept ans. Dès lors, comment assi-
L’objectif initial du CMNE était, au travers de cet organe cen-
miler ce changement structurel? « Durant un certain nombre
tral et de l’existence de ce réseau, de mettre en place et de
d’années, nous avons laissé coexister ces entités, en parallèle.
vendre toute une gamme de produits. Néanmoins, deux ans
Courant 2006, nous avons lancé le processus d’unification avec,
plus tard, une première banque régionale vient taper à la por-
d’un côté le Crédit Professionnel en tant que banque de ban-
te du CMNE pour lui demander du soutien. Il s’agit du Crédit
que en charge des services de support et, de l’autre, les Banques
professionnel interfédéral, basé alors à Mouscron. Une petite
régionales se concentrant sur le développement du business
structure de 16 personnes, mais non dénuée d’intérêt pour
commercial. Cette opération a pris 18 mois, notamment pour
le business. Le CMNE décide donc de procéder à son intégra-
recruter du personnel. CMNE a toujours privilégié le facteur
tion. Jean-Christophe Vanhuysse, CFO de BKCP, ne le sait pas
humain. Aussi, nous avons voulu laisser la possibilité à ceux qui
encore à ce moment mais le rachat progressif des banques
le souhaitaient de continuer à travailler dans le groupe, depuis
régionales suivantes est lancé: Banque du Brabant, Caisse Fé-
les anciens sites régionaux, en les rattachant hiérarchiquement
dérale du Crédit Professionnel de Courtai, Crédit Profession-
à des responsables opérationnels de Bruxelles. Une bonne idée
nel de Malines, Crédit Professionnel de Flandre Orientale, CP
sur le papier… qui, dans la pratique, s’est révélée d’une extrême
Banque, Banque de Flandre Occidentale…
complexité en matière de suivi des activités. »
Dans un premier temps, les entités vivent ensemble mais
Le management de CMNE réagit et décide alors d’une seconde
sans être unifiées dans leur mode de fonctionnement. « Nous
étape importante dans la construction du groupe: le recrute-
devions nous restructurer et travailler différemment, expli-
ment d’un directeur commercial, en 2007, pour entamer un
FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°35 - MARS 2010
programme de développement commercial. « Fin 2008, cela nous a amené à prendre plusieurs décisions. A commencer par la fusion des banques régionales en une seule structure juridique et une seule appellation: BKCP. Ensuite, nous avons consolidé les plateformes informatiques en une seule plateforme retail. Enfin, pour les activités commerciales, nous avons fini par maintenir un seul responsable du développement pour toute la Belgique en nous séparant des directeurs commerciaux issus des différentes banques régionales. »
LA REPRISE, UN BOULEVERSEMENT Aujourd’hui, la structure de BKCP est claire. Elle véhicule un seul et même message. Elle ne connaît plus qu’un mode de fonctionnement et de commercialisation des produits dans les agences. Ses programmes de formation et le suivi commercial sont unifiés, etc. Selon Jean-Christophe Vanhuysse, la politique de changement porte ses fruits. Certes, le travail est encore frais, mais les résultats 2009 se révèlent satisfaisants. « Il nous reste encore beaucoup de pain sur la planche car on ne crée pas une culture d’entreprise en quelques mois. Mais le processus est lancé. » De son expérience, notre interlocuteur retient une période de transition beaucoup trop longue. « Pour certaines entités, l’intégration s’est étalée sur trois ans. Or, le personnel atten-
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dait beaucoup du CMNE. Aussi, je conseillerais d’aller le plus vite possible. Il ne faut pas laisser la banque reprise avec la direction et les équipes en place, sans une présence du repreneur. C’est préférable pour des deux parties. A côté de cela, il faut bien assurer la conduite du changement. Un point tout à fait clé. Vous ne pourrez pas tout de suite fonctionner efficacement sans ressources humaines qui connaissent l’organisation, les procédures, les clients, les contrats, etc. Avant de se lancer dans un processus de migration, il faut comprendre l’existant et pré-
Jean-Christophe Vanhuysse: « En tant que repreneur, vous avez tout intérêt à ce que la transition se passe bien. Assez rapidement, mixez les équipes. Le personnel déjà intégré dans le groupe jouera un rôle de tuteur et démythifiera la reprise. »
parer le changement avec les équipes en place. » Or, une cession/reprise constitue toujours un bouleversement
reuse de créer un réseau de distribution en Afrique de l’ouest
pour les équipes en place: changement de structure, de res-
et à une entreprise de Louvain-la-Neuve qui souhaite structu-
ponsable, d’environnement de travail, nouvelles règles, etc.
rer son département opérationnel.
« Il faut se montrer proche du personnel. Une intégration in-
Aujourd’hui âgé de 55 ans, Dominique de Tollenaere arrive à un
formatique prend, par exemple, neuf mois pour la préparation
nouveau tournant de sa carrière: va-t-il continuer ses activités
technique et trois mois supplémentaire pour que le personnel
de manager indépendant ou, en tant qu’homme de défis, se
s’adapte. En tant que repreneur, vous aurez donc tout intérêt à
décidera-t-il à racheter une PME? La réponse, il la trouve auprès
ce que la transition se passe bien. Assez rapidement, mixez les
de ses enfants qui, entrepreneurs dans l’âme, caressent le rêve
équipes. Le personnel déjà intégré dans le groupe jouera un rôle
d’un jour diriger leur propre société. « C’est ce qui m’a décidé
de tuteur et démythifiera la reprise. »
CONJONCTURE PROPICE
à scruter le marché, nous explique-t-il. C’est idéal pour assurer la continuité des affaires de garantir dès à présent la reprise de la future activité car, à 55 ans, la fin de carrière se rapproche.
Ingénieur civil mécanicien de formation, Dominique de Tolle-
De plus, pour les reprises, la conjoncture est propice aux affaires
naere (DCCS Management & Consulting) a essentiellement
intéressantes. A court terme, une reprise se montrera plus ren-
exercé dans le monde de la gestion et du commerce, avec no-
table que la création de sa propre boite. » Aussi, Dominique de
tamment une expérience africaine de plus de dix ans. Il rentre
Tollenaere ne s’est pas arrêté sur un type d’activité en parti-
ensuite en Belgique et monte sa propre activité de location
culier. « Entreprise de service(s) ou de production, peu importe.
court terme de matériel informatique. Affaire qu’il finit par
Seuls deux impératifs subjectifs – mais terriblement importants
céder à son associé pour reprendre son bâton de pèlerin et
– doivent être respectés: une ouverture à l’international et une
son costume de manager indépendant. Durant trois ans, il
activité évolutive, afin de se prémunir contre une crise et pouvoir
apporte son aide et son expérience à une société belge dési-
répondre aux besoins des marchés et des pays émergeants. » FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°35 - MARS 2009
« A court terme, une reprise se montrera plus rentable que la création de sa propre boite. » chés, afin de ne pas manquer sa cible. « Pour le déroulement de l’opération de reprise, dans un premier temps, on ne rencontre jamais le propriétaire. D’ailleurs, en règle générale, on ne connaît même pas son nom. Le candidat repreneur traite avec des intermédiaires. Tout commence avec une proposition vague émise par le commanditaire: type d’activité, chiffre d’affaires, localisation, etc. » En cas d’intérêt, le candidat repreneur reçoit alors un premier dossier contenant, entre autres, un mémorandum à titre confidentiel, puis le nom de la société. On peut alors décider d’approfondir les choses et, en entrant en contact avec la société, le candidat repreneur accède aux chiffres, à la stratégie, au marché, à la clientèle… « On s’approche à cet instant du désir d’acquisition. Le temps vient de signer un protocole d’accord avec le vendeur – sous réserve des audits comptable et juridique et du financement
Dominique de Tollenaere: « Typiquement, je vois deux sortes d’opérations. D’une part, les entreprises en difficulté ou à très faible rentabilité dont les dirigeants souhaitent absolument se séparer. Et, d’autre part, les sociétés dont les gestionnaires ont dépassé le cap des 60 ans. »
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– pour vérifier si les promesses correspondent bel et bien à la réalité. Si tel est le cas, les deux parties procéderont à l’établissement d’une convention pour laquelle je conseille vivement de recourir à un avocat. Entre le premier contact et la signature, comptez de six mois à un an. » Enfin, dernier point – et non
Fort de son expérience, Dominique de Tollenaere nous livre
des moindres – à régler lors de la négociation: la passation de
quelques impressions. Tout d’abord, dans le marché que nous
pouvoir. Se fait-elle du jour au lendemain? Un suivi des an-
connaissons actuellement, l’acheteur « fixe » davantage le prix
ciens dirigeants semble-t-il souhaitable au moins pour une
que le vendeur. « Typiquement, je vois deux sortes d’opérations,
période déterminée? Des questions pour lesquelles il n’exis-
indique-t-il. D’une part, les entreprises en difficulté ou à très
te, malheureusement, pas de réponses systématiques.
faible rentabilité dont les dirigeants souhaitent absolument se
Valéry Laloire (Green Finance), diplômé de l’IAG (aujourd’hui
séparer. Et, d’autre part, les sociétés dont les gestionnaires ont
Louvain School of Management), débute en tant que cadre dans
dépassé le cap des 60 ans. Voyant la crise arriver, ils souhaitent
le secteur financier. Une première orientation professionnelle
parfois se retirer pour valoriser au plus haut ou parce qu’ils ne
qu’il conservera durant sept ans, dont la majorité passée au
possèdent plus l’énergie nécessaire pour éventuellement se repo-
Luxembourg. Entrepreneur dans l’âme, il crée ensuite en 2002
sitionner. C’est pourquoi, je commence toujours par demander
le premier « family office » bruxellois, une banque privée indé-
l’âge des dirigeants. Il s’agit d’un bon indice. »
pendante pour clients haut de gamme qui souhaitent du surmesure. L’affaire sera revendue cinq ans plus tard, suite à une
SUR DE BONS RAILS
dispute entre associés… et surtout le sentiment, après 12 ans de
Ces entreprises se voient alors souvent valorisée sur base du
finance, de ne pas toucher d’assez près à l’économie réelle.
cash flow libre bien plus réaliste. Autre constatation: quand
Valéry Laloire se décide alors: il veut racheter une entrepri-
on veut acquérir une entreprise, il faut apporter un certain
se. Chose faite en septembre 2008 lorsqu’il devient admi-
montant. « Celui-ci porte souvent sur un ou deux millions
nistrateur délégué d’une société de chauffage, forte de 35
d’euros pour une PME. On peut en trouver à partir de 500.000
personnes, dont 28 ouvriers. Un secteur fondamentalement
euros mais la tâche devient alors plus compliquée. On table
différent de ce que son parcours financier lui avait permis
généralement sur un apport de 30% de financement interne
de découvrir jusque-là. Notre interlocuteur voulait du chan-
et de 70% de soutien bancaire, sur cinq ans maximum. » Selon
gement, le voilà servi. Après les bureaux financiers cossus
Dominique de Tollenaere, généralement, les trois-quarts des
bruxellois et luxembourgeois, le voici sur les Hauts-Sarts, au
dossiers concernent des reprises de succession.
milieu du plus grand zoning industriel de Wallonie.
De par ses activités et son statut d’indépendant, Dominique
Mais Valéry Laloire évolue désormais dans un secteur d’activité
de Tollenaere s’intéresse à tous les secteurs et à tous les mar-
qui le met directement en rapport avec le terrain. « Je voulais
FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°35 - MARS 2010
vraiment reprendre une entreprise industrielle. J’avais par contre mal estimé l’ampleur de certains paramètres: le coût exorbitant de la main d’œuvre qualifiée en Belgique, certaines commissions paritaires contraignantes, une concurrence hostile venue de l’Est, des travailleurs fort pointilleux sur les horaires…» Deux ans plus tard, notre homme a l’impression d’être devenu un gardechasse, au lieu d’un entrepreneur. Il décide donc de partir à la recherche d’un nouveau défi et cède sa société. En l’espace de 24 mois, Valéry Laloire a néanmoins réussi à la remettre sur les bons rails. De déficitaire, l’activité est devenue bénéficiaire, avec un boni non négligeable pour l’exercice 2009. « Grâce à une meilleure gestion financière, j’ai redressé le business. Je me sépare donc d’une affaire qui présente de meilleurs chiffres qu’à mon arrivée. Mais sans regret parce qu’en tant que pur financier, je possède certaines lacunes techniques. Or, dans un tel secteur, les gains importants se réalisent aussi sur l’expertise technique. La plus-value que je peux apporter sera donc meilleure dans un métier davantage axé sur la gestion. » Après une intense recherche, notre homme a trouvé son nouveau bonheur à Bruxelles, avec la reprise d’une entreprise active dans les services immobiliers et financiers.
INSTIGATEUR DE CHANGEMENT Pour trouver une cible, Valéry Laloire conseille de privilégier le réseautage. « Pour ma première opération, je me suis ‘farci’ tous les salons possibles. Un créneau fort peu porteur comparé aux informations que peuvent vous fournir des acteurs comme
Valéry Laloire: « Les méthodes de valorisation sont aussi nombreuses qu’il existe d’entreprises. Et chacun prend un peu celle qui lui convient le mieux... Mais au final, on arrive toujours à un prix de convenance. »
la Sowaccess et Copilot. » Autre remarque tirée de son expérience, les tractations durent toujours plus longtemps que
l’ancien management. « Des problèmes peuvent néanmoins
prévu. « On pense que reprendre ou céder une entreprise est
se poser quand l’ex-patron veut garder le pouvoir ou que, par
simple. Mais ce n’est jamais le cas. Pour ma dernière reprise,
habitude, le personnel continue à aller le trouver pour régler
nous n’avons pas perdu de temps… et les opérations ont quand
certaines questions. Mais de manière générale, il faut essayer
même duré six mois. C’est un strict minimum. »
de pratiquer la transmission en douceur. » En outre, avant de
Au cours de ses recherches, Valéry Laloire s’est aussi rendu
céder, notre homme conseille d’éviter tout mouvement ou
compte que l’âge des cédants constituait un faux argument
opération qui pourrait paraître louche. « Des chiffres clairs
souvent avancé pour justifier une vente. « Généralement,
doivent montrer que tout roule, dans la continuité. Si néces-
les causes réelles sont des disputes entre associés ou au sein
saire, le bilan peut toujours se nettoyer en compagnie du can-
de clans familiaux. Mais on les avance rarement. Or, cela ne
didat acheteur. »
simplifie jamais les négociations surtout si, a priori, l’une ou
Valéry Laloire conseille également aux candidats entrepre-
l’autre partie ne souhaitait pas vendre. » Le management du
neurs de ne pas trop se bercer d’illusions. Le cédant ne doit
changement constitue, quant à lui, un autre obstacle qui ap-
pas tout espérer du repreneur. Et inversement. Quant au prix
paraît après la reprise. « Je ne compte plus le nombre de fois
de la valorisation, il conviendra avant tout au repreneur de
où j’ai entendu: ‘On a toujours fait comme ça’. Le patron doit
s’assurer que le cédant veut bel et bien vendre. « Ce dernier
donc être le premier à montrer l’exemple. Une organisation
attendra toujours bien davantage que ce que son affaire ne
est constituée d’une multitude d’habitudes qu’il faut parfois
vaut. Le premier acquéreur, qui arrive donc généralement avec
changer. Et, dans le chef de certains, ça peut coincer. Surtout
un prix psychologiquement trop bas, a très peu de chance
quand on touche à des privilèges hérités. Sentence ultime, le
de remporter l’affaire. Il faut donc espérer que les premières
licenciement... » Mais s’il se montre ferme, Valéry Laloire sait
négociations aient pu quelque peu ‘casser’ les prix et le moral
aussi faire preuve de générosité. « Par de petits gestes qui
du vendeur. » Un problème qu’il impute également aux mé-
améliorent le quotidien, un patron doit montrer qu’il n’est pas
thodes de valorisation, aussi nombreuses qu’il existe d’entre-
là pour vider la caisse mais bien pour investir dans l’activité et
prises. « Et chacun prend un peu celle qui lui convient le mieux.
dans ce qui fait la force d’un entreprise: l’humain ».
Mais au final, on arrive toujours à un prix de convenance parce
Aussi, pour tenter de faciliter la gestion du changement, Va-
que les parties sont fatiguées de discuter et le cap psycholo-
léry Laloire préfère privilégier une période de transition avec
gique de la cession déjà intégré ». FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°35 - MARS 2009
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DOSSIER FISCALITÉ TEXTE : LAURENT CORTVRINDT
Les candidats repreneurs sont partout! Pour trouver le repreneur le plus apte à adhérer à son plan de continuité, le cédant devra explorer toutes les pistes, sans a priori, et en s’en donnant le temps. D’autres options que celles imaginées initialement peuvent, en effet, se révéler tout aussi valables… et peut-être même davantage! Petite revue des différentes « sources » avec Guy Kahn, praticien en cession, transmission et reprise et coauteur de Transmettre ou acquérir son entreprise.
14
P
our trouver un repreneur, Guy Kahn distingue deux marchés: un premier, ouvert, et un second, caché. Le marché ouvert recouvre l’ensemble des annonces officielles, quels que soient les canaux
utilisés. Soit une bourse d’opportunités issues du tissu régional, fédéral, européen ou mondial. Le marché caché, de loin le plus important, est basé sur le relationnel et l’approche directe. L’expérience montre souvent qu’il offre les meilleures opportunités. Quatre grands types d’acquéreurs existent: le repreneur issu de la famille « au sens large » (enfants, beaux-enfants, cousins…); le salarié, actionnaire ou partenaire (directeur technique, financier, collaborateur expérimenté…); le particulier étranger à la société (contact de partenaires de l’entreprise, d’un relais…) et le repreneur stratégique (fournisseur, distributeur, client…). Le cercle familial reste la solution à laquelle beaucoup de patrons rêvent. « Mais elle ne réussira pas si le repreneur familial ne fait pas, à la fois, preuve de motivation, de technicité et de qualités de bon gestionnaire, observe Guy Kahn. Chercher par-
mi ses collaborateurs constitue, à mon avis, la solution idéale. L’activité resterait, de la sorte, entre les mains de quelqu’un qui en connaît bien les rouages et dont la réussite lui tiendrait à cœur. Une formule mixte s’avère néanmoins envisageable: la famille conserve la propriété mais l’entreprise est dirigée par un tiers. Toutefois, dans la pratique, peu de monde y pense. » Enfin, en recherchant dans son secteur d’activité, on peut trouver une personne qui souhaite une croissance externe. Avantage: celle-ci connaît bien le secteur et il lui sera plus facile d’obtenir des moyens financiers. De plus, la cession à un concurrent se révèle souvent assez intéressante pécuniairement. Ce dernier se révèle souvent prêt à surpayer l’entreprise pour éliminer un rival et atteindre ainsi plus rapidement ses FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°35 - MARS 2010
Guy Kahn: « Les banquiers savent qu’un ancien collaborateur possède probablement plus de chance de réussir qu’un repreneur. Ils se montrent donc d’autant plus à l’aise pour financer son projet de reprise. »
objectifs de développement. « Pour ce cas de figure, je conseille cependant de progresser avec la plus grande prudence et de se montrer attentif aux questions de confidentialité. »
QUEL PROFIL?
LES ENTREPRISES QUI SE VENDENT BIEN SONT DES ENTREPRISES QUI: - témoignent d’une capacité d’autofinancement
Désigner son successeur soulève bien des interrogations. Aussi, Guy Kahn propose trois rappels fondamentaux: choisir le plus compétent et le mieux armé pour diriger l’entreprise, dans ou hors de
prévisionnelle d’au moins 10% du chiffres d’affaires; - possèdent des fonds propres représentant 25% des ressources totales;
la famille, et qui fera preuve du plus grand charisme. « Ensuite le
- se trouvent plutôt en phase de croissance;
successeur devrait posséder trois qualités, explique-t-il. Des qualités
- sont indépendantes financièrement et logistiquement
de cœur et de relations humaines, des qualifications techniques et une connaissance approfondie en matière de gestion ainsi que des réflexes dans l’ensemble des fonctions de l’entreprise. Enfin, il démon-
(endettement et contrats souples); - avancent des avantages compétitifs (technique ou marketing) marqués.
trera également différentes aptitudes: une énergie constante pour innover, améliorer, concrétiser les bonnes occasions; une capacité d’encaisser les coups et de rebondir; un leadership qui générera la motivation des collaborateurs et des partenaires de l’entreprise. » Idéalement, le repreneur se montrera résistant au stress, disposera
LEURS AUTRES ATOUTS APPRÉCIÉS SONT:
d’une solide motivation et saura travailler en toute autonomie.
- l’existence d’une marque connue;
Pour dresser le profil de son successeur, Guy Kahn préconise de re-
- la détention de brevets-licences;
courir à une méthode vieille comme le monde: celle du papier et du
- un savoir-faire marqué et reconnu;
crayon. « Prenez une feuille de papier et, à gauche, écrivez toutes les
- un niveau de complexité du produit (permettant d’éviter
qualités et compétences que vous souhaitez retrouver chez le futur
l’arrivée trop rapide de nouveaux concurrents);
repreneur. A droite, couchez vos défauts et vos insuffisances qui vous
- une fidélité élevée de la clientèle;
ont empêché de faire mieux que ce que vous avez réalisé. Pour les
- des clients traités en direct (sans sous-traitants).
deux parties, soyez francs, et vous obtiendrez un premier profil. Ne rê-
Source: Guy Kahn, Transmettre ou acquérir son entreprise
vez quand même pas de trop. Le mouton à cinq pattes n’existe pas! » Mais, parfois, l’oiseau rare niche quand même dans l’entreprise. Guy Kahn, très poétiquement, aime l’appeler le « merle blanc ».
la transmission à un collaborateur sont appréciables: il connaît
« Il se peut que le cédant ne se soit pas rendu compte qu’il possé-
le cédant et le cédant le connaît, il possède une bonne maîtrise
dait, en interne, la personne toute désignée », dit-il. Une situation
des produits et services et continuera à les améliorer, il est fa-
plus fréquente qu’on ne pourrait le penser: très peu de cédants
miliarisé avec l’environnement de l’entreprise et il poursuivra
pensent spontanément à l’un de leurs collaborateurs pour
l’esprit de croissance insufflé jusque là. « En outre, les banquiers
prendre leur relève. Ou alors, s’ils y ont pensé, ils se sont dit que
savent qu’un ancien collaborateur possède probablement plus de
ce fameux merle blanc ne marquerait pas son accord ou ne dis-
chance de réussir qu’un repreneur. Ils se montrent donc d’autant
poserait pas des fonds nécessaires. Pourtant, les avantages de
plus à l’aise pour financer son projet de reprise. »
Plan de réflexion du repreneur Détermination des objectifs personnels et professionnels Détermination des ses forces et faiblesses
Un bon objectif doit être mesurable et assorti d’une échéance précise. Les forces et faiblesses peuvent être personnelles ou professionnelles: compétences spécifiques, expériences, techniques, matériel, réseau de relations…
Détermination des opportunités et menaces de
Les forces et menaces sont spécifiques à chaque secteur :
l’environnement
concurrence, évolution des besoins, obligations administratives…
Evaluation des évolutions sectorielles probables
Evolution du marché visé, de la concurrence, de la technologie, des réglementations régionales, fédérales et européennes.
Croisement des forces et des opportunités
Le succès naîtra du croisement de certaines opportunités que vous avez détectées avec certaines de vos forces. Un projet qui n’exploite pas une opportunité est voué à l’échec. Un projet dans lequel vous n’utiliserez pas vos forces aura peu de chances de réussir.
Source: Guy Kahn, Transmettre ou acquérir son entreprise FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°35 - MARS 2009
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