EN PRATIQUE SOMMAIRE
N°38 - JUIN 2010
Dossier Finance & IT
Le cloud computing est-il pour vous? Quelles sont les tendances en matière d’informatique financière et quels sont les points d’attention pour le CFO? Tour de table avec plusieurs experts et partage d’expériences chez Solvay, Höganäs, MACtac Europe et JCDecaux
FISCALITÉ: OPTIMISATION DES COÛTS DOSSIER TEXTE : LAURENT CORTVRINDT
Le CFO doit s’intéresser au cloud computing 16
Quelles sont les tendances et les points d’attention pour le CFO en matière d’informatique financière? Tour de table avec Jan Degraef et Yves Schellekens, Director et Business Development Director chez CSC, Michel Vervoort, General Manager d’ABSI, Kenneth Stevens et Steve Lambillotte, Head of Solutions & Presales et Solution Advisor Financials chez SAP, et John Myklebust, directeur du Data Center Services de Belgacom.
Où en sont les entreprises en matière d’informatisation de la
Jan Degraef: « Je ne dirais pas que la fonction finance a at-
fonction finance?
teint son niveau de développement informatique optimal.
Jan Degraef: « Globalement, si on la compare avec l’infor-
Pour certaines tâches, les systèmes informatiques ne sont
matisation des autres fonctions au sein de l’entreprise, la
pas encore à la hauteur des attentes du business: le contrôle
finance s’est fortement développée au cours des dernières
des risques, la communication et la gestion de la crise, les
années. Les processus et tâches à effectuer sont, désormais,
indicateurs financiers ou non financiers liés à l’opérationnel
assez standardisés. La comptabilité générale ou analytique,
nécessaires à l’anticipation de la performance de la société
la conciliation, le reporting, ont atteint des niveaux de matu-
afin de mieux gérer son cash, etc. En transactionnel et en
rité importants. Néanmoins, la crise a montré clairement que
comptabilité, par contre, l’informatisation de la fonction fi-
certaines limites subsistaient. Aujourd’hui, on parle beau-
nancière a presque atteint son but. »
coup de contrôle des risques, des informations pour évaluer
Steve Lambillotte: « Par le passé, l’informatisation de la fonc-
la performance d’une société. Le profit à court terme, seul, ne
tion couvrait essentiellement la finance pure et dure, c’est-à-
compte plus. Tous les bilans doivent être gérés au plus près
dire la comptabilité. Aujourd’hui, les CFO veulent aussi opti-
pour optimaliser la structure financière, sur le long terme. »
maliser les autres processus: la trésorerie, le recouvrement de
Kenneth Stevens: « Historiquement, la finance est la fonc-
créances, les clôtures, le reporting, etc. Avec comme finalité
tionnalité première de SAP, le cœur même de notre système
l’optimisation des tâches opérationnelles au profit d’analyses
ERP. Durant 30 ans, nous avons construit autour de la finance,
plus stratégiques. Cette volonté se traduit par une demande
de manière intégrée, car elle est impliquée à chaque étape de
d’outils intégrés dans leur ERP. A titre d’exemple, depuis un
la vie de l’entreprise. Mais au-delà des modules classiques, on
certain moment, la situation du recouvrement de créance est
remarque une évolution vers de nouvelles fonctionnalités. »
assez dramatique: faillites, impayés… La finance se doit d’op-
FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°38 - JUIN 2010
Yves Schellekens: « Le cloud computing est une évolution intéressante qui va nous permettre d’atteindre ce que l’on nous promet depuis longtemps: davantage de possibilités informatiques, de flexibilité, de souplesse… et des coûts réduits. »
timaliser ce secteur, notamment par son informatique, pour gagner en rapidité et en efficacité. Les CFO ne peuvent plus se permettre d’attendre que les contrôleurs de gestion passent deux à trois jours afin d’établir leur reporting. Ils doivent disposer des outils disponibles en ligne et qui permettent une analyse flexible des résultats de l’entreprise. »
« Les mots clés sont: compliance, transparence et stratégie. »
Quels sont les nouveaux développements en matière d’informatique financière ?
utile pour faire le lien entre l’opérationnel, dans l’usine, et
Jan Degraef: « La finance s’oriente vers les priorités de l’entre-
le financier, à la maison mère, devrait aussi prochainement
prise. Aujourd’hui, il s’agit du contrôle des risques, de l’antici-
évoluer. Enfin, le processus de planning & budgeting est un
pation des planifications, des exercices budgétaires et de la
autre aspect sur lequel toutes les entreprises commencent à
gestion du cash. Sur cette base, nous pouvons déduire trois
se pencher. L’exercice budgétaire se révèle toujours très lourd
priorités dans la mise en place des systèmes informatiques.
à supporter et sa fiabilité est relativement limitée. Nombre
En priorité absolue, il y a la qualité et la pertinence des infor-
d’organisations aimeraient entamer une réingénierie de leurs
mations des bases de données. Aujourd’hui, rien ne garanti
processus budgétaires et reporting, en utilisant l’IT pour les
que toutes les bases de données utilisées dans l’opération-
standardiser. »
nel ou dans les fonctions de support sont totalement fiables
Steve Lambillotte: « Au niveau des processus, les entreprises
pour gérer les opérations au quotidien. Deuxième priorité: le
sont fortement en demande d’intégration, d’automatisation
développement des outils d’aide à la diffusion. Actuellement,
et de consolidation, dans un but de minimiser les erreurs
on parle beaucoup de reporting historique. La troisième prio-
humaines et augmenter le support au niveau décisionnel
rité concerne, quant à elle, la refonte de l’organisation des
grâce à des analyses bien plus détaillées quant aux résul-
structures de données. La gestion des master data – données
tats de l’entreprise. SAP a compris ce besoin et améliore sans
fournisseur, clients, produits, centre de profits et de coûts,
cesse ses produits. Ils concernent la minimisation du temps
etc. – ainsi que leur harmonisation et standardisation sont
de clôture et l’analyse des chiffres en détail; une meilleure
cruciales pour la gestion des entreprises. Par ailleurs, ce qui
sécurisation du recouvrement de créances et la réduction du
concerne la ‘business intelligence’ et les outils de reporting,
risque d’avoir des provisions pour créances irrécouvrables; FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°38 - JUIN 2010
DOSSIER
une vue en ligne des situations de cash pour une meilleure planification de la liquidité de l’entreprise; l’intégration du facility management dans la comptabilité, le controling et la facturation; de nouvelles solutions de shared service center pour intégrer directement différentes filiales; l’augmentation de la rapidité et de la qualité de la consolidation; le reporting online, etc. Enfin, n’oublions pas une autre grande tendance: le paperless. L’image du bureau du comptable surchargé de papiers est révolue. Les entreprises s’équipent désormais de logiciels de facturation électronique, afin de minimiser les coûts et le temps de recouvrement de créances. L’informatique financière évolue vraiment beaucoup en ce moment. » Kenneth Stevens: « On pourrait avoir tendance à croire qu’avec les nouvelles versions de SAP, la fonction finance évolue peu. C’est tout le contraire. » Steve Lambillotte: « Les responsables financiers se doivent de suivre les innovations pour au moins deux raisons. Le business: ils doivent tout simplement optimaliser leur manière de travailler et les processus de l’entreprise afin de gagner en rendement et en sécurité. Et les aspects légaux: la législation change sans cesse et l’entreprise doit pouvoir s’y conformer. » Kenneth Stevens: « En résumé, les mots clés sont: complian-
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ce, transparence et stratégie. » Vers quoi évoluent les ERP ? Michel Vervoort: « Très clairement, pour une partie d’entre eux, vers un ‘ERP dans le cloud’, c’est-à-dire un ERP en mode Software as a Service (SaaS). Tous les éditeurs classiques de logiciels ERP en viennent à proposer leurs modules en ligne. Il y a désormais trois modes de déploiement de l’ERP en entreprise. Le premier, classique, consiste à l’implanter sur une
QUAND LES NUAGES SONT FLEXIBLES Michel Vervoort: « Pour l’utilisateur, le cloud computing, ce sont des ressources applicatives dans un réseau, dont la localisation importe peu, et qui offrent une élasticité des ressources informatiques matérielles (puissance de calcul et CPU) et applicatives mises à disposition. La flexibilité au sein du cloud est un élément essentiel. Si les machines saturent ou rencontrent une quelconque défaillance, l’application sera délocalisée dans le réseau, sur un autre site, de manière tout à fait transparente pour le client. L’entreprise ne devra donc plus prendre en charge la gestion de son parc informatique, de son obsolescence éventuelle, des licences applicatives et de son disaster recovery center, capable d’assurer un back up en cas de défaillance de la ressource interne. En tant qu’ensemble de ressources hardware et applicatives mises à disposition dans un réseau, le cloud computing prend la totalité de ces tâches en charge. »
FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°38 - JUIN 2010
« L’approche doit être très pragmatique, les parties prenantes doivent communiquer. » plate-forme IT au sein de l’entreprise. Pour le deuxième, l’ERP est installé sur la plate-forme d’un prestataire de services: on parle alors d’ERP outsourcé. Troisième niveau: l’ERP est entièrement en ligne, il tourne sur des machines qui n’appartiennent pas à l’entreprise et le prestataire de services facture selon le nombre d’utilisateurs. On peut aussi mentionner qu’à côté des éditeurs commerciaux, arrivent également dans le cloud des ERP libres d’utilisation. Un secteur certainement appelé à un fort développement. » Kenneth Stevens: « SAP a lancé un ERP complet dans le cloud, plutôt destiné, pour le moment, aux PME. En matière de cloud computing, SAP s’engage avant tout à garantir l’intégration entre tous les systèmes, qu’ils soient ‘devant’ ou ‘derrière’ le firewall, pour parler techniquement. Pour répondre à la question, je pense qu’il faut faire la distinction entre les PME et les grandes entreprises. Les premières souhaitent utiliser des applications de gestion à grande échelle sans mettre en place une infrastructure informatique de grande envergure. Ce type de solution, appelée SaaS, ne réclame aucune mise à niveau, maintenance, ni avance. Gestion, contrôle et maintenance sont assurés par des experts depuis des centres de données hébergés très performants partout dans le monde. Ainsi, les entreprises économisent du temps et de l’argent: SAP s’occupe de la mise en œuvre, de la prise en charge et de la maintenance du système pour permettre à ses clients de se consacrer pleinement à leur croissance. Les grandes entreprises, quant à elles, envisagent le cloud computing davantage au cas par cas. En effet, leur système informatique ayant généralement atteint un certain degré de maturité, elles engagent une réflexion pour déterminer quelles fonctionnalités pourraient compléter leur existant, de manière intégrée, tout en leur apportant davantage de flexibilité. » Les solutions cloud/SaaS sont-elles vriament dignes d’intérêt pour les CFO? Kenneth Stevens: « Aujourd’hui, les solutions disponibles sur le marché sont encore limitées pour la fonction finance. En réalité, la première vague du mouvement SaaS s’est essentiellement dirigée vers les ressources humaines ou le Cus-
Kenneth Stevens: « Le temps de déploiement, d’implémentation est devenu très favorable. Ce qui ne signifie pas pour autant que l’alignement entre le business et l’IT, ainsi que la gestion du changement doivent être négligés. »
tomer Relationship Management. Toutefois, technologiquement, la tendance se dessine. La convergence de nouvelles technologies ouvre des possibilités inédites. Mais dire que les solutions cloud/SaaS sont déjà des concurrents de l’ERP ‘onpremise’ reste, à notre avis, encore prématuré. » FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°38 - JUIN 2010
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DOSSIER
John Myklebust: « Du point de vue marketing, l’impact du
cipal est lié à la situation économique. Avec le cloud compu-
cloud computing est sans doute exagéré. Pour nous, il s’agit
ting, le CFO peut libérer une grande partie de son capex pour
d’une forme d’IT gérée par une ou plusieurs entreprises, pri-
envisager des investissements liés à son métier/business et
vées ou publique. En d’autres mots: soit l’entreprise régit son
développer son modèle opex. Nous sommes conscients que
propre cloud, soit elle fait appel à des fournisseurs de servi-
chaque entreprise possède sa propre stratégie capex-opex.
ces, comme Belgacom. On distingue trois grandes familles de
D’où notre offre de modèle cloud ‘hybride’, où les sociétés
cloud. IaaS (infratructure as a Service) est la grande tendance
peuvent bâtir leur propre solution en termes de private cloud.
actuelle. Il s’agit d’un accès vers une plate-forme qui fournit
Pour le CFO, cette flexibilité, cette possibilité de balancer
un service IT presque traditionnel mais dans une forme gérée
entre opex et capex n’existait pas il y a un ou deux ans. Et
et généralement partagée par plusieurs clients. PaaS (Plat-
n’oublions pas l’empreinte carbone plus favorable que celle
form as a Service) voit ses outils augmenter les fonctionnali-
d’un data center interne. »
tés de la plateforme IaaS. En résumé, on y ajoute une couche IT. Enfin, la plus populaire aujourd’hui est SaaS (Software as a
Les solutions Cloud/SaaS sont-elles des concurrents sérieux?
Service). Ce sont des outils distribués en grande échelle, com-
Yves Schellekens: « Si l’on considère le cloud computing dans
me le mail par exemple ou des fonctionnalités ERP fournies
l’ensemble de sa gamme, l’ERP est déjà, aujourd’hui, offert par
en cloud. A côté de cela, nous avons encore d’autres services
certains providers en tant que Software as a Service. Selon une
comme DaaS (Desktop as a Service) où nous fournissons le
étude récente de Gartner et du Financial Executives Research
desktop à partir du cloud. De manière traditionnelle on achè-
Foundation, dans près d’une entreprise sur deux, le CIO rap-
te un pc, on installe un système d’opération et on travaille
porte au CFO. Et plus de la moitié des CFO désirent contrôler
grâce aux données hébergées sur le cloud. L’avantage prin-
l’organisation informatique. Rien que sur base de ces chiffres, on peut déjà dire qu’un CFO doit s’intéresser au cloud computing, un phénomène aujourd’hui incontournable en informati-
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QUELS PIÈGES ÉVITER LORS D’UNE IMPLÉMENTATION?
que. Il devrait s’y intéresser pour deux raisons: par rapport aux systèmes qu’il utilise lui-même, comme l’ERP, ou, tout simplement, parce qu’il a la responsabilité finale de l’organisation informatique. Le CFO joue le rôle de moteur pour faire avancer
John Myklebust: « A côté des questions sur les fonction-
l’informatique. Je crois que le cloud computing est une évolu-
nalités ou le TCO, nous conseillons systématiquement
tion intéressante qui va nous permettre d’atteindre ce que l’on
à nos clients de considérer une stratégie de sortie de
nous promet depuis longtemps: davantage de possibilités in-
contrat. Un utilisateur doit toujours avoir la possibilité
formatiques, de flexibilité, de souplesse… et des coûts réduits.
de basculer d’un fournisseur à l’autre. Ce conseil peut
Gartner prévoit que, d’ici cinq ans, les deux tiers des business
sembler peu commercial. Mais le message de Belgacom
aujourd’hui outsourcés ou managés dans des data centres tra-
est fort. Car il s’agit d’un vrai piège pour les entreprises si
ditionnels vont passer dans un cloud privé, public ou commu-
ce détail n’est pas pris en compte. Parfois, sans le savoir,
nautaire. Souvenons-nous de l’arrivée de l’e-business. Un hype
un client signe un contrat sans clause de sortie… »
rapidement devenu un must. Et aujourd’hui, plus personne
Jan Degraef: « Je conseillerais de se montrer à l’écoute
n’oserait contester sa légitimité. »
du business, tout au long du projet. Les besoins du business évoluent dans le temps. Aussi, il faut l’impliquer
En quoi les nouveaux développements à l’œuvre sont-ils à
à chaque étape de développement. Il ne s’agit pas uni-
même d’aider le CFO dans ses missions?
quement d’un simple partenariat opérationnel IT-busi-
Kenneth Stevens: « Le temps de déploiement, d’implémen-
ness. Les besoins spécifiques doivent être alloués selon
tation est devenu très favorable. Ce qui ne signifie pas pour
les budgets disponibles. Car souvent, les entreprises ont
autant que l’alignement entre le business et l’IT, ainsi que la
tendance à surestimer leurs besoins. Et après quelques
gestion du changement doivent être négligés. Mais l’impact
mois, on se rend compte qu’en réalité, à peine 20% des
sur les coûts est intéressant. Soulignons quand même que,
fonctionnalités sont réellement utilisées par les opéra-
pour le moment, le SaaS ne permet pas encore la même flexi-
teurs. L’approche doit être très pragmatique, les parties
bilité d’adaptation que les solutions ‘on-premise’ où la custo-
prenantes doivent communiquer. Ces points clé revien-
misation est toujours possible selon les besoins très spécifi-
nent toujours, dans chaque implémentation. » Yves Schellekens: « Mon message serait de toujours penser à investir dans une informatique correctement structurée. Ensuite, que le cloud computing vous intéresse ou non, vous travaillerez de toute façon avec professionnalisme et efficacité. »
FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°38 - JUIN 2010
« Le CFO joue le rôle de moteur pour faire avancer l’informatique. »
ques du client. En fait, le CFO peut mettre dans la balance deux approches ‘licences’ différentes. Pour l’ERP ‘on-premise’, il s’agit bien souvent d’une licence d’acquisition, accompagnée d’une maintenance annuelle. Et pour les solutions ‘on-demand’, on paye généralement une facture mensuelle calculée pour un certain nombre d’utilisateurs et de fonctionnalités. » Quels sont les avantages du cloud computing/SaaS? Michel Vervoort: « Différents éléments peuvent séduire un CFO, surtout dans une période où la mobilisation des ressources financières est difficile et où l’on préconise la mobilité. Le cloud computing/SaaS n’immobilise par le capital de l’entreprise puisque son utilisation est régie par un coût mensuel par utilisateur. Le cloud computing rend l’application accessible où que l’on soit, sur tout type de terminal, pour autant qu’il ait accès, via un identifiant, à une connexion Web. De plus, le TCO sur une période raisonnable de 3 à 5 ans s’avère être entre 30% à 60% inférieur au coût d’une utilisation in house. Outre les avantages financiers, je soulignerais encore la rapidité de développement des solutions de type SaaS. En effet, les applications SaaS. Elles sont généralement développées de manière modulaire, générique et utilisables en format standard à 70%-80% des besoins normaux. La mise à façon de l’application (la customisation) nécessaire pour ‘tailler’ le produit aux besoins spécifiques d’un client fait l’objet de la prestation d’un intégrateur, à l’instar d’ABSI. Par rapport aux ERP traditionnels, les développements sont beaucoup plus rapides et donc bien moins chers. Quand on parle de 4 à 6 mois pour mettre en place un module dans un environnement ERP, on parle de 6 à 8 semaines pour les solutions SaaS. Enfin, puisque l’application customisée va tourner sur un environnement commun, opéré par le prestataire de service, l’entreprise ne doit acquérir aucune infrastructure serveurs, de stockage, ni allouer des ressources humaines complémentaires pour la maintenance de ladite application SaaS. » Et quels en seraient les faiblesses? Michel Vervoort: « Les inconvénients de cette solution sont essentiellement du domaine du psychologique. Les en-
Steve Lambillotte: « Les CFO se doivent de suivre les innovations pour deux raisons. Le business: ils doivent optimaliser leur manière de travailler et les processus afin de gagner en rendement et en sécurité. Et les aspects légaux: la législation change sans cesse. »
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DOSSIER
« Par rapport aux ERP traditionnels, les développements sont beaucoup plus rapides et donc bien moins chers. » treprises hésitent encore parfois à franchir le pas sachant qu’elles n’auront plus ‘in house’ une partie des ressources qui font tourner leur activité. La sécurité et la confidentialité sont parfois également citées. Pourtant, ces systèmes en ligne sont sans doute les mieux protégés au monde. En tout cas, certainement bien davantage que ceux de quelconque entreprise. Vous imaginez aisément qu’une faille dans la sécurité des systèmes des acteurs du marché leur ferait perdre crédibilité, réputation, et… clients. Non, ces plateformes sont vraiment ultra protégées. Il est peu contestable que les quelques inconvénients, perçus par certains, sont largement contrebalancés par les avantages. » John Myklebust: « Les Belges sont plutôt traditionnels en IT. Ils veulent voir les machines où leur IT tourne ou, à tout le moins, savoir où elles se situent. Nos clients s’interrogent également sur la fiabilité: quel back-up des données, quelles garanties d’accès, qui est mon partenaire? En fait, le métier de manager IT glisse doucement de gestionnaire de l’infrastructure IT à celui de gestionnaire des relations avec les fournisseurs. Parallèlement, le cloud computing vous rend fortement dépendant d’un fournisseur. Est-ce que l’entreprise est confortable face à une cette stratégie? On peut faire un parallèle avec les fournisseurs d’électricité. Il y a quelques années, le consommateur était lié à un fournisseur unique. Aujourd’hui, il ne se pose plus de questions et change quand il veut! Comme pour le cloud computing, c’est une évolution émotionnelle et géné-
John Myklebust: « C’est une évolution générationnelle. La nouvelle génération vit avec le partage de l’information. D’ici quelques années, cette génération va gérer nos infrastructures IT. Partager des données ou les héberger sur un cloud leur semblera tout naturel. »
rationnelle. En effet, la nouvelle génération vit avec le partage de l’information, comme par exemple sur les réseaux sociaux. Or, d’ici quelques années, cette même génération va gérer nos infrastructures IT. Partager des données ou les héberger sur un cloud leur semblera tout naturel. Bien entendu, au sein de
QUELS SONT LES DÉFIS À RELEVER DANS LE CADRE DES IMPLÉMENTATIONS? Kenneth Stevens: « Que l’on parle d’implémenter un ERP tradi-
financière interne et externe, la communication entre les
tionnel ou une solution SaaS, excepté pour la partie purement
dirigeants de l’entreprise et l’opérationnel, la formation
technique qui varie selon le degré de complexité des installa-
des key users et, enfin, pouvoir compter sur l’expérience
tions, l’aspect essentiel ne change pas: quand on repense ses
d’utilisateurs internes ou de consultants pour soutenir
processus, il faut toujours veiller à gérer le changement. »
l’implémentation. »
Steve Lambillotte: « Quatre autres points me semblent
Kenneth Stevens: « Chaque implémentation reste, finale-
également incontournables: assurer la communication
ment, une affaire de personnes et non de machines. »
FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°38 - JUIN 2010
chaque entreprise, le pas vers le cloud computing dépend de la maturité IT et des ressources humaines qui la gèrent. Les réalités sont différentes selon les secteurs. Les banques, plus orientées finances, n’ont pas de soucis au niveau des ressources IT. Elles ne basculeront donc pas forcément en masse vers le cloud computing. Dans l’industrie, par contre, la demande se révèle actuellement beaucoup plus importante. » Le cloud computing est-il déjà mature pour les entreprises? Michel Vervoort: « Dans les domaines d’utilisation qui sont les leurs aujourd’hui, ont peut franchement dire que la maturité est au rendez-vous. Pour preuve, on entend très peu d’échos – et pourtant, tout le monde est un peu ‘à l’affut’ de ce genre d’info – annonçant des interruptions de service ou des pannes majeures liés à la conception ou au dimensionnement des solutions cloud computing. Les acteurs sont bien conscients qu’ils doivent proposer des systèmes hautement disponibles, fiables et parfaitement sécurisés. Ils ont donc mis en place les mesures adéquates leur permettant d’atteindre ces objectifs. Bien entendu, nul n’est à l’abri d’une interruption temporaire de services. Mais si l’on considère cette éventuelle interruption et qu’on la rapporte à la disponibilité des solutions in house, le bulletin du cloud computing se révèle très favorable. Autre élément positif: la disponibilité du réseau Web. Le cloud computing et ses applications sont accessibles par Internet. Et aujourd’hui, le réseau Internet est devenu extrêmement disponible et fiable. Les soucis de capacité à suivre la demande que l’on pouvait encore rencontrer il y a quelques années sont désormais oubliés. Au vu du nombre et de la notoriété des sociétés faisant appel aujourd’hui au SaaS, notamment aux modules CRM de salesforce.com, le prestataire incontestablement leader sur le marché du SaaS, il faut conclure que cette offre de service rencontre les attentes des entreprises, soucieuses de se (re)centrer sur leur core business, le CRM ou autres modules ERP étant des ingrédients de leur activité et non pas une finalité! » Yves Schellekens: « Oui, il est mature dans certains domaines, pour certaines applications. Car j’estime qu’il faut encore progresser en matière de protection des données. Par exemple, certains pays refusent de voir les données quitter leurs frontières. Il faut dans ce cas trouver un fournisseur qui propose un data centre dans le pays en question et qui garantit que
Jan Degraef: « Souvent, les entreprises ont tendance à surestimer leurs besoins. Et après quelques mois, on se rend compte qu’en réalité, à peine 20% des fonctionnalités sont réellement utilisées par les opérateurs. L’approche doit être très pragmatique. »
les données n’en sortiront pas. Pour les entreprises intéressées, CSC Belgique propose un service d’évaluation des projets de
tés avant de s’engager. Après une évaluation de 3 à 6 semaines,
cloud computing afin d’identifier les risques et les opportuni-
les entreprises se voient remettre un schéma directeur détaillé pour la mise en œuvre d’un projet de cloud computing ciblant les bons processus et garantissant les bénéfices les plus avantageux d’une telle initiative. Ce service d’évaluation permet de
« Le pas vers le cloud computing dépend de la maturité IT et des ressources humaines qui la gèrent. »
comprendre la complexité de l’écosystème du cloud computing. Il propose une analyse axée sur les processus et les paramètres technologiques existants en se fondant sur un outil d’évaluation de l’adaptabilité des systèmes Suitability Scorecard. De quoi prendre les bonnes décisions pour réussir avec succès le transfert d’activités ‘sur le nuage’. » FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°38 - JUIN 2010
FISCALITÉ: OPTIMISATION DES COÛTS DOSSIER TEXTE : LAURENT CORTVRINDT
Le cloud computing est tout sauf un hype 24
Le cloud computing est sans conteste la grande tendance IT du moment. Et les spécialistes semblent s’accorder pour nous prédire une véritable tornade au cours des prochains mois. Eclairage avec Peter Van Roy, professeur ordinaire à l’ICTEAM Institute de l’UCL et spécialiste du cloud computing.
Qu’est-ce que le cloud computing?
les applications qui nécessitent de très larges ressources sur de
Peter Van Roy: « Le cloud computing est une forme de client/ser-
courtes périodes sont amenées à connaître un déploiement
veur avec des propriétés nouvelles qui sont une conséquence de
impressionnant grâce aux clouds. Exemple: la traduction en
sa grande échelle. Le cloud computing utilise la mémoire et la ca-
temps réel du langage parlé. Lors d’une conférence téléphoni-
pacité de calcul d’un très grand nombre d’ordinateurs rassemblés
que ou vidéo, je parle français avec un interlocuteur chinois. Cet
en de grandes installations – qui s’appellent des ‘data centres’
interlocuteur m’entend en chinois et je l’entends en français.
– et reliés entre eux à travers des réseaux performants. Les utili-
Pour ce type d’application, tous les éléments techniques exis-
sateurs du nuage (cloud) peuvent ainsi disposer d’une puissance
tent à cette heure. Par exemple, l’institut IRCAM à Paris, qui est
informatique considérable et modulable à un prix modique. Par
un centre d’expertise mondialement reconnu en traitement nu-
exemple, beaucoup d’applications Web s’exécutent sur un cloud
mérique du son, en a déjà réalisé la plupart. Mais ces éléments
au lieu d’être installées sur des postes clients ».
nécessitent d’énormes ressources en calcul et en mémoire. C’est notamment le cas des traductions de Google qui utilisent un
Quelles en sont les applications?
gigantesque corpus de traduction. Grâce au cloud, on peut uti-
Peter Van Roy: « Actuellement, je distingue deux grands noyaux
liser ces ressources pendant un court laps de temps. Le cloud
d’application pour les clouds: les entreprises et les applications
computing est tout sauf un hype. C’est une révolution. »
sur de petits appareils, comme les téléphones mobiles qui, disposant de peu de ressources propres, ont besoin d’un lien vers
D’où vient l’idée?
un cloud pour stocker les données clients. Néanmoins, je vois
Peter Van Roy: « Encore peu connu du grand public parce qu’il
un troisième noyau – énorme – se développer très prochaine-
est actuellement essentiellement utilisé dans les départements
ment. Et celui-ci va influencer tous les utilisateurs d’Internet. En
IT des entreprises pour de l’outsourcing, le cloud computing se
effet, le cloud possède une propriété jusqu’ici fort peu utilisée
développe sensiblement depuis 2006. Pourtant, l’idée n’est pas
par les clients serveurs: l’élasticité. C’est-à-dire que, ponctuelle-
neuve. Loin de là. Elle remonte aux années 60, lorsque le com-
ment, le cloud peut fournir une énorme ressource si l’utilisateur
puting utilitaire est né. Mais à cette époque, elle ne s’est pas
en a besoin. Avec comme avantage considérable qu’on paiera
réalisée. Il faudra attendre une initiative d’Amazon, l’entreprise
pour cette ressource uniquement durant son utilisation. Aussi,
d’e-commerce, qui, en plein développement, connaît un impor-
FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°38 - JUIN 2010
tant besoin de ressources – un ‘pic’ – à Noël. Or, pendant le reste de l’année ces ressources ne sont pas utilisées. Amazon a alors l’idée de vendre ces ressources à l’externe. C’est de début du cloud. Ensuite, certaines entreprises s’aperçoivent qu’acheter ces ressources leur coûte moins d’argent que si elles s’en dotaient à l’interne. Depuis, le cloud computing a, notamment, beaucoup servi aux réseaux sociaux comme Facebook ou Twitter. » Quels avantages? Peter Van Roy: « Les infrastructures et logiciels mutualisés, vendus sous forme de services, évitent de lourds investissements au départ de nouveaux projets. De plus, la mutualisation permet une baisse du coût total. En effet, les fournisseurs de nuages construisent de grands data centre, avec des machines bon marché. Aussi, leur économie d’échelle est énorme. Pour l’utilisateur, on parle d’un prix cinq fois moins élevé que s’il devait gérer en interne des ressources de calcul et de stockage. Les entreprises n’ont plus besoin de serveurs propres. En outre, l’environnement élastique du cloud garantit une puissance de calcul et de stockage à la demande. Immédiatement. Enfin, avec le cloud computing, on paie uniquement pour ce que l’on utilise. On peut com-
Peter Van Roy: « Il faut voir le cloud comme une solution parmi d’autres, souvent la meilleure… mais pas forcément adaptée à votre réalité, par exemple si vos besoins sont fixes. Car dans un cloud, l’application est virtualisée et on paye un coût à la performance. »
parer le procédé avec la consommation d’électricité à la maison ou au bureau. Le cloud computing se paye d’ailleurs via une fac-
le potentiel de fiabilité, il faut encore gagner la confiance des
ture mensuelle, par anticipation ou après consommation. »
entreprises. Bien entendu, les fournisseurs d’accès garantissent un suivi. Payant, naturellement… Mais le point le plus délicat
Quels en sont les limites, selon vous?
concerne sans doute la géo-localisation, relativement floue des
Peter Van Roy: « Il faut voir le cloud comme une solution parmi
données. Problématique corollaire : comment savoir où se trou-
d’autres, souvent la meilleure… mais pas forcément adaptée à
ve, avec précision, la frontière juridique. C’est très important en
votre réalité, par exemple si vos besoins sont fixes. Car dans un
cas de litige. Dans quel pays se trouve le data centre? Dans un
cloud, l’application est virtualisée et on paye un coût à la per-
hébergement mondialisé, sans délimitations précises, les don-
formance. En 2009, la perte de données de clients de T-Mobile
nées peuvent tomber sous la juridiction du pays hébergeant les
a fait grand bruit. Je pense qu’actuellement les questions tech-
données. Ce problème est loin d’être résolu; des jurisprudences
niques sont résolues concernant la sécurité des clouds. Mais sur
continuent à s’écrire. Dans un avenir très proche, les fournisseurs de clouds devront apporter une réponse précise et des garanties fiables quant à la localisation des données. »
HAUSSE EN EUROPE…
Qui doit s’intéresser à ce type de solutions? Peter Van Roy: « Le système convient à tout type d’activité. Pas
Dans une récente étude réalisée pour la Commission
besoin, non plus, de taille critique puisqu’on paye uniquement
Européenne, le cabinet Pierre Audoin Consultants sou-
pour les services utilisés. On peut déjà utiliser du cloud compu-
ligne la forte croissance des offres IaaS, PaaS et SaaS (In-
ting pour une poignée d’euros. D’ici un an ou deux, je m’attends
frastructure, Platform et Software as a Service). Aussi,
à ce que le cloud computing ait touché le grand public. Je pense
les offres de type « cloud computing » devraient forte-
que les gammes d’applications disponibles sur les clouds vont
ment croître dans les années à venir. En 2009, malgré
considérablement se développer et, peu à peu, elles devraient
la crise, le marché a ainsi atteint 4 milliards en Europe,
remplacer celles des ordinateurs personnels. Google a déjà lancé
avec une croissance de 20% et une part de 1,5% dans
la tendance avec ses Google Apps, Earth, Translate, etc. »
le marché des logiciels et services. D’ici 2015, cette part devrait passer à 13%. La croissance du cloud computing
Quel intérêt pour le CFO?
semble donc notamment bien dopée par la crise. Tou-
Peter Van Roy: « Selon la complexité d’un calcul à effectuer, un
jours selon PAC, avec le cloud computing, une partie de
besoin de modélisation ou de projection, selon la durée d’uti-
l’informatique devrait progressivement se transformer
lisation, le cloud computing permettra de petites économies
en une industrie « lourde », basée sur des centres de pro-
jusqu’à des gains considérables. Dans une entreprise, il peut
duction fortement automatisés.
concrètement participer à la réduction des coûts de l’infrastructure informatique. » FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°38 - JUIN 2010
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FISCALITÉ: OPTIMISATION DES COÛTS DOSSIER TEXTE : LAURENT CORTVRINDT
Comparer les offres n’est pas une mince affaire 26
En ce début d’année 2010, Solvay a procédé à un tour de marché cloud computing afin d’étudier la compatibilité et l’adaptabilité de cette nouvelle technologie aux besoins de l’entreprise. Pierre Godelaine, IT Enterprise Architect, en tire un premier bilan.
C
e tour de marché, Solvay l’a mené auprès d’un en-
nos clients, et parfois ces demandent génèrent des investisse-
semble de fournisseurs informatiques proposant
ments supplémentaires».
un environnement cloud computing dans leur catalogue. Au sein des entreprises, l’informatique
OUTIL FLEXIBLE
veille en permanence à augmenter sa productivité et à réduire
Solvay a souhaité chercher un partenaire pour pouvoir
ses coûts. Aussi, pour Pierre Godelaine, les environnements de
mieux répondre à ces demandes. Comme, par exemple,
type cloud computing ne peuvent plus être ignorés. « Le temps
réaliser un test qui nécessite d’installer des machines dont
était venu pour Solvay de se familiariser avec le cloud computing,
la période d’utilisation sera plus courte que celle de l’amor-
nous explique-t-il. On ne passe pas, du jour au lendemain, d’un
tissement. « Il s’agit en fait d’une sorte d’extension de notre
environnement de serveurs dédiés à un environnement cloud. Car
offre interne. Nous voulons pouvoir choisir entre répondre à
il faut désormais respecter de nouvelles contraintes: on ne fait
une demande d’un client, soit par le biais de notre infrastruc-
plus ce que l’on veut avec les serveurs, l’environnement cloud très automatisé exige de rentrer dans un certain moule, etc. Aussi, il faut faire preuve de volonté pour mener à bien cet apprentissage informatique. Mais je pense qu’à terme, on se dirige vers un gain
IMPACT SUR LE RÉSEAU
en flexibilité et en coût… bienvenu pour le CFO. » La demande de Solvay concerne la partie IaaS (Infrastructure as
En interne, Solvay consolide depuis quelques temps ses
a Service) du cloud computing. En d’autres termes, se montrer
activités informatiques dans des data centres. Que ceux-
capable de placer de l’infrastructure dans un environnement
ci se trouvent dans ses murs ou chez un partenaire, la
cloud computing. Pourquoi? « Parce que nous avons souvent
connectique reste donc identique. L’impact d’un passage
besoin d’infrastructures pour faire tourner des applications. Ac-
en cloud computing est, dès lors, marginal pour le réseau.
tuellement, nous travaillons essentiellement avec des serveurs
Par contre, si l’informatique d’une entreprise est entière-
dédiés, soit gérés en interne dans notre propre data centre, soit
ment distribuée et que l’on décide ensuite de la centraliser
gérés par des partenaires. Mais nous ne bénéficions pas toujours
dans un data centre, l’impact réseau sera plus important.
de toute la flexibilité voulue pour répondre aux demandes de FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°38 - JUIN 2010
reçu un ensemble de réponses. Constat principal: les offres ne se ressemblent pas vraiment… Nous avons alors sélectionné un partenaire répondant à nos principaux besoins et nous permettant de démarrer à petite échelle... avant de poursuivre l’expérience si les premiers résultats se révèlent concluants. » Au rayon des différences, Pierre Godelaine souligne, par exemple, que tous les fournisseurs n’offraient pas la possibilité de bénéficier simultanément de serveurs virtuels et de serveurs physiques; dans le package de base, gérer une base de données était parfois impossible; l’état d’avancement/développement du portail cloud computing sur lequel se connecter n’était pas du tout le même… « Aussi, pour comparer, il faut vraiment se focaliser sur les besoins recherchés. Je suis cependant convaincu que pour la même demande, dans quelques mois, les offres auront évolué. » Parmi les points positifs, Pierre Godelaine retient la flexibilité mais
Pierre Godelaine: « Si nous ne sommes pas encore disposés à faire totalement basculer notre informatique dans les nuages, l’intérêt est réel. Pour comparer, il faut se focaliser sur les besoins recherchés. Pour la même demande, dans quelques mois, les offres auront évolué. »
aussi des coûts d’opérations intéressants. Certes, notre interlocuteur ne se dit pas encore convaincu que le cloud computing permette d’importantes économies. « Quand une entreprise possède déjà un data center optimisé, je pense que le gain se révèle plus faible. Par contre, il sera certainement bien plus substantiel pour une petite société qui ne possède qu’un petit nombre de serveurs. Mais le cloud computing ne peut certainement pas être plus onéreux. En résumé, si
ture dédiée actuelle, soit via l’infrastructure cloud computing,
nous ne sommes pas encore disposés à faire totalement basculer no-
partagée, d’un partenaire. »
tre informatique dans les nuages, l’intérêt est bien réel. Nous pourrons
Sachant, premièrement, que dans un environnement cloud com-
être plus flexibles pour démarrer un projet et moduler les ressources
puting, une demande hardware peut être rencontrée endéans les
en adéquation avec les besoins de nos clients; nous bénéficierons en
24h. De quoi gagner un temps précieux pour le démarrage d’un
permanence de serveurs disponibles pour des tests, sans devoir nous
projet. Et deuxièmement, rajouter du CPU, de la mémoire, peut se
préoccuper de l’investissement en matériel et de son amortissement…
faire à n’importe quel moment. La « surconfiguration » d’une ma-
et l’avenir nous en dira certainement davantage! »
chine pour qu’elle puisse encore rendre service quelques années plus tard n’est donc absolument plus nécessaire. « C’est pourquoi nous voyons actuellement le cloud computing comme un outil très flexible qui complète notre offre, afin de réagir plus vite. »
CLOUDS OVER CALIFORNIA
Toutefois, pour Pierre Godelaine, le cloud computing ne peut encore répondre à tous les besoins. « Les fournisseurs de services ont
En 2009, la ville de Los Angeles a décidé de transférer le
beau vous garantir la plus grande sécurité, le travail s’exécute quand
service d’e-mail de ses 30.000 employés, hébergé chez
même sur des environnements partagés. Et, pour le moment, tous
Novell GroupWise, vers des serveurs cloud de Google.
n’offrent pas, de manière intégrée, un cryptage des données sensibles
D’une durée de cinq ans, le contrat de 7,5 millions de
sur le cloud. Aussi, du moins dans un premier temps, nous conserve-
dollars table sur des services de courrier électronique
rons certaines données sensibles dans un environnement dédié. Autre
pour les employés de la ville à un coût moyen de 50$
point à vérifier: comment ‘sortir’ les applications et données en fin de
par employé par an. Pour répondre aux questions sur
contrat. Ou, quand on vend une activité et qu’il faut la transmettre à
la sécurité et la fiabilité, Google a promis de stocker
son acheteur, comment récupérer l’environnement mis dans le cloud?
les données de la ville sur ses plates-formes sécurisées
Actuellement, les réponses ne sont pas encore très standardisées. »
« Gov Cloud », maintenues dans la zone continentale
EVOLUTION INTERNE
des États-Unis et exploités par des personnes disposant des plus hautes habilitations du FBI. Google a égale-
Pour son tour de marché, Solvay a posé un ensemble de ques-
ment accepté de fournir des crédits financiers à la ville
tions aux fournisseurs potentiels, selon ses besoins: est-ce que
si les services venaient à anormalement baisser en qua-
l’environnement cloud supporte des bases de données? Quels
lité par rapport à ce qui est convenu dans le contrat.
sont les niveaux de service? Etc. « Nous avons également de-
Une analyse effectuée par l’administration de la ville a
mandé à ces fournisseurs de nous décrire comment leur environ-
constaté que les coûts d’exploitation du système Google
nement pourrait satisfaire des configurations utilisées en interne
seraient inférieurs de 23,6% à ceux de Novell GroupWise
par Solvay. Si ces applications venaient à être mises dans un cloud,
au cours de la même période.
comment les organiser, à quel prix, etc. Sur cette base, nous avons FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°38 - JUIN 2010
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DOSSIER FISCALITÉ TEXTE : LAURENT CORTVRINDT
Quand la finance pilote l’IT 28 Marco Tessaro: « Préparer les collaborateurs est essentiel. L’implémentation de l’ERP, jusque-là vue comme un projet embêtant, consommateur de temps et aux faibles implications, s’est ainsi transformée en sujet essentiel. »
G
Il arrive que le CFO ait la responsabilité finale sur l’IT. Est-ce un avantage et quelles sont les tendances que décodent ces directeurs financiers qui « cumulent »? Rencontre avec Thierry Sabaux, Vice-President Finance & IT chez MACtac Europe, Jérôme Blanchevoye, directeur financier et informatique de JCDecaux Belgium, et Marco Tessaro, Vice-President Finance & IT de Höganäs.
roupe industriel suédois, Höganäs est le leader
industriels. « Le Graal ultime en termes de disponibilité de
mondial de la production de poudre métallique,
l’information, serait de bénéficier d’un tableau de bord en li-
dont les applications sont nombreuses: pour le
gne permettant, sur un seul écran, de surveiller le carnet de
revêtement de surfaces afin d’en augmenter les
commandes, la production, le carnet d’achat et toutes sortes
propriétés de résistance à la déformation ou à l’usure, pour des
de paramètres spécifiques aux processus industriels. L’IT doit
filtres destinés à l’industrie textile, pour des applications de frit-
être au service du CFO. »
tage, etc. Créée en 1797, Höganäs n’est ni plus ni moins que la deuxième plus vieille entreprise de Suède. A travers le monde, le
ERP ET MRP
groupe compte aujourd’hui 1500 collaborateurs, pour un chif-
Ceci, c’est pour la théorie. Dans la pratique, cela nécessite un
fre d’affaires de 600 millions d’euros. Au cours des 30 dernières
ERP et même un MRP (Materials Requirements Planning) pour
années, le groupe s’est internationalisé en ouvrant des sites de
planifier les flux et stocks de matières. Plus largement, pour les
production et en décentralisant la gestion de la production et de
managers, Marco Tessaro nous rappelle que l’IT apporte uni-
la commercialisation de ses produits. Höganäs est ainsi passé
quement ce qu’on lui demande. « Aussi, nous avons besoin que
du statut de grande multinationale suédoise à celui de petite
les utilisateurs définissent leurs besoins. Nous pourrons alors
multinationale internationale.
veiller à leur fournir un outil informatique capable de les aider.
En Belgique, Höganäs compte une unité de production qui
Malheureusement, au quotidien, on travaille le nez dans le gui-
héberge également le siège de la division des poudres hau-
don et on s’habitue à une palette limitée d’informations. Il faut
tement alliées. Cette antenne belge réalise 16% du chiffre
remettre ces processus en question, identifier les problèmes et
d’affaires du groupe. Pour Marco Tessaro, VP Finance & IT,
les soumettre en interne. Nous essayons de pousser chaque utili-
un CFO a besoin de qualité et de timing en matière de re-
sateur, dans son domaine, à mieux définir ce dont il a besoin. »
porting. Idéalement en ligne et avec un scope le plus large
Et c’est exactement ce qu’Höganäs vient d’effectuer. L’implé-
possible, du point de vue business mais aussi des processus
mentation de son ERP datant de 1995, le groupe a décidé de se
FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°38 - JUIN 2010
lancer dans une importante mise à jour. Un travail considérable que l’on pourrait comparer, techniquement et culturellement, à un bond qui va transporter l’IT de l’entreprise de l’âge de la pierre aux temps modernes. Jusqu’ici, en Belgique, l’ERP prenait uniquement en compte la comptabilité et la logistique. Les autres tâches, comme la gestion de la production et du stock, étant assurées par des modules indépendants, « greffés » à l’ERP. « Toute l’application va être remplacée par un ERP moderne, Movex, qui vise les entreprises industrielles de taille moyenne comme la nôtre ». Objectif de la manœuvre: répondre aux
« Nous militons de temps en temps en interne pour qu’un projet plus mutualisé soit développé afin de rencontrer nos besoins. »
besoins énormes qui se font de plus en plus ressentir depuis l’ouverture de l’entreprise à l’international. « Nous allons quit-
mes. « Un passage vivement conseillé, utile à tous les utilisa-
ter nos modules stand alone et fichiers Excel pour passer à un
teurs pour définir les besoins qu’ils pensent connaître intui-
ERP complètement intégré, qui comprend également un MRP
tivement dans leur quotidien, pour structurer leur façon de
pour contrôler au plus près les transactions de comptabilité
travailler et en identifier les faiblesses. Il conviendra d’évaluer
interne. Par exemple, la fabrication d’un lot en production gé-
l’outil informatique envisagé par rapport à ces résultats. C’est
nérera automatiquement les transactions comptables corres-
en fait un grand classique des ERP. Ce sont ses projets business,
pondantes. Nous aurons dès lors, en permanence et en temps
destinés à revoir les processus en éliminant les ‘branches mor-
réel, une vue globale sur notre stock. Ce que nous n’était pas
tes’ et autres activités inutiles, en allant droit au but ».
possible jusqu’ici ». Pour Marco Tessaro, il s’agit d’une véritable révolution. Dé-
BONNE ALCHIMIE
sormais, tous les aspects business, en termes de production
Parallèlement à la mise à jour de son ERP, Höganäs a d’autres
de ventes, d’achats, de maintenance ou encore de suivi des
besoins IT spécifiques. On le sait, le marché et le prix des
projets d’investissements seront accessibles au travers d’un
métaux sont extrêmement volatiles, et ce sur de très cour-
point d’entrée unique, mettant les informations à disposition
tes périodes. Gérer l’achat et la vente des métaux se révèle
des managers en ligne et en temps réel. Alors qu’aujourd’hui,
donc capital pour l’entreprise, afin de s’assurer que le client
les données étaient suivies plus ou moins manuellement.
payera, au moins et en moyenne, le prix du marché. « C’est
« J’espère donc voir auprès de mes collaborateurs le ratio com-
pourquoi nous avons mis en place un environnement informa-
pilation/construction/vérification de l’information par rapport
tique qui permet de collecter, via Internet, les prix des métaux
à l’analyse de cette information passer de 80/20 à 20/80, très
sur les marchés, d’y associer des données internes – produits,
rapidement. Bien entendu, comme dans chaque implémenta-
stock, flux, etc. – et de les injecter dans le costing des produits.
tion d’ERP où l’on change radicalement et en une fois l’environ-
De la sorte, nos vendeurs possèdent en temps réel les bonnes
nement informatique et informationnel, les débuts vont être
informations pour remettre un prix pour chaque produit. Le
délicats. Il faudra s’habituer au nouvel outil pour en tirer la
système a fait ses preuves et il sera incorporé au nouvel ERP. »
quintessence et s’assurer de la fiabilité des données. J’espère li-
Entreprise américaine et division du groupe Bemis, MACtac
miter cette période à 6 mois ou 1 an tout au plus. Ensuite, nous
confectionne des autocollants depuis quatre décennies. Son
pourrons travailler de manière totalement différente et nous
métier: créer de la colle et enduire différents types de films
consacrer pleinement à de l’analyse et à d’autres projets. »
(papiers, plastiques, pvc, etc.). MACtac, qui travaille uniquement en B2B, compte trois business unit: une première, « Roll
BRANCHES MORTES
label », prend en charge des étiquettes à prédécouper et
Préparer les collaborateurs à ce changement est un grand défi
imprimer, destinées à des produits de chaîne; la deuxième,
à relever. L’implication des responsables des différents domai-
« Technical », s’occupe d’autocollants, généralement double
nes ne se fait pas en un jour. Faute de temps, au début, ils ne
face, qui serviront de support d’adhésion; enfin, la troisième
se sont que très peu consacrés au design, à la configuration et
se consacre au support promotionnel et publicitaire. En Bel-
aux premiers trainings. Jusqu’au jour où ils ont réalisé que leur
gique, MACtac compte deux sites de production, à Soignies et
avenir et la définition de leur outil de travail quotidien était
à Genk, employant 650 collaborateurs.
en réalité en jeu. « Un outil qui va leur permettre d’obtenir de
Le marché de MACtac Europe est mondial, à l’exception des
nouvelles informations. Dans leur esprit, l’implémentation de
Etats-Unis et du Canada, dont s’occupe MACtac US. Pour
l’ERP, jusque là vue comme un projet embêtant, consommateur
Thierry Sabaux, Vice-President Finance & IT de MACtac Euro-
de temps et aux faibles implications, s’est transformée en sujet
pe, l’informatique financière est essentielle. Au moins à deux
essentiel. Un revirement de position s’est opéré face à la prise
titres. Outre ses deux sites de production sur le territoire bel-
de conscience de l’enjeu. »
ge, MACtac a accès à un large réseau de filiales et d’agences.
Dans la phase de réflexion de la mise à jour de l’ERP, Marco
Aussi, l’entreprise a mis sur pied un système de consolidation,
Tessaro souligne tout l’intérêt de la description des problè-
pour faire remonter l’information. Elle travaille sous ERP. FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°38 - JUIN 2010
29
DOSSIER
Thierry Sabaux: « L’informatique et les utilisateurs n’ont pas toujours eu une bonne perception du travail accompli par l’autre partie. Nous avons donc mis en place une plate-forme d’échange pour objectiver des indicateurs réels. » « Comment voulez-vous (bien) gérer une entreprise sans don-
ture financière, nous allons centraliser, consolider et reporter
nées financières?, interroge-t-il. C’est impossible. Au cours des
l’information à Soignies. Le besoin en informatique financière
cinq dernières années, nous avons mis l’accent sur la fiabilisa-
se révèle donc important: je dois pouvoir faire remonter l’infor-
tion des données, financières et opérationnelles, avec un ensem-
mation provenant des filiales, pour la centraliser, la consolider
ble de kpi’s, d’informations qui remontent directement de l’en-
et la rapporter aux Etats-Unis. »
vironnement de production, la création d’un data warehouse,
Pour Thierry Sabaux, l’informatique est un outil nécessaire.
etc. C’est tout à fait clé en matière de working capital, afin de
Mais elle ne représente pas une fin en soi. « Nous la voulons
prendre les bonnes décisions. » Ce travail a permis de trouver la
intégrée, mais pas centralisée. Dans ma structure, je veux des
bonne alchimie entre les visions financière et opérationnelle
répondants financiers de filiales suffisamment autonomes
de l’entreprise. « Grâce à ces indicateurs financiers et opération-
pour gérer leur environnement mais qui partageront les don-
nels communs, nous utilisons et partageons le même langage.
nées. Notre business est industriel, nous produisons de l’auto-
Nous ne travaillons pas chacun dans notre sphère. »
collant, pas de l’IT. Bien sûr, l’IT constitue un support clé car nous avons besoin de données fiables. Mais si une donnée ar-
UN OUTIL, PAS UNE FIN
rive erronée à l’entrée de l’ERP, toute la chaîne sera faussée et
L’ERP actuellement utilisé par MACtac arrive néanmoins en fin
votre ERP ne servira à rien. L’intervention humaine reste donc
de cycle de vie. Il va donc être mis à jour. Technologiquement,
capitale. L’update de notre ERP est d’ailleurs un projet de l’opé-
car son principe de fonctionnement ne sera pas fondamen-
rationnel, et non de l’ IT. »
talement modifié, mais mis en adéquation avec notre vision future. « Nous allons avant tout veiller à affiner les besoins.
LE MÊME TRAIN
Jusqu’ici, la relation avec les Etats-Unis existait déjà. Mais elle
Parmi les leçons qu’il retire de son expérience, le Vice-Presi-
n’était pas intégrée. La volonté du groupe, au terme de ce pro-
dent Finance & IT de MACtac Europe conseille à ses collègues
jet, consiste à arriver à intégrer l’ensemble des données du bu-
en passe d’implémenter un ERP de s’assurer d’avoir obtenu
siness, toutes divisions, unités et usines confondues. Exemple
l’adhésion du Comité de direction au grand complet. Car si
financier concret: nous allons désormais tous travailler sur le
un seul de ses membres n’est pas convaincu de la nécessité
même plan comptable. C’est-à-dire utiliser les mêmes langue,
et de l’intérêt du projet, une partie de l’entreprise ne suivra
référents et contenus. »
pas le mouvement. « Or, de la mobilisation humaine au sein
Le site de MACtac Soignies est à la fois centre de production,
de l’entreprise dépend la réussite de l’implémentation. » Que
filiale de vente directe et quartier général. « Nous faisons donc
l’on implémente un ERP ou, plus simplement, qu’on le met-
tout au même endroit. Ce qui veut dire qu’en termes de struc-
te à jour, le change management n’est pas mince. Et selon
FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°38 - JUIN 2010
Thierry Sabaux, bien souvent, il se voit négligé. Quand un
Les grands projets IT connotés métiers verront généralement
ERP intègre l’entièreté des processus, ne pas sensibiliser ses
le groupe proposer son savoir-faire aux filiales. Tandis qu’au
collaborateurs au bien fondé de l’opération peut engendrer
niveau des infrastructures, plus localement, nous sommes re-
des difficultés majeures.
lativement autonomes. Même si nous entretenons des échan-
« Parfois, le pas à franchir vers cette nouvelle technologie
ges réguliers de best practices avec le groupe. C’est une grande
n’est pas très grand. Mais tous les collaborateurs doivent faire
force, parce que dès que nous implantons une nouvelle fonc-
ce pas, simultanément. Tout le monde doit prendre le même
tionnalité Excel, Windows ou tout outil bureautique, le test a
train. » Et quand il parle de gagner le buy-in de l’interne,
déjà été réalisé par nos spécialistes. Il s’agit donc d’un déploie-
Thierry Sabaux sait de quoi il en retourne. « Chez MACtac,
ment très sécurisé de l’ensemble des systèmes. Mais c’est aussi
l’informatique et les utilisateurs n’ont pas toujours eu une
un frein, parce que l’implémentation se fait parfois avec un
bonne perception du travail accompli par l’autre partie. L’in-
certain délai. Sauf en cas d’urgence, bien entendu. »
formatique, par exemple, était parfois considérée par les utilisateurs comme un service support réfractaire. Nous avons
ERP MONDIAL
donc mis en place une plate-forme d’échange pour objectiver
En matière d’informatique financière, JCDecaux Belgium uti-
des indicateurs réels. Nous voulions rationnaliser la relation
lise SAP. Développé dans un premier temps au sein de la filia-
et laisser moins de place à l’émotionnel. »
le la plus importante du groupe, la France, l’ERP a ensuite été
Pour obtenir ce buy-in interne, MACtac travaille dans une
essaimé dans d’autres pays. « SAP est un très bel outil, parfai-
structure de « key user », (à voir un peu comme des process
tement performant. Mais, de mon point de vue, il est trop gros
owners) qui possèdent la connaissance des processus comme
pour une filiale de notre taille. Lors de développements ou de
celle des technologies informatiques permettant de les gérer.
déploiements, il nécessite de ‘bouger’ tout le système. C’est un
« Ces collaborateurs vont centraliser un ensemble de données
peu cher par rapport à ce que nous pouvons supporter. Aussi,
ou de demandes émises par les utilisateurs. Au travers de cette
nous militons de temps en temps en interne pour qu’un projet
toile de key users, nous allons partager et étudier les remar-
plus mutualisé soit développé afin de rencontrer nos besoins…
ques, modéliser le business model de l’entreprise tel qu’il est
et faire baisser les coûts ».
aujourd’hui et tel qu’on le voudrait demain. Nous partageons
Si partager le modèle SAP pousse le groupe JCDecaux et sa
ensuite les résultats avec les utilisateurs avant de prendre une
filiale belge vers un haut niveau d’expertise et de sécurisa-
décision. De la sorte, les utilisateurs sont réellement impliqués
tion des serveurs, avec le recul, Jérôme Blanchevoye – qui ne
dans les projets. »
faisait pas encore partie des effectifs de l’entreprise lors de l’acquisition de l’ERP – se poserait néanmoins aujourd’hui la
DÉPLOIEMENT SÉCURISÉ
question d’une telle implémentation. Pour obtenir un repor-
1,9 milliard d’euros de chiffre d’affaires, près de 10.000 colla-
ting interne plus fluide et moins cher, JCDecaux Belgium a en
borateurs et plus d’un million d’espaces publicitaires exploi-
effet dû développer des outils annexes – autour de Business
tés dans 55 pays et plus particulièrement dans 30.500 villes
Objects et Access – pour constituer, entre autres, son propre
de plus de 10.000 habitants, voilà comment décrire, en quel-
data warehouse parallèle. De quoi permettre à chaque direc-
ques chiffres, le groupe JCDecaux, né en 1964 avec le place-
tion un suivi et un pilotage des budgets.
ment du premier abribus publicitaire, à Lyon. Sa filiale belge, JCDecaux Belgium, avance, de son côté, un chiffre d’affaires
VIRTUALITÉ RECOMMANDÉE
de plus de 50 millions d’euros et quelque 200 collaborateurs.
« Nous avons également recours à un outil de reporting, conçu
Le modèle économique du groupe consiste à développer des
et maintenu par le groupe mais alimenté via SAP, en auto-
services à valeur ajoutée, attractifs pour les villes et qui lui
matique, depuis la filiale », dit-il. En matière d’informatique
permettront de remporter des contrats d’exploitation de mo-
financière, pour Jérôme Blanchevoye, le CFO a besoin de visi-
bilier publicitaire. Le projet Villo!, bien connu à Bruxelles, en
bilité. Mais d’une visibilité aisément accessible. Fondamen-
est un exemple. Outre ce volet historique de gestion de mo-
talement, le CFO doit savoir comment structurer son niveau
bilier urbain, JCDecaux est également actif dans le transport
de reporting ainsi que les données et informations qu’il sou-
et l’affichage grand format.
haite remonter. « Un facteur clé du succès. Car si les données
Au niveau informatique, le groupe connaît une expertise
ne sont pas correctement structurées dès le départ, même avec
mondiale. Pour l’implémentation d’outils SAP, d’une part, et,
le meilleur outil du monde, vous n’obtiendrez pas ce dont vous
d’autre part, pour le développement d’outils spécifiques liés
avez besoin. Il faut trouver le juste équilibre entre une infor-
à ses activités business et auxquelles le marché « tradition-
mation bien structurée, accessible et que l’on peut croiser, et
nel » ne peut répondre. « En outre, nous possédons également
un niveau de complexité trop élevé où l’on risque de ne jamais
un ensemble de lignes de conduite qui permettent de piloter
descendre au day to day. Il faut de la fluidité, de la cohérence
au mieux et selon des normes de sécurité très strictes, notre
dans les informations et une rapidité d’accès. »
propre réseau informatique interne, précise Jérôme Blanche-
Pour l’informatique financière, Jérôme Blanchevoye recher-
voye, directeur financier et informatique JCDecaux Belgium.
che avant tout la stabilité et la cohérence d’un système. « On FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°38 - JUIN 2010
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DOSSIER FISCALITÉ
peut éventuellement s’interroger sur le traitement automatisé, comme, par exemple, la facturation dématérialisée. Le marché en la matière commence à bouger. Mais les solutions formatées semblent encore lointaines, surtout pour une filiale de notre taille. Aussi, nous allons attendre que les gros acteurs lancent la démarche pour y aller à notre tour. Notre ERP date de 2005 et reçoit les évolutions SAP. Il est loin d’être dépassé ». Parmi les intérêts d’un ERP pour le CFO, Jérôme Blanchevoye souligne la facilité qu’il peut permettre pour obtenir des états, à les construire ou à les paramétrer soi-même si la structure des données a été correctement élaborée au départ. « Quand on implémente un ERP, il faut également songer à vérifier les potentiels changements engendrés au niveau de l’organisation. Ne va-t-on pas déporter des champs de compétences des personnes responsables, vers ceux d’autres personnes qui n’étaient pas concernées auparavant? Il conviendra de vérifier l’équilibre des charges de travail et les profils de compétences et de formation des collaborateurs concernés. Par exemple, avec SAP, des bons de commande peuvent être générés. Si les travailleurs n’y sont pas formés, de fâcheuses conséquences peuvent exercer un impact sur toute la chaîne… et donc, in fine, sur la comptabilité ». Jérôme Blanchevoye recommande par contre la virtualisation
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à toutes les PME de la taille de JCDecaux Belgium. Notamment grâce à VMware, l’apport en souplesse, en fiabilité et en sécurité fut important. Ensuite, le directeur financier et informatique conseille d’ouvrir de façon très sécurisée son réseau vers l’extérieur, avec des connexions VPN. Par contre, à cette heure, notre interlocuteur reste très frileux par rapport à la révolution cloud computing annoncée à renfort de slogans depuis deux ans. « Les risques sont déjà suffisamment nombreux, nul besoin d’en rajouter une couche. Les problèmes de disponibilité du réseau ne sont pas encore réglés. Si vous utilisez du cloud computing, une panne réseau – un désagrément finalement encore relativement fréquent – signifiera que tous vos accès seront coupés, au moins durant l’interruption. Vous devrez donc vous assurer de la fiabilité de votre fournisseur réseau, en plus de celle de vos serveurs externalisées. Sans parler que, comme avec les logiciels ERP, vous serez désormais liés à un fournisseur, avec ses propres règles de gouvernance imposées aux clients – mises à jour non désirées, plages de maintenance imposées, etc. » Sans compter aussi qu’une société de la taille JCDecaux Belgium aura certainement peu de poids pour faire valoir ses demandes d’évolution ou d’aménagement, estime-t-il. « Je reste convaincu qu’un des facteurs clés de succès d’une bonne IT est une équipe compétente, intégrée, motivée, souple, proche et attentive aux besoins des utilisateurs. Qu’en sera-t-il quand toute l’informatique sera externalisée et que vous serez dépendant d’un interlocuteur peut-être à l’autre bout du monde, un numéro au milieu
Jérôme Blanchevoye: « Je reste convaincu qu’un des facteurs clés de succès d’une bonne IT est une équipe compétente, intégrée, motivée, souple, proche et attentive aux besoins des utilisateurs. »
FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°38 - JUIN 2010
d’autres centaines de numéros, changeant d’interlocuteur au grès des plages de travail de ces derniers. Certes, aujourd’hui, le cloud computing semble promettre des prix intéressants. Mais qu’en est-il réellement et que fera-t-il demain? »