Finance Management N°65 : Public Authorities

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DOSSIER N°65 - OCTOBRE 2013

Public Authorities Amenés à dévoiler des comptes de plus en plus précis sous l’impulsion européenne, les gouvernements doivent moderniser leur comptabilité, gagner en précision lors de la réalisation de leur budget et démontrer le bien fondé de leurs investissements, il en va de leur attractivité.

02 « Il faut arrêter la politique de l'autruche »

Le besoin accru de transparence dans les finances publiques se décline à tous les échelons de pouvoir.

06 « FEDCOM s'intègre dans une dynamique globale de rationalisation »

Défi culturel, économique et organisationnel, le projet entend instaurer un système comptable unifié et commun à l'ensemble des S.P.F.

10 « Les tableaux de bord font à présent partie de notre quotidien »

Gros propriétaire immobilier et investisseur conséquent, la ville de Bruxelles doit composer avec le reporting grandissant réclamé par sa tutelle, la région.

13 « Historiquement, nous avons été obligés de diversifier notre financement » Dès sa constitution suite à l'externalisation d'une compétence wallonne, la SPGE s'est lancée sur le marché des capitaux.

15 « L’objectif financier dans un hôpital est de maintenir des soins de qualité »

Particulièrement complexe, le financement du secteur hospitalier public est fait de regroupements et de synergies.


DOSSIER TEXTE : FLORENCE THIBAUT

Il faut arrêter la politique de l’autruche 2

La transparence des finances publiques est un enjeu décisif pour de nombreux Etats. Cruciale pour assurer leur stabilité macro-économique et leur croissance, c’est le fondement de toute gouvernance solide. Elle permet aussi un meilleur débat démocratique sur ce qui est fait de l’argent public. Amenés à dévoiler des comptes de plus en plus précis, les gouvernements doivent moderniser leur comptabilité, gagner en précision lors de la réalisation de leur budget et démontrer le bien fondé de leurs investissements, il en va de leur attractivité.

L

e Fond Monétaire International (FMI) – comme la

ainsi qu’un audit indépendant. Perspectives croisées autour

Commission européenne – fait de la transparence

de la dynamique d’amélioration à l’œuvre.

des finances publiques son cheval de bataille. Il la définit comme « le souci de faire connaître ouver-

Comment peut-on expliquer ce besoin accru de transparence

tement au public les activités budgétaires passées, présentes

dans les activités de l’Etat?

et futures de l’État, ainsi que la structure et les fonctions des

Giuseppe Pagano: « C’est une lame de fond globale, qui

organes gouvernementaux qui déterminent la politique et les

s’explique en partie par les contraintes imposées par l’UE. C’est

résultats budgétaires ». Cette meilleure vision permettrait ainsi

un phénomène plus large que la crise, même si bien sûr, elle y

que le débat public ait lieu sur la base d’informations plus so-

contribue. Nous sommes dans une période de doute généralisé

lides, la responsabilisation et la crédibilité des pouvoirs publics.

et de grande prudence, y compris par rapport aux analyses des

Giuseppe Pagano, directeur du Service de Finance publique

agences de notations. A l’échelle européenne, une des grandes

et de fiscalité de la Faculté Warocqué, constate que ce be-

difficultés d’Eurostat est d’être sûr des comptes de chaque Etat

soin de visibilité sur les activités de gouvernement ne se

membre. Les exigences de contrôle et de transparence sont de plus

limite pas à l’Etat fédéral, mais touche toutes les entités

en plus précises. Elles sont déclinées à tous les niveaux de pouvoir.

décentralisées en cascade. Pour Daniel Kroes, président de

La tendance générale est aussi de disposer d’une plus grande

l’Institut des Réviseurs d’entreprise, l’exigence de transpa-

certitude en matière de reporting et d’exactitude des données, qu’il

rence doit aller de pair avec un contrôle interne efficace

s’agisse d’une province, d’une région ou d’une entreprise publique. »

FINANCE MANAGEMENT - N°65 - OCTOBRE 2013


Daniel Kroes : « Le contexte global est conditionné par le Pacte européen de stabilité, qui exige un suivi régulier des finances publiques. Deux critères de convergence sont déterminants. Chaque pays doit avoir un déficit inférieur à 3% du PIB et la dette peut dépasser les 60% de celui-ci. Suite à la crise de la zone euro, l’Union a décidé de resserrer les boulons afin d’éviter un nouveau scénario à la grecque. Le SEC 95, système européen des comptes nationaux et régionaux, a été créé dans le but d’harmoniser les différents paysages publics. Il prévoit une rigueur accentuée dans les domaines comptable et financier. Chaque Etat doit ainsi produire des comptes, les consolider et les présenter de la même façon, ce qui se répercute dans toutes les collectivités décentralisées. Que chacun s’aligne sur le même standard est loin d’être évident. En parallèle, la Commission travaille sur un SEC 2010, qui sera une mise à jour du SEC 95. Le mérite de ces normes est de fixer un certain nombre de grands principes qui vont dans le sens d’une meilleure précision des comptes et une gestion plus dynamique des finances à long terme. » Est-il intéressant de comparer les modes de fonctionnement des différents acteurs publics? Daniel Kroes: « Comparer les différents types d’organes publics n’est pas vraiment pertinent. Les approches et les réalités sont très différentes, même si, pour répondre aux exigences européennes, chacun doit remonter ses manches. Les données de chaque entité doivent remonter au niveau fédéral, donc il est difficile d’isoler une organisation. Les chiffes doivent être présentés de la même façon. Tout

Giuseppe Pagano: « Les pouvoirs locaux ont à présent trois ans pour disposer d’informations plus précises et de meilleure qualité. Tout un travail d’harmonisation comptable est actuellement en cours, même si on ne sait pas encore à 100% dans quelle direction aller. »

le monde doit s’y mettre et de la même façon, même si certaines initiatives sont plus répandues que d’autres. La directive 2011/85 qui doit être transposée pour 2013 fixe notamment l’obligation pour les communes de disposer de systèmes de contrôle externes. Les budgets devront également être pluriannuels. La Commission a pris la décision de faire figurer dans la comptabilité publique des entités qui n’y figuraient pas avant. Dès qu’il y a des

« La Commission a pris la décision de faire figurer dans la comptabilité publique des entités qui n’y figuraient pas avant. »

garanties publiques, il faudra en tenir compte, même si elles se trouvent aux côtés d’actionnaires privés. »

Qu’en est-il du contrôle interne? Est-ce une pratique répandue?

Giuseppe Pagano: « Il est, en effet, difficile de comparer les

Giuseppe Pagano: « Une fois encore, nous sommes face à une

efforts consentis par les uns et les autres car les niveaux de

logique de fond qui part du fédéral vers les entités locales.

maturité, les budgets, les contextes législatifs, les modes

Le recours au contrôle interne n’est pas quelque chose de

de fonctionnement et les mécanismes de surveillance sont

nouveau, mais se généralise. De plus en plus de provinces, par

très différents, même si les normes européennes sont les

exemple, n’attendent pas l’intervention de la cour des Comptes

mêmes pour tout le monde. Les communes, par exemple,

pour améliorer leur reporting, mais anticipent ses demandes

ne sont pas soumises au contrôle de la Cour des Comptes,

et questions. Ce contrôle interne prépare au contrôle externe

contrairement aux provinces. Les lois communales sont

qui viendra ensuite. Ce premier travail permet d’être en

très spécifiques, notamment en matière de comptabilité.

conformité avec les exigences extérieures, qu’elles soient

Les pouvoirs locaux ont à présent trois ans pour disposer

belges ou européennes. »

d’informations plus précises et de meilleure qualité. Tout

Daniel Kroes: « Le contrôle interne permet de se placer dans

un travail d’harmonisation comptable est actuellement en

une dynamique d’amélioration continue. Comme dans une

cours, même si on ne sait pas encore à 100% dans quelle

entreprise, tout est une question de processus, de flux, de

direction aller. La rapidité de l’alignement dépendra de la

créances et de dettes. L’IRE milite aussi pour un contrôle

pression d’Eurostat. »

indépendant des organisations publiques, c’est à dire, par

FINANCE MANAGEMENT - N°65 - OCTOBRE 2013

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devient une affaire de spécialistes, même si cette préoccupation citoyenne grandissante est plutôt saine. On va plus loin dans la complexité européenne, qu’il s’agisse des normes SEC 95 ou des exigences applicables aux cadres budgétaires des Etats contenus dans la directive 2011/85/UE. » Quels sont les défis les plus décisifs pour les finances publiques belges? Giuseppe Pagano: « J’en vois deux particulièrement cruciaux. Le premier défi à moyen terme est le vieillissement de la population. On a déjà une bonne idée de ce que ça peut coûter. Il représentera entre 5 et 6% du PIB dans les 15 prochaines années. L’essentiel de l’effort va se marquer entre maintenant et 2030. Le plus gros de l’effort sera réalisé d’ici là. On peut y arriver à condition de retrouver un bon niveau de croissance. A mon sens, ce n’est pas hors de portée. Depuis cinq ans, la Belgique connaît une croissance à zéro. Si cela ne change pas, alors le pays sera face à un vrai problème pour payer les pensions. Comprimer encore les dépenses n’est pas possible sans réduire le bien être des citoyens. Le comité d’étude du vieillissement table sur une croissance moyenne de 1,5%

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Daniel Kroes: « Le contrôle interne permet de se placer dans une dynamique d’amélioration continue. Comme dans une entreprise, tout est une question de processus, de flux, de créances et de dettes. L’IRE milite aussi pour un contrôle indépendant des organisations publiques. »

« L’attractivité belge en question » Paru en juin, le dernier baromètre de l’attractivité

la Cour des comptes ou des cabinets de réviseurs externes,

belge d’Ernst & Young classe la Belgique au 5ème rang

ce qui n’est pas toujours le cas. C’est moins dans les mœurs

des pays européens les plus attractifs pour les inves-

dans les entités locales. La Flandres est pionnière dans ce

tisseurs étrangers, mais figure seulement à la 15ème

domaine, puisque, depuis 2011, son parlement a exigé que

place en matière de création d’emplois. La Belgique fait

les acteurs du contrôle travaillent ensemble, pour améliorer

globalement mieux qu’en 2011 et devance à nouveau

l’échange d’informations, leur efficacité et la qualité du

les Pays-Bas. Avec une moyenne de 17 emplois créés

contrôle. Un acteur comme De Lijn réalise un audit interne

par projet d’investissement, la Belgique signe, par

et se fait à la fois contrôler par la Cour des comptes et par

contre, son plus mauvais résultat. D’après les résultats

des réviseurs externes. C’est une nouvelle dynamique qui

dégagés par la dixième édition du baromètre, des me-

est en marche, mais cela va prendre du temps. On va dans le

sures structurelles s’imposent pour surmonter notre

bon sens, même si on ne change pas des finances publiques

pression fiscale trop élevée. Un de ses handicaps histo-

en un an. Certains systèmes fonctionnent depuis 50 ans. Les

riques reste, sans surprise, ses coûts salariaux salés. Au

pays ont du prendre des engagements face à l’Europe, ils

niveau régional, l’étude dévoile une solide remontée

devront s’y tenir. »

en Wallonie, couplée à une légère reprise en Flandre, après un net recul subi en 2011 et une année record

Les citoyens s’intéressent-ils davantage aux budgets et au

en 2010. Au total, le nombre d’investissements étran-

fonctionnement publics?

gers en Belgique est passé de 153 à 169 en 2012, soit

Giuseppe Pagano: « Dans un contexte de crise, il n’est plus

une hausse de près de 10,5%. Les Etats-Unis restent

question de gaspiller les deniers publics, surtout quand on sait

encore le pays qui investit le plus chez nous. D’après le

qu’on doit réaliser 20 milliards d’économies sur l’ensemble des

baromètre d’EY, pour renforcer l’attractivité belge, une

budgets. Au moins on a de l’argent, au mieux il faut l’utiliser.

réforme du marché du travail et un décalage de la taxa-

L’intérêt des citoyens pour les décisions et la gestion publiques

tion sur le travail pourraient permettre d’améliorer les

s’accentue, mais je doute qu’il puisse maîtriser toute la technicité

perspectives en matière d’exportations. Un climat fis-

des budgets. Certains aspects techniques sont difficiles à

cal offrant une meilleure sécurité juridique serait aussi

appréhender pour monsieur et madame tout le monde. En effet,

une des pistes à suivre.

les finances publiques sont de plus en plus techniques. Cela

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pour y parvenir. Ce n’est pas inatteignable. Le deuxième défi à mes yeux sera d’équilibrer le budget d’ici 2015, ce qui ne se fera pas sans peine non plus. » Daniel Kroes: « Concernant les pensions, ce sont les travailleurs d’aujourd’hui qui payent les pensions. D’ici peu, vu la pyramide des âges, ce système ne fonctionnera plus. De manière générale, il faudra sortir de notre logique de déficit permanent. Nous dépensons plus que ce qui rentre dans les caisses. Pour

« Je ne suis pas d’accord pour dire que la Belgique est un enfer pour les entreprises. »

la défense de l’Etat belge, la plupart des pays fonctionnent de

peut décourager certaines entreprises. »

cette manière. A part, les pays du golf qui sont dans une logique

Giuseppe Pagano: « Indirectement, ces enjeux peuvent

de surplus et les pays scandinaves qui disposent de ressources

impacter les investisseurs. La question de savoir si la

naturelles importantes, les autres vivent généralement au

Belgique attire encore ne peut pas se résoudre par un oui

dessus de leurs moyens. Pour retrouver l’équilibre, il faudra

ou non tranché. Beaucoup d’éléments peuvent intervenir.

combiner croissance économique et augmentation des

L’imposition sur les revenus est particulièrement élevée en

richesses. Il faut arrêter la politique de l’autruche et prendre les

Belgique. Les prélèvements sur les salaires sont parmi les

problèmes à bras le corps. »

plus élevés en Europe et dans le monde. Cela dit, beaucoup de grandes entreprises, belges et étrangères, ne payent

Ces enjeux freinent-ils l’attractivité du pays?

aucun impôt des sociétés. Selon la société et sa sensibilité

Daniel Kroes: « Un des grands problèmes de la Belgique

aux impôts, la situation peut être très différente. Le pays a

est le prix élevé de l’énergie, cela peut jouer en la défaveur

beaucoup de points forts, entre autres sa stabilité juridique et

du pays, tout comme le coût du travail et les pensions, qui

sa population active bien formée. Je ne suis pas d’accord pour

deviennent un défi de plus en plus pressant chaque année,

dire que la Belgique est un enfer pour les entreprises, même si

ainsi que la charge de la dette. Tout cela forme un tout qui

d’autres endroits sont sûrement plus paradisiaques. »

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DOSSIER TEXTE : FLORENCE THIBAUT

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FEDCOM s’intègre dans une dynamique globale de rationalisation Lancé en 2008, le projet fédéral FEDCOM s’inscrit dans la mouvance de modernisation des finances publiques. Son ambition est d’instaurer un système comptable unifié commun à l’ensemble des services publics fédéraux. Il reposera sur une comptabilité générale, budgétaire et analytique. Défi culturel, économique et organisationnel, son premier volet était censé se terminer au début 2012. Si la partie comptabilité générale est achevée, quelques chantiers restent encore dans ses cartons.

L

'origine du projet remonte à 1991. Cette année-

Choisi pour sa longue expérience en la matière, notam-

là, l’élaboration du rapport du gouvernement

ment dans le secteur privé et au sein de la SNCB, Ludo

au parlement accumule un certain retard. Un

Goubert, ingénieur commercial de formation, comp-

sénateur propose alors de s’inspirer du sec-

table fédéral lors du début du projet et membre de la

teur privé pour moderniser le système comptable en vigueur

commission des normes comptables, est celui qui pilote

dans les organes publics et améliorer ainsi son efficacité et

l’ensemble du projet, qui fait collaborer toute une série

sa fonctionnalité. C’est dans ce contexte, qu’une réforme a

d’intervenants, que ce soit les collaborateurs des autres

été légalement introduite via la loi du 15 mars 1991. Une

SPF, la police fédérale ou les services publics fédéraux de

commission dédiée à cette lourde mission a été mise sur

programmation.

pied dans la foulée afin de plancher sur une formule per-

« L’application complète de la loi du 22 mai 2003 est encore

mettant de produire des bilans et autres comptes de résul-

loin d’être terminée, il nous reste du pain sur la planche,

tats plus rapidement. Chapeauté par le Service public fédé-

explique-t-il. Toute une série d’institutions, comme l’Opéra,

ral Budget et Contrôle de la gestion, FEDCOM a également

la Monnaie, la Régie des bâtiments ou l’Orchestre natio-

donné naissance à une application informatique afin d’in-

nal doivent encore être intégrés. Certains disposent d’une

formatiser cette toute nouvelle comptabilité.

comptabilité en partie double, comme beaucoup d’entre-

FINANCE MANAGEMENT - N°65 - OCTOBRE 2013


prises, d’autres pas encore. La régie, par exemple, travaille avec un système très spécifique. Il nous faut constamment nous adapter et harmoniser les méthodes. » A terme, FEDCOM permettra de sortir des rapports financiers plus rapidement et en conformité avec les principes comptables belges et ceux du Système Européen des Comptes (SEC). Le cahier des charges de FEDCOM est plus que conséquent. A sa tête, le SPF B&CG emploie une cinquantaine de personnes. Il a traité près de 800.000 factures en 2012 et manipule en moyenne quelques 350.000 données clients et fournisseurs. Il travaille avec 20 codes de société et 2.000 comptes bancaires dans son système. Sa base légale et réglementaire se compte en milliers de pages. FEDCOM est son projet phare et mobilise une bonne partie de son personnel depuis plusieurs années. Le plan comptable de 2009 lui sert de base. « L’histoire du projet se divise en plusieurs grands chapitres. Après la publication de la nouvelle législation sur la comptabilité budgétaire et générale et la publication d’un appel d’offre, un contrat a été signé avec IBM, comme partenaire principal, SAP et CSC comme sous-contractants en 2007. C’est le démarrage de la modélisation du projet qui commence, se remémore Ludo Goubert. Une phase pilote est entamée en 2008. De 2009 à 2011, nous avons mis en

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place trois vagues de roll out par groupes de quatre ou cinq institutions. Les premiers à se lancer ont été la Chancellerie, Fedict, les SPF P&O, B&CG et Santé publique, choisis pour leur taille moyenne et leur représentativité. En 2012, les derniers services ont démarré leur comptabilité générale. En 2016, ce sera normalement la fin de la période de transition.

Ludo Goubert: « Auparavant, un expert comptable qui regardait un bilan de l’Etat ne pouvait pas s’y retrouver, ce n’était pas dans sa langue. C’est en train de changer. »

Au total, 2000 utilisateurs ont été formés. FEDCOM s’intègre dans une dynamique globale de rationalisation du public. »

tants ont du apprendre le langage budgétaire propre au

Dès 2007, des nouvelles recrues ont été engagées et for-

secteur public. A chaque phase de roll out, une équipe de

mées, notamment à l’utilisation de SAP, afin d’accom-

soutien a été constituée. Tout le monde a associé ses forces,

pagner le projet. Une équipe mixte, composée de fonc-

c’est ce qui a fait la réussite du projet. »

tionnaires réaffectés ou spécifiquement engagés et de consultants IBM/CSC a ainsi relevé ses manches à partir de

NOUVELLE PHILOSOPHIE

la phase pilote, sous l’égide de l’équipe du comptable fédé-

Depuis les débuts, l’étendue du projet a progressé et son

ral. De près ou de loin, environ cent personnes ont contri-

contenu a été affiné. Une année supplémentaire a été ajou-

bué à FEDCOM.

tée au délai initial de roll out. Ludo Goubert commente: «

« 14.000 jours ont été prestées par les consultants. Les

Quatre mois ont été consacrés à la comptabilité générale et le

besoins ont diminué progressivement. Au départ, il y avait

roll out a finalement été réalisé sur trois ans au lieu de deux

davantage d’externes que de fonctionnaires, le ratio s’est

dans l’idée de mieux coller au calendrier comptable. Nous

inversé au fil du temps, notamment en fonction des forma-

avons également fait évoluer la plateforme, même si nous

tions. Certains venaient de la trésorerie, d’autres de l’armée

avons convaincu les organisations d’utiliser le plus possible

ou de P&O. Chacun a amené son expertise particulière. Cela

l’outil tel quel. »

a créé un ensemble de compétences très riche. Les consul-

Pour suivre les différentes évolutions, tous les directeurs financiers des organisations concernées se réunissent encore une fois par trimestre afin de faire le point sur les

« Il nous faut constamment nous adapter et harmoniser les méthodes »

priorités et s’accorder sur les besoins. « Bien sûr, nous ne sommes pas d’accord sur tout et nous avons parfois des conflits, mais c’est ce qui rend le projet intéressant. Il y a beaucoup de synergies à créer et d’idées à mettre en commun », constate-t-il. Un audit de la Cour des comptes a

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DOSSIER

eu lieu chaque année afin de mesurer les grandes étapes.

ont du apprendre à maîtriser un nouveau plan comptable,

L’exercice s’est révélé formateur. Outre un nouveau système

ainsi que de nouvelles procédures. Il ne faut surtout pas

IT, FEDCOM a diffusé de nouvelles manières de travailler. Le

sous-estimer la résistance au changement, mais sans cesse

volet change management a donc été décisif. « Le projet

communiquer et rassurer les équipes. »

s’est parfois apparenté à un choc culturel. Il n’y avait pas de

Le choix des mots dans SAP et l’utilisation d’un langage

culture comptable, incluant les réconciliations fournisseurs

commun ont aussi été des challenges de taille. « Dans le

ou les comptes en banque, en tant que telle. C’est quelque

public, on parle, par exemple, de droit constaté, de recettes

chose qu’il a fallu construire progressivement. Le plus diffi-

et de frais. Certaines choses, comme le nom des colonnes, ne

cile dans ce type de projet est d’embarquer les gens et de les

peuvent pas être adaptées dans SAP, il a fallu faire avec et

familiariser avec de nouvelles procédures. Les collaborateurs

trouver un terrain commun. De nombreuses personnes ont

Une nouvelle ère dans la comptabilité publique Pour sa première édition, l’enquête Towards a new era in government accounting and reporting menée par PwC début 2013, démontre que, partout dans le monde, les gouvernements centraux prennent des mesures pour améliorer leur comptabilité et accroître la transparence de leur reporting financier. Menée dans 100 pays, la recherche révèle que, si seulement 24% des gouvernements utilisent déjà une compta-

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bilité d’exercice, 37% d’entre eux déclarent avoir l’intention de passer à ce type de comptabilité au cours des cinq prochaines années, ce qui porterait le taux total d’adoption à 63% des gouvernements sondés et représenterait un bon de près de 142%. Ce pourcentage signifie, en outre, que la majorité des gouvernements fonctionnent encore avec une comptabilité de trésorerie. Basée sur les entrées et sorties de caisse, la démarche, chère au secteur public, ne tient pas compte des actifs et des passifs, et n’offre donc qu’une vision à court terme des finances. « On ressent une tendance globale chez de nombreux acteurs

était plus difficile pour un état d’emprunter. La dette augmente

publics à rechercher davantage de transparence dans leurs

partout. Le déficit de 3% dont on parle souvent devrait rester une

comptes. Comme les acteurs privés, ils ont besoin de connaître

mesure exceptionnelle. Il est faux de croire qu’un pays pourra

leur situation au jour le jour, constate Patrick Schumesch, global

toujours se financer. Avoir une comptabilité performante permet

public finance and accouting partner chez PwC. Leur logique

de mesurer sa situation en temps réel. D’ailleurs, une exigence

n’est pas si éloignée. Si les entreprises rendent des comptent à

européenne prévoit désormais que chaque état membre doit

leur conseil d’administration, les citoyens représentent, quelque

adopter une règle de comptabilité double. La commission s’est

part, les actionnaires de l’Etat, c’est le jeu démocratique. Avoir

rendue compte que les informations fournies par chaque pays,

une comptabilité moderne est la base pour prendre les bonnes

par exemple à Eurostat, manquaient d’harmonisation. Un projet

décisions et assurer la santé des finances publiques. »

de normes communes est à l’étude. Soit l’Union développera

La prise de conscience du besoin de s’équiper d’outils perfor-

son propre système, soit elle adoptera IPSAS comme référent

mants et de se doter d’une méthode comptable plus moderne

commun. »

s’est accélérée, même si, en Belgique, par exemple, on parle

Certains pays membres sont ainsi plus avancés que d’autres.

encore beaucoup de « cash », ce qui induit une conception des

La France et l’Angleterre se sont déjà alignées aux normes IFRS.

finances à court terme. « De nombreuses figures politiques se

L’Autriche et l’Estonie ont, quant à elles, choisi d’intégrer IPSAS.

référent souvent au budget ou aux différents plans en terme

« En Belgique, il y a différents projets en parallèle, notamment

de cash, ce qui ne facilite pas une vision globale à long terme.

à l’échelle des communes ou des régions, mais pas encore d’ap-

Le budget ne devrait pas uniquement tenir compte des recettes

proche harmonisée et commune à tous les niveaux de pouvoirs.

et des dépenses. De même que certaines choses, comme les

Il y a encore certains progrès à faire, même si les choses bougent.

pensions, ne figurent dans le bilan. On a vu, depuis la crise, qu’il

Le vrai coup d’accélérateur se fera à l’échelle européenne. »

FINANCE MANAGEMENT - N°65 - OCTOBRE 2013


besoin de leurs propre terminologie et de leurs codes budgétaires afin d’apprendre le fonctionnement et d’accepter le système, cela m’a vraiment frappé. Un autre changement culturel considérable est qu’on n’accepte plus d’ouvrir les comptes d’une année écoulée, c’est un gros changement. »

PARTAGE D’INFORMATIONS La prochaine étape sera donc de procéder à l’intégration de la comptabilité budgétaire et analytique. « Il nous faut

« Harmoniser les interfaces et intégrer toutes les données de l’ensemble des organisations concernées est un défi permanent. »

à présent œuvrer à stabiliser le système et à l’archivage des données », précise Ludo Goubert. Pour ce qui concerne les

plus grand nombre en font partie. « On est d’ores et déjà à

données liées au personnel, FEDCOM va s’appuyer sur eHR,

mêmes de payer nos prestataires plus vite que par le passé. Si

un projet mis entre parenthèses pour le moment, qui per-

toutes les informations sont là, tout peut être payé endéans

mettra de réunir l’ensemble des données RH sur une seule

les trois jours. Les données sont également plus disponibles

plateforme. « Le calcul des salaires, les formations suivies, les

qu’avant. On va aussi pouvoir publier un bilan et un compte

cercles de développement y figureront. C’est en chantier im-

de résultats plus accessibles et lisibles par plus de monde. Au-

portant réalisé par Fedict en collaboration avec P&O. Toute

paravant, un expert comptable lambda qui regardait un bilan

la carrière d’une personne se retrouvera au même endroit.

de l’Etat ne pouvait pas s’y retrouver, ce n’était pas dans sa

Ces deux projets gagneront à travailler ensemble. Outre le

langue. C’est en train de changer. Prochainement, nous pu-

partage d’informations, ce qui nous intéresse est de pouvoir

blierons également une version en ligne sur notre site web. »

faire l’analyse des coûts grâce à ces données afin de suivre

L’année 2013 a été particulièrement riche pour FEDCOM,

le budget de plus près. A terme, la mise à jour des salaires

puisque le bilan a pu être déposé en temps et en heure.

comptabilisés se fera automatiquement dans FEDCOM. »

« Tout n’était pas parfait, mais nous avons prouvé notre

Hormis la volonté politique affichée de moderniser le ser-

capacité à pouvoir le faire et respecter les délais. C’est une

vice public, les facteurs de succès ont été la disponibilité

grande source de satisfaction ». D’autres développements

des équipes, internes et externes, et le choix pertinent des

ont déjà été envisagés pour la suite. Le patrimoine de

outils. « Harmoniser les interfaces et intégrer toutes les don-

l’Etat sera, par exemple, progressivement intégré au sys-

nées de l’ensemble des organisations concernées est un défi

tème d’ici les cinq prochaines années. A la fin de l’année

permanent. Chaque SPF est une société qui dispose de ses

2013, les premiers pilotes auront leur inventaire complet.

propres comptes, bilans, livres… Certains, comme la Justice et

« Il y a toujours un laps de cinq ans prévu pour chaque

la Défense souhaitent conserver leurs propres applications.

groupe de SPF. Une petite centaine d’institutions doivent

La police fédérale et la Défense ont également une gestion

encore être intégrées. Il faudra consolider leurs chiffres.

des salaires très particulière. »

Nous allons également contribuer à l’e-invoicing et l’e-pro-

Plusieurs types d’utilisateurs ont été définis. Ainsi, seule

curement, peut être que nous passerons également à IPSAS/

l’équipe du comptable fédéral peut modifier la plateforme.

EPSAS, achève Ludo Goubert. Nous ne manquerons pas de

C’est elle qui reçoit les demandes des uns et des autres et

travail, c’est une certitude ! Ce type de projet n’est jamais

procède aux éventuels changements. La Cour des Comptes,

fini, il y a toujours des choses à améliorer. FEDCOM est un

quant à elle, possède un accès à l’ensemble du système,

projet passionnant et qui a de nombreuses ramifications.

mais ne peut rien modifier. Les autres intervenants dis-

Bien sûr, il y a eu quelques frustrations, mais globalement

posent d’un accès limité. « Des rôles ont été attribués. De

c’est un projet incroyable et très formateur. »

par sa fonction, chacun sait ce qu’il peut faire et à quoi il peut avoir accès. Des règles et procédures encadrent l’utilisation. Il faut en tenir compte quand on configure l’outil. »

PLUS DE LISIBILITÉ De longue haleine, le volet pédagogique du projet a été déterminant pour son bon déroulement. « Nous sommes une petite équipe par rapport au département IT d’un grand SPF, confie Ludo Goubert. Nous devions tenir compte de l’ensemble des SPF et de leurs contraintes particulière, cela n’a pas été une sinécure, mais nous y sommes arrivés. » Grâce à la réussite de la première partie du projet, les avantages sont déjà mesurables. Moins de maintenance du programme comptable et des informations partagées par un FINANCE MANAGEMENT - N°65 - OCTOBRE 2013

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DOSSIER TEXTE : FLORENCE THIBAUT

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Les tableaux de bord font partie de notre quotidien Cœur historique de la ville et de la région, la commune de Bruxelles s’étend sur 32,6 km et abrite une population de 68.576 citoyens. Gros propriétaire immobilier, dotée d’une capacité d’investissement dont peu d’entreprises peuvent se targuer, la ville a appris à jongler avec les tableaux de bord et le reporting sans cesse plus précis demandé par sa tutelle, la région bruxelloise.

D

écoupée en six grandes zones, le Pentagone,

analystes, contrôleurs interne, comptables… Au fil du temps,

Neder-over-Hembeek, Laeken, Haren, le quartier

la ville a réussi à attirer des profils pointus. « J’essaye de parta-

européen et l’axe Louise-Roosevelt, la ville s’est

ger mon temps de manière équilibrée, même si je suis interpellé

progressivement bâtie une administration

tous les jours sur tous les domaines. Pour ce qui concerne ma

performante. « J’ai la grande chance de pouvoir m’appuyer

casquette tourisme, la gestion est un peu décentralisée. »

sur une équipe très efficace, estime Philippe Close, échevin

Bruxelles-ville héberge aujourd’hui 15.598 entreprises,

des Finances, du Tourisme et du Personnel, réélu en 2012.

232.431 salariés et 12.638 indépendants sur son territoire.

Ce sont mes directeurs qui sont en première ligne. En tant

Avec un taux de chômage élevé – 23,7% pour la population

que politique, mon rôle est de donner des impulsions glo-

féminine et 21,9% pour les hommes –, elle se bat pour assurer

bales, de réaliser des arbitrages et de défendre les modifica-

l’emploi et améliorer la formation de ses habitants.

tions budgétaires. » Selon les semaines et les priorités, il répartit son agenda entre

LOGIQUE D’INVESTISSEMENTS

la gestion des finances et le suivi des 4.000 collaborateurs

Un des gros enjeux actuels pour la plupart des communes

que comptent la ville. Pour le seconder, l’équipe RH compte

est l’adoption de la méthode comptable européenne dite

une centaine de collaborateurs. Du côté des finances, ils sont

SEC 95. « C’est un projet de consolidation stratégique. S’ali-

90. On y retrouve toute la palette des fonctions classiques:

gner à cette volonté européenne est une obligation pour

FINANCE MANAGEMENT - N°65 - OCTOBRE 2013


« Le budget est un des temps forts politiques, que ce soit au fédéral, dans les provinces ou les communes. » l’ensemble des institutions publiques. L’exercice peut se révéler lourd et avoir des impacts conséquents sur les investissements », constate Philippe Close. Le défi est de taille, puisque les communes représentent aujourd’hui 47% des dépenses publiques. Dotée d’une charge d’emprunt de 9,5% et d’un budget global de 770.000 euros (près d’un milliard si on inclut la police et d’autres unités), la ville est à même d’investir en moyenne 70 millions d’euros chaque année. L’immobilier et l’enseignement remportent une bonne partie du gâteau. « Nous avons la chance d’avoir une dette assez saine depuis plusieurs années, cela nous permet d’investir de manière conséquente. Nos investissements ont, d’ailleurs, connu un

11

coup d’accélérateur ces dernières années. Le premier poste budgétaire de la ville est l’éducation. C’est un secteur qui reste prioritaire avec le temps. Ensuite, le deuxième domaine qui nous tient à cœur est l’immobilier. Depuis deux ans, nous menons une politique très volontariste en la matière. » Gros propriétaire foncier, Bruxelles dispose d’un parc de loge-

Philippe Close: « Nous devons avoir une vue au jour le jour de nos finances. Le conseil communal et la région nous y poussent. Ils demandent des informations de plus en plus précises et un reporting plus ciblé. »

ments privés moyens de 6.000 unités et gère quelque 7.804 logements sociaux. « Nous souhaitons conserver la même phi-

vins de la ville, le budget est passé au crible par ses onze

losophie à l’avenir, mais tout dépendra des exigences contenues

membres. Une partie de celui-ci est constitué de dépenses

dans les normes européennes. Les communes pourraient être

obligatoires, comme les salaires des travailleurs commu-

amenées à devoir moins investir, ce qui serait problématique

naux. Une autre est soumise à la négociation qui fait le sel

pour la croissance économique de la ville, mais aussi pour son

du jeu politique. « On actualise le budget afin de couper les

urbanisme. L’année prochaine, ce sera la première année où nous

dépenses qui ne sont plus d’actualité. Notre personnel est

devrons présenter notre budget de manière double: sous l’an-

plutôt vieillissant, nous pourrions décider de ne pas renou-

cienne forme classique pour la région et en conformité avec SEC

veler certains postes, mais ce n’est pas une option que nous

95. Techniquement, ce système amène de nouvelles manières de

avons envie de suivre. Le reste est fonction de la stratégie du

travailler. C’est une toute nouvelle approche à adopter. Elle pour-

Collègue, qui est, en quelque sorte, le gouvernement de la

rait modifier la répartition de nos postes budgétaires. »

commune, et des priorités qu’il définit. Le conseil, qui joue

COURSE BUDGÉTAIRE

le rôle de parlement, l’approuve ensuite suivant une logique classique de majorité/opposition. Le budget est un des

La rentrée est une période plus que dense pour la com-

temps forts de la vie politique, que ce soit au fédéral, dans

mune, puisque traditionnellement, le budget est censé

les provinces ou les communes. Mon rôle est de le porter et

être clôturé pour le mois d’octobre. « Du fait de l’agenda

de le défendre. J’espère pouvoir présenter une ébauche aux

politique chargé à cette période-là, c’est rarement possible.

autres échevins d’ici la fin du mois de novembre. »

Pour 2014, il sera sans doute clôturé en décembre. Tech-

Une fois le budget finalisé et envoyé à la région, cette der-

niquement, s’il n’est pas prêt, nous pouvons recourir à des

nière a 120 jours pour l’approuver ou le réformer. « C’est

12ème provisoires et l’achever en janvier si on dépasse le ca-

très rare que la région ne le valide pas. Cela ne m’est encore

lendrier », précise l’échevin. Pour cette édition-ci, l’équipe

jamais arrivé. En général, son approbation est tacite. » Le

de Philippe Close a commencé à préparer un avant-projet

deuxième outil clé dans la gestion de la commune est les

dès le mois d’août.

comptes de résultats qui se font un an et demi après la réa-

Négocié au sein du Collègue des bourgmestre et éche-

lisation du budget. « Mi-2015, nous ferons les comptes FINANCE MANAGEMENT - N°65 - OCTOBRE 2013


DOSSIER

pluriannuel est prévu sur trois ans. « Un rapport annexe au rapport

« On ne peut plus fonctionner à l’aveugle en figeant nos activités un an à l’avance. »

annuel contient tout l’ADN de la commune. Toutes les données qui la font vivre s’y retrouvent. Pour ce qui concerne les modifications du budget, nous avons parfois besoin d’une certaine souplesse. Plusieurs dépenses urgentes peuvent évoluer. Dans ce cas, on adopte le même procédé que pour le budget initial et une proposition est envoyée à la région, qui a alors un délai d’approbation de 40 jours. »

pour 2014. Il s’agit de faire le point sur ce que nous avons

Vu l’importance des montants en jeu, la gestion financière

réellement perçu. Faire le parallèle entre les deux nous per-

de la ville est de plus en plus professionnelle. Une masse

met d’avoir une photographie réelle de nos finances. »

d’informations doit être analysée de près: investissements,

SURVEILLANCE RÉGIONALE

subsides ou collecte des taxes. « On ne peut plus fonctionner à l’aveugle en figeant nos activités un an à l’avance, d’où

La comptabilité de la commune se réalise suivant des règles

l’importance de réussir à attirer des profils pointus dans son

de présentation très stricte. C’est la région qui en est l’ins-

équipe. Les tableaux de bord et les indicateurs font désormais

tigatrice. « Le budget doit y être présenté de manière double,

partie de notre quotidien, achève Philippe Close. On doit pou-

poursuit Philippe Close. Sa partie classique reprend des

voir jongler avec pour piloter la commune et avoir une vue au

éléments comme les transferts et autres subsides. Sa partie

jour le jour de nos finances. Le conseil communal et la région

‘extraordinaire’ comprend l’ensemble des investissements

nous y poussent. Ils demandent des informations de plus en

consentis. C’est une circulaire régionale qui en fixe le cadre. »

plus précises et un reporting plus ciblé. Nous sommes un ser-

En conformité avec la surveillance de la tutelle, un rapport annuel

vice public, l’ensemble de nos revenus doit servir à améliorer le

est réalisé pour l’ensemble des matières et contient des données

bien-être de nos citoyens. Ces derniers sont intéressés de ma-

clés comme l’évolution de l’absentéisme, la progression du parc

nière grandissante par ce que nous faisons de leurs deniers, il

immobilier ou le nombre d’employés. Pour les budgets, un plan

nous faut être à la hauteur. »

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FINANCE MANAGEMENT - N°65 - OCTOBRE 2013


DOSSIER TEXTE : FLORENCE THIBAUT

Nous avons été obligés de diversifier notre financement Fondée en 1999 pour augmenter la capacité d’investissement de la région wallonne, la Société publique de gestion de l’eau (SPGE) a pour mission principale d’assurer le financement et la coordination des acteurs de l’eau. Société anonyme de droit public, c’est un des gros emprunteurs wallons. Depuis ses débuts, elle a choisi de ne pas se limiter au financement bancaire et emprunte régulièrement sur le marché des capitaux. Philippe Delculve, son CFO, prend fréquemment son bâton de pèlerin pour convaincre les investisseurs belges et internationaux.

L

e territoire wallon compte un parc de 415 stations

personnes dont deux commissaires du gouvernement, veille

d’épuration existantes. Près de 883.598 m3 y sont

au bon respect de son contrat de gestion.

nettoyés chaque jour. Son taux d’équipement est en évolution constante depuis la fin des années ‘90.

DIVERSIFIER LE FINANCEMENT

Il est passé de 40% en 2000 à plus de 85% actuellement. Au total,

Le département financier de la SPGE compte huit personnes.

ce sous-secteur mobilise en moyenne 800 personnes au quotidien.

« Nous avons finalement peu d’opérations à gérer au jour le

Installée à Namur, fondée par la région et dotée d’un actionnariat

jour, même si les montants que nous mobilisons sont très im-

mixte, à 84% public, la SPGE emploie une quarantaine de collabora-

portants, indique-t-il. En 1998, de nombreuses obligations en

teurs. Sa dette atteint en ce moment 1,655 milliards. Cette dernière

matière d’assainissement de l’eau ont vu le jour, c’est une des

inclut un emprunt à la BEI, des placements privés et emprunts ban-

raisons qui explique notre création. Nous avons dû rattraper le

caires, ainsi que des papiers commerciaux.

retard en investissant massivement. »

« Nous sommes autonomes et self-supporting à 100%, men-

Depuis sa création, la société ne bénéficie pas des garanties

tionne Philippe Delcuve, directeur financier depuis 2001, dé-

wallonnes pour obtenir du crédit. Son capital de départ, pro-

buts officiels des activités. Notre chiffre d’affaires provient en

duit d’une taxe non utilisée, était de 1,3 milliards. Son dépar-

grande partie de la facture du consommateur. C’est lui qui nous

tement financier est donc condamné à se montrer créatif et

paie via les producteurs, ce qui offre une proximité à notre cash

à combiner les sources de capital. Dès sa constitution, il lui

flow. La SPGE représente le plus gros budget d’investissement

fallait trouver 300 millions d’euros. « Contrairement aux autres

en Wallonie. Nous avons récolté près de trois milliards en dix

gros acteurs wallons, nous avons dû emprunter seuls, sans être

ans afin de rencontrer les exigences européennes, ce qui nous

connu, ni bénéficier d’un soutien étatique. Trouver des moyens

place avant les autoroutes. A titre de comparaison, la région

propres pour augmenter nos investissements a été un défi im-

représente 5 ou 6 milliards. » La société publique s’occupe en

portant. Nous représentions un vrai risque crédit. Nous avons, à

priorité de la protection des ressources hydriques et de l’as-

présent, le même rating que la région auprès l’agence de nota-

sainissement des eaux domestiques usées, de l’égout à la sta-

tion Moody’s, même si notre produit est plus risqué. Nous pou-

tion d’épuration. Son comité d’administration, composé de 20

vons presque emprunter aux mêmes conditions. » FINANCE MANAGEMENT - N°65 - OCTOBRE 2013

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zone euro, a été une période difficile. Il a fallu, une fois encore, nous diversifier. Même si nous sommes un gros corporate public, nous ne pouvons pas fonctionner avec des appels d’offres à rallonges, nous devons anticiper nos besoins. » En ce moment, la SPGE détient une trésorerie de 230.000 millions d’euros, car elle a saisi une opportunité de financement intéressant. « Sans garantie publique formelle, nous essayons de toujours aller chercher du crédit au meilleur moment, affirme Philippe Delcuve. Nous commençons à être connus sur le marché, c’est un atout de taille, même si une réputation peut vite changer. Avec un défaut de paiement, c’est tout le château de cartes qui s’écroule. Lors du premier trimestre de l’année, nous avons bénéficié de conditions exception-

Philippe Delcuve: « A l’époque de notre création, le prêt bancaire était le mode de financement privilégié. Or depuis 2008, il est difficile de s’en contenter. Nous nous sommes tournés assez rapidement vers les placements privés. »

14

nelles. On a bien fait d’emprunter à ce moment-là, car les taux sont de nouveau à la hausse depuis juin 2013. Nous avons fait notre shopping avant cela. En général, nous essayons d’être six mois en avance par rapport à nos besoins de liquidités. »

Modèle d’externalisation réussie, la SPGE a eu la chance de

RÉSEAU À ENCADRER

convaincre la Banque européenne d’investissement en 2004, qui

Réconcilier les intérêts des interlocuteurs de la SPGE est un travail de

ne prête normalement qu’aux Etats, ce qui a attiré les autres inves-

tous les jours. Moody’s s’intéresse surtout aux liquidités, la Région

tisseurs. Elle a obtenu un prêt pour une durée de 25 ans. Devoir se

souhaite qu’elle investisse le plus possible, et Eurostat veut être sûr

débrouiller a finalement été une chance, puisque la société a pris le

que la société soit bien autonome. « Il faut se battre tous les jours

pli de diversifier ses sources de financement. Elle a aussi choisi de

pour maintenir notre flexibilité. » Au quotidien, Philippe Delcuve se

travailler avec une agence de notation, ce qui n’est pas courant pour

consacre aussi beaucoup à la gestion de la trésorerie. « Nous payons les

une société semi-publique.

entrepreneurs entre 30 et 40 millions chaque mois. Il y a, en moyenne,

« Nous avons collaboré avec la BEI avant la crise. Je ne suis pas sûr

150.000 euros de frais de fonctionnement. Suivre les échéances et les

que le scénario se répéterait aujourd’hui, surtout qu’elle reçoit quatre

investissements à réaliser est presque un travail à temps plein. » Dès le

fois plus de demandes. Les discussions ont duré deux ans, mais nous

départ, un chantier d’harmonisation des systèmes comptables des

y sommes parvenus. La BEI offre, quelque part, un second rating qui

fournisseurs et producteurs a été entrepris afin de pouvoir réalisé un

rassure les autres bailleurs de fonds. Chez Moody’s, nous avons aussi

« coût-vérité commun ».

mis en avant la garantie du service public. A l’époque de notre créa-

S’il n’y a pas de contrôle de tutelle de la région en tant que tel, le

tion, le prêt bancaire était le mode de financement privilégié dans

plan financier de la SPGE est approuvé chaque année par le gou-

le public. Or, depuis 2008, il est difficile de s’en contenter. La donne a

vernement wallon. « Nous sommes en contact permanent. Trois

changé. Nous nous sommes tournés assez rapidement vers les pla-

paramètres sont particulièrement importants: le prix de l’eau, le

cements privés. Historiquement, nous avons été obligés de diversifier

pic de la dette, qui est une des grosses négociations, ainsi que les

notre financement. » Selon l’interlocuteur, Philippe Delcuve adapte

investissements à réaliser. Nous sommes, en outre, soumis à l’impôt

son discours. Les agences de rating sont, par exemple, très sensibles

des sociétés, nous avons un cadre à respecter. » L’eau étant un bien

au cash flow, ainsi qu’au montant de la dette.

universel, son prix ne peut pas fluctuer sur un coup de tête. Son

DÉFENDRE LA STRUCTURE

tarif est calculé suivant le coût-vérité de distribution et le coûtvérité de l’assainissement. En 2013, il est de 4,030 €/ m3, ce qui

Construction d’égouts, de collecteurs, de réseaux d’égouttage,

équivaut à une facture annuelle moyenne de 500 € pour une

protection des captages ou entretien de stations d’épuration, les

famille de quatre personnes. « C’est une mauvaise période pour

besoins d’investissement de la société sont conséquents. Les mon-

augmenter les tarifs. En période de crise, on ne veut pas impacter le

tants nécessaires sont particulièrement importants à l’échelle de la

consommateur. Avant, on ne faisait pas attention au prix de l’eau,

Wallonie. Philippe Delculve consacre près d’un tiers de son temps

c’est en train de changer. En même temps, on nous demande d’accé-

à rencontrer les investisseurs potentiels, leur présenter les risques

lérer nos investissements. C’est un équilibre délicat à trouver. » Toute

et leur expliquer la structure, pas toujours lisibles, particulièrement

augmentation prévue, en général chaque année, doit être validée

pour les investisseurs étrangers.

par la région et les affaires économiques.

« Pour les convaincre, il faut se montrer réactifs et flexibles. Nous

Et Philippe Delcuve de conclure: « La SPGE est une illustration qu’il

avons développé une documentation complète en français, en

est possible d’avoir une gestion active et dynamique au sein du sec-

anglais et en allemand pour anticiper leurs demandes. Notre côté

teur public, tout en restant prudentiel et en respectant les obliga-

hybride, à mi-chemin entre une entreprise et une institution publique

tions légales. Les organisations publiques ne peuvent, aujourd’hui,

peut être un atout. Nous jouons sur les deux tableaux. L’assèchement

plus se reposer sur le financement bancaire. On ressent une matu-

des liquidités en Belgique lors de l’été 2012, couplée à la crise de la

rité qui commence à s’installer. »

FINANCE MANAGEMENT - N°65 - OCTOBRE 2013


DOSSIER TEXTE : FLORENCE THIBAUT

Le marché des capitaux est devenu un passage obligé pour les grands acteurs publics Le besoin de transparence accru qu’on ressent chez de nombreuses organisations publiques se décline aussi dans leurs relations avec les banques. Amenées, pour les plus grandes d’entre elles, à devoir diversifier leurs sources de financement, elles envisagent de plus en plus de se lancer sur le marché des capitaux. Entretien avec Olivier Peeters, Deputy Head of Public Banking et Laurent Falla, Head of Public Institutions à la BNP Paribas Fortis.

Comment vous mettez-vous au service de vos clients du sec-

sens. Nous travaillons davantage dans l’optique d’un partena-

teur public? Vos exigences en matière de transparence ont-

riat que d’une simple relation acheteur/offreur. »

elles évolué? Laurent Falla: « Comprendre le business de nos clients, qu’il

Comment la crise est-elle venue transformer vos relations?

s’agisse d’une intercommunale, d’une région ou d’une entre-

Olivier Peeters: « 2008 a été un tournant. Avant, une insti-

prise, est la première chose. Chaque institution publique a

tution publique pouvait rapidement obtenir 100 millions

ses contraintes et sa manière de fonctionner. Nous étudions

d’euros sans justification, ni projet détaillé. La crise ban-

d’abord leurs flux financiers, leurs réseaux de clients et four-

caire, mais aussi celle des finances publiques, a changé la

nisseurs afin de bien percevoir leur réalité. En fonction de

donne et modifié notre manière de travailler. Les banques,

leur typologie, certains produits ne leur seront pas acces-

qui ont été les grandes pourvoyeuses de fonds du secteur

sibles. Nous leur demandons beaucoup de transparence et

public, ont resserré leurs exigences. Les institutions ont dû

leur posons énormément de questions précises auxquelles

organiser leur financement autrement. Certaines se sont

nous attendons des réponses détaillées. »

tournées vers le marché des capitaux, qui nécessite une

Olivier Peeters: « Ce besoin de transparence va dans les deux

manière de communiquer et une transparence beaucoup

FINANCE MANAGEMENT - N°65 - OCTOBRE 2013

15


Olivier Peeters: « Les banques, qui ont été les grandes pourvoyeuses de fonds du secteur public, ont resserré leurs exigences. Les institutions ont dû organiser leur financement autrement. »

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Laurent Falla: « Jusqu’à 2008, le secteur public était vu comme sans risque. Aujourd’hui, aucun secteur n’est épargné. »

plus avancées. Les investisseurs étrangers ont besoin de

fèrent à cette étape ensuite. Pour jouer dans cette cour, il

plus d’informations. Jusqu’il y a peu, certains gros acteurs

faut en accepter les contraintes. »

comme les régions n’avaient même pas de rapports de la

Olivier Peeters: « Durant au moins 50 ans, l’appel d’offre

dette! Un changement est en cours. »

bancaire a été la seule manière de fonctionner pour de

Laurent Falla: « Jusqu’à 2008, le secteur public était vu

nombreux acteurs. Il faut désormais leur expliquer l’inté-

comme sans risque. Aujourd’hui, aucun secteur n’est

rêt d’emprunter auprès d’investisseurs sur le marché. La

épargné. Il ne faut pas oublier qu’il y a aussi eu des faillites

manière de se présenter est très différente. Le marché des

d’entités publiques. L’ensemble des acteurs de la finance

capitaux est fluctuant. Contrairement à un appel d’offre

est plus exigent. Nous sommes passés par une période

qui peut prendre des mois, un investisseur a besoin de

difficile. Le marché et ses contraintes ont changé et notre

réponses dans les deux jours. C’est un renversement de

business model s’est adapté. Nous avons dû l’expliquer à

perspective. Leur prouver que d’autres acteurs issus de leur

nos clients. J’ai tendance à croire que cela a finalement

secteur ont fait ce choix est un argument de poids. Notre

renforcé notre collaboration. »

rôle est de les y aider. »

Quels sont les acteurs publics qui ont accès au marché des

En matière d’outils et de bilans, les grandes structures pu-

capitaux?

bliques fonctionnent-elles de la même manière que les ac-

Laurent Falla: « La plupart des grandes structures pu-

teurs du privé?

bliques y ont déjà recours, les autres feront sûrement ce

Laurent Falla: « Dans le cas des intercommunales, au

cheminement dans les mois à venir. Les grandes intercom-

niveau bilantaire, les rapports annuels sont de la même

munales, pour prendre un exemple, ont de tels besoins et

trempe que ceux des corporates. Le niveau de profes-

de tels montants à emprunter pour maintenir leur réseau

sionnalisme et la manière d’analyser les bilans sont les

que les banques ne sont plus à mêmes de répondre à la

mêmes. Un bilan reste un bilan. Bien sûr, les exigences en

totalité de leurs besoins. La maturité des opérations de cré-

matière de fonds propres ne sont pas du même ordre. Du

dit bancaire a tendance à diminuer, ce qui renforce encore

côté des communes et des régions, on parlera plutôt en

cette recherche de financements alternatifs. Faire ce choix

termes de budget. »

représente un important travail documentaire en amont, même si, une fois le premier cap passé, la charge est plus légère. Les prochaines tentatives demanderont surtout des mises à jour. La première émission est décisive puisqu’elle crée un précédent sur le marché, les investisseurs se ré-

FINANCE MANAGEMENT - N°65 - OCTOBRE 2013


DOSSIER TEXTE : FLORENCE THIBAUT

L’objectif financier dans un hôpital consiste à maintenir des soins de qualité Complexe, le financement des hôpitaux publics combine à la fois subsides, couverture des médicaments et honoraires des patients. Hôpitaux généralistes, gériatriques, universitaires, spécialisés, le panorama est diversifié, leur gestion aussi. Membre du réseau Iris, l’Institut Jules Bordet illustre bien cette juxtaposition de sources de financement. Spécialisé dans la lutte contre le cancer, l’hôpital universitaire a un chiffre d’affaires en constante augmentation.

F

ondé en 1939, l’Institut a développé toute une pa-

Avec un population totale de 880 travailleurs, dont environ

noplie de soins, allant de la prévention, dépistage et

150 médecins et 100 chercheurs, l’Institut s’organise autour

diagnostic, au traitement, jusqu’à la réhabilitation.

de trois piliers: prise en charge du patient, recherche et ensei-

Pionnier dans la recherche, c’est un des premiers

gnement. Membre du réseau IRIS depuis sa création, il fonc-

centres dédiés au cancer en Europe. Pour rester à l’avant-garde,

tionne toujours comme une association avec personnalité

il a toujours mené une politique d’investissement volontariste

juridique propre dans le cadre légal du Chapitre 12 de la loi

afin de disposer des meilleures technologies et des dernières

sur les CPAS.

thérapies. Centre multidisciplinaire intégré situé Boulevard de Waterloo, l’hôpital dispose actuellement d’une capacité de 160

AMÉLIORATION CONTINUE

lits, couplée à un hôpital de jour de 13 lits. En 2012, il a géré 6.002

Le chiffre d’affaire de l’Institut Jules Bordet est actuellement

admissions d’une durée moyenne de sept jours.

de 113 millions d’euros, sans compter les 15 millions alloués

« Le secteur hospitalier est un secteur particulièrement com-

à la recherche commerciale et académique. 31% de celui-ci

plexe et très technique. Il regroupe énormément de métiers et

provient de son budget des moyens financiers, 38% des hono-

recouvre des réalités très différentes, introduit Antoine Mas-

raires et 21% de la pharmacie. « Ce dernier poste est très impor-

sart, directeur financier adjoint depuis deux ans. J’ai décou-

tant chez nous, étant donné que la chimiothérapie représente

vert ce domaine d’activité en rejoignant l’Institut. Il m’a fallu

des frais conséquents. » Le pourcentage restant vient d’autres

au moins un an pour comprendre comment l’organisation

subsides, historiquement calculés en fonction du nombre de

fonctionnait et rencontrer les personnes clés. C’est un milieu

lits agréés, de dons et de legs, même s’ils ont diminué ses der-

professionnel extrêmement riche. »

nières années. « Nous avons le soutien d’une asbl, Les Amis FINANCE MANAGEMENT - N°65 - OCTOBRE 2013

17


DOSSIER

de l’Institut Bordet, qui a pour mission de soutenir la recherche dans les traitements contre le cancer. » Depuis 2009, le plan cancer de la Ministre Laurette Onkelinx est venu amener des fonds complémentaires. Le département financier de l’hôpital emploie aujourd’hui neuf personnes: six comptables, dont la chef comptable, une personne qui gère la caisse, le directeur financier, également devenu entre temps directeur général, et son adjoint qui l’aide à assumer ses deux casquettes. Huit personnes gèrent la facturation et deux personnes se partagent le recouvrement. « C’est un des services centraux dans un hôpital. Suivre les règles Inami, mettre à jour les factures, les optimiser, contrôler leur exhaustivité et leur légalité sont des tâches qui réclament beaucoup de temps. Les factures constituent notre trésorerie. » Selon les périodes, le rôle d’Antoine Massart se compose de gestion d’équipe, d’analyse financière trimestrielle, de reporting, du suivi de la facturation… La période de réalisation du budget se déroule classiquement entre octobre et décembre. Pour le bilan, c’est entre février et avril. « Ce sont des périodes de travail très intenses, appuie-t-il. Ma fonction me pousse aussi à jouer un rôle dans l’amélioration de nos processus. C’est un secteur où un financier ne peut pas se

18

limiter au reporting. Pour optimiser la gestion des finances, il lui faut sortir de son bureau, voir ce qu’il facture, rencontrer les médecins et les chercheurs pour bien comprendre les besoins des services. Les technologies et les solutions évoluent

Antoine Massart: « La raison d’être d’IRIS est de créer une complémentarité entre les institutions. A cinq nous avons plus de poids, notamment dans le cadre de marchés publics. Nous pourrions encore aller plus loin dans cette direction et créer davantage de ponts. »

en permanence, nous essayons de suivre ce mouvement. Il est vrai que les métiers financiers deviennent de plus en plus

seront contrôlées. Les réviseurs viennent traditionnellement

techniques. Le travail analytique et le suivi de la législation

une journée à l’hôpital afin de parcourir les comptes concer-

ont gagné en complexité, les demandes du ministère aussi. Se

nés. Ils consultent toute une série de documents, allant

former en continu est devenu indispensable. »

des fichiers contenant les emprunts, aux investissements

SUIVI COMPTABLE

médicaux et non-médicaux, et posent des questions aux financiers. C’est généralement le responsable comptable

Pour le jeune financier, le plus difficile dans la gestion finan-

et l’adjoint du CFO qui s’en chargent. L’analyse réalisée est

cière propre à l’hôpital, c’est l’analyse du BMF, le budget des

ensuite envoyée par courrier, l’hôpital a alors seulement 30

moyens financiers. « Dans certains cas, il s’agit d’un budget

jours devant lui pour répondre et contester le cas échéant.

temporaire, il nous faut calculer des rattrapages. Parfois le

« L’objectif est qu’en 2015, il n’y ait plus que deux ou trois ans

ministère nous donne davantage, parfois moins. Six ou sept

de retard, même si je n’ai pas encore perçu de coup d’accéléra-

ans après, il y a un contrôle de ces rattrapages perçus, ce qui

teur. C’est un processus qui prend beaucoup de temps et fonc-

impose de conserver l’ensemble des documents et pièces jus-

tionne à la manière d’un match de ping-pong, explique encore

tificatives pour ce laps de temps. Cela demande aussi un suivi

Antoine Massart. Certains frais sont contestés, il faut pouvoir

comptable minutieux et très régulier. »

prouver chaque montant. Tous les calculs ont déjà été faits, on

En 2013, par exemple, ce sont les années 2007 et 2008 qui

essaye de les étayer au maximum. Bien sûr, des erreurs peuvent survenir de part et d’autres. Notre directeur général a participé à la rédaction du nouvel arrêté royal sur le financement des

« Les métiers financiers deviennent de plus en plus techniques. Se former en continu est devenu indispensable. » FINANCE MANAGEMENT - N°65 - OCTOBRE 2013

hôpitaux, c’est un atout de taille. Pour contester, il faut bien connaître la loi et ses subtilités. Si on ne détecte pas les erreurs, on peut perdre des financements. La phase de contrôle est très intense, surtout si elle tombe en pleine période budgétaire, c’est d’ailleurs ce qui va se passer cette année. » Le même principe s’applique lors de la réalisation du BMF. « Nous avons également un délais de 30 jours pour leur demander d’intégrer certains postes supplémentaires. »


Le suivi des comptes de chaque institution du réseau IRIS se

raison d’être d’IRIS est de créer une complémentarité entre les

fait de manière trimestrielle sur base du budget approuvé par

institutions. A cinq nous avons plus de poids, notamment dans

chaque conseil d’administration. Les investissements sont,

le cadre de marchés publics », affirme-t-il.

quant à eux, consignés dans des plans pluriannuels. « Nos

« Nous avons, par exemple, opté pour le même logiciel de fac-

administrateurs peuvent refuser un projet de budget. C’est ce

turation et nous avons également un projet de datawarehouse

qui s’est passé l’année passée, nous n’atteignions pas l’équilibre.

commun. Cependant, nous pourrions encore aller plus loin

La ville de Bruxelles nous demande également des comptes très

dans cette direction et créer davantage de ponts. Il y a toujours

précis. Sa volonté est qu’au total le réseau soit rentable, si une

un effet de concurrence entre ces hôpitaux et chacun d’entre

structure est moins performante, elle sera compensée par les

eux continue ses propres développements internes. L’idéal se-

activités d’une autre. »

rait de parvenir à intégrer l’ensemble des soins. Des plans ont été définis, mais leur application est très lourde. Les choses se

EMULATION EN RÉSEAU

mettent en place progressivement. »

Un gros projet de déménagement a ainsi été approuvé par la

Des réunions ont d’ores et déjà lieu dans les domaines RH,

ville il y a quelques années. L’Institut Bordet devrait s’implan-

IT et financier, suivant la logique d’interdisciplinarité gran-

ter sur le site d’Erasme à Anderlecht. Le nouveau bâtiment

dissante dans le secteur. « Le monde hospitalier est passion-

sera en partie financé par l’hôpital, le reste sera apporté par

nant. Il s’y passe des choses qu’on ne soupçonne pas toujours.

un emprunt bancaire. « C’est un chantier énorme, sur le plan

L’objectif financier est avant tout de maintenir des soins de

de la construction, comme de la finance. Initialement censé

qualité et de répondre au patient de manière complète. En

démarrer en 2013, il a accumulé pas mal de retard en raison de

bout de chaîne, le département financier est en contact avec

problèmes de terrain. »

lui via la facturation et les créances, mais aussi à travers les

Amenés à collaborer fréquemment, tous les mois, les direc-

investissements choisis. C’est l’image de l’hôpital qui se joue à

teurs financiers du réseau se rencontrent. C’est Antoine Mas-

ce niveau », conclut Antoine Massart.

sart qui représente l’Institut. « Nous échangeons et nous nous

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challengeons sur toutes sortes de dossiers, que ce soit sur notre bilan, l’analyse de la pharmacie ou des créances CPAS. Voir comment ils s’organisent ailleurs est très intéressant. Je suis encore très jeune dans le métier, j’apprends beaucoup à leurs côtés. La

Un réseau pour améliorer le service aux patients Créé en 1996, le réseau IRIS regroupe les cinq hôpitaux

quelques chiffres, IRIS c’est en moyenne 1.091.553

publics de Bruxelles: le CHU Brugmann, l’Hôpital

contacts patients, 689.581 journées d’hospitalisation et

universitaire des enfants Reine Fabiola, l’Institut Jules

216.429 passages aux urgences chaque année.

Bordet, le CHU Saint-Pierre et les Hôpitaux Iris-Sud.

Pour les hôpitaux du réseau, l’intérêt est de pouvoir

Au total, le réseau englobe près de 11 sites répartis sur

se concentrer sur une spécialité, tout en réalisant des

huit communes de la ville, 2.461 lits et environ 9.000

économies d’échelle. Certains équipements de pointe

travailleurs. Créé dans le but d’offrir un service public

sont ainsi concentrés sur des sites de référence afin de

hospitalier de grande qualité aux citoyens bruxellois, le

rationnaliser les investissements. Les différents sites

réseau soigne les patients quel que soit leurs moyens et

doivent donc collaborer étroitement, ce qui facilite la

leur situation sociale.

mobilité du corps médical.

IRIS se divise en plusieurs entités, dont IRIS-recherche,

En 2008, un comité de contrôle de l’évolution financière

une asbl fondée en 2006, et IRIS-achat, dans une

de chaque hôpital, ainsi qu'un comité de suivi du plan

logique de mise en commun et de standardisation des

stratégique en partenariat avec l'ULB ont été mis sur

procédures. Depuis 2002, la centralisation des achats

pied. Une démarche de qualité commune a également

a permis d’économiser près de 27 millions d’euros, tant

été définie afin d’harmoniser les procédures d’évaluation

sur les dossiers d’investissements globaux que sur les

interne. Pour Faouzia Hariche, présidente du réseau, les

commandes courantes.

priorités vont être d’encore renforcer la collaboration

Parmi les missions communes aux cinq établissements:

entre les hôpitaux, notamment en redéployant l’offre de

favoriser la recherche en collaborant avec le monde

soins et en créant un système informatique uniformisé de

académique et assurer la formation des médecins,

gestion des dossiers médicaux, ainsi que de construire un

infirmiers et autres professionnels de la santé. En

nouveau laboratoire commun.

FINANCE MANAGEMENT - N°65 - OCTOBRE 2013


Finance Management vous livre, chaque mois, un état des lieux, des témoignages, des conseils, un partage de bonnes pratiques sur des dossiers clés pour votre gestion financière.

N° 48 - Juin 2011 Business Intelligence

N° 49 - Septembre 2011 DAF en PME

N° 50 - Octobre 2011 Les partenaires du CFO

N° 51 - Novembre 2011 Finance & HR

N° 52 - Décembre 2011 « Glocal » CFO

N° 53 - Février 2012 Compliance

N° 54 - Mars 2012 Finance & IT

N° 55 - Avril 2012 Secteur public

N° 56 - Mai 2012 Reinventing Finance

N° 57 - Juin/Juillet 2012 Leadership in Finance

N° 58 - Septembre 2012 Banques & Assurances

N° 59 - Janvier 2013 Cash Management

N° 60 - Mars 2013 Sécurité de l'information

N° 61 - Mai 2013 Finance Durable

N° 62 - Août 2013 Cloud computing

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Finance Management une publication périodique destinée aux responsables financiers et autres professionnels du secteur financier des entreprises de Belgique et du Grand-Duché de Luxembourg. Elle s’adresse également aux dirigeants d’entreprises soucieux d’optimiser la gestion financière de leur société ainsi qu’aux étudiants.

Comité de rédaction: Bruno Colmant (Roland Berger Strategy Consultants, Chargé de cours invité à l'UCL et à laVlerick Leuven Gent Management School), Charles Delloye (Alethea), Denis Dubru (Vice-President Finance, Belgium and Shared Services, GSK Biologicals), Frédéric Mailleux (Directeur Financier-GFA, Ets. Ronveaux), Chris Vroman (HR, Legal et Tax Director chez Ineos), Joël Poilvache (Regional Manager, Robert Half International)

Finance Management – Edité par MRH SPRL 7, Rue du Bosquet – 1400 Nivelles http:// www.financemanagement.be

Equipe rédactionnelle : Christophe Lo Giudice, Florence Thibaut

Rédacteur en chef : Christophe Lo Giudice (redaction@financemanagement.be)

Design & développement graphique : Alain Verstappen, Renato Baio (graphicteam@financemanagement.be)

FINANCE MANAGEMENT - N°65 - OCTOBRE 2013

Direction générale, marketing et partenariats : Jean-Paul Erhard (jpe@financemanagement.be) Régie publicitaire: Jean-Paul Erhard (jpe@financemanagement.be) Editeur responsable : Jean-Paul Erhard 7, Rue du Bosquet – 1400 Nivelles


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