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MUSEU DA MARIONETA um mundo de histรณrias!
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Museu da Marioneta | Guide de Visite
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QU’EST-CE QU’UNE
MARIONNETTE ?
La marionnette, indissolublement liée au spectacle théâtral, est un objet destiné à prendre vie et à trouver une expression grâce au mouvement. Pour qu’elle s’anime, une ou plusieurs personnes la manipulent. À mi-chemin entre le monde imaginaire et le monde matériel, ces poupées sont conçues pour donner corps aux personnages que l’on souhaite représenter. Les marionnettes prennent diverses formes, des plus simples aux plus complexes selon les mouvements dont on veut les doter. Il convient de distinguer trois modes généraux de manipulation qui dépendent de la position du manipulateur par rapport à la figure : - à partir d’un plan supérieur (marionnettes à tige et à fils) ; - à partir d’un même plan (certaines marionnettes d’ombre, les japonaises bunkaru et las marionnettes de manipulation à vue) ; - à partir d’un plan inférieur (les marionnettes à gant, d’ombre, à tige, et les marottes). La diversité des marionnettes est due aussi bien au temps et à l’espace qu’au répertoire et au public auquel elles se destinent. Elles peuvent être confectionnées en tout type de matériaux, les plus fréquents étant le papier, le bois, les textiles, l’argile, les métaux, le plastique et la mousse.
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LA COLLECTION UNE VISITE DE L’EXPOSITION PERMANENTE
La raison d’être de l’exposition permanente du Musée de la Marionnette est de montrer des marionnettes du monde entier. C’est donc une invitation à un voyage qui passe d’un continent à l’autre pour en faire connaître les principales manifestations de formes animées. Ce périple commence en Asie, fait un saut en Europe, puis nous emmène en Afrique et au Brésil, pour revenir enfin au Portugal où il se termine. C’est aussi un parcours dans le temps, où surgissent des exemplaires au passé immémorial et des œuvres de création contemporaine. Dans le sud-est asiatique deux œuvres littéraires sont le fondement du répertoire du théâtre de marionnettes. Il s’agit d’une part du poème épique indien nommé Ramayana, communément attribué au poète Valmiki et que l’on situe entre le Vème et le Ier siècle av. J-C. Ce texte raconte l’amour du prince Rama et de sa bien-aimée Sita, et c’est aussi, pense-t-on, une évocation de la conquête de Ceylan (actuellement Sri Lanka) par les peuples du Caucase. D’autre part, le Mahâbhârata, lui aussi attribué à Valmiki, est un récit de guerre véhiculant les idées qui sont au cœur de l’hindouisme, d’où sa forte charge morale et spirituelle. Khon est le nom du théâtre traditionnel de THAÏLANDE : un théâtre dansé dans lequel les acteurs-danseurs recourent au masque pour représenter les personnages qu’ils incarnent. C’était à l’origine un théâtre de cour, mais aujourd’hui cette pratique s’est diffusée pour devenir un mode de divertissement populaire.
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Les masques khon sont façonnés en papier mâché, puis peints et décorés avec grand soin. L’utilisation des couleurs primaires saturées et le fréquent emploi de la feuille d’or, ainsi que l’ajout presque obsessionnel d’accessoires et de détails, confèrent aux masques une nature qui relève du monde des dieux. Le théâtre khon a élaboré son propre style de danse, de costumes, de musique, de récitation et de chant. À l’origine, des masques étaient utilisés pour tous les personnages, mais aujourd’hui dieux et humains ne sont plus munis que d’accessoires qu’ils portent sur la tête. Un spectacle de théâtre khon est le fruit d’un travail d’équipe qui rassemble plusieurs professions : artiste, sculpteur, peintre, chanteur, conteur, musiciens et danseurs. Outre les masques de certains des principaux personnages, vous pouvez voir dans la collection le costume que portait le danseur qui incarnait le personnage de Thosakan, principal démon de l’histoire. Ces mêmes personnages sont repris dans le théâtre de marionnettes, dont vous pouvez voir ici un exemplaire. Sur l’île de JAVA, en INDONÉSIE, la tradition des marionnettes est non seulement très ancienne comme très riche du fait de la diversité des formes animées que l’on y trouve. À Java, le terme wayang évoque tout type de représentation et renvoie tant à ce qui est divin ou ancestral (yang) qu’à l’ombre (bayang). Ces spectacles s’inspirent des aventures du prince Panji et des poèmes épiques que sont le Ramayana et le Mahâbhârata ainsi que d’autres mythologies animistes qui elles aussi contribuent au théâtre javanais. Wayang Topeng est le nom du théâtre dansé dans l’île de JAVA, en INDONÉSIE. L’usage des masques est l’une de ses caractéristiques principales. Si à son origine le wayang topeng se jouait à la cour, représenté par des membres de l’aristocratie ou par des professionnels, il s’est transformé au fil du temps
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en un divertissement populaire qui égaye parfois les mariages ou d’autres fêtes. Le masque habituel du prince Panji est un visage au teint pâle et aux yeux en amande, assorti d’un petit nez à peine retroussé et d’une petite bouche légèrement ouverte. En INDONÉSIE toujours, mais cette fois sur l’île de BALI, les masques sont utilisés dans divers drames dansés, notamment le Wayang Wong, dont le répertoire traditionnel provient de l’épopée qu’est le Ramayana. Les masques employés lors de ces spectacles sont sacrés et vus comme des objets de culte. Au long de l’année, ils sont conservés dans des temples et lorsqu’il s’avère nécessaire de confectionner de nouveaux masques, on choisit un arbre bien précis, dont le tronc présente certaines protubérances qui indiquent qu’il est « en gestation » : on lui demandera alors l’autorisation de le couper. De nombreux rituels et offrandes sont accomplis pendant la fabrication des nouveaux masques. Parmi d’autres exemples, mentionnons ici le masque d’un oiseau – utilisé pour les personnages de Garuda et de Jatayu – ainsi que celui du singe Hanuman et de la Reine des démons, Rangda. Les marionnettes à tige de JAVA sont appelées Wayang Golek. Les têtes sont en bois ouvragé et peint avec beaucoup de minutie et fichées sur un support vertical qui, en traversant le corps, permet leur rotation. Les costumes sont coupés dans les tissus traditionnels de Java, les batiks. Ces marionnettes sont dotées de bras manipulables au moyen de tiges de bois fixées à leurs mains. Pour
identifier
les
marionnettes,
la
couleur
des
visages
est un élément essentiel: rouge et marron pour les démons ou les personnages de peu de noblesse ;
vert et blanc pour les princes et les
aristocrates. Quant aux divinités, elles sont parées d’ornements en or.
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Les marionnetes d’ombre sont présentes dans plusieurs pays asiatiques et leur influence s’est étendue jusque dans certaines contrées d’Europe. L’histoire veut qu’en CHINE, les ombres aient fait leur apparition au cours du IIème siècle av. J-C. Désespéré par la mort de sa bien-aimée, l’empereur Wu, promit une récompense à qui la lui ramènerait. Un sage magicien découpa la silhouette de l’impératrice dans une peau d’animal et la montra derrière un drap blanc à l’empereur qui fut ravi. C’est ainsi qu’est né le théâtre d’ombres chinois qui s’est popularisé au fil du temps. Ces marionnettes sont très particulières, en ce que leur tête est détachable du corps qui peut alors servir de base à différents personnages. En TURQUIE, les marionnettes d’ombre, confectionnées en peau de chameau ou de buffle, racontent les aventures de Karagoz (qui signifie œil-noir) et de son ami Hacivad. Karagoz est un héros du divertissement populaire qui, pour être grossier et analphabète, n’en est pas moins charmant ! La manipulation est effectuée au moyen de tiges enfilées horizontalement dans les deux orifices pratiqués dans la marionnette. Enfin, les Wayang Kulit, marionnettes d’ombre javanaises, sont des personnages découpés dans de la peau de buffle conformément à une iconographie préétablie : ils sont donc facilement identifiables par le public. Le cuir est ensuite peint au moyen de pigments naturels et agrémenté de détails à la feuille d’or. Les spectacles durent plusieurs heures, et parfois toute une nuit, sous la conduite du dalang, figure centrale de ces représentations. Investi de pouvoirs magiques et spirituels, le dalang manipule toutes les marionnettes qui entrent dans chaque pièce. Simultanément il raconte l’histoire et au moyen d’un
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instrument placé sous ses doigts de pied - le cempala - il bat la mesure pour l’orchestre gamelan qui accompagne la représentation. Toutes ces formes de théâtre de marionnettes d’ombre sont inscrites sur la liste du patrimoine culturel immatériel de l’humanité de l’UNESCO. Au SRI LANKA, les masques sont employés dans les rituels Sanni
Yakuma qui conjuguent pratiques exorcistes et médecine ayurvédique. Selon cette croyance, 18 maladies graves sont provoquées par des démons qui peuvent être à la fois la cause du mal et le moyen de s’en débarrasser, raison pour laquelle le chamane les invoque pendant la cérémonie de guérison. Le masque principal est Mahâkola sanni yakâ, représenté par un personnage qui porte autour de son visage 18 autres petits masques. On trouve également au Sri Lanka un autre type de masques, ceux du Théâtre Kolam (en cingalais « kolam » signifie masque), de type satirique et assorti de connotations rituelles relevant de la fertilité. Dans ce cas il existe trois types de personnages : les humains, les animaux et les démons. L’un de ces démons, Naga Raska, est représenté portant plusieurs serpents sur la tête. Le Théâtre Nô est né au JAPON au XIVe siècle. Il est directement influencé par les principes du bouddhisme zen : la simplicité, la contrition, la discrétion. Littéralement, Nô signifie talent. Les masques du théâtre Nô révèlent la présence des dieux et sont honorés par des rituels avant d’être utilisés. Leur expression figée n’est qu’apparente. En effet, ces masques sont élaborés en suivant des consignes précises pour qu’ils soient à même d’exprimer diverses émotions selon l’éclairage et en fonction de la perspective de l’observateur. Au MYANMAR, ce sont les marionnettes à fils qui sont les plus courantes. Appelées Yok-Thei-Pwe, ces marionnettes sont très réalistes quant à leurs traits,
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leurs ornements ou leur garde-robe. Cette caractéristique est accentuée par une manipulation complexe : elles peuvent mouvoir tous les doigts de la main afin d’évoquer la délicatesse des gestes de l’étiquette et de la danse birmanes. Cet art s’est surtout développé, pendant la deuxième moitié du XVIIIème siècle, du fait de l’arrivée de l’aristocratie thaïlandaise en Birmanie qui a apporté certaines coutumes liées aux marionnettes et au Ramakien. Le retentissant succès de ce théâtre amena le roi Ba-gyi-daw (1819 – 1837) a légifèrer en la matière : il alla jusqu’à créer un ministère chargé d’assurer la bonne exécution de ces rigoureuses lois. Ces spectacles, qui avaient certes pour but de divertir, comportaient également une dimension rituelle et une signification religieuse. Outre le Ramakien, étaient aussi mises en scène les histoires Jakatas (qui narrent les vies antérieures de Bouddha). Pour faciliter la compréhension des spectateurs, des légendes locales étaient introduites dans les trames des Jakatas. Revenons en CHINE, et plus précisément dans la région de Chaozhou, où les marionnettes d’ombre acquièrent de nouveaux contours en accédant à la troisième dimension. Dotées de fragiles têtes d’argile, ces marionnettes à tige sont manipulées de la même façon que celles dont elles procèdent : au moyen d’une tige courant le long du dos et de deux autres fixées aux mains. Inspirés de l’opéra, ces spectacles sont accompagnés par un orchestre et des chanteurs. Si l’on va jusqu’au VIETNAM, on y trouvera un type de marionnettes bien distinct de leurs congénères du sud asiatique: Roi Nuoc. Ces marionnettes, qui se déplacent sur l’eau, reposent sur une plate-forme de bois assortie d’une tringle de bambou qu’actionne le manipulateur debout dans l’eau jusqu’à la taille et caché derrière une structure de bambou elle aussi.
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Traditionnellement ces spectacles avaient lieu dans les rizières et évoquaient les cycles agricoles dans les champs bordant le delta du Fleuve Rouge, ou encore des rituels animistes de fertilité. On racontait des légendes et des histoires appartenant au quotidien de la région; c’est pourquoi les personnages les plus communs sont des agriculteurs, des pêcheurs, des mandarins etc. Le jeune homme juché sur un buffle et jouant de la flûte (instrument qui accompagne les représentations) est une figure fréquente de ces théâtres. En EUROPE, la grande tradition est celle des marionnettes à gant. La Commedia dell’Arte, en ITALIE a été déterminante pour l’évolution du théâtre ambulant, populaire, qui était généralement une forme de satire sociale, et cette influence s’est étendue au théâtre de marionnettes itinérant. Pulcinella, le premier de ces héros populaires, a laissé une descendance un peu partout en Europe. Ses héritiers tiennent de lui certaines caractéristiques comme, par exemple, les pommettes, le nez rouge, le gros ventre, le caractère fanfaron et bagarreur, affirmé par le recours à un bâton qui sert à agresser les adversaires. Les plus populaires sont Punch et Judy, d’ANGLETERRE et Guignol en FRANCE. Celui-ci naît au début du XIXème siècle à Lyon et véhicule les sentiments de révolte et les aspirations du peuple pendant la révolution libérale française. Quant au couple anglais il est aujourd’hui un élément essentiel de la culture britannique qui plaît aussi bien aux enfants qu’aux adultes
Kasperl, une marionnette à fils et à tringles est une célébrité en
REPUBLIQUE TCHEQUE. Un peu plus élégant que ses parents représentés sous forme de marionnettes à gaine, Kasperl porte un costume rouge et un bonnet
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de la même couleur assorti de grelots à son extrémité. En Tchéquie encore, les Vodniks, farfadets des eaux et sorcières, sont des personnages du folklore. Eux aussi sont représentés ici par des marionnettes à fils et à tringles. Au XXe siècle, les traditionnelles marionnettes à gaine ont été adaptées aux temps modernes par des artistes et des marionnettistes contemporains qui leur ont donné une nouvelle apparence. C’est le cas des marionnettes de Carl Schröder (1904-1997), créateur de ses propres personnages et auteur des textes qu’il mettait en scène, entre autres des comédies destinées aux adultes. Il a donné des spectacles pour l’armée pendant la Deuxième Guerre mondiale et mis en scène des films de marionnettes pour les studios DEFA de la République démocratique allemande. Les grosses têtes de ses marionnettes sont façonnées en papier mâché. Frieder Simon (1936), lui aussi marionnettiste dans l’ancienne RDA, est resté fidèle à la figure typique de Kasperl, tout en le dotant d’une esthétique moderne par des traits géométriques dans le style de l’école allemande Bauhaus.
En ALLEMAGNE encore, un personnage bien connu est Faust, représenté
ici par une marionnette à fils de Theo Egglink. Certaines de ses créations, accompagnées de celles d’auteurs en revanche inconnus, étaient parmi les marionnettes utilisées par des marins allemands pendant la Deuxième Guerre mondiale, dans la troupe appellée Nordmärkisches Puppenspiel, de l’amiral Franz Hennig. C’est de VENISE que nous vient un petit théâtre de marionnettes à tringles créé par Virginia Campbell (1914-2016), du Teatro Delle Quattro Stagioni, qui représente la ville lagunaire. Mais il n’y a pas que des marionnettes à gant en Europe. En BELGIQUE, l’un des ex libris de Bruxelles est le Théâtre Toone. Ces marionnettes de bois
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s’animent grâce à une tige et à des fils fixés aux mains et ce, depuis les années 30 du XIXème siècle. Liège, quant à elle, est la ville de Tchantchès et de Nanesse, des marionnettes à tringles incarnant des personnages burlesques grands amateurs de boisson et très comiques. En SICILE, une région italienne, on joue l’Opera dei Pupi.
Ces
marionnettes à tringle, d’un grand poids, étaient utilisées en un premier temps dans des spectacles destinés aux hommes et aux garçons dans le but de leur insuffler des valeurs chrétiennes et positivistes. Les pièces représentées sont normalement inspirées des romans de chevalerie et des chansons de geste et puisées surtout dans le cycle de Charlemagne. Les pupi ont été proclamés chef-d’œuvre du patrimoine oral et immatériel de l’humanité par l’UNESCO. Alberto Urdiales est un marionnettiste ESPAGNOL qui a fondé deux troupes à Madrid: La Caligüeba et le Teatro de la A. Il est l’auteur des marionnettes qui se trouvent à l’entrée et à la sortie de la salle: la première se nomme Dona Guisi [La Princesse au petit pois] et la seconde est le Duende Coletas [Le Lutin Coletas]. En AFRIQUE, marionnettes et masques sont intrinsèquement liés à la nature – à la forêt et à ses animaux – mais aussi aux forces magiques et aux rituels et fêtes communautaires.
Sogobó (littéralement: le retour des animaux) est le nom donné aux
expressions théâtrales des pêcheurs et agriculteurs du MALI et aux sculptures animalières de cette région, colorées et décorées avec des tissus. Sogobó conjugue plusieurs formes d’expression, de la danse au chant et à la musique, sans oublier
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les marionnettes et les masques. La tenue des spectacles a lieu selon les rythmes agricoles du peuple Bamana, qui se consacre essentiellement à la paysannerie, ou en fonction des saisons de pêche pour les Bozos. Ces représentations servent également à rehausser les événements communautaires: les mariages, les cérémonies de circoncision, voire les enterrements. Les hommes, notamment les plus jeunes, ont un rôle capital dans ces spectacles, puisque ce sont eux qui manipulent les marionnettes. Les femmes y participent en chantant. Nous pouvons répartir les marionnettes en deux catégories : celles qui représentent des figures humaines et celles qui représentent des animaux. Ces dernières sont imprégnées du fort symbolisme que la culture africaine attache aux animaux. Par conséquent, dans les communautés de pêcheurs, des animaux tels que l’hippopotame, le crocodile ou le calao ne sauraient manquer. Quant aux figures humaines, elles représentent les différents statuts sociaux du village. En AMÉRIQUE CENTRALE ET EN AMÉRIQUE DU SUD, l’usage des masques est une tradition de l’époque précolombienne qui s’est métissée avec les discours chrétiens qui l’ont suivie. Au Mexique, les masques sont très utilisés lors de la célébration de la Semaine sainte et du Jour des morts, mais aussi pendant le carnaval et d’autres festivités populaires. Au cours de ces nombreuses célébrations, les masques symbolisent une multitude de personnages, dont certains sont en rapport avec l’histoire du pays. Ainsi, la figure de « L’Espagnol » est-elle fréquente dans ces bals masqués, aux côtés d’autres allégories aux Européens. Les masques d’animaux, quant à eux, remontent aux traditions précolombiennes. La danse du jaguar, par exemple, est une réminiscence de cet animal qui symbolisait la fertilité dans l’imaginaire précolombien. Les masques de démons et les crânes
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sont eux aussi très communs, les têtes de mort étant très utilisées lors des cérémonies associées à la Toussaint. En Bolivie, les Diabladas [Danse des diables] sont assez répandues. Il s’agit d’un type de danses où surgit le « Tio de la Mina » [L’Oncle de la mine], un dieu de l’intérieur de la montagne, mais aussi les sept péchés capitaux. Les masques de démons ont évolué au fil du temps, pour devenir des compositions élaborées où se trouvent toujours les «quatre plaies» représentées par des vipères, des lézards, des crapauds et des fourmis. Le défilé de ces personnages masqués peut durer jusqu’à vingt heures. C’est un des éléments essentiels du carnaval d’Oruro qui est inscrit sur la Liste du patrimoine oral et immatériel de l’humanité. En Équateur, les Diabladas sont également assez communes. En Colombie, du fait des croyances animistes des peuples indigènes d’Amazonie, les masques représentant des animaux ornés de plumes colorées sont très fréquents. Ils sont généralement utilisés lors de cérémonies célébrant les périodes d’abondance, notamment au cours des mois de janvier et de février. Le jaguar qui représente le pouvoir et le danger est l’un des plus importants. Il est porté par les chamanes (prêtres traditionnels en contact avec le monde des esprits et dotés du pouvoir de guérir ou de prédire l’avenir). Au Pérou, les masques sont les accessoires indispensables de diverses festivités, qu’il s’agisse des Huaconadas, où les Huacóns, des individus déguisés en vieillards, parcourent les maisons du village, ou des fêtes de Cusco, ou encore du festival de la Vierge du Carmen. Au cours de cette célébration, qui se déroule chaque année à la mi-juillet, surgit une foule de personnages masqués : des habitants de la jungle amazonienne, des commerçants du haut plateau, des gens réduits en esclavage dans les mines d’or et d’argent de la région, des démons ou des négociants en vins. La fête se passe dans la ville de Paucartambo et quoiqu’il s’agisse d’un hommage rendu à Nuestra Señora del Carmen, on y trouve un très
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fort syncrétisme dû à l’identité métisse des habitants de la ville et aux anciennes traditions andines. Les pantins sont également arrivés au BRESIL notamment au nord-est où on les nomme Mamulengos. Ces marionnettes ressemblent aux gens de la région. Elles sont vêtues de tissus bigarrés et jouent dans des pièces de théâtre où l’improvisation et l’échange avec le public sont essentiels. La référence la plus ancienne aux marionnettes au PORTUGAL vient d’Alentejo: il s’agit des Bonecos de Santo Aleixo. Ces figurines allaient de village en village pour y jouer des spectacles qui provoquaient et mettaient à contribution le public, auquel elles s’adressaient immanquablement avec le fameux accent d’Alentejo. Et bien souvent, d’aucuns qui se sentaient visés, leur jetaient des objets à la tête. Ces spectacles étaient accompagnés à la guitare portugaise. Le célèbre Don Roberto est le descendant portugais du pantin Pulcinella. Toutefois, contrairement à ses collègues européens cette marionnette à gant n’a pas de physionomie très précise. C’est pourquoi au Portugal on dit de toutes ces marionnettes que ce sont des «robertos». Une particularité des spectacles de D. Roberto, est l’usage de la palheta, un petit instrument que le marionnettiste plaçait dans sa bouche pour amplifier et altérer sa voix et dont il usait pour tous les personnages en plus du héros de l’histoire.
Au Portugal, plusieurs marionnettistes étaient à la tête d’une entreprise
constituée par un théâtre de marionnettes à gant et à fils qui parcourait tout le pays et installait son pavillon ambulant dans les kermesses. Le commerce et l’art des marionnettes étaient normalement transmis de père en fils. Ces
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marionnettistes populaires se sont maintenus jusqu’aux années 60 avec des répertoires aussi diversifiés que les marionnettes qui leur donnaient vie. Rappelons ici les marionnettistes que furent Faustino Duarte, Henrique Duarte, Manuel Rosado et Joaquim Pinto. Certains montreurs de marionnettes représentaient tout seul. C’est le cas de Cesário da Cruz Nunes. Alors qu’il était au chômage, il vit un spectacle d’António Dias (un des maître du théâtre de Robertos) à la Feira da Ladra, le marché aux puces de Lisbonne, qui lui inspira le désir de se consacrer à cette forme de théâtre. Il construisit ses propres marionnettes et entreprit le difficile apprentissage de la palheta1.
Si le théâtre de Robertos était en voie de disparition au vu des rares
marionnettistes en activité dans les années 80, aujourd’hui ceux-ci sont au nombre de treize et présentent leurs spectacles dans tout le pays. Certains sont représentés dans la collection du musée, notamment José Gil et Vítor SantaBárbara. D’autres projets étaient mus par des buts différents. Le Teatro do Mestre Gil, né en 1943 de l’esprit du poète Augusto de Santa Rita (1888-1956), fut le premier à faire valoir des préoccupations de nature artistique. Les marionnettes, créées par Júlio de Sousa, évoquaient divers personnages de l’histoire du pays. Identique galerie de personnages est sortie des mains de Maria Emilia Perestrelo qui, avec des chiffons, des aiguilles et une paire de ciseau a donné naissance à diverses marionnettes destinées aux émissions pour l’enfance de la radiotélévision portugaise (RTP).
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Le Robertoscope ou le Teatro de Branca Flor furent des initiatives axées sur la pédagogie qui s’inscrivaient dans l’éducation par l’art. Au moyen de marionnettes amusantes, ces deux compagnies souhaitaient instruire les enfants de façon ludique. Le Teatro Branca Flor était dirigé par l’écrivaine Lília da Fonseca. Quant à Henrique Delgado, du projet Robertoscope, il fut l’un des plus importants historien des marionnettes portugaises. Isabel Andrea a fondé le groupe Lanterna Mágica en 1978 et se consacre également à la production de théâtre pour les enfants Mentionnons aussi le travail d’Ildeberto Gama : il est l’auteur des marionnettes de la pièce As Guerras de Alecrim e Manjerona [Les Guerres du romarin et de la marjolaine] d’António José da Silva, mise en scène par Paulo Matos, dont la création a eu lieu dans la Salle Polyvalente du programme Acarte/ Fundation Calouste Gulbenkian. La pièce a été ultérieurement montée au Théâtre national D.ª Maria II en 2006. Dans un autre contexte, Carlos Chagas Ramos a présenté la pièce História mais ao menos verdadeira dum senhor e dos seus dois criados [Histoire plus ou moins véridique d’un seigneur et de ses deux valets] lors de la première Fête du journal Avante (la fête annuelle du Parti Communiste) en 1976 avec des marionnettes en pâte à bois. En 2007, la compagnie S.A. Marionetas, associée à Puppetlink, du Royaume-Uni a mis en scène La tempête, de Shakespeare en utilisant des marionnettes de verre fabriquées par les maîtres verriers de Marinha Grande.
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Olga Neves recrée des personnages d’histoires traditionnelles qu’elle
invite dans des espaces d’exposition, et construit ainsi des environnements scéniques qui évoquent ces contes. Nous voyons ici Alice et le Chapelier Fou d’Alice au pays des merveilles ainsi que le Roi des Souris et le Cheval de la pièce Casse-Noisette La Companhia de São Lourenço e o Diabo a entamé son activité en 1973 et se consacrait à l’opéra bouffe. Ce genre avait connu son apogée au Portugal pendant le XVIIIème siècle grâce au dramaturge António José da Silva, dit « Le Juif ». Cette compagnie représentait des textes classiques portugais. Les marionnettes créées par Helena Vaz (artiste plastique et marionnettiste) frappent par leur originalité et leur mode singulier de manipulation : elles étaient endossées par les acteurs qui s’habillaient de noir lors des représentations pour que leur propre corps passe inaperçu et que l’attention se porte sur les pantins. Avec cette artiste plastique, le musicien José Alberto Gil et le ténor Fernando Serafim sont les responsables de la naissance de cette troupe itinérante qui, tout comme les marionnettistes populaires, allait de village en village en utilisant, à la place d’un pavillon démontable, une charrette-théâtre tirée par un cheval. Fondé en 1988, le Teatro de Marionetas do Porto, qui a été la première de nombreuses troupes, a joué un rôle de pionnier en donnant l’élan au théâtre de marionnettes contemporain. Le musée accueille les marionnettes de la pièce 3ª Estação [3e Saison], une création en collaboration avec Isabel Barros. L’activité de marionnettiste de Delphim Miranda, professeur et illustre conteur, se déploie dans un univers de personnages singuliers qui ouvre les
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portes à l’imagination des petits et des grands. Il est l’auteur des deux chevaliers et du dragon issus de la pièce Cavaleiros de uma Távola Qualquer [Chevaliers d’une table comme une autre]. Nyonica et Dono da Gruta [Le Maître de la grotte] sont des marionnettes créées par Jorge Cerqueira en pâte à bois. Ce professeur d’éducation à l’image a collaboré avec certaines troupes de théâtres de marionnettes, notamment O Fio d’Azeite, à Sintra. NI, est une marionnette à tringles inventée par Rui Rodrigues. Cette télévision à forme humaine est un prototype pour l’adaptation du roman de José Gomes Ferreira As Aventuras de João sem Medo [Les Aventures de Jean sans Peur]. Sr. Tempo [M.Temps], de Miguel Tepes, est une marionnette conçue pour ce même projet. C’est un vieil homme qui porte une horloge sur la tête et se sert d’une canne. Il peut fonctionner à piles ou être remonté. L’alliance de la marionnette et de la technologie était pratiquement inévitable, puisque l’art de la marionnette est ouvert à de multiples expériences et prêt à relever tous les défis! C’est dans les années 90 - qu’au Portugal tout au moins – surgissent les premières conséquences du mariage entre la marionnette et le cinéma d’animation. La publicité télévisuelle de la marque Singer qui, pour le spot « La famille Singer », utilisa des marionnettes et la technique chroma key, fit œuvre de pionnier. Le film «Desassossego» (Intranquillité), enregistré en stop motion (technique qui consiste à décomposer les scènes et à en photographier chaque moment), raconte l’histoire d’Ivan, propriétaire d’une charcuterie dont les
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clients – le vendeur de tabac, une grosse femme sensuelle, la marquise ou le vieux qui boîte - ne négligent rien pour lui rendre la vie impossible. Jusqu’au jour où Ivan décide de changer de branche et de monter un magasin de meubles.
Le film acclamé de José Miguel Ribeiro, intitulé «A Suspeita» (Le Soupçon) (1994), qui se déroule dans un wagon de chemin de fer entre
des personnages très singuliers, est un excellent exemple du remplacement du dessin d’animation par la marionnette qui lui apporte le volume.
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CONVENTO DAS BERNARDAS
Toutes ces marionnettes et masques, retirés de leur habitat, sont aujourd’hui hébergés en un endroit très particulier : le Couvent des Bernardines, situé au cœur du quartier historique de Madragoa. Sa désignation remonte à l’occupation du couvent par les religieuses de l’ordre cistercien qui y vécurent de 1653 à 1851. Une fois les nonnes parties, le couvent a reçu divers types de locataires. Ce fut tout d’abord le siège d’une école privée, le Colégio Académico de Lisboa, puis l’adresse d’environ 200 familles de pêcheurs et de poissonnières, venues de la région d’Aveiro. On raconte même que le cloître était alors utilisé pour y réparer la coque des bateaux et remailler les filets. Dans la chapelle fonctionnait le Cine-Esperança, une salle de spectacle et de cinéma. Grâce à l’intervention de la mairie de Lisbonne au tournant du millénaire, le couvent est devenu ce qu’il est aujourd’hui. Les étages supérieurs hébergent encore une trentaine de familles ; dans l’ancienne cuisine fonctionne un restaurant, A Travessa, et il y a également place pour une collectivité locale. Quant au reste de l’édifice, il accueille ce Musée qui a fait de la chapelle sa salle de spectacle et d’expositions temporaires.
Museu da Marioneta Convento das Bernardas Rua da Esperança, 146, 1200-660 Lisboa Tel: +351 213 942 810 Heures d’ouverture ouvert tous les jours de 10h à 18h sauf le lundi (Derniére admission 17:30) Entrées gratuites pour les résidents à Lisbonne les dimanches matin et jours fériés (10h-14h) Fermetures: les 1er janvier, 1er mai, 24 et 25 décembre et 31 décembre après-midi Transports publics • Autobus 706 | 713 | 714 | 727
• Train - Station de Santos
• Tramway 25 - 28
• Parking public à 400m
GPS 38.707985, -9.155776