NUMERO 39 - NUMERO 2 - Version 2

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numéro Été 2017 numero39.com

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Magazine gratuit

MARIN KONIK Un cuisinier jurassien à Matignon

RAYMOND DEPARDON Ü MON JURA INTIME DENIS FAVIER Ü SA VIE À LA TÊTE DU GIGN J.-FRANÇOIS CHARNIER Ü CRÉATEUR DE MUSÉE

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Photos : Benjamin Becker, Jack Carrot, Office de tourisme

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www.haut-jura.com mAIsOn DE L’émAIL

mUséE DE LA LUnETTE

VIA FERRATA

BIKE PARK & LUDYPARK VTT

Venez fAIRE UN A


TOUR sAVOIR-FAIRE InDUsTRIEL

BELVéDèREs

MOREZ Un territoire

100% JURA

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Voyagez dans le temps CET éTé, BAUME-lES-MESSiEURS RééCRiT SON PASSé Au cœur de l’abbaye, le logis abbatial propose au public de découvrir des vestiges de son passé millénaire encore jamais vus. Tissus de reliquaires du Xe siècle, fragments de vitraux du VIIIe, chapiteaux du XIIe, vestiges lapidaires, les écritures authentiques du Moyen-Âge… Autant d’éléments qui éclairent d’un jour nouveau une histoire qui ne cesse de se réécrire au gré des nouvelles découvertes.

Baume-les-Messieurs

Reculée . Cascades . Grottes Abbaye 4 numéro mère de Cluny 39


Site clunisien Grand itinéraire culturel de l’Europe Cité comtoise de caractère Plus beau village de France Natura 2000

baumelesmessieurs.fr numéro 5 39


www.studiolautrec.fr - 2017- Photo : ©PEXEL/picjumbo.com

www.madeinjura.media

Tout le Jura en vidéo et en son ! 6 numéro

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numéro été 2017 numero39.com

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Magazine gratuit

MARIN KONIK Un cuisinier jurassien à matignon

raymond depardon Ü mon jura intime denIS FaVIer Ü sa Vie à la tête du GiGn J.-FrançoIS CharnIer Ü créateur de musée

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résidence des Épilobes 300, chemin des Mouillettes 39220 Prémanon Tél. : + 33 (0)6 85 96 90 94 E-mail : magazine@numero39.com numéro est édité 39 par les Éditions du Jura SAS au capital de 5000 € RCS Lons-le-Saunier 538 166 166 Président : Franck Lacroix

} Rédaction Directeur de la publication et de la rédaction : Franck Lacroix Ont collaboré : Armand Spicher, Frédéric Machabert, Karine Garnier, Samuel Cordier, Vincent Edwell, Pierric Bailly, Jean-Paul Jeunet, Bernard Guillot, Nicolas Gascard, Marie Spicher (cartes). Merci à Simon Lacroix, Armand Jaillet, Hugo Perreal, Karine, Raphaël et Marin, Jean-Pierre Gros, Daniel Greusard, Marie-Christine Tarby, capitaine Jean-François Bris, Jean-Paul Myard, Nadine Girod. } Publicité Tél. : + 33 (0)6 24 85 36 20 Merci à nos partenaires annonceurs. } Distribution Liste complète des points sur www.numero39.com www.numero39.com facebook.com/Numero39 La rédaction n’est pas responsable de la perte ou de la détérioration des textes et photos qui lui sont adressés pour appréciation. La reproduction, même partielle, de tout matériel publié dans le magazine est interdite. Impression : Roto Champagne Création : juin 2016 Dépôt légal : juin 2017 ISSN : 2495-3393 Photo de couverture : Numéro 39

Jura

des champs O

ui, nous avons fait de belles rencontres. Dans l'année qui vient de s'écouler, nous en avons provoquées quelques-unes, comme en ont l'habitude les journalistes ; les autres, en définitive majoritaires, sont venues à nous. Un général cinq étoiles qui a été patron du GIGN et directeur de la Gendarmerie nationale, un cuisinier qui officie dans l'un des palais de la République, un entraîneur de coureur cycliste — pas n'importe lequel, le meilleur que compte aujourd'hui la France —, un antiquaire également reconnu par ses pairs comme l'une des références mondiales de sa spécialité, un transformateur de cacao qui régale les gourmands jusqu'à l'autre bout de la planète... La liste est longue. Il y a aussi Jean-François Charnier à qui l'on a confié les collections d'œuvres du futur Louvre Abu Dhabi, aux Émirats Arabes Unis. C'est à lui que revient d'imaginer ce que doit être un musée du XXIe siècle. Tous ont un point commun. Ils sont Jurassiens. De naissance ou de filiation. Cette terre d'où ils sont originaires, de laquelle ils se réclament, ils l'ont quittée, comme si, pour s'accomplir, il leur avait fallu s'éloigner de la demeure familiale. Mais ils ne sont pas partis les poches vides, ils ont emporté avec eux des valeurs qui ont été des balises précieuses au moment où ils ont eu à faire des choix. Leurs parcours extraordinaires se sont bâtis sur cet héritage. « Nul ne guérit de son enfance », chantait Ferrat. Le Jura qui les a nourris est un Jura des champs. Tous ont poussé dans les campagnes, tous ont planté leurs racines dans les villages qui dessinent la géographie de ce département de l'Est de la France. Cette ruralité de leurs origines n'est pas le fruit du hasard. Elle témoigne d'une réalité dont on a cru, sans doute à tort, qu'elle constituait

un handicap. Combien de fois n'a-t-on pas entendu qu'il manquait à ce territoire une grande ville, une agglomération capable de rivaliser avec Bordeaux, Grenoble ou encore Strasbourg, un phare citadin suffisamment élevé et puissant pour éclairer l'océan paysan qui l'entoure. Ceux qui regrettaient cette indéniable et fatale absence sous-entendaient qu'aucune graine de champions ne pouvait sortir de cette terre. Comme si les belles plantes ne poussaient que dans le béton. « Avec le Jura, c'est peut-être la première fois où je me suis dit : c'est rural et c'est beau, c'est élégant. [...] S'il existe une quintessence de la France, elle est là », nous confie le grand photographe et documentariste Raymond Depardon. La fidélité et le respect ont fait le reste. Fidélité à une histoire qui s'est écrite à force de travail et de luttes contre un environnement longtemps resté hostile. Respect de ce que l'on est au plus profond de soi, quitte à bousculer les idées reçues, les convenances, les autorités, l'évidence. Les mots de l'écrivain Pierric Bailly, qui rejoint l'équipe de Numéro 39, en sont une belle illustration. Les vies de Denis Trossat, figure emblématique du ballon rond, nous délivrent un dernier message. Non, il n'est pas obligatoire de s'exiler pour réussir son ascension de l'Olympe. L'ancien trésorier de la puissante fédération française de football pourrait vous le dire. Ce n'est pas l'air que l'on respire qui est le plus important. En tout cas, il ne fait pas tout. En vérité, les plus belles destinées naissent de ce drôle de mariage entre les rêves les plus fous que l'on a dans la tête et ce calcaire caractéristique du Jura qui porte nos carcasses. On ne s'élève que sur du solide.

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Sommaire Paul-Émile Victor après sa traversée du Groenland d'Est en Ouest, en juillet 1936. Cette photo a été prise à Ammassalik.

Dans son bureau du 42e étage d’une grande tour parisienne, Denis Favier a mis ses compétences au service d’une grande entreprise internationale.

Jura Dossier

Jura Itinéraire

Les héritiers de Paul-émile

Favier Général 5 étoiles Denis

Victor

et Jurassien

Patron à deux reprises du GIGN, directeur général de la gendarmerie, il a été de tous les coups durs depuis près de trente ans. Mais c’est dans le Jura que Denis Favier a puisé les valeurs qui ont guidé sa prestigieuse carrière. Ü

b Louis Monier/rue des Archives

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maternel, également des agriculteurs dans le secteur d’Orgelet. Pourquoi s’attacher à ces détails ? Parce qu’ils ont façonné la personnalité du gamin qui va passer une partie de son enfance dans la ville-préfecture, subjugué par son père militaire : « Quand je suis né, mon père était en Algérie… J’étais enfant et je voulais déjà être soldat, je n’ai jamais rien voulu d’autre. » De ces années-là, Claude Mathieu, de Pannessières, ami proche, en dit un peu plus : « Le papa de Denis était militaire dans l'armée de terre, il a été blessé en Indochine, en Algérie. Il a été décoré de la Légion d’Honneur au feu. C’est lui qui l’a orienté vers la gendarmerie. Il est mort en 1983 en faisant du ski dans le Risoux quelques semaines avant que Denis épouse sa Ü

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Si Philippe Vichot a fait de sa galerie l’une des plus cotées de la capitale, ce n’est pas un hasard. Le Jurassien de Lons-le-Saunier a appris dès son enfance à repérer le bel objet en suivant sa mère dans ses expéditions.

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Vichot

de

Denis

Trossat L'histoire du football dans le Jura ne peut être racontée sans qu'un chapitre entier soit consacré à Denis Trossat. Mais on aurait tort de ne voir en lui qu'un passionné de ballon rond. L'homme a su mener en parallèle plusieurs vies, aussi riches les unes que les autres. Ü

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Philippe

Les vies

Deux choses ont marqué au fer rouge la vie De PhiliPPe vichot : les chevaux et les antiquités. la Première relève Du Père, ils ont bercé son enfance : « mes parents habitaient lons-le-saunier, rue du solvan. mon père était éleveur et faisait du négoce. il avait des écuries et une cinquantaine de chevaux presque en centre-ville. Je montais tous les jours. » la seconde est liée à sa mère : « elle était antiquaire, elle aimait les beaux objets et j’ai hérité de sa passion. » cette existence bascule au décès d'un papa parti lorsqu'il n'a que dix ans. veuve, mme vichot vend les écuries lédoniennes pour ouvrir une boutique dans une maison à savagna, à deux kilomètres : « Je l’accompagnais pour chiner, j’ai beaucoup appris en la suivant. » collège rouget-de-lisle, lycée Jean-michel, baccalauréat. si son chemin semble tracé, le jeune homme ne se voit pas exercer le même métier que maman. il entre en classe préparatoire de vétérinaire, à Paris. Dans la capitale, il rencontre celle qui deviendra son épouse, la mère de ses trois enfants et sa collaboratrice durant de longues années. après le temps de l’armée — il termine comme moniteur de tir au 44e ri basé à lons — il ne reprend pas ses études, mais rejoint la boutique familiale : « Je faisais du porte à porte dans tout le haut-Jura, je cherchais les meubles en bois naturel, les objets d’art populaire. le soir, je rentrais tard et je m'occupais des chevaux qu’on avait conservés. les journées étaient longues, mais passionnantes… » Ü

Dans le Carré des antiquaires, à Paris, il a l’une des plus belles galeries. Depuis trente ans, Philippe Vichot, Jurassien des environs de Lons, est un spécialiste mondial des meubles du XVIIIe siècle. Ü

Numéro deux sur la liste de Jacques Rousselot, candidat à la présidence de la Fédération française de football, Denis Trossat trésorier depuis juin 2011, a perdu en mars dernier les élections. Il y a six ans, il était devenu le grand argentier de la puissante FFF.

Mon Jura à moi

Gentleman Antiquaire

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Un peu de fraîcheur pour les randonneurs sur la plage de Chancia.

Originaire de Villefranche-sur-Saône, Raymond Depardon connaissait le Jura en voisin, avant de parcourir sa moyenne montagne, à partir de 2006, avec son camping-car et sa chambre photographique sur pied.

Jura Rencontre

Raymond DEPARDON Mon Jura intime

Jura Balades

Vue sur

lacs 40 FRANÇOIS BERNARD 48 MARIN KONIK 54 JEAN-FRANÇOIS CHARNIER 66 PATRICE CHAPON 78 PIERRIC BAILLY 82 NICOLE BEYSSON 8 numéro

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Julien lienard/Getty imaGes

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Les lacs jurassiens sont tous différents, mais ils ont en commun une beauté sauvage, une sorte de force et de paix tout à la fois. Les découvrir et les sillonner est toujours un moment de communion intense. Ü

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Le photographe est tombé amoureux du Jura. Il l'a immortalisé lorsqu'il a dessiné avec ses clichés le « portrait de la France ». Aujourd'hui, il aime venir en vacances dans cette moyenne montagne qui n'a rien perdu de sa ruralité. Ü

86 JOSIANE BERTOLINI 90 RENÉ ALLARD 94 FLORA PERNELLE 98 HENRI MAIRE 116 LES « VICTOR GROS » 130 JEAN-PAUL JEUNET

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IMPRessIOnnAnt… PAR LA fORCe Du RegARD, PAR LA PRestAnCe, PAR Le tIMbRe De sA vOIx, PAR Cette IMPRessIOn De fORCe et De CALMe entReMêLés. Rencontrer Denis favier, c’est poser le pied sur une autre planète, avoir la certitude que tout est simple et maîtrisé, dans un environnement empreint de doutes et d’incertitudes. Il y a 58 ans, naissait à Lons-le-saunier, un petit favier que sa mère suzanne et son père gérard appelèrent Denis. C'était un pur produit jurassien, de ce Jura rural et dur à la tâche. Dans son arbre généalogique, on croise des grands-parents paternels qui exploitent une ferme dans la région de Cousance, et du côté

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Cent dix ans après sa naissance, l'explorateur jurassien n'en finit pas d'inspirer. Numéro 39 a rencontré plusieurs de ses disciples, parmi lesquels des compatriotes. Ü


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Premier matin de l'année 2017 et déjà un somptueux spectacle sur le Revermont Jurassien. Brume envoûtante et givre sur le château du Pin. Une véritable maquette sculptée par les éléments. Cliché : Nicolas Gascard

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Un fameux soir de printemps, la couverture nuageuse au-dessus de la collégiale Notre-Dame de Dole est l'instant idéal pour le photographe qui travaille en pose longue. Cliché : Nicolas Gascard

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Au cours d'une fin d'après midi d'automne, un orage de giboulées éclate sur le vignoble jurassien non loin du village de L'Étoile. L'évacuation du rideau de pluie et de grésil engendre une lumière de feu entre ciel et terre. Cliché : Nicolas Gascard

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Sur les hauteurs de La Pesse, entre Jura et Ain, La borne au Lion marque la frontière depuis 1613 dans le massif du Jura. D'un côté, la Franche-Comté ; de l'autre, le Bugey. Cliché : Vincent Edwell

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Elsa Jeanvoine Meilleur maître d'hôtel de France

À 31 ANS, ELSA JEANVOINE, MOITIÉ JURASSIENNE PAR SA MÈRE ET MOITIÉ DOUBISTE PAR SON PÈRE, a décroché, à la fin de l’hiver, le titre de meilleur maître hôtel de France. Elle évolue dans l’équipe de François Moureaux — autre Jurassien — qui tient le restaurant de la Poutre en été à Bonlieu et l’Azimut à Courchevel en hiver. Ce chef a, lui, été gratifié d'une étoile au Michelin en 2010 pour sa cuisine dans son restaurant de Haute-Savoie, mais encore rien dans le Jura. Elsa Jeanvoine a rejoint François Moureaux il y a dix ans et ce titre, elle l’a vécu comme un défi : « Savoir choisir une composition florale, expliquer une carte, proposer le vin qui convient, sélectionner la musique d’ambiance, ce sont des détails qui font qu’une soirée est réussie ou pas ! » La jeune femme voit aussi dans ce trophée la défense des « petits » : « Ils constituent l’essentiel des établissements en France. Ce n’est pas parce qu’ils sont peu connus qu’ils ne font pas de l’excellent travail. » Cerise sur le gâteau, la clientèle félicite la lauréate, surtout dans le Jura : « Les gens veulent savoir, ils se sentent concernés. » François Moureaux vit plutôt bien cette expérience : « Cette distinction apporte à l’établissement une certaine renommée. Les gens ont entendu parler de ce titre et ils viennent voir ce qu’Elsa fait de si particulier. »

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Le dessert, c’est son truc

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Enzo Franzi, jeune pâtissier de 22 ans, originaire de Besançon, a rejoint il y a huit mois le chef étoilé, Meilleur Ouvrier de France, Romuald Fassenet au château du Mont Joly, à Sampans. Cet hiver, il est devenu champion de France junior de dessert. Six mois de travail intensif, mais le jeu en valait la chandelle : « J’ai gagné avec mon dessert Lemon Ice que Romuald Fassenet avait mis sur sa carte depuis plusieurs mois déjà. » Cet été, Enzo va rejoindre la capitale et si possible… un palace.

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C’est la suite d’une drôle de rencontre autour d’un verre, en novembre 2015, entre Jean-Luc Mélenchon, le politique, et Claude Buchot, le viticulteur de Maynal. Au Salon du vin bio à Paris surgit l’idée d’une cuvée spéciale. Elle s’appellera « La Rebelle » et se déclinera en rouge et en blanc, le premier élaboré par Valentin Morel de Poligny, le second par Claude Buchot sur la récolte de 2015. Élevée en cuve pour donner davantage de minéralité, elle est mise en bouteille en juin 2016 et, depuis, se vend essentiellement sur le site : www.jlm2017.

Le retour de Lamy Chappuis

b FRANCK SEGUIN/PRESSE SPORTS

La clientèle jurassienne aime venir découvrir le métier d'Elsa.

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Jurassiens

La cuvée de Mélenchon est jurassienne

Le Jurassien sort de sa retraite pour faire son retour à la compétition. Le champion olympique de combiné nordique à Vancouver tente un retour à l'approche des prochains JO de PyeongChang. La carrière du Bois d'Amonier était en sommeil depuis mars 2015.


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b DR

Jurassiens

Après plusieurs collaborations à des revues, la Jurassienne vient de publier son premier livre pour enfants.

Mathilde Poncet une sacrée Chipie NÉE À SAINT-CLAUDE, ÉLEVÉE DANS LES HAUTES COMBES, cette Haut-Jurassienne de 23 ans a choisi la voie du dessin et des arts graphiques pour mener sa vie. Après un projet de BD pour adultes en quinze pages intitulé À l’origine publié dans la revue Citrus, la réalisation d’un poster Bas les Masques pour le magazine Biscotto, la publication d’un travail sur l’ours et son montreur (son sujet de diplôme en master aux Beaux-Arts de Metz) dans la revue Etapes et d’autres contributions au journal Erratum, Mathilde Poncet vient de publier son premier vrai livre rien qu’à elle. Il s’appelle Chipie décolle et raconte l’histoire d’un chat qui fuit la terre avec une fusée et va de planète en planète. Un dessin illustre chaque planète sur une double page et chaque planète — qui tire son nom d’un scientifique existant ou ayant existé — a son propre univers où se mêlent des êtres et des animaux étranges. C’est une sorte

de cherche et trouve : le lecteur doit retrouver Chipie et sa fusée au milieu des pages. J’y ai ajouté quelques références aux adultes avec, par exemple un marsupilami… » Le livre, publié aux éditions L’Agrume, s’adresse aux enfants dès l’âge de trois ans. Mais plus que du scénario, il tire son originalité des mondes recréés par la jeune illustratrice : « J’aime beaucoup la mythologie et les légendes m’inspirent dans mon travail, je m’intéresse également beaucoup à l’environnement, à la nature. » Actuellement, Mathilde Poncet, qui termine une année de service civique à la Fraternelle de Saint-Claude où elle conduit des ateliers de sérigraphie, prépare déjà d’autres projets parmi lesquels l’affiche du prochain festival des arts de la rue de Lavans-lès-Saint-Claude et celle de l’Abonde de Lamoura. À suivre. Pwww.mathildeponcet.com

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Cinquante ans de télé à travers la vie de Michel Drucker

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QUI NE CONNAÎT PAS MICHEL DRUCKER ? FIGURE EMBLÉMATIQUE de la télévision française, il anime, chaque semaine, Vivement dimanche prochain. En plus de cinquante ans de carrière, l'animateur a tout connu : l'ORTF auquel ont succédé TF1, Antenne 2 et FR3, la privatisation de la Une et la création des chaînes privées, la TNT... De Tilt Magazine à Studio Gabriel, en passant par Champs-Élysées, il a su mener sa barque pour ne jamais quitter le petit écran. Ce périple n'a pas toujours été un long fleuve tranquille. Dans l'unique biographie consacrée à la vedette, le Jurassien Franck Lacroix [directeur de publication de Numéro 39, N.D.L.R.] dresse le portrait d'un homme plus complexe qu'on ne l'imagine et, à travers lui, écrit l'histoire passionnante et épique de la télévision depuis un demi-siècle. PFranck Lacroix, Michel Drucker - Une vie, Mareuil Éditions, 2016, 19,90 €.


LA REGION, PARTENAIRE DES FESTIVALS

©Crédits photos : Lynko/Festival de la Paille

PROMOUVOIR LA FRATERNITE EN SOUTENANT LA CULTURE

www.bourgognefranchecomte.fr Retrouvez-nous sur

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Avocates Maude et Karine

réinventent leur métier MAUDE LELIÈVRE ET KARINE DE LUCA SONT AVOCATES AU CABINET GRANVELLE spécialisé dans le droit familial à Lons-le-Saunier. Autrement dit, elles travaillent beaucoup sur les conflits familiaux : divorces, séparations… Leur expérience les a amenées à observer que la démarche des clients vers un avocat est vécue de manière compliquée et souvent désagréable, même quand, au final, le verdict leur est favorable. Pourquoi ? Maud Lelièvre répond : « Les gens ont du mal avec la procédure, ils pensent que les avocats ne les entendent pas dans leur souffrance. Nous avons donc repensé notre manière de travailler à travers l’organisation du cabinet, la création de fiches pratiques, la mise en place de jeux de rôles et même la diffusion de vidéos sur YouTube sur le ressenti des enfants… Il s’agit de remettre l’humain au cœur de notre travail. » L’initiative née il y a deux ans a fait mouche. Les deux avocates lédoniennes ont participé au Prix national de l’innovation où elles ont terminé deuxième du Prix du Public : « Cette reconnaissance a donné du sens à notre métier, nous sommes libérées et les gens s’intéressent à ce qu’on fait. » Prochaine étape, pourquoi pas la création d’une forme de coopérative regroupant tous les avocats tentés par l’expérience.

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Opticien... producteur

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Opticien à Lons-le-Saunier pour le réseau Atol, Frédéric Carret a décidé de financer lui-même un film de 25 minutes sur les malvoyants : « Rien n’est fait au niveau national pour prévenir les gens que ce handicap peut les toucher un jour, surtout la DMLA qui est devenue un vrai sujet de santé publique. » Le projet qui se présente sous la forme d’une série d’interviews de malvoyants, mais aussi de professionnels de la vue (opticiens, ophtalmologues, orthoptistes, ergothérapeutes…) et d’associations aboutira à l’automne. L’idée : organiser à dans la ville-préfecture du Jura un rendez-vous national pour amener les pouvoirs publics et les professions concernées à prendre en compte l’information nécessaire du public.

b MARION HERNOUT

Nicolas Gascard, le livre

Maude Lelièvre

b PASCAL REGALDI

Jurassiens

Karine de Luca

Depuis vingt ans, armé de son appareil photo, le Jurassien Nicolas Gascard traque, de jour comme de nuit, les phénomènes naturels : aurores boréales, éclairs, tempêtes saisis un peu partout dans le monde … Une fascination qui l’a amené à réunir ses plus beaux clichés dans un ouvrage de 160 pages au titre prometteur Atmosphère publié aux éditions Slatkine (préface de Vincent Munier). Un magnifique voyage au cœur de la force, du mystère et de la beauté. PNicolas Gascard, Atmosphère, éditions Slatkine, 2016, 59 €.

Pierric Bailly à la recherche du père Pour son quatrième ouvrage en neuf ans, Pierric Bailly abandonne la fiction et se met à nu à la recherche de ce père qui s’est tué en 2016 lors d’une chute dans les bois de Revigny. L’homme des bois n’est pas un hommage, c’est une recherche sans concession, mais avec une énorme pudeur du pourquoi de la mort et aussi du comment. Après Polichinelle, Michel Jackson, L’étoile Hautacam, L’homme des bois est sans doute l’œuvre la plus intime de ce jeune auteur jurassien qui n’en finit pas d’étonner. PPierric Bailly, L’homme des bois, éditions POL, 2017, 10 €.


Tour de France :

Le Conseil départemental fait vibrer le Jura

L’ É TA P E M A D E I N J U R A

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8/07 TOUR DE FRANCE

ARBOIS

Belvédère du Fer-à-Cheval

MONTROND CHAMPAGNOLE MONT-SUR-MONNET

SONGESON

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95

GRAND PRIX DE LA MONTAGNE SPRINT RAVITAILLEMENT

Côte de la Combe de Laisia-Les Molunes

187,5 Distance

101 105 108 119 122 129 138 143 148 152 159 164 170 175 178 183

en Km

Le Manon LAMOURA

73,5

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STATION DES ROUSSES

45 53 63

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CHOUX VULVOZ LARRIVOIRE SAINT-CLAUDE L’Essard L’Évalide

37

BONLIEU

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Saint-Maurice

13

DOLE

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MONT-SOUS-VAUDREY

0

Côte de Viry

3

S

AUGERANS

1300 1200 1100 1000 900 800 700 600 500 400 300 200 100

PRÉNOVEL LES PIARDS SAINT-LUPICIN LAVANS-LES-SAINT-CLAUDE CHASSAL

Altitude en m

Col de la Joux

Srpint de Montrond

DOLE STATION DES ROUSSES 187 km

L

e 8 juillet, le Tour de France fera vibrer le Massif jurassien. En effet, pour la deuxième année consécutive, la plus grande et prestigieuse épreuve de cyclisme du monde fera une longue escale dans le Jura, avec une journée entière consacrée au territoire jurassien, grâce à l’engagement du Conseil départemental et à la volonté de Clément Pernot, Président du Département. Rencontre avec un amoureux du vélo et de son territoire.

1. Vous êtes à l’origine de la venue du Tour de France dans le département du Jura et ce, deux années de suite. Pouvezvous nous parler de la genèse de cette relation privilégiée avec les organisateurs ? J’ai souhaité dès mon élection à la tête du Conseil départemental, m’investir dans les relations entre l’Association des Départements de France et Amaury Sport Organisation, qui collaborent chaque année pour la bonne mise à disposition des routes, par convention de partenariat. Le Président de l’ADF m’a ainsi fait l’honneur de me nommer référent de l’ADF sur cette question, rejoignant aussi ma passion pour le cyclisme en général et le Tour de France en particulier. J’ai ainsi pu travailler avec les équipes d’ASO et son Président, Christian Prudhomme, alors se sont manifestées des concordances de vues et une réelle amitié. C’est ainsi qu’il m’avait demandé en 2016 de penser à un départ jurassien pour une étape franco-suisse. A cette occasion, Christian a pu voir l’extraordinaire engagement des Jurassiens et de mes équipes dans ce départ à Moirans-en-Montagne et ce jour-même, nous avons convenu de renouveler l’opération, dans la voiture que nous partagions pour suivre les coureurs. C’est donc une marque de confiance et d’amitié.

2. Vous avez décidé du parcours de cette étape. Pouvez-vous nous en parler ? J’ai en effet conçu ce parcours entièrement jurassien comme une visite idéale de notre territoire. L’enjeu est que beaucoup de

Jurassiens puissent profiter du parcours et que les centaines de millions de téléspectateurs à travers le monde puissent découvrir les richesses du Jura, du Nord au Sud, n’oubliant pas les villes ayant postulé auprès d’ASO. Ainsi, j’ai souhaité que cette étape parte de Dole, capitale historique de la Franche-Comté et arrive aux Rousses, station chère aux amoureux des sports nordiques, mais qu’elle traverse aussi Arbois et son vignoble, le plateau de Champagnole, le Pays des Lacs, Saint-Claude, capitale du Haut-jura et symbole de nos traditions et savoir-faire. J’ai également voulu faire passer cet évènement dans des lieux ou des communes, où cela n’avait pas été pensable auparavant, ou encore des lieux emblématiques comme la côte de la Poyat à Saint Claude. C’est donc tout le Jura, dans sa diversité et ses richesses géographiques, culturelles, historiques et économiques que j’ai voulu valoriser.

3. Qu’attendez-vous de cette étape pour le Jura ? Je souhaite que les Jurassiens et tous les habitants du Massif viennent encourager le peloton, dans un esprit de fête et de fierté. J’ai déjà invité les Communes traversées à proposer des animations et je sais que les entreprises, les associations et les clubs répondront présent. Toutes les initiatives sont les bienvenues. Nous savons que le Jura est une Terre de Vélo. Aussi, j’attends des retombées économiques et touristiques, bien sûr, mais j’attends surtout que les Jurassiens s’associent, de la manière qu’ils voudront, à ce qui sera à nouveau une grande fête populaire. Infos : www.letour.jura.fr

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Romain Bardet, le numéro un du cyclisme français, et son entraîneur, le Jurassien Jean-Baptiste Quiclet posent pour Numéro 39.

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Jura Couverture

L'homme dans l'ombre de Romain

Jean-Baptiste Quiclet, directeur de la performance de l’équipe cycliste professionnelle AG2R La Mondiale est l’un des hommes de confiance de Romain Bardet. À 32 ans, il possède un parcours singulier. Du massif du Jura jusqu’au podium du Tour de France, retour sur une trajectoire atypique. Ü

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b FRÉDÉRIC MACHABERT POUR NUMÉR0 39

Bardet


H

2016. HUIT GAILLARDS QUI NE FONT QU’UN. SOUDÉS COMME LORS DE CES TROIS DERNIÈRES SEMAINES. Pour rien au monde ils n’auraient voulu louper ce moment. Face à eux, leur chef de file, leur « pote » qui savoure un instant d’éternité, une deuxième place au Tour de France. En bas de l'estrade, on s’enlace. Les façades se craquellent, les larmes s’échappent. En haut, la solennité de l’instant sur la plus belle avenue du monde, les Champs Élysées. Romain Bardet est installé à la droite de Chris Froome, épilogue d’une Grande Boucle qui a basculé 48 heures plus tôt sur la route de Saint-Gervais, où le longiligne Auvergnat a remporté l’étape, inscrivant son nom dans la liste des grands de la planète vélo. Les caméras du monde sont braquées sur le podium de cette 104e édition de la plus grande course cycliste du monde. Bardet, perdu dans ses songes, aperçoit un peu à contretemps ses compagnons de route. La cérémonie se termine. Peu importe le protocole, Romain Bardet rejoint ses coéquipiers. Et tombe dans les bras d’un homme : Jean-Baptiste Quiclet. Le Jurassien de 32 ans est l’entraîneur du leader français. Alors que certains de ses confrères revendiquent plus de deux décennies d’expérience, lui a réussi le pari un peu fou de gravir les échelons du cyclisme mondial en trois saisons. Il est aujourd’hui le directeur de la performance de l’équipe cycliste professionnelle AG2R La Mondiale.

LE DÉCLIC À MÉTABIEF L'homme possède le parcours classique d’un passionné de vélo. Originaire de Voiteur, il débute sous les couleurs de Bletterans, « avec un personnage illustre du coin, Roger Chevallier ». Le Franc-Comtois pur souche est fils d’un couple originaire de Haute-Saône : « Je ne suis pas issu d’une famille de sportifs. Il y a bien mon oncle, Gilles Nachin, originaire de Vesoul, qui a été un bon amateur sur la route et l’un des initiateurs du VTT en France. C'est lui m’a donné la passion du vélo. » Le déclic se produit en 1993, lorsque la station de Métabief accueille le quatrième championnat du monde de l’histoire du VTT. Le garçon alors âgé de huit ans est sur le

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L'équipe AG2R-La Mondiale a testé plusieurs étapes du Tour de France 2017, dont celle qui emprunte les routes de l'Ain.

bord du parcours pour encourager un tonton qui, à ses yeux, a tout du héros. L'histoire est en marche. Il rejoint Jura Cyclisme comme compétiteur, mais se dirige assez vite vers le coaching. Paradoxalement, l’homme qui travaille aujourd'hui avec le meilleur professionnel tricolore, Romain Bardet, connu pour être un des coureurs les plus méticuleux du peloton, est à ce moment-là bien loin d’avoir intégré tous les paramètres liés à la performance : « À 20 ans, je n’avais pas forcément conscience de tout ce que l’on pouvait mettre en place pour être compétitif. J’ai découvert cela en première année de faculté. » Rapidement, une première rencontre va se révéler déterminante pour la suite de sa carrière : Yvan Clolus. Cet autre Jurassien expatrié à Ornans, dans le Doubs, le convie dès 2005 à un stage avec l’équipe de France juniors de cross-country. « Cette expérience m’a donné le goût de l’encadrement et je me suis investi avec lui. J’ai ensuite été sollicité sur les groupes route. » Pour son aîné, « J.-B. est un formateur. Il a su s’imposer par ses connaissances et son expertise. Dans le monde dans lequel il évolue, si tu n’as pas été professionnel, on a tendance à ne pas te prendre au sérieux. Lui n’a pas fait douze fois le Tour de France, mais on s’en moque un peu, il a réussi à se faire une place… » Aux côtés d'Yvan Clolus, le Jurassien travaille pour le Comité régional de Franche-Comté, puis intègre l’encadre-


MOIRANS-EN-MONTAGNE

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PARMI LES GRANDS Pour le Franc-comtois, c’est le début d’une nouvelle vie. Adieu le massif du Jura, direction l’Ouest de la France, où il restera quatre ans. Avec lui, il embarque les siens en Bretagne pour se retrouver au plus près du service course de son nouvel employeur : « J’avais l’ambition de travailler chez les professionnels, c’est là qu’il y a le plus de moyens. Ce projet partait de zéro, il y avait tout à faire », raconte-t-il. L’équipe participe à trois Tour de France entre 2011 et 2013, avant de disparaître. Entre-temps, elle était devenue Saur-Sojasun, puis Sojasun. De cette expérience, Jean-Baptiste Quiclet garde une vraie reconnaissance, celle de la première chance : « J’ai fait mes classes. Il y avait un échange mutuel enrichissant… » Si l’homme a désormais la tête dans l’univers professionnel, il garde les pieds solidement ancrés sur son Jura natal. « Il reste un mec simple qui n’a pas vraiment pour habitude d’oublier qui il est et d’où il vient », souffle Yvan Ü

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COMMUNAUTÉ DE COMMUNES JURA SUD

ment du nouveau pôle France, situé à Besançon. Mais c’est en 2009 que sa carrière prend un nouveau tournant. Sur les conseils de Bernard Bourreau, ancien sélectionneur national, Jean-Baptiste Quiclet rencontre Stéphane Heulot. Ce dernier, champion de France en 1996, cherche un entraîneur pour son groupe professionnel, l'équipe Besson Chaussures.

© 2017 Mattel. Tous droits réservés. Reproduction avec l’aimable autorisation de Mattel.

b FRÉDÉRIC MACHABERT POUR NUMÉR0 39

RENDEZ-VOUS EN ENFANCE


Romain Bardet

Je me souviens de ma rencontre avec Jean-Baptiste Quiclet. Il était tout nouveau dans l’équipe AG2R La Mondiale. Avant de débuter ma troisième année professionnelle, je cherchais à approfondir mes connaissances dans le domaine de l’entraînement. Je savais qu’il avait suivi un parcours scientifique et je voulais me développer dans ce domaine. Avant de commencer à travailler ensemble, nous avons échangé. J’ai trouvé une véritable oreille pour m’écouter. Et c’est sur cette base qu’a débuté notre relation. Aujourd’hui, je sais que je travaille avec quelqu’un de compétent, toujours disponible et à l’écoute des athlètes qu’il entraîne. Il est passionné par son métier, par le cyclisme. Même si JB n’a pas la même expérience que certains entraîneurs, cela n’a jamais été un frein. Ce qui me plaît, c’est que l’on apprend et l’on avance ensemble. Je préfère cela à quelqu’un qui pourrait dire la messe et que l’on écoute religieusement. Avec lui, nous sommes dans l’apprentissage mutuel. Nous travaillons beaucoup lors des stages ou sur certaines séances spécifiques. Même s’il est absent en course, cela ne l’empêche pas d’être en contact avec moi chaque jour. Il a besoin de cette distance pour garder une certaine analyse... et cela me va bien.

Clolus, qui porte un regard bienveillant sur son ancien élève. Fin 2012, Alexis Vuillermoz [lire Numéro 39 n° 1] envisage de changer définitivement de vie. Le garçon de Chevry, près de Saint-Claude, médaillé mondial en VTT chez les moins de 23 ans, vient de louper sa qualification pour les Jeux olympiques de Londres. Et pour couronner le tout, il doit chercher un nouvel employeur. Ce passionné de finance envisage sérieusement sa reconversion professionnelle dans l’univers bancaire. Mais Jean-Baptiste Quiclet qui l’a vu débuter au club du Plateau du Lizon, n’a pas perdu le garçon de vue. Sans être réellement proche du Sanclaudien, il tente un pari : « Alexis n’avait pas vraiment de référence sur la route et, dans sa situation, il avait même un peu arrêté de s’entraîner. J’ai convaincu Heulot de le prendre à l’essai en stage. » Quelques mois plus tard, sous les couleurs de Sojasun, Alexis Vuillermoz court le Tour de France en 2013, la 100e édition : « Il se fai-

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sait remarquer avec des échappées », rappelle Yvan Clolus qui entraîne le garçon depuis 2005. Quatre années après ce pari, le jeune homme est aujourd’hui l’un des cadres de l’équipe AG2R La Mondiale et a remporté une étape du Tour en 2015. Après six victoires chez les professionnels, Alexis Vuillermoz est considéré comme l’un des meilleurs puncheurs. Il n’a pas oublié le précieux coup de main : « Si je suis là aujourd’hui, c’est clairement grâce à Jean-Baptiste. C’est lui qui, en 2012, s’est engagé personnellement pour que l’on me donne ma chance. Aujourd’hui, je lui fais une confiance absolue. Cela fait près de quinze ans que l’on se suit et je sais ce que je lui dois. »

LA RENCONTRE AVEC BARDET Tous deux font donc face à l’arrêt de Sojasun fin 2013. Pour l'entraîneur, les choses sont compliquées. Les diffé- Ü

b ALEX MARTIN/PRESSE SPORTS

« On apprend ensemble »


Créateur et distributeur de pipes, Chacom reste aujourd’hui la plus grande marque française, sachant allier tradition, création et innovation. Forte de son savoir-faire, ses pipes sont vendues à travers plus de 40 pays.

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www.pipechacom.com

’est en 1856 que Saint-Claude devient la capitale mondiale de la pipe de bruyère et la Maison Comoy devient le premier fabricant de pipe de la ville. En 2016, après plus d’un siècle passé dans le quartier pipier du Faubourg Marcel, l’entreprise quitte son ancienne usine pour s’installer à quelques kilomètres, dans un bâtiment récent. Ce nouvel emplacement permet l’inauguration d’un magasin d’usine et d’un musée, où se mêlent habilement tradition et modernité, et où se raconte l’histoire d’une industrie emblématique du Jura, dont l’activité perdure et rayonne dans le monde entier. Avec un savoir-faire hors du commun qui n’a pratiquement pas changé depuis deux siècles, l’entreprise de

pipes Chacom s’est forgé une renommée internationale. De par les magasins spécialisés en pipes et accessoires fumeurs, les buralistes et son site Internet pipechacom. com, la marque propose une large gamme de pipes dans plus de 40 pays, ainsi qu’un très grand choix d’articles fumeurs pour pipe, cigare et cigarette. Avec pour objectif principal la qualité, l’entreprise commercialise également des marques étrangères comme les pipes et accessoires Peterson of Dublin, les pipes italiennes Brebbia et les danoises Neerup. Forte de son succès, Chacom ressent depuis peu un phénomène où une clientèle plus jeune s’intéresse aux produits de l’entreprise et à l’art de vivre qui en découle.

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b FÉRÉDRIC MONS/PRESSE SPORTS

rents contacts avec les équipes cyclistes françaises n’aboutissent pas. Il va jusqu'à envisager une nouvelle orientation professionnelle : « Je pensais passer des concours pour devenir cadre fédéral. » Alors que les cyclistes ont déjà repris le chemin de l’entraînement, une porte finit toutefois par s’entrouvrir en plein hiver : « En décembre, les dirigeants d'AG2R La Mondiale m’ont invité sur un stage. Ils m'ont gardé, mais j’avais six mois pour faire mes preuves. » C’est à cette période qu’il fait la connaissance de Romain Bardet. L’Auvergnat vient de boucler sa deuxième saison professionnelle et compte déjà une victoire au classement général au Tour de l’Ain et une quinzième place au Tour de France pour sa première participation. Bref, le coureur est

Jean-Baptiste Quiclet et son protégé auvergnat lors du dernier Tour de Catalogne.

plus que prometteur ! « Personnellement, je ne le connaissais pas en arrivant dans l’équipe. Le deuxième jour avec l’équipe, je le vois débarquer dans ma chambre. Il m’a posé tout un tas de questions. Il avait besoin d’échanger sur pas mal de points concernant l’entraînement. Depuis, on a tissé un lien et une confiance mutuelle. »

EN DEHORS DE LA MÊLÉE Le binôme semble sur les rails. Là encore, tout va très vite. Pour le groupe français, la saison 2014 est à marquer d'une pierre blanche avec la victoire par équipes au Tour d’Italie, puis au Tour de France. En juillet, sur les Champs Élysées, Jean-Christophe Péraud finit deuxième du classement général, Romain Bardet sixième. L’équipe AG2R La Mondiale entre dans une nouvelle dimension : « Mais sincèrement, entre mon arrivée et cette saison 2014, il n’y a pas de cause à effet. » Peut-être, mais en l’espace de quatre années, Jean-Baptiste Quiclet révolutionne l’équipe. Trois entraîneurs supplémentaires arrivent sous

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sa direction, avec chacun des compétences différentes : « J.-B. a besoin de s’entourer de personnes qu’il connaît et en qui il pourra avoir confiance », souffle Yvan Clolus. L’été dernier, au moment où Bardet et les siens enflamment les routes, il n’est d'ailleurs pas physiquement présent sur la Grande Boucle. « Je n’ai pas forcément vocation à être présent en permanence sur le terrain, justifie-t-il. J’ai besoin d’avoir un recul sur les choses qui permet d’affiner mon observation. Pris dans l’évènement, on n’a pas les images et les infos de ce qui peut se passer. En prenant du recul, on voit parfois mieux les choses… » Malgré un emploi du temps dévoré par 150 jours de déplacement annuel, Jean-Baptiste Quiclet trouve encore les ressources pour s'engager dans la vie de la commune de Marchaux, dans le Doubs, où il réside. Une épreuve de première catégorie (plus haute division amateur) et un trail mis en place par le Team organisation Marchaux qu’il préside viennent ponctuer la vie de ce village proche de Besançon : « Je reste un passionné avant tout, il faut garder les pieds sur terre par rapport à la base du sport et être conscient des difficultés. » La gestion de ces deux rendez-vous s’organise bien souvent à distance. Comme en cette fin mai où il termine deux semaines de préparation sur les hauteurs de la Sierra Nevada, aux États-Unis. Le Tour de France est déjà dans toutes les têtes. En juillet, Romain Bardet sera forcément attendu. Chacun de ses gestes sera observé, analysé, commenté. Le 8 juillet, lorsque les cyclistes s'affronteront entre Dole et les Rousses, ce sera forcément un moment particulier pour son homme de confiance. « Je vais peut-être venir avec mes enfants, c’est important de vivre cette journée avec eux », glisse le père de famille dont la compagne est originaire du Haut-Jura. Jean-Baptiste Quiclet sera ému, mais passion et humilité ne le quitteront pas. Ces valeurs font de lui un homme simple ; ce sont elles qui le mèneront au sommet.

Encore des Jurassiens Deux parcours différents mais les mêmes racines. À 33 ans, Franck Boudot parcourt le monde au sein du peloton. Pas sur le vélo, mais à l’arrière d’une voiture d’assistance. Son rôle ? Mécanicien pour l’équipe AG2R La Mondiale. Le prochain Tour de France, il ne l’imaginait pas sans lui. « Ce sera ma douzième grande boucle », confie Boudot avec fierté. En effet, l'ancien directeur sportif du Vélo Club de Dole sera chez lui le 8 juillet au départ de la 8e étape qui mènera le peloton jusqu’aux Rousses. Le Docteur Guillaume Sarre a quitté les terres jurassiennes pour s’installer à Grenoble, après un brillant parcours universitaire. L’homme n’a pas oublié ses débuts : « Je suis originaire de Lons-le-Saunier et mes parents vivent toujours dans la Bresse jurassienne. » Comme Quiclet, il revendique une première licence au Guidon bletteranois. Présent sur les routes du Tour d’Italie en mai, il suivra le Tour de France devant la télé avant de retrouver l’équipe française lors du Tour d’Espagne.


Le

Tour dans leJura

Samedi 8 juillet, le Tour de France partira de Dole et traversera le département jusqu'à la Station des Rousses. Une étape 100 % Jura. Ü

b STÉPHANE MANTEY/PRESSE SPORTS

Thibaut Pinot

b JÉRÔME PREVOST/PRESSE SPORTS

Tony Gallopin

b YUZURU SUNADA/PRESSE SPORTS

Julian Alaphilippe

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b LOUIS MONIER/RUE DES ARCHIVES

Paul-Émile Victor après sa traversée du Groenland d'Est en Ouest, en juillet 1936. Cette photo a été prise à Ammassalik.


Jura Dossier

Les héritiers de Paul-Émile

Victor

Cent dix ans après sa naissance, l'explorateur jurassien n'en finit pas d'inspirer. Numéro 39 a rencontré plusieurs de ses disciples, parmi lesquels des compatriotes. Ü

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Traversée du Groenland 80 ans après Les trois copains ont mis les pas dans ceux de Paul-Émile Victor, célébré dans le nouvel Espace des mondes polaires de Prémanon. Ils viennent d'effectuer une traversée hivernale du Groenland d’Est en Ouest. 32 jours de souffrance extrême, de franches rigolades, de douces engueulades et d’amitié. La vie en somme…. Ü

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Poussés à rude épreuve, les corps des aventuriers ont enduré 8 heures de marche par jour, bravant un vent terrible et des températures allant jusqu’à - 38°C.

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Kangerlussuaq

Mer du Labrador

Dé du Dtroit ane ma rk

Groenland

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UN BLANC IMMENSE, SANS RELIEF NI ODEUR Autour d’un café, il nous plonge dans ce voyage extraordinaire : « Vous marchez huit heures par jour dans un paysage qui ne change jamais. Comme au centre d’un grand cercle blanc, où que vous alliez, vous avez l’impression que le sol monte légèrement. Sans relief, j’étais sans repère et j’avais par-

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ILS ONT RI COMME DES FOUS, PLEURÉ COMME DES ENFANTS, MARCHÉ COMME DES BÊTES. Et ils ne savent toujours pas pourquoi ils ont fait ça ! Sans doute pour plonger au cœur d’eux-mêmes… Les voilà revenus les trois copains aventuriers, d’un périple de près de 600 kilomètres entre Kangerlussuaq et un peu avant Isortoq. Parvenus à 60 kilomètres du point d’arrivée initial, ils ont marché et skié 8 heures par jour pendant trente-deux jours sous un froid tenace et des conditions météorologiques catastrophiques. Une tempête les a cloués sur place, obligeant Jean-Francois Fillod, le Haut-Jurassien de la troupe, Jack Champagne et François Deroubaix à rester trois jours sous la tente, puis de nouveau deux fois une journée. Ah que ces heures d’attente étaient longues ! Ce voyage au cœur du Groenland, ils en rêvaient depuis de longues années. Après plusieurs raids en Islande et en Suède, Jeff Fillod avait déjà partagé l’ascension du Spitzberg avec ses deux amis en 2015. Cette fois, c’est un défi encore plus grand qui les attendait : marcher, quatre-vingts ans après, sur Kalaallit Nunaat les traces de leur illustre ancêtre, Paul-Émile Victor. Sur place, ils ont dû se ire la o le p Cerc rendre à l’évidence : une quinzaine d’expéditions ont lieu cette Isortoq année sur la calotte glaciaire, dont la moitié composée de Norvégiens qui ne connaissent pour beaucoup même pas le

nom du premier homme à les avoir précédés. Peu importe, l’aventure est belle et quelques jours avant de partir, Jean-François Fillod n’a qu’une hâte : lâcher les chiens comme on dit ! Après ces longs mois de préparatifs, les amis brûlent d’impatience de se frotter à la bête. Et ils ne sont pas déçus. « On a tout de même bien ramassé au début du périple ! Nous avons mis trois jours pour monter sur la calotte, tentant de se frayer un chemin dans la glace, à skis puis avec les crampons. Pour être franc, nous n’avions pas pris la pleine mesure de la difficulté », reconnaît le Franc-comtois deux jours après son retour, assis sur le confortable canapé de son gîte « La vie neuve » aux Molunes.

François Deroubaix, Jeff Fillod, le Haut-Jurassien, et Jack Champagne ont partagé joies, difficultés et doutes inhérents à cette équipée hors du commun.

fois des haut-le-cœur. Les écarts de température sont colossaux passant de – 38,1 °C au plus froid à +15 °C à notre arrivée sur le front de mer. Pour lutter contre cela, il fallait rester en action permanente : toujours agir, jamais subir. Sinon le froid vous prend ! Au début, j’étais constamment dans le rouge physiquement, de sorte que mon mental ne pouvait pas s’évader. Avec cent kilos de matériel à traîner et les vents permanents, parfois catabatiques (piterak en inuit), nous parlions très peu pendant la journée. Le soir, au bivouac, on s’interrogeait : « Alors, t’es parti toi aujourd’hui ? » Quand les moments d’évasion arrivent, ils ont beau durer deux heures, on a l’impression que cinq minutes se sont écoulées ! » Inconscient du temps dans une atmosphère dénuée d’odeur, sans aucun repère visuel, sous un froid délirant et un vent cinglant, l’homme est dépourvu. Le soir, sous une tente de vingt mètres carrés qu’ils prenaient soin d’installer en Ü


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Paul-Émile Victor le Jurassien LES PREMIERS FRIMAS, C’EST À SAINT-CLAUDE QUE PAUL VICTOR LES A CONNUS. NÉ LE 28 JUIN 1907 À GENÈVE, le petit Paul a grandi au 15 (actuel 26) rue Bonneville, non loin de l’école de la Poyat où il a étudié avec Lily, sa cadette de dix-sept mois. En 1916, ses parents, de confession juive, décident de déménager à Lons-le-Saunier. L’ambiance à Saint-Claude est devenue délétère : depuis la déclaration de guerre, Éric Victor, par son nom d’origine Erich Heinrich Victor Steinschneider, a du mal à faire entendre qu’il est d’origine… tchèque et non allemande ! De plus, la réussite dans son usine de pipes en fait pâlir plus d’un, auquel s’ajoute un antisémitisme latent depuis l’affaire Dreyfus. On l’accuse - à tort - d’espionnage pour l’ennemi et il est interné au camp de Blanzy, en Saône-et-Loire, de septembre 1915 à avril 1916. Les enfants sont aussi la cible innocente de leurs « camarades ». À Lons, les Victor retrouvent donc une vie plus normale. La famille s’installe d’abord dans une maison en bord de Vallière, ce « pissoulet nauséabond » que Paul n’aime pas. Chaque dimanche, le garçon file place de la Liberté pour acheter le traditionnel gâteau chez Pelen… comme tout bon Lédonien ! En juillet 1919, les Victor louent le premier étage de la villa Bernard, rue des Quarts (Charles Nodier aujourd’hui), toujours à Lons. Ce sera la maison de son enfance, où PEV vivra ses premiers voyages dans une pièce inoccupée sous les toits : la fameuse mansarde. L’ado dessine, écrit, lit des récits d’aventure et rêve sa vie future. Il joue aussi à cache-cache avec Didi, sa bonne camarade, puis son premier amour, dans les fromageries Bel. Le jeudi soir, Lily et Paul partent à vélo avec les copains du quartier. Le garçon entre au lycée Rouget-de-Lisle, puis part à Lyon pour ses études et enchaîne avec la marine à Marseille. À 23 ans, il revient travailler aux établissements EH Victor, où il se sent à l’étroit. Il marche beaucoup, apprend à piloter, fait du ski aux Rousses et découvre la Dôle, avec Max Arbez. Premières grimpettes ! À 25 ans, il débarque à Paris pour de nouvelles aventures... Mais toute sa vie, le grand explorateur reviendra à Lons-le-Saunier retrouver ses repères et la chaleur du foyer.

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Paul-Émile Victor (à gauche), avec son père Éric et sa sœur Lily, à Lons-le-Saunier, en 1929 ou 1930.

creusant, avec leurs dernières forces, la neige glacée à la pelle, les trois copains mangeaient essentiellement des rations lyophilisées au rythme de 4 500 calories par jour. « Nous avons mis dix jours à atteindre cette quantité, c’est vraiment énorme pour un estomac ordinaire… En rentrant, je ne rêvais que de salades, de fruits et de légumes ! », raconte Jeff, grand gaillard qui a pourtant fondu durant la traversée, passant d’un visage rond à des traits beaucoup plus fins au retour. Sous la tente, après le repas, les copains discutent, piquent des fous rires et lisent, engoncés dans leurs sacs de couchage. « Jack et François ont dévoré trois livres durant la traversée, moi un seul ! » Les caractères eux aussi s’affirment. Poussés au plus profond de leur être, les hommes se découvrent tels qu’ils ne se connaissaient pas encore. François, infirmier urgentiste de 33 ans et sous-officier de l’école militaire de haute montagne, habituellement taiseux, s’est avéré être un grand bavard ! Jack, médecin, a retiré quelque chose de très positif de cette aventure et s’est senti très à l’aise dans ce milieu hostile, vivant là un « pèlerinage à la rencontre de soi ».

L’AMITIÉ, ARME SACRÉE DU GRAND NORD Cette « traversée de l’Atlantique » s’est faite entre amis, riant de leurs plaisanteries « pas toujours très fines ! », supportant parfois mal la promiscuité, mais se soutenant comme des frères. « Après Dye-2, on marchait et j’ai dit à Jack “Je vais craquer”. François était devant nous, il est revenu sur ses pas, a tout de suite compris et, sans hésiter une seconde, il a décrété : “Allez, on plante la tente”. Il n’était que 14 heures. Habituellement, on bivouaquait beaucoup plus tard... » Cette solidarité, base de leur projet, n’a jamais été ébranlée. « L’important, c’était d’être ensemble », résume simplement l'aventurier. La « fête » des anniversaires qu’ils ont vécue le 22 avril, pour les 50 ans de Jeff et les 34 ans de Jack, était à l’image de ce bonheur simple : des bonbons Haribo, une grosse bougie, un chant joyeux entonné par surprise… « C’était génial », souffle le Jurassien, tout sourire. La tempête a fait prendre du retard aux trois explorateurs, qui décident, à quelques jours de la fin du périple, de prévoir un plan de secours. Ils demandent à leur compère Jacques Carrandié, en base arrière, de leur organiser un point de ren-

Après une bonne nuit de sommeil, il faut pelleter pour dégager la tente.

PPaul-Émile Victor - J'ai toujours vécu demain de Daphné Victor et Stéphane Dugast,

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préface de Nicolas Hulot. 2017. Points.


contre à 100 kilomètres de l’arrivée pour s’éviter une pression négative. Cette décision les libère tellement qu’ils n’auront pas besoin de cette option et Jacques organise un second point de rencontre où un hélicoptère les attend à 60 kilomètres d’Isortoq. « On a voulu reculer encore l’échéance, mais Jacques [Carrandié] craignait que l’hélico finisse par nous lâcher ! Au bout du compte, ce n’était pas plus mal : on a su après que le glacier d’Isortoq était ouvert et dangereux, la banquise n’étant pas suffisamment gelée. Les ours, du fait du réchauffement climatique, sont bien plus nombreux à Isortoq et nous avions finalement décidé de partir sans fusil… »

LE PEUPLE INUIT

Fromagers depuis quatre générations, la famille Poulet s’est spécialisée dans la fabrication de raclette, tomme du Jura et surtout morbier. Un savoir-faire unique, transmis de père en fils.

Les trois copains ont visité Dye-2désertée en 1988, où tout est resté en l’état : les bouteilles vides (et pleines) sont encore sur la table, les magazines, le plateau de self entier et même un jambon !

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En escale à Tassilak (le nouveau nom d’Ammassalik) avant de repartir en liaison régulière pour Tulussuk puis Reykjavik, les trois hommes ont pu faire connaissance brièvement avec le peuple Inuit. Un peuple « fragile » sur lequel l’alcool a fait des ravages, mais chez qui « une réelle prise de conscience du problème » commence à poindre. Nos trois acolytes repartiront-ils ensemble pour d’autres aventures ? « Oui, mais pas maintenant ! », assure Jean-François Fillod qui doit d’abord emmener la nièce de Jacques Carrandié, 12 ans, faire ses premiers pas à Kiilopaa, en Laponie finlandaise… « Nous avons aussi envie de créer une bourse pour aider les jeunes à monter leurs projets. Je veux qu’ils sachent que les aventures peuvent se vivre ici ou là-bas, qu’il n’y en a pas que dans les livres et que c’est à la portée de tous ! »

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François Bernard

Le grimpeur sur son voilier Le Lédonien a gravi les plus hauts sommets du monde et soumis son corps à rude épreuve. Aujourd’hui, « Ben » a soif de partage et l’étanche sur Atka, le voilier en route vers les espaces polaires. Ü L’HOMME ASSIS EN FACE DE MOI AU CAFÉ DU THÉÂTRE DE LONS-LE-SAUNIER a gravi les sept plus hauts sommets de chaque continent, gagné le Pôle Nord, puis le Pôle Sud, en autonomie totale, fait plus de 1 000 sauts en parachute et se réveille à 6 heures pour un footing ou une sortie vélo avant son petit-déjeuner. « Ben », comme tout le monde l’appelle, n’est pas du genre aventurier solitaire. Revenu dans sa ville natale il y a peu, ce Lédonien a toujours aimé les autres, la rencontre et le partage. Son aventure a commencé à l'âge de 17 ans, en lisant L’Équipe. Il cherchait par tous les moyens à accomplir son rêve : grimper. « Chamonix était mon obsession. » Un tout petit encadré de l’École militaire de haute montagne scelle son avenir. Au 44e RI, dans un bureau de recrutement « type Union soviétique », un adjudant à moustache tente de l’orienter vers l’artillerie, plus accessible. « J’ai insisté : je veux grimper. Et j’ai coché ce seul choix. » François Bernard réussit les tests physiques et s’adjuge l’une des trente places disponibles. En 1983, au terme d’une formation de seize mois, il intègre le bataillon d’Annecy, puis la section montagne. « Le top ! L’hiver à Samoëns, l’été à Chamonix ». Le jeune sportif touche à son rêve… mais a déjà mille autres idées en tête.

cœur sur la main ; tout ce qu’on aime en montagne. Quand on est encordé avec Ben, on se sent bien : il a la bonne gestuelle, une excellente capacité physique, mais aussi de la réflexion. Il ne va pas n’importe où et calcule le risque. » Éric Gramond se souvient de leur arrivée sur le toit du monde, comme si c’était hier. « J’avais planté le drapeau d’un sponsor, Antoine celui du Cantal et François celui du Jura. On avait oublié le drapeau français ! On s’est pris une bonne engueulade… » Dans ce groupe, Ben a connu « onze ans de paradis », durant lesquels son corps a souffert. « Au Pôle Nord,

EN 1993, L’EVEREST

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François Bernard, éternel voyageur, a toujours un projet d’avance et l’envie irrépressible de le partager.

b CPY ATKA.FR

Trois ans plus tard, il entre au Groupe militaire de haute montagne, dépendant du ministère de la Défense. Cette équipe de huit personnes triées sur le volet incarne l’image et le prestige de la France en matière d’expéditions polaires. C’est aussi « un labo de l’extrême », où les limites sont sans cesse repoussées. C’est là qu’il fait ses premières expéditions et rencontre Éric Gramond, avec qui il fonda plus tard Kaïlash Adventure, un bureau de guides à Chamonix. « Ben est arrivé dans le groupe au moment où je le quittais, raconte Éric. Il était hypermotivé et surdoué. Nous avons gravi l’Everest ensemble en 1993. Il est fiable, serein, très indépendant et a le


b SDB-NARSSAQ

nous étions la première expédition française en autonomie totale. On ingurgitait 6 016 calories par jour pour résister aux 10 heures de marche sous -32 °C de moyenne le premier mois et -25 °C le second mois. Je n’ai perdu qu’1,5 kg. L’armée se basait sur nos rations pour calculer celles des missions humanitaires », raconte Ben. Le groupe s’est prêté à des biopsies musculaires pour la recherche contre les myopathies, des tests psychomoteurs en altitude avant et après les expéditions, des tests au froid, nus, munis de capteurs en plein Pôle Nord. « Après l’Everest, certains d’entre nous avaient perdu 80 % de leurs capacités physiques », assure-t-il.

UN MAJESTUEUX VOILIER POUR TRANSPORTER DES RÊVES Ces expériences, il les a partagées avec Antoine Cayrol, un autre aventurier vadrouilleur. « On a fait quinze expéditions ensemble, raconte celui-ci. Pôle Nord, Pôle Sud, Patagonie, etc. C’était mon compagnon de cordée, c’est toujours un grand ami. Tous les 6 octobre, date de notre arrivée au sommet de l’Everest, on s’envoie un SMS. Cette année, j’étais sur un bateau au large du Pacifique ; lui sur le sien quelque part en mer ! Nous avons un goût commun pour l’aventure et les espaces sauvages, mais Ben, d’une grande générosité, met aussi dans chaque projet une notion de partage. L’an prochain, j’irai sur son bateau dans le Grand Nord canadien pour passer un moment durable ensemble. » Le bateau de François Bernard s’appelle Atka et constitue le projet de toute une (seconde) vie. Amarré à La Rochelle, il s’apprête à repartir au Groenland où il emmènera essentiellement des jeunes. Des tas de projets ont gravité autour du pre-

Sur Atka, François Bernard emmène des gens de tous horizons parcourir la mer et hiberner dans les mondes polaires.

mier périple : un film de Sarah Delbenne, des échanges avec 650 enfants, dont ceux de Trévillers (Haut-Doubs), un blog avec les élèves de Bellefontaine, Prémanon, Morez, etc. Cet immense voilier, le Jurassien en est fou, comme un gosse. Il a claqué toutes ses économies et multiplié les rendezvous, jusqu’à un certain ras-le-bol, pour trouver des financements. Il a pu clore le budget l’an dernier grâce à un miraculeux mécène de dernière minute, vraiment tombé à pic. L’aventurier a des milliers d’envies restant à accomplir. Photographe, il a ses brevets d’État pour le ski, le parapente, le deltaplane et passe actuellement un diplôme anglais pour être capitaine de bateau. Ce gentil pote tord le cou au temps, précédant toujours le futur d’un demi-pas. « Je me reposerai quand je serai mort. » Ben a perdu « plusieurs amis très chers » et déjà « grillé pas mal de jokers ». « Ce serait génial de savoir combien il nous en reste, non ? » Baptiste, 23 ans, et Léo, 18 ans, suivent le rythme. Papa n’a guère envie que ses fils s’ennuient. « J’ai emmené Baptiste à douze ans au Groenland, Léo à cheval en Mongolie, nous sommes partis aux États-Unis en famille. Je les ai fait skier, voler… » L’aîné, capitaine de bateau, est actuellement en Antarctique. Léo, menuisier-ébéniste, « a envie de bouger aussi… » Et peut compter sur son père pour l’aider !

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Dans son bureau du 42e étage d’une grande tour parisienne, Denis Favier a mis ses compétences au service d’une grande entreprise internationale.

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Jura Itinéraire

Favier Général 5 étoiles Denis

et Jurassien

Patron à deux reprises du GIGN, directeur général de la gendarmerie, il a été de tous les coups durs depuis près de trente ans. Mais c’est dans le Jura que Denis Favier a puisé les valeurs qui ont guidé sa prestigieuse carrière. Ü

maternel, également des agriculteurs dans le secteur d’Orgelet. Pourquoi s’attacher à ces détails ? Parce qu’ils ont façonné la personnalité du gamin qui va passer une partie de son enfance dans la ville-préfecture, subjugué par son père militaire : « Quand je suis né, mon père était en Algérie… J’étais enfant et je voulais déjà être soldat, je n’ai jamais rien voulu d’autre. » De ces années-là, Claude Mathieu, de Pannessières, ami proche, en dit un peu plus : « Le papa de Denis était militaire dans l'armée de terre, il a été blessé en Indochine, en Algérie. Il a été décoré de la Légion d’Honneur au feu. C’est lui qui l’a orienté vers la gendarmerie. Il est mort en 1983 en faisant du ski dans le Risoux quelques semaines avant que Denis épouse sa Ü

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I

IMPRESSIONNANT… PAR LA FORCE DU REGARD, PAR LA PRESTANCE, PAR LE TIMBRE DE SA VOIX, PAR CETTE IMPRESSION DE FORCE ET DE CALME ENTREMÊLÉS. Rencontrer Denis Favier, c’est poser le pied sur une autre planète, avoir la certitude que tout est simple et maîtrisé, dans un environnement empreint de doutes et d’incertitudes. Il y a 58 ans, naissait à Lons-le-Saunier, un petit Favier que sa mère Suzanne et son père Gérard appelèrent Denis. C'était un pur produit jurassien, de ce Jura rural et dur à la tâche. Dans son arbre généalogique, on croise des grands-parents paternels qui exploitent une ferme dans la région de Cousance, et du côté

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b FABRICE BALSAMO/SIRPA

Briefing du GIGN quelques heures avant l'assaut contre les frères Kouachi auteurs de la tuerie de Charlie Hebdo à Dammartin-en-Goële, en janvier 2015.

Avec le GIGN, une longue histoire Le 22 avril 1988, en Nouvelle-Calédonie, des indépendantistes kanak attaquent la gendarmerie de l’île d’Ouvéa. Après avoir tué quatre gendarmes, ils se replient dans une grotte avec seize otages. Le 5 mai, à trois jours du second tour de l’élection présidentielle opposant François Mitterrand et Jacques Chirac, l’assaut est lancé, faisant 19 morts parmi les Kanaks et deux chez les militaires. Cette opération laissera des cicatrices qui marqueront le GIGN. C'est dans ce contexte sensible que Denis Favier est appelé, en 1992, à prendre le commandement de l'unité d'élite. Mission délicate. Le Jurassien n’appartient pas au GIGN et, d’ordinaire, on prend des gens du sérail pour effectuer ce genre de mission. Le gendarme est choisi pour ses états de service, il sera accepté par la troupe : « C’était une première car, sans assentiment interne, les choses sont compliquées. Le GIGN est une formidable maison avec des hommes de caractère. Tout s’est finalement bien passé et je pense que mon formatage “à la Jurassienne” à base de sérieux et d’obstination m’a beaucoup aidé. J’ai connu des épreuves et, au final, je crois avoir été reconnu ! » Dans les faits, Denis Favier reprend tout à zéro : formation, attitude… Les résultats s’enchaînent, le GIGN ré-

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sout quelques affaires criminelles et terroristes qui font la une des journaux télévisés, notamment la prise d'otages du vol Air France 8 969 à Marseille-Marignane, du 24 au 26 décembre 1994, alors qu’il est commandant. C'est lui qui dirige l'opération qui peut être suivie en direct sur LCI. Plus de 300 munitions sont tirées. Les terroristes sont neutralisés. Le blason du GIGN est redoré. En 2007, il est rappelé à nouveau à sa tête : « On m’a demandé de défaire ce que j’avais contribué à créer quelques années plus tôt. Nous devions coller mieux au terrorisme » C'est qu'entre-temps, la menace a évolué. Cette mission est particulièrement délicate. Denis Favier s’en souvient, comme si c’était hier : « C’était difficile car on touchait aux traditions. Il a fallu développer de nouvelles capacités dans la perspective d’actes de terrorisme de masse, du style de la prise d'otages en 2002 au théâtre Doubrovka de Moscou. Il fallait être capable de mettre en place des moyens très lourds, mais d’avoir aussi de petites équipes ponctuelles. En un mot, faire du modulaire… Au final, j’ai commandé un GIGN décuplé avec plus de muscles. C’est devenu l’unité la plus importante d’Europe ! » Pour mémoire, citons la libération, en 2008, des otages du Ponant, un voilier trois-mâts de croisière, abordé par des pirates dans l’Océan Indien.


territoires. J’ai besoin du service rendu aux citoyens et j’aime l’opérationnel. Je n’ai jamais regretté mon choix ! J'ai profondément aimé la gendarmerie, l'engagement et le désintéressement des femmes et des hommes qui y servent. » Voilà qui est dit… Le jeune officier fait ses premiers pas dans la Gendarmerie mobile, à Baccarat, au pied des Vosges. Pendant quatre ans, il multiplie les séjours outre-mer, notamment en NouvelleCalédonie. Ensuite s’enchaînent des responsabilités en Bretagne, puis dans les Pyrénées, de 1988 à 1992. Le lot commun d’un gendarme de métier... jusqu'à ce que son destin prenne un tour bien particulier. Il rejoint le Groupe d'intervention de la Gendarmerie nationale (GIGN) pour en prendre le commandement [lire par ailleurs]. En 1997, nouvelle orientation : Denis Favier décide de faire l’École de Guerre, le plus haut établissement de formation des officiers supérieurs des Armées françaises, de la Gendarmerie nationale et des services de la Défense, installé dans les locaux de l'École militaire à Paris. Un temps de sélection pour les militaires qui souhaitent accéder à des fonctions encore plus importantes. Le Jurassien enchaîne avec un séjour de deux ans dans l’administration centrale, avant d’être nommé commandant de la gendarmerie de Haute-Savoie, puis de réintégrer l’administration : « Cette alternance est un principe de base dans la gendarmerie pour que les responsables connaissent les deux volets du métier. » 2007, c'est le retour dans l'unité d'élite de la Gendarmerie nationale qui doit, de nouveau, être réformée pour répondre aux nouvelles formes du terrorisme et du grand banditisme.

LE GIGN À DEUX REPRISES Cursus scolaire au gré des affectations de son père jusqu’en 1975, l’élève Denis Favier intègre ensuite le lycée militaire d’Autun, puis celui d'Aix-en-Provence. Ses résultats sont si bons qu’il rejoint l'École spéciale militaire de Saint-Cyr, entre 1981 et 1983. Pour ceux qui l’ignorent, Saint-Cyr est l’antichambre d’une carrière militaire de haut vol. Le Jurassien choisit la gendarmerie plutôt que l’armée de terre. « Je suis très attaché aux Passation de commandement avec le nouveau directeur général, sous le regard du porte-drapeau qui se trouve être le fils du général Favier.

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femme Sylvie qui a des attaches à Prémanon. » Un héritage qui vous suit toute une vie. Mais Denis Favier n’est que pudeur, il n’étale pas ses émotions. Quelques mots seulement pour se souvenir que son paternel l’emmenait chez ses grands-parents à Merlia ou qu’il aimait retrouver la maison familiale de Pannessières. « Je faisais les foins à Saint-Christophe. Tous ces lieux ont marqué mon enfance. Par la suite, ma famille s’est orientée vers le Haut-Jura et ce sont d’autres endroits que j’ai appris à aimer : les forêts du Risoux et du Massacre, le Pic de l’Aigle, le lac de Bonlieu. Il existe une magie profonde du Jura. Quand on monte jusqu'à la Dôle et qu’on découvre les Alpes, on se dit que ces lieux n’ont pas bougé depuis des millénaires. Certains peuvent ne pas y être réceptifs, c’est un sentiment qu’on ne peut pas imposer. Moi, j’ai un attachement profond à la terre, aux hommes qui l'habitent. Ce sont mes racines rurales qui m’ont donné un peu de bon sens et la capacité de relativiser. »

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100 000 GENDARMES SOUS SES ORDRES En 2011, Denis Favier prend pour un an la responsabilité de la gendarmerie d’Ile de France. Un poste difficile, un de plus. La vie de ce Comtois hors du commun n’est décidément pas un long fleuve tranquille. En 2012, c’est le Premier ministre Manuel Valls qui fait appel à lui pour être son conseiller gendarmerie : « C’était un challenge intéressant avec une équipe sympathique. La gendarmerie a pu apporter sa voix et être entendue. » Un an plus tard, en 2013, il devient directeur général de la gendarmerie française, il a autorité directe sur 100 000 gendarmes et 20 000 réservistes. C’est son dernier poste. Trois ans et demi après, Denis Favier décide de quitter la gendarmerie. Volontairement. « J’avais fait mon temps, trente-cinq ans au service de l’État. Que ceux qui disent que j’ai pantouflé viennent me voir… » Voilà le Jurassien de caractère qui res- Ü

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En août dernier, une haie d'honneur se met en place alors que Denis Favier quitte le siège de la direction de la Gendarmerie nationale.

pilote, on a identifié toutes les victimes en quinze jours. J’ai tourné la page avec un pincement au cœur. » Revenir un jour ? « Ce n’est pas possible, il ne faut pas d’aller-retour, sinon on est une girouette ! »

b FABRICE BALSAMO/SIRPA

UNE NOUVELLE VIE

surgit : « Après avoir porté des réformes lourdes et connu pas mal d'épreuves, j’ai voulu assurer ma succession pour que tout se passe au mieux. J’aurais pu rester plus longtemps sans véritable risque, mais il faut savoir partir. La gendarmerie avait besoin de sang neuf. » Durant toutes ces années, le militaire ne s'est jamais pris pour un stratège. « Mon métier, ce sont les opérations, confie-t-il. Nous nous sommes engagés massivement dans l’affaire des frères Kouachi, auteurs de l'attentat contre le journal Charlie Hebdo, qui a eu lieu à Paris le 7 janvier 2015 et a entraîné la mort de douze personnes. Dans le crash du vol 9 525 de Germanwings, il y a deux ans sur le territoire de la commune de Prads-Haute-Bléone, à la suite d'un acte volontaire du co-

Denis Favier a rejoint un grand groupe privé dont il a en charge la sécurité. Dans son bureau du 42e étage d’une belle tour de verre du quartier de La Défense à Paris, pas d’images du passé. Pas de nostalgie. L’homme vit l’instant présent : « Je ne peux pas concevoir d’arrêter, j’ai assez de travail pour encore dix ans ! » De sa carrière, lui reste un titre : général cinq étoiles, ce n’est pas rien ! C’est même énorme pour le petit gars de Lons, par ailleurs grand officier de la Légion d’honneur. Mais son humilité jurassienne n’est jamais très loin. Son humilité et une certaine forme d’humour : « Général d’armée cinq étoiles, c’est le rang de tous les chefs d’État-Major. Au-dessus, il n’y a que maréchal, mais c’est une distinction ! » Alors, ce regard intense qui vous traverse semble soudain vous quitter pour se porter quelque part sur les eaux jurassiennes qu’il aime tant : « Les lacs, c’est la liberté, se baigner au cours d'une promenade… J’aime Chalain et mes parents se sont mariés à la chartreuse de Vaucluse, aujourd'hui enfouie au fond du lac de Vouglans. Qu’y a-t-il de plus beau que la vallée de la Valouse avec ses petits villages qui émergent dans la brume d'un matin d'été ? » Qui a dit que derrière un général ne pouvait pas se cacher un contemplatif ?

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Le général Favier avec les personnels du Peloton de gendarmerie de haute montagne, après l'accident de l'Airbus A320-211 de la Germanwings survenu à la suite d'un acte volontaire du copilote, en 2015.

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Le Jurassien de 27 ans travaille dans l’illustre palais du Premier ministre, rue de Varenne, à Paris.


Jura Portrait

Marin

Konik Il régale

les ministres Cuisinier dans la Marine, ce Lédonien de 27 ans se prénomme… Marin, mais il n’a toujours pas servi sur un bateau. Par contre, chaque jour, il prépare les repas du Premier ministre et de ses hôtes ! Marin Konik est l’un des vingt cuisiniers de Matignon. Ü

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SI ON LUI AVAIT DIT QU’UN JOUR, IL SERAIT MILITAIRE, le petit Marin aurait bien rigolé. Parents séparés, une grande sœur aujourd’hui à Besançon et un petit frère dont il s’est beaucoup occupé, son univers de gosse tournait autour du handball : « Je n’étais pas mauvais et, comme les gamins de mon âge, je rêvais du maillot bleu. Mais ce que j’aimais surtout, c’était jouer avec les copains, sans penser à rien d’autre… » Ce sport aurait pu être toute sa vie, mais le destin en a décidé autrement. Crâne rasé, barbe réglementaire, regard clair et droit, aujourd’hui le bonhomme est posé, loin du militaire baraqué des images d’Épinal. Lui serait plutôt du genre chat maigre, vif et espiègle. Quand il évoque son parcours, ses souvenirs sont ronds comme un ballon. Enfant de la génération des Costauds, ses qualités le font quitter le sage collège Rouget-de-Lisle de Lons-le-Saunier, en cinquième, pour celui des Louataux à Champagnole, où il reste un an, avant de rejoindre le collège Stendhal de Besançon, en section sports-études : « C’était le niveau au-dessus, assez difficile physiquement et mentalement. » Il enchaîne alors avec une seconde au lycée Paul-Émile-Victor

à Champagnole, section handball bien sûr. Mais là, tout bascule : « Je passais plus de temps à faire du théâtre de rue qu’à m’entraîner. » Alexis Pernet, ancien camarade, aujourd’hui capitaine de l’équipe fanion de l’Union Sportive Lédonienne (USL), se souvient de cette époque bénie : « Marin, je le connais depuis l’âge de treize ans. Dans la même chambrée à Besançon, on avait collé nos matelas pour pouvoir discuter la nuit, on formait un vrai duo. A Champagnole, on a répété les soirs pendant un an la chorégraphie de Claude François pour un spectacle. Nous avons aussi chanté Renaud, déguisés en fermiers. Moi, je jouais de la guitare, et Marin chantait. C’est quelqu’un de fiable, je suis fier de lui. » Son âme de saltimbanque lui joue des tours, les résultats scolaires s’effondrent. Il est prié d’aller redoubler ailleurs et ses parents le rapatrient au lycée agricole de Montmorot, à côté de la ville-préfecture : « Ils voulaient que je fasse une bonne seconde ailleurs que dans un lycée où j’aurais retrouvé tous mes potes... et ils ont eu raison parce que j’ai décroché un bac technique Sciences techniques de l’agronomie et du vivant (STAV) qui m’a beaucoup plu. Après, j’ai réfléchi à ce que je voulais Ü

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b DR

faire et, comme j’aimais bien cuisiner et faire les repas pour la famille et les copains, j’ai engagé une remise à niveau à Arbois, une section du lycée Friant de Poligny. » C’est la révélation ! Il enchaîne les stages, d’abord à l’hôtel-restaurant Le Chamois aux Rousses, puis à Eze dans un restaurant une étoile, et à Yvoire aux Jardins du Léman, avant de décrocher son BTS. Comme il en veut toujours plus, il s’envole pour l’île de la Réunion, où il passe une licence très spéciale en arts culinaires des tables de l’océan indien : « Ce fut une année riche humainement ; j’avais déjà des influences antillaises à la maison par mon beau-père guadeloupéen. Aujourd’hui ma cuisine est marquée par les épices. »

C’EST PAS L’HOMME QUI PREND LA MER… Retour dans le Jura, puis direction Toulouse, où il se lance dans un master de management et ingénierie en restauration collective. Au bout d’un semestre, Marin Konik renonce : trop scolaire : « Pendant un an, je suis retourné travailler aux Jardins du Léman, j’ai beaucoup appris avec des gens très professionnels. » C’est là qu’il décide de faire une demande pour l’école de sous-officier de maistrance à Brest. Lubie ? Pas du tout, la chose a pris le temps de mûrir : « Déjà en BTS, j’ai beaucoup réfléchi pour rejoindre un corps d’armée. J’aime cet esprit carré, j’ai besoin d’un cadre et d’un esprit d’équipe. » Après une batterie d’entretiens, de tests physiques, psychologiques et scolaires, il est reçu... Et le voilà parti à Brest pour

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En habit de parade pour le défilé du 14 juillet sur les Champs-Élysées, à Paris.

quatre mois : « C’est une formation très dense, on se forme à la culture marine. Après, je suis parti à Querqueville, près de Cherbourg, où j’ai passé mon brevet d’aptitude technique et enchaîné avec une spécialisation en cuisine marine. » Quand vient l’heure des affectations, étrangement Marin ne demande pas un bateau, mais la cuisine de haute autorité : « C’était pour moi l’opportunité de rejoindre les ambassadeurs de la Marine à Paris, je voulais faire autre chose que de la cuisine de collectivité et mon projet a fonctionné. » En sachant bien qu'il servirait plus tard sur un bateau, il débarque à Paris, en janvier 2015, et cuisine six mois pour le chef d’État-Major de la Marine. Quand l’ensemble de l’Etat Major déménage pour Balard, le Jurassien demande Matignon, tout bonnement : « C’est très dur d’avoir la place. On est presque tout au sommet de l’échelle, on fait la cuisine pour le Premier ministre et l’ensemble du personnel. C’est très impressionnant parce que c’est la deuxième maison de France, un lieu chargé d’histoire. Pour moi, c’est un rêve ! Chaque matin, je me dis : tu vas à Matignon et je ressens une immense fierté. » Ü


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Préparer une entrée, une viande en sauce, un dessert pour le Premier ministre, ses invités ou simplement pour le personnel de Matignon, rien n’est laissé au hasard sous l’œil vigilant du chef Denis Rippa. La deuxième maison de France se mérite.


Les cuisines de Matignon, c’est un univers à part entière, un monde fait d’exigence et de précision placé sous la houlette de Denis Rippa, chef de l’illustre demeure depuis décembre 2014 : « La pression est là tous les jours. Pour faire à manger, nous sommes vingt-six en cuisine, dont six apprentis, auxquels s’ajoutent plus de soixante-dix personnes chargées de l’intendance en salle et en cuisine. » Une ruche où se côtoient fonctionnaires, contractuels et militaires, basée sur la rotation : entrées, plats chauds, mise en place, cuisine du Premier ministre… Chacun passe par tous les postes : « C’est plaisant et très riche d’enseignements. Et puis, la cuisine marine est très prisée, la majorité des gens ont entre trente et quarante ans, je suis l'un des plus jeunes… »

VALLS, CAZENEUVE... ET ÉDOUARD PHILIPPE Jeune, peut-être, mais ici rue de Varenne, l’âge ne compte pas. Le mot d’ordre est de répondre à la demande et de s’adapter. Et pas question de commenter les goûts des personnalités politiques ou civiles qui sont invitées à la table du chef du gouvernement. La discrétion est de rigueur : « Je choisis mes collaborateurs sur leurs compétences, j’exige une belle moralité, un vrai engagement dans le travail. Pour moi, le statut n’est pas primordial, j’attache beaucoup d’importance à la cohésion. Marin est consciencieux, c’est un garçon qui a de l’esprit et beaucoup d’humour, il a conscience de ce qu’il ne sait pas encore faire, mais il a déjà fait des bonds en avant, c’est une pierre solide dans l’équipe, il sait prendre du recul », décrit Denis Rippa. Dans cet univers feutré, il est quand même permis de répéter que Manuel Valls aime bien la viande rouge, ou encore que Bernard Cazeneuve préfère les plats plus traditionnels : « Nous, on ne voit personne, notre place est aux cuisines et, de ce point de vue, Matignon, c’est comme ailleurs : le travail doit être irréprochable. Les jours où il y a un conseil des ministres ou des réceptions, on a davantage de travail, c’est tout. Quand il y a des cas particuliers, les intendants nous informent et on adapte les plats. Mais nous faisons une cuisine française ! »

Curieusement, Marin Konik n’est pas en terre étrangère à Matignon, le chef sommelier est bisontin et l’un des maîtres d’hôtel est également lédonien : « Nous parlons beaucoup du Jura, c’est important d’être l’ambassadeur de sa région, de faire connaître les produits locaux. Je ramène tout le temps du comté et j’invite les gens à venir à la Percée. » Si professionnellement Matignon est une aubaine, reste la sphère privée. Sa petite chambre dans une base militaire interdite aux civils n’est pas franchement adaptée à une vie de couple. Heureusement, Sonia, son amie, vit à Marseille. La jeune femme s’est fait une raison : « On s’est rencontré il y a presque trois ans et on se débrouille avec cette situation. Week-end après week-end, ce sont les retrouvailles le vendredi et les adieux le dimanche soir. Je sais ce que c’est que l’amour de son métier, je ne lui demanderai jamais de rester à terre. C’est quelqu’un de confiance, il est solide et puis… il fait très bien le risotto, mon plat préféré », confie-t-elle. Il y aura un après Matignon et notre Lédonien s’y est préparé : « Je suis marin et je n’ai pas envie de connaître mon premier bateau à trente ans ! » Cette autre vie qui se profile déjà, il veut la passer dans le Sud, près de sa belle. Alors pourquoi pas Toulon, première base navale de France, avec sa flotte mais aussi ses sous-marins. C’est une expérience que Marin Konik ne s’interdit pas : « Je suis rentré dans la Marine faire des missions engagées, même si mon port d’attache sera toujours Lons-le -Saunier. »

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Un chef atypique Particulier, atypique… Les qualificatifs ne manquent pas pour décrire Denis Rippa. Ce que revendique cet homme de 45 ans, par ailleurs parrain de la promotion 2016 du lycée Friant de Poligny, c’est une cohésion et une ambiance dans son équipe : « C’est vrai, je ne ris pas, je parle peu et je bouscule mes collaborateurs intellectuellement. Les gens ont mis du temps à me comprendre. » Travailler avec Denis Rippa, c’est intégrer le fait que cet homme veut l’excellence. Chef pour la première fois à vingt-cinq ans, il a choisi d’exercer dans les maisons de la République et, depuis qu’il est à Matignon, il ne cesse de modifier les choses : matériel, personnel, méthodes de travail... Matignon le vaut bien avec 180 déjeuners et 80 dîners chaque jour pour le personnel, auxquels s’ajoute une quinzaine d’autres pour le cabinet du Premier ministre, sans compter les visites officielles, les visites d’État, les repas du gouvernement, les décorations et autres réjouissances.

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b AGENCE FRANCE-MUSEUMS

Les racines de Jean-François Charnier sont en Petite Montagne, loin des Émirats Arabes Unis, Londres ou encore Paris où il travaille. Pourtant, le Jura ne cesse de l'inspirer.


Jura Entretien

Charnier Ce que le Louvre Jean-François

ABU DHABI

doit au Jura

J

Pour ce projet incroyable qui doit ouvrir au public à la fin de l’année aux Émirats Arabes Unis, Jean-François Charnier, le Jurassien, a été choisi comme directeur scientifique de l’Agence France-Muséums. C’est lui qui a imaginé le contenu de ce musée du IIIe millénaire. Ü

JEAN-FRANÇOIS CHARNIER N'EST PAS NÉ DANS LE JURA. IL A VU LE JOUR DE L'AUTRE CÔTÉ DES ALPES. Malgré tout, l'homme est un Jurassien pur sucre. D'abord parce qu'il retrouve la Petite Montagne de ses aïeux dès qu'il le peut ; ensuite, parce que cette terre n'a cessé de l'inspirer. Son implication dans la création du Louvre Abu Dhabi ne fait pas exception. Le projet qu'il conduit depuis maintenant plusieurs années aux Émirats Arabes Unis ne serait pas tout à fait le même sans les moments de solitude et de réflexion qu'il a vécus sur les sentiers et les chemins d'Essia.

NUMÉRO 39 - Vous êtes né en Italie et n’avez connu le Jura que pendant vos vacances scolaires. Pourtant vous affirmez tout devoir à cette terre franc-comtoise. Que voulez-vous dire ? JEAN-FRANÇOIS CHARNIER - C’est une histoire qui remonte loin, à cinq ou six générations. Les Charnier étaient des potiers installés en Petite Montagne, plusieurs ont été maires d’Essia. Mon grand-père paternel était gendarme à cheval, il a dû quitter le village et mon père est né à Lyon. À 25 ans, celui-ci est parti en Italie, a rencontré ma mère sur l’île d’Ischia, dans la baie de Naples. D'où ma naissance de Ü

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La tête dans les entrelacs de la coupole, Jean-François Charnier rêve du musée idéal.

l'autre côté des Alpes. Quand j’ai eu 12 ans, nous avons déménagé en Belgique et, à l'âge de 18 ans, je suis venu à Paris étudier l’histoire de l’art à l’École du Louvre. Mes parents, eux, se sont installés dans le Jura. Dans la famille, le Jura, c’était un mythe. J’y ai passé tous mes étés, toutes mes vacances scolaires, tous mes Noël. C’est là que j’ai gagné mon premier argent de poche en faisant les foins et, surtout, c'est là que j’ai observé avec attention l'environnement dans lequel j'évoluais. Je grandissais. Ces balades, ces longs moments dans la campagne m’ont construit. Au milieu des arbres, dans les champs, j'aimais méditer. C’est mon côté contemplatif, rousseauiste. Je peux rester des heures à contempler ce qui m’entoure, en silence. Cela, je le dois au Jura. Dans le même temps, je peux également être quelqu'un d’exalté, saisi par la passion. Celle-ci peut notamment advenir dans la nature lorsque les émotions et les idées vous envahissent. Aussi, tout mon effort intellectuel a été de trouver un juste équilibre entre ces deux versants de ma personnalité. La France et l’Italie d’une certaine manière. Un autre élément m’a nourri, ce sont les enjeux du patrimoine dans les villages agricoles. J’ai toujours été passionné par les objets : poteries, lampes à huile, outils que j’ai poncés, vernis, cirés… quand j’étais gamin. Ce rapport à la pierre, à l’histoire, au temps long, j'en ai fait mon métier. L’anthropologie dans mon cas a d'abord consisté à comprendre l’évolution du monde agricole, les pratiques et usages, la fin d’une certaine vie rurale liée à l’agriculture, l’ensauvagement de la Petite Montagne… J’ai lu beaucoup de livres à ce sujet. Mais cette quête n’était pas qu’intellectuelle, elle

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b DR

m'habitait littéralement. Dans mes marches en solitaire, j’ai découvert des paysages à taille humaine, des essences d’arbres variées, des petits étangs gagnés par la végétation, des coteaux traversés de sentes de chevreuils ou de sangliers, des prairies sèches, les pierres et les fossiles aussi. Mon grand-père avait une vigne à Grusse, parfois j’y allais et je méditais près d’un vieux lavoir. Sa rénovation avec des pavés autobloquants, du ciment et vernis faux chêne a été un choc pour moi. J’étais fasciné par les ruines dans leur vérité et, au fond de moi-même, l’abandon de cette part de présence humaine m'a ému. C’est ainsi que le Jura m’a tout donné. Cette somme d’émotions liées au Jura n'appartient-elle qu'au passé ? J.-F. C. - Non, elle continue à vivre en moi et à travers mes trois enfants qui n'ont de cesse de me demander de se balader en forêt jurassienne. À l'été, dès la fin de l'école, mon fils va rejoindre ses grands-parents à Essia pour faire du vélo. Vous disiez aussi que le Jura avait servi de matière à vos travaux professionnels ? J.-F. C. - J’ai commencé mon parcours par l’histoire

Un rêve de démesure Le Louvre Abu Dhabi est un musée universel, fruit d’un accord signé le 6 mars 2007 entre le gouvernement français et celui des Émirats Arabes Unis dans le cadre d’une coopération culturelle sur trente ans entre les deux pays. L’architecture a été confiée à Jean Nouvel (à qui l’on doit le musée du Quai Branly). L’Agence France-Muséums a été spécialement créée pour la mise en œuvre de cet accord qui prévoit — outre la construction du musée et l’élaboration du projet scientifique et culturel — le prêt de plusieurs centaines d’œuvres émanant des musées français pendant dix ans, l’organisation de quatre expositions annuelles pendant quinze ans et la constitution d’une collection propre au musée. Jean-François Charnier est directeur scientifique de l’Agence. Situé sur l’île de Saadiyat [île du Bonheur], le Louvre Abu Dhabi composera, avec d'autres musées (le Scheik Zayed national Museum, dédié à l’histoire des Émirats Arabes Unis, et le Guggenheim Abu Dhabi, ouvert à l’art contemporain) le district culturel de la ville. Le musée, qui devait initialement voir le jour en 2012 devrait finalement être inauguré cette année. Le Louvre Abu Dhabi étant construit sur l’eau, il a fallu poser 4 536 pieux pour en assurer les fondations. Le complexe de 24 000 m² est couvert en partie par une majestueuse coupole de 180 m de diamètre dominant et protégeant les galeries du musée. Le dôme est ajouré de telle manière à laisser filtrer une pluie de lumière changeante au gré de la course du soleil.


b ARCHITECT ATELIERS JEAN NOUVEL

La coupole, œuvre de l'architecte Jean Nouvel, domine l'ensemble des galeries du musée.

de l’art à l'École du Louvre, j’ai enchaîné avec l’archéologie et l’anthropologie à la Fac de Nanterre. Mais j'ai aussi travaillé dans le Jura avec Pierre Petrequin [archéologue responsable, durant de longues années, des fouilles sur le site néolithique de Chalain, N.D.L.R.]. Nous avons étudié ensemble des objets de prestige, des haches en jade notamment, qui nous ont interpellés sur la manière dont un objet peut devenir autre chose qu’un objet fonctionnel. On s’aperçoit que l’histoire de l’art et l’anthropologie se croisent dans le Jura. Les chefs de villages du néolithique détenaient des objets de prestige qui étaient des symboles de pouvoir. Ces réflexions sur les enjeux sociaux de l’art ont guidé par la suite mon approche de ce que doit être un musée aujourd’hui. Puis, j’ai obtenu mon concours de conservateur et j’ai travaillé quatre ans à Nantes comme conservateur du patrimoine aux affaires culturelles, chargé de la préhistoire pour la région des Pays de la Loire et l’ensemble de l’archéologie pour le département de la Sarthe. C'est alors que vous avez participé à la création du musée des civilisations de l'Europe et de la Méditerranée à Marseille. J.-F. C. - En effet, j’ai rejoint ensuite l’équipe de préfiguration du projet chargée de réfléchir à une présentation de l’art et des civilisations de la Méditerranée, sous un angle à la fois académique et vivant. J’y ai œuvré six ans et en garde un grand souvenir. J’avais la charge du département dédié à l’agriculture, la chasse et la pêche. Le Jura encore. Le ministère de la Culture m’a ensuite demandé de travailler sur l’avenir des dépôts archéologiques, très nombreux en France. Ceux-ci posaient parfois

problème. Pour cela, j’ai quitté un temps l’équipe marseillaise, et après deux mois, j’ai rendu un rapport qui fut accepté. J’ai alors quitté le Mucem qui prenait beaucoup de temps pour naître. J’avais compris qu’un musée ne pouvait pas présenter des œuvres dans des dépôts silos, comme le ministère les appelait alors, mais qu'il devait les transformer en ateliers, parce que l’avenir, c’est le mouvement et non l’abandon. Cette conception a débouché sur la création du réseau national des Centres de conservation et d’études (CCE). L’un des tout premiers a été celui de Lons le Saunier qu’a porté Jean-Luc Mordefroid, archéologue municipal. Nous avons aidé sa naissance car le mot d’ordre était de décentraliser notre action à travers la France. J’ai beaucoup appris sur les enjeux des territoires à ce moment-là. Plusieurs CCE ont été lancés depuis. Et là, tout bascule ? J.-F. C. - Un jour de la fin de l’année 2007, on m’a contacté pour me proposer de m’occuper de l’archéologie dans le cadre du futur Louvre Abu Dhabi, aux Émirats Arabes Unis. Je me suis dit que c’était une vraie chance de réaliser aujourd’hui un musée universel qui croise les différentes cultures ; j’avais déjà travaillé sur ce sujet avec le Mucem, ce qui m’a permis d’être très rapidement opérationnel. Pendant près de quatre ans, j’ai construit une approche qui me semblait adaptée aux enjeux de ce musée hors normes pour notre époque. Finalement, je suis devenu directeur scientifique du projet avec comme mission de mettre en œuvre cette approche. Mon projet était basé sur l’idée que le Louvre Abu Dhabi ne devait pas être le Louvre à Abu Dhabi mais un nouveau musée pour le XXIe siècle. Ü

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J.-F. C. - Oui, le Louvre Abu Dhabi raconte une histoire avec un prologue, un récit - celui de l’humanité - et un épilogue : l’universel. Après le siècle des Lumières, il y a eu cent cinquante ans de colonisation, puis la décolonisation. Comment penser le commun quand chacun estime détenir la vérité unique sur cette histoire ? Plus le monde est ouvert, plus les gens se referment sur des valeurs identitaires. Le monde est à la recherche d’un nouveau récit du commun de l’humanité !

On imagine que dans votre tête, il ne s'agit pas seulement d'une formule. Au fond, que vouliez-vous initier ? J.-F. C. - Je voulais un vrai musée dans lequel les œuvres des différentes civilisations puissent dialoguer entre elles comme elles l’ont toujours fait dans l’histoire. Si les œuvres incarnent l’âme des cultures et civilisations alors cela revient à proposer un dialogue intercivilisationnel dans la muséographie, un dialogue des civilisations par leur âme, leur esprit. Certes, le musée propose une exposition d'objets d'art, mais, en fait, ce n’est pas seulement cela. L’enjeu est de révéler l’esprit de ces civilisations, de donner à comprendre l’histoire, d’expliquer comment le monde est devenu ce qu’il est. Croyez-moi, il faut avoir beaucoup médité là-dessus dans le fond de la campagne du Jura pour imaginer cette nouvelle approche ! [Sourire] À première vue, ce sont des idées simples et on se dit que tout le monde y a pensé, mais ce n’est pas si simple. J’ai

compris qu’il ne fallait pas répéter l’existant. Il fallait imaginer un récit qui puisse aller jusqu’à faire comprendre à quelqu’un que l’art peut l’aider à se comprendre, à éclairer son histoire, son identité, sa conduite dans un monde complexe. Dès lors, l'art peut être une nécessité, une évidence. À travers le décloisonnement des collections et cette mise en rapport des civilisations, il y a un nouveau territoire à conquérir pour le musée : par exemple montrer que la construction identitaire est un processus qui s’enrichit de l’apport des autres. Voilà l’idée-force qui pourrait faire école. C’est sans doute ambitieux, utopique... mais mon objectif, c’est de réaliser un projet qui fasse que, dans les vingt prochaines années, on ne puisse pas concevoir un nouveau musée sans se référer à Abu Dhabi. En fait, si je résume, ce musée va raconter l’histoire de l’humanité ?

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b NUMÉRO 39

Ce projet de musée à Abu Dhabi impose au Jurassien un rythme de vie effréné.

Ce projet est gigantesque et ambitieux. Comment avezvous obtenu les moyens de le réaliser ? J.-F. C. - Quand j'ai repris la responsabilité du projet scientifique avec Jean-Luc Martinez [Président-directeur du Musée du Louvre, N.D.L.R.] et que nous avons présenté ces idées de mises en regard des œuvres de cultures et de civilisations différentes à nos partenaires émiriens, ils ont dit oui, un oui enthousiaste. Surtout, ils sont ambitieux, ils veulent que le Louvre Abu Dhabi soit le plus beau musée du monde. Aussi ils nous ont donné les moyens de travailler. L'architecte Jean Nouvel s'occupe du bâtiment et l'équipe scientifique que je coordonne est en charge du contenu, en collaboration avec nos partenaires émiriens d'Abu Dhabi Tourism and Culture Authority. Jean Nouvel et moi, nous nous entendons très bien d'ailleurs. C'est une clé essentielle pour connecter le contenant et le contenu du musée, gage d'une expérience réussie pour le visiteur ... Cet ensemble du Louvre Abu Dhabi est un peu la métaphore de l'oasis qui protège les œuvres d'art sous un dôme où elles se répondent les unes les autres. Aujourd'hui, nous sommes au bout du processus : nous avons acquis environ 620 œuvres pour la collection permanente du musée, les musées nationaux français nous prêtent 300 œuvres par an, nous réalisons plusieurs films pour la médiation dans le musée. Parfois je me dis que jamais un directeur scientifique n'a eu autant de chance que moi. C'est le premier musée universel dans la région et l'un des plus grands projets culturels français dans le monde. J'ai parfois le sentiment que c'est un peu mon bébé. Mais je ne me mettrai pas sur le devant de la scène, je suis au service d'un projet, et pas l'inverse ! Mais il y a un prix à payer pour vous ? J.-F. C. - J’ai 48 ans, je travaille en anglais, je suis installé depuis quatre ans à Abu Dhabi où j’ai un bureau et une partie de l’équipe, j’ai un autre bureau à Paris avec l’autre partie de l’équipe. Je vis dans plusieurs maisons, je suis toujours dans des avions. Au fond de moi, je cultive le mythe de tout arrêter et de vivre tranquille, entouré de ma famille... et de quelques poules. En fait, j’aime parfois ne rien faire et me sentir saisi par la contemplation. On ne peut pas travailler comme un forcené la tête baissée tout le temps, c’est insupportable. J’ai envie de regarder et me sentir participer au cycle de la nature autour de moi, de voir pousser les arbres. Le but de la vie, c’est d’être heureux, mais aucun cours ni à l’école ni ensuite ne nous apprend à l’être. On ne nous dit pas non plus de lire des romans, de prendre le temps pour de vrais échanges avec ses amis, de nouer un dialogue continu avec ses parents, d'adopter un mode de vie équilibré. Je me dis des fois en pensant au temps long et à cette étrange notion de progrès qu’en fait l’humanité s’est mise dans un sacré pétrin : courir toujours plus vite, capitaliser, perdre sa vie à faire ce que la société nous demande, alors qu’elle est si courte, si fragile ! Je vous le confiais : je suis sans cesse écartelé entre contemplation et exaltation.


ÉTAPE

DOLE 8 JUILLET TO D E PA R T - S A M E D I 8 J U I L L E T

UR

DÉPART

AVENUE DE LAHR

DE FRAN

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Dans le Carré des antiquaires, à Paris, il a l’une des plus belles galeries. Depuis trente ans, Philippe Vichot, Jurassien des environs de Lons, est un spécialiste mondial des meubles du XVIIIe siècle. Ü

Philippe

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Vichot


Si Philippe Vichot a fait de sa galerie l’une des plus cotées de la capitale, ce n’est pas un hasard. Le Jurassien de Lons-le-Saunier a appris dès son enfance à repérer le bel objet en suivant sa mère dans ses expéditions.

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DEUX CHOSES ONT MARQUÉ AU FER ROUGE LA VIE DE PHILIPPE VICHOT : LES CHEVAUX ET LES ANTIQUITÉS. LA PREMIÈRE RELÈVE DU PÈRE, ILS ONT BERCÉ SON ENFANCE : « Mes parents habitaient Lons-le-Saunier, rue du Solvan. Mon père était éleveur et faisait du négoce. Il avait des écuries et une cinquantaine de chevaux presque en centre-ville. Je montais tous les jours. » La seconde est liée à sa mère : « Elle était antiquaire, elle aimait les beaux objets et j’ai hérité de sa passion. » Cette existence bascule au décès d'un papa parti lorsqu'il n'a que dix ans. Veuve, Mme Vichot vend les écuries lédoniennes pour ouvrir une boutique dans une maison à Savagna, à deux kilomètres : « Je l’accompagnais pour chiner, j’ai beaucoup appris en la suivant. » Collège Rouget-de-Lisle, lycée Jean-Michel, baccalauréat. Si son chemin semble tracé, le jeune homme ne se voit pas exercer le même métier que maman. Il entre en classe préparatoire de vétérinaire, à Paris. Dans la capitale, il rencontre celle qui deviendra son épouse, la mère de ses trois enfants et sa collaboratrice durant de longues années. Après le temps de l’armée — il termine comme moniteur de tir au 44e RI basé à Lons — il ne reprend pas ses études, mais rejoint la boutique familiale : « Je faisais du porte à porte dans tout le Haut-Jura, je cherchais les meubles en bois naturel, les objets d’art populaire. Le soir, je rentrais tard et je m'occupais des chevaux qu’on avait conservés. Les journées étaient longues, mais passionnantes… » Ü

Gentleman Antiquaire numéro 61 39


b NUMÉRO 39

Rapidement, il décide de voler de ses propres ailes. Sa géographie s'agrandit : « Je chinais toute la semaine partout dans l’Est et le Sud de la France. Je déballais le vendredi aux puces de Saint-Ouen, les plus connues au monde, avant de repartir en quête de trésors. J’étais tout le temps dans ma voiture. » En 1979, c’est la grande décision : s’installer en Île de France. Dès l’année suivante, Philippe Vichot rejoint la région parisienne puis, en 1981, déménage dans Paris intramuros où, pendant cinq ans, il creuse son sillon, lentement, patiemment. Jean-Gabriel Debueil, ami et restaurateur installé à quelques dizaines de mètres de l’antiquaire [Lire Numéro 39 n° 1], connaît bien ce caractère trempé, audacieux autant que rusé. Les deux sont jurassiens d’origine et cette « jurassitude » les rapproche : « Il a une dimension romanesque. C’est un taiseux qui pèse ses mots et, dans sa discipline très aristocratique, c’est rare. Il faut le voir inspecter un meuble avec son regard aiguisé, c’est toujours à l’économie, mais c’est incisif. C’est l’un des regards les plus reconnus de sa profession. Il possède aussi cette élégance qui consiste à ménager même ses inimitiés... et c’est un Jurassien de la terre. »

Inutile de le cacher, ces premières années franciliennes ont été dures : « Personne ne m’attendait, il a fallu faire sa place en achetant des objets assez chers et en les revendant le plus vite possible. Le plus important, c’était de se faire connaître du milieu. Ces cinq ans ont été très formateurs et franchement agréables. Pas Ü

Philippe Vichot est spécialiste des objets du XVIIIe siècle. Sa galerie de la rue de Lille dans le 7e arrondissement cache des trésors.

Un quartier sans équivalent au monde

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Le Carré des Antiquaires, à Paris, est le centre international du commerce des antiquités. Les pièces qui s’achètent et se vendent ici viennent du monde entier et sont souvent acquises par des musées ou de grands collectionneurs. 62 numéro 39

Tapisserie usée ou murs peints en rouge, vieux parquet, plafonds sombres… Le tout derrière une devanture en bois défraîchie. Dans cette galerie, l’une des plus grandes et des plus belles du quartier des antiquaires, tout respire l’ancien. Mais, attention ! L’ancien haut de gamme. Ici, on est dans La Mecque des vieux objets, écrin de pièces rares, de très haute qualité. Les clients sont des collectionneurs internationaux ou des musées, et les meubles proviennent de lieux incroyables : vieux châteaux, maisons familiales, fiefs de dynasties illustres disséminées aux quatre coins du monde. Paris reste la plaque tournante de l’antiquité, le centre mondial des objets d’art et le Carré des Antiquaires, dans le VIIe arrondissement, n’a pas d’équivalent dans le monde. Ces quatre tapisseries monumentales de 1690 dénichées dans un château, signées, expertisées, garanties qui trônent sur les murs de la galerie Vichot en sont la démonstration. Ont-elles un prix ? En tout cas, elles ont toutes les chances de venir enrichir les collections d’un grand musée…

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de magasin, pas d’horaires d’ouverture, de belles découvertes, une curiosité sans limite, des coups de chance, des déceptions aussi, mais une vraie liberté. » Avec le temps, le Jurassien se dit qu’il devrait avoir pignon sur rue. Qu’à cela ne tienne, en 1987, ses collègues lui trouvent un fonds de commerce rue de Lille, le berceau mondial de l’antiquité.

UN EXPERT RECONNU L’avenir s’annonce prometteur, mais, en 1990, Saddam Hussein envahit le Koweit. S'ensuivent la guerre du Golfe et la crise économique qui ont bien failli le mettre sur la paille. Heureusement, il n'a pas quitté les puces de Saint-Ouen, une belle poire pour la soif : « J’ai pu passer le cap. » Cet épisode achevé, vient alors l’heure de la notoriété : « En 1992, j’ai fait la dernière édition de la Biennale des Antiquaires au Grand Palais et, deux ans plus tard, la première au Carrousel du Louvre. Ensuite, j’ai abandonné, je n’aimais pas trop cette ambiance feutrée, même si elle amène la clientèle. » Et la reconnaissance de ses pairs. Avec des expositions un peu partout en province et un réseau qui n’en finit pas de s’étoffer, Philippe Vichot devient l’un des spécialistes mondiaux du mobilier des XVIIIe et début XIXe siècles, expert à la Chambre nationale… À 61 ans, l’homme est mince, vif, regard acéré. Il n’a rien perdu de son allant — on pourrait même parler de séduction — même si son air autoritaire et ses silences ont tendance à impressionner. De sa galerie de 190 m², il a fait un lieu hors du temps : tableaux, meubles, chandeliers, lustres, statues, bustes, fauteuils, horloges, miroirs… se reflètent dans l’écran XXL d’un Apple tout neuf. L’homme et sa collaboratrice ne cessent de pianoter sur le clavier à la recherche du bel objet, observant, questionnant, finissant par trouver… « Le métier a beaucoup changé. Autrefois,

on pouvait faire de belles découvertes quand les professionnels déballaient leur camion sur les marchés. Aujourd’hui l’information file à la vitesse grand V sur internet. Il faut s’adapter. » Même s’il n’est pas fatigué, l’âge et l’expérience autorisent Philippe Vichot à faire des choix. Aucun de ses trois enfants n’a hérité de la fibre : « Je n’ai personne pour reprendre, mais, de toute façon, je ne veux pas vendre, même si j’ai la nostalgie de mes débuts. Cette liberté, c’était magique ! Et puis, j’ai beaucoup travaillé pendant toutes ces années et il ne me reste pas grand-chose pour le reste. » Un avis que confirme Chloé, sa fille aînée qui vit aujourd’hui à New York [lire par ailleurs] : « Papa est un bosseur acharné, il est tout le temps en train de se battre. C’est vraiment une force de travail, mais il aime aussi partager, expliquer. C’est un besoin chez lui, il est passionné. Je l’ai beaucoup suivi et ce qui m’a toujours frappée, c’est son sens de la relation, à l’ancienne, basée sur une parole donnée, une poignée de main. Ce sont des valeurs qu’il a acquises dans son enfance jurassienne et c’est beau à voir dans le milieu de l’entreprise. » Philippe Vichot le dit simplement : « En fait, je suis un paysan. J’ai les pieds sur terre et j’ai besoin de la nature. J’aurais préféré vivre dans le Jura qui me manque. Le fief familial de mon père est à Nevy-sur-Seille et je m’y sens bien. Mais le Jura est trop loin. Ma mère vit maintenant en maison de retraite, on va vendre Savagna. C’est une page qui se tourne. » Si Philippe Vichot revient peu à peu à ses fondamentaux ruraux, c’est en Normandie qu’il a décidé de se poser : « Il y a deux ans, j’ai racheté une propriété en Normandie et j’élève des chevaux en professionnel. J’ai donc deux métiers. J’aime passer du temps là-bas, c’est le retour à la campagne et je peux y aller tous les week-ends. C’est un bon équilibre parce qu’en fait, je souffre de la vie parisienne. »

Chloé Vichot, la « Frenchie » trader passe à la restauration en bocaux C’est la fille à son père ! Même sens de l’entreprise, même acharnement… À 35 ans, Chloé Vichot a déjà un joli parcours derrière elle. Parisienne, formée à la finance à l’Université Dauphine, elle s’expatrie à New York, où elle travaille pour la BNP, la Société Générale et Merrill Lynch, filiale de la Bank of America. Bref, c’est une trader ! Mais son truc à elle, c’est la cuisine. Un rêve de gosse hérité des recettes de sa grand-mère. En 2012, à 30 ans, elle se marie et décide de préparer sa reconversion. Après trois ans de cours du soir en cuisine et un emploi chez Eleven Madisson Park, l’un des restaurants renommés de New York, elle ouvre, à Manhattan, « l’Ancolie », un petit restaurant de quartier d’une dizaine de places, mais pas que… « L’Ancolie » marie le manger-vite américain et la tradition du manger-bien français, le tout sur une dynamique de développement durable. La moitié du temps, le restaurant sert des cafés-croissants et, l’autre moitié, des soupes, des salades et des plats en bocaux de verre. « Nous incitons nos clients à utiliser le verre et à manger des légumes de saison produits en circuit court. Tout est recyclé et ce qui ne l’est pas est récupéré pour le compost et amené dans un jardin. » Pour faire face aux aléas, Chloé a également une activité de traiteur basée sur des recettes maison, à l’image du gâteau au chocolat de sa grand-mère jurassienne.

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b L'ANCOLIE

Chloé, la fille de Philippe Vichot, a préféré la vie aux États-Unis.


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Jura Entreprendre

Patrice

Chapon

Transformateur de cacao

C

Lédonien d’origine, cet autodidacte au regard bleu est, à 58 ans, l’un des chocolatiers les plus prisés de sa génération. Quatre boutiques à Paris, d'autres à Dubaï ou Tokyo, une chocolaterie à Chelles rayonnent sur le chocolat mondial. Ü

UN BÂTIMENT DANS LA ZONE D’ACTIVITÉ DE CHELLES, PETITE VILLE DE BANLIEUE à 30 km de Paris. Le quartier est calme, la chocolaterie Chapon ne se distingue pas des autres bâtiments et, pourtant, c’est dans ses locaux que se fabrique, à l’abri des regards indiscrets, l’un des meilleurs chocolats du monde. Aux manettes, depuis 2007, Patrice Chapon. L'homme se fait plaisir. Non seulement il ramène les meilleurs cacaos des différents continents, mais, de surcroît, il s’amuse comme un fou dans son musée miniature, sorte de bric-à-brac improbable, mélange hétéroclite de tout ce que le monde du chocolat compte d’originalités. On trouve même des chocolats Pelen de Lons le Saunier ! Normal, Patrice Chapon est Jurassien d’origine.

UNE RECONNAISSANCE MONDIALE Aujourd’hui, la marque aux Trois gosses – c’est l’emblème qu’il a choisie pour sa maison – est une référence... et une marque déposée. Trois boutiques à son nom à Paris, une à Neuilly, une cinquième à Chelles, une à Dubaï, une à Tokyo… et des titres à la

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pelle : quatorze titres de meilleur chocolatier au concours national de la confiserie ; meilleur chocolatier de Paris en 2005 ; meilleur chocolatier du salon du chocolat en 2007... Patrice Chapon fait même, l'an dernier, son entrée dans le cercle très fermé des douze meilleurs chocolatiers de France et des sept Français à fabriquer eux-mêmes leur chocolat. De quoi donner le tournis. Comment expliquer ce succès ? Par l’envie, d’abord. Par le travail, ensuite. Cet homme de 58 ans, regard bleu, visage de baroudeurséducteur, est un éternel créateur. Mieux, un inventeur. Dès 2001, il lance la première boutique « made in chocolat », un magasin qui propose une palette de tablettes invraisemblable. Les clients goûtent le chocolat chaud, fondu ou en morceaux. Il crée également le « chocolat Monsieur », avec des morceaux de chocolat chaud et invente le concept de « bar à mousses » au chocolat. Quand on lui demande pourquoi un bar à mousses, il rigole : « Je voulais une identité, la mousse en a été une ! » Ces créations ne sont, en fait, qu’une suite logique à son travail : « Ma mission, c’est d’être un vrai artisan, c’est-à-dire celui qui Ü


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En trente ans, Patrice Chapon, le chocolatier autodidacte, s’est fait une réputation internationale. Ce gourmet va chercher lui-même son cacao dans les pays producteurs.


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Il n’existe pas vraiment de formation pour devenir un spécialiste du cacao.

travaille le produit du début à la fin », résume-t-il. Patrice Chapon est un véritable autodidacte et c’est sans doute ce qui a toujours fait sa force. C’est en tout cas l’avis d’un autre chocolatier jurassien, l'illustre Édouard Hirsinger, meilleur ouvrier de France : « Il a tout appris seul, parce qu’il croyait en ce qu’il faisait. C’est l’incarnation des valeurs jurassiennes : le travail, la ténacité, l’orgueil du travail bien fait aussi ! » C'est que la famille Chapon a ses racines en terre comtoise. Un oncle tient une scierie à Crançot ; un autre est vigneron à Grusse. Quant au père de Patrice, il est représentant pour la maison Henri Maire durant dix ans. Sa maman s'occupe, elle, des quatre enfants du foyer. Le couple tient aussi le Café de la Gare à Cousance, une petite guinguette : père au bar, mère en cuisine. Une vie compliquée, des horaires impossibles jusqu’au grand déménagement, en 1960, pour une autre vie à Lagny-sur-Marne, en région parisienne. Le paternel va entamer une carrière de négociant en vins fins pour les restaurants huppés de la capitale : « J’ai grandi là-bas, mais toutes mes vacances, je les passais dans le Jura pour voir la famille. Mes parents avaient acheté une maison à Grusse ! » Dans ses jeunes années, le garçon n’est pas franchement un bon élève : « Je voulais être architecte, je dessinais tout le temps des maisons, mais mon père m’a vite refroidi. Mes notes en mathématique m’interdisaient tout espoir ! Mieux, il m'a mis en pension au Rancy et m'a dopé aux cours du soir pour que j’obtienne… mon BEPC. Quand je l’ai eu, il m'a demandé de choisir un métier. »

POUR BUCKINGHAM PALACE En attendant, il emmène son fils dans ses tournées : « On livrait les restaurants. C’est comme ça que j’ai découvert ces endroits merveilleux et surtout leurs cuisines. » Comme il sent que Patrice est intéressé, il demande à un de ses clients de le prendre en stage. Les premiers pas, la révélation : « Je n’étais pas attiré par le salé. C'était la bonne odeur de tarte aux pommes qui me plaisait ». Le gamin demande à faire un stage en pâtisserie, mais essuie un refus. Déception. Cependant une bonne fée veille sur l’enfant : une semaine plus tard le pâtissier se blesse au bras. Le Jurassien est appelé en renfort ! À partir de cet instant, un destin s’enchaîne. Dur, très dur au départ. Début d’un apprentissage en pâtisserie à Lagny. Deux ans plus tard, alors qu’il est en train de travailler, le patron reçoit un

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coup de fil. Il se retourne et demande à la cantonade si quelqu’un est intéressé pour aller travailler… à Londres : « Je dis oui sans réfléchir, ni rien demander. Je suis parti comme ça pour deux années avec un contrat ! » Il débarque à Sloane Square : « J’ai mis trois jours pour comprendre que je travaillais pour Buckingham Palace. J’ai appris à faire des sorbets avec des fruits venus de France, j’étais devenu pâtissier-glacier pour la couronne d’Angleterre et je n’avais toujours pas touché au chocolat ! » À Londres, Patrice Chapon découvre le luxueux magasin Harrod’s et, au rez-de-chaussée, l’univers de la gastronomie avec tous les grands produits : « Je voyais du très bon chocolat et j’avais envie de travailler ce produit noble. » Qu’à cela ne tienne, dans la petite maison où il loge, il passe à l'action : « Je l’achetais, je le fondais, je faisais des décors. » L’aventure dure deux ans au bout desquels il revient à Paris avec une seule idée en tête, faire du chocolat chez lui pour le vendre ensuite à des boutiques. Seulement, personne ne l’attend ; les professionnels ont déjà leurs fournisseurs attitrés. Il faut trouver des idées nouvelles… Il se lance alors dans la fabrique de boîtes en chocolat sur lesquelles il reproduit des décors comme la Madeleine. On pourrait passer des heures sur les détails de la vie de Patrice Chapon. Raconter sa première commande de 40 boîtes par Auchan ou celle des 24 000 grenouilles en chocolat vert – emblème du groupe – par Look Voyages. Ou encore le coup de chance qui l’a fait un jour rencontrer une cliente lui dévoi-

Édouard Hirsinger devant sa boutique à Tokyo, au Japon.


CHAMPAGNOLE NOZEROY lant qu’un chocolatier de sa connaissance cessait son activité. Évidemment, il saute sur l’occasion et rachète le matériel et… la clientèle. Reste à trouver l'argent : « A la cinquième tentative, une banque m’a prêté 300 000 francs. Quinze jours plus tard le banquier était arrêté pour détournement de fonds. J’ai eu chaud ! » Toute l’histoire de Patrice Chapon est parsemée d’anecdotes. À chaque fois, il frôle la catastrophe, mais il surmonte les obstacles et finit par réussir. Le changement se produit en 2005 : « J’ai décidé de fabriquer moi-même mon chocolat, j’avais l’énergie pour cela, mais personne ne vous apprend, il n’y a pas d’école. Il faut le griller, le torréfier, le concher. » Grâce à la profession, il voyage : Pérou, Mexique, Venezuela, Cuba, Bolivie, Tanzanie. Il découvre les meilleurs chocolats du monde et, en même temps, son métier de transformateur de cacao. La chocolaterie de Chelles est la concrétisation de cette démarche, c’est son cabinet secret. Arnaud Pelen, chocolatier lédonien, admire ce sens de l’initiative : « Je l’ai croisé quelques fois au salon de la chocolaterie, on se téléphone plusieurs fois par an, entre professionnels. Ce qu’il a fait mérite le respect, partir de rien et, à force de persévérance, réussir à monter une chocolaterie, à ouvrir des boutiques, à être reconnu… C’est beau. » Mais pour Patrice Chapon, il n’y a pas de hasard. Derrière chacun de ses choix, il y a une parcelle du Jura : « Mon vrai bonheur, c’est de voir la fascination des clients et la gratitude dans leurs yeux. Mais pour y arriver, il faut une détermination à tous crins. Je peux dire que c’est le Jura qui me l’a donnée. Ce département et les gens qui l’habitent portent en eux une sorte de puissance de l’esprit qui permet de voir aboutir les projets ; ils ne lâchent rien. Ça peut être un défaut, mais c’est aussi une immense qualité. »

Hirsinger régale les Japonais Cet Arboisien de souche et Meilleur Ouvrier de France dans la catégorie chocolatier-confiseur en 1997 est présent depuis cinq ans à Tokyo. Depuis cette année, la surface qui lui est accordée vient quasiment de doubler, ce qui constitue une belle reconnaissance dans cette ville où les saveurs venues de France font un véritable tabac. Son aventure tokyoïte a débuté en 2012 avec une boutique franchisée de Ginza, l'équivalent des ChampsÉlysées, où ses chocolats ont été proposés au public pendant trois ans. Puis le magasin a fermé ses portes une année avant de rouvrir avec de nouveaux propriétaires en décembre 2015 à Omote Sando, où sont déjà installés de grands noms de la pâtisserie mondiale : « Je vends mes produits à mon nom, à l’exception de la glace. Tous les chocolats partent en palettes filmées par avion, rien n’est congelé. Évidemment, les prix s’en ressentent. Je crois qu’on est dans les plus chers du monde, entre 7 et 9 euros le chocolat ! » Prochain objectif, pérenniser l’expérience en étoffant la gamme « Made in Jura » avec des chocolats adaptés à chaque saison : « Les Tokyotes apprécient ce que les Français consomment et ils veulent des chocolats qui sont faits directement chez nous ! » Une véritable opportunité pour le savoir-faire jurassien.

JURA

COMMUNAUTÉ DE COMMUNES

Un dispositif d’Appui à l’Immobilier d’Entreprise

Une démarche innovante en matière économique afin d’accompagner les projets de développement dans les meilleures conditions. Déjà particulièrement engagée en matière de développement économique, la Communauté de Communes Champagnole Nozeroy Jura, poursuit et étend son accompagnement à destination des entreprises en proposant des conditions favorables à leur installation ainsi qu’à leur développement. Un dispositif incitatif et déterminant Dans ce cadre, l’intercommunalité s’engage à soutenir financièrement les investissements immobiliers des entreprises souhaitant s’implanter ou s’agrandir sur son territoire, en initiant un dispositif d’Appui à l’Immobilier d’Entreprise (AIE) réservé aux entreprises industrielles. Avec ce dispositif, la Communauté de Communes souhaite se différencier des autres territoires et attirer de nouvelles entreprises mais aussi déclencher des projets d’investissement pour celles déjà installées.

« Le développement économique du territoire demeure une des priorités de notre Communauté de Communes. »

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ACTIVITÉS INDUSTRIELLES, ARTISANALES ET COMMERCIALES

EMPLACEMENTS ET TARIFS PRIVILÉGIÉS

■ Aménagement des zones économiques du territoire ■ Voirie de liaison ■ Accompagnement des porteurs de projets ■ Depuis 2017 : nouveau dispositif d’Appui à l’Immobilier d’Entreprise (AIE) Les élus et les services de la Communauté de Communes accueillent et se mobilisent pour accompagner tous les porteurs de projets. Contact : Communauté de Communes Champagnole Nozeroy numéro 69 3 rue Victor Bérard – 39300 Champagnole 39 Tél : 03.84.52.06.20 – Mail : contact@cphj.fr


Mon Jura à moi

Les vies de

Denis

Trossat L'histoire du football dans le Jura ne peut être racontée sans qu'un chapitre entier soit consacré à Denis Trossat. Mais on aurait tort de ne voir en lui qu'un passionné de ballon rond. L'homme a su mener en parallèle plusieurs vies, aussi riches les unes que les autres. Ü

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Numéro deux sur la liste de Jacques Rousselot, candidat à la présidence de la Fédération française de football, Denis Trossat trésorier depuis juin 2011, a perdu en mars dernier les élections. Il y a six ans, il était devenu le grand argentier de la puissante FFF.


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LE CHÂTEAU DE LA SAUGE À SAINT-LAMAIN, LES TOITS DE SON VILLAGE DE PASSENANS, LES TERRAINS de foot, la montée à la Dôle et les gens aussi, beaucoup de gens… Le Jura de Denis Trossat, 61 ans, est celui de l’altruisme, mais aussi celui du sport, de l'engagement associatif et de l’entreprise. Ce terreau qui colle aux crampons l’a mené, durant six ans, en haut de l’affiche du football français comme trésorier de la Fédération française aux côtés de Noël Le Graët : le Walhalla. Il l’a ramené tout aussi vite à la réalité de l’échec lors des dernières élections à la FFF. Prendre du recul, ne rien regretter, poursuivre sa route, conserver ce bon sens paysan. Ces leçons, Denis Trossat, le jeune retraité qui veut encore conseiller les entrepreneurs, les tire de sa terre jurassienne.

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Denis Trossat a été le trésorier de Fédération française de football. Un poste qui ne l'a jamais éloigné des petits clubs. Ici, avec les enfants de Macornay.

NUMÉRO 39 - Votre enfance, c’était la vie de château ? DENIS TROSSAT - Mon Jura s’est bâti à côté de Passenans, à Saint-Lamain, plus exactement au château de la Sauge où mon père travaillait. On était dans un château, mais on habitait dans la maison d’ouvrier ! Ce château était un peu inaccessible, il était interdit au public, mais j’organisais des parties de gendarmes et voleurs pour les copains. C’est là que s’est construit mon esprit d’initiative. À l’école, j'étais l'ini- Ü

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tiateur de matches de foot, je composais les équipes et j’accrochais les noms sur les poteaux du préau. J’avais huit ans à peu près. Les autres me reconnaissaient cet esprit, peut-être parce que j’essayais toujours d’être équitable. C’est une forme d’égoïsme de prendre du plaisir en faisant plaisir aux autres. Une devise qui a marqué votre vie ? D. T. - Qui a marqué mes deux vies ! L’une professionnelle dans le milieu des entreprises, l’autre associative. En fait, je n’accepte pas que mon travail entre en conflit avec mes plaisirs, sauf si mon travail est un plaisir, ce que j’ai toujours recherché. Tout petit, je n’ai bien travaillé qu’avec les gens que j’ai aimés. Je le faisais plus pour la personne que pour la matière. Puis, j’ai croisé des gens qui m’ont montré par l’exemple que dans la vie, il existe des règles. Heureusement pour moi, parce que j’étais une sorte de gentil fumiste, j’amusais la galerie. Plus tard, c’est au milieu des autres que j’ai appris à parler, à être convaincant… et à pouvoir réaliser des choses.

Diriez-vous que Passenans est l’épicentre de votre Jura ? D. T. - C’est au château que j’ai grandi dans une famille de sept enfants dont je suis l’aîné, une réalité qui ouvre au sens des responsabilités. Ma mère a fait le plus beau métier du monde, celui d’élever ses enfants, et mon père fut longtemps ouvrier agricole. Beaucoup de travail, peu d’argent et le sens des priorités : élever les gosses, les tenir propres, leur inculquer les valeurs de la vie avec les autres. Notre richesse, c’était la relation humaine, on ne se disputait pas à la maison parce qu’on n’avait pas de sous ! Passenans, c’est là que je suis entré au foyer rural et que j’en suis devenu le président à dix-huit ans. J’y ai connu celui qui est devenu mon mentor : Lucien Ciabrini, le maire du village. Il était aussi conseiller général et me recevait chaque dimanche midi chez lui pour faire le point sur les activités. Avec lui, j’ai appris la rigueur. C’est à Passenans aussi que j’ai vécu ma première expérience dans le football. En 1974, les gens de mon village ont créé le Club sportif de Passenans, mais ils se sont engueulés la même année et je suis devenu trésorier à dix-neuf ans. Ce village est tout un symbole. Pour moi, la vraie vie est là. En montant la route de Champagnole, on voit les vieux toits s’aligner. C’est un village de vignerons, les maisons montrent une certaine réussite économique, elles transpirent l’histoire qui est aussi un peu la mienne.

Vous avez déjà évoqué quelques rencontres importantes. Quelles sont les autres personnes qui ont compté pour vous ? D. T. - Parmi ceux qui m’ont permis de me construire, il y a mon grand-père maternel ; il dégageait une telle aura que, lorsque deux gars se bagarraient au retour de la foire, c’est lui, Paul Brulebois, qu’on appelait pour les séparer. Quand je venais en vacances chez lui, il attelait le cheval et le menait au trot pour me balader dans les bois. Je pense aussi à ma mère, une femme autoritaire à laquelle je me suis souvent opposé. Avec mon père, c’était des gens de peu, mais avec des valeurs très fortes. Quand j’ai été en pension au collège de la Salette, à Voiteur, le Père Maurice Grainetier, professeur de latin, m’a pris sous son aile. Il me correspondait bien. La messe, ce n’était pas son truc, mais pour moi, c’était un vrai curé. En seconde au lycée Mont-Roland à Dole, Daniel Chenevat m’a appris l’amour des lettres. J’ai été viré avant le bac que j’ai passé par correspondance, mais si je l’ai eu, c’est grâce à une très grosse note en français. Plus tard, Noël Le Graet, le président de la Fédération française de foot, m’a appris le silence et l’observation. À vous entendre, vous avez passé de longues années dans les écoles privées. La religion vous a-t-elle marqué ? D. T. - Énormément et même plus que cela ! Mes parents étaient et sont très cléricaux, j’allais à la messe. Mais cela frisait l’endoctrinement, j’en ai souffert et je me suis bâti en réaction à cet excès. Ce n’est d'ailleurs pas avec eux que je me suis fait intellectuellement. À la maison, on ne parlait pas de culture, ni de politique… À ce moment-là, j'ai compris qu’il existe des gens qu’on ne voit jamais à l’église, mais pour qui les portes du Ciel sont grandes ouvertes - s’il y a un ciel - parce qu’ils aiment les autres bien plus et bien mieux que certains ! En CM2, j’étais en pension à Voiteur, je rentrais à la maison tous les quinze jours. Pourtant, j’habitais à huit kilomètres ! J’y suis resté cinq ans. Quand on faisait des bêtises, on nous tapait sur les doigts et c’était des élèves de troisième qui nous infligeaient cette punition. Alors, j’ai cherché à m’évader en faisant du tennis de table et en m’engageant dans l’association qui, au collège, organisait des événements pour financer des actions solidaires à Madagascar. J’en suis devenu le président quand j’étais en quatrième et en troisième. Le milieu religieux était dur, mais il m’a fait comprendre que cette vie de groupe ne me convenait pas. J’étais un individualiste qui refusait l’ordre établi. Votre Jura est donc aussi celui de la revanche ? D. T. - Pas de la revanche, plutôt de la réaction ! Je n’aurais pas fait tout ce que j’ai fait dans ma vie si j’étais né dans un milieu confortable. J’avais le sentiment de vivre une injustice formidable quand, l’été, je voyais les châtelains atteler le bateau pour aller à Chalain et que je restais là, à quai, ou quand il y avait la fête foraine et que j’avais deux tickets quand les copains en avaient trente. Par la suite, j’ai voulu éviter ce type de situation à d’autres enfants ; c’est l’origine de mon engagement associatif. Je n’ai jamais eu de détermination particulière, hormis de vivre une vie que je voulais partager avec les autres et j’ai essayé d’exploiter positivement une situation de douleur au départ, empreinte de modestie sociale. En quel sens les entreprises ont également occupé une place prépondérante ? Ü

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Quand il enfourche son vélo, Denis Trossat oublie ses soucis. En cette belle journée, il rejoint Baume-les-Messieurs depuis Château-Chalon.

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C'est au château de la Sauge, à Saint-Lamain, que Denis Trossat a passé son enfance.

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Souvenirs Quand Denis Trossat rencontre le sculpteur Frédéric Jager, les récits d'aventuriers en culottes courtes, se bousculent.


D. T. - Je dois tout à ce milieu, j’y ai passé toute ma vie professionnelle à la Chambre de Commerce et d’Industrie du Jura, d’abord dix ans en conseil d’entreprises pour les hôteliersrestaurateurs, ensuite comme formateur en vente-négociation. Les chefs d’entreprises jurassiens me fascinent, ce sont des investisseurs, donc des explorateurs. Vous allez à Ardon, au milieu des bois et vous tombez sur une entreprise ultramoderne. C’est un spectacle lunaire, mais c’est cela mon Jura… Parce que le climat est dur, les gens sont tout sauf égoïstes. Quand il fait froid et qu’il neige, il est impossible de vivre seul, replié sur soi-même. Les gens sont obligés de se regrouper pour lutter contre les éléments et quand ils se regroupent, ils inventent, ils innovent... Le Jura est le premier département industriel de France ramené à sa population. Si les capitaines d’entreprises avaient voulu gagner de l’argent, ils auraient délocalisé, ils ne l’ont pas fait. Pourquoi ? Pour des valeurs : l’appartenance, la curiosité, la discrétion. Beaucoup sont des visionnaires. Vous avez pu vérifier que le football est aussi un milieu de l’entreprise ? D. T. - C’est certain, mais pour moi, l’aventure du foot a commencé à Passenans, au niveau le plus bas ; j’adorais ce sport, mais les matches cadets et minimes se jouaient le dimanche matin. Or, le dimanche matin, il y avait la messe et pas moyen d’y déroger. J’en ai loupé beaucoup… Je ne jouais pas trop mal, le club de Poligny a même essayé de me récupérer. Mais je suis toujours resté à Passenans. Par fidélité. De toute ma vie, je n’ai eu qu’une licence… que j’ai toujours. Pour moi, le foot est un vecteur d'éducation. On ne remplace pas la famille, mais on peut l'aider. Ce sport populaire apprend aux gosses à ne pas laisser couler l'eau de la douche, à ne pas laisser traîner le matériel, aux parents à partager leur voiture pour

Denis Trossat contemple les toits de Passenans, le village où ses parents habitent une maison jouxtant le stade de football. « C'était l'annexe du club », sourit-il.

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emmener les joueurs au stade. Si tu es un bon footballeur et que tu appliques ces valeurs, tu es un bon homme dans la vie. Comment passe-t-on de Passenans à la Fédération française de football ? D. T. - C’est le système de la pyramide ! Le District du Jura m’a repéré, je suis devenu vérificateur aux comptes, puis j'ai été élu au comité directeur, ensuite vice-président et président de 2000 à 2011. De là, j’ai été élu président du Grand Est et je suis rentré au comité directeur national où j’ai toujours défendu le football de la base. En 2011, j’étais avec Noël Le Graet quand il s’est présenté aux élections nationales et nous avons gagné. Je suis devenu trésorier de la FFF en courtcircuitant le cursus normal de progression. Le Jura est alors monté à Paris ! D. T. - Oui et j’ai découvert une autre dimension en passant d’un budget de 180 000 euros à 210 millions. J’ai croqué à pleines dents dans cette vie nouvelle, cette fonction vous fait manger dans les meilleurs restaurants, boire les meilleurs vins, dormir dans les meilleurs hôtels du monde… En six mois, j’ai pris huit kilos, j’ai dû me prendre en main. Le petit Jurassien était sur une autre planète, dans un monde de lumière, de pouvoir, de médias, mais ce monde peut rapidement faire tourner la tête si on ne conserve pas les pieds sur le plancher des vaches. J’ai essayé de ne jamais oublier d’où je viens. L’aventure a duré six ans et j’ai perdu les élections en avril dernier. J’ai été déçu. Mais, ma chance est d’être resté en contact avec les petits clubs. Durant ces six ans, j'ai continué à vivre au milieu du foot jurassien. Maintenant, je n’ai plus aucune responsabilité. Je reçois moins de coups de téléphone. Dorénavant, mes relations sont autres, mais humainement beaucoup plus profondes


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« Allez, on va s’en sortir, ai-je dit en lui offrant une troisième bière. On doit commencer par la matière première. De la silicone. Il y a quelques usines dans le coin… » Ni une ni deux, on a rejoint ma voiture pour partir en direction d’Oyonnax, capitale de la Plastics Vallée. Dix minutes plus tard (avec une pointe à 190 km/h sur la D436, quand même), on se retrouvait à fouiner dans les poubelles d’une usine de gravure chimique en quête d’un bloc de silicone. « Eurêka ! » a crié mon acolyte en brandissant un magnifique cube de couleur vert pomme. Un bon début. Retour dans la voiture, et cette fois on a filé droit sur Saint-Lupicin (quatorze minutes chrono), où, comme chacun sait, officient deux trois génies de la tournerie. On a trouvé sans difficulté un artisan disponible. Mon ami se montrait assez tatillon sur la forme à donner à l’objet : « Une belle courbe qui monte, voilà. Et si ce n’est pas trop vous demander de tracer quelques nervures… » Aussitôt dit, aussitôt fait : la pyrogravure est

b AMANDINE BAILLY

C’était l’avant-veille de Noël, en plein centre-ville de SaintClaude. Je venais d’acheter un pack de bières, et, en sortant de la supérette, je me suis pris un type en pleine figure. Un choc assez violent, bam ! j’étais sonné. Lui était désolé : « Oh, pardon, monsieur, je ne vous ai pas fait mal ? Vous savez, je suis tellement tracassé. Il faut à tout prix que je trouve ce truc, mais j’ai bien peur de ne pas y arriver… » Il avait un débit ultra-saccadé, alors je lui ai demandé de se calmer et de respirer un peu, puis j’ai posé le pack sur le capot de la voiture garée le long du trottoir, déchiré le carton et lui ai offert une bouteille. Maintenant, je pouvais l’inviter à me raconter ses petits malheurs. Après avoir avalé une bonne gorgée, il a lâché : « Un sex-toy, il me faut un sex-toy pour ma mère. – Pour votre mère ? – Chaque année, elle nous fait une liste de Noël, et on tire au sort pour se répartir les achats, je suis tombé sur le sex-toy. Mais comme toujours, je m’y prends au dernier moment. Je viens de faire le tour de la ville, impossible d’en trouver un. » Bon, j’avais affaire à un sacré zozo. En même temps, il était vraiment paniqué, le pauvre, et je ne me voyais pas l’abandonner comme ça. « Vous savez, ça ne se vend pas n’importe où ces machins, lui ai-je dit. Ni en pharmacie, ni en librairie. On n’en trouve que dans des boutiques spécialisées, des boutiques que l’on appelle des sex-shops… » Il écoutait attentivement, comme un enfant devant son grand-père qui lui explique le fonctionnement du système solaire. Et j’ai donc sorti mon téléphone pour chercher l’adresse d’un sex-shop à Saint-Claude : aucune réponse. En élargissant la recherche aux environs, on m’envoyait à Genève, à Besançon ou à Lyon. « Vous voulez dire qu’il n’existe pas un seul sex-shop dans le Jura ? ! » Il commençait à suer à grosses gouttes, à trembler. Je lui ai donné une deuxième bière. De mon côté, je me suis mis à penser tout haut : « J’ai pourtant souvenir d’un sex-shop à Lons, dans les années 1990. Situé à côté d’un restaurant qui s’appelait Chez nous, dans un petit renfoncement. Quand j’étais au collège, on faisait exprès de passer devant. Parfois, on poussait la porte du magasin et on partait en courant. Oh, d’ailleurs, on avait croisé le proviseur et sa femme qui en sortaient avec deux sacs bien remplis. Après tout, c’était leur droit. Bref. C’est vrai qu’il a fermé rapidement, ce magasin. Mais c’est quand même fou, pas un seul sex-shop dans le Jura ! Le Jura, pays du jouet… Tu cherches un yo-yo, un bilboquet ou même un ballon sauteur, t’es au bon endroit. Par contre, maman te commande un stimulateur de point G ou un œuf vibrant, si c’est une urgence, t’es mal barré. » Heureusement pour mon ami, on m’a toujours appris à ne pas fuir devant l’obstacle.

également une spécialité locale. « Magnifique, vraiment, vous êtes un artiste ! » On y était presque. Car il ne voulait pas se contenter de cette très jolie chose, certes, mais un brin inerte. « Pour maman, je veux du haut de gamme. La pointe de la modernité. » Nous restait donc à intégrer le mécanisme. Huit minutes plus tard (conduite modérée), on entrait dans Moirans, où nous attendait un fabricant de vieux jouets en métal, un technicien épatant, qui nous a même proposé de sonoriser l’objet – mais un vibromasseur qui chante Petit papa Noël, non, l’idée ne nous emballait qu’à moitié. En tout cas, il a super bien bossé. « La Rolls du sex-toy ! s’est exclamé mon ami en avalant la dernière bière du pack. Oh, maman va être contente. » Comme quoi, l’industrie jurassienne a de l’avenir. Le Jura, pays du jouet pour adultes !


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Un peu de fraĂŽcheur pour les randonneurs sur la plage de Chancia.

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Jura Balades

VUE SUR

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Les lacs jurassiens sont tous différents, mais ils ont en commun une beauté sauvage, une sorte de force et de paix tout à la fois. Les découvrir et les sillonner est toujours un moment de communion intense. Ü


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Nicole Beysson, bénévole, restauratrice... et voyageuse.

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Des panneaux d’information pour percer les secrets de ce magnifique lac glaciaire.

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Séance baignade sur la plage du Domaine de Chalain vue depuis le belvédère de Fontenu.


Le lac de Chalain, c’est son pré carré. Nicole Beysson aime ses eaux changeantes, mais elle a tout autant besoin de voguer au bout du monde… Pour mieux revenir.

Le

Chalain secret de Nicole

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Nicole Beysson, c’est le grand écart permanent entre une vie paisible dans un environnement fait de sérénité (à part en été, bien sûr, quand la foule des estivants se presse à Chalain) et des voyages à n’en plus finir en Australie, à Bali... Un prototype de la Jurassienne du IIIe millénaire, pour laquelle le monde n’est tout au plus qu’un village. L'ancrage local est néanmoins nécessaire si l'on ne veut pas s'égarer : « La vie n’est pas simple, commence-telle. En 2009, mon papa m’a proposé de reprendre avec lui le petit snack de Doucier. Depuis, on ne compte pas nos heures quand les clients sont là. » Nicole est une fille de sa génération : école primaire à Doucier, collège à Clairvaux-les-Lacs, lycée à Lons-le-Saunier, fac de socio à Besançon. Après, elle part un an en Nouvelle Zélande pour parfaire son anglais, vivre par elle-même et apprendre à se connaître. Elle revient boucler une équivalence en français/langues étrangères. Depuis, elle jongle entre la petite restauration et ses envies d'évasion : « C’est un rythme qui me convient, je travaille de fin mars à fin septembre et l’hiver, soit je travaille, soit je pars. » Mais cette vie n’est pas tombée du ciel : « Je suis très attachée à cette région et, en même temps, très détachée parce que je sais qu’à un moment de l’année, je vais m'en éloigner. C’est un besoin, il faut que je m’en aille. Quand je reviens, je porte un regard nouveau sur mon environnement, un regard de découverte que les gens qui vivent ici tout le temps n’ont peut-être pas toujours au quotidien. » Nicole Beysson (avec un Y s’il vous plaît) veut vivre l'existence qu’elle aime, c’est une façon d’être : « Je suis bénévole pour le triathlon de Chalain, c’est un gros événement pour le secteur. Moi, je me souviens d’avoir été recrutée toute petite, quand il a commencé en 1995. Je l’ai couru de 1995 à 97, je devais être minime. Je l’ai même gagné dans ma catégorie. Et je ne l’ai manqué que trois fois durant toutes ces

années, quand j’étais à l’étranger. Je m’occupe des sandwichs pour les bénévoles ; c’est sympa d’avoir l’impression de participer à quelque chose. »

L'AVENTURE EN SOLITAIRE Il n’y a pas que le triathlon pour vous ancrer au terroir, Nicole a travaillé sept saisons au domaine de Chalain l’été quand elle était étudiante. C’était le temps des copains, des premières bringues, des soirées sur la plage, des baignades : « J’y retourne très souvent et je vais sous mon arbre, un peu à l’écart, là où j’allais admirer le soleil couchant. Même l’hiver ! Je me souviens qu’une fois, on a pris les chaises longues et on s’est installé dans la neige pour profiter de la lumière. Ce lac est magique ! » Nicole Beysson a ses coins à elle : la crête, à partir du belvédère de Fontenu, juste à côté du chemin ou bien la plage du domaine. Cette année, elle se lance seule dans l’aventure entrepreneuriale : « Au p’tit Creux » va devenir » « le café Imagine ». Nouveau concept, nouveau départ, mais toujours saisonnier : « Je veux mettre ma touche personnelle et offrir un espace nouveau et agréable. Doucier restera toujours mon port d’attache, mais je continuerai à partir et… à revenir retrouver mes racines. »

Pour apprécier Chalain, Nicole n'hésite pas à s'en éloigner. numéro 83 39


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UN COUP D'ŒIL

LE BELVÉDÈRE DE LA FRATE L’un des plus beaux points de vue sur le lac de Chalain aux couleurs incroyables qui se transforment au cours de la journée. La Frate, on y accède par un sentier qui longe la crête et la D90. C’est un chemin à couvert dans la forêt qui longe la falaise et domine le domaine, son château et le lac. La vue est imprenable, bien sûr, mais il règne là une atmosphère étrange où des lapiaz plongent le visiteur dans un livre de légendes.

Le lac émeraude

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UN PETIT VERRE

GLACES DE LA FERME Et si c’était une glace, juste une glace pour se rafraîchir par une belle journée de juillet ? Dans le minuscule village de Fontenu, qui domine le domaine et le lac de Chalain, la petite échoppe de la Glace de la Ferme propose plus de quarante parfums naturels. Alexandre, agriculteur, a diversifié son activité et, en juillet et août (seulement), il fabrique un excellent produit du terroir à partir de son lait. Sa femme Virginie fait le service. Glace de la Ferme, Fontenu Pwww.jura-glacedelaferme.com

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Difficulté : Facile Durée : 3 h Distance : 12 km Dénivelé + : 340 m Guide : Promenades et randonnées Pays des Lacs Balisage : puis et de nouveau

¢ Départ du parking du Belvédère de Fontenu u. Suivre le GR 559 en direction de Chemin Neuf (possibilité de longer la falaise de Fontenu sur un sentier de 200 m et de rejoindre le GR). À Chemin Neuf, continuer tout droit jusque Sur Mont. Nombreux points de vue sur le lac. Poursuivre tout droit en sous-bois, traverser une petite clairière et prendre en face le chemin qui descend. ¢ Au Châtelet, quitter le GR et suivre à gauche le balisage jaune. Longer le lac v, passer à côté du Parcours Aventure. Arrivé à Sous la Baume de Chalain, suivre tout droit la direction “Domaine de Chalain” et rejoindre le parking (ou bien bifurquer à droite juste avant Sous la Baume de Chalain, et quitter le balisage jaune sur 1 km pour suivre la plage du Domaine w. Passer une passerelle et rejoindre le parking). ¢ Au Domaine de Chalain, prendre à droite le chemin qui longe le lac, rejoindre la route. La suivre sur 300 m. Sur le Lac, monter à travers bois un chemin sur la gauche, poursuivre jusqu’à la Place aux bois, continuer en bordure de falaise jusqu’au belvédère Sur la Roche, puis celui de la Frate x et celui Sur le Château. Récupérer le GR, rejoindre la route, la suivre jusqu’au village de Fontenu, traverser le village. Devant la mairie, prendre à gauche et rejoindre le parking du Belvédère.

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La perle en son écrin

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Difficulté : Facile Durée : 1 h Distance : 4 km Guide : Promenades et randonnées Pays des Lacs Dénivelé positif : 200 m Balisage : puis puis

¢ Départ du parking du Belvédère de Fontenu. Suivre le GR 559. ¢ À Chemin Neuf, prendre à gauche le chemin balisé en jaune qui descend. À Sous la Baume de Chalain, continuer à travers le camping v. ¢ Au Domaine de Chalain w, prendre à gauche et monter la petite route qui rejoint la Charrière. ¢ À la Charrière, franchir une barrière métallique, récupérer le GR et tourner immédiatement à gauche, entrer dans le village de Fontenu x, traverser le village. Devant la mairie, prendre à gauche la route qui mène au parking du Belvédère de Fontenu.


Léon Donjon

Prenez de la hauteur Préparez votre visite chez nous sur

Bernard Leroy

GRANDVAUX

numéro 85 www.haut-jura-grandvaux.com 39


b NUMÉRO 39

À chaque instant, Josiane Bertolini perce les mystères des lacs des Mortes et de Bellefontaine.

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Un paradis pour tous ceux qui pratiquent le VTT.

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Petite pose en famille au-dessus de la roche Champion pour admirer le paysage.


Accompagnatrice de montagne, Josiane Bertolini puise son énergie vitale dans les couleurs et les innombrables fleurs des lacs des Mortes et de Bellefontaine, entre le Doubs et le Jura.

flâneries Josiane

Les de

O

On ne les voit pas encore depuis la route, ils se cachent derrière les sapins. Josiane Bertolini dévoile son lieu de paix pour une balade sereine, au pied des falaises de la forêt du Risoux. Les voilà qui s’étendent sous nos yeux, bleu foncé entourées de verts, de jaunes, de roses et de violets, de rouges et d’oranges. Les lacs des Mortes et de Bellefontaine dévoilent leurs couleurs, l’un se trouvant sur la commune de Chapelle-des-Bois, dans le Doubs, l’autre juste à côté sur la commune de Bellefontaine, dans le Jura. Séparés par une moraine, les deux lacs communiquent pourtant entre eux. En zone Natura 2000, ils forment, avec les tourbières alentours, l’un des plus remarquables écosystèmes de France, rendant la Jurassienne souriante mais prudente. « Conseillez aux promeneurs d’emprunter les chemins pour ne pas abîmer les fleurs ».

LA REINE DES FLEURS Ce sourire bienveillant appartient à ceux qui cultivent la douceur. Incollable sur chaque plante, elle guide paisiblement ses promeneurs et désigne du bout du doigt les anémones, les droséras, grassettes, sphaignes, myrtilles et autres espèces à fruits, airelles, canneberges ou camarines noires. « J’aime ces lacs en toute saison. Au printemps, les crocus apparaissent dès la fonte des neiges, puis c’est au tour des gentianes bleues sur les coteaux. L’été, ce sont les trèfles d’eau, les trolls (une variété de renoncules), le début de la Reine-des-prés et le lys Martagon. Les fleurs demeurent jusqu’en septembre au moins. La germanica, une variété de gentiane, clôt le bal. L’automne, les bouleaux sont jaunes et la bruyère violette donne au sol une couleur incroyable. L’hiver, en raquettes sous la neige, c’est magnifique. Les ambiances sont à chaque fois différentes… » Pour les plus aguerris, c’est définitivement le belvédère de la Roche Bernard que Josiane Bertolini conseille, surplombant les deux lacs à flanc de falaise. Les eaux peu profondes donc peu poissonneuses

attirent peu d’oiseaux. « On peut cependant apercevoir quelques milans, des canards et des grèbes huppés », confie l'accompagnatrice de montagne, au moment même où passe un goéland. L’été, les paysans font les foins des prairies voisines de Chapelle-des-Bois, où la fruitière à comté est en bio. Les vaches font tinter les cloches à leur cou et Josiane Bertolini se régale de ces bruits de campagne. Elle aime aussi toutes les histoires de ces lieux : durant la Seconde Guerre mondiale, bon nombre d’habitants du secteur résistaient, faisant passer les Juifs en Suisse voisine.

DEUX LACS EN ÉQUILIBRE Dans un passé moins glorieux, c’était aussi le chemin idéal pour la contrebande… Mais au fait, pourquoi ce nom de lac des Mortes ? « L’eau du lac part dans des rivières souterraines qu’on ne voit pas, d’où cette référence aux eaux mortes. Certains racontent aussi qu’un soir de Noël, deux jeunes filles se rendaient à la messe de Minuit en passant sur le lac gelé et se sont noyées après que la glace ait cédé. » Mais l’anecdote favorite de notre guide, par ailleurs prof de Qi Gong, lui ressemble : « En hiver, le lac de Bellefontaine alimente celui des Mortes. En été, le prélèvement d’eau de consommation plus important et la sécheresse inversent la tendance. Ces deux lacs, ce sont le Yin et le Yang ».

Un pays où l'histoire, la grande, se mêle aux légendes. numéro 87 39


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UN COUP D'ŒIL

LA TAILLERIE DE BELLEFONTAINE Une boutique un peu mystérieuse que Gilbert Duraffourg, lapidaire-diamantaire, a créée voilà près de quarante ans. En cet endroit se trouvent toutes sortes de pierres précieuses : diamants, émeraudes, rubis, saphirs et beaucoup de pierres fines. Aujourd’hui, sa fille Valérie perpétue la tradition. Diplômée de gemmologie, elle pourra vous expliquer les secrets des carats et autres subtilités d’un métier qui fut longtemps l’un des savoir-faire du Haut-Jura. Parking des téléskis, Bellefontaine Pwww.lataillerie.com

Un balcon sur le lac des Mortes

b DR

UN PETIT VERRE

L’ÉPICÉA Un petit hôtel-restaurant au pied du massif du Risoux, mais surtout un bistrot où se désaltérer après une bonne balade. Ici, on est en pleine nature, quasiment dans les champs avec les montbéliardes comme voisines. Plutôt bucolique et apaisant. Caroline et Olivier proposent aussi des animations à thème le vendredi soir en juillet et août. Se renseigner sur place ou à l’office de tourisme. Bref, un petit coin comme on les aime, couleur locale avec l’accueil chaleureux en plus. Pwww.l-epicea.fr

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Difficulté : Moyenne Durée : 3 h 30 Distance : 13 km Dénivelé + : 370 m Guide : Morez-les Rousses-la Faucille Balisage : puis et de nouveau

¢ Départ du parking au Carrefour du Petit Bois. Suivre le balisage jaune en direction Les Lacs à travers prés. Traverser le ruisseau, poursuivre dans la tourbière u, franchir le pont qui sépare le lac des Mortes et le lac de Bellefontaine v, remonter sur l’autre versant et rejoindre une petite route à Sur les Lacs. ¢ Prendre à gauche, récupérer le GR et poursuivre jusqu’à la Caserne des Douanes. Là, continuer en direction de Chapelle des Bois, passer devant Chez l’Aimé. Arrivé Sous le Risoux des Lacs, quitter la route et suivre le GR à droite, longer la maison et monter à travers les prés-bois jusqu'à la ferme. Suivre la route sur 200 m et prendre un chemin à droite. À La Madonne, suivre la direction Le Réservoir w, prendre à droite et grimper (montée difficile), arrivée à la Roche Champion x, belvédère et Croix. ¢ Suivre le GR en sous-bois sur la crête. Au Gît de l’Échelle, belle vue sur les lacs. Continuer tout droit jusque Sur le Risoux des Lacs et prendre à droite. À la Croisée des Roches, suivre le GR et rejoindre la Roche Bernard y. ¢ Continuer en direction Les Essarts, quitter le GR et prendre la direction La Feuillat (descente difficile). Là, à droite rejoindre Sur les Lacs, prendre à gauche et traverser le pont entre les deux lacs, suivre la tourbière, les prés, passer le ruisseau et revenir au parking.

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Il était une fois les tourbières

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Difficulté : Moyenne Durée : 1 h Distance : 5 km Dénivelé + : 50 m Guide : Morez-les Roussesla Faucille Balisage : puis puis

¢ Départ du parking au Carrefour du Petit Bois (1 100 m). Suivre la D46 sur 100 m en direction de Chapelle des Bois, jusqu’au Chalet des Mortes u. Tourner à droite et suivre la petite route jusque Sous le Risoux des Lacs, puis Chez l’Aimé, puis la Caserne des Douanes. ¢ Poursuivre jusque Sur les Lacs v, quitter la route et prendre à droite le sentier, descendre jusqu’au bord du lac des Mortes w. ¢ Continuer le chemin, franchir le pont x et prendre le chemin à travers la tourbière y. Longer le lac des Mortes, rejoindre les prés, passer sur le ruisseau et remonter jusqu’au parking.


BATEAU

LE LOUISIANE Lac de Vouglans Croisière Croisière-repas

Croisière Bar Restaurant Embarquement Base de loisirs du Surchauffant La Tour du Meix

Renseignement/Réservation : 03 84 25 46 78

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Un panorama exceptionnel sur la vallée de l'Ain.

La plage de Chancia pour une halte rafraîchissante.

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René Allard dans le café qu'il tient à Coisia, dans la vallée de l'Ain.


Dans le village de Coisia, il y a les empreintes des dinosaures retrouvées en 2004 le long de la route... et René Allard, le paysan bistroquet qui s’échine tant bien que mal à garder son café ouvert.

Le

sémaphore

C

de Coisia

C’est un petit estanco grand comme un mouchoir de poche dans lequel on pénètre à Coisia. Pas de bar, pas de tireuse à bière, juste un meuble hors d’âge où trônent quelques bouteilles. Et puis une longue table couverte d’une toile cirée, quelques chaises. Au mur, de vieilles photos du village… C'était avant. Avant quoi ? On ne sait plus très bien parce que c’était avant… Cette époque, on a tendance à vouloir l'oublier parce que chaque détail vous rappelle qu’ici, en Petite Montagne, c’était vraiment la ruralité profonde, avec tout ce que l’appellation comporte de suranné. Pourtant, René Allard et ses 68 ans alertes semblent ramer à contre-courant. Enfant du pays, de parents et grands-parents paysans sur cette terre riche des alluvions de l’Ain, il a vécu une vie laborieuse d’agriculteur : « Nous étions deux enfants et comme j’étais le seul garçon, ça n’a pas fait de pli, mes parents m’ont dit que je reprendrai la ferme ! » À quelques encablures de l'actuel lac de Coiselet, une ferme permettait de vivre, mais guère plus. La terre, le bois… René Allard, avec son brevet professionnel d’agriculture, a joué les novateurs : « J’ai été le premier de la commune à installer une trayeuse automatique. » Marié, divorcé, père de deux filles et un fils qui a préféré faire carrière dans la police, il a profité de ses 58 ans pour prendre sa retraite : « J’avais les trimestres, mais pas l’âge. Je suis parti avec une petite retraite ! » Au fond, la vie de René Allard est une vie simple : « Je n’ai jamais eu envie de vivre ailleurs, on est bien ici, confie-t-il. J’aime mon village, j’y suis né, j’y suis allé à l’école, j’ai joué dans ses champs et ses bois, j’ai été au lac, je garde trois hectares de terre pour ma fille qui élève des chevaux au village, je lui fais son foin ! » Pourtant, en 1982, l'homme décide de reprendre le café familial : « Il était à mes parents, c’est une grande licence qui permet de vendre de l’alcool. À l’époque, les gens venaient, il y avait des clients. Les jours d’enterrement, on n’arrivait pas à servir tout le monde, mais maintenant quand il y a un

enterrement, les gens louent la salle communale et apportent eux-mêmes à manger et à boire. Les jeunes sont partis, il n’y a même plus de vieux. »

ENTRE PIC ET LAC Et pourtant, entre les ruines du château du Pic d’Oliferne où il a usé ses fonds de culotte et le lac de Coiselet, René vit une vie qui lui convient très bien : « Je me souviens que mes parents, le soir, racontaient la légende des filles du comte qui avaient été mises dans un tonneau plein de clous et précipitées au bas de la falaise. Elles se sont transformées en trois rochers qu’on peut encore voir. » On les appelle les trois damettes. Dans le dictionnaire d'Alphonse Rousset, elles ne sont plus les filles du seigneur mais ses captives, et les assaillants sont leurs fiancés venus les arracher à un autre barbe bleue. René Allard aime les sentiers qui grimpent jusqu’à la forteresse. C’est son jardin. Bien sûr, il y a le lac aussi : « Mais il n’y a pas beaucoup de touristes, regrette-t-il. Quand je vois le monde qu’il y a dans la région des lacs… » Attention, le Jurassien n’est pas envieux. Son village, il l’aime comme il est : « J’aime la beauté des paysages, le point de vue quand on est au château. Ma philosophie, c’est la simplicité et la transparence. Respecter les autres, le milieu dans lequel on vit et se faire respecter. Cela me suffit ! ».

Le château d'Oliferne n'a cessé d'être son terrain de jeu. numéro 91 39


)Itinéraires(

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UN COUP D'ŒIL

LE CHÂTEAU D'OLIFERNE Ce sont des ruines d’un château construit vers 1230 par Jean de Chalon et détruit en 1592 par les troupes d'Henri IV, mais quelles ruines ! Le site d’Oliferne est l’un des plus célèbres de toute la Petite Montagne. À 807 m d'altitude, il domine les vallées de l’Ain, de la Bienne et de la Valouse. D’ici, on peut même admirer les Alpes. Un chantier de restauration y est conduit par l'Adapemont. PAccessible depuis Vescles par le hameau de Boutavent.

La forteresse et le lac

b FACEBOOK

UN PETIT VERRE

L'AUBERGE DU BARRAGE Au cœur du hameau de Menouille, au pied du barrage de Vouglans, l'auberge a ouvert ses portes à nouveau il y a trois ans. Une bonne adresse pour boire un verre entre amis ou déguster quelques spécialités de Franche-Comté. À l'exemple de la tartine comtoise avec son pain gratiné au comté, son jambon et sa crème de chardonnay. Entre amis, les « pizzas bistronomiques » ne manqueront pas d'amateurs. Tél. : 03 84 24 95 46. Pwwww.facebook.com/ aubergedubarrage

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Difficulté : Moyenne Durée : 4 h Distance : 11 km Dénivelé + : 550 m Guide : Petite Montagne et région d’Orgelet Balisage :

¢ Départ depuis le lavoir de Condes à proximité du lac de Coiselet u. Monter l’Impasse des Sources, poursuivre le sentier. Avant le chemin en béton, prendre à droite et grimper à travers bois entre les murets de pierres sèches. Rejoindre la piste carrossable, la suivre à gauche sur 300 m, puis tourner à droite. ¢ Poursuivre la montée jusqu’au Pic d’Oliferne, prendre à gauche le chemin qui mène au château d’Oliferne en longeant le mur d’enceinte de l’ancienne forteresse. Au sommet, vue à 360 degrés sur la vallée de l’Ain, le lac de Coiselet, les monts Jura et le Mont-Blanc par temps clair v. ¢ Redescendre les marches, rejoindre le mur d’enceinte et revenir jusqu’au panneau Pic d’Oliferne. Poursuivre à gauche. Au Bois des Marguerites, prendre à droite sur 500 m, puis reprendre à gauche un chemin qui descend, puis remonte et longe la crête du Molard de la Justice sur 3 km w. Beaux panoramas. Le chemin vire à droite et descend en direction du hameau de Boutavant. Suivre la Rue Principale, puis la Rue du Belvédère, le chemin mène à un petit parking. À droite avant le parking, un escalier et un petit sentier mènent au Belvédère de Boutavant x, faire l’aller-retour (10 minutes) et suivre la piste carrossable, puis descendre à droite le sentier emprunté à l’aller. Rejoindre Condes.

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Le gardien du lac

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Difficulté : Moyenne Durée : 2 h Distance : 4 km Déniv. + : 250 m Guide : Petite Montagne et région d’Orgelet Balisage :

¢ Départ du parking du village de Chancia. Prendre la route qui monte en direction du belvédère, passer devant la chapelle et continuer en direction de Sur la Cize, puis Sur Vaillière. Continuer Sur l’Antenne, prendre à gauche le Molard de Netru et, après 10 m, de nouveau à gauche un chemin qui grimpe u. ¢ Depuis le sommet, descendre à travers les bois. Rejoindre la route, la traverser, prendre à droite sur 50 m, puis à gauche un chemin qui longe le lac. Arrivée à La Plage w, prendre le chemin en face (barrière verte) rejoindre le lavoir à l’entrée du village de Condes. Prendre le sentier à gauche et rejoindre le parking.


… et réveillez tous vos sens ! Assistez à la fabrication du Comté en fruitière, pénétrez le silence des caves d’affinage, découvrez l’univers de la ferme, visitez la Maison du Comté ... Les producteurs de lait à Comté AOP, les fromagers, les affineurs du Massif jurassien et tous les passionnés de leur noble terroir vous souhaitent

Les Routes du Comté, réseau touristique et gastronomique dans les Montagnes du Jura

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Photos : S. Godin (lieu : Saint-Pierre • Jura) - Studiovision Conception : Nansen Développement / www.nansen.fr • Création : www.berengerlecourt.com

la bienvenue sur les Routes du Comté !


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Flora Pernelle a choisi de reprendre la gestion du camping du Frasnois, au bord du lac de Narlay.

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Le Pic de l’Aigle domine de 100 m les quatre lacs.

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Saut groupé dans le lac de Narlay.


À 35 ans, Flora Pernelle a plaqué son métier de commerçante pour se mettre au vert. Avec son compagnon Florian, ils ont repris le petit camping municipal de Narlay. Un pari audacieux.

Gardienne du Paradis

E

Enfant de Bonlieu, Flora Pernelle a pas mal bourlingué dans sa jeunesse. Études en arts plastiques, puis dans la gestion administrative à Montpellier et Lyon, elle a enchaîné les expériences, notamment dans la vente, fait un petit passage en Suisse comme travailleuse frontalière, avant de se poser au domaine de Chalain, où elle a ouvert sa propre boutique de décoration. Elle y est restée dix ans ; ce travail saisonnier a fini par la lasser : « L’hiver, je vivais à Dole ou à Clermont Ferrand, je faisais des petits boulots dans la vente ou le secrétariat, mais, en 2014, j’avais fait le tour de la question. Et puis j’avais besoin d’un retour dans mes forêts et mes lacs. En fait, je voulais une autre vie plus écolo, me faire plaisir sans nuire à la nature… » Coup de chance, la commune de Narlay envisage une délégation de service public pour booster son petit camping, un endroit magique connu des vrais amateurs d’espaces et de liberté, créé dans les années 1970 pour juguler un peu le camping sauvage, florissant à l’époque. Ici, on vient de génération en génération, il n’y a pas vraiment d’emplacements délimités, c’est le camping à la bonne franquette et les fans rappliquent de très loin pour ce coin de liberté au bord d’un des plus beaux lacs du Jura.

trice : « Nous fixons nous-mêmes nos salaires en fonction de la situation. Il a fallu tout mettre entre parenthèses : nos vies, nos sorties, nos envies... Depuis un an, c’est le camping qui est prioritaire, mais cet endroit est tellement atypique. Il nous correspond si bien que les obstacles sont surmontés sans réelles difficultés. Et puis, ma fille de six ans se plaît vraiment ici ; c’est une forme de paradis. » Un paradis que vient de rejoindre un bébé cet hiver. Si ce n’est pas la foi… : « Ce lieu n’a jamais changé, il n’a jamais été dénaturé. À Ilay, il n’y a pas de catamaran, juste des pêcheurs. Le soir, je pars de la maison et je fais une balade au-dessus des cascades du Hérisson et quand je me promène au belvédère des Quatre Lacs ou au Pic de l’Aigle, je me dis que c’est une vraie chance d’avoir pu conserver cet environnement intact. Il faut avoir vu la lumière changeante sur le Petit Maclu, avoir pris la barque et se poser au milieu du lac dans le silence… Tout cela, j’essaie de le transmettre aux gens de passage et, pour le reste, on verra bien. S’il faut aller travailler en usine l’hiver, nous irons, ce n’est pas un problème. L’argent, ce n’est pas ce qu’on recherche. C’est vrai, dans ce camping, on n’a pas de Wi-Fi et, dans le coin il n’y a pas de salle de concert, ni de spectacles, aucune belle expo, mais on ne s’ennuie pas et on est en phase avec nous-mêmes ! »

UNE AVENTURE FAMILIALE Pendant un an, avec Florian, Flora prépare son dossier de candidature : « On a hésité jusqu’au bout parce que c’était sauter dans l’inconnu. Mais on s’est dit qu’il faut de l’audace dans la vie et que, même si on est sûr de rien, même si nous restons tributaires des aléas climatiques, même s’il a fallu investir nos économies pour apporter notre touche à ce camping un peu vieillot, le jeu en valait la chandelle. C’était le prix à payer pour vivre la vie qui nous plaît. » Et, franchement, les jeunes y croient. Ils ont donc créé leur propre entreprise. Voilà Flora bombardée direc-

Il faut avoir vu la lumière changeante sur le Petit Maclu. numéro 95 39


)Itinéraires(

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UN COUP D'ŒIL

LE PIC DE L’AIGLE Pour sûr, il porte bien son nom ce rocher qui domine de 100 mètres les Quatre Lacs ! Tutoyant les 1 000 m d’altitude, il est accessible depuis la Chaux du Dombief, où une grimpette de 90 m de dénivelé vous attend. On peut aussi y accéder par le GR 559 qui fait découvrir au passage les beaux belvédères des Trois et des Quatre lacs. Le Pic de l’Aigle, c’est un endroit d’histoire et de mystère. Un vieux château, aujourd’hui disparu et la légende du Cavalier de Bonlieu hantent les lieux. PAccès par la D39

Les Quatre Lacs, chapelet de perles

b LA CABORDE

UN PETIT VERRE

L’ÉOLIENNE Au hameau de la Fromagerie, en descendant depuis Ilay, ce restaurant, qui fait aussi chambres d’hôtes et gîtes, est un superbe endroit pour étancher sa soif, à côté d’un espace botanique qui permet de découvrir 300 plantes médicinales et de rocailles dans leur milieu naturel. Une exposition (gratuite) donne aussi l’occasion de se familiariser avec ces plantes et de tout connaître sur leur utilisation. Hameau de la Fromagerie, le Frasnois Tél. : 03 84 25 50 60 Pwww.eolienne.net

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Difficulté : Moyenne Durée : 4 h  Distance : 13 km Dénivelé + : 480 m Guide : Promenades et randonnées : Pays des Lacs Balisage : puis puis

¢ Départ depuis le parking de l’Église du Frasnois. Suivre la route en direction du camping Sur Narlay. À l’entrée, quitter le chemin balisé qui descend à gauche et prendre la direction du lac. À la hauteur du sanitaire, tourner à droite et prendre le chemin sous bois, passer devant une fontaine. Avant de rejoindre le CD75, tourner à gauche et rejoindre le chemin balisé qui fait le tour du lac de Narlay. Prendre à droite, rejoindre un parking, traverser le CD75 et suivre la direction Belvédère des Quatre Lacs. ¢ Rejoindre la route, la suivre sur 200 m jusqu’au parking du Petit Maclu u. Tourner à gauche, longer la route sur 200 m, puis à droite rejoindre le GR et grimper en lacets à travers bois. Suivre le chemin de crête, rejoindre le Belvédère des Quatre Lacs v, puis celui des Trois lacs et poursuivre jusqu’au Pic de l’Aigle à 991 m w. ¢ Descendre à droite le sentier jusqu’au Pied du Pic, prendre le petit sentier parallèle au gros. Suivre le GR. Aux Rousselets, tourner à droite. Au Chemin des Lacs, prendre à gauche, longer le lac d’Ilay x. Traverser la route et poursuivre jusqu’au hameau de la Fromagerie. Au restaurant l’Éolienne, quitter le GR et suivre à droite le balisage jaune en direction du Frasnois. Rejoindre l’église du Frasnois à travers prés et bois.

b NUMÉRO 39

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Narlay de vert vêtu

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Difficulté : Facile Durée : 1 h 15 Distance : 5 km Déniv. + : 130 m Guide : Promenades et randonnées : Pays des Lacs Balisage : et

¢ Départ depuis le hameau de Narlay. Suivre la route, puis le chemin en direction du camping municipal. À l’entrée, quitter le chemin balisé et prendre la direction du lac. À la hauteur du sanitaire, tourner à droite et prendre le chemin sous bois, passer devant une fontaine, poursuivre. Avant de rejoindre le CD75, tourner à gauche et rejoindre le chemin balisé jaune qui fait le tour du lac de Narlay. ¢ Prendre le chemin à gauche et suivre le balisage jaune qui contourne le lac u, d’abord dans les bois puis à travers prés. L’accès au lac est aménagé en plusieurs endroits, remonter jusqu’au hameau de Narlay v en suivant le chemin au bord du lac.


Moirans-en-Montagne

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Jura Histoire

HENRI MAIRE on

Un vigner au service e c n a r F a l de

En juillet, Henri Maire aurait eu 100 ans. Il n'a pas seulement été le vigneron que l'on connaît. Le Jurassien a aussi, à sa manière, servi l'État et sa diplomatie internationale. Ü 98 numéro

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Henri M ministr URSS Ambass Vin fou

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Arbois

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À LA TABLE DES GRANDS Le nectar qui en sera issu va donc être dégusté sur les tables des plus grands de ce monde. Même s'il s'est toujours gardé de tout militantisme politique, Henri Maire est de « tendance » radicale-socialiste, ce que confirme sa complice amitié avec Edgar Faure. Celui-ci, élu député du Jura en 1946, ministre du général de Gaulle, puis du président Pompidou, ne peut qu'être séduit par un Jurassien hors normes, ambitieux pour son entreprise viticole, mais aussi pour tout le vignoble arboisien. Jusqu'à son décès en 1988, il demeurera le soutien constant de son compatriote. C'est un autre serviteur de la République qui est à l'origine de ce qui sera la plus grande réussite commerciale d'Henri Maire, le « Vin fou ». Charles Brune, né à Arbois en 1891, est ministre des PTT en 1950, avant de devenir ministre de l'Intérieur. Cherche-t-il, comme l'a assuré un chroniqueur, à « offrir un vin original aux gens de la capitale » ou espère-t-il aider l'un de ses plus prestigieux électeurs ? Toujours est-il que l'élu a trouvé son « vin original ». Pour Henri Maire, reste à le faire connaître du grand

En 1959, Henri et Janine Rousseau, Henri Maire, Jean Varéchon, Henri Martin et Stepan Vassilievitch Tchervonenko, diplomate soviétique qui fut notamment ambassadeur d'URSS en France, en Tchécoslovaquie et en Chine.

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D DE MOSCOU À SAN FRANCISCO, DE BRUXELLES À PRETORIA, LE NOM D’ARBOIS EST ASSOCIÉ À CELUI DE LOUIS PASTEUR… mais aussi, et plus souvent qu’on ne le pense, à celui d’Henri Maire qui aurait eu 100 ans en 2017. Les deux hommes n'ont pas vécu dans le même siècle, ils partagent pourtant une histoire commune depuis le jour où le vigneron a accepté la proposition de l'Académie des Sciences d'entretenir la vigne de Rosières ayant appartenu au grand savant et sur laquelle il a mené ses expérimentations sur

la fermentation. Cette parcelle de 47 ares 50, à l'époque pratiquement à l'abandon, a une spécificité ; son vin couleur corail n’est pas vendu, mais réservée à des occasions remarquables et à des fins caritatives. C'est en 1945 et avec l'accord du petit-fils du savant que le Jurassien arrache les vieux ceps et replante 2 470 pieds de vigne avec les quatre principaux cépages jurassiens (chardonnay, trousseau, poulsard et savagnin), mais aussi trois cépages secondaires (pinot, aligoté et melon) et un plant inconnu, non répertorié dans le catalogue européen des variétés. Les chercheurs l'ont baptisé « plant Pasteur » et il est sauvegardé.


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En juillet 1955, l'Américain Eisenhower, le Soviétique Khroutchev, le Britannique Eden et le Français Pinay se réunissent à Genève pour décider de l'avenir du monde. S'ils optent pour la détente internationale, le Daily Telegraph laisse entendre que le Vin fou n'y est pas étranger.

éric Grandmaison

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public. Il fait alors appel à l'agence publicitaire Roumagnac et profite du génie créatif d'un illustrateur hors pair qui devient son ami, Paul Grimault, surtout connu comme réalisateur de films d'animation (Le roi et l'oiseau sur un scénario de Jacques Prévert). Le dessinateur conçoit, en 1951, l'élégante mascotte qui ornera les bouteilles de Vin Fou. Un produit qui connaît immédiatement un extraordinaire succès, renforcé par la pose de plus de 2 000 panneaux publicitaires sur les routes de France, une énorme campagne sur les ondes de Radio Luxembourg (futur RTL) et la création d'une Carte du Tendre par Paul Grimault, déclinée sur des foulards de soie ! En juillet 1955, à la conférence de Genève des quatre Grands (Eisenhower, Khrouchtchev, Eden, Pinay), Edgar Faure réussit à faire servir son Vin fou. Un dessin humoristique du Daily Telegraph laisse entendre que c'est grâce à lui que peut enfin s'amorcer la détente !

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AMITIÉ FRANCO-RUSSE Plus étonnante est l'amitié d'Henri Maire pour Sergueï Vinogradov qui est « ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de l'URSS en France » de 1953 à 1965. MarieChristine Tarby, sa fille, se souvient bien de cet homme affable et jovial qui fréquente alors les salons du château Montfort, entre le vallon de la Cuisance et celui du ruisseau Javel. La rencontre mérite d'être contée. En 1959, Henri Maire organise un jeu : il offre 1 000 bouteilles à qui offrira la preuve photographique que la face cachée de la lune ne ressemble pas Ü

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Henri Maire a reçu en Arbois les premiers ambassadeurs canadiens en France, de Pierre Dupuy à Claude Charland.

offre même une vigne à l'Union soviétique par l'intermédiaire de Valérian Zorine, ambassadeur en France de 1965 à 1971. En pleine guerre froide, la « diplomatie » du vigneron n'est pas à sens unique. La firme est très implantée commercialement au Canada et Henri Maire fait cadeau, « en Rosières », d'une parcelle de vigne à l'ambassadeur du Canada. Ses relations politiques locales — Edgar Faure, le sénateur Pierre Jeambrun, Jacques Duhamel, ministre de la Culture puis de l'Agriculture —, son habileté de négociateur, sa position de viticulteur moderne, en font un interlocuteur privilégié, y compris lors de négociations portant sur la réforme des politiques agricoles européennes. Marie-Christine Tarby évoque ainsi plusieurs réunions, à Arbois, en présence de Sicco Mansholt, le commissaire européen à l'agriculture, auteur du plan portant son nom qui préparait la réforme de la PAC. « Notre maison était le refuge des discussions non officielles », se souvient-elle.

INSPIRATION AMÉRICAINE Désormais influent, Henri Maire se fait ouvrir des portes fermées au commun des mortels. En Californie, il est ainsi accueilli par Ernest Gallo, le très puissant et premier Ü

à la vue fantaisiste imaginée par Paul Grimault. Deux mois plus tard, le satellite soviétique Luna 3 en rapporte des photos. Beau joueur, Henri Maire envoie les mille bouteilles aux spationautes soviétiques. Là encore, c'est une incroyable opération de publicité et le début d'une amitié avec l'ambas-

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Coups de pub

sadeur Vinogradov. On dit que des bouteilles de Vin Fou ont été retrouvées dans les stations spatiales soviétiques. Ce qui est sûr, c'est que Marie-Christine Tarby, ayant été autorisée à visiter certaines bases spatiales très protégées, y a vu des bouteilles de vin Fou, seul vin autorisé là-bas. Elle a pu également en voir exposées dans le musée Korolev (du nom du fondateur du programme spatial soviétique). C'est dire le retentissement qu'a eu le Vin Fou en Union Soviétique. Edgar Faure s'efforce à l'époque de réchauffer les relations avec l'URSS et Henri Maire

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Parmi les « coups » médiatiques organisés par Henri Maire, il faudrait citer aussi ce jour de 1955 où une pièce de Vin Jaune et des clavelins sont emmurés dans la cave du restaurant La Tour d'Argent à Paris, en même temps qu'un chausson de la danseuse Ludmilla Tchérina. L'ouverture du caveau a eu lieu en 2001, en présence de la vedette et du meilleur sommelier du monde, Philippe Faure-Brac. Et aussi ce tour du monde en bateau d'un fût de vin confié au célèbre navigateur et scientifique Alain Bombard. Le retour donna lieu au lancement d'une opération « Vin retour des Isles » pour prouver que les voyages permettent au vin de vieillir en s’améliorant. Le grand chef Raymond Oliver prolonge l'opération par des recettes concoctées au Grand Véfour avec la complicité télévisuelle de la speakerine Catherine Langeais. Telles sont quelques-unes des réalisations de cet entrepreneur exceptionnel qui connut une progression somptueuse, devenu plus grand propriétaire exploitant du Jura avec 400 hectares, dont 300 en vignes, et plus important employeur de la ville d'Arbois.


Domaines Henri maire

De l’ombre à la lumière Henri Maire, c’est l’histoire d’une trajectoire qui commence en 1632 avec le recensement d’un Maire « ayant vigne et cave ».

1939 Henri Maire hérite de 2,6 hectares de vignes. Il crée progressivement un immense domaine presque éclipsé par l’aura des marques auréolées de succès éblouissants dans les années 1950 que crée ce pape du Jura tel le fameux Vin Fou. Aujourd’hui c’est une autre famille, Boisset, voisine bourguignonne, qui assure la courbe de cette trajectoire en ouvrant les domaines Henri Maire sur le monde tout en respectant un patrimoine intact. La rénovation de la boutique historique d’Arbois en a été le premier signe. Mais c’est au cœur de ses domaines viticoles qu’il faut regarder car avant d’être une marque Henri Maire est avant tout un domaine, « vigneron par excellence » comme il se définissait lui-même. Aujourd’hui l’exploitation de ses cinq domaines sur Arbois, Pupullin, Château-Chalon, L’Étoile, couvrent 280 hectares. Une seule et même ligne de conduite préside à leur exploitation, un travail de valorisation du vignoble qui se traduit par une sélection parcellaire drastique, des sélections clonale et massale rigoureuses pour des replantations qualitatives. Le travail dans les vignes, est basé sur le respect de la nature et des sols. Des bêchages un rang sur deux, des remontages de sols pour aérer les terres soumises au tassement dû à l’humidité, l’enherbement pour contrôler vigueur et rendement. Enfin, bien sûr, une taille adaptée à chaque cépage. Si le Jura est l’un des terroirs les plus préservés de France, il est aussi l’un des plus petits puisque l’appellation des vins du Jura couvre seulement 2 000 hectares. Nourris à la marne, l’argile et le calcaire, élevés à l’ombre des vallées et à la lumière oblique de la montagne. Les cépages indigènes, poulsard, savagnin et trousseau et leurs cousins bourguignons pinot noir et chardonnay engendrent diverses expressions et c’est bien là l’originalité du Jura : des vins vifs, floraux, élégants, suaves, intenses, lumineux, fruités, souples, corsés, singuliers, généreux, liquoreux… L’univers visuel de la marque a été retravaillé dans cet esprit, respect du passé, confiance en l’avenir : les couleurs illustrent le passage de l’ombre à la lumière. Le brun pour l’ombre de la terre, des vignes, des fûts et l’obscurité bénéfique des caves. La lumière d’altitude, le chatoiement cristallin des bulles de Crémant, le doré de la noble oxydation qui se dévoile… Le porteur de biou*, illustration traditionnelle, symbolise la métamorphose perpétuelle du travail de la vigne au vin, de l’ombre à la lumière… *Le biou est une grappe géante portée en procession dans Arbois le premier dimanche de septembre en prémices des vendanges.

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producteur mondial de vins. À plusieurs reprises, il rencontre les plus grands scientifiques américains des Universités de Davis et Fresno qui mènent des travaux sur le vin. Il en rapporte de nouvelles techniques qu'il applique sur ses terres : plantations à trois mètres, regroupement des parcelles en grands domaines d'un seul tenant, rationalisation de l'encépagement, méthodes de vinification, utilisation de nouveaux médias, vente à domicile... Il participe aux réunions de l'Office international de la vigne et du vin. Ses homologues du monde entier sont reçus dans le Jura. En 1960, il acquiert le domaine de Grange Grillard qu'il organise sur le modèle de Clos Vougeot. Débute une ère de réceptions fastueuses souvent animées par Les Fiouves de Censeau que commande Charles Vauchez.

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Une figure jurassienne

Le 20 octobre 1955, Henri Maire fait emmurer une pièce de Vin Jaune dans le restaurant parisien La Tour d’Argent, en présence de la merveilleuse Ludmilla Tcherina qui esquissera un pas de danse sur le caveau. Cinquante ans après, l'artiste assiste à l'ouverture, toujours sous les flashs des photographes.

LE SHOW-BIZ À LA FINETTE L'année suivante ouvre La Finette, restaurant populaire qui met en exergue les spécialités jurassiennes et francs-comtoises, ainsi que les vins Henri Maire, dans une ambiance chaleureuse avec des tables en rondins de bois vernis. « C'est le seul restaurant que je connaisse, affirme Marie-Christine Tarby, dont la décoration n'a pas changé en 56 ans, sans être démodée. » Tous les gens de la région, et de toutes conditions, s'y retrouvent, mais l'on croise aussi des personnalités de passage, comme Brigitte Bardot et Samy Frey, Miss France ou le lauréat d'un grand prix littéraire. Pour concevoir et faire aboutir tous ses projets, Henri Maire s'appuie sur la culture littéraire et le patient travail de son épouse Marie-Thérèse Salles. Son décès prématuré en 1968 bouleverse l'homme d'affaires, initiateur en quelque sorte d'une diplomatie par le vin du Jura. Il s'éteint, à son tour, le 28 novembre 2003.

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Henri Maire naît le 16 juillet 1917 à Paris. Il y passe son enfance et son adolescence, avec de fréquents séjours à Laval, ville de sa mère. Il a 17 ans lorsque son père meurt. Il décide de venir à Arbois pour reprendre le vignoble familial avec son grandpère. Période de labeur obscur dont on ne mesure guère l'envergure. Les anciens se souviennent que, pendant la guerre, il cultive des pommes de terre, échangeant 1 kg contre une bouteille vide ! Le jeune homme défriche et replante. Il achète des terrains, en échange d'autres, pratiquant, comme le dit sa fille Marie-Christine Tarby, « un vrai remembrement qui ne coûte rien au contribuable ». Il défonce des dizaines d'hectares et, entre 1959 et 1973, unifie 316 parcelles pour créer le domaine Françoise de Montfort (plus de 50 hectares d'un seul tenant). Bien sûr, l'agrandissement du domaine ne va pas sans quelques jalousies. Ce qui amuse Henri Maire. Et lui fait dire à Jean Varéchon, qui a été président de la Fruitière vinicole et communiste convaincu : « Tu vois, quand vous serez au pouvoir, ce sera bien plus facile de nationaliser, j'aurai fait le boulot ! » L'homme ne manque pas d'humour. Il est aussi un « patron social », faisant construire pour son personnel des maisons individuelles à loyer modéré et location-vente à « La Gentillère » (dix maisons), « Le Clair Logis » (20 maisons) et au lotissement « Commandant Grand ». Il serait dommage que l'image de l'homme et du bâtisseur disparaisse peu à peu derrière la marque. Laissons la parole, avec son autorisation, à Jacky Millet, qui, dans Voix du Jura, après les obsèques d'Henri Maire, écrit : « En affaires, il était dur, même impitoyable ; mais c’était un être très sensible, “le plus charmant des hommes, convivial, accueillant, serviable”, témoigne Robert Aviet, l’un de ses fidèles amis. Son aspect bourru était fait pour masquer cette nature… » Certes ses méthodes de vente directes sont contestées, mais il est certain que grâce à lui, le vignoble jurassien est sorti de l'obscurité. Bien des vignerons ont dû leur survie certaines années à la vente de leur vin ou de leur raisin à la société Henri Maire. Henri Maire est décédé dans la nuit du 27 au 28 novembre 2003. C'est aujourd'hui la prestigieuse famille de vignerons bourguignons Boisset (Clos Vougeot) qui a repris les destinées du domaine de 250 hectares.


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JULIEN LIENARD/GETTY IMAGES

Originaire de Villefranche-sur-Saône, Raymond Depardon connaissait le Jura en voisin, avant de parcourir sa moyenne montagne, à partir de 2006, avec son camping-car et sa chambre photographique sur pied.


Jura Rencontre

Raymond DEPARDON Mon Jura intime Le photographe est tombé amoureux du Jura. Il l'a immortalisé lorsqu'il a dessiné avec ses clichés le « portrait de la France ». Aujourd'hui, il aime venir en vacances dans cette moyenne montagne qui n'a rien perdu de sa ruralité. Ü

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Le village de Mièges photographié depuis Nozeroy. « Avec le Jura, c’est peut-être la première fois où je me suis dit : c'est rural et c'est beau, c'est élégant. Ce n'est pas non plus cliché. S'il existe une quintessence de la France, elle est là ».

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NUMÉRO 39 - Quels liens avez-vous avec le Jura ? Ce sont d'abord des liens familiaux ? RAYMOND DEPARDON - Non, pas vraiment. Le Jura, c'était un département que je ne connaissais pas particulièrement. Ma maman était de la Bresse, mon papa du Beaujolais, et j'ai passé toute mon enfance à Villefranchesur-Saône. Quelque part, je suis donc un peu tiraillé entre le Massif central et le Jura. Vous avez par contre des liens amicaux avec les Jurassiens Jean-Yves Brégand et Patrick Toussaint, qui tirent vos photographies ? R. D. - Oui, surtout avec Patrick Toussaint. Quand je

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Qu'est ce que vous appréciez chez lui ? R. D. - C'est un grand tireur. Le tirage, c'est un travail d'artisanat et la première chose qui va avec, c'est l'exigence. Ses tirages sont denses, ce que j'aime bien. C'est peut-être un peu l'influence de la montagne ! J'ai une exposition en septembre à la fondation Henri Cartier-Bresson à Paris et c'est Patrick qui va réaliser les 80 tirages exposés. Comment avez-vous connu le Jura en vrai ? R. D. - Avec l'agence Magnum, nous avions fait un workshop à Saint-Ursanne en 1980, organisé par Guy Le Querrec. C'était dans le Jura Suisse, il y avait une foire à chevaux. Ensuite, j'avais dû passer plusieurs fois à Lons-le-Saunier ou à Saint Claude. Je me sentais assez proche du Jura, j'aime ces grosses fermes qui ne sont pas ostentatoires, vous sentez que c'est une famille. Ensuite, je suis surtout venu dans le Jura en 2006, dans le cadre de mon projet qui consistait à photographier la France. Au départ, j'avais répondu à une commande du Pèlerin, qui était le journal du monde rural, et j'avais été en Haute-Saône. Ce n'est pas très loin non plus.

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DEPUIS QU’IL A QUITTÉ VILLEFRANCHE-SURSAÔNE – c’était en 1958 - pour monter à Paris, Raymond Depardon n’a jamais cessé d’arpenter le monde pour couvrir, en tant que photographe, puis cinéaste, nombre de faits d’actualité. Membre de l’Agence Magnum, il est célèbre pour ses reportages sur des lieux sensibles, pour ses livres ou pour ses films, dans lesquels il s’attache à donner un sens plus juste aux événements de notre société, plus particulièrement ceux qui ne défraient pas la chronique dans des salles d’audience ou les hôpitaux. À partir des années 2000, Raymond Depardon consacre également dix ans aux paysans de moyenne montagne. Ce travail affirme son désir de photographier un territoire français moins connu, touché par les grandes mutations rurales et urbanistiques de la deuxième moitié du XXe siècle. C’est notamment dans ce cadre qu’il a photographié et filmé le Jura à partir de 2006. En l'écoutant parler du Jura, nous comprenons que son lien à ce territoire voisin de celui qui l’a vu grandir dépasse le cadre de sa mission de photographier la France « des souspréfectures ». Aujourd’hui, ses photographies noir et blanc – comme celles qui seront présentées cet automne à la Fondation Henri Cartier-Bresson – sont en outre tirées dans le Jura. Et, régulièrement, Raymond Depardon séjourne dans cette montagne où il dit de plus en plus se sentir « chez lui ».

l'ai connu, il travaillait à Paris. C'est grâce à Jean-Yves Brégand, son oncle [N.D.L.R. : de Messia-sur-Sorne], qu'il est monté à Paris pour être tireur. Je l'ai rencontré un peu par hasard, je me souviens lui avoir demandé de tirer des photos du Vietnam. Je ne le regrette pas. Je ne savais pas que Patrick était du Jura. Un jour, à Paris, il me dit : « Je rentre au pays ». Je lui demande : « Mais, c'est où ton pays » ? Il me répond : « c'est Lons-le-Saunier, où mon père était photographe ». Après, il m'a dit qu'il allait même quitter Lons pour habiter Les Crozets, où il a acheté une ancienne colonie de vacances pour y faire un gîte. Quand il est parti de Paris, nous avons continué à travailler ensemble. Dans les années 1970, nous étions un peu fascinés par les États-Unis ; certains photographes n'habitaient plus New York et s'étaient décentralisés. Ils avaient leurs labos dans le Colorado, alors j'ai toujours pensé que Patrick avait fait le même choix avec le Jura ! Avec toutes les messageries rapides, c'est possible aujourd'hui. Avec Patrick, j'ai le Jura en permanence. Quand je l'appelle, j'entends l'accent, j'aime bien. Je le reconnais parce que c'est un accent, au fond, qui n'est pas très éloigné de celui de Villefranche-sur-Saône.

Dans votre portrait de la France, « La France de Depardon », présenté en 2010 à Bibliothèque nationale Ü


ROCH ARMANDO/CONTOUR BY GETTY IMAGES b

Touché par les grandes mutations rurales et urbanistiques de la deuxième moitié du XXe siècle, Raymond Depardon a voulu photographier la France qui l’avait vu naître. « J’ai été très heureux de rencontrer le Jura. »

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Pour répondre à un souci de rendu documentaire, Raymond Depardon a utilisé une chambre photographique grand format. Ce matériel est lourd et encombrant, mais le rendu unique. La justesse de la composition, la qualité des détails, l’équilibre des couleurs et l’élégance de cette image d’une ferme de Lajoux en sont la preuve.

de France, le Jura était très représenté. R. D. - Oui. Parce que j'ai été très heureux de rencontrer le Jura. J'avais commencé au début des années 2000 et ça avait été un choc. Tout allait alors bien politiquement, tout le monde était heureux. Moi, j'arrive dans ce territoire et je vois qu'il va mal, beaucoup plus mal à cette époque qu'aujourd'hui. J'ai continué ma mission pendant quatre ans et j'ai vu un changement. J'étais avec mon fourgon et j'étais doublé par d'autres fourgons qui avaient des capteurs solaires. Je voyais des maisons équipées de géothermie, je rentrais dans les villages, j'allais boire des cafés, il y avait des jeunes. Ayant fait des films sur le monde rural, je savais qu'il suffisait d'un salaire pour qu'un couple soit sauvé. Bien sûr, c'est triste la désertification. Mais oui, j'ai vu un petit peu de changement. Je ne le dis pas pour toute la France, mais pour le Jura, je ne sens plus du tout cette impression de dépression.

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Vous avez pu échanger avec les habitants ? R. D. - Bien sûr, ils venaient me voir. Parce que la chambre, cette espèce de pied qui ressemble à un chevalet, attire les gens. Quand un paysan venait me voir pour bavarder avec moi, c'était formidable parce qu'il n'avait pas du tout le même rapport qu'avec un voleur d'images. Si j'avais été avec un petit appareil, tout le monde aurait eu de la suspicion. Là, au contraire, avec ma chambre et mon voile, cela se passait bien. Dans le Jura, j'avais constaté que les gens aussi venaient me voir alors que dans certaines régions, surtout de l'Ouest, ils ne disaient rien. Moi, si je voyais un gars avec un appareil comme ça, j'irais le voir : « Et ça existe encore ? », « comment faites-vous des photos avec ce genre d'appareil ? ». Avec la chambre, vous ne pouvez pas tricher, parce que vous êtes face à un garage, une fontaine, vous photographiez une présence. Et c'est techniquement impeccable. J'avais choisi la meilleure chambre, le meilleur objectif, le meilleur film américain, pour simplement pouvoir rendre au moins cette élégance qu'a la campagne française. Qu'est-ce qui vous attire chez les gens ? R. D. - J'ai la chance d'avoir été élevé dans une ferme. Dès que je croise un paysan, contrairement à l'attitude d'un Ü


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Repro ABM Graphic • Lons-le-Saunier - 35457


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Le photographe affectionne la moyenne montagne, son bâti et son agriculture. Le choix de travailler au printemps et l’automne lui a permis de révéler les couleurs de cette partie du Jura, comme la façade de cette ferme à Supt, proche de Andelot-en-Montagne.

citadin, je vais le voir et n'ai aucune inhibition. J'avais toujours perçu le fait d'être fils de paysans comme étant un complexe, et cela s'est avéré être une force incroyable. Quand je suis en Afrique ou encore en Amérique du Sud, je rencontre beaucoup de paysans. En Bolivie par exemple, les Quechuas sont impressionnants, mais je peux faire une photo. J'ai davantage d'appréhension à photographier une jeune fille dans les rues de Paris qu'un paysan. C'est pour ça que j'ai pu faire les films sur les paysans dans les années 2000. Entrer dans une ferme, ce n'est pas facile, mais les paysans sont des gens extrêmement intéressants que l'on ne connaît pas. C'est un peu « le Parlement des invisibles », pour reprendre la terminologie de Pierre Rosanvallon. À Paris, ils m'ont tous dit : « Mais ils n'existent plus les paysans de ta ferme ! » Moi, je voyais encore plein de toiles cirées et des gens qui avaient quelques bêtes et qui s'en sortaient. La culture

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agricole intensive, qui nous avait été imposée après la guerre, elle ne pouvait pas passer dans ces montagnes, c'était trop accidenté. Cela m'a réconforté... et réconcilié surtout. Par contre, contrairement à beaucoup d'autres photographes, vous n'avez pas photographié la nature jurassienne. Pourquoi ? R. D. - Je cherchais des choses plutôt contemporaines. Le bâti et l'intervention de l'homme m'intéressaient beaucoup. Dans le Jura, j'ai été plutôt récompensé. J'aurais pu faire tout un livre sur le sujet, tellement il y avait des choses à photographier. À ce point ? R. D. - Parce qu'une des qualités du Jura pour moi, c'est qu'il n'a pas vendu son âme au diable, contrairement à d'autres départements de montagne. Et j'ai trouvé qu'il y avait une certaine authenticité que je n'ai pas trouvée dans beaucoup d'endroits en France, sauf peut-être dans le Lot ou le Tarn. Quand tu traverses un village, il y a certes un peu de lotissements au début, parce qu'il faut quand même bien construire des maisons neuves pour les gens. Mais le tas de fumier n'a pas pour autant disparu. On ne peut pas non plus vendre tout aux touristes. C'est peut-être aussi la chance de cette France de Ü


Vous parlez de Nozeroy ? R. D. - Voilà, Nozeroy. C'est magnifique, toute la ville fait partie des fortifications, ce n'est pas seulement le château. J'y suis allé il n'y a pas encore longtemps, elle a gardé son authenticité. Elle a aussi une agriculture, des fermes avec leur environnement. Avec le Jura, c'est peut-être la première fois où je me suis dit : c'est rural et c'est beau, c'est élégant. Ce n'est pas non plus cliché. S'il existe une quintessence de la France, elle est là. Vous avez photographié Salins, Champagnole, Lajoux, mais il y a des endroits, comme Saint-Claude, qui vous plaisent plus que d'autres dans le Jura. R. D. - Effectivement, à Saint-Claude, il y avait cette boucherie, qui n'existe plus d'ailleurs, qui ressemblait complètement à celle de mes parents, avec des faïences rouge et noir. Il y avait aussi ce monsieur d'origine turque qui vendait des pneus. Dans un quartier de Saint-Claude, situé en bas, vers la rivière, sans doute un des quartiers les plus humides, un peu délaissé, il a repris un peu le flambeau. Je me suis approché, lui ai demandé si je pouvais faire une photo. Il a accepté, il était très gentil. Ce qui est intéressant dans les lieux, c'est qu'ils sont très métaphoriques de la situation. Cette image montre aussi que tout le monde ne va pas dans le centre commercial faire rechaper son pneu. Il y a des gens qui n'ont pas les moyens. Certains disent que les centres-villes seraient morts. Eh bien non, ils sont repris. C'est l'avantage du Jura, il y a des gens qui restent en ville, ce n'est pas abandonné. Ce qui surprend dans vos images, c'est qu'il n'y a pas de bleu, ni de blanc dans un pays marqué par l'hiver ? R. D. - Je ne voulais pas la neige. Je connais des livres, certains sont remarquables, qui essayent de vendre la beauté d'une région, avec ses levers de soleil, ses brumes ou ses brouillards. Je ne le cherchais pas, le ciel bleu non plus. Ce qui était le plus dur, c'était de n'être ni dans la carte postale, ni dans un éloge ou une mystification. L'automne et le printemps ont formé pour moi le meilleur couple pour photographier la France. Dans mes photographies du Jura, il y a un tracteur, des maisons neuves, des maisons en bois, des vaches... ... Oui, des Montbéliardes. R. D. - Oui. Je m'en souviens parce que mes parents avaient des Montbéliardes à la ferme. C'est une vache qui est complètement du Jura, de la Franche-Comté en tout cas. C'est une vache très bien adaptée à ce genre d'altitude, entre lait et viande. C'est peut-être cela qui fait aussi que je m'y sens bien. Le Jura, vous y êtes récemment venus en vacances. R. D. - Oui, à Prénovel. J'ai loué un chalet, bien fait d'ailleurs. Ma femme avait des petits problèmes de respiration, alors on s'est dit, on va aller respirer. Ce séjour a été un bonheur total. Même nos enfants sont venus nous voir. On a fait plein de choses, comme des balades.

Making of

En ce début d’année, Raymond Depardon est en plein montage de son prochain film, tourné l’année dernière dans l’hôpital du Vinatier, à Lyon. « Néanmoins, il adore le Jura », précise l’attachée de presse de l’agence Magnum; le photographe cinéaste donne donc son accord pour une interview, malgré un emploi du temps très chargé. Trois jours plus tard, un jour pluvieux de Saint-Valentin, nous le retrouvons à Paris, dans un café du quartier de l’Odéon, mitoyen du cinéma dans lequel il travaille quotidiennement. Devant un thé et durant plus d'une heure, il répond à nos questions. Regard droit et bleu métallique, il parle de son métier, de sa passion pour le monde paysan ou de sa rencontre avec les Jurassiens avec précision, sincérité et enthousiasme.

La marche, c'est un peu nouveau. J'ai beaucoup marché, mais dans le désert avec des rebelles, pour mon travail. Ce qui est formidable dans le Jura, c'est qu'il y a un poteau indicateur qui est mieux fait que celui pour les bagnoles. Il y a la distance, la durée, tel truc à voir, alors que pour les voitures, le panneau indique juste : « C'est par là ».

Jura ?

Pourquoi aimez-vous venir en vacances dans le Haut-

R. D. - C'est reposant et fortifiant. Il y a quelque chose qui fait que c'est assez vaste, il y a de la place pour tout le monde. On n’est pas tous accrochés aux remontées mécaniques, tous au même endroit. Si je devais habiter quelque part, le Jura serait sans doute bien placé, j'irais sur les plateaux. Je me sens chez moi là-bas. J'avais un peu hésité à acheter une maison, c'était tentant. Nous pensons y retourner très vite. Cest la fin du printemps qui doit être le mieux, mais il ne faut pas qu'il pleuve ! Le train que prend Patrick pour venir à Paris, à Nurieux, est bien pratique.

moyenne altitude. Les grands ordinateurs de l'Insee ont découvert cette diagonale du vide, qui part des Ardennes jusqu'à l'Ariège. Mais, en dehors de ça, il y a quand même des départements qui ont su un petit peu se préserver. Et ce qui est formidable dans le Jura, c'est qu'il y a aussi un patrimoine. Vous savez, il y a une ville fortifiée très belle...

Alors il lui arrive de quitter le Jura ? R. D. - Souvent nous nous retrouvons à Paris dans un café près de Denfert-Rochereau. Il monte pour la journée, nous discutons un peu. Et, au fond, quand il repart, je l'envie, parce qu'à Paris, on est quand même bien tous un peu fous et pressés. Je trouve son expérience réconfortante parce qu'il continue à faire son métier et à vivre dans le Jura.

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NUMÉRO 39

Dans l'ancienne chapelle du Carmel de Lons-le-Saunier où l'entreprise s'est installée après le départ des sœurs, Thierry, Lucas et Victor Gros prennent la pose pour Numéro 39.


Jura Saga

Victor

GROS Lunetiers

de père en fils

L

Depuis six générations, la société Victor Gros appartient à la même famille. À chaque fois, les hommes ont fini par reprendre les rênes de l'entreprise lédonienne qui vient d'acquérir la plus ancienne manufacture du Jura, Fidela. Ü

L'HISTOIRE DÉBUTE EN 1872 À OYONNAX, DANS L'AIN. Rue Jean-Jaurès, l'hôtel de ville n'est encore qu'un hôtel. La fille des propriétaires, Louison Varin, tombe amoureuse de son voisin, Édouard Gros. Profession du jeune homme : fabricant d'ornements de coiffure. La capitale du Haut-Bugey a su construire sa renommée sur ses peignes en buis, puis en ivoire. Mais, en cette fin de XIXe siècle, entre le Lange et la Sarsouille, quarante-et-une manufactures travaillent désormais le celluloïd que John Welsey et Isaiah Hyatt ont mis au point en 1869. Le chemin de fer vient d'être inauguré, l'électricité se propage de maisons en ateliers. La révolution industrielle est en marche. Six générations plus tard, les héritiers du couple continuent à tenir la barre de l'entreprise. Les collections ont changé de visage ; les lunettes ont remplacé les peignes. Cette exceptionnelle longévité n'obéit en rien à une

règle intangible. En vérité, cette saga familiale s'est écrite malgré ceux qui l'ont incarnée. À chaque fois, les événements se sont imposés aux descendants mâles qui ont tous, ou presque, fini par présider aux destinées des Établissements Gros.

D'OYONNAX À LONS-LE-SAUNIER En 1978, Thierry Gros vit à Houston, aux États-Unis. Dans son bureau qui dépend de la Direction des relations économiques extérieures du ministère de l'Économie, des Finances et de l'Industrie, l'ancien étudiant de l'Essec, grande école de commerce, dépend de Jacques Cheminade, celui-là même qui va ensuite se présenter à trois reprises à l'élection présidentielle. Aux USA, il va également suivre un stage à la banque Paribas qui finance des explorations pétrolières. Bref, il trace sa route loin des siens et des ateliers qui sentent bon le plastique. Mais son père, qu'une leucémie va emporter, le Ü

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COLLECTION PRIVÉE b

Photo de famille avec Édouard Gros et son épouse. L'entreprise est née à Oyonnax, dans l'Ain, fin du XIXe siècle.

rappelle en France. À son décès, il songe d'abord à vendre. Sa vie est ailleurs. Puis, il se reprend. Quarante ans plus tard, il est toujours assis à son bureau, désormais installé dans un angle de l'ancienne sacristie de la chapelle du Carmel de Lons-leSaunier. En 1990, expropriée au moment de la construction du quartier de La Grenette, la société a quitté Oyonnax, d'abord pour Clairvaux-les-Lacs, dans le Jura, puis, à partir de 2006, pour la ville-préfecture, là même où jadis les sœurs assistaient aux offices. Les locaux professionnels à l'étage, l'appartement au rez-de-chaussée. Et une existence agitée d'entrepreneurs.

DES PARIS SPORTIFS À LA LUNETTE « Jamais je n'infligerai cela à mes enfants », s'était promis Thierry Gros qui, en 2010, partira de nouveau en quête d'un acquéreur. Sauf qu'en 2015, il a passé le flambeau à Lucas, le plus jeune de ses trois fils. Après huit ans d'études supérieures (IEP de Lille, HEC…), le benjamin de la fratrie n'avait, lui non plus, aucunement l'intention de marcher sur les traces de son père… et de ses aïeux. « Je voulais réussir par moi-même. En outre, j'étais attiré par les grandes entreprises », justifie-t-il. En 2010, c'est pourtant une start-up qu'il intègre. Betclic, site web français de paris sportifs a été créé cinq ans plus tôt par Nicolas Béraud, avec un seul employé et

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un investissement de 3 millions d’euros. Lucas Gros le rejoint à Londres, puis est muté à Paris. Il voit la société grossir. Trop à son goût. Il décide de s'en aller. La suite se déroule en Sicile. Toute la famille passe Noël sous le soleil de la plus grande île de la mer Méditerranée. À l'occasion d'un « brainstorming » comme en ont l'habitude les Gros, Martine, maman et chef des ventes pour la France de la société Victor-Gros Distribution, suggère alors à son plus jeune enfant de prendre le poste de directeur général qui vient de se libérer. « J'ai été séduit par l'idée de me retrouver à la tête de ma propre structure », glisse celui-ci. Il accepte donc. « L'entreprise est en bonne santé, cela m'a donné du temps pour observer. J'ai vu les points forts, les points faibles aussi. Le produit et le process industriel m'ont beaucoup intéressé. De toute façon, je ne pourrais pas vendre quelque chose que je n'aime pas ». Le week-end, il prend le temps de “débriefer” avec ses parents dont les remarques peuvent le bousculer : « Tu ne vas pas nous apprendre à bosser », lui objecte-t-on. Le chef d'entreprise aimerait davantage de « cohérence » dans le catalogue et nourrit l'ambition d'atteindre une taille plus importante (la société emploie actuellement dixneuf salariés). En février dernier, Victor-Gros Distribution a ainsi repris Fidela, la plus ancienne manufacture lunetière jurassienne placée en redressement judiciaire en septembre 2016 par le Parisien Frédéric Lafite qui l'avait rachetée en 2011 aux héritiers des fondateurs. Les Lédoniens n'ont pas réfléchi longtemps avant d'acquérir « Les fils d'Aimé Lamy » installée depuis 1820 à Morez. Elle leur permet notamment de retrouver une activité de production abandonnée en 1995 au profit de la distribution. « La marque nous plaisait beaucoup », Ü


Conception graphique Valérie Besser / Création textile Sophie Dalla Rosa / Photos Marc Bardi

Saison

2017

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ajoute Lucas Gros, qui a conservé dix-sept salariés, mais abandonné la marque Bugatti. Cette audace permet au lunetier d'assimiler un savoir-faire parfois unique : « Elle est l'une des toutes dernières à détenir celui de la fabrication laminée, qui permet des modèles extrêmement fins et solides », précise-til. Et de poursuivre : « Avec Fidela, on va construire quelque chose de pérenne. »

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COLLECTION PRIVÉE

Publicité datant de 1971. Aujourd'hui, la société porte la marque Traction Productions.

Quand son grand frère Victor se rend avec lui au 167 bis de la rue de la République, celui-ci ne peut s'empêcher, émerveillé, de prendre des photos qu'il publie avec fierté sur Facebook. Lui aussi avait juré qu'il ne bosserait pas dans ce secteur servi à table à presque tous les repas. Aujourd'hui, il gère pourtant les trois boutiques parisiennes de la société, dont l'une en franchise, comme celle qui a été ouverte aux Pays-Bas. À 22 ans, il a débuté comme commercial, en bas de l'échelle. Il a notamment représenté la marque sur la côte ouest et le sud des États-Unis. À son retour dans la vieille Europe, lassé des voyages, il a songé à entrer dans la fonction publique. Ü

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Toute la famille, ou presque, travaille dans l'entreprise. Et pourtant, de Thierry, le père, à Victor et Lucas, ses fils, tous ont d'abord rêvé s'émanciper de la société lunetière.

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« Mon père m'a dit : j'ai besoin de monde dans les magasins », se rappelle le cadet. Il a donc fait son retour sur les bancs de l'école pour apprendre le métier d'opticien. Il s'est inscrit à l’Institut supérieur d'optique (ISO) de Paris. Trois ans en alternance. « Que cela a été dur de reprendre ses études ! », grimace-t-il. Un sourire convainc qu'il ne regrette rien. Cette fatalité à rejoindre les effectifs de la société — à moins qu'il ne s'agisse d'une malédiction, allez savoir ! — a débuté avec l'unique enfant d'Édouard et Louison. Prénom : Victor. Précisons ici que chez les Gros, les Édouard donnent naissance à des Victor qui, à leur tour, engendrent des Édouard… À de rares exceptions. Victor Gros n'a d'autres choix que de prendre les rênes de la fabrique située rue Francisco Ferrer. En plein cœur d'Oyonnax, elle produit des peignes aux formes savantes et aussi des boucles de ceinture pour Paul Poiret, grand couturier précurseur du style Art Déco. En 1922, l'Espagne inspire les créations qu'habillent similis et calottes. Le temps n'est pas encore à la « fast fashion ».

L'AMÉRIQUE DE JACKIE O Les différentes crises n'épargnent pas la maison « VictorGros, successeur d'Édouard Gros ». À la Première Guerre mondiale succéderont la mode des garçonnes, coiffure à la Ninon et nuque rasée, puis le Jeudi noir qui terrasse Wall Street et l'économie mondiale dans un jeu de dominos. Bon gré mal gré, le navire tient bon. Édouard prend la suite de Victor. Dans les années Cinquante, les peignes sont abandonnés au profit des lunettes. Un jour de 1968, Jackie Kennedy, qui va

épouser l’armateur et milliardaire grec Aristote Onassis, est surprise portant le modèle 759. « Nous l'avons rebaptisé la Jackie O par la suite », indique Victor Gros. Plus glamour. L'Amérique, décidément très présente, a aussi inspiré la marque « Traction Productions », lancée en 1989, garantie Origine France et déclinée en quatre collections. « Ma sœur tenait une boutique à Los Angeles », raconte Thierry Gros. Elle était située Traction Avenue, petite rue bordée de palmiers, proche de la gare. Traction n'a donc rien à voir avec la voiture française Citroën qui, dans la mémoire collective, reste liée à l'Occupation, tour à tour voiture de la Gestapo et icône de la Résistance. Traction, c'est ici la locomotive. Longtemps après les lunettes Daniel Hechter dont ils avaient obtenu la licence, les Gros consacrent « 200 % » de leur temps à développer cette signature. La création est devenue une priorité. La PME qui génère quatre millions d'euros de chiffre d'affaires, dont soixante pour cent en France, reste donc très incarnée par la famille. « Mais plus nous grossirons, moins nous pourrons conserver cette gestion familiale », assure son nouveau capitaine. Mais ne comptez pas sur lui et son frère (un troisième a réussi à s'échapper en menant carrière dans la médecine) pour enfin planifier leur succession et transmettre sereinement à leurs descendants ce qu'ils auront bâti. Ils sont encore jeunes et ont le temps d'y songer. Mais surtout, il serait malvenu que la septième génération mette pour une fois les pieds dans l'entreprise sans avoir juré mordicus que l'on ne l'y verrait jamais ! Il y a des lois à respecter.

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Après avoir été fondée à Oyonnax, dans l'Ain, l'entreprise a d'abord déménagé à Clairvaux-les-Lacs, puis à Lons-le-Saunier. Elle vient de racheter Fidela, lunetier emblématique de Morez.

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DAVID VUILLERMOZ/MUSÉES DE LONS-LE-SAUNIER

En archéologie, les objets d’importance côtoient dans la terre d’autres fragments apparemment moins prestigieux, souvent amassés, brisés ou peu volumineux et ces dépôts sont stockés et rarement mis en lumière. Pourtant, ils apportent quantité d’informations, permettent de reconstituer la panoplie d’un personnage, de comprendre les usages, la manière de vivre des sociétés anciennes. Ce sont ces fragments d’objets cassés ou modestes qui sont présentés tout à trac au public au Musée des beaux-arts de Lons avec cette particularité qu’il s’agit de fragments métalliques (alliage cuivre-étain) de l’âge du bronze, c’est-à-dire de 2 300 à 800 av. J.-C. de Bourgogne-Franche Comté et Alsace. Passionnant.

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Où : Lons-le-Saunier Quand : Jusqu'au 22 octobre

KER-XAVIER ROUSSEL, PAYSAGE D’ÉTÉ, PETIT PALAIS, GENÈVE

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Agenda

Bric-à-brac pour les dieux ?

Pwww.musees-franchecomte.com

b OBJET

HYPOMORPHE, CLICHÉ REBECCA PERRUCHE

Les Celtes Où : Dole Quand : Jusqu'au 27 août

À la suite du 41e colloque de l’Association française pour l’étude de l’âge du fer (AFEAF) qui s’est tenu en mai à Dole sur le thème des sanctuaires, une exposition réunit au Musée des beaux-arts et d’archéologie une partie des pièces découvertes récemment sur les différents sites régionaux par l’Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap) et l’Université de Bourgogne Franche-Comté. À travers trois thématiques, l’habitat, les nécropoles et les sanctuaires des cinq derniers siècles avant notre ère, cette exposition donne l’occasion de découvrir quelques petites merveilles qui apportent des informations supplémentaires sur la civilisation celte, toujours aussi envoûtante. Pwww.musees-franchecomte.com

Idéklic

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Pwww.ideklic.com

b NANDO

C’est LE festival de l’enfant de 3 à 13 ans (les tout petits ne sont pas oubliés). Partout dans les rues du village haut-jurassien, dans les maisons, sur les places, dans les jardins et même en pleine nature, vingtcinq compagnies vont proposer vingt-six spectacles et soixantehuit représentations. Parmi les cinquante-huit ateliers, les festivaliers choisissent eux-mêmes leurs activités (arts plastiques, danse, musique, science…).Alliant une programmation tous publics ouverte à toutes les formes d’expression, le Ideklic célèbre cette année sa 28e édition

E MAILA CONCERTO

Où : Moirans-en-Montagne Quand : du 11 au 14 juillet


VUILLARD, LA PASSERELLE, COLLECTION PARTICULIÈRE bEDOUARD

Intimités en plein air Où : Saint-Claude Quand : jusqu’au 31 décembre

Cette exposition, réalisée en partenariat avec le musée d’art Roger-Quilliot (MARQ) de Clermont-Ferrand et le musée de l’Abbaye, présente une centaine d’œuvres d’Edouard Vuillard et de KerXavier Roussel sur la thématique des paysages. De nombreux sujets d’intérieur, mais également des scènes de nature particulièrement esthétiques illustrent ces intimités en plein air. Les deux artistes du mouvement des Nabis, un groupe de jeunes peintres qui chercha à renouveler la peinture au tournant du XIXe siècle, se répondent à traOUVERTURE vers leurs œuvres. Une fraîcheur et une beauté à découvrir DES aBonnements dans l’un des plus beaux musées du Jura. À PARTIR DU meRcRedi 30 aoÛt Pwww.musees-franchecomte.com

lancements de saison Jeu 7 sept > 20H dole > LA FABRIQUE Ven 8 sept > 20H lons > LE THÉÂTRE EnTRÉE LIBRE SUR RÉSERVATIOn

03 84 86 03 03

Mélodie en jouets

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MUSÉE DU JOUET

Où : Moirans-en-Montagne Quand : jusqu'au 14 mars 2018 Cette exposition accueillie par le Musée du Jouet de Moirans-en-Montagne se regarde, mais s’écoute également. Sifflets, crécelles, boîtes à musique, poupées chantantes, instruments miniatures… Les jouets sonores et musicaux ont fait et font encore le bonheur des enfants et parfois un peu moins celui des parents. Par contre, tous ces jouets accompagnent les différentes étapes du développement et sont des vecteurs de plaisir et d’apprentissage de la musique et du rythme. Certains sont même d’authentiques spécialités jurassiennes fabriquées dans toute la région. Cette exposition – outre qu’elle présente de vrais trésors – retrace également une partie de l’histoire locale. Un plaisir pour les yeux… et les oreilles. Spectacles et animations musicales sont aussi au programme. Pwww.musee-du-jouet.com

No Logo Où : Fraisans Quand : 11, 12 et 13 août

Pour les fondus de musique reggae, mais pas que… No Logo est désormais entré dans le paysage des festivals de musique jurassiens. Sur l’ancien site des forges de Fraisans, plus de 30 000 fans viennent écouter la meilleure musique reggae du moment. Au programme cette année : Soom T, Larukétanou, Steel Pulse, Danakil, Raging Fyah, Dub Master Clash, Alpha Steppa, Mahom, Ras Lion et d’autres encore à venir.

LES SCÈNES DU JURA SONT SUBVENTIONNÉES PAR : LE MINISTÈRE DE LA CULTURE ET DE LA COMMUNICATION / DRAC DE BOURGOGNE FRANCHE-COMTÉ, LA VILLE DE DOLE, ESPACE COMMUNAUTAIRE LONS AGGLOMÉRATION, LE CONSEIL DÉPARTEMENTAL DU JURA, LE CONSEIL RÉGIONAL DE BOURGOGNE FRANCHE-COMTÉ, LA COMMUNAUTÉ DE COMMUNES CHAMPAGNOLE PORTE DU HAUT-JURA, LA VILLE DE MOREZ COMMUNE NOUVELLE DES HAUTS DE BIENNE, LA COMMUNAUTÉ DE COMMUNES PORTE DU JURA. AVEC LE SOUTIEN DE L’ONDA ET DU CLUB DES PARTENAIRES. SIRET N° 413 401 373 000 19 / APE : 9001 Z - LICENCES N° 1-1032792/1-1032794/2-1032795/3-1032796

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Agenda

À la conquête des nouveaux mondes De tout temps, les hommes ont conçu des instruments dérivés des principes de l’optique pour voir l’infiniment petit ou l’infiniment lointain, délimiter les frontières et mesurer le temps. Ces inventions ont été indispensables aux progrès de l’humanité entre les XVI° et XVIII° siècle, elles ont permis de comprendre le monde. Cette exposition, articulée autour de six sections, se vit comme une pérégrination dans le temps et à travers les objets empruntés aux collections Essilor-Pierre Marly, en dépôt au musée de la lunette et Jourdain et rend hommage aux inventeurs. Le visiteur peut s'initier aux techniques scientifiques grâce aux manipulations ou résoudre des énigmes. Enfin, l’art est aussi très présent dans ce monde hors du commun.

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b DR

COLL. ESSILOR-PIERRE MARLY – PHOTO : PIERRE GUENAT

Où : Morez Quand : jusqu’au 13 octobre

Pwwww.musee-lunette.fr

Pris dans le filet Où : Lons-le-Saunier Quand : jusqu’au 3 septembre

JEAN-BAPTISTE MERILLOT

Une immersion dans l’univers de la designer textile Sophie Della Rosa, spécialiste de la maille tricotée, qui détourne la technique du tricot pour créer des sculptures à la fois oniriques et pleines d’humour. Voilà l’univers du célèbre filet Mini Babybel complètement revisité. Couleurs, formes, sensations redessinent l’espace. Étrange sentiment de parcourir les chemins emmaillotés de la Maison de la Vache qui Rit qui invite le visiteur, seul ou en famille, à tricoter lui-même ses propres objets. Et attention à ne pas prendre les pieds dans le filet !

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Steve Gianakos

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N. KNIGHT

Où : Dole Quand : 16 juin au 24 septembre

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Cet artiste new-yorkais inclassable qui, à ses débuts, a allégrement pillé tout ce qui faisait référence, s’est imposé au fil des ans par son univers proche du pop art, a trempé dans la bande dessinée, mais celle particulièrement trash, érotique et sanglante. Bref, il joue avec la vulgarité, le trivial, en déstructurant, cassant, recollant et finalement réinventant un univers visuel qui lui est propre et qui pulvérise le politiquement correct et les valeurs américaines. Un artiste inclassable et incorrect dont près de 80 œuvres sur papier datant des années 1980 à aujourd’hui sont présentées au Musée des beaux-arts de Dole. Celles-ci seront en bonne compagnie aux côtés d’autres artistes du même acabit : Peter Saul, Rancillac, Fromanger dont les œuvres composent sur place la collection contemporaine du musée. À voir parce que ça dérange ! Pwww.musees-franchecomte.com


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CHRISTOPHE ACKER

Visitez les

Olivia Ruiz Cinq années sans album, mais pas sans projet. Olivia Ruiz a écrit et réalisé son premier court métrage, créé une comédie musicale sur une immigrée espagnole et fait un bébé… Et la voilà le 5 octobre qui débarque à la Commanderie avec son tout nouvel album. A nos corps aimants n’est rien moins qu’un hymne au plaisir féminin sans compter que l’une des douze chansons de l’album s’appelle Paranoïaque transcendantal — un clin d’œil au surnom dont s’affublait lui-même Salvador Dalí. Et les chanteuses françaises du moment capables de citer le peintre surréaliste, croyez-nous, ne sont pas légion.

©Bilboquet 2017

Où : Dole Quand : 5 octobre

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Festival de Bouche à oreille

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CHEREAU

Où : Petite Montagne Quand : du 13 au 23 juillet

Pendant dix jours, de village en chapelle, de château en bâtisse, c’est l’ensemble des communes de Petite Montagne qui accueille le public : Gigny, Arinthod, Orgelet, Montfleur… L’occasion de goûter aux spécialités locales et aux produits du terroir ; le temps d’écouter un concert de musique du monde, un chanteur ou un groupe ; la possibilité de découvrir un endroit méconnu, un monument dans une ambiance conviviale… C’est tout cela le Festival de Bouche à Oreille qui accueille cette année quelques noms bien connus. Pwww.festival-jura.com

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Où : Nozeroy Quand : le 23 juillet

DR

Dans la petite cité historique de Nozeroy, fief des sires de Chalon, chaque année le passé refait surface et surtout le XVI° siècle qui fut pour la Comté un siècle de prospérité. À quoi ressemblait un banquet à cette époque, que mangeait-on, que buvait-on, quelles étaient les animations, les musiques ? À toutes ces questions, cette fête apporte des réponses : tournois, duels, échoppes d’artisans, repas géant, groupes de musique traditionnelles… Et une superbe ambiance un brin médiévale. Alors, soyez de ceux qui prendront la vieille cité et ses remparts… Pwww.juramontsrivieres.fr

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Agenda

L’Assaut des Remparts

Voyage au pays des tourbières Où : Prémanon Quand : jusqu’au 5 novembre

Le monde des tourbières est tout autant méconnu qu’envoûtant. Peuplés de plantes extraordianires, d’animaux qui ne le sont pas moins, ces milieux humides semblent tout droit surgis du passé. Pour tout savoir sur cet univers fantastique, le nouvel Espace des Mondes Polaires de Prémanon vous ouvre grand ses portes.

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RITA MANCESTI

Pwww.espacedesmondespolaires.org

30e désalpe Où : Saint-Cergue (Suisse) Quand : 30 septembre

C’est une fête traditionnelle très importante dans toute la Suisse. À Saint-Cergue, à deux pas des Rousses, ce rendez-vous aura cette année une saveur particulière puisque ce sera la trentième édition. 700 bovins, soit une dizaine de troupeaux, décorés par les bergers, seront fêtés dans chaque village. Entre la Cure, dans le Jura, et Saint-Cergue, les bêtes vont redescendre des alpages pour prendre leurs quartiers d’hiver dans les fermes situées en plaine. Cors des alpes, musique folklorique, artisanat, costumes… et la foule des grands jours.

Où : Château-Chalon Quand : 6, 7, 8, 12, 13, 15, 20, 21 et 22 juillet Ce spectacle historique et théâtral en plein air écrit par René Lacroix, réalisé par Dominique Comby et interprété par l’ensemble du village réunit une centaine de figurants et de techniciens. Il retrace le basculement de la France de l’Ancien Régime à la société nouvelle, de Louis XV à Napoléon. Cinquante ans de bruit et de fureur à vivre en direct. Pwww.lesamisdechateauchalon.fr

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Château-Chalon en révolution

BERNARD EMORINE

Pwww.desalpe-saint-cergue.ch


Du bord du Léman aux crêtes du Jura...

L’abbaye de Baume se dévoile Où : Baume-les-Messieurs Quand : jusqu’à fin septembre

Découvrez des paysages hauts en couleurs avec le chemin de fer

Nyon - St-Cergue - La Cure

Pwww.baumelesmessieurs.fr

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Week-end du Chat perché

Producteur et affineur

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Où : Dole Quand : du 22 au 24 septembre

ALINE MARTIN

Pwww.tourismepays-de-dole.fr

Vente directe fromages AOP et produits de terroir Photos : CIGC / Image@associés - CIGC / Bérenger Lecourt

Pour tous ceux qui aiment flâner et… déguster, le Week-end du Chat perché est à marquer d’une pierre blanche ! Pendant deux jours, le cœur de la ville — classé — laissera découvrir tous ses secrets architecturaux : ruelles, hôtels particuliers, cours intérieures, jardins, escaliers, façades, cloîtres, couvents, bords de canal… Mais ce sera aussi l’occasion d’une découverte gustative de toutes les spécialités régionales, en suivant le circuit du Chat perché, emprunté à l’imaginaire de Marcel Aymé, écrivain dolois. Au programme, expositions, concerts, dégustations, ateliers, concours culinaires, démonstrations des chefs étoilés… Un pass « dégustation » sera disponible sur demande. Pour cette seconde édition qui se déroulera le jour de la fête nationale de la gastronomie, le Week-end du Chat perché accueillera la ville de Sestri Levante (située entre Gênes et les Cinq Terres).

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Depuis qu’elle a racheté l’abbaye, la commune de Baume-lesMessieurs a entamé un processus de reconversion culturelle. La première étape vise à retracer, durant tout l’été, l’histoire de ce lieu hors du commun qui a entretenu durant mille ans des liens étroits avec Cluny. Les sept salles du logis abbatial présentent des objets historiques jamais dévoilés au public, fruit de recherches sur le site et de prêts de collectionneurs particuliers et du Département, notamment une collection de tissus des VIIIe, IXe et Xe siècles, des vestiges romans de l’abbaye et des fac-similés de vitraux du VIIIe siècle. Sous forme de circuit chronologique, la visite s’achève sur des images de l’abbaye après les moines avec des gravures de Josette Coras, un clin d’œil à celle qui a habité le logis abbatial tant d’années.

Fruitière des Coteaux de Seille

Lavigny - Tél. : 03 84 25 31 89

Horaires d’ouverture : du lundi au samedi de 8 h 45 à 12 h 15 et de 16 h 30 à 19 h 30. Dimanche et jours fériés : 8 h 45 à 12 h 00.

Vente directe au magasin numéro 129 et sur www.comte-morbier.com

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Il y a un peu plus d’un an, je décidai de tourner la page d'une belle histoire riche de rencontres qui m’ont permis de voyager Jurassien à travers & Végétal le monde en emportant à chaque fois dans mes valises un peu de ce pays qui m'a vu naître. Au fil de ces escapades qui m'obligeaient à ouvrir mes yeux candides sur d’autres mondes, je me sentais heureux de partager nos saveurs jurassiennes et de voir des yeux gourmands remplis de pétillance après la dégustation de volaille à la crème au vin jaune ou de quelques champignons juste posés sur un gâteau croustillant aux Mélilot, ou mieux encore d’un sablé au comté utilisant cette poussière d’or jurassien qu'est la farine de gaudes de Chaussin. Certains se parfumaient en Chanel ou Dior, moi c’était « Absinthe » de François Guy, « Fumés » de chez Thaurin, « Torréfié » de chez Taron. Cela me rappelle une soirée mémorable où, à mon arrivée à Montréal, j’ai dû expliquer à l’ambassadeur de France qui me recevait l’odeur de gentiane dont mon costume était imbibé suite à l'éclatement de la bouteille de chez Michel voyageant dans ma valise ! De ces itinérances, je ramenais de belles idées et l’intention créative de les marier avec les produits de chez nous. C'est comme cela que, de Singapour, j’ai rapporté de merveilleuses épices indonésiennes, une exceptionnelle mouture de manioc du Brésil ou encore de superbes yuzus du Japon pour n’en citer que quelques exemples…

l'oseille, dans une cuisine actuelle où l'épure apporte de nouvelles subtilités gustatives ? Sans ce passé structurant des anciens, cette cuisine évolutive et réfléchie ne serait pas. Là aussi, on voyage entre les générations et la force de notre cuisine française, c’est de ne jamais oublier ce qui s’est fait avant pour mieux évoluer vers ce qui se fera après. Le cuisinier voyage, il s’enrichit. J’ai compris tous les contrastes que pouvait me procurer cette liberté. Parcourant la France, j’ai côtoyé les autres, j’ai humé les parfums de nos territoires, je me suis imprégné de cette culture gastronomique française, tout cela, à grands coups de casseroles, de poêles et souvent d’engueulades ! Bien sûr je ne vivais ce bonheur qu'en gardant au fond de mon cœur, le désir de me retrouver un jour dans mon Jura natal et de coller au plus près de la vérité de mes « racines ». Car, voyezvous, c'est aussi cela la force du voyage.... Il nous révèle à la différence et à une forme d’altérité trop souvent laissée pour compte sur fond de valeurs universelles. J'ai ressenti alors ce besoin de me rapprocher de cet environnement pour mieux perpétuer l'appel des anciens, et du message de préservation qu'ils nous transmettent. Aujourd’hui, avec la liberté du temps, j'ai pris un peu de recul et je suis admiratif de ce patrimoine végétal si bien dessiné. À chaque saison, je voyage encore et je m'évade dans ce beau Jura. Je vis une émotion discrète qui depuis bien longtemps, me donne l'impression de participer à un mystère.

Par cet enthousiasme et cette exigence qui vous nourrissent à chaque défi réussi, j’ai pris confiance en moi, mais j’ai aussi voyagé intérieurement et appris. J'ai connu cette forme de solitude, souhaitée parfois, redoutée de temps en temps, mais tellement bénéfique lorsque l'on sait s'entendre. Tous ceux qui, comme Paul-Émile Victor, sont partis loin de leur pays, le Jura, ont certainement ressenti cet état d'âme vite rattrapé par un désir de découverte, mettant en évidence le paradoxe de partir pour grandir. La jeunesse est démesurée, mais c'est tellement bon ! Il n'y a pas d'obstacle à la connaissance et à cette forme d'insouciance qui remet en question et interroge. Face à mes maîtres, j'avais l'impertinence de l'interrogation objective et contradictoire qui oblige à la réflexion constructive. Ce qui me fera dire à tous les jeunes passant par Arbois : « Sache mon jeune ami qu'en matière de cuisine, rien n'est absolu, tout reste à définir et que la création culinaire n'a de sens que si elle est perpétuellement en recherche, continue ton chemin et tu comprendras… » Qu'est devenu le plat emblématique des frères Troisgros à Roanne dans les années 1970, le magnifique saumon à

Jean-Paul

Jeunet

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b JEAN LUC GRILLOT - PARIS

Partir... et revenir


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NOUVEAUTÉ 2017

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RENDEZ-VOUS DANS L’ESPACE

conception-réalisation baltik.fr/kolza.biz. Images :D. Baileys- Powerofforever -N.Michel

STATION DES ROUSSES

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