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OUTRE-MER grandeur Nature n°23 _ juillet-août 2024
GÉRER LES MILIEUX AQUATIQUES ET PRÉVENIR LES INONDATIONS, UNE COMPÉTENCE DE LA CADEMA
Alors qu’une épidémie de choléra sévit à Mayotte depuis mars, la Cadema rappelle son fort engagement pour la Gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations (Gemapi). Rencontre avec Rachadi Saindou, président de la communauté d’agglomération.
Les difficultés d’accès à l’eau potable et courante couplées aux défauts d’assainissement sont des facteurs qui favorisent le développement du choléra. Une résurgence de cette grave maladie intestinale a été observée en Afrique de l’Est depuis 2021, avant que l’épidémie ne se propage aux Comores en février 2024, notamment à Anjouan, puis enfin dans certains quartiers de Mayotte. Face à une telle situation, la Cadema, Communauté d’agglomération de DembéniMamoudzou qui héberge plus d’un tiers des habitants de l’île, revient dans cet article sur ses actions dans le cadre de la Gemapi, contribuant tant à la salubrité publique qu’à la protection de l’environnement.
NOS ÉLUS ONT UNE VOLONTÉ FORTE DE CONCILIER DÉVELOPPEMENT HUMAIN ET ÉCOLOGIQUE,
ESTIME SOIFOUAN SAID, RESPONSABLE DU SERVICE EAU À LA CADEMA
Depuis 2018, la Gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations (Gemapi) est attribuée aux établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre (EPCI-FP) dont fait partie la Cadema. Les quatre missions lui incombant à ce titre sont ainsi définies par le Code de l’environnement :
• aménager tout ou partie d’un bassin hydrographique ;
• entretenir et aménager un cours d’eau, canal, lac ou plan d’eau, y compris leurs accès ;
• défendre les sites contre les inondations et la mer ;
• protéger et restaurer les sites, écosystèmes aquatiques, zones humides et formations boisées riveraines.
Dirigé par Soifouan Said Mela, le service Eaux de la Cadema compte une vingtaine de personnes. Or, les compétences Eau et Déchets étant liées, la Cadema a choisi de les mutualiser, ce qui permet de mobiliser pour ces deux grands champs d’actions aux enjeux majeurs une centaine d’agents.
INTERVIEW
RACHADI SAINDOU, PRÉSIDENT DE LA CADEMA
• Le Département de Mayotte étant propriétaire des cours d’eau, quelle forme revêt votre partenariat et comment financez-vous la Gemapi ?
- Le Conseil départemental est en sous-effectif et privilégie l’entretien des rivières dotées de captages en milieu rural. Nous intervenons pour notre part en zone urbaine et avons signé avec le Département une Autorisation d’occupation temporaire (AOT) du domaine public afin d’entretenir les cours d’eau au sein de la Cadema. Intégrée à l’avis d’imposition des contribuables, la taxe Gemapi dote chaque année la Cadema d’environ un million d’euros, dont près de 350 000 euros sont affectés à l’entretien des cours d’eau. C’est une tâche considérable que nous effectuons, avec des pressions inédites liées à une croissance démographique exponentielle, à l’abandon de déchets de toutes sortes dans la nature, à la création de bidonvilles, aux rejets d’eaux usées, etc. Avant nos interventions, les milieux aquatiques se résument bien trop souvent à de véritables dépôts sauvages !
• Quelles sont les autres principales actions réalisées dans le cadre de la Gemapi ?
- Concernant cette mission de nettoyage et d’entretien des cours d’eau et des mangroves – lesquelles représentent 80 % du littoral de la Cadema – nous confions des marchés de travaux à des prestataires qui vont collecter et mettre en décharge les déchets.
Par ailleurs, traditionnellement, les femmes à Mayotte lavaient leur linge en rivière, aux abords des villages. Pour mettre fin à cette pratique encore trop courante qui pollue les cours d’eau et le lagon en aval, la Cadema investit dans un projet social et environnemental adapté à notre contexte local : les laveries solidaires. Ces « lavomatiques » ciblent les foyers les plus démunis à travers un forfait de lavage à seulement un euro.
Et en matière de prévention des inondations, qui constitue le 2e volet de la Gemapi, la Cadema porte depuis 2020 le programme d’actions de prévention des inondations de la rivière Majimbini à M’tsapéré. Nos agents surveillent le bon écoulement des eaux, confortent les berges et sensibilisent la population riveraine au risque inondation. Cette année, nous allons lancer un marché de revégétalisation des berges pour limiter ce risque. Nous avons identifié des zones prioritaires. Ce projet est important aussi à une échelle plus large, car replanter est une manière de faire face à la crise hydrique à Mayotte. Nous allons travailler avec des associations locales pour revégétaliser les berges et nous réfléchissons déjà à la mise en place, par la suite, de gestionnaires qui assureront un suivi régulier sur ces sites naturels.
BIENTÔT 10 LAVERIES SOLIDAIRES EN SERVICE À LA CADEMA
Les lessives en rivière n’étant pas compatibles avec les exigences environnementales sur l’eau et les milieux aquatiques, la Cadema a implanté des laveries solidaires sur son territoire. Après une 1re laverie inaugurée à Dembéni en 2021 puis une 2 e à Hajangua en mai 2024 (ci-contre), 8 autres laveries ouvriront cette année. Une solution alternative au lavage en rivière qui a, par exemple, été reproduite à Bandrélé et va l’être à Koungou.