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OUTRE-MER grandeur Nature _ Conseil départemental de Mayotte

LA PROTECTION DES TORTUES MARINES ET LA LUTTE CONTRE LE BRACONNAGE

PUBLI-COMMUNIQUÉ

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À Mayotte, si les tortues de mer sont protégées, les actes de braconnage persistent. Rencontre avec Oulanga Na Nyamba, association mahoraise de défense des tortues. Soutenue par le Département de Mayotte, elle œuvre avec lui à la protection de ces reptiles emblématiques.

Organisation non gouvernementale fondée en 1998 à Mayotte, Oulanga Na Nyamba a pour mission principale la préservation de l’environnement (« Oulanga ») et des tortues marines (« Nyamba ») de l’île au lagon, comme l’indique son nom en shimaoré.

L’association réunit aujourd’hui entre 200 et 300 adhérents par an et poursuit courageusement ses 3 objectifs : mieux connaître et protéger les tortues marines et leur environnement ; sensibiliser les jeunes et les adultes à la protection de ces espèces ; lutter de façon active contre l’exploitation illégale des tortues de mer sur le territoire.

Oulanga Na Nyamba bénéficie sur de nombreux projets d’un soutien financier et technique du Département de Mayotte, lui-même acteur de la protection des tortues à travers ses 12 agents assurant la surveillance nocturne et le suivi sur les plages. Les autres acteurs locaux de la cause des tortues sont notamment la brigade nature de l’Office français de la biodiversité, Les Naturalistes, le REMMAT (Réseau échouage mahorais des mammifères marins et tortues marines) et bien sûr les forces de l’ordre, maillon essentiel à la lutte contre le braconnage. L’ensemble de ce réseau s’est renforcé pour faire face aux délits dont sont victimes les tortues vertes et plus rarement imbriquées, respectivement classées en danger et en danger critique d’extinction par l’UICN.

Opération de nettoyage du 20 février 2021.

©Oulanga Na Nyamba

Opération de nettoyage du 20 février 2021.

© Oulanga Na Nyamba

Tortue braconnée sur une plage de Mayotte.

© David Lemor | 97 px

TÉMOIGNAGES

JEANNE WAGNER, DIRECTRICE DE L’ASSOCIATION OULANGA NA NYAMBA

Jeanne Wagner

Aujourd’hui, Oulanga Na Nyamba a une équipe de 10 salariés et 8 volontaires en service civique (VSC). Avant, l’association était basée uniquement sur le bénévolat, qui est une ressource très importante pour nous, mais variable dans le temps, ce qui est normal. Avoir une équipe fixe en interne nous permet de mener des projets de grande ampleur, d’être plus concrets et efficaces.

Pour comprendre la place du braconnage à Mayotte, on a mené des enquêtes dans le cadre d’un projet cofinancé par le Département. Les premiers résultats, qui mériteraient d’être approfondis, montrent que la population mahoraise ne pense pas partout que les tortues venues pondre sur les plages sont parfois capturées pour être mangées. Cette perception varie beaucoup d’un village à un autre. Il ressort par ailleurs que les tortues ne sont pas consommées lors des repas familiaux, mais à l’occasion de barbecues qui ont lieu hors de la maison, entre amis de sexe masculin. La tortue n’est pas non plus un repas de fête traditionnelle. En réalité, elle est surtout tuée pour être vendue, et il y a là une vraie problématique. En effet, sa chair peut être monnayée, suivant la demande, entre 10 et plus de 100 euros le kg, sachant qu’un animal compte en moyenne 60 kg de viande...

Notre action s’avère essentielle pour limiter ce braconnage, d’autant plus qu’il s’est durci ces dernières années – les braconniers sont souvent armés et agressifs – en même temps que la délinquance et les autres pratiques illégales.

ALI MOUNIR, COORDINATEUR DE LA LUTTE CONTRE LE BRACONNAGE

Ali Mounir

À Oulanga Na Nyamba, je coordonne le projet “ Protection des plages de ponte des tortues marines ”. Notre équipe de terrain, composée de 11 personnes et de bénévoles tous formés par l’association, assure une présence sur les principales plages de ponte, à raison d’environ 350 rondes diurnes et nocturnes par an. Nous ne donnerons pas plus d’informations bien sûr, pour des raisons de confidentialité. Depuis avril 2021, nous avons signalé 9 comportements suspects auprès de la gendarmerie maritime et de la gendarmerie départementale, qui ont conduit à la condamnation de 5 braconniers.

En 2021, Oulanga Na Nyamba a permis de sensibiliser environ 400 personnes au cours d’une cinquantaine de sorties d’observation des pontes à Moya.Sur la même période, 227 interventions ont eu lieu dans le milieu scolaire, périscolaire et lors d’événements.

© Oulanga Na Nyamba

Le nombre d’actes de braconnage recensé par notre association est en constante diminution depuis 2019, ce qui montre que nos actions portent leurs fruits. Mais ces agissements illégaux restent nombreux et il nous faut continuer ce combat de longue haleine.

Nous sommes en fait les yeux des gendarmes, qui ne possèdent ni le temps ni les moyens de réaliser nos nombreuses heures de surveillance. C’est capital pour nous de travailler avec les forces de l’ordre, car ce sont elles qui peuvent au final intervenir et réprimer le braconnage.

Et puis, la population doit comprendre que les tortues sont une richesse de Mayotte, qui attire chaque année de nombreux touristes. On doit absolument faire comprendre que l’environnement peut rapporter si on ne le détruit pas.

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