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CLIPPERTON
98799, CLIPPERTON ÉPISODE 2 : UNE CHANCE
Ci-dessus : inhabité par l’homme, l’atoll de Clipperton abrite la plus grande colonie de fous masqués au monde. Celle-ci est en déclin du fait de la surpêche du thon : les fous masqués se nourrissent en effet des poissons et calmars chassés vers la surface par les bancs de thons.
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Tête d’épingle perdue dans les confins du Pacifique oriental, Clipperton est certes un « caillou de la République » mais aussi un territoire aux atouts multiples, malgré l’indifférence de nos décideurs.
Depuis son attribution définitive à la France en 1931, suite à un arbitrage international rendu en défaveur du Mexique, notre pays ne s’est guère intéressé à cette île-confetti du bout du monde.
Certes, la France a envoyé des militaires occuper cet atoll entre 1966 et 1969 mais cela faisait suite aux protestations d’États d’Amérique, inquiets des essais nucléaires aériens en Polynésie française. Officiellement, cet atoll n’est aujourd’hui fréquenté que par des scientifiques, des radioamateurs ou des explorateurs qui en font la demande. Officieusement, c’est une autre affaire... À l’abri des satellites et à mi-chemin entre l’Amérique du Sud et du Nord, Clipperton est un lieu de rendez-vous discret prisé des trafiquants en tous genres. Ses eaux sont pillées en toute impunité par des thoniers étrangers, sans qu’aucun droit fondamental à la pêche ne soit appliqué.
Un laxisme français a priori monnayé contre la libération en 2013 de Florence Cassez, une ressortissante française emprisonnée au Mexique. Une façon également pour le quai d’Orsay de calmer les velléités de souveraineté de cet État-voisin, le plus proche de l’atoll. Une manière aussi comme une autre pour notre pays, avec cette seule possession du Pacifique Nord et ses eaux attenantes, de conserver sur le papier son rang de seconde puissance maritime.
Dans la sphère politique, rien n’a bougé jusqu’en novembre 2016 et l’annonce par Ségolène Royal, alors ministre de l’Écologie, de créer une zone de protection de biotope – aire marine – autour de Clipperton et ce dans un rayon de 12 milles marins (22 kilomètres).
Un bel effet d’annonce survenu en pleine COP 22 à Marrakech mais qui n’a débouché sur aucune mesure productive. Aucune surveillance durable de la zone n’a été étudiée. Aucune coopération avec les États voisins n’a été envisagée. Clipperton a été une nouvelle fois abandonné, et négligé alors que ce territoire d’outre-mer vit de profonds bouleversements et doit fait face à des défis qui ne manqueront pas de se poser à notre société les prochaines années. Appelons-ça, les paradoxes français…
Rédaction : Stéphane Dugast
Reporter, auteur, réalisateur et chroniqueur, Stéphane Dugast multiplie depuis l’an 2000 les embarquements en tous genres. Il a séjourné à trois reprises sur l’atoll de Clipperton. Il est également le cofondateur du journal papier Embarquements dédié aux voyages et à la découverte. + d’info ici : www.embarquements.com