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MUSIQUE

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RENTRÉE LITTÉRAIRE : DANS LE MEILLEUR DES MONDES

Les ouvrages de la rentrée littéraire dessinent des mondes et des vies intranquilles, comme entre deux rives, pour le meilleur et pour le pire. De quoi aborder l’automne arrivant, sous le prisme de la (re)construction. The new literary season: The “best” of worlds. For the upcoming literary season, a number of authors have chosen to depict universes and lives that are truly unheard of… as if lost between two shores, for better or for worse. These new releases allow one to approach the coming autumn through the prism of (re)construction.

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Futur choc

Prix Goncourt 2004 pour son vibrant récit sur une famille italienne, Le Soleil des Scorta, Laurent Gaudé signe un ouvrage choc, comme pour nous alerter sur le fait que ce «soleil» pourrait bien disparaître de notre planète. Nous voilà plongés dans un monde futuriste où les hommes et les femmes vivent dans des zones divisées par classes sociales, où des êtres sont démembrés en plein jour pour récupérer d’étranges greffes qui offriraient la vie rêvée. Un roman pour ne pas avoir à se souvenir de «la vie d’avant».

An astonishing future. Laurent Gaudé – who won the 2004 Goncourt Prize for The Scortas' Sun, his vibrant story about an Italian family – seemed to have been warning us that said “sun” could well disappear from our lives one day. In the author’s shocking new novel, the reader is plunged into a futuristic world where men and women live in areas divided by social class. Here, people are dismembered in broad daylight for the sake of harvesting strange transplants, which appear to be the key to the dream life. With this novel, you won’t even remember “the world before…”

©Jean-Luc Bertini

« Chien 51 », Laurent Gaudé, Actes Sud Prix TTC 22,00 €

Tout sauf un long fleuve tranquille

Se révélant comme un guide sous sa plume de poète, Yasmina Khadra signe un ouvrage dense en forme de récit initiatique. C’est l’histoire d’un brave garçon, berger dans le désert algérien, jamais sorti de son douar, qui se voit pris dans un terrible traquenard. Il fera la guerre des tranchées en 1914, sous un autre nom, pour le compte d’un caïd qui lui a promis monts et merveilles. S’ensuit une sorte de chemin de croix au cours duquel les étapes de vie sont les plus douloureuses — mais aussi les plus belles — qui soient.

Life is anything but a long, quiet river.

Yasmina Khadra's poetic penmanship guides the reader through this – emotionally heavy – initiatory tale. It is the story of a brave boy, a shepherd in the Algerian desert who had never left his douar (circular nomadic village in Algeria), who finds himself caught in a terrible trap. He ends up fighting in the 1914 trench wars under a fake name, after being convinced by a shady leader who promised him great things. Thus, his tribulations begin, ones in which life reveals itself to be as painful – and as beautiful – as can be.

©Jean-Luc Bertini – SIPA

Se parler (cash)

Le titre frappe fort. C’est la méthode Virginie Despentes : manier les mots de façon volontairement crue et violente, la nuance du message qui en ressortira n’en sera que plus inattendue. C’est le constat au fil des échanges de mails bien corsés entre le «Cher Connard», un certain Oscar, écrivaillon «metooïsé» par son ancienne attachée de presse et Rebecca, une actrice quinquagénaire sur le retour. Contre toute attente, Oscar et Rebecca vont se lier d’amitié, leurs échanges marquant les étapes d’une réconciliation symbolique entre les genres. L’ouvrage esquisse ici les traits d’une ligne médiane entre les prismes parfois radicaux, d’une posture ni-ni du masculin, ni martyr autoproclamé du féminisme, ni «tous les mêmes». Une œuvre qui cherche la justesse, un entre-deux résumé par l’oxymore qui trône en couverture. Shooting straight. The title – Cher Connard (Dear Douchebag) – is hardhitting… as is Virginie Despentes' won’t: the authoress uses words in a deliberately crude and violent way, making the nuanced message that emerges from her writing all the more poignant. This form of realisation appears over the course of a heated email joust between the book’s two characters: first, we have the “Dear Douchebag” in question, a certain Oscar, a writer who got “me too-ed” by his former press agent; then we have Rebecca, a fifty-year-old actress trying to make her comeback. Against all odds, Oscar and Rebecca become friends, as their exchanges mark the stages of a symbolic reconciliation between the two sexes. The authoress sketches out a form of common ground through the male’s (at times radical) position: he is neither a self-proclaimed martyr of feminism, nor “just another man”. The book seeks accuracy, an inbetween summarised by the oxymoron that characterises its title.

© Nikos Aliagas

« Cher Connard » Virginie Despentes, Grasset Prix TTC 22,00 €

Une enfance sacrifiée

L’infatigable Amélie Nothomb signe un livre «familial» avec Le Livre des sœurs. Il y est question d’un lien d’âmes — littéralement — sœurs entre Tristane, la première-née délaissée par des parents trop épris l’un de l’autre, et Laëtitia, la seconde. Malgré cette ode à l’amour sororal, l’histoire de Tristane est grinçante, dessinant une enfant «terne» qui a dû se construire seule. Une sorte de «conte de fées» qui n’oublie pas la noirceur originelle de ses écrits initiatiques. Lost childhood. With Le Livre des Sœurs (The Sisters’ Book), unremitting authoress Amélie Nothomb gives us her version of a “family” book. It is about a soul bond – literally – between sisters Tristane, first-born child abandoned by parents who had too much love for each other, and their second-born Laëtitia. Behind this ode to sisterly love, Tristane's story remains harsh, depicting a “dull” child left to rear herself. The book is a sort of “fairy tale” that leaves room for the original darkness of Nothomb’s early writing.

© Francesca Mantovani - Editions Gallimard

« La Vie clandestine » Monica Sabolo, Gallimard Prix TTC 21,00 €

L’échappée vers la vérité

Le pouvoir de l’écriture opère, clandestinement, sous la plume de Monica Sabolo, dans cet ouvrage en forme d’enquête sur le groupe terroriste d’extrême gauche Action directe. Car c’est au travers de cette obsession que l’ancienne journaliste se voit emportée vers l’énigme et la violence de sa propre existence. Née de père inconnu, élevée par un père adoptif aux activités occultes, elle a subi l’irréparable, la condamnant, elle aussi, à une vie de fugitive. Se raccrochant sans cesse à ce qui fait humanité, l’auteure passionne et bouleverse, signant un livre qui fera écho à toutes nos clandestinités. The escape towards truth. Through her investigation of Action Directe, an extreme left-wing terrorist group, Monica Sabolo’s pen illustrates – in all clandestineness – the true power of writing. Her obsession led the former journalist down the rabbit hole that is her own existence and the violence that defines it: born of an unknown father, raised by an adoptive father who indulged in occult practices, she suffered the irreparable, thus condemning her – in turn – to the life of a fugitive. The authoress enthrals and upsets, constantly clinging to what makes her human in this book that is sure to echo all of our most clandestine feelings.

La liste de ses multiples vies

© Astrid di Crollalanza

Comme si l’auteure nous plongeait dans les pensées continuelles de son héroïne, Comment font les gens? suit frénétiquement la vie à cent à l’heure d’une femme, mère, amie et éditrice quinquagénaire, Anna. Se voulant le portrait de notre époque, le livre illustre toutes les questions auxquelles sont confrontées les héroïnes féminines ordinaires : le vieillissement du corps, la question du féminisme, le gap entre générations et les incompréhensions, la gestion des parents en Ehpad, les infidélités des hommes… Vaste programme! All of her different lives. It’s as if Olivia de Lamberterie were trying to immerse us in her heroine's stream of consciousness: Comment font les gens ? (How do people do it?) frantically follows the fast-paced life of Anna; she is a woman in her fifties, a mother, a friend and an editor. Intended as a portrait of our times, the story depicts all of the issues facing “ordinary” female heroines: an ageing body, the question of feminism, the generation gap and the ensuing misunderstandings, managing one’s parents in an old people's home, the infidelity of men, etc. A full programme indeed!

« Comment font les gens? » Olivia de Lamberterie, Stock Prix TTC 20,50 €

CHATEAU ROUBINE - Cru Classé 4216 route de Draguignan 83510 Lorgues www.chateauroubine.com - Tél +33 (0)4 94 85 94 94

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