Croisements
n°19 avril / mai juin 2014
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du 7 FÉv. 2014 au 4 janv. 2015 œuvres majeures de la collection Würth
anthony caro, Table Piece “Bastion Dance”, 1995, acier, bois et céramique, 81 × 101,5 × 70 cm, collection Würth, inv. 4002
WWW.musee-Wurth.Fr tÉl. 03 88 64 74 84
Toutes les activités du Musée Würth France Erstein sont des projets de Würth France S.A.
édito Explosive ! Voici que s’annonce une fin de saison détonante avec la création française de Doctor Atomic de John Adams, dans une mise en scène de Lucinda Childs. Dietrich Henschel – un des plus grands récitalistes de notre temps, mémorable aussi en Doctor Faustus (Busoni) et Wozzeck (Berg) – entrera dans la peau du physicien J. Robert Oppenheimer, le père de la tristement célèbre bombe atomique, pour une soirée qui marquera à n’en pas douter les esprits. Patrick Davin dirigera l’Orchestre symphonique de Mulhouse. Explosion de couleurs ensuite : dans un registre plus léger, l’irrésistible Platée de Mariame Clément nous invitera à une rêverie douce-amère. Sous les traits de cette grenouille attachante, nous retrouverons Emiliano Gonzales Toro et Christophe Rousset, à la tête des Talens Lyriques. Les éléments se déchaînent du côté de l’Opéra Studio : nos jeunes chanteurs se retrouvent embarqués avec Stéphane Vérité au cœur d’une tempête… amoureuse avec La Colombe et Le Pauvre Matelot, deux courts opéras traités dans un jeu de complémentarités. à la baguette, Claude Schnitzler dirigera l’Orchestre philharmonique de Strasbourg et l’Orchestre Lamoureux – pour les représentations à Paris. Côté danse, la création se trouve doublement à l’honneur : il sera tout d’abord question de la création du monde, selon le récit de la Genèse. Le chorégraphe Uwe Scholz parvient à faire émerger du chef-d’œuvre de Haydn deux figures nouvelles de l’homme et de la femme. Un spectacle total qui fera se côtoyer les danseurs du Ballet de l’OnR, les Chœurs de l’OnR, trois solistes et La Follia, Orchestre de chambre d’Alsace. Création encore avec Genesis : à travers ce programme inédit, Ivan Cavallari donne carte blanche aux danseurs qui souhaitent s’essayer à la chorégraphie. Au total, huit courtes pièces prendront forme sous vos yeux, à Mulhouse avec Genesis Studio, puis à Strasbourg. La saison de récitals s’achève avec Stéphane Degout et Sophie Koch, deux artistes français que nous nous réjouissons toujours d’entendre. Des ateliers pour enfants et quatre concerts apéritifs viendront parfaire ce programme : Pile ou face – donné dans la grande salle par nos jeunes chanteurs de la Maîtrise –, Poupées russes, Frou-Frou et Il Campanello. Je vous souhaite un printemps gai et éclatant et vous invite, dès le 6 mai, à lever le voile sur la saison 2014-2015 ! Marc Clémeur Directeur général
Contacts
Opéra national du Rhin 19 place Broglie • BP 80320 67008 Strasbourg cedex 8 +33 (0)3 88 75 48 00 opera@onr.fr
Billetterie
Strasbourg 0 825 84 14 84 (0,15 € / min) Mulhouse +33 (0)3 89 36 28 28 Colmar +33 (0)3 89 20 29 02
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Directeur de la publication Marc Clémeur Responsable de la rédaction Mélanie Aron Conception graphique et secrétariat de rédaction Flora Klein - OnR Impression Gyss Imprimeur Obernai Journal imprimé à 23 000 exemplaires ISSN : 2103-981X Licences 2-1055775 et 3-1055776 photos : couverture bruno de lavenère & étienne guiol p.3 : alain kaiser
2014 2015 rendez-vous le 6 mai
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p.4 : photo nis&for • p.5, de gauche à droite : bruno de lavenère & étienne guiol, patrick nin, jean-luc tanghe et hervé poeydomenge
06 De la bombe 09 Oppenheimer, ce héros 10 Avant l’explosion
la colombe le pauvre matelot 16 Un décor numérique... 20 Cocteau, le « poète-orchestre »
danse 22 Die Schöpfung 24 Genesis
récitals 26 Stéphane Degout 27 Sophie Koch
L’Opéra national du Rhin est composé des Villes de Strasbourg, Mulhouse et Colmar et subventionné par le Ministère de la Culture et de la Communication, la Région Alsace , associée à l’ensemble des actions programmées dans le cadre de la saison 2013-2014, le Conseil général du Bas-Rhin, le Conseil général du Haut-Rhin. L’Opéra national du Rhin tient à remercier l’ensemble de ses partenaires, entreprises et particuliers, pour leur confiance et leur soutien.
jeune public En piste !
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La Maîtrise : ici et ailleurs
platée 13 Un amour de grenouille 14 Inoubliable nymphe des marais
doctor atomic
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mécènes
Banque CIC Est Cercle Richard Wagner Philéa Réseau GDS Roederer
Sponsors
Caisse d’épargne Alsace Crédit Agricole Alsace Vosges Dagré Communication Printemps
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concerts apéritifs
les brèves 4 questions à... Mariame Clément
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34 le
35 sandrine
cavallari
voyage de pinocchio abello
côté coulisses 36 Du croquis à la scène
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38 Les secrets de Cendrillon 40
lA PRESSE EN PARLE
calendrier
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Partenaires
Advisa Café de l’Opéra Cave de Turckheim CBS Outdoor Champagne Nicolas Feuillatte Chez Yvonne CRT Alsace Effervescence Fnac Kieffer traiteur Le Pont des Vosges Librairie Kléber Mars Chocolat France Musée Würth France Erstein Parcus Wattwiller
Partenaires médias
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Arte Dernières Nouvelles d’Alsace France Bleu Alsace France 3 Alsace L’Alsace Lagardère Métropoles Le Figaro Les Inrockuptibles Libération Mezzo Qobuz.com Radio Accent 4 Radio FIP Strasbourg Radio RBS Strasbourg RTL 2 Szenik.eu
Les membres de Fidelio
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de la bombe John Adams compose Doctor Atomic en seulement 18 mois. Il s’agit du plus long et du plus complexe de ses ouvrages scéniques. Le livret de Peter Sellars est un arrangement de textes déjà existants, d’informations de sources diverses : des récits de journalistes, d’historiens, des documents gouvernementaux tombés dans le domaine public. On y trouve également des détails tirés des livres de Leslie Groves et Edward Teller, protagonistes du Projet Manhattan.
Le pacte
selon Adams, peu d’Américains seraient sensibles au mythe de Faust. Le pacte conclu par Oppenheimer avec le gouvernement américain fait partie de la « mythologie nationale » américaine. On vous donnera le matériel et l’argent, les plus grands scientifiques et un soutien illimité. Vous nous fabriquerez une arme de destruction de masse : tel est le deal. Le spectre du communisme et de la guerre froide hantent l’enfance du compositeur. Cet opéra est pour lui une magnifique opportunité de regarder la mythologie américaine et ses archétypes.
On vous donnera le matériel et l’argent, les plus grands scientifiques et un soutien illimité. Vous nous fabriquerez une arme de destruction de masse : tel est le deal.
En 1999, Pamela Rosenberg, directrice de l’Opéra de San Francisco, propose à John Adams de composer un opéra autour du mythe de Faust. Elle évoque Robert Oppenheimer (directeur scientifique du projet Manhattan), la création de la première bombe atomique : sujets particulièrement attirants pour lui. Il sent immédiatement en lui cette vibration familière, indicatrice d’un sujet palpitant. L’affaire est conclue. Mais les états-Unis ont leur propre mythologie, et
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Horreur et poésie
Charles Baudelaire, John Donne, Muriel Rukeyser et la Bhagavad Gita : ils sont présents dans le livret et ont un lien direct avec Robert Oppenheimer, homme cultivé, parlant aussi couramment le français que l’allemand, lisant le sanskrit et écoutant Bach. La poésie est partie prenante de la narration et participe à l’horreur du sujet. Oppenheimer parle à travers elle. Ainsi à la fin du premier acte, le créateur de la bombe est seul. Père de l’arme la plus redoutable
détails : maquettes de décors de bruno de lavenère / étienne guiol
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opéra strasbourg
ve 2, ma 6, ve 9 mai 20 h di 4 mai 15 h
la filature mulhouse sa 17 mai 20 h
conférence
par Franck Mallet me 30 avril 18 h • entrée libre
photos frédéric godard
Pour John Adams, l’utilisation de la bombe est courue d’avance comme quelque chose d’inévitable, d’écrasant, de stratégique aussi : montrer au monde qui est le boss.
que l’humanité ait jamais connue, il ressent un déchirement intérieur. C’est là qu’est introduit un sonnet de Donne, un moment très profond dans l’opéra, qui traite de la presque insupportable conscience de soi, de la bataille entre le bien et le mal, entre la lumière et les ténèbres. Le poète parle de lui-même comme d’une « ville usurpée », sa raison a été capturée par les forces du mal. C’est la face sombre de sa personnalité qui s’exprime, moment d’une forte intensité dramatique. Une fois passée l’euphorie initiale liée au succès de la bombe, il sombrera d’ailleurs dans une dépression profonde. Après la guerre, les artistes sont obsédés par la capacité de l’homme à se détruire lui-même. Les films de science-fiction apparaissent, porteurs de cette menace et angoisse de destruction de la terre. Varèse, avec Déserts, suggestion d’un paysage postapocalyptique, et la musique de science-fiction sont les deux premières sources d’inspiration de John Adams. Les paysages sont très présents dans la musique. Le compositeur utilise des effets sonores comme le bruit de la pluie, du tonnerre, du vent, des sons angoissants et mystérieusement beaux.
Opéra en deux actes de John Adams sur un livret de Peter Sellars Créé à l’Opéra de San Francisco le 1er octobre 2005 Direction musicale
Patrick Davin
Mise en scène
Lucinda Childs
Décors et costumes
Bruno de Lavenère Lumières
David Debrinay vidéo
étienne Guiol
J. robert oppenheimer
Dietrich Henschel
edward teller
Robert Bork
robert wilson
Marlin Miller
L’arme est là
kitty oppenheimer
Doctor Atomic n’est résolument pas le Faust américain. Car la bombe est pensée dans la course héroïque pour protéger le monde du nazisme, pour sauver la civilisation. Et de leur côté, les Allemands travaillent à leur propre bombe. Il y a urgence. John Adams a beaucoup lu et réfléchi sur la guerre, l’extrême, l’inhumain, la destruction et la fatalité. Pour lui, l’utilisation de la bombe est courue d’avance comme quelque chose d’inévitable, d’écrasant, de stratégique aussi : montrer au monde qui est le boss. Après trois ans de lectures sur le sujet, Adams énonce une douloureuse bien qu’évidente conclusion : la bombe atomique n’aurait pas dû être utilisée. Oppenheimer le savait : les armes nucléaires ne serviraient que contre des populations affaiblies et condamnées. Et ce fut le cas au Japon. Mais si les Américains ne l’avaient pas lâchée à ce moment-là, à cet endroit, d’autres l’auraient inévitablement fait, plus tard.
pasqualita
Anna Grevelius
Jovita Vaskeviciute general leslie groves
Peter Sidhom
frank hubbard
Brian Bannatyne-Scott captain james nolan
John Graham-Hall Chœurs de l’OnR
Orchestre symphonique de Mulhouse Éditions Boosey & Hawkes
Croisements • 7
le projet manhattan Le 11 octobre 1938, Einstein adresse une lettre à Roosevelt, expliquant que les Nazis sont en mesure de purifier l’uranium-235 et devraient bientôt disposer d’une bombe atomique extrêmement puissante. Peu après, Roosevelt lance le Projet Manhattan. En 1939, Enrico Fermi crée sa « pile atomique » à base d’uranium et de graphite. Il teste l’hypothèse d’Einstein, la réaction en chaîne et la possibilité de produire une réaction explosive. Lorsque les états-Unis entrent en guerre en 1941, les scientifiques produisent les éléments nécessaires à la fabrication de la bombe. En 1942, le Général de Brigade Leslie Richard Groves est nommé directeur du Projet Manhattan à Los Alamos, au Nouveau Mexique. Il demande à J. Robert Oppenheimer d’en prendre la direction scientifique. Deux combustibles nucléaires sont préparés simultanément, l’uranium-235 enrichi et le plutonium-239. Le projet militaire est bien gardé : les services sont cloisonnés et à part les plus hautes autorités civiles et militaires, personne ne connaît la finalité du projet. L’accès au site de test est placé sous haute surveillance. Le Projet Manhattan coûte 2 milliards de dollars US (de l’époque) et réunit en 3 ans 200 000 personnes réparties dans 37 laboratoires secrets des états-Unis. Le but ultime des expériences est tenu secret jusqu’en mai 1945, où ont lieu les premiers essais en grandeur nature. Un tir d’essai de 108 tonnes est réalisé le 7 mai 1945 à Trinity. L’apothéose a lieu le 16 juillet 1945 lorsqu’un flash brillant visible à plus de 16 km de distance apparaît dans le ciel d’Alamogordo. L’explosion de la première bombe A dépasse toutes les espérances et libère une énergie estimée à environ 22 000 tonnes de TNT (plus de 2 200 camions de dynamite !). Les essais s’arrêtent là. Ils sont concluants. Analysant les conséquences et le coût d’une invasion du Japon, l’état-Major américain estime qu’il faudrait entre 500 000 et 1 000 000 de soldats pour conquérir le pays et que la guerre ferait entre 220 000 et 500 000 morts américains. Mais Truman veut la capitulation inconditionnelle du Japon. Pour éviter une longue et difficile bataille sur le sol japonais, Truman et son état-Major décident de faire exploser la bombe atomique sur une ville de réserve japonaise si l’armée nippone ne capitule pas immédiatement. Ignorant l’ultimatum, les Japonais attendent les Américains de pied ferme sur leur territoire et planifient des attentats suicides pour sauver l’honneur de leur nation et de l’Empereur. Mais ils n’en auront pas le temps. Truman demande qu’on lui dresse une liste de cinq villes japonaises à bombarder et ce n’est qu’au dernier moment, en fonction de la météo notamment, que les objectifs d’Hiroshima et Nagasaki sont choisis.
trinity Nom de code du premier essai nucléaire de l’histoire. L’explosion a lieu le 16 juillet 1945 à Alamogordo au Nouveau-Mexique dans une zone désertique nommée Jornada del Muerto. Trinity consiste en l’explosion d’une bombe au plutonium nommée « Gadget ». Semblable à une grosse boule, Gadget n’est pas larguée d’un avion mais hissée au sommet d’une tour métallique. L’essai devait servir à valider l’ensemble des recherches menées sur l’arme atomique. Le 12 juillet 1945, la bombe arrive sur le site. Elle est montée par les scientifiques dans le Ranch McDonald puis transférée sur le lieu prévu pour l’explosion. Les ingénieurs insèrent le cœur en plutonium dans la bombe. Puis elle est hissée au sommet de la tour. Durant la nuit du 15 juillet, les détonateurs sont installés, l’engin est prêt. À 5 h 29, la bombe explose. Un cratère de 3 mètres de profondeur et de 330 mètres de diamètre se forme sur le lieu de la détonation. La silice contenue dans le sable s’est transformée en verre d’une couleur vert clair, la « trinitite ». Les montagnes aux alentours s’illuminent pendant deux secondes et le grondement de l’explosion atteint les observateurs après 40 secondes. Personne ne se trouve à moins de 9 kilomètres de l’explosion. L’onde de choc est ressentie à plus de 160 kilomètres et le champignon atomique atteint une altitude de 12 kilomètres. Le cratère sera remblayé durant les jours qui suivent l’explosion. Les militaires donnent comme explication un accident dans un dépôt de munitions et la cause exacte n’est pas rendue publique avant l’attaque sur Hiroshima. L’essai ayant pleinement réussi, les bombes sont opérationnelles et prêtes à être lâchées sur le Japon. Les 6 et 9 août, deux bombes sont larguées : Little Boy sur Hiroshima et Fat Man sur Nagasaki.
oppenheimer, ce héros De Londres à Berlin en passant par Pékin, Lucinda Childs est sollicitée par les plus grandes scènes du monde pour remonter des pièces qui ont marqué l’histoire telles que Dance, Einstein on the Beach… Entretien avec une chorégraphe metteur en scène engagée. Doctor Atomic est une œuvre que vous connaissez très bien puisque vous en aviez réalisé la chorégraphie dans la mise en scène de Peter Sellars, quel regard portez-vous sur cette première version ? La création à San Francisco en 2005 m’a énormément surprise, je ne m’attendais pas à ce résultat. C’était complètement différent d’une production comme Einstein on the Beach. Doctor Atomic suit un schéma strictement narratif, concentré sur deux jours du mois de juillet 1945. Deux jours cruciaux et déterminants pour l’histoire de l’humanité. À la fin de l’opéra, les vingt dernières minutes de musique suivent en temps réel les vingt minutes avant l’explosion de la bombe. On est plongé au cœur de l’action, aux côtés de J. Robert Oppenheimer. Cette correspondance totale entre le temps de la scène, le temps de l’action et celui de la salle crée un rapport d’évidence fascinant. Peter Sellars s’est attaché – avec succès – à représenter ce qu’il s’était vraiment passé.
photo michael o'neill b
J. Robert Oppenheimer est au cœur de l’opéra, comment le décririez-vous ? C’est « THE » héros. Pas seulement de Doctor Atomic mais aussi de notre XXe siècle. Une personne exceptionnelle qui a pensé la fin du monde. Il a voulu sauver l’humanité et arrêter définitivement la guerre. La façon dont il a été choisi pour superviser le Projet Manhattan m’a beaucoup intriguée. On savait qu’il était génial. Capable d’une grande concentration, d’une énergie surhumaine. Il était aussi un grand manager ;
il a pu gérer une équipe qui est passée de 50 à 300 personnes. Il savait motiver les gens pour travailler 24 h sur 24. Oppenheimer, c’était l’exactitude, la loyauté, une conscience exacerbée et en même temps une grande solidité l’empêchant de sombrer dans la folie malgré les plaintes de sa femme et les conditions de vie difficiles et précaires qui étaient celles des membres du Projet Manhattan. Toutes ces qualités font que le Général Leslie Groves, responsable militaire du projet, l’a imposé, convaincu que c’était le seul homme à avoir les épaules pour un tel projet. En dépit des critiques qui pouvaient déjà pointer sur son passé avec la montée du maccarthysme. Quel rapport entretenez-vous personnellement avec ce personnage ? J’ai son histoire dans le sang. J’avais dix ans quand la chasse aux sorcières et la lutte contre le communisme ont été déclarées par Mac Carthy. L’époque pendant laquelle Oppenheimer est devenu l’objet des attaques du maccarthysme correspond à la période où ma conscience politique et artistique s’éveillait. En ce sens, on peut dire que le maccarthysme représente un événement fondateur dans mon parcours intellectuel. J’ai commencé à me poser des questions sur le gouvernement, les lobbies à l’œuvre, l’intelligentsia… En outre, comme la plupart des Américains de ma génération, la Deuxième Guerre mondiale a joué un rôle majeur dans ma construction identitaire. Mon père a combattu en Normandie, dans le Pacifique et l’Atlantique. Il n’en parle jamais, c’est un sujet trop douloureux pour lui. Quand il est rentré, on a pris un nouveau départ et tenté de former une famille normale. Doctor Atomic possède un troisième acte qui n’est pas dans le livret : la naissance d’une nouvelle génération, la mienne. Doctor Atomic • Croisements • 9
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Avant l’explosion
Dans son livre de mémoire 1, John Adams raconte qu’en 1999, douze ans après la première de Nixon in China, quatre ans après celle de I Was Looking at the Ceiling and Then I Saw the Sky et alors qu’il travaillait encore à El Niño qui sera donné à Paris en décembre 2000, il n’avait aucune envie particulière d’entreprendre la composition d’une nouvelle œuvre lyrique. La proposition de Pamela Rosenberg, alors directrice générale de l’Opéra de San Francisco, de contribuer à un cycle qui dessinerait les contours d’un « Faust américain », eut raison de cette relative désaffection. Non pas, ajoute sobrement John Adams, que la thématique faustienne l’eût enthousiasmé ni même vraiment convaincu, mais parce que la suggestion était aussi d’évoquer la personne de J. Robert Oppenheimer. Homme d’une grande finesse et d’une immense culture, physicien reconnu et admiré par les communautés scientifiques du monde entier, Robert Oppenheimer fut aussi le directeur scientifique du Projet Manhattan qui, de 1942 à 1945, eut pour tâche de mettre au point la première bombe atomique, celle qui fut lâchée sur Hiroshima et Nagasaki les 6 et 9 août 1945. Les figures contrastées d’Oppenheimer le désignaient comme le personnage principal d’un opéra qui explorerait, sinon un hypothétique mythe faustien, du moins les complexités d’un « rêve » et d’une conscience propres aux Américains au cœur d’un XXe siècle déchiré par un conflit planétaire d’une violence inédite et désormais placé devant l’éventualité d’une destruction totale. 10 • Croisements • Doctor Atomic
Le projet, relate John Adams, s’imposa dès lors à lui avec une virulence singulière, et il s’y attela aussi rapidement qu’il le put. Mais si une œuvre lyrique requiert une thématique d’ensemble et parfois un rôle principal, il lui faut aussi un ressort dramatique, la tension d’une intrigue. L’idée magistrale de John Adams et de son librettiste Peter Sellars fut de parler de la bombe atomique, non pas en évoquant les terribles effets de ses premières utilisations militaires, mais en situant l’action dans sa phase immédiatement antérieure, au moment qui précède de quelques jours puis de quelques heures le premier essai effectif, qui eut lieu le 16 juillet 1945 dans le désert du Nouveau Mexique. C’était, à l’évidence du cataclysme, à la connaissance que rétrospectivement nous en avons, aux certitudes dont il fait l’objet, substituer la dimension d’une attente, d’une projection, d’un doute existentiel, c’était rouvrir un espace et un temps suspendus dans lesquels la prévision et le calcul des savants côtoient soudain la sensation panique des hommes d’être confrontés à la question abyssale de leur propre raison d’être. L’étonnant attrait que possède Doctor Atomic tient peut-être à ce parti pris d’une situation qui présente toutes les caractéristiques d’un dispositif messianique – l’attente, la remémoration, le pressentiment d’un événement qui ne se contentera pas de s’inscrire dans le fil de l’histoire mais qui pourrait bien provoquer une césure et comme le repliement du temps sur lui-même –, mais en en inversant le sens. Car ce n’est pas ici quelque Autre, un Tout Autre, un Messie qui va advenir, mais la conséquence mesurée, maîtrisée, d’une action et d’une ingéniosité humaines, trop humaines.
détails : maquette de décors de bruno de lavenère / étienne guiol
par Daniel Payot
L’idée magistrale de John Adams et de son librettiste Peter Sellars fut de parler de la bombe atomique, non pas en évoquant les terribles effets de ses premières utilisations militaires, mais en situant l’action dans sa phase immédiatement antérieure, au moment qui précède de quelques jours puis de quelques heures le premier essai effectif.
En donnant aux équations d’Einstein une application effective, en transformant la matière en énergie par la fission de l’atome et en transgressant de ce fait la distinction jusqu’alors tenue pour irréductible entre matière et énergie, les humains ont fait de l’élément premier de la nature, de son entité de base, un principe de destruction ; de quelque manière qu’on l’exprime, que les termes choisis soient profanes, métaphysiques ou religieux, cette invention bouleverse la grammaire même de la création : la matière sur laquelle nous avions cru depuis toujours asseoir notre habitation du monde est devenue potentiellement destructrice ! Tous les personnages de Doctor Atomic, différemment selon leur fonction et leur psychisme, sont confrontés à l’émergence d’enjeux nouveaux, plus ou moins fondamentaux, surgis de cette saisissante révélation. L’imminence du premier essai amplifie encore l’intensité de cette confrontation, comme si chacun, en accompagnant le franchissement d’un seuil jamais atteint dans la capacité humaine d’anéantissement, était en train de vivre une sorte de veillée d’arme ontologique dans laquelle se jouait virtuellement le sort de l’humanité et celui du monde. L’attente et la disposition inquiète qui la définit ont alors le pouvoir de révéler des contradictions à proprement parler tragiques : pour les protagonistes de ce drame, ce qui s’annonce est indistinctement un acte de destruction incommensurable et, comme il est dit dès la première scène de l’opéra, une tentative de « sauver la civilisation » (il faut faire vite, les nazis sont peut-être sur le point de concevoir une arme équivalente, la guerre qui n’en finit pas continue de supprimer un nombre terrifiant de vies humaines). Sur le modèle de cette déconcertante ambivalence, tout devient tragiquement interchangeable, les valeurs positives (les compétences scientifiques et techniques, l’idée d’un monde pacifié, la tendresse de l’intimité, le rappel d’un sens de l’existence riche d’une multiplicité infinie d’expressions) et les valeurs négatives (la dévastation de la nature, l’écrasement des hommes, le meurtre de civils qui, innocents, ont le malheur d’être nés dans un pays devenu ennemi, et jusqu’à la négation potentielle de l’humanité). Cette indistinction ou convertibilité générale donne la tonalité et assure l’impression de suspens de l’ensemble, même si nous savons dès le commencement de l’œuvre en quoi consistera sa fin, comme si l’imminence avait tout envahi. C’est pourquoi sans doute le livret, mais aussi la musique, peuvent sembler parfois placer à un même niveau tous les enjeux, nombreux, qui se trouvent successivement ou simultanément évoqués : enjeux techniques et scientifiques, médicaux et psychologiques, militaires et stratégiques, politiques et sociaux, éthiques, métaphysiques, religieux.
Dans le vide que creuse le temps suspendu de l’expectative, on passe sans transition des préoccupations les plus immédiates (les conditions météorologiques, la fiabilité des calculs, la nécessité de respecter le calendrier prescrit par les autorités politiques et militaires) aux interrogations les plus profondes (que représente encore la vie humaine ? à quoi, devant l’ineffable, tenons-nous encore vraiment ? Pourrions-nous habiter un monde devenu muet ? Quel sens sommes-nous encore capables de transmettre à nos enfants ?), comme si l’attente avait pris le pas sur le temps lui-même, comme si toute réalité temporelle, même la plus apparemment constante, était maintenant marquée du signe de l’imminence. Le personnage d’Oppenheimer, tel que John Adams et Peter Sellars le campent, se trouve au centre de ces interférences. C’est lui qui assure le passage incessant entre le plan des préoccupations rationnelles et techniques et celui des questionnements existentiels et ontologiques. Par sa compétence et son efficacité d’un côté, par son humanité et la profondeur et pureté de sa conscience de l’autre, il participe à la fois de l’un et l’autre niveau. C’est lui aussi qui fait transiter la pensée et le sens, de la perception masculine des scientifiques et des militaires qui renvoient toute chose à l’impératif de la réussite finale de l’essai, vers un univers féminin dans lequel, comme l’expriment les deux personnages de femmes, Kitty, l’épouse d’Oppenheimer et Pasqualita, la nurse de leurs enfants, importent surtout les conditions maintenues de la vie et de sa transmission, la vérité des relations entre humains et l’authenticité de leur habitation commune du monde. Robert Oppenheimer n’était certainement pas un Faust américain. En répondant positivement à la proposition de l’Opéra de San Francisco d’en faire le personnage principal d’un opéra, John Adams et Peter Sellars sont plutôt parvenus à évoquer l’invention qui fonda rationnellement la perspective d’une destruction totale du monde à travers le regard et l’humanité déchirée de celui qui, souvent réduit à l’appellation bien troublante de « père de la bombe atomique », s’impose ici par l’intégrité et la fragilité de son âme. C’est cela peut-être qui confère à Doctor Atomic son intérêt et sa force d’émotions, comme si nous mesurions là l’intrigante distance, simultanément abolie et à nouveau exposée, qui sépare et réunit la finitude de l’homme et les conséquences infinies de ses réalisations. 1. John Adams, Hallelujah Junction. Composing an American life, Ferrar, Straus and Giroux, New York, 2008. Le chapitre 13, intitulé « A swirl of atoms » (p. 268-293), se rapporte à la composition de Doctor Atomic.
Daniel Payot
est professeur à lʼUniversité de Strasbourg.
opéra strasbourg
ve 13, ma 17, je 19, sa 21 juin 20 h di 15 juin 17 h
de grenouille
di 29 juin 17 h ma 1er juillet 20 h
rencontre avec Christophe Rousset et Mariame Clément animée par Marc Clémeur je 12 juin 18 h 30 • entrée libre
platée un amour
la sinne mulhouse
Une œuvre éblouissante, un plateau magique réunissant les solistes, le Ballet et les Chœurs de l’OnR, les Talens Lyriques au sommet : tous les ingrédients sont réunis pour célébrer avec faste l’année Rameau
Ballet bouffon (comédie lyrique) en trois actes et un prologue de Jean-Philippe Rameau Livret dʼAdrien-Joseph Le Vallois dʼOrville Direction musicale
Christophe Rousset Mise en scène
Mariame Clément
Un mariage presque parfait…
Décors et costumes
Las de la jalousie de son épouse Junon, Jupiter s’amuse… en mettant en scène un faux mariage. La mariée ? Platée, une grenouille aussi prétentieuse que repoussante. Gonflée d’orgueil, la nymphe des marais ne doute pas un instant de ses charmes et se rêve déjà première dame. La fête est parfaite, à peine si Platée s’étonne de l’absence d’Hymen et de l’Amour. Le simulacre de mariage est interrompu à point nommé par l’entrée fracassante de Junon qui découvre, hilare, les traits de la promise. Réconciliés, les dieux regagnent leur céleste demeure. Quant à notre grenouille, moquée, bafouée, elle n’a d’autre issue que de regagner bien vite le fond de sa mare. Faire d’une vilaine grenouille l’héroïne d’une pièce donnée pour le mariage, en 1745, du Dauphin et de l’Infante d’Espagne, que l’on disait peu avantagée par la nature, le pari était osé. Véritable météorite dans l’œuvre de Rameau, Platée s’inscrit en totale rupture avec les très sérieux Hippolyte et Aricie, Castor et Pollux ou Dardanus, purs exemples de tragédie lyrique, genre avec lequel Rameau renouera par la suite. Dans cet opéra-ballet hors normes, qu’il se plaisait à qualifier de ballet bouffon, Rameau se rit des codes du genre : répétitions syllabiques, vocalises inattendues,
accents inversés… font basculer la musique du sérieux au comique populaire. « On reconnaît certes parfaitement le style du compositeur, mais le ton est neuf. Rameau s’y montre tour à tour piquant, comique, spirituel 1 ». Les chœurs des grenouilles croissantes, l’arrivée de la pluie, les transformations de Jupiter, la colère de Junon laissent éclater l’inventivité du compositeur alors âgé de 50 ans, et qui semble rajeunir à mesure qu’il compose.
Lumières
Des dieux au top
Thespis
Les dieux selon Mariame Clément incarnent « ce (faux) âge d’or optimiste du "tout est possible", cette époque bénie où l’idée de libération par la consommation n’a pas encore été remise en cause. […] Junon, c’est une femme au sourire impeccable, qui règne sur le monde comme dans son intérieur. » Pour Platée, c’est le symbole absolu de réussite sociale, enfin accessible : « si je fais tout comme il faut, se dit-elle, si je possède le même robot électroménager, la même cold-cream et le même bustier pointu que Junon… alors moi aussi je peux être la femme de Jupiter ! 2 »
Momus
Julia Hansen
1. Entretien avec Christophe Rousset, programme de salle de l’OnR, 2010 2. Entretien avec Mariame Clément, Croisements n°2, 2010
Reinhard Traub Chorégraphie
Joshua Monten
Dramaturgie
Clément Hervieu-Léger PROLOGUE Thalie
Ana-Camelia Stefanescu Cyril Auvity Thomas Dolié La Folie
Ana-Camelia Stefanescu L’Amour
Hanne Roos Mercure
Cyril Auvity Cithéron
Thomas Dolié Clarine
Hanne Roos Platée
Emiliano Gonzalez Toro Jupiter
Andrew Schroeder
photo alain kaiser
vous avez dit talens ? Ils sont les grands ambassadeurs de la musique baroque. Portés par le claveciniste Christophe Rousset, fondateur de l’ensemble en 1991, les Talens Lyriques transmettent leur passion pour l’opéra et la redécouverte du patrimoine musical européen, sur les plus grandes scènes. Cette saison, l’ensemble continue de partager son activité entre productions scéniques : LʼOrfeo de Monteverdi à l’Opéra national de Lorraine, Alcina à lʼOpéra national de Paris, Les Indes galantes à lʼOpéra national de Bordeaux, Le Messie au Theater an der Wien, et concerts : Opéra royal de Versailles (Amadis de Lully, Les Danaïdes de Salieri), Festivals de Beaune et dʼAmbronay, Salle Pleyel, Arsenal de Metz, Opéra de Dijon, Grand Théâtre de Provence, Dortmund/Klangvokal, Concertgebouw de Bruges, Wigmore Hall et Barbican Centre de Londres, Philharmonie dʼEssen, Festival d’Edimbourg, Graz, etc. La discographie de l’ensemble comprend une quarantaine de succès, enregistrés, entre autres, chez Erato, Decca, Naïve et Virgin Classics. >> Journée spéciale Rameau, sa 14 juin de 8 h à 18 h sur Radio Accent 4
Junon
Isabelle Druet Un satyre
Frédéric Caton Chœurs et Ballet de l’OnR Orchestre Les Talens Lyriques Société Rameau Paris représentée par Alkor-Editions Kassel
production de l’opéra national du rhin
platée
inoubliable nymphe des marais Florilège des moments forts d’une production qui a marqué les esprits à sa création en 2010 à l’OnR. à découvrir absolument ou à revoir en famille, sans modération.
Chapeau à l’Opéra national du Rhin de s’être jeté à l’eau. Interprétation de tout premier ordre du rôle-titre par le jeune Emiliano Gonzalez Toro. christian merlin
À Strasbourg, Platée devient une comédie déjantée qui, transposée au milieu du XXe siècle, a un parfum d’ironie. Et pourtant, derrière les masques de clowns se cachent des sentiments qu’on prend au sérieux. Albrecht Thiemann
Un spectacle enthousiasmant, jubilatoire, euphorisant et musicalement superbe. Un Platée anthologique d’Emiliano Gonzalez Toro dont la performance est absolument exceptionnelle. Pierre-Emmanuel Lephay 14 • Croisements • Platée
Mariame Clément a signé une mise en scène drôle, remplie de trouvailles désopilantes. Thérèse Jauffret
Une vision totalement renouvelée et triomphalement accueillie par le public. Michel Thomé
Rousset dirige le tout avec compétence, magnifiant chaque passage orchestral. Nicolas Blanmont
Christophe Rousset et ses Talens lyriques, d’une éloquence et d’une beauté sonore qui se nourrissent l’une l’autre. Christian Fruchart
La veine parodique de Joshua Monten est tout bonnement prodigieuse tout comme les danseurs du Ballet de l’OnR. Jacques Doucelin
On ne s’ennuie pas une seule minute dans ce Platée. La légèreté teintée d’humour, dès le début, ne vous quitte plus jusqu’à la fin du spectacle. Georg Rudiger
platée, onr, saison 2009-2010 : photos alain kaiser
Les mises en scène de Mariame Clément ont beau se succéder sans se ressembler, son obsession de la pertinence imprime sa griffe jusqu’au moindre détail. Écartant toute référence mythologique, elle propulse Platée dans le tourbillon consumériste des Trente glorieuses, dont le foisonnement se révèle proprement baroque. Mehdi Mahdavi
À la tête des Talens lyriques, Christophe Rousset célèbre Rameau avec bonne humeur, la vitalité sonore de ses musiciens conférant à la partition une allure de danse perpétuelle, au point que l’auditeur ne tarde pas à sentir des fourmis dans ses jambes. Michel Parouty
Habile, rythmée, la mise en scène de Mariame Clément ne détourne jamais la musique de Rameau de son livret et profite de la chorégraphie malicieuse de Joshua Monten. Philippe Venturini
Avec Christophe Rousset et ses formidables Talens lyriques, la précision est aussi de mise dans la fosse d’orchestre. Jörg Florian Fuchs
Il n’est pas d’opéra sans magie, ainsi pourrait-on définir en substance le triomphe de la musique dans le marécage. dirck schümer
Platée • Croisements • 15
nouvelles productions
la colombe le pauvre matelot Un décor numérique pour une mise en scène cinématographique
L’amour sur un plateau Trop pauvre pour offrir un dîner décent à la jeune fille qu’il aime, Horace n’a plus d’autre recours que de faire cuire la colombe qu’il a élevée avec tant de soins, une belle colombe que la jeune fille aurait bien envie qu’Horace lui offre… Créée pour un public de bourgeois et d’aristocrates qui venaient prendre les eaux en été, La Colombe séduit par son sujet frais et léger, un livret tissé sur la fable de Boccace et La Fontaine, édulcorée par les librettistes Barbier et Carré. Présentée le 3 août 1860 au Salon Louis XIV du Casino de Bade, elle connaît un vif succès puis remporte la même adhésion du public parisien en 1866. Cet opéra, que Stravinsky lui-même qualifiera plus tard de « court mais délicieux », semble heureusement sortir de l’oubli dans lequel il était tombé pendant des décennies.
Après ce délicieux quiproquo, un autre plus dramatique se fait jour dans Le Pauvre Matelot. Trop longtemps absent, le matelot est désormais considéré comme mort. Seule son épouse refuse de s’y résoudre et repousse indéfiniment l’idée de se remarier. Or quand son matelot de mari revient, elle ne le reconnaît pas et le tue pour lui voler les richesses qu’il a accumulées durant ses voyages – un argent qui lui sera bien utile lorsque son époux rentrera, pense-t-elle ! « Le Pauvre Matelot a la beauté brute d’une tragédie sans appel, un scénario taillé à la serpe, un fait divers sans cause décelable. Le texte de Cocteau n’use d’aucun artifice. Il plante un décor rudimentaire et exige que les âmes soient simples. La rudesse est provoquante, il n’est pas la peine d’en rajouter. L’amour y est inconditionnel, sans concession 1. » Le retour d’un disparu assassiné par ceux qu’il voulait surprendre : Jean Cocteau aurait trouvé le sujet du Pauvre Matelot dans un journal. Complainte en trois actes, la partition de Milhaud adopte le style de la chanson populaire qui, avant l’avènement de la presse à sensation, servait à colporter les faits divers souvent les plus atroces. L’opéra ne rencontre pas le succès escompté à sa création le 16 décembre 1927, il s’imposera ensuite dans une version réduite pour tourner dans le même programme que L’Histoire du soldat de Stravinsky. 1. Note d’intention de Stéphane Vérité, programme de salle
maquette de décor pour la colombe : Conception S.Vérité / R.Sosso - Production images Explore Studio - R.Sosso
Quand l’amour tourne au drame
théâtre colmar
ve 4 avril 20 h di 6 avril 15 h
la sinne mulhouse
ma 6, sa 10 mai 20 h
opéra strasbourg
ma 1er, je 3 juillet 20 h
athénée
théâtre louis-jouvet
paris
me 11, ve 13 juin 20 h sa 14 juin 20 h di 15 juin 16 h
Direction musicale
Claude Schnitzler
Mise en scène, décors, lumières, conception des images numériques
Stéphane Vérité costumes
Hervé Poeydomenge conception des images numériques
Romain Sosso
la colombe Opéra comique en deux actes de Charles Gounod Livret de Jules Barbier et Michel Carré sylvie
Gaëlle Alix horace
Jean-Christophe Born maître jean
Sévag Tachdjian
l’ami Le Pauvre Matelot
mazet
la femme Le Pauvre Matelot
Lamia Beuque
le beau-père Le Pauvre Matelot
le pauvre matelot Complainte en trois actes de Darius Milhaud Paroles de Jean Cocteau le matelot
Sunggoo Lee sa femme
Kristina Bitenc son ami
David Oller son beau-père
Fernand Bernadi
Orchestre philharmonique de Strasbourg Orchestre Lamoureux (Paris) Édition Heugel et Cie
maquettes de costumes de hervé poeydomenge
Le Pauvre Matelot : avec l’aimable autorisation de M. Pierre Bergé, président du Comité Jean Cocteau
sylvie La Colombe
Mazet La Colombe horace La Colombe
Maître jean La Colombe
productions de l’Opéra studio
Du cinéma sur le plateau
Des passerelles peuvent se faire entre les deux opéras, mais le but du metteur en scène Stéphane Vérité n’était pas de les lier, plutôt de jouer de la différence pour que l’un soit le miroir de l’autre. Certes les deux ouvrages parlent d’amour et de désir – dans Le but du metteur en scène La Colombe, un homme Stéphane Vérité n’était pas attend une femme, de les lier, plutôt de jouer dans Le Pauvre Matelot, c’est l’inverse –, de la différence pour que ce sont pourtant deux l’un soit le miroir de l’autre. univers extrêmement distincts, radicalement opposés. « Les contours de chacun laissent en creux la place de l’autre. La frivolité chez l’un est fidélité absolue chez l’autre, le sacrifice symbolique de l’oiseau répond au meurtre sacrificiel du mari, aux vocalises et circonvolutions mélodiques chez Charles Gounod, répond la ligne directe, tranchante, aux accents populaires, de la musique de Darius Milhaud 2. » L’époque de leur création les rend foncièrement différents car entre les deux beaucoup de choses ont changé. Rarement jouée, La Colombe « alterne chant et texte, une histoire assez légère qui présente tout de même des moments moins lisses, des pics et des épines – on mange quand même l’oiseau à la fin. […] Le challenge pour moi [Stéphane Vérité] est de redonner un sens à La Colombe, de faire saillir son côté épineux et les zones d’ombre des personnages tout en gardant une certaine légèreté 3. » Violente et dure quant à elle, la pièce de Milhaud, inspirée de chansons des années vingt, est assez curieuse. Pour Stéphane Vérité, qui connaît bien l’univers de Cocteau, « Le Pauvre Matelot est extrêmement bien écrit. C’est une lame de rasoir. La partition de Darius Milhaud n’est pas facile à mettre en scène, mais l’histoire est proche de la perfection, c’est un trait, une ligne simple mais redoutablement efficace 4 ».
Être, tout simplement « Je leur demande [aux chanteurs] d’être détendus et d’être totalement impliqués dans ce qu’ils jouent. D’être tout simplement. […] Concrètement, cela passe par des exercices de respiration avec les chanteurs pour les décontracter. Tous les matins nous consacrons cinquante minutes à ce travail de préparation 6. » Depuis de nombreuses années, Stéphane Vérité développe un travail organique avec les chanteurs basé sur le corps et la respiration. Assez peu pratiquée, sa méthode bouleverse les codes, les habitudes mais donne d’excellents résultats tant sur la voix et sa maîtrise qu’en termes d’écoute de soi et de l’autre, de concentration, de lien avec le groupe, d’implication. Permettre aux chanteurs de prendre connaissance de leur corps les rend plus disponibles, plus présents. C’est aussi une manière de se découvrir autrement, de former une équipe tout en évitant les conflits, de parler un langage qui permet au travail scénique d’avancer beaucoup plus vite. 2. Note d’intention de Stéphane Vérité, programme de salle 3 à 6. Entretien de Stéphane Vérité par Frédéric Aron dans le programme de salle, « L’organique et le pixel »
18 • Croisements • La Colombe / Le Pauvre Matelot
photo nis&for
Condensés d’humanité
Une des particularités du travail de Stéphane Vérité est le recours à la technique du décor numérique, pour des mises en scène et scénographies toujours très influencées par le Des images avec une qualité cinéma. Le processus redoutable, au réalisme de diffusion des images permet de créer une magie poussé jusqu’au détail infime. totale car on ne sait pas Mais au départ rien n’existe. d’où elles viennent. « Des Nous ne filmons rien, tout est images avec une qualité créé en pixels. redoutable, au réalisme poussé jusqu’au détail infime. Mais au départ rien n’existe. Nous ne filmons rien, tout est créé en pixels. […] Je considère que mon travail s’inscrit dans la continuité de l’histoire de l’opéra avec ses décors peints et ses mondes recréés, éclairés d’abord par des bougies puis par des projecteurs, avec des apparitions, des vols, en jouant sur la sensation, l’organique, l’intervention du corps… C’est à la fois le prolongement d’une histoire et l’ouverture vers de nouveaux mondes, notamment vers le cinéma. Le décor numérique amène du cinéma sur le plateau, au sens propre du terme 5. »
le pauvre matelot
le « poète-orchestre » par Yves-Michel Ergal Le samedi 21 février 1920, règne à la Comédie des ChampsÉlysées, à Paris, une effervescence qui à elle seule résume l’extraordinaire et unique vitalité artistique de ces « années folles » : on y donne la première représentation générale du Bœuf sur le toit. Comment définir l’œuvre, aujourd’hui sans doute, ne serait-ce que par le titre, la plus connue de la fructueuse collaboration du poètedramaturge Jean Cocteau et du musicien Darius Milhaud ? Une simple « farce imaginée et réglée par l’auteur », comme l’indique Cocteau lui-même ? Ou encore « un mime », un « cinémasymphonie », ou même un « poème cinématographique », à la manière du poète Philippe Soupault ? Un orchestre de vingt-cinq musiciens, dirigé par Wladimir Golschmann, accompagne cette histoire surréaliste, jouée par un trio de clowns célèbres, les Fratellini, et par le nain Boda, du cirque Medrano. Pour certains journalistes, il s’agit d’un simple divertissement bien agencé, pour d’autres, le spectacle annonce un esprit nouveau, un « cubisme dramatique ». L’œuvre traverse la Manche quelques mois plus tard, pour être représentée au Coliseum de Londres, le 12 juillet 1920. Cocteau, en véritable homme-orchestre, inspirateur et même producteur du spectacle, à la fois seul chorégraphe et auteur de l’argument, a su réunir, autour de sa « farce » inspirée du cinéma américain, imprégnée de musique populaire du carnaval de Rio, entre tango et samba, les artistes les plus prometteurs de l’époque : les décors et cartonnages étaient dus à Raoul Dufy, les costumes à Guy-Pierre Fauconnet. Notons qu’un bar du même nom s’ouvre le 10 janvier 1922, à l’ombre de l’église de la Madeleine, rue Royale, où se réunit bientôt, selon Cocteau lui-même, « tout ce qui bouillonnait dans tous les domaines ». Cocteau était
Yves-Michel Ergal, spécialiste de littérature générale et comparée, est maître de conférences à l’Université de Strasbourg. Auteur d’un essai sur Proust et Joyce, il a également édité, de Marcel Proust, la préface, traduction et notes à La Bible d’Amiens, de John Ruskin, aux éditions Bartillat (2007), ainsi quʼune biographie de Proust aux éditions SEM (2009). Il vient de faire paraître un essai sur le roman, Lʼécriture de lʼinnommable, aux éditions Champion (2014).
parvenu à réaliser, avec ce Bœuf sur le toit, son rêve d’une sorte de « transposition intellectuelle du ballet, du cirque et du music-hall réunis ». Milhaud, que Cocteau rencontre en 1919, musicien déjà confirmé, avait lui-même suggéré le titre de l’œuvre à Cocteau, au retour d’un séjour au Brésil, avant guerre, où il fut un temps secrétaire d’ambassade de Paul Claudel, alors nommé à Rio. À dix-huit ans, Jean Cocteau écrit ses premiers vers, où la poésie lui apparaît « comme une fée où m’invitaient les muses ». En 1908, paraît au Mercure de France son premier recueil de poèmes, La Lampe d’Aladin : « J’ai erré dans la vie sombre avec la lampe merveilleuse. […] Et, le cœur chargé d’illusions, j’ai pleuré devant la difficulté de les apporter à la lumière pour les offrir au monde incrédule. » Ces quelques mots, « pour expliquer le titre », comme il le précise en tête du recueil dédié à sa mère, ne résument-ils pas déjà le projet de ce dandy en qui Proust prédisait une « vie différente de celle des autres hommes » ? En villégiature avec le jeune romancier Raymond Radiguet, en août 1922, dans le Var, non loin de Saint-Tropez, Cocteau écrit une quarantaine de poèmes, qui seront réunis dans le recueil Plain-chant, publié aux éditions Gallimard en 1925. Sans que l’œuvre poétique de Cocteau soit directement placée sous le signe de la musique, de nombreux ouvrages l’évoquent cependant : Les Vocalises (1913), Opéra (1927), Appogiatures (1953) ou encore Le Requiem (1962). Un poème de Plain-chant retient l’attention, qui s’ouvre par ces deux vers : « Auric, Milhaud, Poulenc, Tailleferre, Honegger / J’ai mis votre bouquet dans l’eau du même vase. » Cocteau rappelle ici le rôle primordial qu’il a joué dans la création du célèbre « groupe des Six » : aux cinq musiciens convoqués, Cocteau s’ajoute lui-même, véritable chef d’orchestre de ce sextuor d’avant-garde, faisant écho au « groupe des Cinq » qui avait métamorphosé la musique russe (Moussorgski, Rimsky-Korsakov, Balakirev, Borodine, Cui). C’est dans ce cadre que Le Bœuf sur le toit est créé, puis, qu’un an plus tard, Les Mariés de la tour Eiffel sont représentés, le 18 juin 1921, au Théâtre des Champs-Élysées, par la compagnie des Ballets suédois, sur une musique de Germaine Tailleferre, Georges Auric, Arthur Honegger, Darius Milhaud et Francis Poulenc. Dans la même salle, trois ans plus tard, en 1924, les Ballets russes offrent cette fois-ci une « opérette », Le Train bleu, née de la collaboration de Cocteau et de Milhaud, sur une chorégraphie de la sœur de Nijinski, La Nijinska. Ce ne sera qu’en 1927 que Cocteau monte son autre collaboration avec Darius Milhaud, Le Pauvre Matelot, « complainte » qu’il a pourtant conçue dès l’été 1922. La même année est joué Œdipus Rex, sur un texte en latin, fruit d’un travail avec Stravinski,
illustration anne-sophie tschiegg
avec qui Cocteau s’est réconcilié, après lui avoir reproché, dans Le Coq et l’Arlequin, « notes autour de la musique », publié en 1919, d’être trop proche de Debussy, ce dernier s’étant luimême placé sous l’influence d’un Wagner soudain déconsidéré. Dans ces années d’après-guerre, Cocteau est sacré le « poèteorchestre », selon la formule de Louis Aragon, et, entouré de ses cinq musiciens, en particulier de Darius Milhaud, il est au cœur de l’introduction du jazz à Paris, à la faveur de ces samedis où le fameux « groupe des Six », réuni au Bœuf sur le toit, improvise, accompagné de musiciens noirs, des rythmes endiablés qui font fureur. Cocteau tape sur la grosse caisse, tient la rubrique jazz de la revue L’Intransigeant, on le surnomme le « bluff sur le moi », l’on parle d’un « cocktail, des cocteaux ». L’expression aujourd’hui de « faire un bœuf », improvisation spontanée et joyeuse de musiciens, tire même son nom du célèbre cabaret. Cocteau est aussi galvanisé par l’immense succès que rencontre le roman Le Diable au corps, de sa jeune recrue Raymond Radiguet, paru chez Gallimard au printemps 1923. Sans Cocteau, Radiguet n’aurait sans doute jamais eu le cœur à l’ouvrage. Les deux amis avaient profité des beaux étés au bord du lac d’Arcachon pour écrire, travailler, prendre des bains de soleil, autre mode instaurée par le poète. Les fabuleux bals costumés des Beaumont inspirent à Radiguet cet autre roman, Le Bal du comte d’Orgel. Le conte de fées s’interrompt toutefois brutalement : le 12 décembre 1923, âgé d’à peine vingt ans, Radiguet, succombant à la fièvre typhoïde, rejoint pour toujours ces étoiles immortalisées dans les dessins de Cocteau. Ce dernier, devenu, à la faveur de cet humour parisien parfois cruel, le « veuf sur le toit », portera toujours le deuil du jeune ami trop tôt disparu. Entre séances d’opium et vraie-fausse conversion sous l’influence du philosophe chrétien Jacques Maritain, Cocteau continue, sans relâche, de créer, souvent dans la souffrance. C’est à l’été 1926 qu’il rencontre la figure mythique, venue de la Grèce antique, qu’il renouvelle au point d’en faire son alter ego : Orphée. Cocteau découvre le cinéma : il façonne, en vrai Pygmalion, le comédien et l’ami, Jean Marais, pour
qui il écrit, en huit jours, Les Parents terribles, pièce qui sera suivie de nombreux succès. La mise en musique par Poulenc de La Voix humaine, en 1958, est en ce sens exemplaire. Deux ans plus tard, en 1960, Cocteau réalise l’onirique Testament d’Orphée, où, poète assassiné et renaissant de ses cendres, il tient le rôle principal. En partie retiré dans le calme de sa maison de Milly-la-Forêt, il continue de peindre, aux côtés de son compagnon des dernières années, son ancien jardinier devenu son fils adoptif, Édouard Dermit. Les deux amis reposent aujourd’hui dans la chapelle voisine, aux murs décorés par le « poèteorchestre », après que Cocteau a rejoint lui aussi le ciel bleu étoilé de ses rêves éveillés, le 11 octobre 1963. Cocteau meurt le même jour que son amie Édith Piaf, pour qui il avait écrit, en 1940, Le Bel Indifférent, thème de la femme amoureuse qui attend son amant, variation sur le monologue de La Voix humaine. Car si Cocteau a appartenu à l’aventure moderniste des Ballets russes, s’il a collaboré avec les plus grands musiciens français de son temps, de Darius Milhaud à Poulenc, s’il a fait connaître au public le jazz, bien avant les années soixante de Saint-Germain-des-Prés, il a également aimé le « musichall » et la chanson française, il a écrit pour les gloires de l’époque, Marianne Oswald et Suzy Solidor, avant de donner des textes à Édith Piaf, à Jean Marais. La « complainte » du Pauvre Matelot, sur la musique de Darius Milhaud, n’est-elle pas emblématique du Cocteau poète et musicien ? La femme qui assassine son mari, matelot au long cours qui revient, plein de richesses, méconnaissable après tant d’années d’errance, participe à la fois de l’histoire poignante de ce bouffon du roi qui tue sa fille adorée, pièce de Victor Hugo reprise par Verdi dans son opéra Rigoletto, et du music-hall : « Mes sœurs, n’aimez pas les marins », a chanté plus tard Marianne Oswald, popularisant cette autre « chanson-complainte » écrite par Cocteau, « on nʼaime en eux que des fantômes ».
Qui êtes-vous Jean Cocteau ?
N’êtes-vous pas passé derrière le miroir de ces années folles, vous le poète-musicien, vous le dessinateur-poète de génie, à la faveur de multiples pirouettes vertigineuses ? Un autoportrait de vous dessine, avec cette légèreté n’appartenant qu’à vous, le contour d’un visage sans traits, un visage sans visage, comme une simple note de musique, ou un pas de danse, qui vous résume. Le Pauvre Matelot • Croisements • 21
die schöpfung osons la création Dans une chorégraphie audacieuse mêlant vocabulaire classique et influences contemporaines, Uwe Scholz redonne vie au monument musical de Haydn et au mythe fondateur dont il est porteur. Il fait émerger de la partition deux figures nouvelles de l’homme et de la femme, symboles d’espoir né de l’amour.
Un texte fondateur « Au commencement Dieu créa les cieux et la terre. La terre était déserte et vide. Il y avait des ténèbres au-dessus de l’Abîme et l’esprit de Dieu planait audessus des eaux. Dieu dit : « Que la lumière soit » et la lumière fut. Dieu vit que la lumière était bonne et Dieu sépara la lumière des ténèbres. Dieu appela la lumière Jour et il appela les ténèbres Nuit. Il y eut un soir, il y eut un matin : premier jour. » Genèse, chapitre 1-2
Le livret de La Création de Haydn se construit autour d’un des textes les plus lus et commentés de l’humanité, celui qui ouvre la Torah juive et la Bible chrétienne. Monument religieux et littéraire dont il est difficile de mesurer l’impact sur la civilisation occidentale dans des domaines aussi divers que la cosmologie, la philosophie, l’anthropologie, la science ou l’art. Mais ne nous y trompons pas, Haydn avec sa musique tout autant que Gottfried van Swieten pour l’écriture du livret prennent leurs aises avec les saintes écritures. Entre leurs mains, outre l’utilisation de l’allemand en lieu et place du latin, le mythe biblique connaît une profonde réinterprétation fortement imprégnée du positivisme du siècle des Lumières et du dandysme naissant des aristocraties européennes. Fi du « péché originel » ou de « la chute » si chers à la tradition catholique : Haydn et van Swieten se veulent résolument optimistes et humanistes. Voyons plutôt : une fois la création des animaux achevée, « il manque encore la créature qui rendra grâce à l’œuvre de Dieu… », la proclamation d’une humanité à l’image de Dieu « vêtu de noblesse et de dignité, doué de beauté, de force et de courage, érigé vers le ciel, l’Homme (der Mensch) se dresse – un homme (ein Mann!) et roi de la nature. Son large front annonce son sens profond de la sagesse, et dans son regard clair brille l’esprit, le souffle et l’image du Créateur ». Ecce homo – et quel homme ! 22 • Croisements • Die Schöpfung (La Création)
la filature mulhouse
ve 28, sa 29 mars 20 h di 30 mars 15 h
danse à l’université UHA, Gymnase universitaire je 13 mars 18 h 30 entrée libre
opéra strasbourg
je 3, lu 7, ma 8, me 9 avril 20 h sa 5 avril 15 h* di 6 avril 15 h
théâtre colmar
sa 26 avril 20 h* di 27 avril 15 h* * Représentations données avec une musique enregistrée.
US, Le Portique ma 18 mars 18 h 30 entrée libre
répétition publique La Filature ma 25 mars 18 h 30 entrée libre
photo klara beck
La légende d’un siècle La Création de Haydn a fait couler beaucoup d’encre, parfois trop. Correspondances, mémoires, souvenirs, biographies… On ne compte plus les écrits aux témoignages aussi séduisants qu’invérifiables. Pas étonnant pour une œuvre qui, en quelques mois, dans un continent déchiré par la guerre, a fait vibrer l’Autriche catholique, l’Allemagne protestante, l’Angleterre et la France de Bonaparte. Véritable choc esthétique, « phénomène sans précédent, si l’on en croit Marc Vignal, qui pourrait être considéré comme le premier grand événement de la culture du XIXe siècle musical ». Le mythe voudrait que La Création soit la première grande œuvre de la musique écrite en pensant à la postérité : « Je voudrais bien écrire quelque chose qui fasse durer mon nom dans le monde », aurait dit Haydn selon Barthélémon (violoncelliste s’attribuant les mérites de l’idée d’un oratorio s’inspirant de la Genèse), encore selon une lettre de Grove adressée à Pohl en 1878 narrant l’anecdote. On peut aussi lire que ce serait un certain imprésario londonien du nom de Salomon qui aurait proposé le sujet de la création en précisant qu’Haendel l’avait déjà refusé. La perspective de défier le génie musical de l’Angleterre aurait fini de convaincre Haydn. Conjectures ou vérités, il reste que l’œuvre et son auteur ont fasciné toute une époque. À commencer par les 60 premières mesures Largo, chaos introductif qualifié de « couronne sur un front divin » par Carl Friedrich Zelter. Suivent ensuite les trois parties de l’oratorio consacrées successivement à la création des éléments, des êtres vivants avec pour point culminant celle de l’homme, et enfin le bonheur initial du paradis. Les trois archanges Gabriel (soprano), Uriel (ténor) et Raphaël (basse) se partagent le récit et contribuent à l’efficacité rare de la dramaturgie. Une expérience foudroyante à en croire les contemporains : « À l’instant précis où pour la première fois cette Lumière éclata, tout se passa comme si ses rayons étaient lancés des yeux brûlants de l’artiste. La réaction des Viennois, électrisés, fut telle que pendant quelques minutes l’orchestre ne put continuer », selon les souvenirs dʼun contemporain de Haydn.
chorégraphie, décors, costumes
Uwe Scholz Musique
Joseph Haydn direction musicale
Vincent Monteil
projections scénographiques
Francesco Clemente cycle « CVIII Watercolours Adayer »*
Lumières
Michael Roeger Choréologue
Tatjana Thierbach soprano
Hanne Roos ténor
Mark Van Arsdale basse
Norman Patzke Ballet de l’OnR Chœurs de l’OnR La Follia,Orchestre de chambre d’Alsace direction artistique
Hugues Borsarello * Collection du Kunstmuseum Basel / Kupferstich Kabinett Basel
créé au ballet de zurich
Croisements • 23
genesis >
Une soirée inédite : carte blanche à 8 danseurs de la compagnie. Découvrez leurs créations à Mulhouse avec Genesis Studio et à Strasbourg avec Genesis. Nos jeunes talents vous livrent leurs secrets en avant-première...
Votre création en quelques mots ? Et si l’on oubliait le superficiel pour aller à l’essentiel ?
>
En un mot ? Connections.
Eurêka Fukuoka
Un titre ? Un univers ? Je n’ai pas encore choisi, les danseurs pourraient être les passagers d’un tram ou pourraient attendre un train à la gare… je cherche une situation qui se prête à l’ironie.
Italian connection
Une inspiration ? La vie et les gens de tous les jours… les danseurs aussi… Nous sommes des comédiens ! Est-ce la première fois que vous réalisez une chorégraphie ? Oui ! J’ai toujours voulu le faire
mais je n’avais jamais pris le temps de concrétiser mes idées.
> Votre création en quelques mots ? C’est une pièce comique pour un danseur et un pianiste. En un mot ? Humour. Une ambiance ? Une ambiance très romantique. J’ai deux scènes en tête. D’un côté, un écrivain qui crée un roman sur son amour impossible. De l’autre, un pianiste qui joue dans un bar.
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Une inspiration ? La musique est ma première source d’inspiration. Je voulais utiliser la musique de Chopin, d’où le thème du romantisme. Comment travaillez-vous avec les danseurs ? Comment les avez-vous choisis ? C’est assez difficile
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Miao Zong Talent comique
Votre création en quelques mots ? La force que nous donnent les blessures de la vie. En un mot ? Le lien. Une image ? Une photo : au conservatoire, une petite fille en demi-pointe appuyée sur la barre fascinée
par un cours de danse. Ma petite sœur handicapée. Je voulais aborder cette histoire très personnelle avec un duo de filles parce qu’on n’en voit pas assez et que je cherche une complicité intense. Vera Kvarcakova et Sarah Hochster sont deux danseuses que j’estime. J’ai besoin de leur humilité pour montrer la générosité, le courage que m’a transmis ma sœur.
Femmes fortes
stéphanie madec-van hoorde
au départ, il faut trouver le fil à tirer. J’ai tout de suite pensé à Alexandre Van Hoorde et Renjie Ma parce qu’ils ont cette fibre comique que je cherche.
Votre processus de création ? Je ne peux pas avancer sans musique. D’abord je l’écoute, je prends
des notes, puis je travaille seule en studio. Ensuite on crée ensemble avec les danseuses, elles me donnent énormément.
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Votre création en quelques mots ? Une exploration de l’imperfection à laquelle on est sans cesse
confronté en tant qu’homme. En un mot ? Énergie.
Un titre ? The very fabric of existence Une inspiration ? Multiples. Un sourire, une larme, une feuille… Chaque jour, j’essaie de sentir le monde avec un regard nouveau. Pour The very fabric of existence, j’ai pris comme point de départ les trois gunas de la tradition philosophique du Yoga. Ce sont les trois qualités principales dont lʼinteraction produit toutes les formes de la « création » qui émane de la nature originelle. Avez-vous déjà réalisé d’autres chorégraphies ? Oui, j’ai créé ma première pièce il y a six ans mais
c’est la première fois que je me lance dans une production avec dix danseurs !
KEVIN YEE-CHAN
Zen attitude
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genesis
centre chorégraphique mulhouse
opéra strasbourg
je 12 juin 20 h sa 14, me 18 juin 15 h & 20 h
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lu 26, ma 27, me 28 mai 19 h
Votre création en un mot ? Le réveil. Moment très personnel que l’on ne peut ni provoquer ni arrêter. Une inspiration ? Une sculpture au salon d’art contemporain à Mulhouse, l’automne dernier. Trois personnes regardant vers le ciel dans une attitude d’admiration et d’émerveillement. Une musique ? Une violoncelliste de San Francisco : Zoe Keating.
Une inspiration ? Une musique et une exposition. D’abord la musique : le solo de violoncelle de Pascal Amoyel. Ensuite est venue la découverte d’une exposition avec cette vision de tableaux suspendus avec deux faces visibles, une sombre, une éclairée. Je suis gémeaux et la binarité en moi est très présente. Comment choisit-on ses danseurs ? Je voulais deux danseurs qui se correspondent dans la dualité.
J’ai choisi Céline parce que je cherchais une danseuse souple et douce, Lateef pour sa force.
Avez-vous déjà créé d’autres pièces ? Oui, notamment Juntos, lorsque j’étais au Ballet de Hof. Ils l’ont gardée au répertoire et l’ont même tournée à Paris. J’aime le travail de chorégraphe, quand on a beaucoup dansé on accumule différentes inspirations en soi et vient un moment où l’on a besoin de les donner aux autres.
> Votre création en quelques mots ? Deux danseurs traversent l’espace scénique et le temps en faisant un lien entre la danse baroque dite « belle danse » et la danse d’aujourd’hui. Une inspiration ? La belle danse et sa première codification à la cour de Louis XIV. Une musique ? Dans la danse baroque, la musicalité est au cœur de l’expression.
J’ai choisi de fort belles pièces de violes de Marin Marais.
didier merle
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La belle danse...
yann lainé
Votre création en quelques mots ? Un solo, 7 couples, 7 garçons avec une fille tout en sensualité et sensibilité.
Sensible
Un titre ? One
photos jean-luc tanghe et nis&for
Un univers ? Le tango et le cirque. Comment décririez-vous votre travail de chorégraphe ? J’ai procédé progressivement. J’ai commencé à travailler seulement avec 2 danseurs. Puis j’ai continué avec le solo et fini par les ensembles. Avez-vous déjà chorégraphié d’autres pièces ? J’ai créé une pièce humoristique
pour le West Australian Ballet.
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Musique !
Votre création en quelques mots ? Ma pièce rassemble deux danseurs (Lateef Williams et Céline Nunigé), un homme et une femme : deux couleurs, deux histoires, deux façons de bouger, une dualité.
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Driiiiiiing
Sandra Ehrensperger
lateef williams
Comment décririez-vous votre travail de création ? C’est ma première chorégraphie, mais j’en avais envie depuis longtemps. Genesis était pour moi une occasion à ne pas manquer. Jusqu’à présent je trouve cela très épanouissant même s’il faut accepter que tout ne se mette pas en place d’un seul coup. Les tâtonnements font partie du processus. J’ai la chance de pouvoir travailler avec des danseurs exceptionnels.
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genesis studio
Récital Stéphane Degout
Opéra Strasbourg me 7 mai 20 h
baryton
Simon Lepper piano
l’art
Deux artistes français pour clore en beauté cette saison de récitals particulièrement passionnante.
stéphane degout
Une nouvelle année qui commence sous le signe du lied allemand, dès le 4 janvier avec un récital d’une jeune artiste déjà au faîte de son art.
Revoici Stéphane Degout, notre Hamlet de 2011, dans un récital mêlant styles et époques différents, accompagné au piano par Simon Lepper.
26 • Croisements • Récital
>> au programme FRANZ SCHUBERT (1797-1828) Der Zwerg
HUGO WOLF (1860-1903) Der Feuerreiter
CARL LÖWE (1796-1869) Edward
GABRIEL FAURÉ (1845-1924) Automne L’Horizon chimérique
ROBERT SCHUMANN (1810-1856) Belsatzar FRANZ LISZT (1811-1886) Die drei Zigeuner KURT WEILL (1900-1950) Die Ballade von ertrunkenen Mädchen
FRANZ LISZT Tre sonetti di Petrarca
photo Julien Benhamou
Quel chemin depuis ce jeune et pétulant Papageno que nous présentait le festival d’Aix-en-Provence il y a… plus de dix ans déjà ! Le jeune baryton lyonnais a tracé sa route depuis, gravissant rapidement toutes les marches d’une carrière brillante mais raisonnable, où les prises de rôles ne cherchent pas à brûler les étapes. Comme bon nombre des jeunes chanteurs français, il a su se garder des prestiges trompeurs de la surexposition médiatique et du marketing à tout va pour s’imposer parmi les connaisseurs comme l’un des interprètes les plus intéressants de sa génération. Pelléas miraculeux et sensible, Hamlet noble et puissant (on se souvient de sa prise de rôle ici même en 2011), il n’hésite pas à aborder des rôles fort différents, tels ces Rameau inattendus, Hippolyte et Aricie ou encore Les Indes galantes, alors qu’il venait de triompher dans Die tote Stadt de Korngold, et Wolfram dans Tannhäuser. On l’a même retrouvé la saison dernière à la Monnaie de Bruxelles pour une création, La Dispute de Benoît Mernier. Ce genre de grand écart prouve la curiosité de l’artiste, mais aussi son intelligence du chant, qu’il sait adapter aux styles, aux époques. C’est cette formidable malléabilité qui séduit dans ses interprétations de musique de chambre, qu’il s’agisse d’oratorios et de musique religieuse (bouleversant Joseph dans L’Enfance du Christ de Berlioz, pour ne rien dire de ses interventions dans le Requiem allemand de Brahms, qu’il vient d’enregistrer sous la direction de Yannick Nézet-Séguin) ou de mélodie, genre qu’il défend contre vents et marées. Simon Lepper l’accompagne au piano pour ce récital témoignant de leur volonté de montrer des joyaux du répertoire des époques et des styles les plus différents, comme ces Sonnets de Pétrarque de Liszt, sommet d’un romantisme noble et élégant, ou ce trop bref Horizon chimérique de Fauré, assurément l’un des cycles les plus achevés de tout le répertoire français avec Le Promenoir des deux amants de Debussy… qu’il nous offrira peut-être lors d’un prochain récital, qui sait ?
Opéra Strasbourg me 18 juin 20 h
Récital Sophie Koch
mezzo-soprano
François-Frédéric Guy
du chant français
Dans le cadre de la présidence autrichienne du comité des ministres du Conseil de l’Europe, cette artiste à la renommée internationale nous revient avec un programme hors des sentiers battus, comme à son habitude.
sophie koch
photo Patrick Nin
>> au programme FRANZ SCHUBERT (1797-1828) Ganymed Auf dem Wasser zu singen Gretchen am Spinnrade Die junge Nonne Musensohn
RICHARD STRAUSS (1864-1949) Ich liebe dich Allerseelen Ruhe meine Seele Die Nacht Schechtes Wetter
JOHANNES BRAHMS (1833-1897) Vergebliches Ständchen Wie Melodien zieht es Liebestreu Das Mädchen spricht Immer leiser wird mein Schlummer Wiegenlied
RICHARD WAGNER (1813-1883) Wesendonck Lieder
Entracte
piano
Voici enfin en récital à l’OnR, pour le dernier de la saison, la grande mezzo-soprano française Sophie Koch (elle fut notre Zerlina dans Don Giovanni en 1998) accompagnée au piano par François-Frédéric Guy, un nouveau venu ici, l’un des plus talentueux. Le mezzo-soprano serait-il une spécialité française ? Au XIXe siècle déjà, n’est-ce pas en France que se développent les grands rôles tels que Leonor de La Favorite, Carmen, Dalila et autres Sapho, tandis que Pauline Viardot donnait des idées à Meyerbeer (Fidès dans Le Prophète) et Berlioz même (qui réécrivit pour elle l’Orphée de Gluck) ? Sophie Koch a repris le flambeau de cette tradition des voix pleines, rondes et charnues, étonnamment longues, capables de faire sonner les graves les plus profonds sans rien perdre de leur agilité dans les vocalises. Son atout fut peut-être d’avoir accepté de continuer à chanter sur des scènes à taille humaine, sans privilégier les capitales où le gigantisme des salles oblige à des excès de décibels. Pour une chanteuse qui aime autant la mélodie et le lied, pour qui l’émotion et la beauté du chant passent avant les éclats vocaux, c’était assurément un gage de santé. Ses dernières prises de rôles, telle cette miraculeuse Alceste de Gluck à l’Opéra de Paris, montrent les affinités de l’artiste avec le répertoire français. C’est pourtant vers les compositeurs allemands qu’elle a choisi de consacrer le récital du 18 juin prochain. Schubert, Schumann et le tout jeune Richard Strauss pour le romantisme à fleur de peau, la mélancolie aussi, un sentiment qu’elle sait véhiculer comme peu d’autres. Mais elle a aussi tenu à associer les deux compositeurs ennemis – ou du moins considérés comme tels par leurs tenants respectifs : Brahms et Wagner. Volonté de dépasser les clivages, de montrer les affinités sans doute plutôt que les écarts. On ne saurait passer sous silence que comme partenaire, elle n’a pas choisi le moindre des pianistes : François-Frédéric Guy est aujourd’hui l’un des pianistes français les plus justement célèbres ; défenseur de la musique allemande depuis toujours (il enregistrait la Hammerklavier en guise de premier disque – et comment ! – et vient d’achever l’enregistrement de l’intégrale des sonates de Beethoven), il sait comme elle ce que le sérieux en musique signifie. Pas ennui, pas lourdeur ; bien au contraire même. Mais c’est précisément quand on a touché au plus profond de la richesse d’une musique que l’on peut la présenter avec simplicité, sans affectation, sans pontifier. Pour la réunion de ces deux interprètes d’exception, de ces deux âmes au diapason, une soirée à ne pas manquer ! Récital • Croisements • 27
L’OPéRa à vOtRE taBLE
Dîners sur scène
PhOtOS JEan-Luc tanghE - FRéDéRiquE gODaRD - niS&FOR
StRaSBOuRg OPéRa me 14 (complet), je 15, ve 16 (complet) mai 19 h 15
En mai, l’Opéra national du Rhin vous fait tourner la tête ! Pour la 5e édition des Dîners sur scène, les danseurs du Ballet s’invitent à votre table en compagnie des chanteurs de l’Opéra Studio et font valser vos papilles. Plus qu’un dîner, plus qu’un spectacle, une soirée inoubliable à partager en couple, en famille ou entre amis.
REnSEignEmEntS Direction de la communication et du mécénat fidelio@onr.fr – +33 (0)3 88 75 48 95 / 40 www.operanationaldurhin.eu
nfants pour e s r ie l e at
En piste ! Deux mercredis découverte pour les enfants qui souhaitent s’initier à la danse. La motivation et la soif de découverte sont les seuls pré-requis à ces moments conviviaux. à ne pas manquer !
dansez maintenant Opéra Assister à lʼéchauffement des danseurs à la barre et Strasbourg aux répétitions dʼun ballet, puis entrer dans la peau d'un danseur le temps dʼun atelier : voilà le programme me 9 avril 12 h 30 dʼune après-midi bien remplie autour du spectacle Die Schöpfung (La Création) de Haydn. Réservé aux 8-12 ans
La fabrique du chorégraphe
Tarif : 5,50 € Réservation : 03 88 75 48 54 / 79 ou jeunes@onr.fr Nombre de places limité
Comment imaginer une chorégraphie ? à partir dʼune idée ? Dʼune histoire ? Dʼun mouvement ? En une après-midi, les enfants déchaînent leur imagination et découvrent les secrets du processus de création.
centre chorégraphique mulhouse me 21 mai 14 h 30
Réservé aux 6-10 ans
la maîtrise : ici et ailleurs La Maîtrise de l’OnR est composée de plusieurs chœurs que les jeunes chanteurs intègrent selon leur âge et la maturité de leur voix. Un chœur d’hommes vient compléter les propositions de pratique du chant amateur.
PILE OU FACE
de haut en bas : photo frédéric godard • photo nis&for
La maîtrise en tournée Les adolescents et le chœur d’hommes seront en Russie du 23 au 29 avril : à Moscou à l’école artistique Mamontov, à l’école de musique d’Ouglitch, au centre culturel de Yaroslavl et au “White Hall” de l’école Polytechnique de Saint-Pétersbourg. Quarante chanteurs du chœur d’enfants ont quant à eux pris deux rendez-vous au pays des cigales. Si vos vacances vous amènent vers cette destination en juillet, vous pourrez les applaudir à Aix-en Provence le 8 et à Marseille le 10. Nul doute que les uns et les autres auront l’occasion de visiter les régions où ils sont invités.
La Maîtrise de l’Opéra national du Rhin – Petits Chanteurs de Strasbourg a voulu synthétiser pour ce concert apéritif dans un conte simple tout ce qu’elle aime : des musiques variées, l’expression du corps et de la voix dans sa richesse de contrastes, la personnalité de chacun des ensembles qui le constituent et sa passion pour l’opéra. Ce spectacle est aussi un voyage vers l’inconnu, évoquant le déchirement du départ, des rencontres enrichissantes, la découverte du monde et la nature… de la musique de chambre et du lied à la chanson française, des musiques « du monde » à la mélodie française, de l’opéra aux musiques ethniques, de film, en passant par la pop anglaise et la comédie musicale. Pile ou face, méli et mélo, mais la qualité, toujours au rendez-vous. Luciano Bibiloni DIRECTION MUSICALE Roselyne Koeniguer piano Vincenzo Cirilo et Cécile Bienz mise en scène Luciano Bibiloni, Edlira Priftuli et Cécile Bienz chefs de chŒur
Opéra
Strasbourg sa 29 mars 11 h Croisements • 29
concerts apéritifs Les concerts apéritifs font partie des traditions de la maison. Des choix éclectiques à l’image des interprètes qui montent sur scène et viennent ensuite prendre un verre avec les spectateurs, un gage de convivialité. En partenariat avec la Cave de Turckheim.
Frou-Frou
Cordelia Huberti piano
Poupées russes Le génie mélodique de Tchaïkovski touche bien des cœurs lorsque les scènes lyriques occidentales programment ses opéras. On entend moins souvent ces mélodies composées entre 1875 et 1893 qui approfondissent l’exploration des sentiments dans l’intimité d’une atmosphère chambriste. Notre trio russe nous invite à écouter la nature (Au jardin près du gué, Le Rossignol, J’ai ouvert la fenêtre, Les étoiles nous éclairaient doucement) et à des rencontres colorées (Au milieu d’un bal bruyant, Chanson de la tsigane). Il nous transporte des cimes d’un hymne extatique à l’amour (Dis-moi à l’ombre des branchages) aux abîmes du désespoir amoureux (Oublier si vite). Dans les couleurs du soprano, de l’alto ou du ténor, nous vivons l’aube, le jour, le coucher de soleil, moments de la journée égrenés sur les notes d’un compositeur ultrasensible. Enfin, raffinement suprême pour un chanteur russe, La Nuit, composée par un disciple de Tchaïkovski, Taniev (1856-1915), parachève l’hommage au maître de l’émotion mélodique.
Opéra
Strasbourg Salle Bastide sa 26 avril 11 h
Opéra
Strasbourg Salle Bastide sa 24 mai 11 h
Artistes des chœurs de l’Onr Dominic Burns baryton Jean-Marie Bourdiol ténor Yasmina Favre mezzo-soprano Susan Griffiths soprano Lucile Komites mezzo-soprano Vérène Rimlinger piano et mise en espace
Il Campanello Une sonnette (il campanello) tinte dans le noir et c’est le début des ennuis pour un pharmacien avide de consommer sa nuit de noces, en butte aux facéties d’un jeune amoureux. Cet opéra-bouffe drôle et brillant naît pourtant sous de sombres auspices : le choléra dévaste Naples en cette année 1836 et Donizetti vient de perdre ses parents et un enfant mort-né. Décidé pourtant à aider la troupe d’un petit théâtre napolitain en difficulté, il compose en quelques jours Il Campanello sur le sujet d’un vaudeville parisien, La Sonnette de nuit. La création à la fin de l’épidémie est un tel triomphe que Donizetti transforme l’année suivante les dialogues originellement en dialecte napolitain : il compose des récitatifs en italien afin de permettre à l’œuvre de faire carrière en dehors de Naples. C’est une troisième version que l’Opéra Studio propose au public alsacien : les péripéties des impatiences de l’apothicaire y sont suggérées en français au fil de la musique de Donizetti. Artistes de l’Opéra Studio Gaëlle Alix Serafina Sévag Tachdjian Don Annibale di Pistacchio Jean-Christophe Born Spiridione Lamia Beuque Madama Rosa David Oller Enrico Alice Meregaglia piano Vincent Monteil Directeur musical Anne Le Guernec mise en espace
théâtre
colmar ma 3 juin 12 h 30
opéra
strasbourg Salle Bastide sa 28 juin 11 h
photos frédéric godard
Artistes des chœurs de l’Onr Tatiana Zolotikova soprano Elena Iachtchenko alto Piotr Iachtchenko ténor
Il n’y a pas que la musique sérieuse dans la vie et les compositeurs peuvent dévoiler des facettes plus licencieuses : regards, paroles, caresses… tous les échanges humains les inspirent. Nos artistes du chœur et leur pianiste nous offrent ainsi un bouquet de délices sensuels cueillis dans l’effloraison de l’opérette, du lied ou de la chanson. Mélodies libertines ou chansons à textes un peu coquines, Mozart ou Offenbach, Satie ou Messager, Schumann ou Gainsbourg se côtoient dans la célébration d’un amour qui n’a pas peur du rire et des émotions tendres.
4 questions à...
Vous aimez la musique, comment êtes-vous tombée dedans ? Comme Obélix : je suis tombée dedans quand j’étais petite. Et comme pour Obélix, la potion magique n’a jamais cessé de faire son effet. (Heureusement, contrairement à Obélix, j’ai le droit de continuer à en consommer régulièrement). Mes parents étaient férus de musique classique et d’opéra en particulier. Mon enfance a été bercée par le piano : mon père, excellent pianiste amateur et surtout grand déchiffreur, se mettait à jouer dès qu’il rentrait du travail. Et j’ai vu mon premier opéra à quatre ans. Enfant, je présentais à mes parents des spectacles de marionnettes avec Siegfried réveillant Brünnhilde sur le rocher ! Bizarrement, je n’ai pas eu de période rebelle : adolescente, je me rappelle que j’écoutais des opéras en dessinant des scènes qui me faisaient rêver, Don Giovanni en particulier.
Mariame
Clément Mariame Clément
est metteuse en scène. Elle a déjà signé cinq productions à l’OnR. Nous aurons le plaisir de la retrouver dès le mois de juin avec son inoubliable Platée (voir p.13).
Quel est votre plus beau souvenir ? Je pourrais dire Abbado, Jansons, Rattle, Salonen, Pollini, Brendel, Quatuor Alban Berg, je pourrais citer des voix sans nombre qui m’ont troublée, émue, bouleversée. Je pourrais aussi dire : chaque italienne avec orchestre de chaque œuvre que je dirige – l’irruption de l’orchestre, enfin, après des semaines de travail au piano, me donnant immanquablement à la fois l’impression de comprendre pourquoi je fais ce que je fais, et le sentiment d’être ultra privilégiée d’avoir le droit de le faire. Mais je pourrais aussi dire : ma fille en train de chanter. La voix de cette enfant dans la rue, dans sa chambre, dans son bain, explorant le monde, se créant un territoire, donnant un sens à ce qui l’entoure à l’aide de sa petite ritournelle – comptine apprise à l’école ou opéra entendu à la maison : ça, c’est l’universalité de la musique, l’expérience musicale par excellence. Ordonner le chaos du monde. Si vous étiez un instrument ? Le triangle ? Simplicité et perfection de la forme, discrétion, humilité, tintement cristallin, dérisoire mais irremplaçable. Le détail parfois indétectable sans lequel l’ensemble manque de magie. Ou bien : l’orchestre comme instrument. Un son unique mais tissé de voix multiples. Diversité des instruments, des cultures de chacun, des expériences individuelles. Collaboration, symbiose, magie, oubli de soi, alchimie des parties sublimées dans le tout – mais où chaque personnalité, même le triangle, a son mot à dire. Si vous étiez un personnage lyrique ? … je ne serais sans doute pas metteur en scène. Comme dirait Don Giovanni : être fidèle à l’un, c’est être infidèle aux autres.
mariame clément : photo Jean-Pierre Daumard
créajeunes Il y a trois ans, Camille Laurent sortait de l’école des Arts de la transformation de l’Opéra national du Rhin où elle avait complété une formation de maquilleuse perruquière. Depuis, elle travaille régulièrement dans la maison en intermittence, à l’atelier de perruques et lors des productions. Parallèlement, elle monte un projet ambitieux : créer son propre atelier et sa société de fabrication de perruques à destination de personnes qui, atteintes de pathologies nécessitant un protocole lourd, perdent leurs cheveux. Au-delà de la confection, elle montre une ambition affichée de prendre en charge la personne dans sa globalité. Ainsi souhaite-t-elle assurer accueil confidentiel, déplacement à domicile, création de perruques sur mesure, conseils de maquillage et d’assistance dans les démarches administratives pour la prise en charge des frais. Le projet reçoit le soutien de « Créajeunes », un programme d’accompagnement à la création d’entreprise pour les 18-32 ans et elle sort lauréate du concours. Le lancement est prévu prochainement. Le dynamisme et la volonté de Camille seront, nous le souhaitons, gage de son succès.
ivan cavallari à la folie
Deuxième saison pour Ivan Cavallari à la tête du Ballet de l’OnR. Observation, réflexion, travail et innovation sont les mots d’ordre de cet homme passionné et ambitieux.
En arrivant à l’OnR, quelle était votre vision de la compagnie ? Pendant le premier mois, j’ai simplement pris le temps de regarder les danseurs et de découvrir leurs qualités. J’ai trouvé une compagnie avec une forte personnalité et une belle énergie. Plus d’un an après votre arrivée, cette vision a-t-elle changé ? En travaillant quotidiennement avec les danseurs, au fil des classes, des répétitions et des spectacles, ma vision a mûri naturellement. Plus que tout, j’aime passer du temps dans les studios avec eux. Ce que je regarde en eux, c’est avant tout les personnes, les individualités. Ce sont toutes ces personnalités mises ensemble qui créent la magie sur scène. Sans leur force, le chorégraphe ne peut rien ! En quoi la compagnie a-t-elle évolué ? Par la pratique de pièces néoclassiques, les danseuses assouplissent leurs muscles, leur corps s’allonge tout en devenant plus fort. Une fois cette étape franchie, le travail moderne et contemporain devient beaucoup plus simple. Les danseuses travaillent leurs pointes au quotidien car nous sommes une compagnie de Ballet. Mais le travail sur pointes fait partie de l’identité d’une compagnie de répertoire telle que la nôtre. Peut-on parler d’ores et déjà d’un nouveau visage de la compagnie (ou d’un nouveau corps) ? Pas encore. Je pense que les changements prennent du temps et que les premières années sont toujours quelque peu mouvementées. 32 • Croisements • Ivan Cavallari
Stéphanie Madec - Van Hoorde, danseuse au Ballet de l’OnR, revient sur ses deux années avec Ivan Cavallari.
Quelles sont les perspectives pour les années à venir ? C’est une magnifique question. Le Ballet du Rhin compte en moyenne trente dates par saison, trois programmes, mais seulement une production avec orchestre. à cela s’ajoutent quelques dates de tournées en région. Je souhaite avant tout gagner l’affection et la reconnaissance du public mulhousien (sans oublier Strasbourg et Colmar). Jusqu’à présent beaucoup de gens ignorent où nous répétons, mais grâce à la rénovation du bâtiment, les gens vont pouvoir se rendre compte que nous sommes au cœur de Mulhouse. Nous pourrons bientôt inviter du public dans nos studios. J’aime encourager les vocations chorégraphiques au sein de la compagnie. C’est pour cela que j’ai créé le programme Genesis. Chaque danseur qui le souhaite peut s’exprimer et faire danser les autres. Il me semble également essentiel de développer une identité qui nous permette de nous produire en dehors du syndicat intercommunal. Nous avons besoin de davantage de dates de spectacles et d’au moins deux productions avec orchestre par saison. Nous devons aussi établir une relation forte avec le Conservatoire de Mulhouse et permettre à des étudiants de participer à nos productions.
DE GAUCHE à DROITE : photo frédéric godard •photo nis&for
Comment évolue le répertoire de la compagnie ? Le répertoire est très riche et la compagnie a eu la chance de travailler avec de grands chorégraphes. Cela doit continuer ainsi. Avez-vous trouvé votre place en Alsace ? Absolument. J’ai la chance de vivre à la campagne. J’aime le calme et la paix, le silence et le vert. La présence de l’eau en Alsace est importante, le canal, le Rhin, m’aident à me détendre et à rêver. Je me promène régulièrement en montagne, en Forêt Noire ou dans les Vosges et cela me permet de réellement me ressourcer.
Comment avez-vous vécu l’arrivée d’Ivan Cavallari au Ballet de l’OnR ? La compagnie a d’abord découvert un grand charisme et une implication totale. Dès qu’Ivan est arrivé dans les murs du Ballet, il était à nos côtés au quotidien, donnait des cours, nous suivait au plus près… Sa plus grande qualité ? J’apprécie beaucoup sa franchise. Il a toujours été clair par rapport à son projet artistique. Il responsabilise les danseurs en leur demandant d’y réfléchir sincèrement. En même temps, il s’adapte aussi à nous, à notre personnalité. Il est arrivé sur une ligne très classique mais quand il nous a découverts dans un programme aussi varié que La Folie dans la danse, il a pu voir à quel point la force de notre compagnie résidait dans la diversité et la richesse de ses individualités. Et vous, que pensez-vous de la nouvelle ligne artistique ? La nouvelle direction a forcément représenté une remise en question pour moi. J’ai toujours adoré le classique. La maîtrise permet d’avoir beaucoup plus de liberté dans le contemporain aussi. La contrainte permet de se libérer, de lâcher prise. En revanche, cette orientation est très exigeante sur la forme physique, l’allongement des lignes. C’est une chose d’avoir l’envie et la curiosité mais le corps doit suivre, je ne suis plus au début de ma carrière. Aujourd’hui, je me rends compte que quand la tête veut et que l’on sent la direction derrière soi, on peut repousser ses limites. Comment Ivan Cavallari vous fait-il travailler physiquement ? Dans les cours, on a beaucoup plus de stretching, de pas pour permettre l’allongement. Et avec les pièces, on prend le pli. Le corps s’adapte à ce que l’on danse. Quand on travaille des ballets contemporains très en force, dans la gravité, appuyés, on prend forcément des cuisses. Aujourd’hui, on voit concrètement que tous les danseurs sont plus élancés. Ivan Cavallari • Croisements • 33
Vous avez suivi les aventures de Pinocchio sur Facebook et Twitter : retour sur images
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le voyage de
pinocchio 5
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1. Collodi, je 2 janv. 2014. C’est le grand départ : j’essuie une petite larme en quittant ma bourgade natale. 2. Florence, Palais des Offices, ve 3 janv. 2014. Je ne résiste pas à jouer les touristes • 3. Un dernier regard sur ma Toscane ensoleillée • 4. Ciao Italia, à moi l’aventure ! • 5. Prague, di 5 janv. 2014. Escale improvisée. • 6. Tour Montparnasse à babord ! • 7. Me 15 janv. 2014. Paris by night. • 8. Les joies du RER, c’est pas trop mon truc. 9. Le train non plus… on s’ennuie. • 10. Je préfère la trottinette... 11. ... ou la bicyclette • 12. Mulhouse, ma 28 janv. 2014. Ouf, enfin arrivé ! Je me vois déjà en haut de l’affiche. 13. Colmar, sa 8 fév. 2014. Me voilà porté par un vent de liberté ! • 14. Strasbourg, di 16 fév. 2014. Au sommet de la gloire…
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Sandrine Abello a pris la direction des Chœurs de l’OnR en janvier dernier. éternelle curieuse, à la fois anxieuse et déterminée, elle revient pour nous sur ces expériences qui ont conduit sa vie et sa carrière. à lire avec une petite intonation du Sud où elle a grandi.
sandrine abello Votre première rencontre avec le chant ? Quand j’étais adolescente, j’étudiais le piano. Ma mère, qui écoutait – et de fait moi aussi – toutes sortes de chansons, m’achetait des partitions, des « piano-chant » que je déchiffrais en chantant avec elle. Du Piaf, mais aussi des airs et parfois même des duos comme celui de Don José et Micaëla dans Carmen. Ma culture du chant n’est pas exclusivement lyrique. Vos premiers souvenirs musicaux ? Mon père était employé de banque. Il y avait une médiathèque dans son entreprise où chaque membre de la famille – nous étions quatre – choisissait un disque par semaine. Ma mère choisissait toujours un « tube » classique. C’est par ce biais que j’ai découvert notamment La Petite Musique de nuit de Mozart et bien d’autres choses. Votre premier souvenir d’opéra ? Au Théâtre de Nîmes, j’étais allée voir Andalousie de Francis Lopez ; vous allez me dire que c’était de l’opérette mais il y avait des costumes, des décors, des airs qui m’ont marquée. Quel parcours vous a amenée à être chef de chœur ? Comme j’étais pianiste-chef de chant, rapidement j’ai commencé à diriger de manière impromptue les ensembles, par exemple lors des répétitions de certains opéras qui comportaient des chœurs de coulisse. Les choses se sont faites naturellement. à l’origine, j’étais pianiste-chef de chant, notamment à l’Opéra d’Avignon, de Toulon et à Angers-Nantes Opéra. à Dijon, j’avais une responsabilité plus étendue puisqu’en charge des études vocales et attachée de production au Service Chœur. J’encadrais les chefs de chant, établissais les plannings du chœur et organisais ses déplacements et ses tournées. Je coordonnais les informations musicales et scéniques entre le chef d’orchestre invité, le metteur en scène, les chefs de chant, planifiais les répétitions en fonction des besoins des maîtres d’œuvre de chaque équipe artistique.
Vous avez eu l’occasion de travailler avec les « grands » artistes et les amateurs, quels enseignements tirez-vous de ces expériences ? Notre métier de chef de chant nous amène à travailler étroitement avec les chanteurs solistes d’une production, parfois même il s’agit de chanteurs mondialement reconnus. Passé le temps de gêne d’aller faire une remarque à un artiste qui a commencé sa carrière alors que vous-même n’étiez qu’un « bébé » dans la profession, vous vous rendez compte rapidement que ces artistes-là sont d’une grande humilité et ont des qualités humaines incroyables ! Les plus grands se laissent facilement conseiller, contrairement à ce qu’on peut croire, ils sont sensibles aux remarques. Et c’est parce qu’ils sont sereins qu’ils sont si grands. Pour exemple, Monsieur Alain Fondary avec lequel j’ai eu le privilège de travailler sur une production de Tosca à l’Opéra de Dijon. Travailler avec des amateurs est aussi très agréable. C’est avec eux particulièrement que l’on apprend à utiliser les gestes simples, ceux qui vous permettent d’obtenir d’un chœur ce que vous souhaitez. Et votre premier contact avec les chœurs de l’OnR ? Outre le fait qu’ils avaient été invités à l’Opéra de Nantes pour renforcer les effectifs pour un concert Verdi pour chœur, je les ai vus pour la première fois en décembre, au moment du départ de Michel Capperon. Les premières répétitions étaient consacrées à Der fliegende Holländer de Wagner. J’étais très anxieuse car, pour les avoir vus travailler, ils me paraissaient très précis, très disponibles et généreux. Il me fallait leur donner des raisons de m’accorder leur confiance. J’espère avoir réussi mon « atterrissage ».
Comment s’est passée votre installation en Alsace ?
En dehors d’un concert que le trompettiste André Henry et moimême avions donné à Guebwiller en 1998, mon passage à proximité à l’Opéra de Fribourg (en Suisse !), je ne connaissais pas l’Alsace. Je suis arrivée en décembre dernier. En dehors du froid, et peutêtre du stress lié à ma situation « transitoire » qui m’ont provoqué une extinction de voix, c’était une période plutôt agréable avec notamment les marchés de Noël. Je venais dans un premier temps remplacer temporairement Michel Capperon qui quittait son poste de chef des chœurs. J’ai été lauréate du concours de recrutement (parmi 76 candidatures). J’en suis ravie, c’est une maison attachante. Sandrine Abello • Croisements • 35
carnets de croquis
Jetez un œil curieux dans quelquesuns des carnets de croquis de Radu Boruzescu, ces trésors de crayonnés, d’idées, d’inspirations, de plans et d’échantillons, bases de l’élaboration du décor grandeur nature de Rigoletto.
du croquis
quatre collaborations
Les gradins
Le cirque, c’est aussi les gradins qui accueillent le public. Radu Boruzescu passe du croquis au dessin plus précis, faisant apparaître les cotes pour faciliter le travail des ateliers de fabrication de décors.
dessins de radu boruzescu - maquette de décors de rigoletto
à l’OnR, le décorateur Radu Boruzescu a signé quatre productions avec le metteur en scène Robert Carsen : Richard III, L’Affaire Makropoulos, De la maison des morts et Rigoletto.
Le clown
Rigoletto le bouffon est associé à l’image du clown blanc, que l’on rencontre traditionnellement au cirque. Voici le point de départ de la scénographie, qui sera décliné tout au long de l’ouvrage. Le masque, emblématique de cette production, a été inspiré par Larmes de clown, film de 1924 de Victor Sjöström avec Lon Chaney (voir photo ci-contre). Ci-dessous, les pistes de réflexion autour de l’élaboration du « profil » du personnage de Rigoletto.
à la scène
Voici quelques notes jetées sur un carnet de croquis, comme le résultat d’une « tempête d’esprit » permanente :
« Rigoletto : le double grimaçant Le Clown blanc, le théâtre de la Foire, le cirque, le music-hall Le clown, le bouffon, le saltimbanque, l’entertainer, The Joker Faire rire pour exorciser la misère du Temps, la "malfortune" et la mort Le Bouffon renvoyait le Roi à sa Solitude »
photos alain kaiser
le rideau de scène
Au cirque, il dévoile les artistes à leur entrée sur la piste. à lʼopéra aussi. Le voici rapporté à la dimension d’un rideau de théâtre.
les coulisses de la création
les secrets
de cendrillon épisode 4 Jusqu’aux dernières répétitions, toutes les équipes de l’OnR n’ont cessé de prêter main forte à l’équipe artistique de La Cenerentola. Les ultimes ajustements sont faits. Le cycle de représentations peut commencer.
Faites
18 h 15
pétiller les
saveurs
pas le sel !
Près des loges des solistes, Cendrillon (Maite Beaumont) et Alidoro (Ugo Guagliardo) sont livrés aux mains expertes de nos maquilleuses-coiffeuses Julie et Magali.
Une faible teneur en sel, qui préserve le goût des mets et votre santé !
Les perruques des deux sœurs Clorinda et Thisbe sont prêtes à être posées.
t Au même instan
Dans la loge du chœur messieurs, les éléments de costumes n’attendent plus que leurs chanteurs…
photos onr • photo spectacle : alain kaiser
2 h 50 après le lever de rideau, la représentation s’achève. Ce soir, c’est la dernière à Strasbourg.
... et en coulisses sur la scène, bien rangés, ces objets qui dans les mains des artistes deviennent des accessoires.
22 h 49
Le lendemain Tandis que sur scène a lieu le démontage des éléments de décors, pièce par pièce, on s’affaire pour rassembler costumes, perruques et accessoires.
Tout, comme ici le carrosse, est ensuite chargé dans les semi-remorques et part pour de nouvelles aventures au Théâtre de la Sinne à Mulhouse et au Théâtre municipal de Colmar. Ainsi va la vie d’une production à l’Opéra national du Rhin...
La presse en parle Rigoletto La distribution est dominée par Nathalie Manfrino : timbre riche, expression intense, la soprano française continue à nous surprendre par sa capacité à alléger son instrument devenu vraiment très opulent, pour rendre justice aux passages réclamant une voix plus fine. Au pupitre d’un OPS de Strasbourg en très grande forme (conséquences d’une année de travail avec Marko Letonja ?), Paolo Carignani impose une lecture toute de lyrisme et d’émotion. Richard Martet
Oui, ce clown maudit vu par Carsen est grandiose, inoubliable ! En accord parfait avec son metteur en scène, George Petean assume avec une admirable facilité toutes les facettes du rôle de Rigoletto, si lourd et si délicat. Elisabeth Bouillon
Rigoletto impressionnant du Roumain George Petean, véritable personnage shakespearien. Touchant, attachant, d’une humanité à tirer des larmes et obsédé par la malédiction qui l’assaille, il possède toutes les qualités requises par son chant assuré et profond, se glissant avec bonheur dans la peau du bouffon grimé. Michel Le Naour
Le Rigoletto somptueux de George Petean confirme qu’il faut compter ce baryton roumain parmi les tout meilleurs interprètes verdiens du moment. Le Duc de Dmytro Popov ne démérite en rien ; là aussi, l’aigu est généreux et rayonnant, la voix saine et artistiquement conduite. Chez la Gilda de Nathalie Manfrino, on apprécie l’intensité dramatique, la substance de la pâte vocale et l’engagement. Michel Thomé
En Duc de Mantoue, le ténor roumain Dmytri Popov a une voix insolente de santé et tient avec facilité la route. Marc Munch
Un OPS dans une forme olympique, placé sous la direction fougueuse du chef italien Paolo Carignani. Il préserve habilement l’équilibre entre fosse et plateau, et installe un rythme et une cohérence dramatique à la partition de Verdi qui forcent lʼadmiration. Emmanuel Andrieu
Nathalie Manfrino, une crédibilité et un investissement scéniques appréciables. On se laisse facilement prendre par ce spectacle continuellement animé, qui sait créer des personnages forts et ne renonce jamais à un esthétisme de tous les instants. Laurent Barthel
aladin
et la lampe merveilleuse La reprise par l’Opéra Studio de l’OnR de son Aladin, mis en scène de Waut Koeken, rend justice à une œuvre qui ne s’adresse pas qu’aux enfants. Fabrice Malkani
Christian Fruchart
Un cadeau précieux à l’intention du jeune public. Dominique Feig
Un spectacle festif et brillamment coloré (…) et hautement recommandable. Pierre Benveniste
photos alain kaiser et jean-luc tanghe
La distribution fait honneur au niveau d’excellence qui demeure la règle dans la cellule de formation de l’Opéra national du Rhin.
le vaisseau fantôme Un coup de chapeau à Sandrine Abello, à qui l’on doit la préparation des Chœurs de l’OnR, toujours à la hauteur d’une partition qui les sollicite énormément. Alain Cochard
Les Chœurs de l’Opéra de Strasbourg (direction Sandrine Abello) peuvent être loués sans retenue ; ils déploient une grande force dans les scènes de masse. Georg Rudiger
Les deux héros de la soirée auront été Ricarda Merbeth, Senta incandescente, brûlée par sa passion pour le Hollandais, et Thomas Blondelle qui campe avec une grâce mozartienne Erik. Marko Letonja dirige avec une élégance souveraine un OPS des meilleurs jours et des Chœurs de l’OnR très en voix. Philippe Venturini
Il convient de saluer la prestation du slovène Marko Letonja dans la fosse de l’Opéra de Strasbourg avec des musiciens de l’OPS plus homogènes qu’ailleurs. Bruno Serrou
On aime aussi le travail de Raymond Bauer, à la fois fonctionnel et suggestif, mêlant adroitement réalité quotidienne et fantastique. Elisabeth Bouillon
Le meilleur du spectacle revient aux Chœurs de l’OnR qui jouent un rôle moteur. Noël Tinazzi
Les Chœurs de l’OnR sous la direction de Sandrine Abello font une démonstration de puissance et de rigueur. Dans la fosse, un OPS à son beau niveau. Marko Letonja conduit l’ouvrage avec une admirable exactitude. Marc Munch
Eve-Maud Hubeaux, au timbre remarquable, confirme tous les espoirs placés en elle tandis que le jeune ténor belge Thomas Blondelle campe un Erik impétueux et suicidaire, au chant énergique et ciselé dans un matériau riche et frais. Un régal ! Jérôme Pesque
Superbe Riccarda Merbeth engagée, épanouie, voix massive lancée comme un boulet, ligne tendue et frémissante. Thomas Blondelle épatant : un jeune artiste de valeur éclate en scène ce soir. André Tubeuf
Juvénile et fraîche avec jusqu’à la fin d’inépuisables aigus purs et sûrs et une articulation claire, Riccarda Merbeth est une extraordinaire et courageuse Senta. Rolf Fath
La mise en scène brillante de Nicolas Brieger… est profonde et tout à fait enthousiasmante. Jason Howard est très à l’aise dans le rôle du Hollandais. Sa voix de baryton était tout à fait convaincante et sonnait bien. Gunther Thiel
De haut niveau, le Daland de Kristinn Sigmundsson à la diction d’une clarté exemplaire. La Mary d’Eve-Maud Hubeaux se fait remarquer par un timbre de mezzo somptueux et riche et par une notable puissance.
L’interprétation musicale de ce Vaisseau convainc. Le chef de l’OPS, Marko Letonja, tire lui aussi le Hollandais de son tiroir romantique. Dagmar Guilcher
Raimund Bauer a conçu un espace d’une fonctionnalité stupéfiante. Nikolaus Schmitt
Compliments à la percutante Mary Eve-Maud Hubeaux et, last but not least, compliments au chœur vif, homogène et puissant (préparé par Sandrine Abello). Alexander Dick
Michel Thomé
pinocchio
Dans cette brillante création, le chorégraphe italien [Ivan Cavallari] assoit son autorité et son talent, alors que les danseurs confirment, inlassablement, le haut niveau de la troupe et la capacité d’intégration constante de nouveaux éléments venus du monde entier. Claudine Studer-Carrot
Du beau et grand spectacle.
photos alain kaiser
Gilles Haubensack
Pinocchio, brillant et plein de fantaisie. Une œuvre d’art totale, qui suscite au-delà de l’émotion, le pur plaisir d’un spectacle vivant de qualité. Udo Klebes
La presse en parle • Croisements • 41
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Calendrier avril
je 03 Die Schöpfung (La Création) Strasbourg Opéra ve 04 La Colombe / Le Pauvre Matelot Colmar Théâtre Strasbourg Opéra sa 05 Die Schöpfung (La Création) Strasbourg Opéra di 06 Die Schöpfung (La Création) di 06 La Colombe / Le Pauvre Matelot Colmar Théâtre Strasbourg Opéra lu 07 Die Schöpfung (La Création) Strasbourg Opéra ma 08 Die Schöpfung (La Création) Strasbourg Opéra me 09 Dansez maintenant Strasbourg Opéra me 09 Die Schöpfung (La Création) ve 11 Le Roi Arthus Mulhouse Filature di 13 Le Roi Arthus Mulhouse Filature Strasbourg Opéra sa 26 Poupées russes sa 26 Die Schöpfung (La Création) Colmar Théâtre di 27 Die Schöpfung (La Création) Colmar Théâtre Strasbourg Opéra me 30 Conférence Doctor Atomic
mai
ve 02 Doctor Atomic Strasbourg Opéra di 04 Doctor Atomic Strasbourg Opéra ma 06 Doctor Atomic Strasbourg Opéra ma 06 La Colombe / Le Pauvre Matelot Mulhouse Sinne Strasbourg Opéra me 07 Récital Stéphane Degout ve 09 Doctor Atomic Strasbourg Opéra sa 10 La Colombe / Le Pauvre Matelot Mulhouse Sinne Strasbourg Opéra me 14 L’Opéra à votre table Strasbourg Opéra je 15 L’Opéra à votre table Strasbourg Opéra ve 16 L’Opéra à votre table sa 17 Doctor Atomic Mulhouse Filature me 21 La fabrique du chorégraphe Mulhouse CCN Strasbourg Opéra sa 24 Frou-Frou CCN lu 26 Genesis Studio Mulhouse CCN ma 27 Genesis Studio Mulhouse CCN me 28 Genesis Studio Mulhouse
juin
ma 03 Il Campanello Colmar Théâtre me 11 La Colombe / Le Pauvre Matelot Paris Athénée Strasbourg Opéra je 12 Genesis Strasbourg Opéra je 12 Rencontre Platée ve 13 Platée Strasbourg Opéra ve 13 La Colombe / Le Pauvre Matelot Paris Athénée Strasbourg Opéra sa 14 Genesis sa 14 La Colombe / Le Pauvre Matelot Paris Athénée di 15 La Colombe / Le Pauvre Matelot Paris Athénée di 15 Platée Strasbourg Opéra ma 17 Platée Strasbourg Opéra Strasbourg Opéra me 18 Genesis Strasbourg Opéra me 18 Récital Sophie Koch je 19 Platée Strasbourg Opéra sa 21 Platée Strasbourg Opéra Strasbourg Opéra sa 28 Il Campanello di 29 Platée Mulhouse Sinne
juillet
ma 01 La Colombe / Le Pauvre Matelot Strasbourg Opéra ma 01 Platée Mulhouse Sinne je 03 La Colombe / Le Pauvre Matelot Strasbourg Opéra
20 h 20 h 15 h 15 h 15 h 20 h 20 h 12 h 30 20 h 20 h 15 h 11 h 20 h 15 h 18 h
20 h 15 h 20 h 20 h 20 h 20 h 20 h 19 h 15 19 h 15 19 h 15 20 h 14 h 30 11 h 19 h 19 h 19 h
12 h 30 20 h 20 h 18 h 30 20 h 20 h 15 h & 20 h 20 h 16 h 17 h 20 h 15 h & 20 h 20 h 20 h 20 h 11 h 17 h
20 h 20 h 20 h
CCN
Centre chorégraphique national 38 Passage du Théâtre Mulhouse
Athénée
Athénée Théâtre Louis-Jouvet sq. de lʼOpéra Louis-Jouvet 7 rue Boudreau 75009 Paris
Opéra Danse Récitals Jeune public Concerts événementiel
Informations communiquées sous réserve de modifications
Calendrier • Croisements • 39
www.fondationbeyeler.ch Papillons, um 1910, Öl auf Leinwand, The Museum ofModern Art, New York, Gift of Mrs. Werner E. Josten in memory of her husband, 1964; Foto: © 2013. Digital image, The Museum of Modern Art, New York / Scala, Florence
FONDATION BEYELER 2. 2. – 18. 5. 2014 RIEHEN / BÂLE