Dossier pédagogique
Saison 2015-2016
Verdi
DON CARLO NOUVELLE PRODUCTION
En deux mots Dans l’Europe du XVIe siècle déchirée par les guerres de religion, Philippe II d’Espagne et son fils s’affrontent pour l’amour d’une même femme. Quand les sentiments se mêlent de politique, les conséquences peuvent être redoutables...
Contacts Flora Klein • tél + 33 (0)3 68 98 75 21 • courriel • fklein@onr.fr Hervé Petit • tél + 33 (0)3 68 98 75 23 • courriel • hpetit@onr.fr Opéra national du Rhin • 19 place Broglie BP 80 320 • 67008 Strasbourg Photo Nis & For
operanationaldurhin.eu
nouvelle production Grand opéra en quatre actes de Giuseppe Verdi Livret de Joseph Méry et Camille Du Locle d’après la pièce de Friedrich Schiller Créé à l’Opéra de Paris, Salle Le Peletier le 11 mars 1867 Version de Milan 1884 STRASBOURG Opéra ve 17 juin 19 h 30 di 19 juin 17 h ma 21 juin 19 h 30 je 23 juin 19 h 30 sa 25 juin 19 h 30 ma 28 juin 19 h 30 MULHOUSE La Filature ve 8 juillet 19 h 30 di 10 juillet 17 h
Rencontre avec Daniele Callegari et Robert Carsen Strasbourg, Librairie Kléber je 16 juin 18 h 30 entrée libre
Direction musicale Daniele Callegari Mise en scène Robert Carsen Décors Radu Boruzescu Costumes Petra Reinhardt Lumières Robert Carsen et Peter Van Praet Dramaturgie Ian Burton Filippo II Stephen Milling Don Carlo Andrea Carè (sauf 19 et 23/06) Gaston Rivero (19 et 23/06) Posa Tassis Christoyannis Il Grande Inquisitor Ante Jerkunica Elisabetta di Valois Elza van den Heever La Principessa Eboli Elena Zhidkova Un Frate Patrick Bolleire Tebaldo Rocío Perez Il Conte di Lerma Camille Tresmontant Voce dal cielo Francesca Sorteni Chœurs de l’Opéra national du Rhin Orchestre philharmonique de Strasbourg
Langue : italien surtitré en français et en allemand Durée approximative : 3 h Conseillé à partir de 13 ans : collège et lycée
Argument Dans le cadre du traité de paix franco-espagnol de Cateau-Cambrésis, Elisabeth de Valois, fille du roi de France, est promise à l’Infant Carlo. Mais au dernier moment, son père, le roi Philippe II d’Espagne, veuf depuis peu, choisit d’épouser la princesse sans savoir que le jeune couple s’était déjà rencontré.
Acte I Le cloître du monastère de Saint-Just C’est là que s’était retiré Charles Quint après avoir abdiqué. Des moines prient à proximité de son tombeau. Carlo est venu chercher du réconfort et croit entendre la voix de son grand-père. Son ami Rodrigue, le marquis de Posa, le rejoint alors qu’il revient de la Flandre soumise à la rudesse du pouvoir espagnol. Il le conjure d’intercéder en faveur de ce peuple meurtri. Carlo lui avoue de son côté son amour impossible pour sa belle-mère. Il a d’ailleurs du mal à contenir son émotion en voyant passer le couple royal. Rodrigue le console du mieux possible tout en l’enjoignant de soutenir la cause flamande, ce qui saura le guérir de son impossible passion. Tous deux se jurent une fidèle amitié.
Aux portes du couvent Alors que les dames de la cour se divertissent, la princesse Eboli interprète une chanson mauresque. Rodrigue glisse un billet de Carlo à la Reine qui vient d’arriver et, pour la laisser tranquille, discute avec Eboli. Puis il supplie la reine d’accorder une entrevue à son malheureux ami. Eboli, secrètement amoureuse de l’Infant, ne peut s’empêcher de penser qu’elle est la cause de son tourment. La Reine congédie l’assistance et se retrouve seule à seule avec Carlo. Celui-ci lui demande d’intercéder en faveur de son départ pour la Flandre. Mais au cours de son entrevue, il ne peut s’empêcher de trahir ses sentiments. Elisabeth lui rappelle alors qu’elle est devenue sa mère. Carlo s’en va, désespéré. Le roi entre à son tour et, voyant son épouse seule en dépit de l’étiquette, décide de renvoyer sa dame de compagnie en France. Puis Rodrigue, auquel Philippe II demande à parler, en profite pour plaider la cause des Flamands. Le roi, sensible à sa franchise, le met en garde contre le Grand Inquisiteur. Il finit par lui faire part de ses soupçons sur une idylle entre sa femme et son fils. Rodrigue a beau dissiper les doutes, il est chargé par le roi de surveiller le prétendu rival. Acte II Les jardins du palais royal Suivant les instructions d’un billet doux qu’il croit être de la reine, Carlo se rend à une entrevue nocturne. Mais la jeune femme masquée qui l’attend n’est autre qu’Eboli. L’infant ne peut cacher sa déception. Folle de rage, la princesse jure de se venger car elle a compris le véritable objet de son amour. Carlo puis Posa ne parvenant pas à la calmer, ce dernier conseille à son fidèle ami de lui remettre tous les papiers compromettants qu’il pourrait détenir. Carlo refuse d’abord puisque Rodrigue est devenu le favori du roi mais finit par céder.
Une grande place devant la cathédrale de Valladolid Philippe II et Elisabeth assistent avec toute la cour, le clergé et le peuple à un autodafé destiné à punir les hérétiques. Une délégation de députés flamands à la tête de laquelle se trouve Carlo vient en vain plaider la grâce pour leur province. Et l’Infant ne parvient pas à obtenir de son père le gouvernement de cette région. Hors de lui, il pointe son épée en direction du roi. Rodrigue le désarme, Carlo est arrêté. Philippe II nomme alors Posa duc. L’affreuse cérémonie peut enfin commencer tandis qu’une voix venue d’en haut et que personne ne semble entendre accueille l’âme des martyrs. Acte III
Le cabinet du roi Seul, au petit matin, Philippe II se lamente sur le désamour de son épouse mais également sur la vacuité de sa vie. Il reçoit le Grand Inquisiteur afin de répondre à un cas de conscience : peut-il sacrifier son propre fils ? Celui-ci invoque l’exemple de Dieu qui n’a pas hésité à le faire. Il lui demande surtout qu’on lui livre Posa. Philippe II cède. A peine le Grand Inquisiteur est-il sorti qu’Elisabeth vient réclamer son aide pour retrouver le coffre à bijoux qu’on lui a volé. C’est le roi lui-même qui le détient et, l’ouvrant, il découvre avec stupeur un portrait de son fils. Accusée d’adultère, Elisabeth s’évanouit. Posa et Eboli arrivent à leur tour : le duc s’efforce d’apaiser le roi tout en songeant à sauver Carlo. Quant à
Eboli, elle ne peut que demander pardon à la reine pour avoir elle-même remis le coffret par dépit amoureux. Elle avoue également avoir cherché à séduire le roi. Elisabeth lui donne le choix entre l’exil ou le couvent. Eboli se lamente sur son sort tout en espérant toujours un avenir radieux pour son bien-aimé.
Dans la prison de l’Infant Posa est venu rendre visite à Carlo pour un dernier adieu car il s’est lui-même accusé d’avoir mené la révolte de la Flandre et se sait condamné par l’Inquisition. Suppliant Carlo de poursuivre la lutte, il se retrouve abattu d’un coup de feu. Avant de mourir, il révèle néanmoins à son ami que la reine l’attendra au couvent de Saint-Just. Philippe II entre dans la prison pour rendre à Carlo son épée que celui-ci repousse. Une émeute gronde aux portes de la prison et l’on réclame la libération de l’héritier du trône. La foule finit par pénétrer dans l’enceinte de la prison, Eboli en fait partie. Devant le trouble, seul le Grand Inquisiteur parvient à rétablir le calme et oblige toute l’assemblée à s’agenouiller devant le roi.
Acte IV Le cloître du monastère de Saint-Just Elisabeth, arrivée la première au rendez-vous, se recueille sur la tombe de Charles Quint. Carlo la rejoint et lui fait ses adieux définitifs car il part pour la Flandre honorer la mémoire de Rodrigue. Tous deux acceptent enfin leur triste destinée tout en espérant se retrouver dans un monde meilleur. Philippe II qui les surprend n’a plus aucun scrupule à livrer son fils au Grand Inquisiteur. Mais Carlo est tout à coup entraîné dans la tombe de son grand-père et se soustrait définitivement à la justice des hommes.
Quelques mots sur l’œuvre Au XIXe siècle, composer pour « la grande boutique », comme l’on surnomme l’Opéra de Paris, c’est un passage obligé alors que la capitale française rayonne autour des arts. Bien que Verdi n’aime pas beaucoup cette maison dont il critique la lenteur dans le travail pour un piètre résultat, il lui est impossible d’y résister. Après avoir adapté un opéra de jeunesse avec Jérusalem en 1847, et surtout connu le triomphe avec Les Vêpres siciliennes à l’occasion de l’Exposition universelle de 1855, Verdi est une nouvelle fois sollicité par la direction, d’autant plus que la mort de Meyerbeer laisse un vide créatif qu’il faut combler. à l’occasion de son passage dans la Ville Lumière pour une reprise de Macbeth et des Vêpres, les discussions sur le choix du livret commencent. Il refuse d’abord un projet destiné à feu Meyerbeer, repense un temps à son adaptation du Roi Lear puis finit par accepter, à l’été 1865, de composer un ouvrage adapté du Don Carlos de Schiller, un dramaturge qu’il connaît plutôt bien. Alors que la création est prévue dix-mois plus tard, Verdi commence le travail mais se retrouve bientôt avec l’un des deux librettistes pressentis puisque le décès de Joseph Méry oblige Camille Du Locle à terminer le texte seul. En plus du drame de Schiller, celui-ci s’intéresse également à une pièce d’Eugène Cormon sur Philippe II créée quelques années plus tôt au théâtre de la Gaîté. La composition se déroule quant à elle entre Paris et Busseto pour être terminée à l’été suivant. Les répétitions peuvent alors commencer… Et Verdi s’irrite à nouveau contre le niveau des interprètes qui nécessite de rallonger indéfiniment les répétitions. On demande aussi au compositeur de raccourcir plusieurs fois l’ouvrage afin de répondre notamment à certaines contingences comme laisser les spectateurs dîner ou permettre aux banlieusards d’attraper le dernier omnibus. La première, le 11 mars 1867, reçoit un succès d’estime. Parmi les reproches, une musique loin du style habituel de Verdi que d’aucuns qualifient de « wagnériste » – une vraie injure ! –, des mélodies peu soignées, et, malgré toutes les coupures, de pénibles longueurs. Berlioz soutient, Bizet ironise. Comment ne pas évoquer cette savoureuse anecdote qui raconte que l’Impératrice Eugénie, très puritaine, aurait détourné le regard en entendant « Tais-toi, prêtre ! » sur la scène. Et il est vrai que les accents anti-catholiques de l’ouvrage font pousser quelques cris. Pas d’échec pour autant puisque l’ouvrage se maintient sur une quarantaine de représentations pendant deux saisons… Même si Verdi s’inscrit dans les codes du grand opéra français, ballet inclus, il est vrai qu’il ose plusieurs innovations dans le prolongement de la maturation de son style : une musique qui cherche à coller de plus en plus au texte, un chœur moins présent, un orchestre qui n’est pas simplement là pour accompagner les voix. – révisions, ce qui frappe avec Don Carlo(s), c’est la multitude de Plus que tout autre opéra dont il aurait procédé à des versions qui continuent de coexister tant Verdi a opéré des remaniements sans pour autant choisir d’imposer une version officielle. En schématisant quelque peu, on peut en retenir quatre principales qui redécoupent ou suppriment des scènes voire un acte entier et font usage du français ou de l’italien pour le livret. A chaque nouvelle programmation, c’est toujours la question du choix de la version, voire d’un mélange des versions, qui se pose immédiatement. L’OnR a présenté Don Carlo(s) en 1975 (dir. A. Lombard / I. Strasfogel, msc. N. Merrill), en 1997 (dir. P. Olmi, msc. S. Vizioli) et en 2006 (dir. Marco Guidarini, msc. G. Rueb sur un concept de R. Loy). C’est la version « de Milan » de 1884 qui a été choisie pour cette nouvelle production : en quatre actes, sans le ballet et le livret traduit en italien par Achille de Lauzières et Angelo Zanardini.
à écouter, à voir > Riccardo Muti, Chœurs et orchestre de La Scala de Milan, Daniela Dessi (Elisabeth), Luciano Pavarotti (Carlos), Luciana d’Intino (Eboli), Paolo Coni (Posa), Samuel Ramey (Philippe), EMI, 1992- version de Milan > Existe aussi en DVD – mise en scène de Franco Zefirelli –, EMI, 1992
Giuseppe Verdi Compositeur Fils d’aubergiste, il est né dans la province de Parme en 1813. Il apprend la musique avec l’organiste de son village et poursuit ses études à Busseto. Là-bas, il fait la connaissance d’Antonio Barezzi, musicien amateur et mécène. C’est avec son aide qu’il obtient une bourse lui permettant de parfaire son éducation musicale à Milan. En 1832, il échoue au concours d’entrée au Conservatoire. En 1839, il présente son premier opéra Oberto à la Scala de Milan. Il remporte un tel succès que Merelli lui offre un contrat pour trois autres ouvrages : Un giorno di regno (1840), Nabucco (1842) et I Lombardi (1843). Verdi est très productif dans les années qui suivent, il devient célèbre dans toute l’Europe et très populaire en Italie. Il enchaîne les ouvrages pour répondre à la demande : Ernani (1844), I due foscari (1844), Giovanna d’Arco (1845), Attila (1846), Macbeth (1847) et Luisa Miller (1849). Ses plus grands chefs d’œuvres datent de l’époque de son mariage avec la cantatrice Giuseppina Strepponi. On lui doit alors : Rigoletto (1851), Le Trouvère (1853), La Traviata (1853), Les Vêpres siciliennes (1855), Simon Boccanegra (1857) et Un Bal masqué. Son activité créatrice est ralentie les trente-cinq dernières années de sa vie. Il ne compose que 6 ouvrages : La Force du destin (1862), Don Carlos (1867), Aïda (1871), Requiem (1884), Otello (1887) et Falstaff (1893). Il meurt à Milan en 1901.
Biographies Daniele Callegari Direction musicale Originaire de Milan où il fait ses études musicales, il devient d’abord chef principal du Wexford Opera Festival, puis de l’Orchestre philharmonique d’Anvers. Il est régulièrement invité à diriger sur les scènes lyriques internationales. Il dirige Un ballo in maschera à Washington et Monte-Carlo, La Traviata à Dresde, Così fan tutte à Copenhague, Falstaff à Toulouse, Rigoletto à Tel Aviv, Il Trovatore au Met, Rigoletto et Madama Butterfly à l’Opéra national de Paris, La Bohème à la Fenice de Venise, Aida et Don Giovanni à San Diego, Madama Butterfly à Barcelone. Parmi ses prestations récentes figurent La Sonnambula à Bari, Falstaff à Montréal, Un ballo in maschera à Tel Aviv, Ernani à Monte-Carlo, Tosca à Venise, Don Pasquale à Pékin et La Bohème à Palm Beach. Entre autres projets figurent Don Giovanni et Falstaff à San Diego, Maria Stuarda au Théâtre des Champs-Élysées, I due Foscari à Santiago du Chili, Macbeth à Tel Aviv, Il Trovatore à l’Opéra de Paris, Attila à Monte Carlo et Aida à Barcelone. à l’OnR, il a dirigé Les Huguenots en 2012, Tosca en 2013 et Ariane et Barbe-Bleue de Dukas en 2015.
Robert Carsen Mise en scène Né au Canada, il a réalisé à l’invitation de Marc Clémeur à l’Opéra de Flandre des cycles Janáček et Puccini. Il est invité par toutes les scènes lyriques internationales. Ses productions comprennent Dialogues des carmélites, Les Fêtes vénitiennes, Platée (à l’Opéra Comique), Die Zauberflöte (Baden-Baden et Paris), Don Giovanni, Falstaff , The Turn of the Screw (Vienne), L’Amour des trois oranges (Berlin), Ariadne auf Naxos (Munich), Rinaldo, Le Couronnement de Poppée à Glyndebourne, Iphigénie en Tauride (San Francisco, Londres et Madrid), La Traviata (Venise), le Ring de Wagner (Cologne, Venise, Shanghai, Barcelone). Il met en scène des comédies musicales telles que Candide, My Fair Lady et Singin’in the rain au Châtelet, à Moscou, à la Scala de Milan… À l’OnR, il a mis en scène Richard III de Giorgio Battistelli (2009), un cycle Janáček, La Bohème, Tosca, Rigoletto et La Dame de pique (juin 2015).
Prolongements pédagogiques Arts du langage > Livret élaboré d’après le drame de Friedrich Schiller Don Carlos, en langue française > Relation triangulaire entre les personnages d’Elisabeth, Philippe et Carlo > Thèmes : amours impossibles, drame passionnel, jalousie, mort et trahison > Le rôle d’Elisabeth (sacrifice, attitude héroïque) > Verdi et le thème de la liberté et des nationalismes > Le Sturm und Drang
Histoire > Opposition des pouvoirs temporel et spirituel > Puissance politique de l’Espagne du temps d’Elisabeth de Valois et Philippe II, le soulèvement des Pays-Bas contre l’Inquisition > Réforme et contre-Réforme (paix d’Augsbourg en 1555 : cujus regio, ejus religio) > Puissance de l’Inquisition contre celle du pouvoir > L’époque de Philippe II d’Espagne et les prémices de la monarchie absolue en France
Discussions, débats > Autour du despotisme, de l’obscurantisme et du fanatisme
Arts du son > Le grand opéra français : drame historique et histoire d’amour > Structure musicale et structure dramatique : musique étroitement liée au sens du texte, discours presque continu > Lyrisme et écriture vocale chez Verdi > Orchestration : effets de couleur et d’éclairage > Parallèle avec l’acte I de Tristan und Isolde de Wagner > Le plain-chant > Chanter l’hymne espagnol > écouter un extrait du Requiem > La musique à l’époque de Charles Quint et François 1er
Arts visuels, Arts de l’espace > Imaginer, élaborer des maquettes ou des planches en fonction des différents tableaux décrits dans le livret (forêt de Fontainebleau, Cloître d’un monastère, etc.) > Représentations d’Elisabeth de Valois et de Philippe II (par exemple au musée du Prado) > Paris au XIXe siècle, du temps de Verdi
Thème transversal > La représentation du pouvoir