La revue de Palais des Thés
Numéro 82
Printemps 2021
II
ÉDITORIAL
Révolution de Palais ! C’est avec une grande joie que nous vous dévoilons ce numéro 82. Bruits de Palais change et se présente désormais sous un nouveau format. Il s’enrichit de nombreuses rubriques. Depuis 1994, Bruits de Palais vous informe et vous raconte un peu de ce qu’est notre vie, à nous passionnés, qui allons chercher les plus beaux thés dans des pays souvent éloignés.
François-Xavier Delmas Fondateur de Palais des Thés
En couverture
Tout juste cueillies, ces fleurs de jasmin seront mêlées aux feuilles de thé dans quelques heures. Ci-contre
Certains jardins de thé, lorsqu’ils sont à flanc de montagne, ont des pentes extrêmement raides et rendent la cueillette parfois acrobatique. Ici au Népal.
À l’origine simple feuillet en noir et blanc imprimé avec les moyens du bord, Bruits de Palais a évolué au fil des années, il a pris des couleurs et de l’épaisseur. Bruits de Palais vous a annoncé l’arrivée de nouveaux thés et la découverte de régions inexplorées. Bruits de Palais vous a fait voyager, à la rencontre des fermiers et des artisans qui nous sont chers. Bruits de Palais vous a appris à apprécier le thé et ses Grands Crus au gré de dégustations. Bruits de Palais vous a aussi invités à utiliser le thé comme un ingrédient à part entière dans la cuisine. Bruits de Palais vous a fait découvrir de nombreuses facettes du monde du thé, et pourtant, il reste encore tant à arpenter ! Voici venu le temps de vous proposer une revue encore plus instructive et pédagogique, qu’il s’agisse d’histoires, de photos, de voyages. Nos racines ne changent pas, nous avons toujours pour mission de révéler le meilleur du thé au plus grand nombre et nous souhaitons, plus que tout, transmettre notre passion pour cette boisson. Être à vos côtés et vous guider dans votre découverte, dans vos pratiques, tels sont nos vœux les plus chers. Avec cette nouvelle édition, nous voulons vous emmener plus loin, partager davantage nos métiers et tout ce que nous avons la chance d’apprendre. Nous donnerons ainsi la part belle aux pérégrinations de nos chercheurs de thé, aux coups de cœur de nos tea sommeliers, aux connaissances de nos experts. Nous ouvrirons nos pages à d’autres passionnés de thé, fins connaisseurs ou spécialistes de tel ou tel aspect de notre boisson préférée. Nous vous ferons part de nos combats et de nos engagements, ceux d’une équipe et d’une entreprise conscientes de leur rôle et de leurs responsabilités. Une page se tourne donc et nous espérons que vous prendrez autant de plaisir à parcourir cette revue que nous en avons pris à la concevoir pour vous.
Numéro 82 • Printemps 2021
SOMMAIRE C A R N E T D E VOYAG E
PLANÈTE THÉ
C U LT U R E T H É
Par L éo Per r in
Adoptons la refill attitude
Les secrets du théier
14
20
Dans les forêts de Thaïlande 6
Le bilan carbone d’une tasse de thé 18
UN THÉ, UN TEA SOMMELIER
DU THÉ EN CUISINE
R AC O N T E Z- M O I
Par Manuel a L er iche
Carottes et crumble aux noisettes au Thé des Lords
Par Bénédicte Bor toli
La dégustation du Qingjing Oolong 26
L’histoire du thé et du cacao 30
28
T H É D ’ E XC E P T I O N
ÉBRUITÉ
Les Perles de Jasmin, un savoir-faire ancestral
Toute l’actualité du Palais 34
32
CONTRIBUTEURS
Léo Perrin
Bénédicte Bortoli
Manuela Leriche
Léo parcourt les plantations de thé pour sélectionner les meilleurs crus et transmet avec passion le fruit de ses voyages et de ses rencontres.
Éditrice, Bénédicte est également auteure de beaux-livres consacrés à la gastronomie. Elle prête souvent sa plume à des chefs.
Tea sommelier, Manuela apporte son expertise et sa connaissance des thés dans une approche pédagogique et décomplexée.
6
CARNET DE VOYAGE
7
Dans les forêts de Thaïlande Depuis plusieurs mois, différentes pistes pour trouver de nouveaux producteurs en Thaïlande se dessinaient. Suite à une rencontre fortuite et dans l’idée d’enrichir notre sélection de thé du Triangle d’or, je suis parti à la recherche des plus belles feuilles Par Léo Perrin dans les montagnes thaïlandaises.
D
epuis l’avion, les montagnes se dévoilent une à une. Je vois les maisons traditionnelles akha, les rizières en escalier, la forêt épaisse et j’imagine les animaux qu’elle abrite, les arbres qui la peuplent. Nous atterrissons brusquement sur la piste. Me voilà à Chiang Mai, la « rose du Nord », deuxième plus grande ville de Thaïlande (si l’on considère l’agglo mération de Bangkok comme une seule ville) bien que cinquante fois moins peuplée que la capitale. Après quelques formalités administratives à l’aéroport, je rejoins la vieille ville fortifiée. Je passe devant de nombreux temples bouddhistes, souvent blancs, parfois dorés. La tradition anime la ville, les jeunes bonzes aux robes safran s’amusent, les mets délicats des vendeurs ambulants parfument les rues. Retrouver cette atmosphère m’émeut à chacun de mes voyages. À peine ai-je débarqué que ma quête commence. Tout d’abord, je rejoins Kim qui m’attend dans un café de la ville. Kim est une jeune Thaïlandaise rencontrée par l’intermédiaire d’un producteur chinois. Elle connaît bien la région et pourra orienter mes recherches. Après quelques présentations et politesses d’usage, Kim me délivre de précieuses informations sur des personnes qui pourraient me mener à des thés d’exception. « Il y a peut-être quelqu’un du côté de Phayao, me souffle-t-elle. Je peux retrouver son contact et te le donner. Je ne suis sûre de rien, car c’est une très ancienne région productrice de thé qui, aujourd’hui, ne compte plus de manufactures actives. » Puis elle ajoute : « Il y a aussi Edward que tu connais sans doute déjà du côté de Wawee. Tu devrais aller le voir ! »
Un fermier atypique
Chatchanamongkol dans la plantation de théiers sauvages à Phayao
Le lendemain de mon arrivée sur le sol thaïlandais, après un rapide coup de téléphone à Chatchanamongkol, un producteur de Phayao, pour lui annoncer ma venue, j’embarque dans un bus local, en direction de cette région qui m’est encore inconnue. En Thaïlande, et plus particulièrement dans le Triangle d’or, le bus est mon moyen de locomotion préféré. Bien qu’inconfortable, il emprunte des routes qui témoignent de la vie locale. On y voit défiler des villages dotés d’un charme sans artifice, on y croise des peuples qui vivent près des routes, on y découvre des métiers oubliés de l’Occident. On y sent la flore locale, les plats mijotant pour les voyageurs, l’odeur de la pluie après la mousson. Cinq heures de route sont nécessaires ce jour-là pour arriver à destination. Chatchanamongkol arrive accompagné de sa compagne et de son père. Il veut me faire visiter ses jardins de thé. Serrés dans une Jeep, nous traversons les reliefs. Entre deux secousses, il m’explique qu’il a plusieurs métiers : producteur de thé, potier et facteur !
CARNET DE VOYAGE
Une fois le véhicule garé au cœur de la forêt, nous partons à pied découvrir la plantation. Le lieu est splendide, le potentiel est fabuleux. Les théiers poussent librement à flanc de montagne, abrités par la canopée tropicale. L’environnement est d’une pureté remarquable, les papillons semblent flâner, les oiseaux aux plumages chatoyants sifflent, l’air est frais. Les plants des théiers que j’observe sont anciens, les racines solidement ancrées dans la terre. Je m’imagine fouler l’éden qui abrite les feuilles convoitées. Nous continuons notre marche, je rêve déjà à l’idée de goûter la liqueur de ce jardin. Tout à ma joie et à mon enthousiasme, j’en oublie presque de poser à mon guide les questions essentielles : « Combien de kilos produis-tu par an ? − Environ un à deux. − Une à deux tonnes, c’est ça ? − Non, un à deux kilos. − Mais tu es vraiment producteur de thé ? − Oui ! J’ai trouvé ce jardin abandonné dans la forêt. Je récolte parfois quelques feuilles, j’en fais un thé à la maison. Je produis ce kilo de mes mains. Donc je suis producteur, non ? » Le métier de chercheur de thé, c’est aussi cela. Avant de trouver, nous cherchons, encore et encore, sans certitudes ni garanties. Ce n’est pas un échec, mais avant tout une étape, parfois déroutante et un peu surprenante, dans cette quête merveilleuse de l’exceptionnel. Mon bus pour revenir à Chiang Rai ne passant que le lendemain matin, je reste toute la soirée avec cette famille d’une grande gentillesse. Chercher du thé, c’est aussi partager des moments avec ces hommes et ces femmes qui nous accueillent et nous offrent un peu de leur vie.
Rencontre avec Edward à Wawee Il est temps désormais de rejoindre Chiang Rai, point de départ pour me rendre à Wawee, où je souhaite retrouver Edward, un fermier que j’ai rencontré trois ans plus tôt. Comme chaque année, je me rends dans le centre-ville, chez le loueur de deux roues, non loin de la monumentale et clinquante Tour de l’horloge. Cette fois, j’emprunterai la route du Sud, pour découvrir de nouveaux paysages et… d’étonnantes spécialités locales ! Dans l’une des nombreuses gargotes qui longent la route, je goûte au menu du jour : omelette de larves de fourmis. Un festin protéiné ! Enfin, arrivé à Wawee, je retrouve Edward dans sa grande manufacture. C’est par hasard que j’avais fait sa connaissance en me promenant dans ce petit village multiethnique.
LE TRIANGLE D’OR, BERCEAU DU THÉ Le nord de la Thaïlande,
et plus largement le Triangle d’or (sud de la Chine, Thaïlande, Myanmar, Laos, Vietnam), serait le berceau originel du thé. Cette zone montagneuse de plusieurs milliers de kilomètres est peuplée de différents groupes ethniques qui ont domestiqué le théier depuis des milliers d’années. Ces ethnies, telles que les Palaung, les Lahu, les Lisu ou les H’mông, traversent les reliefs et s’établissent en communautés, apportant la culture du thé d’une montagne à l’autre. C’est à ces peuples, trop longtemps restés dans l’ombre et écartés de l’histoire du thé, que nous devons les exquis parfums qui s’échappent de nos tasses.
8
9
CARNET DE VOYAGE
10
Un jardin de théiers, laissé à l’abandon à Phayao, accessible après quelques kilomètres de marche en traversant une épaisse forêt
11
12
CARNET DE VOYAGE
Attiré par une odeur de feuilles de thé fraîches, j’étais revenu sur mes pas, curieux de découvrir la source de ces parfums. Edward s’était montré peu intéressé par l’export de son thé, pourtant délicieux. L’année de notre rencontre et la suivante, il n’a pas souhaité travailler avec l’Europe, préférant commercer avec la Chine comme son père le faisait avant lui. À cette époque, il m’avait cependant expliqué la complexité du marché chinois. La proximité de Wawee avec la frontière chinoise a attiré beaucoup d’acheteurs chinois peu scrupuleux venant se procurer du thé thaïlandais pour le mélanger à leur propre thé ou le vendre directement en Chine sous une fausse appellation. Ce système, bien que profitable pour certains, ne permet aucunement à la Thaïlande de bénéficier de la renommée de ses thés et octroie à d’autres une gloire non méritée. Une réelle frustration se fait ressentir depuis quelques années dans ce pays, ainsi que dans les autres régions d’Asie du Sud où cette pratique est courante. Prévenu par Kim de ma présence sur le territoire, Edward n’est pas surpris de me voir dans son village. Il m’invite chaleureusement à m’asseoir dans sa magnifique salle de dégustation où il pratique le Gong Fu Cha sur de très beaux plateaux sculptés à la main. Edward est né en Thaïlande de parents chinois. Ses aïeux faisaient partie des nationalistes qui ont fui la Chine de Mao dans les années 1950 pour s’installer au Myanmar, dans l’idée d’organiser la résistance. Chassés de ce pays dix ans plus tard, certains ont décidé de s’installer en Thaïlande, notamment à Mae Salong 1,
La Thaïlande regorge de trésors cachés.
À Wawee, Edward devant son théier de 400 ans
CARNET DE VOYAGE
13
La manufacture de thé d’Edward à Wawee, où sèchent les feuilles de thé dans de grands plateaux.
* Mao Cha de Wawee 2017 → Réf. 3211 – 38 € les 100 g (quantités limitées)
** Deang Wawee → Réf. 3212 – 32 € les 100 g (quantités limitées)
non loin de Wawee, où nous achetons déjà du thé depuis de nombreuses années. Quelques-uns sont ensuite partis vivre dans les villages environnants. Le thé se prépare donc, comme dans le Yunnan, avec un gaiwan et quelques tasses. On fait généreusement déborder le thé, l’eau s’écoule dans un seau sous la table, on enchaîne les tasses jusqu’à atteindre l’ivresse théinée. Après quelques litres de thé partagés, Edward m’explique qu’il pensait que c’était trop compliqué d’exporter son thé en Europe. Cependant, cette année, la pandémie empêchera les Chinois de venir le voir. Il a donc décidé de franchir le pas et souhaite travailler avec moi et vendre son précieux thé en France. Cela lui permettra également de le voir vendu sous son nom et celui de son pays, la Thaïlande. Après trois longues années, Edward accepte enfin de mettre en place cette collaboration tant attendue. Mais pour quels thés ? Ensemble, nous dégustons plusieurs crus et deux d’entre eux retiennent particulièrement mon attention. Tout d’abord, un splendide Mao Cha de 2017 * aux effluences miellées et abricotées ainsi qu’à la longueur florale enivrante. Puis, séché sur les paillasses en plein soleil, un splendide thé noir ** aux grandes feuilles torsadées, à la fois corsé et boisé. Nous visitons ensuite son jardin. Ici, comme souvent en Thaïlande, la taille des théiers n’est pas régulière et ne forme pas de tables de cueillettes. Les théiers sont plantés sans vraiment respecter de distance entre chaque plant. Les troncs sont épaissis par le travail de l’homme et les ramures taillées en de grosses sphères asymétriques. Le plus vieux théier d’Edward aurait 400 ans et il est vrai qu’il paraît tout petit à côté de ce géant feuillu. La Thaïlande regorge de trésors cachés. Lors de ce voyage, ce territoire fabuleux m’aura encore livré de sublimes surprises. Qu’ils soient Thai, Han, Lahu, Akha ou Palaung, les peuples qui constituent la force de ce pays réalisent des thés de qualité que nous continuerons d’aller chercher pour ravir le palais des amateurs. De ces plantations et de ces mains, nous pourrons toujours espérer de très belles dégustations pour les mois, les années et les décennies à venir.
•
1. Voir l’article Les thés de Mae Salong du Bruits de Palais numéro 44.
PL ANÈTE THÉ
14
ADOPTONS LA REFILL ATTITUDE Pratiquée de tout temps, la vente de denrées alimentaires non emballées participe aujourd’hui aux nouveaux modes de consommation favorisant la réduction du gaspillage alimentaire et des déchets d’emballages jetables. Le vrac est aussi une évidence pour le thé.
D
epuis quelques années, le vrac connaît un véritable essor, sous l’impulsion notamment du Réseau Vrac, créé en 2016, et du mouvement Zéro Déchet, ainsi que de consommateurs toujours plus responsables. L’achat en vrac consiste à acheter des produits sans emballage ou avec peu d’emballage et de les conserver dans des contenants réutilisables et durables. Il s’inscrit dans une tendance de fond. En 2019, 88 % des magasins bio et 70 % des enseignes de la grande distribution disposaient d’un rayon de vente en vrac. Le vrac : une approche vertueuse et pérenne La réduction des déchets, et notamment de ceux en plastique, est une préoccupation importante pour la grande majorité de la population qui prend conscience des enjeux écologiques auxquels nous devons tous faire face. Acheter en vrac et réutiliser des contenants est un moyen efficace de produire moins de déchets et d’alléger nos poubelles en emballages polluants. Le vrac permet aussi de choisir la bonne quantité et donc d’éviter le gaspillage alimentaire. Chaque année, un Français jette en moyenne 29 kg de denrées alimentaires dont 7 kg de produits encore emballés. Se procurer la juste quantité est une bonne solution pour réduire considérablement nos déchets et adopter une consommation plus responsable.
173
kg de déchets d’emballages produits par chaque ménage européen tous les ans*
5 550
tonnes d’emballages économisées par le vrac, en 2023, dans l’Union ** Européenne
ET LES SACHETS ? Aux États-Unis, en 1908, Thomas Sullivan
a l’idée d’envoyer le thé à ses clients dans des sachets de soie, moins onéreux que les boîtes en métal utilisées à l’époque. C’est donc par souci économique et pratique qu’est né le sachet de thé. En 1929, l’Allemand Adolf Rambold ajoute au sachet une ficelle pour rendre son utilisation plus aisée. Cette invention a révolutionné le monde occidental du thé. Le sachet de thé s’est ensuite répandu sur toute la planète pour finalement devenir une norme. Si la mousseline en coton vous permet de transporter et d’apprécier vos thés préférés en dehors de chez vous, à l’hôtel par exemple, dès que les conditions le permettent, passez-vous de ces sachets superflus et préférez un thé en vrac !
Si 40 % des Français achètent en vrac, ce type de consommation ne représente aujourd’hui que 0,75 % du marché national.*** * Sources page 38
15
ENGAGÉS À NOS CÔTÉS
ENGAGÉS À NOS CÔTÉS
16
PL ANÈTE THÉ
17
La refill attitude : un engagement pour la planète Historiquement, le thé a toujours été vendu en vrac, à la pesée. Il fait partie des denrées qui se prêtent particulièrement bien à ce type de vente. C’est une matière solide et sèche qui, conservée dans de bonnes conditions, peut se garder plusieurs mois. Le thé en vrac permet également de préserver les feuilles entières, ce qui est un gage de qualité. Soucieux de réduire drastiquement les emballages produits et mis sur le marché, Palais des Thés encourage pleinement la consommation de thé en vrac et la refill attitude. De l’anglais refill, « recharger » ou « remplir de nouveau », l’expression refill attitude désigne chez Palais des Thés la possibilité de remplir directement, en boutique, ses boîtes avec du thé en vrac, sans emballage superflu. Cette pratique écoresponsable incite les clients à revenir avec leur propre contenant pour n’acheter que l’essentiel : le thé.
Pour une conservation optimale du thé Palais des Thés nous invite à offrir une seconde vie aux boîtes dont nous disposons à la maison, pour les remplir avec nos thés préférés. Il faut cependant respecter quelques règles simples : une boîte opaque, car à la lumière, le thé pourrait non seulement se dessécher mais aussi perdre sa couleur et ses parfums, et hermétique pour protéger le thé des odeurs et éviter toute oxydation. Il faut également le conserver au sec pour qu’il ne moisisse pas au contact de l’humidité. Et le contenant doit bien sûr être propre et inodore afin que le thé n’absorbe pas d’odeurs parasites. Ce peut être aussi l’occasion de s’offrir une ou plusieurs belles boîtes à choisir dans la large collection de Palais des Thés, du simple étui en métal à quelques euros au très bel objet en écorce de cerisier. Il ne reste plus alors qu’à remplir ces contenants, en boutique, avec l’aide des experts. Sans oublier le bonheur de pouvoir sentir le thé en vrac dans les grosses boîtes accueillant plusieurs kilos de feuilles : voyage garanti à chaque ouverture !
•
DES ÉCRINS PRÉCIEUX POUR DES THÉS D’EXCEPTION Palais des Thés cultive l’art du beau et propose une collection de boîtes washi spécialement destinées aux thés rares et éphémères. Le mot washi signifie « papier japonais ». Ce papier est fabriqué de façon traditionnelle au Japon depuis le viie siècle. Il est constitué de longues fibres de mûriers à papier, ce qui lui confère à la fois légèreté, souplesse et résistance. En 2014, cet artisanat traditionnel a été reconnu comme patrimoine culturel immatériel de l’humanité par l’Unesco. Avec leur double couvercle hermétique, les boîtes washi Grand Cru sont idéales pour la conservation des plus beaux thés. Leur décor est inspiré du kintsugi (« jointure en or »). Cette méthode traditionnelle japonaise consiste à réparer des porcelaines et des céramiques brisées à l’aide de laque d’or. Cet art est souvent pris comme symbole de la résilience et de l’acceptation de l’imperfection. Boîte de 100 g → Réf. V2030B – 14 € Boîte de 150 g → Réf. V2030C − 17 €
PL ANÈTE THÉ
18
Le bilan carbone d’une tasse de thé
nne ye
m
oyenne
-30
co2
₂
CO
m
m es de
2/ Manufacture
Emballage du thé (transport jusqu’au grossiste) Emballage (vendeur final)
3 ,3
g
mme
-30
3/ Transport et commerce
nne ye
ra
Engrais et récolte mécanique Moyenne
0
co2
mo
g
,3 Le théier est un arbuste ra mme de qui vit de 50 à 80 ans. Tout au long de sa vie, il stocke du carbone dans ses racines, ses branches, son feuillage. Dans la mesure où seules quelques feuilles sont récoltées régulièrement sur chaque rameau et que cette cueillette ne fait pas mourir la plante, le théier, comme tous les autres arbres, agit comme un puits de carbone. Son bilan est donc négatif. À l’échelle d’une tasse, cela représente environ 30 g de carbone capturé.
5,6
g ra
ra Comme pour toutes mme de les cultures, l’utilisation 1,4 d’engrais engendre des Culture émissions de gaz à effet de biologique serre, qui varient en fonction et récolte des pratiques (bio ou engrais manuelle La cueillette est Le chimiques). théier l’autre source d’émissions. Selon qu’elle est manuelle ou mécanique, elle peut modifier beaucoup cette première étape du bilan. g
Récolte
2
co2
Culture 1/ Culture et récolte
mo
Le thé est globalement économe en gaz à effet de serre. Il est même la boisson la moins carbonée, avec un bilan moyen de 19 g de C02 par tasse. Voici comment ce bilan se décompose, de la cueillette à la tasse, pour mieux comprendre comment vous pouvez agir, en tant que buveurs de thé, et le rendre plus favorable.
de
Manufacture Lors de cette étape, c’est la méthode de séchage des feuilles 12,2 2,1 4/ Préparation qui a le plus d’impact carbone. Un séchage au soleil ou dans des machines activées grâce aux énergies renouvelables type éolienne a bien sûr un effet moindre sur le réchauffement global. Si le bois sert de carburant, le bilan carbone est neutralisé : la consumation du bois libère du CO2, mais le stockage des bûches, la replantation d’arbres et la retombée des cendres dans le sol capturent du CO2.
15
142
m
CO
g ra
-30 m es de
PL ANÈTE THÉ
19
2/ Manufacture
₂
nne ye
ra
e
₂
CO
₂
CO ₂
CO
m es de
Eau minérale et bouilloire électrique
Enfouissement ₂
CO
g ra
g
₂
CO
g ra
m es de
D’après « Tea’s m Footprint Carbon m s d e? »:, Saint oueSinner septembre 2009, étude de Nigel Melican de la société de consulting Moyenne en thé Teacraft.
6,5
g ra
6,5
du champ au magasin de détail
9,6 Moyenne
₂
-8,3 19 142
m
₂
9,6
142
CO
15 Eau du robinet et cuisinière à gaz
Dans la plupart des pays de la planète, l’enfouissement m déchets des m e s d e reste la manière la plus usitée pour s’en ra e d mme débarrasser. La mise en décharge du thé, mais surtout de son emballage s’il est conditionné en sachet, produit yenneà effet de serre (gaz carbonique et méthane). desMogaz Bilan carbone (info transversale) co2
31
m
Moyenne
Bilan carbone (info transversale) du champ au magasin de détail
Moyenne
m
2,3 0,3
CO
9,6
m es de
142
g ra
mo
nne ye
m
g ra
g ra
5/ Enfouissement
0,8 Moyenne
-8,3 19 142
m es de
Le bilan carbone du thé en vrac est dix fois inférieur à celui du sachet de thé.
142
g
mme d Le choix de l’eau, la manière dont on la fait chauffer et tout ce qui relève de la préparation du thé font de celle-ci l’étape la plus émettrice5/ deEnfouissement CO2. Elle représente 12,2 2,1 4/ Préparation en moyenne à elleoseule plus des deux tiers des e n y n e M émissions de votre tasse de thé. En ne chauffant que la quantité d’eau nécessaire, vous pouvez donc limiter votre impact de manière significative.
Le bilan global d’une tasse de thé
15
co2
2,3 0,3
mo
Emballage du thé (transport jusqu’au grossiste) Préparation 31 Emballage (vendeur final)
m es de
₂
₂
CO
g ra
m es de
31
12,2
g ra
g
m
m
-8,3 19 142
Moyenne
mme de
2,1
Le transport du thé en bateau est bien évidemment inférieur au transport par avion, deux à trois fois plus défavorable du point de vue des émissions. Les caisses et autres emballages constituent également une autre source de CO2.
0,8
3,4
ra
m
CO
₂
4/ Préparation
co2
mo
nne ye
3,3
0
CO
m es de
g ra
g ra
m
3/ Transport et commerce
15
₂
₂
CO ₂
Emballage du thé (transport jusqu’au grossiste)en Moy ne Emballage (vendeur final)
3,3 Transport et commerce
0
12,2
,3
* Donnée issue de Edeni.fr (en ne faisant bouillir que la quantité d'eau nécessaire).
2/ Manufacture
Moyenne
2,1
-30
CO
CO
₂
g
co2
mo
-30
Moyenne
300
250
g ra
19
(transport jusqu’au grossiste) ur final)
2
m es de
m m cycle de Le bilan m carbone permet de calculer l’impact du e vie d’un bien, d’un ingrédientm e s d e e s ddans m e s d esur l’émission de gaz à effet de m ou d’une activité serre l’atmosphère. Il est exprimé en équivalent carbone. Dans un bilan carbone, il est pertinent de comparer la puissance de nuisance de chacun des gaz à effet de serre.
nne ye
mme de
m
0
Transport et 200 commerceMoyenne
,3
m es de ra
-30 g ra
g ra
m
Le théier
3/ Moyenne 150
g ra
-30
100
50
grammes de CO2 pour 25 centilitres
CO
*
Moyenne
m es de
5,6
1,4
g ra
0
g ra
1,4
m
5,6
₂
Bilan carbone comparatif des principales boissons
CO
1/ Culture et récolte
CO
2
Moyenne
Moyenne
m es de
CULTURE THÉ Ces femmes, qui récoltent les feuilles à la cime de théiers sauvages, appartiennent à la communauté Dao, au Vietnam.
20
21
CULTURE THÉ
Les secrets du théier Le théier, cet arbre natif d’Asie du Sud-Est, dont l’aire d’origine serait située dans la région à la frontière entre le Laos, la Chine et le Myanmar, n’est véritablement cultivé qu’au ive siècle lorsqu’il est domestiqué par les Chinois et que les premières plantations voient le jour dans le Sichuan.
CULTURE THÉ
22
CULTURE THÉ
23
L
e théier (Camellia sinensis ou Thea sinensis, « camélia chinois ») est un arbuste à feuille persistante de la grande famille des Théacées. Il est un cousin du camélia de nos jardins et comporte trois variétés principales : celle originaire de Chine, dite sinensis, et dont la feuille est petite et vert-olive ; celle en provenance d’Assam, assamica, à la pousse large, claire et charnue ; et, plus rare, celle découverte au Cambodge, cambo diensis, qui n’est pas cultivée. Par phénomène d’hybridation spontanée ou déclenchée par l’homme, les trois variétés de Camellia sinensis ont donné naissance à de très nombreux hybrides. On recense ainsi aujourd’hui plus de cinq cents types différents de théiers, qui en sont issus, mais possèdent chacun des caractéristiques propres. Cépages, cultivar et terroirs À l’instar des différents cépages de vigne cultivés, certaines variétés de théiers sont mieux adaptées à la production de thé vert, d’autres à celle de thé noir, etc. On nomme les cépages du théier « cultivars », de la contraction du terme anglais cultivated variety. Ils sont le résultat d’une sélection, d’une hybridation (croisement entre deux espèces ou deux genres) ou d’une mutation spontanée dans le règne végétal. Mais, à l’inverse du secteur viticole, où les cépages ont fait l’objet d’expériences d’acclimatation hors de leur terroir d’origine qui ont débouché sur une relative mondialisation, les cultivars du théier ont pour caractéristique commune d’être souvent cantonnés à une zone donnée de culture. Cette régionalisation tient avant tout à l’absence de communication entre les différentes régions de thé du monde. Le peu de curiosité, voire le désintérêt, des planteurs à l’égard de ce qui se passe ailleurs n’encourage guère les expériences d’acclimatation, et il y a très peu de chances de rencontrer un même cultivar sur les pentes de Darjeeling et sur l’île de Taiwan. Cependant, quelques pionniers, notamment au Népal et dans certains pays d’Afrique, commencent, avec succès, à introduire des cultivars chinois ou japonais dans leurs plantations. L’autre point de comparaison du théier avec la vigne est sa grande capacité d’adaptation à des sols et à des conditions géographiques très divers. Il est ainsi légitime de s’interroger sur l’influence que le terroir est susceptible d’exercer sur les qualités organoleptiques d’un thé donné et donc sur l’existence de « thés de terroir ». On entend par « terroir » une étendue de terre présentant une homogénéité physique, originelle ou liée à des techniques
Cépage le plus répandu au Japon, le yabukita est reconnaissable par sa feuille longue et étroite, dressée vers le soleil.
UN PEU D’HISTOIRE Le théier aurait été découvert par les Chinois vers 2 700 avant Jésus-Christ. Selon un récit légendaire, Shen Nong, héros de la mythologie chinoise, aurait demandé à ses sujets de ne consommer l’eau que bouillie pour des raisons sanitaires. C’est ainsi que quelques feuilles de thé tombées dans son eau bouillante auraient fait succomber Shen Nong aux vertus de ce breuvage parfumé… La consommation de thé est, en fait, attestée en Chine depuis le viii e siècle avant notre ère. Les tout premiers Occidentaux à en découvrir l’existence sont les missionnaires et les grands voyageurs au xvi e siècle, mais ce n’est qu’au début du siècle suivant que le thé est véritablement introduit en Europe par l’intermédiaire des Hollandais.
CULTURE THÉ
24
culturales, et apte à fournir certaines denrées agricoles. Si l’on n’émet pas de doute sur l’influence de la composition physico-chimique du sol sur le théier, il est en revanche difficile de déterminer dans quelle mesure elle communique un caractère particulier au thé. Face à l’extrême cloisonnement qui règne dans le monde du thé et la très forte régionalisation des cultivars, il est donc difficile d’établir des comparaisons autour d’un même cultivar, produit selon des règles identiques, mais ayant poussé sur des sols différents. En outre, à la différence du vin – où la question des terroirs s’inscrit dans une démarche de recherche de qualité –, la très grande majorité du thé produit dans le monde échappe encore à cette approche et l’influence du terroir sur un thé donné n’est pas à ce jour une problématique émergente.
Ce qu’il faut au théier pour être heureux Le théier pousse dans les régions au climat chaud et humide, avec des pluies régulières, de préférence reparties sur toute l’année. Il croît entre le 42e degré de latitude Nord et le 31e de latitude Sud. La température moyenne optimale est de 18 à 20 °C, mais elle peut présenter d’importantes variations, notamment nocturnes. L’influence du climat agit à la fois sur le volume et la qualité de la récolte, qui sera souvent moindre si le climat trop humide. L’altitude favorise aussi la qualité du thé au détriment du rendement. En région tropicale, le théier peut être cultivé à une altitude allant du niveau de la mer jusqu’à 2 500 mètres. La lumière est également importante : elle est nécessaire à la formation des huiles essentielles qui donnent à l’infusion son arôme. Elle doit être de préférence diffuse. C’est pourquoi, dans une plantation, on trouvera presque toujours de grands arbres, plantés régulièrement, qui, tout en contribuant à équilibrer l’écologie du sol, tamisent les rayons du soleil. Le théier supporte mal les vents violents et pousse mieux dans une atmosphère calme et pure.
•
Quelques « cépages » stars YA B U K I TA
AV 2
C’est le cultivar de prédilection des planteurs japonais pour sa résistance aux températures basses et son parfum végétal et iodé. Il représente à lui seul environ 85 % des théiers plantés dans le pays. Aujourd’hui, d’autres cultivars sont utilisés au Japon (Sae-Midori, Oku-Hikari, Asatsuyu…), ce qui permet d’obtenir un éventail olfactif et aromatique plus large.
Utilisé dans les différentes régions de thé de l’Inde, ces deux dernières décennies, malgré son apparence un peu frêle, il a donné des résultats assez spectaculaires sur le plan organoleptique, notamment à Darjeeling. Il apporte, en effet, au thé un bouquet floral et zesté incomparable.
DA Y E
TTES12 « Grandes feuilles »
Il sert à la fabrication des Pu Er de Chine et c’est l’un des cultivars les plus odorants. Fraîches, ses feuilles évoquent le parfum d’un bouquet de freesia. En séchant, elles développent un parfum très animal avec des notes de cuir et d’écurie.
Ambari vegetative 2
Taïwanese Tea Experiment Station no 12 ou Jin Xuan
À Taïwan, il permet de produire certains Dong Ding. Grâce à ses notes beurrées et d’épices douces très intenses, avec parfois des arômes floraux prononcés d’ylang-ylang, on fait des thés étonnants pouvant évoquer le lait vanillé.
25
CULTURE THÉ
Par temps de forte chaleur, le théier apprécie l’ombre. On plante donc des arbres, ici des palmiers, au-dessus des théiers dans les zones géographiques pouvant être soumises à des températures caniculaires.
UN THÉ , UN TE A SOMMELIER
26
La dégustation du Qingjing Oolong « Cœur d’émeraude » est la traduction poétique de Qing Xin, le nom du théier utilisé pour confectionner le Grand Cru que je m'apprête à déguster. Ce Qingjing Oolong, superbe thé d’oxydation intermédiaire, provient du Yunnan. Sa fabrication est inspirée des Gao Shan Cha taïwanais, les célèbres « thés de hautes montagnes ». Pour révéler toute sa richesse gustative, il est préparé dans un gaiwan de porcelaine, selon la technique du Gong Fu Cha. Par Manuela Leriche
1. Humer les perles Tea sommelier chez Palais des Thés depuis 2016, Manuela Leriche a conseillé quotidiennement nos clients pendant plusieurs années dans nos boutiques parisiennes avant de se consacrer à la mise en valeur des thés d’origine, et notamment des Grands Crus, dont elle participe à la sélection et à la mise en vente.
2. Verser l’eau dans le gaiwan
Les perles vertes [1], tout juste sorties de leur boîte, délivrent des notes qui laissent présager une grande complexité aromatique. Dès qu’elles entrent en contact avec la porcelaine brûlante, elles exhalent un tourbillon de notes florales et beurrées. Pour « réveiller » les Oolong façonnés en perles, je procède toujours à un rinçage des feuilles, qui permet d’entrouvrir les rameaux, sans altérer les parfums les plus fragiles. Ce rinçage est extrêmement rapide : l’eau doit être reversée immédiatement. Les infusions suivantes ne dureront, elles aussi, que quelques secondes, le temps d’une respiration. Une fois cette préparation terminée, en un mouvement circulaire et énergique, je verse l’eau bouillante dans le gaiwan (« bol à couvercle ») [2] . Les feuilles se mettent en mouvement et dansent dans la tasse. En un instant, l’eau se teinte discrètement, et le thé est prêt à être versé dans la tasse pour être dégusté [3]. Le Gong Fu Cha peut symboliser les différents âges de la vie. La première infusion est à l’image de la jeunesse : les
UN THÉ , UN TE A SOMMELIER
27
parfums f loraux, impétueux et éclatants, se libèrent vivement, presque impulsivement. La liqueur est jaune diaphane, la texture est douce et légère comme la soie, et pourtant les notes sont très intenses. Lors de la deuxième infusion, l’eau se teinte à peine plus mais les sensations gustatives ont déjà évolué. La texture se densifie et les notes beurrées s’installent. J’aime particulièrement la troisième infusion au cours de laquelle le thé atteint sa maturité [4]. Il est à son apogée aromatique. Les parfums sont puissants, à la fois floraux, amandés, beurrés et vanillés.
4. Déguster la liqueur
3. Verser le thé dans la tasse
La texture s’amplifie, pour devenir infiniment onctueuse. Le thé déploie toute sa complexité dans un parfait équilibre. La quatrième infusion, dense et expressive, dévoile des parfums harmonieux, mêlant au bouquet de fleurs blanches des notes fruitées et pâtissières. Les tanins finement veloutés prolongent le goût. Je continue jusqu’à la septième infusion.Désormais, la liqueur est dorée, plus foncée mais toujours éclatante. La
texture se poudre davantage. Les parfums entremêlant les fleurs et les épices se parent de mystère. Le Grand Cru se révèle avec la mesure et l’élégance des vénérables. Les infusions se poursuivent. Le Gong Fu Cha fait apparaître à chaque infusion l’éclat éphémère et absolu de chacun des parfums de ce thé aux ressources inépuisables. Je termine cette dégustation en musique, avec la Mélodie hongroise D.817 de Schubert, dont la progression cyclique entre en résonance avec les notes furtives et répétitives du Qingjing Oolong. Puis le thé s’éteint lentement, après un chant du cygne exprimant une ultime fois des parfums de lys et de pivoine. Bientôt, les parfums s’évanouissent, laissant place aux souvenirs.
•
Qingjing Oolong Grand Cru Cultivar Qing Xin Producteur Monsieur Yang Origine Gaoligong Shan
(Chine, Yunnan)
Altitude 2 300 mètres Récolte septembre 2020 Conseils de préparation → En théière
90 °C/195 °F 5 minutes
→ Au Gong Fu Cha
95 °C/200 °F 5 infusions de quelques secondes Accords gourmands une crème caramel, des financiers ou du chocolat blanc → Réf. 2775 – 35 € les 100 g
DU THÉ EN CUISINE
28
Carottes et crumble aux noisettes au Thé des Lords Les notes douces des carottes et le croquant des noisettes s’accordent parfaitement avec le Thé des Lords, un très bel Earl Grey au parfum de bergamote bien prononcé.
Pour 4 personnes 8 carottes avec les fanes 1 cuil. à soupe d’huile d’olive 1 cuil. à soupe de Thé des Lords Pour la pâte à crumble 30 g de beurre doux froid 30 g de parmesan râpé 30 g de noisettes en poudre 30 g de farine de sarrasin 1 cuil. à café de Thé des Lords 1 pointe de sel Pour la vinaigrette 1 cuil. à soupe d’huile d’olive 1 cuil. à café de vinaigre de vin 1 cuil. à soupe de jus d’orange 1 cuil. à soupe de sirop d’érable
Thé des Lords → Réf. 802 − 8,70 € les 100 g
Dans une grande casserole d’eau bouillante salée, faites cuire 10 minutes les carottes épluchées (vous pouvez conserver 2 branches de fanes lavées). Égouttez-les et coupez-les en deux dans la longueur Faites chauffer une poêle avec l’huile d’olive. Ajoutez les carottes et le thé. Faites cuire à feu moyen 5 minutes. Ajoutez les fanes coupées et laissez cuire 2 à 3 minutes. Préparez la pâte à crumble
Mettez tous les ingrédients dans un gros bol et malaxez-les pour obtenir une pâte proche du gros sable. Préchauffez le four à 180 °C (th. 6). Répartissez la pâte sur une plaque de four. Enfournez 20 minutes pour qu’elle soit bien dorée. Préparez la vinaigrette
Émulsionnez tous les ingrédients. Déposez les carottes chaudes dans un plat, arrosez-les de vinaigrette, émiettez le crumble et disposez les fanes (facultatif).
Conseil de dégustation Pour gagner du temps, vous pouvez préparer et cuire la pâte à crumble la veille, puis réchauffer le plat le jour même. Les carottes peuvent être remplacées par des panais qui apporteront une touche de noisette et une petite note épicée.
29
R ACONTE Z-MOI
30
L’histoire du thé et du cacao Du thé et du cacao, on a tant écrit la petite et la grande histoire, discuté les origines, convoqué les légendes, que ces deux denrées font autant partie de notre patrimoine littéraire que gastronomique ! Par Bénédicte Bortoli
Dégustés sous forme de boissons dès le deuxième millénaire avant Jésus-Christ, respectivement par les Chinois et les Olmèques, le thé et le cacao sont arrivés en Europe, et sur notre territoire, à la même époque. Retrouvons-les, en France, au xviie siècle, où, introduits à la cour, ils reçoivent un accueil différent. Une passion française ?
Carmontelle (1717-1806). Mme la Marquise de Montesson, Mme la Marquise du Crest et Mme la Comtesse de Damas, 1773 [détail]
C’est au début du xviie siècle que les premières briques de thé, utilisées à Java comme monnaie d’échange contre de la sauge et de la bourrache par des Hollandais, sont importées en Europe. Le thé est alors considéré essentiellement comme une boisson aux vertus médicinales. Mazarin en buvait pour soigner sa goutte, Louis XIV pour prévenir vapeurs et vertiges, et Madame de Sévigné pour guérir « tous ses maux ». Nous sommes bien loin de
R ACONTE Z-MOI
31
l’image sophistiquée qu’on lui prêta par la suite. Réservé à la cour et à cet usage thérapeutique, le thé ne rencontre pas de succès en France contrairement à l’Angleterre, ou à la Hollande où il suscite un véritable engouement dès son introduction. « Le thé était une étrangeté pour des Français de la vieille roche, écrit Brillat-Savarin dans la Physiologie du goût (1825). Cependant il fut accepté. Je le fis en leur présence, et ils en prirent quelques tasses avec d’autant plus de plaisir, qu’ils ne l’avaient jamais regardé que comme un remède. » D’abord largement confiné dans les salons de l’aristocratie, il conquiert à partir de la seconde moitié du xixe siècle une partie de la bourgeoisie avec l’ouverture des premiers salons et maisons de thé. Alors que le cacao arrive en Angleterre en même temps que le thé de Chine et le café du Yémen, l’aristocratie française s’entiche du chocolat, la nouvelle boisson à la mode. En France, il fait son entrée à
la cour avec Anne d’Autriche, infante d’Espagne (pays gagné par la folie du cacao !), qui s’unit à Louis XIII en 1615. Puis MarieThérèse d’Autriche, épouse de Louis XIV, lui voue une véritable passion jusqu’à s’en rendre malade par sa consommation excessive. Cette boisson devient alors le symbole d’un extrême raffinement teinté de libertinage pour les effets aphrodisiaques qu’on lui prête. Au milieu du xviie siècle sont créées les premières Chocolate houses par un Français à Londres, point de départ de la démocratisation du chocolat à boire avant la fabrication des premières pièces à croquer – toujours à Londres en 1674 – puis le début de l’industrialisation du chocolat, produit plus massivement et ainsi plus accessible. Thé et cacao, avec plus ou moins de succès à leur arrivée en France, ont donc été l’apanage d’un petit cercle de privilégiés et d’initiés avant d’intégrer notre quotidien et de garnir nos cuisines. De ces deux ingrédients
* Thé noir cacao intense → Réf. 7830 – 12 € les 100 g
phares, des maisons de thé ont voulu sceller l’union intime, dans l’esprit des traditions gastronomiques de Pâques.
Du chocolat dans le thé Chez Palais des Thés, ce mariage se révèle cette année dans deux créations, avec et sans théine. Leur point commun ? L’utilisation de la grande capacité du thé à capter les arômes et celle du grué de cacao à infuser. Le défi ? Réussir un équilibre en associant deux produits aux profils aromatiques très marqués. Intensément cacaotée, la première création* est un thé noir aux éclats de fèves de cacao issues de République Dominicaine, rehaussé d’une pointe de réglisse, qui s’exprime avec puissance. Dans un autre registre, le rooibos** partage en douceur les nuances vanillées du cacao du Nigeria, accordées aux notes chaleureuses de la cannelle. Deux façons gourmandes d’unir chocolat et thé en une même tasse !
•
** Rooibos chocolat et spéculoos → Réf. 926 – 12 € les 100 g
THÉ D’ E XCEPTION
32
Les Perles de Jasmin, un savoir-faire ancestral Le thé au jasmin est l’un des plus anciens thés parfumés. Il s’agit traditionnellement d’un thé vert auquel on mêle des fleurs fraîches de jasmin. Sous cette appellation se cache une pluralité de façonnages et surtout de qualités. Parmi ces thés au jasmin, le plus réputé se nomme « Perles de Jasmin ».
Les Perles de Jasmin sont traditionnellement confectionnées dans la région du Fujian, près de la ville de Fuding, en Chine. Son nom originel est Mo Li Long Zhu : Mo Li signifie « fleurs de jasmin » et Long Zhu, « perles de dragon » en référence à la légende chinoise selon laquelle cet animal fantastique devrait sa puissance à une perle magique cachée dans ses griffes. Sa fabrication séculaire se déroule en deux étapes : la cueillette du thé vert au printemps et la récolte des fleurs de jasmin en été. Une cueillette impériale La cueillette du thé vert a lieu au mois d’avril au moment où les jeunes pousses printanières sont les plus qualitatives. Les feuilles sont récoltées dans les montagnes avec une grande attention : pour fabriquer des Perles de Jasmin, seuls les rameaux composés d’un bourgeon et d’une feuille seront cueillis. On parle de « cueillette
impériale ». Le théier le plus utilisé pour leur confection est le Fuding Da Bai. Ce cultivar, sélectionné dans la ville de F uding, est reconna issable à ses bourgeons argentés particulièrement grands et duveteux, ainsi qu’à ses parfums extraordinaires qui se mêlent magnifiquement aux fleurs de jasmin. Une fois le thé récolté, les feuilles sont ensuite chauffées brièvement à haute température afin de stopper leur oxydation, puis chaque perle est roulée à la main. Ce savoir-faire artisanal demande une grande expérience et beaucoup de patience. Les perles de thé vert sont ensuite soigneusement stockées jusqu’à l’été, à l’abri de l’humidité, en attendant l’arrivée des précieuses fleurs.
L’union des fleurs et du thé Le jasmin fleurit en été. Dès le mois d’août, les fleurs sont transportées auprès des perles de thé vert afin de procéder au mariage de leurs parfums.
Cueillette manuelle des fleurs de jasmin, protégées du soleil.
Comme les fleurs ne diffusent leurs arômes qu’à la tombée du jour, c’est en fin d’après-midi qu’elles rejoignent les feuilles de thé afin d’être mises en contact durant la nuit entière. Cette opération délicate consiste à former un lit de perles que l’on recouvre de fleurs. Mais pour éviter une altération des parfums due à un excès de chaleur et d’humidité, le jasmin et le thé sont continuellement brassés
UN THÉ DÉCRYPTÉ
33
afin d’abaisser la température. Au petit matin, les fleurs sont soigneusement retirées par un système de tamis, car en flétrissant le jasmin développerait de l’amertume. Ainsi, contrairement à ce que l’on pourrait imaginer, un thé au jasmin d’exception est toujours dénué de f leurs. Pour les Perles de Jasmin, l’opération est renouvelée sept fois, avec des fleurs fraîchement cueillies chaque
jour. Ce Grand Cru extraordinaire nécessite plus de 250 kg de fleurs de jasmin pour 100 kg de thé !
Des perles en bouche Les Perles de Jasmin se caractér i s ent p a r leu r te x t u re d’une extraordinaire rondeur, à l’image du façonnage en perles des feuilles de thé. Le parfum des fleurs se dévoile
avec intensité et précision. Il se mêle ensuite à des notes de fruits rouges subtiles délivrant une impression sucrée. Les Perles de Jasmin déploient tout au long de la dégustation une grande ampleur en bouche, offrant une expérience gustative d’un grand raffinement.
•
Perles de Jasmin → Réf. 2060 − 34 € les 100 g
ÉBRUITÉ
34
François-Xavier Delmas et Sidonie Bonnec enregistrent un épisode de « Un thé, un voyage », avec François Touchard, le réalisateur.
« Un thé, un voyage », le premier podcast sur le thé Dans chaque épisode, François-Xavier Delmas et Sidonie Bonnec dégustent les meilleurs thés et parcourent le monde à la recherche de leurs histoires. Ils vous emmènent en Chine goûter des Perles de Jasmin, en Inde boire un Darjeeling, dans les rues de Calcutta à la découverte du chaï. Vous dégusterez même du thé avec du fromage !
Perles de Jasmin Épisode 1 16.11.2020 Découvrez également d’autres épisodes à retrouver sur le site www.palaisdesthes.com/fr/podcast ou sur les autres plateformes de diffusion de podcasts habituelles. Une production Univers K.
La délicatesse du thé vert de printemps se marie à merveille avec la subtilité du jasmin pour donner naissance à un thé d’exception : Perles de Jasmin. François-Xavier nous raconte ici l’histoire de ce Grand Cru, sa récolte, sa manufacture. On découvre pourquoi le thé doit être infidèle aux fleurs pour qu’elles donnent le meilleur de leur parfum. Un voyage sensuel et savoureux ! Durée de l'épisode ► 20:23
ÉBRUITÉ
35
Darjeeling Épisode 2 30.11.2020 François-Xavier emmène Sidonie dans une région singulière et mythique, au pied de l’Himalaya. Carrefour culturel croisant les influences indiennes, anglaises, tibétaines et népalaises, Darjeeling est aussi un endroit unique dans le monde du thé et la maîtrise de son savoir-faire. Partons pour les routes escarpées de Darjeeling déguster l’un des plus beaux thés du monde.
L’actualité du Palais SERVICE
Rapide et gratuit, optez pour le click & collect !
Durée de l'épisode ► 17:28
Chaï Épisode 3 14.12.2020 Le chaï, de son vrai nom « massala chaï », est un rituel incontournable des rues indiennes. De l’écolier à l’homme d’affaires, de Calcutta à Bombay en passant par Fort Cochin, tout le monde boit du chaï. Il existe mille recettes de cette délicieuse boisson qui mélange thé, épices, sucre et lait. Dans cet épisode, François-Xavier nous livre la sienne, et prépare pour Sidonie « son » chaï, celui de ses souvenirs. Un moment convivial et réconfortant qui suspend la frénésie ambiante le temps d’un thé. Durée de l'épisode ► 23:39
Quatre accords thés et fromages Épisode 4 28.12.2020 De plus en plus, le thé sort de sa théière et fait de surprenantes rencontres. François-Xavier nous raconte l’histoire d’amour incongrue mais sincère, entre le thé et le fromage. Au travers de dégustations, Sidonie devient la témoin d’accords délicieux entre un chèvre et un thé vert de Chine, une fourme d’Ambert et un thé blanc népalais ainsi que d’autres associations gourmandes ! Durée de l'épisode ► 18:00
N’attendez plus chez vous et gagnez du temps en boutique. 1. Passez votre commande de thés et d’accessoires éligibles au click & collect en ligne. 2. Sélectionnez votre boutique de retrait. 3. Après avoir reçu votre confirmation de commande, récupérez-la en boutique. BOUTIQUES
Deux nouvelles boutiques pour partager avec vous notre passion pour le thé Nous sommes ravis de vous annoncer l’ouverture de deux nouvelles boutiques Palais des Thés pour vous accueillir, vous guider et vous faire plaisir parmi notre sélection de plus de 250 thés. À Lyon, dans le centre commercial de La Part-Dieu 17, rue du Docteur-Bouchut 69003 Lyon Tél. : 04 28 00 18 02
À Bordeaux Bègles, dans le centre commercial Rives d’Arcins Rue des Frères-Lumière 33130 Bègles Tél. : 05 64 10 09 62
NOUVE AUTÉS
36
Un printemps haut en couleur !
→ Réf. V2034B → Réf. DVT309
GENMAICHA MIDORI BIO → Réf. 3050 – 13 € les 100 g
→ Réf. DVT494
→ Réf. N360
→ Réf. V2037C
THÉIÈRE EN FONTE Rouge Impérial
→ Réf. V2033C
→ Réf. N359
→ 0,6 l – 80 € → Réf. M121B
→ Réf. DVT773 → Réf. DVT802
LES COULEURS DU THÉ
→ Réf. DVT861
→ Réf. V2036B
→ Boîte de 100 g – 16 €
→ Réf. DVT862
→ Réf. V2033B
37
TASSE YAMA → 9 cl – 12 € → Réf. N163
THÉIÈRE YAMA → 43 cl – 50 € → Réf. M247
OSMANTHUS D’OR → Réf. 317 – 16 € les 100 g
→ Réf. V2034C
→ Réf. V2036C
→ Réf. V2035C
BOÎTES WASHI AQUARELLE
→ Réf. DVT771
→ Boîte de 100 g – 13 € → Boîte de 150 g – 16 €
→ Réf. V2035B → Réf. DVT898
→ Réf. V2037B
→ Réf. N361
MUGS AQUARELLE → 44 cl – 16 € → Réf. N362
THÉIÈRE EN FONTE Gris Xian → 0,6 l – 80 € → Réf. M121A
Madame Ming, une des rares femmes à la tête d'une plantation de thé, à Mae Salong, dans le nord de la Thaïlande.
« Nous nous refusons tous les luxes sauf le plus précieux : la lenteur. »
4,90 €
Nicolas Bou vier
palaisdesthes.com