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Projet LPMD par Thierry Hanon Degroodt

Par Thierry Hanon‐Degroodt

« Je profite de l’opportunité de la revue pour vous décrire un petit projet qui commence à porter ses fruits et mériterait à mon sens d’être étendu. »

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La conversion vers le LED Le sujet d’étude qui a mené à ce projet est la pollution lumineuse et la conversion des luminaires vers le LED. Comme vous le savez, un vaste projet de conversion des luminaires est actuellement en cours en Belgique. D’un côté, la conversion des éclairages autoroutiers, de l’autre celle des éclairages urbains. Deux acteurs différents, comme d’habitude, et une gestion fédéro-régio-communalisée comme on l’apprécie à la belge pour occuper nos hommes politiques (ex : est-ce que cela sera compatible entre les régions et systèmes, au niveau contrôle des luminaires.. ? Amusez-vous et posez la question à l’occasion). Remarque : En France, c’est UNE personne qui gère cela pour le territoire (= un interlocuteur) et les exécuteurs sont fixés par département, en Italie : idem, en Slovénie : idem, en Hollande : idem, etc…. Mais dans nos régions, vous imaginez bien que cela ne peut pas « être simple »… Tout est une question de point de vue et d’efficacité. La rupture nord‐sud En plus, alors que le Gouvernement Wallon, en suivant la Flandre en 2007, avait décidé d’éteindre nos autoroutes (ce qui a fait baisser le nombre d’accident mortels, d’ailleurs), il se réjouit maintenant de pouvoir « rallumer nos autoroutes » vu que le LED consommera moins ! Il se fiche évidemment du fait que de toute consommation > 0 (même à 30% de la précédante), cela coûtera tout de même (surtout dans une période où on arrêtera le nucléaire) et qu’on ira le chercher dans vos poches. Quant aux effets pervers de la conversion vers les LED, qui ne se fera sentir que dans quelques années (préparez vos vaccins, car vous en aurez besoin…), cela n’est évidemment pas une préoccupation principale. Tout le monde a pu constater la grande efficacité pour prévoir un problème annoncé, on l’a bien vu récemment… Alarmisme non fondé « Fake news » dirait un personnage célèbre pour avoir bénéficié d’une interface neurale avec Twitter… Ou sont les preuves ? Tout cela n’est que l’obscurantisme (sic) mal placé et imbécile de personnes qui voudraient obscurcir nos magnifiques trous dans l’asphalte routier au lieu de les éclairer pour aider nos automobilistes… C’est un long sujet, en dehors du cadre de ces pages… Mais des sites (bien informés) existent et des centaines d’études aussi (voir liens), mais en soit, il faut bien le reconnaître : comment « argumenter » sur cela ? Comment évaluer cela ? Les mesures mondiales sur la luminosité nocturne ambiante découlent de soit a) une étude de cas (situation existante) b) une étude de prévision (situation future, sur base de simulation) c) une étude de conversion (situation avant / après, sur un bâtiment, une zone, un aménagement) d) une étude de longévité (analyse d’un éclairage dans les conditions d’utilisation) Mais d’aucune étude globale sur une « conversion » (situation avant / après au niveau d’une région ou pays). On dénombre évidemment des études locales qui, une fois combinée, donne une vue

générale, mais vu l’éparpillement des territoires, nécessitent des simulations pour être consolidée. Or, voici qu’une région du monde parmi les plus éclairées la nuit (pour une fois que la Belgique est première en quelque chose, snif…) sur un territoire relativement petit, effectue une conversion massive vers les LED en quelques années (max 10 ans). S’il y a un endroit où il faut faire des mesures, c’est clairement là ! Les mesures satellites Immédiatement, on pense au suivi via satellite… Il y a des satellites chinois (avec accès payant aux données) qui sont disponibles et dont les données pourraient être exploitées. Tous les autres sont malheureusement « aveugles » aux LED, car aujourd’hui optimisés pour les longueurs d’ondes du type sodium ou mercure. Le « pic bleu » caractéristique des LED est invisible, donc : au fur et à mesure des « conversions », le pays s’éteint !

Remarque : n’oubliez pas cela quand on vous montera des photos satellites avec les effets « positifs » de la conversion… Seules les photos prises depuis ISS (appareil photo standard, calé sur notre vision) sont valables ! On espère que T. Pesquet refera des images, comme il nous l’a promis… Donc, cela existe, fort dépendant de la météo et du positionnement, et c’est très cher… Donc, une étude ponctuelle, soit… Mais une continue sur plusieurs années ? J’en doute, vu la politique scientifique locale. Les mesures au sol C’est évidemment le plus facile et les projets comme « Globe at night » le font d’une manière la plus ludique (en visuel sur les étoiles) et facile possible. Les mesures atteintes ne sont pas trop mauvaises et permettent d’établir une tendance, mais pas d’avoir des données ponctuelles exactes pour monter une étude précise. La mesure via un détecteur fixe, sur une longue durée et présent dans un scénario local de conversion (donc, avec mesures avant/après) est le plus fiable. Avec une sensibilité à la PL de l’ordre de 50km dans nos régions, une dizaine de capteurs peuvent couvrir le pays en entier. C’est là que s’inscrit mon projet… Le problème de la capture au sol Plusieurs stratégies de capteurs existent, mais comme on n’a guère le temps, on va se focaliser sur un capteur universellement reconnu dans le domaine astroamateur : le Sky Quality Meter de Unihedron, qui existe en plusieurs versions : portable (sans connectivité ni stockage) et connectables (USB, network). Les « connectables » présentent l’avantage d’être fort bien calibrés dès l’usine (sur 8 achetés, la déviation est minime) et peuvent être recalibrés si besoin est. Mais l’utilisation de ce dispositif à l’extérieur pose évidemment des problèmes pratiques : - isolation versus les conditions météo - mode de connectivité (avec avantage / inconvénient) - présence d’un « ordinateur » pour la capture et le stockage - les programmes de captures et de stockage - la prise en compte des conditions extérieures de la capture - la transmission des données

C’est pour résoudre cela que j’ai créé la version 6 de mon LPMD ou Light Pollution Mobile Detector. LPMD : le principe Concept que j’ai créé en 2014 et que j’ai présenté lors du Symposium International sur la Pollution Lumineuse, il intègre les capacités de capture de plusieurs évènements et son traitement en déplacement. - V1.0 : capture PL en mobile (à pied ou voiture) via Lightmeter - V2.0 : intégration du positionnement global et la capture vidéo - V3.0 : intégration de technique IA pour la détection des points lumineux et leur positionnement en 3D, avec SQM - V4.0 : intégration des flux vidéo stéréoscopiques - V5.0 : refonte du système autour de nouveaux logiciels

Voyons cela de manière pragmatique : qu’est-ce qui est nécessaire ? Voici une vue de l’implémentation géographique :

Chaque station (disposant d’un « nom » unique) installée dans une région va effectuer ses captures et envoyer en temps réel ses résultats vers un site central situé dans le Cloud. Donc, chaque station LPMD doit normalement être connectée sur Internet (via cable ou WIFI). Certes son fonctionnement « 100% indépendant » est possible, mais on perd 80% des possibilités. A chaque mesure, la station va capturer : la pollution lumineuse les conditions météos locale (max 50 km, si possible) Et lors de l’envoi des données, elles seront complétées par les données d’éphémérides (pour le lieu considéré). Toutes stations suffisamment « proches » utiliseront les mêmes conditions météos. Remarque : on parle bien ici d’observations météo, pas de prédictions (largement discutables). C’est la première fois que l’ensemble des conditions pouvant influencer une mesure de brillance du ciel sont directement intégrée dans chaque mesure. On peut ainsi évaluer : - la « brillance » du ciel (en mag/arcsec²) - la magnitude limite à l’œil nu - l’état général de la météo : température (capteur/extérieur), point de rosée, pression, vent - la situation générale des couches nuageuses à plusieurs altitudes - une estimation de la visibilité visuelle - les conditions astronomiques : crépuscule, durée du jour, phase de la Lune, altitude du Soleil, etc…

Si un nouveau type de capteur peut être installé (ex : images), il sera toujours possible d’intégrer cela dans la capture. Le composant « traitement » sur un module électronique très courant permet toutes les extensions imaginables… Les composants et fonctions Sans rentrer dans les détails techniques, attardons nous aux fonctions principales de chaque « node » LPMD :

Le point le plus critique (et qui demande toujours actuellement toute notre attention) est la résilience de la solution. C’est l’aspect qui nous a procuré le plus de travail dans la mise en place. Le module central doit assurer ses fonctions en permanence, 24/24h, 7/7j et cela avec une connectivité (vraiment) fort variable dans la région Wallonne… D’un jour à l’autre, celle-ci peut se dégrader à un point rarement imaginé (même au sein d’une connexion correctement établie)… Et si tous les composants ne sont pas « codés » pour faire face à toutes ses « pertes », on perd évidemment une part ou l’autre du fonctionnement normal.  Toutes les fonctions sont contrôlées par un outil de configuration facilement utilisable et chaque LPMD est accessible en « remote access » pour la maintenance.

La capture, l’enrichissement et le traitement sont donc des phases séparées : a) La capture, fonctionnant en permanence, s’assure de récupérer les informations des capteurs et de les stocker en local (support mémoire dédié). Sauf en cas d’erreur du capteur (ce qui génère une alerte via réseau), le but de « capturer », quelques soient les conditions de connectivité. Au minimum, on disposera des mesures PL, qui pourront d’ailleurs évoluer avec tous les capteurs disposant d’un protocole publié. Aujourd’hui, le SQM/LU est supporté (car c’est le seul dont je dispose). Le jour où un autre capteur est nécessaire, il suffira d’adapter un module interface (ex : le SQM/LE est théoriquement supporté, mais jamais testé).

Le même module se connecte sur une station météo (la plus proche) et récupère les informations météo dans un format international standardisé.

b)

Le module de publication s’occupe de plusieurs fonctions : a. Enrichir les données de capture avec les données issues du calcul des éphémérides locales b. Traduire les informations météo en valeurs communes (ex : overcast at 9000 feet = ciel bouché dès 2700m) c. Pré-calculer des informations et préparer l’enregistrement vers la base de données centrale d. Envoyer toutes les données de manière périodique vers le site central e. Sauver de manière locale toutes les données (support amovible) Le module de publication est évidemment prévu pour pouvoir retraiter automatiquement des volumes de données pendant une période de perte de connectivité.

Le LPMD en « vrai » Le premier LPMD a été financé par le club AstroNamur, le site et les fonctions Cloud le sont par BeAstro. Le comité d’administration de l’ASCEN n’étant pas d’accord à l’unanimité sur l’utilité de cette solution, les tenants du projet (membres du comité d’AstroNamur) cherchent du support auprès des autres clubs astroamateurs (des deux parties du pays !) pour rapidement déployer la solution en attendant de futures discussions sur le sujet. La première version réalisée est donc en production dans la région de Fernelmont/Forville et se présente sous la forme actuelle suivante : Localisation actuelle…

Assez central, ce qui est intéressant…

Mais il reste beaucoup à couvrir pour obtenir une mesure efficace… 

Le LPMD V6.1 - le module « capture », avec son dôme (qui va évoluer), en situation. - Le module de traitement des données, basé sur la solution EAB (voir plus bas), qui reste à l’abri (Le câble de connexion fait 5m) LPMD : Le site… Est en plein développement… Et vu les améliorations / corrections qui ont été apportées ces dernières semaines sur le capteur et ses fonctions, il est resté très minimaliste à ce stade… (Toute aide est la bienvenue pour son développement). Et de facto (surtout quand Proximus décide de

La version actuelle : http://lightpollution.beastro.be/doku.php la page principale, hébergée par BeAstro http://lightpollution.beastro.be/doku.php?id=lpmd la page dédiée au LPMD http://lightpollution.beastro.be/php/lpmdstatus.php La page actuelle pour la situation des mesures Et, en première… En cours de développement : http://lightpollution.beastro.be/lpmd/ La page « finale », basée sur la database

Même remarque… Développer tout ceci demande du temps et parfois, ce n’est pas sans problèmes.. Donc, des données peuvent ne pas être (encore) disponibles ou sont en pleine migration/analyse. Si vous avez un problème ou une demande particulière, prière de me contacter ! La partie « traitement » est réalisée sur une version dédiée de la plateforme EAB (Easy AstroBox) qui constitue à lui seul un document dédié… Pour plus d’info : https://www.easyastrobox.com/ Le coût : la solution implémentée revient à 350 eur, capteur compris. Si évidemment une personne dispose déjà d’un SQM connectable, le coût descend très largement ! Toute la solution est disponible en Open Source et il suffit de me contacter si vous êtes intéressé par l’implémentation d’un « node ». A l’écriture de ses lignes, il y a 112 fichiers de données, couvrant du 18/7 au 23/11 (parfois avec des trous suite à des problèmes de jeunesse ) avec la majorité des données prises toutes les 5 min. Au total : 28643 mesures, dont 2500 intègrent les données météo et toutes les calculs d’éphémérides… (comme cela, vous voyez que cela évolue… ) Attention : le site va changer… Car désormais le serveur « Cloud » est disponible et une database centralisée est désormais également disponible. Cela devrait même permettre d’entre des mesures « manuelles » au sein de celle-ci. LPMD : Just in time Démarré en juillet, actif au niveau capture depuis… Et la conversion LED commence dans la région ! Les premiers 300 luminaires vont être convertis dans la commune, et des conversions sont en cours dans les communes proches. Donc, on devrait pouvoir analyser les premiers effets de la conversion sous peu. En pratique, vu les luminaires actuellement présents (datant des années 60), toute conversion devrait être bénéfiques en terme de pollution lumineuse « pure » (et pour l’astronomie )… Les LED sur la biodiversité, c’est autre chose…  Donc, séparons les sujets et voyons les chiffres quand ils seront disponibles. Un exemple rapide…

Pour l’exemple, ce graphique montre la mesure de la PL (min 17 mag/arcsec²) en fonction de la phase lunaire (17 = 0% , nouvelle lune, 25 = 100%, pleine lune), et basé sur les données capturées et calculées par le LPMD. L’influence de la Lune est bien visible… Donc, pour les futures comparaisons, il faudra bien sélectionner les périodes d’analyse.

Remarque : des essais ont été réalisés pour « affiner » les mesures sur certaines périodes, et la première partie montre la précision avec une mesure par 30 sec. Cette capacité (gérable à distance) permet de tester plus précisément un effet ou l’autre (ex : fête du village, Skytracer, etc…)

Pour plus de renseignements ttf@beastro.be (ou via le club et son président )

Des lectures PL : http://ascen.be/ : http://lightpollution.beastro.be/doku.php : https://www.globeatnight.org/ : http://nuitfrance.fr/ : https://www.anpcen.fr/

Merci de m’avoir lu et Bonnes Fêtes à tous !

NDLR : Merci pour cet éclairage intéressant, cher Thierry, et à très bientôt pour d’autres moments lumineux !

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