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Kant par Ida Salètes

Par Ida Saletes

Nous retrouvons Ida avec, pour ce numéro, une évocation kantienne.

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« En matière de cosmogonie, chacun fait ce qu’il veut ! » Exoconférence de Alexandre Astier

Certains anciens du siècle des Lumières développèrent des théories dont celle d’Emmanuel Kant dont je vais vous parler un peu. Kant, c’est pour moi une image, introduite par une professeure de biologie en fac qui nous dessinait l’idée de la transmission des savoirs par le biais de cet auteur : la représentation d’’un voilier qui part vers l’horizon, riche du savoir transmis mais qui naviguera en sa compagnie comme il l’entendra, qui le modifiera au gré du vent et, peutêtre, s’en affranchira pour aller plus loin. Le savoir est un perpétuel mouvement. Kant, influencé par les théories de Newton exprimera ceci : (Théorie du ciel-vers 1755) « A partir des lois universelles des mécaniques célestes de Newton, j’en déduis la formation des corps célestes, les causes des mouvements des planètes à partir des lois du mouvement de la matière » Principe d’analogie : Kant a fait cette expérience de pensée en s’appuyant sur un principe simple : celui de l’analogie. A partir des théories de Newton, il déduit des rapports de ressemblance entre des objets spatiaux. Les principes mécaniques régissant le système Terre-Lune-Soleil s’appliquent à l’ensemble du système solaire. Puisque tout est intimement réglé par l’horlogerie fine de « Newton ». Donc, pour Kant, notre système solaire ressemblait à la voie lactée, dans l’idée « des poupées russes » si l’on veut se représenter mentalement .Notre système devenant alors une mini représentation de la voie lactée, elle-même caractéristique d’un système plus vaste.

Il écrira : « L’aspect du ciel étoilé est l’image d’une distribution systématique des étoiles qui n’est que le reflet en grand de ce qui se passe dans le petit »

Ce qui m’a paru intéressant dans cette démarche, c’est la mise en situation, en déroulement d’une historicité de l’univers. Nous sommes au 18° siècle et cette intuition du mouvement profondément ancrée chez Kant, me paraît vraiment novatrice et à considérer aujourd’hui. Savoir, c’est une trajectoire, avec des flux et parfois des reflux.

Bien entendu, il n’avait aucune idée de la singularité dont parlera Lemaître plus tard. Il ne pouvait aller au-delà de cette idée d’un univers en mouvement depuis un instant primordial,

La voie lactée

Kant la pense déjà sous forme d’une organisation. Pour lui, les lois de Newton et ce qu’il voit du ciel étoilé lui permettent (vers 1755) d’envisager l’espace comme un ensemble complexe, qui fonctionne en interactions et qui fait partie intégrante d’un tout beaucoup plus vaste. Cette mise en relation des phénomènes décrite par Newton et ses observations me paraissent vraiment intéressantes. Il déclarera : « Les étoiles ne sont pas fixées sur la concavité apparente de la sphère céleste » Il envisageait donc la voie lactée comme un disque aplati qu’il associera plus tard à la forme des nébuleuses. Nébuleuses=galaxies chez lui. Toujours selon le principe d’analogie. « On peut se représenter le système des étoiles comme des systèmes planétaires infiniment agrandis, liés à leurs soleils, comme notre propre système solaire » La modernité de cette suggestion est incroyable. Depuis on sait que notre système solaire est un peu atypique (modèle de Nice) mais nous sommes au 18° siècle !!! Mais derrière cette réflexion de Kant, il persiste toujours la mise en mouvement. Ainsi, ces formes universelles interagissent et s’équilibrent : attraction-répulsion. « Les autres étoiles comme notre soleil, exercent une action identique sur leur environnement. »

« De ce fait, et en vertu de cette condensation que rien n’arrête, les systèmes de l’univers sont amenés à tomber les uns sur les autres et à se réunir en une masse unique »

Question qui demeura longtemps d’actualité. On sait aujourd’hui que l’expansion s’accélère mais il y eut débat jusque peu : Expansion, pas expansion ?

Les univers îles

Toujours au sein de sa pensée analogique, Kant l’appliqua aux galaxies (qu’il dénommait nébuleuses). La voie lactée serait un système gigantesque constitué de millions de systèmes solaires, qu’il songeait pareils au notre. Mais alors, pourquoi s’arrêter là !! « Nous voyons les premiers éléments d’une progression continue de mondes et de systèmes. C’est une série sans fin, qui s ‘enfonce dans un abîme insondable » Emmanuel Kant avait conscience que les moyens d’observation de l’époque ne lui permettaient pas d’asseoir cette hypothèse par l’expérience de l’observation. Pourtant, en passeur de savoirs, il encouragea ses disciples à redoubler d’efforts, de persévérance car disait-il :

« il existe en ce domaine un vaste champ de découvertes. Les observations donneront les clés de savoirs inimaginables ».

Lorsque j’observe l’étendue des progrès technologiques, je ne suis pas loin de penser comme lui, toute raison gardée dans la comparaison. Mais Kant considérait que chaque nébuleuse(galaxie) était un système rempli d’étoiles qui devaient être animées d’une rotation différentielle. Il abordait ainsi les notions de pluralité des mondes et l’infinité de notre univers. Deux forces essentielles à l’oeuvre dans la création de l’univers : la condensation de la matière qui engendre des masses différentes et le mouvement de rotation. Mais qu’est-ce qui mettait de telles forces en mouvement, pour passer du repos endormi à la bougeotte qui

engendre des différences de masse? (se rapprocher, si intérêt, de la théorie , je cite : « hypothèse Kant-Laplace ». Un clin d’oeil à Roland car la belle Sirius y tient une place prépondérante. Kant ne sut le définir véritablement.

Une création sans fin

Pour l’auteur, l’idée même de mouvement évolue, la création jamais terminée. Kant n’y mettait pas là une volonté divine mais un déroulement inhérent à chaque chose : les mondes finis passent et deviennent alors d’autres matériaux pour la formation éventuelle d’autres mondes. Bien visé lorsque l’on connaît aujourd’hui l’implication des supernovaes dans la création d’autres systèmes. Un monde à l’agonie va engendrer un autre monde. Ne serait-ce pas l’origine de notre système solaire, né de quelques ondes gravitationnelles perturbantes ?

« Un principe de pédagogie que devraient surtout avoir devant les yeux les hommes qui font des plans d’éducation, c’est qu’on ne doit pas élever les enfants d’après l’état présent de l’espèce humaine, mais d’après un éclat meilleur, possible dans l’avenir, c’est-à-dire d’après l’idée de l’humanité et de son entière destination. Ce principe est d’une grande importance. » Emmanuel Kant

Professeur depuis 1976, IDA est conseillère pédagogique et à ce titre s’occupe de la formation des profs via un programme universitaire. Elle a rejoint le CNABH en 2017, représente l’ASBL à la FFAAB et a également participé aux travaux du secrétariat jusqu’en 2018. Après une brève interruption, nous espèrons la retrouver dans l’équipe dès que les mesures sanitaires seront levées.

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