LA TORRE VELASCA Où comment BBPR opéra le détournement des concepts modernes.
PAPELIER LOU DE GRESLAN PAUL
DIRIGÉ PAR ANNE ROQUEPLO ENSAVT - 2E ANNÉE
INTRODUCTION À L’ANALYSE. La Torre Velasca est un gratte-ciel moderne construit entre 1956 et 1958 à Milan, par les architectes BBPR. Son nom est une référence au gouverneur milanais Don Juan Fernando de Valasco, qui gouverna la cité de 1592 jusqu’en 1600 et de nouveau de 1610 jusqu’en 1612. Située en plein coeur de la ville historique, elle établit un dialogue entre l’architucture traditionnelle historique, notamment le Duomo et le Castello Sforzesco, et les récents immeubles d’acier et de verre du XXIe siècle. Cette tour, dont les architectes défendent la conception strictement basée sur les prescriptions du mouvement moderne, fut pourtant maintes fois raillée par les membres de ce mouvement. En effet BBPR, influencée par l’environnement prééxistant Milanais, est parvenue à une contextualisation “ fortuite “ de l’édifice très peu appréciée des Modernes. Cette analyse considèrera donc les différents facteurs ayant influencé la conception de la Torre Velasca afin de rendre compte du cheminement intellectuel qui conduisit à l’introduction de l’histoire dans le Modernisme.
SOMMAIRE 1/ UNE ARCHITECTURE IMPLIQUÉE
L’Après-Guerre en Italie, une nurserie architecturale.
Le style architectural du néoliberty : vers un rationnalisme organique
L’engagement intime des architectes
2/ D’UNE LOGIQUE PROGRAMMATIQUE A LA FORME “CHAMPIGNON”
La typologie de la tour, résultante d’ambitions d’ordres multiples
L’apparition d’un dessin singulier
L’articulation d’un sursaut habité
3/ UN ÉDIFICE EXPRESSIF AUX PORTÉES MULTIPLES
Registre temporelle
Une façade à l’expression plastique inhabituelle
La structure au service de l’organisation interne
ANALYSE ARCHITECTURALE DE LA TORE VELASCA / 2E ANNÉE / ENSAVT
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1/ UNE ARCHITECTURE IMPLIQUEE
L’APRÈS-GUERRE EN ITALIE, UNE NURCERIE ARCHITECTURALE Au lendemain des effrois de la Seconde Guerre Mondiale, et plus particulièrement ceux de l’attaque d’août 1943 ( FIG. 1 ), la ville de Milan est largement affaiblie. Les dommages causés par les bombardements ont endommagé le tissu urbain de la ville italienne au point d’en rayer des ilôts complets et de laisser des brêches béantes dans le patrimoine historique. ( FIG. 2 ) Alors que les architectes s’emploient au périlleux projet de reconstruction de la ville au dessus de ses ruines, la question du style s’impose. FIG. 1 / Piazza Fontana le lendemain du bombardement 16 aôut 1943
FIG. 2 / Bâtiments bombardés du Centre Milanais (ech 1/2000e)
Batiments détruits
Batiments détruits sur le site
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Dans les années précédant la guerre, le courant fasciste produisit une architecture monumentale des plus brutales, prêchant l’idéal détaché de la terre et la renaissance du monde antique. La tendance s’inverse après 1945, quand l’architecture ne répondit plus qu’aux besoins culturels, sans se soumettre au régime totalitariste. Ce renversement s’appuie par ailleurs sur la démonstration historique que l’architecture ancrée dans l’environnement montre une légitimité inhérente plus forte que toute autre. Deux écoles se distingent alors. La première, conservatrice et classique, propose une reconstruction “ à l’identique “ de la ville, prônant le renouveau de la tradition urbaine de la cité. La deuxième, portée par ceux qui, dans les années trente ont apartenu au mouvement moderne et qui à présent recherchent l’ancrage dans la tradition locale.
LE STYLE ARCHITECTURAL DU NÉOLIBERTY : VERS UN RATIONNALISME ORGANIQUE
FIG. 3 / Le Palazzo di Giustizia (1932 -1940) de Marcello Piacentini, pendant la démolition de l’ancienne caserne occupant le site
Cette école s’inscrit ainsi comme prolongement du mouvement Moderne tout en approfondissant sa théorie pour adapter le projet à son contexte et puiser des expressions dans la prééxistance environnementale. Intitulé “ Néo-Liberty” par un de ses pères et membres de BBPR, Ludovico Barbiano di Belgiojoso, il laisse entrevoir la renaissance du “Liberty Style”, ou Art Nouveau et comprend l’agence BBPR, les architectes Michelucci, Albini, Gerella ou encore Ridolfi.
L’ENGAGEMENT DES ARCHITECTES L’agence BBPR est fondée à Milan en 1930 par les architectes et amis Gian Luigi Banfi, Lodovico Barbiano di Belgiojoso, Enrico Peressutti et Ernesto Nathan Rogers. Afiliée au fascisme italien au début de la guerre, elle s’en écarte rapidement pour entrer dans la résistance. Malheureusement, Gian Luigi Banfi paye le prix de son courage et meurt dans un camp de concentration nazi. Ce drame aide à comprendre l’envergure de l’interêt personnel des membres rescapés pour la reconstruction Milanaise une fois la guerre terminée, et notamment dans le projet de la Tore Velasca.
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2/ D’UNE LOGIQUE PROGRAMMATIQUE À LA FORME “CHAMPIGNON” La forme de la Torre Velasca, semblable à celle d’un champignon aux dires des architectes eux-mêmes, puise sa justification dans raisonnement rationnel à plusieurs niveaux.
LA TYPOLOGIE DE LA TOUR, RÉSULTANTE D’AMBITIONS D’ORDRES DIVERS. Au début des années 1950, la société immobilière RICE -Ricostruzione Comparti Edilizi Spa.- prend possession d’un ilot rasé par les bombardements au cœur de la ville historique, à 300 mètres du Duomo, et commande à BBPR la reconstruction de la parcelle centrale de 9000 mètres carrés. Deux hypothèses leur sont alors proposées. D’une part, un bâtiment de faible hauteur avec cours fermées de 14 3000 mètres cubes, préconisé par la mairie et se fondant dans la masse du tissu traditionnel. D’autre part, une tour isolée différent du tissus traditionnel et libérant de l’espace au sol par sa faible emprise. Cette proposition, désavantageuse quantitativement -126 000 mètres cubes- fait pourtant l’unanimité. En effet, les commanditaires sont enjoués par le rayonnement possible d’un tel édifice dans la ville, et la mairie par la création d’une place publique de 1650 mètres carrés.
FIG. 4 / Implantation et superpostion des volumes programmatiques liés par le noyau FIG. 5 / Implantation du projet initial en forme de paravent et du projet final (ech 1/500e)
L’APPARITION D’UN DESSIN SINGULIER L’exploration de la forme : Les premières esquisses de BBPR pour ce projet proposent une tour d’acier et de verre d’une esthétique proche de ses contemporaines américaines et ayant la forme d’un paravent. C’est ensuite à travers un aller retour incessant entre l’analyse contextuelle et l’analyse programmatique que s’établit progressivement la forme en “champignon” résultant de la superposition des programmes.
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Une logique urbaine : FIG. 6 / Relation des logements au ciel et des bureaux à la ville
La typologie de la tour fournit à BBPR la possibilité de répartir au mieux les différents programmes prévus au regard des situations. ( FIG. 6 ) Les 8 étages de logements sont placés au sommet de façon à obtenir un contact maximum avec le ciel, à jouir d’une vue inédite sur Milan, à être éloignés de l’activité urbaine, et à bénéficier de la meilleure qualité d’air possible. Les 2 étages de commerces, signifiés formellement par l’auvent au dessus de l’espace public sont disposés au sol pour être accessibles facilement depuis la place, ce qui les rend plus attrayants. La situation des 16 étages de bureaux au milieu est une conséquence logique de la répartition des autres programmes.
Une logique de plan:
FIG. 7 / La différence de plan entre étages de bureaux et de logements provient notamment de l’emprise suplémentaire des loggias et des pièceces humides (ech 1/100e)
La différence de surface entre les étages de bureaux et les étages de logements témoigne dans la Torre Velasca d’une étude fine et d’une prise en compte de la différence des surfaces nécessaires à la bonne répartition spatiale des deux programmes. En effet, les pièces humides - cuisine et salle de bain - et les loggias, présentes dans chaque appartement, justifient la décision de BBPR d’accroitre la surface des étages de logements par rapport à ceux des bureaux. ( FIG. 7 ) Ce sont donc ces deux logiques qui ont coproduit la forme champignon. Mais comment lier les deux programmes dissemblables spatialement? Structure de la Torre : noyau et pilliers
Circulation et pièces humides
Loggias et terrasses
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L’ARTICULATION D’UN SURSAUT HABITÉ La saillie héroïque du volume supérieur de la tour, correspondant aux 72 logements, est maintenue au dessus les étages de tertiaire par de puissants piliers extérieurs qui accompagnent la déformation volumétrique et reprennent les charges du porte à faux ( FIG. 9 ), et par un noyau central en béton armé dédié aux circulations verticales, qui assume la fonction de contreventement. Alors que les logements se trouvent à partir du 19e étage, les piliers dévient de la verticale à partir du 15e étage et se transforment en arbalétriers. C’est au 18e étage - l’étage comportant les implantations techniques (air conditionné, prise d’air), l’habitation du gardien et les logements pour le personnel de service - là où la tension centrifuge dans les piliers est maximale, que sont installés des tirants, ferraillages du béton qui traversent de part en part la tour, afin de les retenir.
FIG. 9 / Transmission des charges des pilliers du volume supérieur au volume inférieur (ech 1/100e)
Par ailleurs, cet étage, lien entre les deux volumes, est volontairement en retrait de la façade afin de renforcer l’impression de la légèreté et le l’effet de surplomb des logements ( FIG 9 ).
FIG. 9 / La résolution technique de la tension dans la dalle béton du 18e étage: les maillages de l’armement métallique (ech 1/100e) FIG. 8 / L’articulation des volumes et la déviation des poteaux
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FIG 10 / Photographie aテゥrienne de la Torre Velasca ( ツゥ Rafael Cazorla )
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3/ UN EDIFICE EXPRESSIF AUX PORTEES MULTIPLES La Torre Velasca, résolument moderne, affiche cependant une expression plastique et volumétrique exceptionnellement riche pour son époque et sa typologie. A penchant historicisant, elle fut vivement critiquée par ses contemporains, et notamment par les confrères du groupe des CIAM1 dont BBPR faisait partie.
Bien qu’il est difficile de dire de qui, de la poésie ou du rationalisme, à résulté cette expressivité inédite, elle confère cependant à la tour un caractère intemporel profondément contextuel.
FIG 11 / Augmentation de la hauteur bâtie et implantation significative de la Torre Velasca
REGISTRE TEMPOREL La Torre Velasca comme point de repère dans la ville. La Tore Velasca est aujourd’hui un point de repère incontestable dans le centre historique Milanais. Voulue par les architectes et constitutive de la tour, cette fonction apparait dès les premières ébauches afin de redéfinir la skyline milanaise. Au cours des siècles, celle ci a en effet vu ses édifices monumentaux, comme les tours médiévales et les églises, perdre leur suprématie aérienne au fil de l’augmentation progressive de la hauteur bâtie. ( FIG.11 )
10 / 14 m Silhouette historique des immeubles avec un monument repère
22 / 24 m Augmentation de la hauteur bâtie et enfouissement du monument repère
106 m
BBPR va ainsi au delà de la conception d’une simple tour et met en jeu une dimension urbaine. Une similitude franche avec la tour médiévale.
Création d’un nouveau monument repère: renouvellement de la silhouette historique bâtie
Par ailleurs, la Tore Velasca revêt à plus d’un égard l’apparence de la tour de guet de l’architecture lombarde. En effet, le couronnement en saillie de la tradition médiévale est fort similaire au débord du volume supérieur de la tour, et les mâchicoulis d’hantant semblent être retranscrits par les poteaux en baïonnette. ( FIG. 12 ) Ces similitudes ont cependant des portées bien supérieures au seul esthétisme, compte tenu du contexte d’après-guerre trouble et incertain dans lequel prend place la Tore Velasca. Ainsi BBPR, témoignant de sa vigoureuse implication sociale, redonne par son édifice une forme à la symbolique rassurante et protectrice à la ville, sorte de monument glorifiant la reprise économique, sociale et politique Italienne.
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FIG 12 / Comparaison typologique entre la tour de Porta Castello à Vicenze ( © Tititateo ) et la Torre Velasca
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La contextualisation jusqu’aux détails. Au delà des références à l’échelle urbaine, la Torre Velasca affiche aussi son caractère historique à plus fine échelle, notamment dans sa matérialité, ses fenêtres et son toit. La palette des matériaux de façades ( enduit de ciment, grès de marbre, béton et pierre de Véronne) est officiellement choisie de façon à réduire l’entretien et garantir une durabilité maximale. Elle se révèle cependant similaire aux matériaux traditionnels du Centre Milanais, reprenant leur teinte et leur rugosité. Par ailleurs, les fenêtres intègrent les dimensions historiques verticales. Le toit de la Torre Velasca n’est pas non plus sans rappeler le contexte environnant. “ I cannot deny that we purposely used the traditional shapes like the hip-ended roofs” Ludovico Barbiano di Belgiojoso2 Ce choix ambigu pour un bâtiment supposé moderne est déduit de deux facteurs. Premièrement, le couronnement doit intégrer les locaux techniques tout en respectant la composition volumétrique globale. Il est de plus issue de la volonté de rendre le bâtiment lisible depuis le tissus urbain avoisinant. Par delà la recherche d’un renouveau spatial structurant, la Tore Velasca offre aussi une plasticité jusqu’alors inédite pour sa typologie.
FIG 13 / Simitude entre un immeuble historique et la Torre Velasca ( © B Plessi )
Les CIAM (Congrès Internationaux d’Architecture Moderne) sont les rencontres des grands architectes et urbanistes internationaux des années 1930, organisées dans le but de poser les bases théoriques du mouvement architectural et urbanistique moderne et fonctionnaliste afin de promouvoir ces idées dans l’entre-deux-guerres. 1
Intervista sulla torre velasca all’architetto Belgiojoso, in BBPR. La Torre Velasca, editrice Abitare Segesta, Milan, 1882 2
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UNE FAÇADE À L’EXPRESSION PLASTIQUE INHABITUELLE Le language de la structure porteuse L’œuvre majeure de BBPR se distingue notamment par ses piliers extérieurs se répétant sur ses quatre façades. Plusieurs raisons peuvent expliquer ce parti pris audacieux, transcendant ses contemporains. L’expression rationaliste de la Tore Velasca à travers la théâtralisation de ses piliers porteurs est à ce point poussée qu’elle semble plus empruntée au vocabulaire gothique du Duomo Milanais voisin qu’à celui des architectes modernes ( FIG. 14 ). En effet, mue par une volonté aigue d’économie de moyens, BBPR travaille la section des poteaux en fonction des charges auxquels ils sont soumis dans la plus stricte nécessité. Les poteaux s’affinent et leurs sections évoluent, passant du carré plein en base à un profil en T au sommet, à mesure qu’ils s’élèvent sur la tour. L’effet visuel produit est une accentuation de la perspective et une décomposition lumineuse sur la surface même du pilier, ce qui lui confère une identité singulière propre. Cette évolution structurelle et lumineuse des pilliers est aussi présente dans la construction gothique, inspiration dont les architectes ne se cachent guère.
FIG. 14 / Comparaison entre le travail de section d’un pillier gothique et de la Torre Velasca ( illustration reprise de Eugène Viollet-le-Duc )
Une façade unie par une structure ordonnée. A l’ordre monumental du pillier vient s’ajouter celui du raidisseur des parois extérieures de remplissage. En effet, des éléments porteurs communs aux différents volumes programmatique apparaissent en surépaisseur à intervalle régulier sur l’intégralité des façades ( FIG. 15 ). Ceux ci permettent le développement des fenêtres, loggias ou toutes autres ouvertures de la façon la plus libre possible. ( FIG.16 ) Ces deux ordres superposés, dialoguant à l’échelle urbaine jusqu’à celle du détail, unifient la tour et renforcent sa verticalité.
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FIG. 15 / Raidisseur de façade et pilliers porteurs (ech 1/50e)
FIG. 16 / La superpostion des ordres de façade ( © Souls at Zero )
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LA STRUCTURE AU SERVICE DE L’ORGANISATION INTERNE FIG. 17 / Comparaison de résolutions du plan “ libre “ à travers le 20e siècle La Villa Savoye - Corbusier : plan libre, poteaux dalle
Le centre Georges Pompidou - Rogers et Piano: plan flexible, structure extérieure
La Torre Velasca - BBPR: plans pluriels, pilliers et noyaux
Le Plan Libre interprété Si les poteaux extérieurs ordonnent et esthétisent les façades de la Torre Velasca, là n’est pas leur raison première. Leur emplacement peu commun n’a pas pour cause la recherche d’un effet stylistique particulier mais l’adaptabilité optimale intérieure. L’idée étant de pouvoir agencer les appartements et les bureaux le plus librement possible autour du noyau, BBPR crée des plans dénués de toute contrainte structurelle enclos par une façade continue. Dès lors, l’absence des poteaux à l’intérieur du plan est expliqué, sans pour autant justifier leur exubérante expression extérieure. La Torre Velasca s’inscrit de la sorte dans son époque, la liberté de composition intérieur étant une préoccupation redondante pour les architectes du vingtième siècle. Le Corbusier, notamment avec le système domino et par la villa Savoye, a théorisé le concept de plan libre, affranchissant les parois intérieures de la structure dans une quête de flexibilité. La quintessence de cette flexibilité apparaît avec le Centre Georges Pompidou de R.Rogers et R.Piano, qui pour un programme mixte et évolutif dispose de vastes surfaces ( 7 500 mètres carrés utiles ) avec une structure essentiellement extérieure. ( FIG. 17 ) La traduction spatiale du plan libre. Les espaces utiles entre poteaux et noyau sont agencés différemment à chaque étage, témoignant des possibilités offertes par l’organisation de la structure. Ainsi, les parois intérieures sont non porteuses et composées de panneaux de bois préfabriqués. Elles sont disposées afin de répondre au mieux au programme, de la même façon que les meubles fixes et semi-fixes dessinés eux aussi par les architectes. Cependant, la notion du plan libre est ici en partie perdue par l’immobilité perçue du plan et du mobilier.
FIG. 18 / Photocollage de présentation du projet par BBPR. La perspective montre l’espace intérieur libéré de toute structure ce qui conforte le choix de positionner les pilliers à l’extérieur
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CONCLUSION Pour beaucoup, l’approche rationaliste sans cesse évoquée par BBPR à tous les stades de conception de la Torre Velasca transparaît comme le prétexte à une esthétique plastique arrêtée. La reprise de symboles historiques, visant à harmoniser la tour et son contexte, est d’avantage perçue par les critiques comme une extravagance d’un autre temps catapultée dans le monde moderne que comme une tentative réelle d’adaptation à ce monde. “You are resisting contemporary life” Bakema1 Certains déplorent de plus le manque de possibilité d’adaptation de la tour, ce qui la positionne en marge de la société actuelle qu’on sait évolutive. En effet, il est interressant de mettre en lumière le double discours de BBPR, qui justifie le flanquement extérieur des pilliers par le dégagement de plans intérieurs largement fléxibles, mais organise ces derniers de façon pérreines par l’immuabilité des murs et du mobilier. Il n’est cependant pas absurde de remarquer que, par ce formalisme au combien critiqué, BBPR a réussi l’implantation d’une typologie nouvelle au cœur de la ville historique de Milan à ce point qu’il est difficile de discerner son âge des autres monuments sans faire de plus amples instigations. La Torre Velasca triomphe ainsi à créer la transition entre la Milan Historique et celle du 21e siècle. “ Nous devons avoir le courage d’inscrire le signe de notre époque et plus nous serons capables d’être modernes, mieux nous serons reliés à la tradition et nos oeuvres s’harmoniseront avec les milieux environnants préexistants ” Emesto Nathan Rogers2
Jacob Bakema, remarques sur la Tour Velasca au 10e CIAM à Otterlo, 1959 dans MALLGRAVE Francis, CONTANDRIOPOULOS Christina, Architectural Theory. Volume II An Anthology from 1851-2005, Balckwell publishing, Malden, Oxford, Victoria, 2008 1
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BBPR. La Torre Velasca, editrice Abitare Segesta, Milan, 1882
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