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Jury Christian Drevet, architecte, enseignant ENSA de Saint Etienne Jacques Schmitt, Direction du Développement et de l'Aménagement Université de Grenoble Nicolas Dubus, architecte, enseignant ENSA de Grenoble Eric Seguin, architecte, enseignant ENSA de Grenoble Catherine Pierre, rédactrice en chef adjointe de la revue AMC Hubert Guillaud, architecte, enseignant ENSA de Grenoble Grégoire Chelkoff, architecte, enseignant ENSA de Grenoble (directeur d’études) Magali Paris, ingénieure paysagiste, enseignante associée ENSA de Grenoble (représentant de l’UE)
Encadrement du master ACSE :
Grégoire Chelkoff, responsable du Master ACSE, architecte, professeur Yann Blanchi, architecte, maître-assistante associée Jacques Scrittori, architecte d’intérieur, maître-assistant associé Magali Paris, ingénieure paysage, maître-assistante associée
Avec les participations de :
Nicolas Tixier, architecte, maître-assistant Walter Simone, architecte, vacataire
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Introduction Nous sommes toujours en mouvement dans notre environnement. La perception de celui-ci est liée à l’action et plus particulièrement au mouvement. Ce dernier intervient à différentes échelles du déplacement, de la grande distance au geste ou à la pensée du mouvement. Le mouvement est définit comme le déplacement d’un corps par rapport à un point fixe de l’espace à un moment déterminé12. Le déplacement quant à lui est l’action de se déplacer et le résultat de cette action. Ces définitions nous font penser que le mouvement, comme l’affirme Alain Berthoz, 3 est en fait la simulation de l’action. Nous pouvons parler de mouvement lorsqu’il y a une décision, une volonté propre. La question du mouvement, sa reconnaissance comme enjeu important pour les disciplines de l’espace semble apparaître avec le développement des mobilités de l’après-guerre, particulièrement, comme le souligne Frédéric Pousin4, aux Etats Unis. En France, comme nous le savons, Le Corbusier est un des premiers à parler de « promenade architecturale », lorsqu’il évoque la villa Laroche –Jeanneret ou encore la villa Savoye. Lors 1 Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales, http://www.cnrtl.fr/definition/ mouvement, consulté le 03/03/2012 2 BERTHOZ Alain, Le sens du mouvement, Paris, Ed Odile Jacob, 1997 3 POUSIN Frédéric, De la chorégraphie à l’architecture du paysage : noter pour concevoir, In Welcomme Bernard (dir), Comme une danse, Arles, les carnets du paysage, 2007,n°1314, p25 4 LE CORBUSIER, entretien avec les étudiants des écoles d’architecture, Paris, minuit, 1957
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d’une discussion avec des étudiants en architecture5, il montre l’importance du mouvement dans l’architecture : « Dedans et dehors, dessous et dessus. Dedans, on entre, on marche, on regarde en marchant et les formes s’expliquent, se développent, se combinent. Dehors, on approche, on voit, on s’intéresse, on tourne autour, on découvre. On ne cesse de recevoir des commotions directes et successives. Et le jeu joué apparaît. On marche, on circule, on ne cesse de bouger, de se retourner. Observez avec quel outillage l’homme ressent l’architecture : il a deux yeux qui ne peuvent voir que devant ; il peut tourner la tête latéralement, ou de bas en haut, tourner le corps ou transporter son corps sur ses jambes et tourner tout le temps. Ce sont de centaines de perceptions successives qui font la sensation architecturale. C’est sa promenade, sa circulation qui vaut, qui est motrice d’évènements architecturaux. Par conséquent, le jeu joué n’a pas été établi sur un point fixe central et idéal, rotatif et à vision circulaire simultanée. » De ces éléments essentiels de la pensée architecturale contemporaine, un nouvel environnement architectural semble apparaître : celui du mouvement, du déplacement, de la dynamique. Tschumi explique que c’est le mouvement qui sculpte l’espace. C’est-à-dire que l’espace est modelé et défini par ce qu’il se passe à l’intérieur et alentour. Il propose que l’espace ne peut exister sans mouvement.6 5 LEIGHTON Joanne, We can build you, in CORIN Florence (dir.), danse et architecture, Bruxelle, nouvelles de danse, 2000, n°42-43, p 203 6 Disponible sur http://fr.wikipedia.org/wiki/Perception_de_l%27espace consulté le 27 mars 2012
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Mouvement du corps
Vécu
Simulé
Représentation
Nous pouvons nous demander comment le mouvement du corps participe de l’analyse et de la conception de l’architecture ? Nous pensons qu’il existe des outils de mise en mouvement du corps et que ceux-ci constituent un bagage pour aborder la question du mouvement dans l’architecture. Au travers de ce mémoire nous verrons qu’il existe trois types de mouvements : le mouvement vécu, le mouvement simulé et le mouvement représenté. ces différents types de mouvement sont à la fois complémentaires et différents. En effet, que la représentation du mouvement est un moyen de simuler un mouvement qui est ou sera vécu une fois le projet réalisé. C’est cette tension entre mouvement vécu et mouvement simulé qui nous intéressera plus particulièrement. Ce travail s’appuie sur une recherche bibliographique qui permet de classer le mouvement selon trois approches différentes. Ainsi les sciences du mouvement cherchent à comprendre ce qu’il se passe lorsque nous effectuons un mouvement ou voyons une personne en faire un. Dans cette partie, c’est la dimension cognitive du mouvement qui est abordée grâce à l’étude des travaux de deux scientifiques reconnus : James J. Gibson et Alain Berthoz. La seconde approche du mouvement est celle des
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arts tels que la danse et la sculpture. En effet, ce sont tous deux des arts qui prennent en compte le corps et son rapport à l’espace. Enfin, nous aborderons le mouvement d’un point de vue architectural. Les architectes étudiés ici, sont ceux qui parlent de mouvement et particulièrement du mouvement du corps lorsqu’ils évoquent leurs œuvres . Nous verrons aussi comment le mouvement peut être enregistré à travers différentes notations du mouvement. Au travers de cette étude, nous essaierons de dégager des outils de mise en mouvement du corps. Ces outils peuvent servir à la fois à l’analyse et à la conception de l’architecture. ils permettent ainsi de savoir si un bâtiment offre des expériences de mouvementdu corps. Nous allons mettre en pratique certains outils à travers le travail de projet afin de concevoir un bâtiment, la Maison de l’Université, où le mouvement du corps occupe une place importante. Cet édifice, situé sur le campus de Grenoble, est un rectangle construit sur toute sa surface et sculpté par des poches d’ambiance. Ce travail montre comment les outils dégagés précédemment participent à la conception du projet et permettent de réfléchir le bâtiment à l’échelle du corps.
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SOMMAIRE Introduction
p4
I/ Les
p14
sciences du mouvement
A. Le Flux optique plutôt que l’observation statique : la théorie de James J. Gibson Perception visuelle Structure lumineuse B. Le mouvement, un sixieme sens Le cerveau, un simulateur Décision et action La forme simule le mouvement C. La mémoire du mouvement Mémoire spatiale Mémoire de déplacements Mémoire de l’expérience
II/ La
p17
p26
sculpture et la danse, arts du
mouvement
p14
A. Les installations de Georges Trakas Le pont de l’épée Isle of view 111 Marches vers la Paix
p34
p34
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B. Richard Serra Equilibre et stabilité Promenade C. Notation du mouvement en danse Notation de Laban Notation de Benesh Notation de Conte
III/ Le
mouvement en architecture
p40
p46
p52
A. L’expérience de l’espace Le mouvement comme mesure de l’espace Multiplicité ds points d vue Espace «vrai» Continuité spatiale L’espace vivant
p46
B. L’architecture dynamique Rudolf Arnheim L’architecture baroque Le théâtre de Loïe Fuller La vision et les autres sens? Peter Zumthor L’architecture de santiago Calatrava
p64
C. Notation du mouvement en architecture Notation de l’espace, du mouvement et de l’orientation
p76
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Lawrence Halprin Manhattan Trabscripts Expérience de notation personnelle Une boite à outil pour penser le
mouvement dès la conception
IV/ Dynamique Maison
en poche, le projet de la
de l’Université
A. Contexte Opération Campus Schéma Directeur d’Aménagement B. Des poches d’ambiance La Maison de l’Université La poche sonore La poche de fraicheur La poche de lumière Organisation spatiale
p101
p101
p104
Conclusion
p115
Bibliographie
p117
Remerciements
p126
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Le champ de flux optique pour un pilote lors d’un attérissage (BRUCE Viki et GREEN Patrick, La perception visuelle, physiologie, psychologie et écologie, Grenoble, Presses universitaires de Grenoble, 1993, p 281)
I/ Les
sciences du mouvement
A. Le flux optique plutôt que l’observation statique : la théorie de James J. Gibson La perception de l’espace désigne les processus sensoriels, principalement visuels et kinesthésiques, qui permettent de localiser un objet dans l’espace.7 La fonction principale de la perception est de nous fournir des informations sur notre environnement. Ces informations sont ensuite traitées par le cerveau qui va envisager les différentes possibilités d’actions face à ces informations. Nous verrons ceci dans la seconde partie qui traite de la dimension cognitive du mouvement Perception visuelle La vue est souvent considérée comme le sens dominant dans l’appréhension et la compréhension de l’espace. Les théories sur la perception visuelles sont, avant la théorie de Gibson, basées sur l’idée que des images statiques se forment sur la rétine. Gibson soutient que ce sont le flux et les perturbations dans la structure du réseau optique qui fournissent l’information utile à la perception et qui renseigne l’observateur sur son environnement. Nous appelons réseau optique tout ce qui arrive à l’œil que ce soit l’intensité lumineuse, les couleurs, les textures, les ombres…
7 GINSBURG Carl, Le mouvement et l’esprit, In CORRIN Florence (dir), Scientifiquement danse : quand la danse puise aux sciences et réciproquement, Bruxelle, nouvelles de danse, 2006, n°53, p 38
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La perception visuelle est en fait le résultat d’un flux optique plutôt que l’observation statique d’images. La théorie de Gibson8 repose sur le fait que les stimuli visuels ne sont pas l’image formée par la lumière sur la rétine à un instant donné mais une notion plus riche intégrant flux optique et transformations. Cette redéfinition inclut par conséquent le mouvement dans le stimulus : les transformations perçues par l’œil sont provoquées par le mouvement de l’observateur (ou des objets).
Structure lumineuse
Gibson rejette donc l’affirmation selon laquelle c’est l’image rétinienne qui constitue le point de départ du traitement visuel. Il affirme que c’est le réseau total des rayons lumineux atteignant l’observateur qui fournit une information directe sur l’agencement de l’espace ainsi que sur le mouvement de l’environnement de l’observateur. La lumière qui arrive à l’œil, soit directement, soit indirectement, par réflexion sur des objets,
8 BRUCE Viki et GREEN Patrick, La perception visuelle, physiologie, psychologie et écologie, Grenoble, Presses universitaires de Grenoble, 1993, p 274-291
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permet de percevoir notre environnement. Cependant Gibson soutient que c’est la « structure » contenue dans la lumière, plutôt que la stimulation lumineuse, qui fournit les informations pour la perception visuelle. Il s’appuie sur un exemple simple : « une lumière diffuse, non structurée, telle qu’on l’obtient en plaçant des demi-balles de ping-pong sur les yeux en se plaçant dans une pièce bien éclairée, produit une perception de « rien ». Pour percevoir les choses plutôt que « rien », la lumière doit être structurée »9. Cette structure existe dans les surfaces et leurs textures, celle-ci ordonne à son tour la lumière qui atteint l’observateur. Gibson estime que l’information importante dans la perception de l’espace réside dans la diversité des informations présentes dans le réseau optique, que ce soit les variations de couleur, de texture, de luminosité. Il ne faut cependant pas oublier que, pour Gibson, le mouvement est essentiel pour la perception de notre espace. Les variations d’informations sont produites par le mouvement de l’observateur (et celui des objets) dans l’espace. Ce mouvement donne des informations solides sur la position du corps par rapport à l’environnement, l’agencement et la forme de l’espace. Lorsque nous bougeons dans l’espace, notre réseau optique entier est transformé. La théorie de Gibson est, on l’a vu, centrée sur la perception visuelle. Pour résumer, son idée est que toutes les informations nécessaires à la perception de l’espace sont disponibles dans 9 BRUCE Viki et GREEN Patrick, La perception visuelle, physiologie, psychologie et écologie, Grenoble, Presses universitaires de Grenoble, 1993, p275
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l’environnement et il va s’agir pour l’observateur de saisir ces informations. Ceci est rendu possible par le mouvement de l’observateur ou des objets dans l’espace. La perception extrait l’information présente dans l’environnement, cette information est véhiculée par la lumière. Selon Gibson, notre environnement est objectivement structuré morphologiquement et qualitativement mais cette objectivité est « écologique » : elle s’appuie sur des éléments qui existent toujours dans notre environnement. Ces éléments invariants concernent la forme, la texture, la réflexion d’un objet, d’une surface… Nous les retrouvons toujours dans notre quotidien même si les textures varient un objet en aura toujours une, si la forme de l’espace change, un espace aura toujours une forme…Pour Gibson, si l’information spatiale contenue dans un stimulus est en parti donné par ces invariants statiques, elle l’est surtout donnée par ses invariants dynamiques. L’importance du mouvement tient donc en tout premier lieu à son rôle dans la production de ces invariants. Gibson pense que perception et action sont intimement liées. Le sens de la vue jouant un rôle dominant dans la perception de notre espace.
B. Le mouvement, un sixième sens Nous venons de voir que, selon Gibson, nous percevons notre environnement grâce au flux optique et aux mouvements que nous faisons dans l’espace. Cette théorie sur le mouvement vient bouleverser la croyance que nous percevons des images statiques
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de notre environnement. Les théories sur le mouvement semblent prendre dès lors une place importante dans la conception et l’analyse de notre environnement. Le cerveau, un simulateur Alain Berthoz,10 ingénieur, psychologue et neurophysiologiste dirige le laboratoire de physiologie de la perception et de l’action. Il pense que le cerveau est un simulateur capable d’inventer des hypothèses qu’il projette sur le monde. La perception de notre espace ne serait donc pas passive, le cerveau n’est pas un ordinateur calculant à toute vitesse à partir des informations reçues des sens, mais serait un processus dynamique, actif, sélectionnant les évènements de la vie. « Nous comprenons que le mouvement est nécessaire à la connaissance du monde, que la perception est un processus actif, utilisant ce que nous avons appelé avec Jacques Droulez des mémoires dynamiques. »11 Il trouve que nous accordons trop d’importance au langage au détriment de l’action et du corps sensible. Il va jusqu’à déclarer « Il n’y a pas de vie sans mouvement » lors d’une conférence où il expose son livre le sens du mouvement12. Il souligne que la survie dépend du mouvement, commandé et contrôlé par des processus extrêmement rapides liés à l’anticipation. Il explique que les 10 BERTHOZ Alain, Le sens du mouvement, Paris, Ed Odile Jacob, 1997 11 PESSIS-PASTERNAK Guitta, le mouvement ce sixième sens- Les expériences en apesanteur d’Alain Berthoz, du Collège de France. [en ligne], Libération, Science le 20 mai 1997, disponible sur http://www.liberation.fr/sciences/0101214342-le-mouvement-ce-sixiemesens-les-experiences-en-apesanteur-d-alain-berthoz-du-college-de-france consulté le 16 Avril 2012 12 BERTHOZ Alain, Le sens du mouvement, Paris, Ed Odile Jacob, 1997
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espèces qui ont remportées l’épreuve de la sélection naturelle sont celles qui ont su gagner quelques millisecondes pour capturer une proie, pour échapper à un prédateur. Le facteur vitesse dans le mouvement est important pour notre survie. Or puisque le cerveau n’est pas un mécanisme traitant à une vitesse extrême les informations reçues de nos sens, la simulation de l’action permet de prévoir les conséquences de l’action. C’est l’anticipation qui permet de prédire ces conséquences. Nous ne pouvons dépendre uniquement de ce que nous apprennent nos sens. Berthoz l’exprime ainsi : « le cerveau est avant tout une machine biologique à aller vite en anticipant. »13 On perçoit et on agit, on pense directement dans l’action. Pour illustrer ses propos il prend l’exemple d’un champion de ski. Il ne traite pas en permanence les informations venant de ses sens, ça serait trop long. Dans son esprit, il déroule la course, simule son trajet, prévoyant l’état dans lequel ses capteurs sensoriels devraient se trouver, puis il vérifie si leur état correspond à la prévision qu’il a faite. « L’évolution a donc clairement sélectionné des capteurs qui peuvent prédire le futur ».14 Le cerveau réussit à faire des prédictions en quelques millisecondes grâce à des astuces qui permettent de gagner du temps. Il explique que pour connaître la distance pour éviter une collision par exemple, nous ne la 13 GINSBURG Carl, Le mouvement et l’esprit, In CORRIN Florence (dir), Scientifiquement danse : quand la danse puise aux sciences et réciproquement, Bruxelle, nouvelles de danse, 2006, n°53, p 49 14 GINSBURG Carl, ibid, p51
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calculons pas, ou plutôt notre cerveau ne la calcule pas, il mesure la dilatation de l’image sur la rétine, donnant ainsi le temps jusqu’au contact. La perception de notre espace est une « construction multisensorielle »15. Nous avons vu que la perception et le mouvement sont indissociables, or pour Berthoz, le mouvement est un sixième sens résultant de la coopération entre les différents capteurs sensoriels. Le cerveau combine toutes les sensations qui découlent des différents capteurs sensoriels comme les muscles, la vision, les capteurs de l’oreille interne… c’est pourquoi il nomme le mouvement un sixième sens. Le cerveau sélectionne les capteurs utiles en fonction de l’action prévue. « La perception est une sélection active »16. Lorsque nous sommes dans un espace et que nous apercevons une forme s’avançant vers nous, nous n’avons que quelques millisecondes pour décider si nous sommes en danger ou non, et réagir face à cette décision : se déplacer, marcher plus vite ou bien rester sur place. 15 PESSIS-PASTERNAK Guitta, le mouvement ce sixième sens- Les expériences en apesanteur d’Alain Berthoz, du Collège de France. [en ligne], Libération, Science le 20 mai 1997, disponible sur http://www.liberation.fr/sciences/0101214342-le-mouvement-ce-sixiemesens-les-experiences-en-apesanteur-d-alain-berthoz-du-college-de-france consulté le 16 Avril 2012 16 PESSIS-PASTERNAK Guitta, le mouvement ce sixième sens- Les expériences en apesanteur d’Alain Berthoz, du Collège de France. [en ligne], Libération, Science le 20 mai 1997, disponible sur http://www.liberation.fr/sciences/0101214342-le-mouvement-ce-sixiemesens-les-experiences-en-apesanteur-d-alain-berthoz-du-college-de-france consulté le 16 Avril 2012
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Décision et action Il explique lors d’une conférence, qu’il y a à partir de l’image d’un objet ou d’un espace, plusieurs voies visuelles. Une grande voie passant par la partie supérieure du cerveau identifie où nous sommes. Une seconde voie va vers le lobe temporal et identifie le « quoi », il reconstruit le visage de chacun, les objets et est spécialisé dans l’identification des objets, éléments de l’espace. La dernière voie va vers une structure appelée amygdale, qui est fondamentale pour l’émotion. C’est cette structure qui fait que nous trouvons un espace dangereux ou pas. Elle attribue directement à l’objet, l’espace, la personne une valeur de survie, qu’elle soit bonne ou mauvaise. Cette valeur est ensuite évaluée et tout ceci donne lieu à des décisions, travaillées dans la zone antérieur du cerveau, et guident l’action. Ce résumé physiologique qui montre comment nous analysons les formes visuelles en est de même pour les autres sens et leur combinaison. La perception d’une forme n’est donc jamais passive, elle est décision, conscient ou inconsciente. Lorsque nous regardons la forme de l’espace, d’un objet, du paysage qui nous entoure, le cerveau ne se contente pas de les analyser, il décide et anticipe. « Vous décidez que ce que vous voyez est un chien derrière un arbre et non pas deux morceaux de chien »17. Notre cerveau décide de reconstruire la forme. Nous rejoignons ici la théorie de Gibson sur la perception visuelle : lorsque nous bougeons par 17 BERTHOZ Alain, Carnets de recherche Design et cognition, disponible sur http://www. ensci.com/uploads/media/cahier_Berthoz.pdf consulté le 17 avril 2012
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rapport à un objet, le flux visuel est différent pour l’objet et l’arrière-plan, cela nous permet d’établir immédiatement une distinction entre objet et arrière-plan.18 C’est pour Berthoz, une décision que prend notre cerveau de reconstruire la forme dissimulé partiellement derrière un objet. Une bonne décision commence donc par une bonne perception des données. Or percevoir c’est, selon Alain Berthoz, choisir les informations qui nous semblent pertinentes par rapport à l’action envisagée. Nous sommes obligés de sélectionner les informations que l’on perçoit car nos connaissances sont limitées mais Berthoz nous répond que l’émotion joue un rôle important dans notre faculté de sélection et de perception comme point de départ de la décision. Afin de comprendre comment le cerveau sélectionne les informations, il faut prendre en compte le rôle des émotions dans la perception de notre espace, affirme Alain Berthoz. Les émotions ne se réduisent pas à des réactions, à ce qui nous fait peur ou qui nous plait, elles participent à la perception de notre environnement et ainsi à la décision et à l’action. L’émotion serait une préparation à l’action, comme le signale son étymologie « e-movere », associé au mouvement Alain Berthoz explique dans son ouvrage, le sens du mouvement, que même lorsque nous pensons être statiques, le cerveau lui, pense toujours en mouvement. En effet, dans le 18 GINSBURG Carl, Le mouvement et l’esprit, In CORRIN Florence (dir), Scientifiquement danse : quand la danse puise aux sciences et réciproquement, Bruxelle, nouvelles de danse, 2006, n°53, p 40
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corps humain, il existe un certain nombre de capteurs pour le mouvement (dans les muscles, dans les articulations, dans le cerveau). Ceux-ci permettent d’évaluer le déplacement relatif du corps ou d’une partie du corps. Ainsi, avant d’avoir effectué un geste ou un déplacement, le cerveau le simule. Lors de cette simulation les capteurs neuronaux stimulés sont les mêmes que ceux mis en jeu lorsque nous effectuons le mouvement. Il cite les neurone-miroirs, qui sont des neurones qui codent aussi bien la production d’un mouvement que la perception du mouvement. Ces neurones se déchargent avant de faire un geste et préparent donc une action spécifique ; mais si quelqu’un fait le même geste, le même neurone s’active dans notre cerveau. Le geste de la personne, simulé dans notre cerveau, fait appel aux mêmes neurones que ceux qui produisent ce geste Par exemple, lorsque nous voyons une porte, nous allons nous imaginer en train de la franchir. Dans notre cerveau, cette simulation revient à franchir la porte, à effectuer ce déplacement, même si notre corps ne la franchit pas réellement. La perception est donc simulation de l’action. « Percevoir un fauteuil, disait le psychologue Janet, c’est s’imaginer le mouvement qu’il faudrait faire pour l’atteindre. »19 Il explique que les formes ne sont pas forcément statiques, ce 19 PESSIS-PASTERNAK Guitta, le mouvement ce sixième sens- Les expériences en apesanteur d’Alain Berthoz, du Collège de France. [en ligne], Libération, Science le 20 mai 1997, disponible sur http://www.liberation.fr/sciences/0101214342-le-mouvement-ce-sixiemesens-les-experiences-en-apesanteur-d-alain-berthoz-du-college-de-france consulté le 16 Avril 2012
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sont des formes qui produisent des mouvements ou qui expriment le mouvement, une trajectoire. Décrire la forme d’une architecture par exemple, sans avoir recours à un crayon ou une maquette, peut se faire par un mouvement du bras ou de la main. Le mouvement simule la forme dans notre cerveau. Nous avons interviewé des étudiants en Master 1 d’architecture afin qu’ils nous expliquent leur projet et le processus de conception. Il s’est avéré que pour parler de la forme de leur projet, plus de la moitié d’entre eux utilisent un geste de la main. Le mouvement de la main, décrit la forme de l’espace et provoque une image dans notre cerveau. C’est le geste qui fait appel à un imaginaire spatial.20 Pour résumer, A. Berthoz nous explique que nous pensons en mouvement. Les mêmes structures sont impliquées dans l’observation et dans l’exécution d’une action. Nous pensons en mouvement. Bergson rejoint cette idée lorsqu’il dit « l’idée du mouvement c’est déjà le mouvement qui commence »21 La forme simule le mouvement Nous avons vu précédemment que notre cerveau simule le mouvement lorsqu’il voit une personne effectuer un geste. Mais la simulation du mouvement va au-delà. Alain Berthoz cite une expérience réalisée par Semir Zaki, un neuroscientiste anglais. Il a présenté des formes statiques, des dessins, des croquis à des personnes. Il a pu ainsi démontrer que lorsque nous voyons 20 cf annexes 21 ROUSSEAU Pascale, Figures de déplacement : l’écriture du corps en mouvement, In BUSLOT Olivier (dir), Perte d’inscription, Orléans, Exposé, 1995, n°2, p 90
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une image, l’aire de notre cerveau qui est impliquée dans la perception de la vitesse dans notre environnement visuel réagit. Or la vitesse est l’action de se déplacer rapidement. La vitesse est donc une composante du mouvement. Nous pouvons ainsi penser que lorsque nous voyons une image, une forme nous imaginons, simulons le mouvement. Lorsque nous voyons une calligraphie nous percevons le mouvement de la main du calligraphe. Alain Berthoz, dans le sens du mouvement, accuse les architectes d’avoir oublié le mouvement en imposant des formes rectangulaires, il prend alors l’exemple du ministère des finances ou de la Grande Bibliothèque à Bercy, où les formes « nous empêchent d’avoir le plaisir du mouvement »22. Il prend comme contre-exemple l’architecture de Paul Andreu. L’architecte cherche à alléger son architecture et donne ainsi un mouvement que nous percevons, que nous vivons mentalement. Les courbes et formes fluides sont particulièrement présentes dans son architecture. La critique de Berthoz semble s’appuyer sur la forme et les lignes de l’architecture. Celle-ci peut être modelée, sculptée et faire ainsi appel à l’imaginaire du mouvement. Les formes qui font appel au mouvement semblent être, pour Alain Berthoz, des lignes fluides, des courbes qui s’opposent à l’orthogonalité, aux lignes droites et inflexibles. L’idée de fluidité semble être un moyen de simuler le mouvement. Ozenfant et Jeanneret ont écrit dans les années 1920 à propos des sensations provoquées par des figures 22 BERTHOZ Alain, Le sens du mouvement, Paris, Ed. Odile Jacob, 1997
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géométriques. La courbe apparait encore une fois comme l’idée du mouvement : « le ligne verticale, image de la force de gravité, horizontale comme idée de repos, oblique comme expression dynamique et, finalement, courbe comme sensation suave de mouvement. »23 En introduisant son live, Giedion évoque lui aussi, de manière plus rapide, la sensation de mouvement donné par, pour lui, une ligne verticale : « l’horizontale est la ligne de repos : la verticale, celle du mouvement. »24 Il n’évoque ici que les lignes droites sans parler des lignes brisées ou des courbes
C. La mémoire du mouvement Alain Berthoz se penche sur l’idée de la simulation du mouvement dans le cerveau en démontrant que lorsque nous voyons une forme, une ligne, une personne en mouvement, nous simulons ce mouvement. Il existe encore une manière de simuler le mouvement, cette manière passe par la mémoire. Mémoire spatiale Nous pouvons nous demander ce qu’il se passe dans notre cerveau lorsque nous parcourons un trajet connu. C’est la mémoire 23 JEANNERET Charles-Edward et OZENFANT Amédée, sur la plastique, l’esprit nouveau, n°1, octobre 1920, p41, cité par AMALDI Paolo, Architecture Profondeur Mouvement, Gollion, Ed In folio, 2011, Chapitre 08 immersion-abstraction : flux d’images, p393 24 GIEDION Siegfried, Espace-temps architecture, Bruxelles, Ed. Connaissance, 1978
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spatiale qui entre en jeu. Il existe deux conceptions possibles, elles diffèrent selon les personnes. La première est la conception d’une carte mentale statique. Elle est composée de repères visuels et de distance. La seconde est la conception de cartes mentales dynamiques. Elle s’appuie également sur des repères visuels et de distance mais est aussi constitué d’une série de mouvements du corps, liés par exemple aux changements de direction. Alain, Berthoz, en s’appuyant sur une série d’expériences, remet en cause l’idée selon laquelle le cerveau est conçu pour traiter les informations visuelles cartographiques. Il fait l’hypothèse que la mémoire de l’espace fait en réalité appel à une mémoire du mouvement qu’il appelle « mémoire topokinésthésique ». Cette mémoire est basée sur le mouvement du corps que nous pouvons effectuer et sur des repères visuels ou acoustiques. Les cartes mentales dynamiques simulent donc un parcours qui comprendrait les repères visuels, les distances, les mouvements de notre corps, mais aussi le sens auditif. Henri Poincaré a écrit25 « Localiser un objet en un point quelconque de l’espace signifie se représenter les mouvements [...] qu’il faut faire pour atteindre cet objet. » Il propose ainsi une théorie dynamique de la mémoire spatiale qui va à l’encontre de la théorie qui suppose que le cerveau code l’espace en se basant sur des cartes topographiques statiques. 25 DE SUDRES Daniel-Philippe, Mémoire de mouvement, mémorisation [en ligne], Neuroconnectique, 2006 disponible sur http://neuroconnect.club.free.fr/d64.htm consulté le 19 avril 2012
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Nous avons aussi plusieurs façons de mémoriser les espaces dans lesquels nous nous déplaçons. Alain Berthoz26 explique que nous avons deux stratégies mentales de nous rappeler du déplacement que nous avons effectué. Par exemple, nous pouvons nous rappeler un trajet en évoquant notre mouvement, les évènements qui sont survenus, (mémoire dite épisodique), c’est ce que nous appelons le point de vue « égocentré » et une stratégie de « route ». Il s’agit d’une mémoire séquentielle des actions. La seconde est un point de vue « allocentré », grâce à une stratégie de « survol ». Nous nous rappelons ainsi notre trajet en évoquant une carte mentale de l’espace. « Le cerveau utilise des réseaux différents pour l’action dans des espaces différents. L’espace et la forme des espaces sont utilisés pour la mémoire. »27 Mémoire des déplacements Il démontre par ailleurs qu’un homme, privé de la vue, est tout à fait capable d’évaluer correctement ses déplacements dans l’espace. Ainsi la mémoire des déplacements est une mémoire qui permet au cerveau de simuler un mouvement et non pas de représenter simplement des lieux successifs. Nous avons vu que lorsque nous nous déplaçons dans un espace, nos sens, à l’aide du mouvement, permettent d’appréhender cet espace et de nous orienter. Cependant privé de la marche et du sens de la vue, nous sommes toujours capables d’estimer le parcours que nous faisons dans l’espace. Pour démontrer cette affirmation, Alain Berthoz étudie des personnes ayant les yeux bandés et 26 BERTHOZ Alain, Le sens du mouvement, Paris, Ed Odile Jacob, 1997 27 BERTHOZ Alain, Carnets de recherche Design et cognition, disponible sur http://www. ensci.com/uploads/media/cahier_Berthoz.pdf consulté le 17 avril 2012, p6
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transportées sur un robot mobile. L’expérience est menée en deux temps : le robot se déplace tout d’abord automatiquement sur une distance entre deux et dix mètres, il transporte évidemment la personne les yeux bandés. Il est ensuite demandé à cette personne de reproduire le parcours en actionnant ellemême le robot. Dans ce cas, les personnes testées reproduisent facilement la distance parcourue. Cependant, il leur est difficile de chiffrer cette distance. Un second test est effectué mais cette fois-ci si la distance change, le temps lui reste le même. Dans ce cas aussi, le sujet reproduit fidèlement le trajet en distance et en temps. Ce sont les sensations tactiles telles que les vibrations et les pressions sur la peau exercée par son mouvement dans l’espace qui lui permet de reproduire facilement ces expériences. La mémoire spatiale des déplacements du corps ne semble pas être seulement une liste de positions mais une véritable mémoire dynamique qui s’aide de la vitesse. Lorsque le sujet doit reproduire la distance parcourue, le cerveau simule le mouvement qu’il a subit. Mémoire de l’expérience La mémoire du mouvement semble être la mémoire de notre expérience de l’espace. Nous pouvons imaginer un trajet par exemple, car nous connaissons les mouvements qu’il faut faire pour rejoindre notre point d’arrivée. Parce que nous avons déjà vécu physiquement le mouvement, nous pouvons le simuler mentalement. Edward Casey, professeur de philosophie, affirme que notre capacité mémorielle serait impossible sans mémoire
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corporelle.28 Nous nous souvenons à travers le corps autant qu’à travers notre système nerveux et notre cerveau. Juhani Palasmaa écrit que l’espace n’est pas que visuel ou formel, il fait interagir la mémoire avec des confrontations, des rencontres. « Dans cette mémoire, le passé s’incorpore aux actions, au lieu d’être conservé séparément quelque part dans l’esprit ou le cerveau, il est un élément actif des mouvement du corps »29. Cette citation d’Edward Casey à propos du jeu de la mémoire et des actions montre bien que notre expérience passée a une incidence sur nos actions, nos mouvements.C’est cette mémoire de l’expérience du mouvement qui permet de comprendre l’espace. Rudolf Arnheim explique que l’expérience de l’espace implique des images mentales et une connaissance liée à cette expérience. Il prend l’exemple du cube. Nous ne pouvons pas voir les six faces d’un cube dans sa totalité d’un seul coup d’œil. En un seul regard nous ne voyons que trois des six faces qui le compose. Cependant, nous surmontons cette vision et faisant appel à l’expérience des différents mouvements que nous avons pu faire autour de ce cube, nous imaginons le reste des faces. « Ce que nous savons, mais que nous ne pouvons voir d’emblée, est contenu dans notre vision, comme une image engrangée, une image qui est composante de notre façon de voir. Voir implique toujours la
28 PALASMAA Juhani, Le regard des sens, Paris, Ed du linteau, 2010, p52 29 ARNHEIM Rudolf, Dynamique de la forme architecturale, Liège, Ed. Pierre Mardaga,1986, p116
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perception, la mémoire, la compréhension et la connaissance. »30 L’esprit reconstitue la forme à partir des divers points de vue que nous avons eus de celle-ci. L’image architecturale est alors « une image mentale synthétisée avec plus ou moins de succès, à partir de visions partielles. »31 Ces images mentales sont parfois erronées. Rudolf Arnheim explique que « le mouvement tend à linéariser la trajectoire et à éliminer les déviations. »32 . En effet, il démontre que les images mentales des connexions entre les espaces parcourus sont souvent le reflet de notre parcours : les espaces se succèdent les uns après les autres. Par exemple, lorsque nous essayons de nous rappeler de la configuration d’une ville ou d’un quartier, nous avons tendance, selon Arnheim, à ignorer les détours qui compliquent la direction générale d’une rue. Dans un édifice nous faisons de même. Lorsque la direction générale de notre parcours dévie, nous avons des difficultés à le concevoir et cela nous désoriente. Il effectue une expérience sur une petite fille, lui demandant de dessiner l’appartement de ses parents. Elle dessine les espaces les uns après les autres. Elle simplifie le plan en fonction du parcours linéaire qu’elle a l’habitude de faire. « L’esprit saisit plus facilement une séquence linéaire que la simultanéité multiple 30 ARNHEIM Rudolf, Dynamique de la forme architecturale, Liège, Ed. Pierre Mardaga,1986. p 83
31 ARNHEIM Rudolf, ibid., p116 32 ARNHEIM Rudolf, ibid. p155
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en haut : plan de l’appartement en bas : plan de l’appartement dessiné par la petite fille (ARNHEIM Rudolf, Dynamique de la forme architecturale, Liège, Ed. Pierre Mardaga,1986, p155)
des communications dans un système complexe bidimensionnel. »33 Cette simplification correspond en fait, à l’expérience motrice que nous faisons d’un édifice, d’un quartier, d’une ville. Nous voyons ici que l’expérience spatiale de l’espace par le mouvement engendre une fausse information dans notre esprit. Nous ne nous représentons pas forcément l’espace comme il est réellement. C’est pourquoi une succession d’espaces linéaires est compréhensible rapidement et facilement par le visiteur. Ainsi, un architecte qui souhaite que la forme de l’édifice et sa configuration spatiale soient communicatif à ses habitants ne doit pas tenir compte uniquement de la vision et de la structure. Nous avons dégagé ici différents outils impliquant le mouvement du corps, tels que le flux optique qui parvient à nos yeux, l’émotion qui est une préparation à l’action, les lignes fluides et les courbes qui semblent simuler le mouvement plus facilement que l’orthogonalité, et la mémoire topokinésthésique. Ces outils sont dégagés à partir de l’analyse du mouvement, mais nous pouvons imaginer les retrouver lors de la conception d’un projet. Par exemple, un projet qui préfère les courbes à la rigueur de l’orthogonalité simulera, selon Alain Berthoz, le mouvement plus facilement, notre œil glissant sur ces courbes sans être bloqué par un axe perpendiculaire.
33 ARNHEIM Rudolf, Dynamique de la forme architecturale, Liège, Ed. Pierre Mardaga,1986, p155
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chambre de l’enfant
Cuisine
toilettes Salon salle de bain chambre du frère
Chambre des parents
Chambre des parents
chambre de l’enfant
Salon
Cuisine
salle de bain
chambre du frère
toilettes
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II/ La
sculpture et la danse, arts du
mouvement Les sciences du mouvement ont révolutionnées la manière de percevoir et d’appréhender notre environnement. Les théories de Gibson et de Berthoz se basent sur la domination du sens de la vue dans notre perception de l’espace. Même si Berthoz admet que le sens du mouvement fait appel à tous les autres sens, la vision reste dominante. Cependant les arts qui mettent en jeu l’espace, nous nous concentrons ici sur la sculpture et la danse, conçoivent de plus en plus de projets où les autres sens sont mis en œuvre. A. Les installations de Georges Trakas Les œuvres du sculpteur George Trakas34 témoignent de son intérêt pour le mouvement du corps dans l’espace et de la relation au paysage, à la nature. Son travail n’est pas une apologie de la vue, il nécessite de parcourir, de mettre son corps en mouvement pour appréhender l’œuvre. La communion avec la nature et ses éléments, eau, terre, pierre, végétal… sont partie prenante de son œuvre et c’est cette communion qui nous pousse à nous en approcher, à toucher ces éléments.
34 GROUT Catherine, Les axes en mouvement, In WELCOMME Bernard (dir), Comme une danse, Arles, les carnets du paysage, 2007,n°13-14, p181-187
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Le pont de l’Epée
Il construit, parce que ces œuvres engagent toujours le corps et que nous pouvons donc monter dessus, passer à l’intérieur, tourner autour, à Thiers, en 1985, le pont de l’Epée, qui franchit une chute d’eau en prenant appuis d’un coté sur une ancienne usine et de l’autre sur la rive constituée de rochers. Il souhaite construire cette œuvre en acier afin que le corps ait une relation brute avec la pierre, l’eau et l’acier. Le pont en acier inoxydable permet de refléter le mouvement de l’eau. Ici nous passons dans le vacarme de la chute d’eau se répercutant d’une paroi à l’autre. Nous longeons la roche et le bâtiment, ce qui nous permet de sentir la minéralité de la roche, sa fraîcheur et son humidité. Notre mouvement révèle la beauté et la force du site, nos sens sont en éveil que ce soit la vue, mais aussi l’ouïe avec le bruit de l’eau, le toucher avec le métal ou la pierre ou simplement les gouttes d’eau qui viennent nous éclabousser au fur et à mesure que nous avançons sur le pont. Isle of View Dans ces œuvres George Trakas n’oublie pas que nous ne sommes pas des individus isolés. Il conçoit un lieu pour que les étudiants du campus de l’université du Massachusetts se rencontrent. « Le propos était de construire deux ponts faisant un sentier du désir, afin de relier les étudiants au terrain et de créer un lieu pour qu’ils fassent une pause et se rencontrent. La largeur des deux ponts étant de quatre-vingt-un centimètre, pour se croiser, il faut faire le dos-à-dos ou le ventre-à-
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Le pont de l’épée, 1985, le creux de l’enfer Thier (MORAUX Raymond, Thiers en photo, Disponible sur http://www.raymondmoraux.fr/symposiumdesculp/index. html, visité le 30/04/12) croquis de l’Isle of View réalisé par George Trakas (Bidding for good, disponible sur http://www.biddingforgood.com/auction/item/Item.action;jsessionid=kk2Fhv4 1g+5w3CY5zTUKjg**.app2-i?id=103688434, consulté le 30/04/12)
ventre. »35 Le sentier n’est pas un face à face, les deux ponts sont décalés et le chemin est sinueux. La multitude de matériaux permet « d’engager tous les sens (des promeneurs) lors de leurs parcours. »36 Un des ponts est fabriqué en granit et mesure huit mètre, l’autre est en acier et s’étend sur une longueur de douze mètres. Il ajoutera par la suite un sentier en pierre rouge et, à la demande de l’université une main courante sur le pont en granit. Celle-ci va modifier la marche et l’amplitude des gestes sur le pont.
111 Marches vers la paix Les sculptures ou plutôt les installations de George Trakas ne sont pas faites pour être simplement regardées de loin. L’artiste souhaite que nous découvrions notre corps à travers ses œuvres. Il nous dit que l’œuvre n’existe pas sans le corps, celui-ci la complète, la fait exister dans le temps. Dès les années 1970 il ressent « la nécessité d’intégrer le mouvement du spectateur avec les matériaux de l’œuvre qui pourrait coexister entièrement avec les matériaux et l’essence du site. De cette manière j’ai senti que l’œuvre allait respirer et être temporelle aussi bien que spatiale. »37 Il insiste sur l’importance de la position dynamique des observateurs, des promeneurs au sein de ses œuvres. Avec celles-ci nous allons modifier notre tenue, notre manière de marcher, notre allure. George Trakas souhaite que ses œuvres nous aident à découvrir notre corps en marchant dans ou sur ses 35 GROUT Catherine , Les axes en mouvement, In WELCOMME Bernard (dir), Comme une danse, Arles, les carnets du paysage, 2007,n°13-14,p 183 36 GROUT Catherine ibid, p 183 37 GROUT Catherine ibid, p 183
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sculptures, que nous éprouvons les mouvements que nous faisons tout en ressentant le paysage, la nature qui nous entoure. En posant une structure en U pour se promener sans toucher le sol et sans abîmer la terre, George Trakas nous fait vivre encore une fois une expérience qui entraine le corps dans une nouvelle relation au paysage. Cette structure n’est pas une simple passerelle, elle a été calculée précisément pour que, lorsque nous posons le pied pour la première fois sa flexibilité nous surprenne. Une fois l’expérience faite, nous allons jouer avec la manière de poser notre pied pour rester en équilibre. Ensuite, si le mouvement de l’acier et de nos pas sont dans le même rythme, nous allons « libérer notre corps »38, prendre conscience de son poids et profiter de la relation avec l’environnement. « Je désengage la préoccupation du corps de chaque pas pour que la marche soit plus fluide, pour que le mouvement de l’œil et de la pensée ne soient pas complètement occupé par la marche sur des pierres ou des rochers. Je souhaite que la relation avec le site soit harmonisée avec le mouvement du corps. Sur un sol irrégulier il faut faire un effort de concentration pour être stable ; ainsi, si on veut voir le paysage, il faut s’arrêter, et celui-ci correspond le plus souvent à une carte postale. Alors on ne peut pas être sensible aux grandes formes et aux vues sur le paysage »39 . Le poids du corps et les pieds de la personne qui marche sur l’acier, le fait vibrer et les sons sont transmis à l’environnement. 38 GROUT Catherine, Les axes en mouvement, In WELCOMME Bernard (dir), Comme une danse, Arles, les carnets du paysage, 2007,n°13-14, p184 39 GROUT Catherine ibid, p 184
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C’est le mouvement des pas qui vient créer cette « musique ». Les personnes qui marchent, la sculpture et le paysage s’échangent mutuellement. La présence de la sculpture a modifié visuellement la perception du paysage. Si nous choisissons de marcher dessus, le site devient le lieu de notre expérience et révèle nos gestes et nos mouvements. La largeur de la structure en U, comme celle des ponts, est calculée pour correspondre au corps en mouvement et aux dimensions de hanches. Si au départ nous ressentons l’étroitesse comme une contrainte, après quelques pas nous nous habituons et nous passons d’un regard focalisé sur la structure à une vision plus large sur le paysage. Dans l’œuvre de 111 marches vers la paix à Verdun, qui est en fait une série d’escaliers et de paliers de couleur, de matériaux et de textures différentes, l’artiste dit engager la totalité du corps dans l’expérience de la structure. « Cette œuvre engage le corps moment à moment, pieds, jambes, pelvis, colonne vertébrale, cœur, cou, bouche, nez, œil, oreille, cerveau, âme, de manière à mélanger les divers mouvements en une symphonie. […] je joue avec le corps comme un maître de ballet ; je suis très sensible aux pieds : comment on sent le paysage avec le pelvis. »40 La ceinture pelvienne se situe à la jonction entre la force de gravité et la force de réaction. Le pelvis est, Pour George Trakas, à l’intersection des axes gauche-droite et haut-bas. Les axes ont une part importante dans l’élaboration de ses œuvres, en ressentant le paysage en mouvement, il va en déduire 40 GROUT Catherine , Les axes en mouvement, In WELCOMME Bernard (dir), Comme une danse, Arles, les carnets du paysage, 2007,n°13-14, p184
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Tilted arc, Richard Serra, 1981, New York (Aschkenas David, Culture Shock, disponible sur http:// www.pbs.org/wgbh/cultureshock/flashpoints/visualarts/ tiltedarc_big2.html, visité le 15/04/12)
l’axe de sa structure. Cet axe se superpose aux axes de référence de notre corps, la marche devient dès lors plus fluide, en lien avec l’espace de la structure. Il existe trois axes de référence : hautbas, gauche-droite, et devant-derrière. Nous développerons plus particulièrement cette idée lorsque nous étudierons Jean Cousin. Par la superposition des axes, leur croisement et les interactions entre le site, les matériaux et les personnes, George Trakas souhaite nous orienter avec les éléments qui constituent le paysage. Il conçoit ses œuvres autant à partir du contact du pied avec le sol que de la vision de l’œuvre avec le site. Le sol ne doit pas être vécu comme une surface mais comme un élément nécessaire au maintien de la verticalité de notre corps et au déplacement. Les textures, les matériaux sont une part importante de son travail. Et ceux-ci ne sont pas travaillés uniquement pour la vue, mais aussi pour les autres sens, en particulier le toucher et l’ouïe.
B. Richard Serra Un autre artiste travaille lui aussi sur le mouvement du corps pour appréhender ses œuvres. Les sculptures de Richard Serra41 s’adressent directement au corps et à nos expériences d’horizontalité, de verticalité, de pesanteur et poids.
Equilibre et stabilité Ses sculptures donnent l’impression d’être instables, leurs poids 41 PALASMAA Juhani, Le regard des sens, Paris, Ed du linteau, 2010, p40
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écrasant dominent le passant, l’intimidant. Elles interrogent les notions d’équilibre, de gravité, d’espace et du mouvement du corps dans l’espace. Alors que pour des sculptures « classiques » le visiteur tourne autour et peut l’appréhender entièrement, dans les œuvres de Richard Serra il se promène à l’intérieur, à l’extérieur, il ne peut en avoir une vision globale que d’un point de vue éloigné en hauteur. L’artiste dit à propos de la structure Tilted arc : « Le spectateur devient conscient de lui-même. En bougeant, la sculpture change. La contraction et l’expansion de la sculpture résulte du mouvement. Pas à pas, la perception non seulement de la sculpture mais de l’environnement tout entier change. »42 Lors de son exposition, l’œuvre fait beaucoup de bruit. Installée sur Federal Plazza à New-York elle coupe la place en deux au grand mécontentement des employés des bureaux autour qui ne 42 PALAGRET Catherine-Alice, Richard Serra Installation de Clara Clara aux tuileries, Archeologie du futur/archeologie du quotidien [en ligne],disponible sur http://archeologue. over-blog.com/article-18679807.html consulté le 12 avril 2012
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pouvaient plus circuler librement. Les installations de Richard Serra sont parfois testées par les promeneurs doutant de la stabilité. En effet, il n’est pas rare de voir des passants donner des coups de pieds sur un des deux murs d’acier de la sculpture Clara-Clara installée dans le fer à cheval du jardin des tuileries ou encore essayer de les pousser43. Même si le but premier de l’installation est de guider les passants venant de la place de la concorde ou du jardin en passant au travers, entre les deux parenthèses d’acier.
Promenade
L’équilibre des structures interrogeait aussi les visiteurs lors de l’exposition Monumenta 2008. L’artiste a créé cinq stèles monumentales, dressées dans la verrière du grand Palais. Son œuvre, Promenade, indique bien qu’il faut se déplacer autour ces immenses plaques d’acier pour apprécier l’œuvre et la 43PALAGRET Catherine-Alice, Richard Serra Installation de Clara Clara aux tuileries, Archeologie du futur/archeologie du quotidien [en ligne],disponible sur http://archeologue. over-blog.com/article-18679807.html consulté le 12 avril 2012
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Clara-Clara (Mendelson Jodie, disponible sur https://picasaweb. google.com/lh/photo/YIdHzJVvNQlXvDw1lP857w, visité le 15/04/12)
comprendre. Comme pour Clara-Clara, c’est le visiteur qui révèle la structure : « C’est le passant qui crée l’œuvre par son déplacement, une œuvre unique, personnelle, différente de celle d’un autre promeneur. Les visiteurs, en effet, parcourent la nef et tournent autour des stèles. A chaque pas l’œuvre change, il est très difficile de voir les cinq plaques en même temps sinon aux deux extrémités de l’axe central et de l’entrée. Partout ailleurs, on ne voit que quatre pièces, la cinquième étant toujours masquée. »44 Richard Serra a souhaité que les balcons de la serre ne soient pas accessibles. Pour lui, l’œuvre doit se voir et se vivre du sol et non en surplomb. C’est seulement par le mouvement que nous pouvons nous rendre compte de la taille et du nombre de stèles. En levant la tête pour observer une stèle, nous pouvons être pris de vertige devant les dix-sept mètres qui nous surplombent. Cet effet est renforcé par la légère inclinaison de chaque élément. Lors de la visite, les guides incitent les visiteurs à toucher l’acier, à appréhender l’œuvre avec le corps. Les enfants laissent leur empreinte, touchent, poussent, tournent autour, c’est une véritable découverte qu’ils effectuent en expérimentant l’œuvre. La lumière qui s’infiltre dans la serre du Grand Palais fait découvrir une nouvelle œuvre, un nouvel aspect de celle-ci selon l’heure et la météo. Les œuvres de Serra impliquent toujours le corps en mouvement, nous devons passer entre, faire le tour, s’éloigner pour apprécier 44 PALAGRET Catherine-Alice, Richard Serra Installation de Clara Clara aux tuileries, Archeologie du futur/archeologie du quotidien [en ligne],disponible sur http://archeologue. over-blog.com/article-19749679.html consulté le 12 avril 2012
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pages précédentes à gauche : Promenade, exposition Monuenta ( Archéologie du futur, disponible sur http:// archeologue.over-blog.com/article-19749679.html, visité le 30/04/12) a droite : graffiti magnétiques dans le bronx ( artnet. com, disponible sur http://www.artnet.com/magazineus/news/ artnetnews/artnetnews8-29-06-1.asp, visité le 30/04/12
la globalité de l’installation. Il nous fait prendre conscience de notre corps dans le temps, l’espace et le mouvement. Les sens comme le toucher et la vue semblent les plus sollicités dans ces œuvres. Celles-ci sont souvent imposantes mais la forme de l’acier qu’il soit droit comme dans Promenade, courbe, torque (Pour reprendre l’expression de l’artiste) ou en spirale, invitent à la promenade. La spirale, à l’opposé d’un labyrinthe, impose un parcours ou plutôt deux. De l’extérieur vers le cœur et du cœur vers l’extérieur. Certaines installations sont dégradées avec des écritures sur l’acier, des traces de pieds. Mais la structure en spirale installée dans le Bronx a été taguée par des graffitis magnétiques. Ces graffitis ne détériorent pas l’installation car ils peuvent être enlevés, déplacés. Les graffeurs ont suivi les intentions de Richard Serra qui veut que ses œuvres se vivent en marchant. Elles ne se contemplent pas de l’extérieur, elles invitent le promeneur à en faire le tour et à y pénétrer. Seul le mouvement permet de les comprendre.
C. Notation du mouvement en danse Les danseurs partagent avec les concepteurs d’espace, comme nous allons le voir, le soucis d’enregistrer le mouvement du corps dans l’espace pour mieux concevoir que ce soit une chorégraphie, un jardin ou une place publique Christelle A. Bokossa 45 écrit que la 45 BOKOSSA Christelle A., de la notation chorégraphique à l’espace architectural : vers une architecture en mouvement, disponible sur http://issuu.com/cleopatre/docs/article_
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danse et l’architecture sont deux disciplines qui ont pour matière première l’espace. Les chorégraphes ont élaborés différentes notations du mouvement afin de préserver et transmettre un répertoire. Ces notations permettent de lire, écrire, analyser et penser le mouvement. Les chorégraphes notent le mouvement afin de pouvoir communiquer facilement entre eux et permettre la transmission, autre que visuelle et orale, des pas et des mouvements effectués dans une danse.
Notation de Laban La notation de Rudolf Laban, architecte de formation, a été la première à devenir un système universel de notation. La notation Laban46, également appelée cinétographie ou Labanotation, permet de transcrire le mouvement humain. Elle a été conçue dans les années 20 par Rudolf Laban. Cette notation repose sur la verticalité, la symétrie du corps et le déplacement du poids du corps. Chaque mouvement du corps est décomposé en éléments fondamentaux tels que l’espace occupé, la durée du mouvement, la partie du corps mobilisée et l’énergie déployée. Il divise le corps verticalement en deux. Les signes qu’emploi Rudolf Laban47 s’attachent à rendre compte des dynamiques : la dimension scientifique_danse_et_arcitecture, consulté le 22 .03.12 46 Websin, notation du mouvement lire, écrire, analyser, penser le mouvement [en ligne] disponible sur http://notation.free.fr/laban/index.html consulté le 24 Mars 2012 47 POUSIN Frédéric, De la chorégraphie à l’architecture du paysage : noter pour concevoir, In Welcomme Bernard (dir), Comme une danse, Arles, les carnets du paysage, 2007,n°13-14, p22-47
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Gestes et direction associés au symboles de la notation de Laban (Perrin Alysha, Labanwriter, disponible sur https://sites. google.com/site/appageproject/wikipedia-style-article-1, visité le 27/05/12) Gestes et notation de Benesh ( Gras, Stephanie, Création d’une chorégraphie, disponible sur http://stephaniegras.files.wordpress. com/2008/05/image-4.png, visité le 27/05/12) Gestes et notation de Conté (Nadal michelle, la méthode Pierre Conté, disponible sur http://web.lerelaisinternet.com/danse/IFDS/Pierre_ Conte.htm, visité le 27/05/12) A droite : Notation de Laban Websin, notation du mouvement lire, écrire, analyser, penser le mouvement [en ligne] disponible sur http://notation.free.fr/laban/index. html consulté le 24/03/12
des signes indiquent le temps, et les colorations du symbole définissent l’intensité du mouvement.
Notation de Benesh
D’autres chorégraphes comme Benesh 48se sont attelés à la notation du mouvement, mais il essaie de représenter la fluidité du mouvement et non une séquence de ce mouvement. Cette notation a pour objectif de figurer le schéma corporel dans l’espace, tout en reproduisant la trajectoire du mouvement dans le temps. Elle repose sur l’espace : l’orientation du corps et le parcours, le poids du corps, les parties du corps mobilisées, le tracé des membres et le temps. Nous pouvons voir qu’ici c’est le mouvement en entier qui est représenté et non une partie du mouvement. Elle élimine l’intervalle entre deux postures et introduit la notion de fluidité. Notation de Conté 48 Websin, notation du mouvement lire, écrire, analyser, penser le mouvement [en ligne] disponible sur http://notation.free.fr/benesh/index.html consulté le 24 Mars 2012
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La notation de Conté49 quant à elle, s’attache à retranscrire le mouvement à l’aide de la notation de la musique. Ce système repose sur différentes facteurs qui sont : le temps, l’espace (les appuis, les sauts, les fléchissements, les directions), les nuances (contraction et amplitude), l’accentuation (mouvement bref, frappé, lancé…) et l’orientation. Nous voyons apparaitre ici plus clairement, la notion de nuance et d’intensité qu’avait commencé à initier Rudolf Laban. Ces notations permettent à la fois l’analyse de la danse mais aussi la création de nouvelles chorégraphies. Rudolf Laban a cependant poussé un peu plus loin son étude sur le mouvement en créant une kinésphère : « l’espace que peuvent toucher ses membres en position debout »50, c’est la sphère du mouvement. A partir de cette kinésphère il la cristallise et en crée une structure. C’est un polyèdre régulier composé de vingt faces triangulaires équilatérales égales entre elles, « c’est le cristal dont la forme est la plus proche de la kinésphère »51. Richard Buckminsterfuller52 va concevoir un projet architectural de Rudolf Laban, projet qu’il décrit dans A life For Danse. Il va se baser sur la triangulation de la kinésphère pour concevoir une structure cohésive, une sorte d’architecture géodésique. 49 Art et mouvement, Tableau synoptique des principaux signes du système de notation du mouvement de Pierre Conté [en ligne] disponible sur http://conte.notation.free.fr/ Tableau%20Synoptique%20Conte.pdf consulté le 24 Mars 2012 50 ODENTHAL Johannes, l’espace dansé- les conflits du théatre de danse moderne, in CORIN Florence (dir) Danse et architecture, Bruxelle, nouvelles de danse, 2000, n°42-43, p 14 51 SCHWARTZ Elisabeth, les trames architecturales du mouvement chez Rudolf laban, in CORIN Florence (dir) Danse et architecture, Bruxelle, nouvelles de danse, 2000, n°42-43, p 47 52 SCHWARTZ Elisabeth ibid, p 52
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La multitude de matériaux qui incite l’usager à les toucher, la stimulation d’un axe de référence, la notion d’équilibre et de stabilité et la fluidité sont les outils qui semblent ressortir de cette étude. Ici ces outils sont dégagés à partir de l’analyse du mouvement dans les œuvres mais aussi lors de la conception. En effet, George Trakas pense aux matériaux et aux effets qu’ils auront sur le corps dès l’esquisse du projet. Il semble que les outils qu’il utilise lors de la conception fonctionnent par la suite assez bien, puisque le promeneur se déplace et expérimente l’œuvre comme l’avait prévu le sculpteur.
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III/ Le
mouvement en architecture
Nous avons vu qu’afin de saisir entièrement les œuvres des sculpteurs tels que George Trakas ou Richard Serra, nous avons besoin de les pratiquer, d’en faire l’expérience physique. Cette expérience implique tous les sens et pas seulement la vue. L’expérience de l’espace, qu’il soit conçu par un architecte ou un artiste semble s’appréhender par le mouvement. A. L’expérience de l’espace L’architecture est partout autour de nous, dans notre quotidien, pourtant elle est bien souvent incomprise et méconnue. Sa forme, son organisation, sa symbolique peuvent être appréhendée par l’exploration, l’expérimentation de l’espace, du lieu. L’architecture ne peut s’appréhender que si nous vivons cette expérience. La compréhension de l’architecture, sa relation avec le site, les autres édifices, les personnes se fait par le biais du mouvement. Entrer, sortir, passer une porte, être à l’intérieur puis à l’extérieur, pratiquer l’espace est un moment d’expérience qui n’engage pas seulement le regard mais le corps tout entier : le déplacement fait vivre l’expérience physique de la profondeur que l’on découvre lorsqu’on pénètre dans un bâtiment après avoir vu la façade. Juhani Palasmaa écrit « les expériences architecturales authentiques consistent alors, par exemple, à approcher ou se confronter à un bâtiment plutôt qu’à appréhender
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formellement une façade ; leur forme résident dans l’acte d’entrer, et pas simplement dans le dessin visuel de la porte, de regarder dedans ou dehors par la fenêtre, et non de regarder la fenêtre elle-même en tant qu’objet matériel ; de vivre dans une pièce chauffée plutôt que de regarder le dessin de la cheminée. L’espace architectural est un espace vécu plutôt que physique, et l’espace vécu transcende toujours la géométrie et le champ mesurable »53 Nous remarquons ici, que la forme, la géométrie de l’espace ne suffit pas à appréhender l’architecture, l’espace doit être vécu par le corps tout entier pour être apprécié. Le mouvement comme mesure de l’espace La marche est un moyen d’appréhender l’espace et plus particulièrement l’espace architectural. Le corps est un outil de mesure, il permet de nous mesurer à l’espace qui nous entoure, de savoir si cet espace est démesuré ou au rapport de notre corps. C’est lui qui nous donne une référence permanente et qui nous permet de dire si cet espace est plus petit, plus haut, plus chaud, plus lumineux, plus calme. Mais pour pouvoir comparer les espaces il faut en avoir fait l’expérience, s’être confronté à eux et connaître ce que nous avons ressentis dans ces lieux. Le simple mouvement des yeux permet de voir l’espace différemment, d’un autre point de vue et ainsi de prendre conscience de sa forme, de ses dimensions, s’il nous protège des intempéries, s’il est ouvert ou fermé. 53 PALASMAA Juhani, Le regard des sens, Paris, Ed du linteau, 2010, p71
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Villa La Roche, multiplicité des points de vue (architecturewrass3ali, disponible sur http://architecturewrassi3ali.blogspot.fr/2011/09/villa-laroche-le-corbusier-paris.html, visité le 20/05/12)
Pour prendre conscience de l’espace qui nous entoure, nous avons besoin du mouvement, de nous déplacer à l’intérieur afin d’en connaître les dimensions, l’expérience de l’espace ne peut se faire que par le biais du mouvement. Rudolf Laban écrit « l’espace est la caractéristique essentielle cachée du mouvement, et le mouvement un aspect visible de l’espace ».54 Cette phrase résume bien l’idée que l’espace et le mouvement sont indissociables : il ne peut y avoir de mouvement sans espace et d’espace sans mouvement. Afin de se rendre compte de l’espace, le mouvement est indispensable. Henri Poincaré affirmait que « sans mouvement, et surtout sans les mouvements oculaires, le concept d’espace était impossible. »55 La multiplicité des points de vue C’est en expérimentant l’espace, en le traversant que nous pouvons appréhender le plus complètement l’architecture, contrairement aux autres arts où nous sommes souvent face à l’œuvre pour la comprendre et l’appréhender (un tableau, un écran, une scène). Nous avons besoin de tourner autour de l’édifice, d’entrer à l’intérieur, de monter les étages, de sortir sur la terrasse pour comprendre comment l’édifice fonctionne, comment les pièces s’articulent. Le Corbusier nous dit « on entre, on marche, on regarde en marchant, et les formes s’expliquent, se développent, se 54 LABAN Rudolf, Choreutics, Londres, Ed. L. Ullmenn, Mac Donald & Evans, 1966 55 GINSBURG Carl, Le mouvement et l’esprit, In CORRIN Florence (dir), Scientifiquement danse : quand la danse puise aux sciences et réciproquement, Bruxelles, nouvelles de danse, 2006, n°53, p 42
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combinent ».56 Pour lui, la promenade architecturale associe les expériences visuelles et kinesthésiques. L’espace architectural se traverse, se parcours, se ressent en mouvement. Pour Le Corbusier, l’architecture est conçue pour être appréciée en mouvement et non depuis un point de vue privilégié. Elle se dé couvre dans le temps, au fil des mouvements. Le déplacement permet d’éprouver la dimension de l’architecture en articulant espace, corps et temps. Le Corbusier démultiplie les points de vue en s’appuyant sur les principes de simultanéité des cubistes et sur l’importance de la quatrième dimension dans notre perception de l’espace : celle du temps. Il préfère l’expression plus poétique de « promenade architecturale ». Elle consiste, nous l’avons dit, à multiplier les points de vue sur l’objet architectural. Pour la maison La Roche par exemple, à l’intérieur, la continuité spatiale est obtenue grâce à de nombreuses percées, à la suppression de cloisons et de portes qui cloisonnent l’espace traditionnel. « Dans le hall, alternent les pleins et 56 Le Corbusier, entretien avec les étudiants des écoles d’architecture,Paris, minuit, 1957
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les vides, les espaces rentrants et pénétrants. Le balcon qui jaillit au-dessus du vide est le point fort d’un espace dont il rompt la rigueur par sa position asymétrique. Deux niveaux de galeries multiplient les points de vue sur le hall, dessinant un jeu formel de parallèles et de perpendiculaires dans l’espace. »57 . Une architecture de « qualité », qui se comprend par le visiteur, serait celle qui démultiplie les points de vue et nous incite ainsi à la parcourir. Espace « vrai » Nous pouvons alors penser qu’un espace, un lieu vécu, traversé par le corps, n’est pas lisible, compréhensible d’un seul point de vue. Le mouvement est un moyen de prendre conscience de l’espace. Une architecture sera qualifié de « réussie » lorsqu’elle parvient à inviter le visiteur à la parcourir, lorsqu’elle convie au mouvement. Pour Bruno Zevi, on ne peut parler d’espace « vrai » 57 Association des sites de Le Corbusier, http://www.sites-le-corbusier.org/maisons-laroche-jeanneret, site visité le 10 avril 2012
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Cité de la Musique Christian de Portzamparc ( DUMAS Sylye, Christian de Portzamparc, disponible sur http://contemporart.voila.net/portzamparc.htm, visité le 10/03/12)
(pour reprendre le terme de Philippe Boudon58) qu’à condition que l’espace soit traversable, accessible et appropriable par le corps, que l’espace soit fermé ou ouvert59. L’espace vrai semble donc être un espace vécu physiquement par le corps en mouvement. Pour lui, « l’espace géométrique s’anime en raison des gestes et des actes de ceux qui l’habite »60. Le visiteur fait alors partie intégrante de l’œuvre, il fait exister l’espace par sa simple présence, par son déplacement. Le visiteur joue un rôle actif dans la découverte de l’espace, de l’œuvre architecturale qu’il éprouve. Les effets d’étranglement, de dilatation, d’ouverture, de fermeture, de fluidité ne peuvent être ressentis que par le mouvement, grâce à la marche et à la traversée des ambiances. Christian de Portzamparc dit qu’il perçoit l’architecture comme une expérience de la découverte et du mouvement. Il conçoit la Cité de la Musique comme une invitation à la promenade : « il ne s’agit pas de construire un labyrinthe, mais plutôt d’équilibrer les repères et les surprises, d’enchaîner des expériences contrastées qui, dans la perception, vont se succéder et communiquer une sorte d’euphorie à vivre à l’intérieur du bâtiment »61. 58 BOUDON Phillipe, Sur l’espace architectural, Paris, Ed. Parenthèses, 2003 p51-55 In AMALDI Paolo, Architecture, Profondeur, Mouvement, Gollion (Suisse), Ed. In folio, 2011, p408 59 SANDER Agnès, Pour une architecture du mouvement/du territoire-entretien avec Odile decq, Flux [en ligne], Avril 2004, n°50, disponible sur http://www.cairn.info/revueflux-2002-4-page-67.htm consulté de 10 Avril 2012 60 AMALDI Paolo, Architecture, Profondeur, Mouvement, Gollion (Suisse), Ed. In folio, 2011, p408 61 GALLIARI Alain et GUILHEUX Alain, Entretien avec Christian de Portzamparc, Résonnance [en ligne , mars 1995, n° 7, Icram-centre George Pompidou, disponible sur http:// articles.ircam.fr/textes/Galliari95b/, consulté le 10 avril 2012
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Odile Decq explique que l’idée du parcours, du déplacement du corps, de la découverte est aussi un point essentiel dans ses édifices : « Le déplacement dans l’espace faisait qu’il devenait une découverte, quelque chose qui se parcourait, qui était progressif et jamais donné d’un coup, et que nous avons fini par appeler l’espace dynamique. »62 L’espace va générer du déplacement, du mouvement. Nous partons à la découverte de l’espace par le parcours, la marche, la promenade. Un parcours linéaire où les espaces s’enchaînent les uns après les autres permet de faire ressentir au visiteur les changements d’échelles, de proportions, d’ambiances. C’est le déplacement du corps qui permet de prendre conscience de ces variations qu’elles soient nettes, franches ou plus discrètes, modérées. Si l’architecture arrive à faire le lien entre ces espaces ; entre l’intérieur, l’extérieur et ce qui se passe autours, nous pouvons alors parler d’espace « vrai ». Continuité spatiale L’expérience de l’espace n’est pas simplement intérieur ou extérieur c’est, comme l’affirme Aldo Rossi, « réversible » : « l’expérience spatiale propre de l’architecture se prolonge dans la rue, dans les places, dans les ruelles et dans les parcs, dans les stades et dans les jardins, partout où l’œuvre de l’homme a limité des « vides », c’est-à-dire des espaces « clos » ».63 L’espace est 62 SANDER Agnès, Pour une architecture du mouvement/du territoire-entretien avec Odile decq, Flux [en ligne], Avril 2004, n°50, disponible sur http://www.cairn.info/revueflux-2002-4-page-67.htm consulté de 10 Avril 2012 63 ZEVI Bruno, Apprendre à voir l’architecture, Paris, Ed. de minuit, 1969, p16
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continu, nous allons passer d’un espace à un autre, qu’ils aient les mêmes caractéristiques ou non, mais l’espace ne s’interrompt jamais. Il n’est jamais pure intériorité ou pure extériorité. Ce sentiment de continuité de l’espace et de réversibilité, Aldo Rossi l’expérimente lorsqu’il visite les cellules de religieuses dans le couvent Las Playas à Saint-Jacques-de-Compostelle. Il décrit ce qu’il éprouve « A l’intérieur des cellules, je remarquai la luminosité impressionnante, en contradiction avec l’aspect quasi carcéral de la façade extérieure. A l’intérieur, on perçoit même les cris qui proviennent de l’extérieur avec une acuité plus grande, comme dans un théâtre »64. C’est le passage de l’extérieur avec la vision austère de la façade vers l’intérieur qui révèle le contraste qui existe dans le bâtiment. Cependant c’est en entrant, en franchissant le seuil de l’édifice qu’il s’aperçoit que si le visuel est très contrasté, en rupture totale entre intérieur et extérieur, la dimension sonore persiste des deux côtés. La superposition de ces phénomènes : rupture visuelle et continuité sonore, est perçue par le parcours et surprend le visiteur aussitôt qu’il pénètre à l’intérieur. Nous pouvons ainsi dire que faire l’expérience de l’espace, de l’architecture en général, c’est comprendre et ressentir les liens entre intérieur et extérieur, les échanges entre les espaces, par le biais du mouvement du corps. La surprise, la découverte semble être un moyen d’inciter les visiteurs au mouvement, les contrastes d’ambiance favorisent la surprise et donc le déplacement. 64 ROSSI Aldo, Autobiographie scientifique, Paris, Ed. Parenthèse, 1988, p18
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L’espace vivant Jean Cousin65, dans son livre l’espace vivant admet donner, lui aussi, une place importante à la vision dans notre sentiment global de l’environnement. Il étudie la perception de l’espace en déclinant les morphologies spatiales que nous pouvons trouver. Il écrit qu’il existe « une certaine corrélation entre un environnement physique donné et l’ensemble des réactions, des comportements soit d’un individu soit d’un groupement humain. »66. Ainsi la perception de notre environnement semble induire des actions particulières. Nous retrouvons ici l’idée que perception et action sont indissociables. De plus c’est ici, une fois encore, la perception visuelle qui domine. En réalité ce qui donne un caractère statique ou dynamique aux espaces est, comme l’explique Jean Cousin, l’existence des axes de références. Il en existe selon lui, trois : un axe haut/ bas, un axe devant/derrière et enfin, un axe gauche/droite. Ces axes déterminent des directions possibles à prendre. Les trois axes développent des actions symboliques67 : pour l’axe vertical, nous savons que la joie est exprimée par un mouvement vers le haut ; par l’élévation. En revanche, le désespoir est accompagné d’un relâchement des muscles et le corps se tasse. Le terme « dépression » a une référence vers le bas. Cet axe symbolise également la conscience d’un dessus et d’un dessous. L’axe avant arrière est symbolisé par le point principal de vision 65 COUSIN Jean, L’espace vivant, Paris, Ed. du Moniteur, 198 66 ibid 67 COUSIN Jean, L’espace vivant, Paris, Ed. du Moniteur, 1980
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de la perspective : c’est le point où toutes les parallèles à cet axe semblent se retrouver à l’horizon. Ces parallèles à la direction de notre marche en avant renforcent « d’une manière quasiment hypnotique »68 cette direction. Jean cousin écrit que « le dynamisme ainsi crée, dans notre monde de parallèles, a une puissance traumatique incroyable »69. Cet axe représente l’axe de la marche, du mouvement dans l’espace en dehors de la présence d’inclinaisons ou de pentes. L’axe gauche- droite ou transversal est lié au concept de symétrie. Ces axes de références prennent en considération le corps dans sa totalité pour la perception de l’espace. Les formes spatiales vont favoriser le développement d’un ou plusieurs axes, conférant à l’espace son degré de statisme ou de dynamisme. Ces trois axes jouent un rôle important dans la perception de notre espace et particulièrement en ce qui concerne le mouvement. En fait, en ce qui concerne la perception de l’espace à travers la vision, l’existence de ces axes est moins importante que les obstacles qu’ils rencontrent. En effet, un axe bloqué créé un arrêt dans cette direction particulière, alors qu’un axe favorisé engendre une possibilité de mouvement. En explorant les différents types de spatialités, allant de la spatialité totalement ouverte (un espace négatif) à un espace complètement fermé, clos (un espace positif par excellence), il explique qu’il existe différents degrés d’espaces statiques 68 COUSIN Jean, L’espace vivant, Paris, Ed. du Moniteur, 1980 69 ibid
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et positifs. Un espace statique serait un espace qui ne favorise d’aucune manière les axes dynamiques du corps. La meilleur façon de bloquer un des axes, nous l’avons vu, semble de placer un plan perpendiculaire à sa direction. Ainsi, le mouvement vers l’avant est bloqué et nous sommes obligés soit de nous arrêter soit de contourner ce plan. La stimulation des axes de références semble se faire à l’aide d’éléments spatiaux comme un mur, un sol, un objet dans l’espace. Si aucun élément ne vient stimuler ces axes, l’espace aura une tendance à pousser au statisme. Il prend ainsi l’exemple du désert. Dans ce cas, l’espace est complètement ouvert, rien ne nous protège, aucun axe dynamique n’est privilégié. Par conséquent cet espace devient statique, nous ne savons pas où aller, quelle direction choisir. Un autre exemple est celui de la pièce circulaire, ici aucun axe n’est privilégié, l’espace semble induire le statisme. Si nous plaçons un objet au centre de la pièce, un mouvement autour de celui-ci va apparaitre et la pièce va devenir un espace positif dynamique. Jean Cousin décline les espaces en fonction de leur morphologie spatiale, mais il ne prend en compte ni les facteurs d’ambiance, ni les personnes en groupe. En s’intéressant aux personnes isolées il néglige les interactions entre les hommes. Il explique que la manière la plus simple pour bloquer un axe est de placer un plan perpendiculaire à la direction. Mais si une personne remplace ce plan et se place face à nous, au sens de notre marche, nous allons soit nous arrêter pour discuter, soit la contourner. Tout comme nous le faisons lorsqu’un mur nous barre le passage. Nous avons tous fait l’expérience du métro bondé. Ici l’espace est confiné, nous sommes à l’étroit. C’est la présence des personnes
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autour de nous et non la dimension de l’espace qui nous donne cette sensation. Dans cette configuration notre bulle personnelle est réduite au aucune direction n’est privilégiée, l’espace induit, selon Cousin le statisme. Cependant, la première chose que nous souhaitons c’est sortir de cet espace. C’est la présence des autres personnes et non la configuration spatiale qui nous pousse à agir ainsi. Il étudie uniquement l’individu isolé dans une architecture où la lumière ou encore la température n’entre pas en compte dans notre perception de l’espace. Il explore dans son livre, les différentes ouvertures mais il ne parle pas de la lumière ou de la vue qu’offre cette ouverture. Les ouvertures ne stimulent pas uniquement le sens de la vue, si le soleil passe à travers, la pièce sera plus chaude, nous allons peut-être nous éloigner ou nous rapprocher de cette ouverture selon les qualités thermiques que nous recherchons. Jean Cousin admet donner une place importante à la vision lors de la perception de notre espace. Juhani Palasmaa montre comment la vue a dominé les autres sens, dans la culture occidentale, et ce depuis les grecs. Le règne de la vision a, pour lui, perverti l’enseignement et la pratique de l’architecture. Un espace ne stimule pas uniquement le sens de la vue. Selon George Berkeley, philosophe, la vue a besoin du toucher qui fournit les sensations de « solidité, de résistance et de relief »70 ; séparée du toucher la vue ne pourrait avoir « aucune idée de la distance, de l’extériorité ou de la profondeur, ni par conséquent de l’espace 70 PALASMAA Juhani, Le regard des sens, Paris, Ed du linteau, 2010, p49
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et du corps »71. Pour Berkeley, la perception de notre espace prend source uniquement dans le toucher et le mouvement (essentiellement l’exploration haptique et la proprioception). La vue vient simplement accompagner le toucher dans la perception de notre environnement. Hegel est d’accord avec le point de vue de Berkeley en affirmant que le seul sens pouvant donner la sensation de profondeur de l’espace est le toucher car il « ressent le poids, la résistance et la forme tridimensionnelle des corps physiques, nous permettant de prendre conscience des choses autours de nous, dans toutes les directions. »72 Les autres sens ne sont pas négligés et négligeables lors de la perception de notre espace. Nous remarquons que les différents sens que nous possédons permettent, par le biais du mouvement, de prendre conscience de l’espace, de le mesurer
B. L’architecture Dynamique A travers l’étude du travail de Jean Cousin, nous avons pu observer que certains espaces sont plus dynamiques que d’autre en stimulant un axe de référence.
71 PALASMAA Juhani, Le regard des sens, Paris, Ed du linteau, 2010, p49 72 ibid
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Rudolf Arnheim Rudolf Arnheim écrit que « l’expérience de l’architecture est liée à notre existence corporelle et au mouvement du corps dans l’espace »73. Il rajoute cependant que l’expérience sensorielle ne passe pas que par la vue ou le toucher, elle implique des images mentales. Il explique que l’espace est caractérisé par son dynamisme. Toute forme a en elle une force tensionnelle qui comprend ce dynamisme. Il s’appuie sur l’exemple d’une forme simple : le rond, comme celui du Panthéon à Rome. Cette forme « définit un espace intérieur qui s’étire dynamiquement mais qui est retenu par un mouvement contraire »74. Un autre exemple est celui de la colonne, notre regard glisse vers le haut tout le long. Il nous dit que l’espace est caractérisé par des lignes de forces, qu’elles soient ascendantes, descendantes ou interrompues, et des champs de tension. Les églises sont un exemple de force ascendante. L’élancement du clocher est un geste qui permet de s’élever vers les cieux. C’est ici le mouvement symbolique qui est représenté. Le mouvement ascendant semble se traduire par un élancement vertical, une ligne droite ou courbe qui monte vers le ciel. Si rien ne lui fait obstacle, un étage au-dessus par exemple, l’élancement est encore plus significatif. Rudolf Arnheim explique que lorsqu’il y a une dynamique dans un sens, elle existe aussi dans l’autre sens. Il s’appuie sur 73 Arnheim Rudolf, L’édifice, objet d’une vision bien réfléchie, in CORIN Florence (dir) Danse et architecture, Bruxelle, nouvelles de danse, 2000, n°42-43, p 82 74 ARNHEIM Rudolf, Dynamique de la forme architecturale, Liège, Ed. Pierre Mardaga,1986
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Eglise de la Salute, Venise (miroitement de l’infini, mouvement, disponible sur http://manierisme.melancholia.fr/?3-1-3-Mouvements, consulté le 25/03/12)
l’exemple de la pyramide pour illustrer ses propos. L’élévation de la pyramide vers le haut est contrecarrée par une pression vers le bas qui part du sommet et s’évase vers le sol. Cependant ce mouvement descendant est, pour Arnheim, secondaire car « chaque fois qu’un schéma visuel est ancré par une base solide, la direction vers l’extrémité libre domine. »75 Le double mouvement ascendant et descendant est particulièrement visible dans les couches horizontales de la pyramide : le mouvement vers le haut se fait sous forme de contraction et le mouvement vers le bas en expansion. Les proportions de la base d’un volume rectangulaire vont donner le caractère énergique à l’impression de mouvement ascendant. Si la forme du volume est plus large que haute, ce dernier « s’élève mollement » alors que si elle est plus étroite et plus haute, « la poussée ascendante est énergique »76 Ce sont les rapports entre force et masse qui donnent le caractère énergique des formes. Un autre point évoqué par Arnheim dans la dynamique verticale est le fait que la colonne par exemple, traverse le plafond ou est limitée par des bases et des chapiteaux. Dans les colonnes classiques les bases et chapiteaux empêchent le mouvement visuel de se prolonger au-delà de la surface avec le sol ou le plafond. Ces « buttoirs » jouent un rôle de barrière dans le dynamisme de la colonne. La forme de la colonne joue aussi un rôle dans la perception du mouvement ascendant ou descendant. « Lorsque la 75 ARNHEIM Rudolf, Dynamique de la forme architecturale, Liège, Ed. Pierre Mardaga, 1986 p232 76 ibid
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colonne est plus large au sommet et s’effile vers le bas, la dynamique qui en résulte est plus probablement dirigée vers le bas. »77 Cependant il rappelle que tout mouvement perçu dans un sens peut être perçu par quelqu’un d’autre dans l’autre sens. Ainsi, « lorsqu’on observe une colonne se rétrécissant vers le bas et qu’on la perçoit paradoxalement comme s’élevant à partir du sol, elle paraît étroite à la base et semble s’alourdir à mesure qu’elle s’élève. »78 La dynamique de la forme architecturale c’est aussi le fait que les formes incitent au mouvement. Nous avons vu avec Jean Cousin79 qu’il existe des espaces qui favorisent le mouvement à différents degrés. Ainsi, le simple fait de créer une piste droite dans le désert, qui est un espace négatif statique, indique une dynamique, une direction. 77 ARNHEIM Rudolf, Dynamique de la forme architecturale, Liège, Ed. Pierre Mardaga, 1986 p58 78 ibid
79 COUSIN Jean, L’espace vivant, Paris, Ed du moniteur, 1980
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Théâtre Loïe Fuller ( Chausson vert, chorégraphes et danseurs, disponible sur http://leschaussonsverts.eklablog.com/loie-fuller-18621928-la-fee-lumiere-a24352052, visité le 25/03/12)
L’architecture baroque Nous ne pouvons évoquer l’impression de mouvement dans l’architecture sans dire quelques mots sur l’architecture baroque. Celle-ci « se fonde sur l’impression de mouvement dont l’expression principale réside dans le contour. La ligne disparaît dans le mouvement des masses de lumière et d’ombre. »80 L’architecture baroque affectionne les lignes courbes et les jeux de lumière. Son but est de charmer, de surprendre. La surprise et la découverte est une des facteurs évoqué précédemment. Le baroque introduit le mouvement dans la composition et s’oppose à la régularité de la Renaissance. Une façade baroque n’est pas rectiligne, elle est ondulée. La souplesse du rond ou de l’ellipse est préférée à la rigueur du carré ou du rectangle. Les façades vont s’incurver de plus en plus et il n’est pas rare de retrouver la ligne courbe dans les œuvres architecturales. Borromini, un architecte de cette période, joue avec les lignes et les surfaces, ne leur laissant aucun répit, préférant les courbes sinueuses et les ondulations à ce qui est droit et plat. Il est obsédé par les formes ovales et elliptiques. Pour relier deux étages de largeur différente entre eux des contreforts en formes de volutes enroulées sur elles-mêmes sont utilisés. Nous pouvons en voir un exemple dans l’église de la Salute à Venise. Nous retrouvons ici la spirale, l’enroulement des œuvres de Richard Serra utilisé d’une manière différente. Ici ce n’est pas le corps physique que fait l’expérience de cette forme mais nous simulons le mouvement d’enroulement dans 80 Le Corf Philippe, Le baroque [en ligne] , Médiathèque cité de la musique, disponible sur http://mediatheque.cite-musique.fr consulté le 18 avril
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notre esprit. Le théâtre Loïe Fuller La représentation du mouvement, au-delà de la représentation en peinture, en photo ou en dessin, qui ne génèrent pas d’espace, peut se retrouver dans l’architecture. Nous allons prendre un exemple précis : le théâtre Loïe Fuller à l’exposition universelle de 1900. Loïe Fuller, chorégraphe et danseuse, connue pour sa danse serpentine, décide de construire un théâtre-musée « dans lequel pourrait se déployer la forme globale et complète de son idéal artistique. »81 Elle commande à Francis Jourdan, décorateur, et Henri Sauvage, architecte, un édifice dans lequel on retrouve le mouvement de la danseuse dans ses chorégraphies, mouvement visible grâce aux voiles qu’elle fait virevolter. Les concepteurs se lancent donc sur un projet où visuellement, l’image évoque les voiles ondoyants des danses. Ainsi, deux « ailes de papillon » aux formes ondulantes se déploient sur la façade avant de s’ouvrir au-dessus de l’entrée 81 LISTA Giovanni, Le théâtre Loïe Fuller à l’exposition universelle de 1900, in CORIN Florence (dir) Danse et architecture, Bruxelle, nouvelles de danse, 2000, n°42-43, p 57
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placée au centre de la façade. Le bâtiment doit être aérien et « fluide », sa forme doit renvoyer de suite à cet art particulier du mouvement propre à Loïe Fuller. Cependant, la conception de l’édifice renvoie plus au style Guimard et à la mode japonaise, coiffé d’un toit décoré de guirlandes et de lampions, qui alourdissent l’édifice. La danseuse fait alors appel Pierre Roche, sculpteur, afin de trouver une forme architecturale issue des mouvements de ses danses et du mouvement drapé des voiles de la danseuse. La hauteur de l’édifice est revue à la baisse et le volume de la toiture s’incline doucement vers le spectateur La façade est totalement remodelée et ressemble désormais à un voile déployé, orientant le plissé vers l’entrée afin d’inciter le spectateur à entrer. « L’ensemble s’organise en un complexe jeu de lignes fluides : les ondoiements de la façade suggèrent le déferlement d’un immense flot, alors que la ligne de faîte de l’édifice redouble en écho ce mouvement en ondulant cinq fois, comme un second ourlet, celui d’une vague montante qui se formerait au loin. »82 A l’intérieur, le plafond est couvert de draperies sur lesquels des projecteurs tournoient en créant les effets chromatiques d’un kaléidoscope. Le théâtre rassemble en un volume statique le mouvement et la lumière, qui sont les principaux éléments des danses de Loïe Fuller. Nous pouvons nous demander si c’est effectivement le mouvement du corps de la danseuse qui est représenté ici. En réalité il s’agit d’une référence au second degré : l’édifice représente le mouvement de la danseuse imitant les ailes du papillon grâce 82 LISTA Giovanni, Le théâtre Loïe Fuller à l’exposition universelle de 1900, in CORIN Florence (dir) Danse et architecture, Bruxelle, nouvelles de danse, 2000, n°42-43, p 57
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à ses voiles. La fluidité comme outil de mise en mouvement apparaît une fois encore. Nous l’avons déjà évoqué lors de l’étude des notations du mouvement ou certaines représentent des séquences de mouvement et d’autre le mouvement en entier, par des courbes, des lignes fluides. Nous pouvons cependant remarquer que cette fluidité de mouvement s’exprime au travers d’un médium, le voile de la danseuse, dans le cas du musée de Loïe Fuller. La vision et les autres sens ? La simulation du mouvement semble passer avant tout et une fois encore par la vision. Nous voyons une personne faire une geste, nous observons un croquis, nous regardons la forme d’un bâtiment. Nous n’avons jusque-là pas d’écrit relatant le fait que les autres sens simulent le mouvement. Nous pouvons cependant évoquer quelques exemples qui sont tirés d’expériences communes mais qui n’ont, à ma connaissance, pas été traitées par des scientifiques. Nous avons tous fait l’expérience d’entendre un train. Même si nous ne le voyons pas, nous imaginons et connaissons le sens dans lequel il se déplace. Le bruit des pas d’une personne nous indique aussi si elle s’éloigne ou s’approche de nous, même si nous ne la voyons pas. Le son par l’accroissement de l’intensité nous donne la direction du mouvement. Nous pouvons ainsi nous représenter mentalement le mouvement, le déplacement. Une autre expérience commune est celle du vent. Lorsque nous sommes dehors et qu’il y a du vent, il vient toucher notre peau. Nous pouvons ainsi connaître sa direction, d’où il vient pour nous en protéger ou non. Ce sont les capteurs tactiles de la peau qui permettent de connaître ce mouvement. Ici c’est principalement
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Les thermes de Vals, Peter Zumthor (archidaily, the therms Vals, 11 fevrier 2009, disponible sur http://www.archdaily.com/13358/the-therme-vals/, consutlé le 10/12/11)
les figures de vitesse et de direction qui nous simulent le mouvement mentalement. Peter Zumthor Les expériences sensorielles sont particulièrement présentes dans l’architecture de Peter Zumthor.83 Il conçoit son architecture pour qu’elle puisse nous toucher, qu’elle fasse ressentir quelque chose à son visiteur. Dans les thermes de Vals l’architecte souhaite séduire les baigneurs tout en leur laissant la liberté de créer leur parcours. Pour lui, l’architecture est non seulement un art spatial, mais aussi un art temporel. Il souhaite donc inciter à la flânerie, à une promenade où le temps rentre en compte. Il écrit à propos de ce parcours : c’est une sorte de « voyage de découverte. »84 Nous retrouvons ici l’idée de découverte développée par Christian de Portzamparc, Odile Decq ou Aldo Rossi. Le temps semble essentiel pour l’expérience de l’espace. Nous ne pouvons pas en faire l’usage en une fraction de seconde. Peter Zumthor réfléchit à la manière dont nous nous déplaçons dans l’espace. Le souhait qu’il émet lorsqu’il conçoit les thermes de Vals, est de créer un espace qui nous séduit plutôt qu’il nous dirige. Il oppose la « flânerie libre » de son architecture qui séduit aux couloirs d’hôpital qui dirigent. A Vals il crée des espaces qui ne nous dirigent pas, nous sommes à un endroit mais un peu plus loin, quelque chose nous attire, que ce soit une lumière qui tombe, un matériau qui nous appelle. Attention, si rien ne nous dirige, l’espace ne doit pas pour autant devenir un labyrinthe. 83 ZUMTHOR Peter, Atmosphère, Berlin, Ed. Birkhäuser, 2008 84 ZUMTHOR Peter, ibid
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Pour cela Peter Zumthor fait des exceptions en réintroduisant des indications qui permettent de s’orienter, la vue à travers une fenêtre par exemple. « Diriger, séduire, laisser aller, donner de la liberté. »85 Pour certains espaces, l’architecte explique qu’il est judicieux de créer un lieu où nous n’avons pas besoin de courir partout, où nous n’avons pas besoin de chercher la porte. Des lieux où nous n’avons pas besoin de nous déplacer, où nous sommes simplement là. Peter Zumthor prend pour exemple les salles de cinéma, les auditoriums ou encore les pièces de séjour. La perception de l’espace passe par tous les sens et pas seulement la vue. Le toucher semble guidé par les matériaux. Louis Kahn raconte « dès que je suis rentré dans l’espace magnifique de l’institut Salk à la Jolla, j’ai ressenti la tentation irrésistible de marcher directement vers le mur en béton et de toucher sa 85 ZUMTHOR Peter, Atmosphère, Berlin, Ed. Birkhäuser, 2008, p46
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douceur veloutée et la température de sa peau »86. La texture des matériaux incite ou non au toucher. Nous allons nous en approcher pour les sentir au bout des doigts. Mais le sens tactile n’est pas seulement au bout des doigts. Les pieds qui entrent en contact avec le sol sont aussi une expérience tactile. Pour les aveugles par exemple, les poinçons sur le sol avant les passages piétons signifient qu’ils doivent s’arrêter. C’est en sentant la différence de matière que la personne sait qu’il faut s’arrêter. Peter Zumthor87 parle du son dans le bâtiment. Le son dans l’édifice est directement lié aux matériaux utilisés et à leurs assemblages. Il montre qu’un sol en bois posé sur des poutres ne donnera pas le même son que collé directement sur du béton. C’est le bruit que les pas font sur le sol qui permet de révéler le son.
86 PALASMAA Juhani, Le regard des sens, Paris, Ed du linteau, 2010, p65 87 ZUMTHOR Peter, Atmosphère, Berlin, Ed. Birkhäuser, 2008, p29-33
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Turning Torso, Santiago Calatrava (Vaughan Jordan, Turning torso, disponible sur http://vaughanjordan.wordpress.com/2011/10/23/turning-torso/, consulté le 28/04/12)
L’architecture de Santiago Calatrava Nous l’avons vu, la sensation de mouvement dans l’architecture est souvent représentée par des courbes, des lignes ondulantes. Cependant ces courbes font plus souvent référence au mouvement du vent, de l’eau, ou encore des oiseaux qu’à celui du corps humain. Santiago Calatrava propose, pour la station de Métro du World Trade Center à New York, « un espace spectaculaire évoquant un squelette d’oiseau immense s’ouvrant vers le ciel. »88. Ce dernier conçoit cependant des architectures qui rappellent le mouvement du torse de l’homme. Le bâtiment appelé Turning torso, est construit à Malmö, en Suède. Il est composé de neufs cubes d’une hauteur de six étages qui s’empilent les uns sur les autres en effectuant un mouvement de torsion du bas vers le haut, autour d’une structure en béton armé. La tour renvoie à l’image d’un torse en mouvement : « L’idée de ce bâtiment m’est venue il y a de longues années à la suite d’une série d’études sur l’anatomie humaine et d’expériences exécutées, par le biais de la sculpture, sur la structure. La construction des tours est, avec les ponts, la discipline du génie civil par excellence, et, pour moi, cette activité est comparable à celle d’un musicien : une maîtrise technique est indispensable pour que l’auditeur oublie l’instrument et se laisse porter par la seule poésie de la mélodie...».89 Avec cet édifice il propose une nouvelle expérience de l’espace qui déstabilise le corps humain et remet en cause le 88 VIEIRA Emmanuelle, Santiago Calatrava l’audace espagnole [en ligne], egodesign, 22 juin 2006 disponible sur http://www.egodesign.ca/fr/article_print.php?article_id=4 consulté le 18 avril 2012 89 VIEIRA Emmanuelle,ibid
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confort ou la statique. Ses architectures magnifient la structure et subliment le mouvement. La gare TGV de St Exupéry à Lyon en est un exemple parmi d’autres. La structure de la gare fait penser au mouvement d’un oiseau prenant son envol. La vision de cette structure va stimuler les zones qui gèrent le mouvement dans notre cerveau. Nous voyons ici apparaitre l’idée que les formes architecturales, permettent de traduire un mouvement vécu. La signification du mouvement en architecture semble se faire par la composition de l’espace et des formes. Nous parlons alors d’espace dynamique ou de l’architecture du mouvement.
C. Notation du mouvement en architecture Nous avons vu que la notation du mouvement en danse permet de transmettre une chorégraphie mais aussi d’en créer d’autre. Les architectes quant à eux, se sont penchés sur une manière de noter le mouvement du piéton. Comme les chorégraphes, les architectes et autres concepteurs d’espaces ont le souci d’enregistrer le mouvement du corps dans l’espace pour analyser ou concevoir un projet. Notation de l’espace, du mouvement et de l’orientation. Philip Thiel, architecte, travaille sur une notation de l’espace, du mouvement et de l’orientation. Son hypothèse de
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départ est que la perception visuelle de notre environnement est un processus dynamique incluant le temps : « les espaces, surfaces, objets, évènements, ainsi que leur significations qui sont associées dans des combinaisons variées pour constituer tant les paysages naturels que les paysages humains, ne peuvent être vus simultanément, mais ils doivent être expérimentés dans des séquences temporelles. »90 Nous pouvons remarquer que cette hypothèse se rapproche de celle de Gibson, où la perception de notre espace est principalement visuelle et se passe à travers le mouvement. Il parle également de surface et de temps. Les surfaces sont indispensables à la perception de notre environnement, selon Gibson, ce sont leurs textures qui permettent de percevoir notre environnement. Lors de ses recherches Thiel se penche effectivement sur les travaux de Gibson sur la vision, qui postulent que la perception visuelle des relations lumineuses entre des positions et des qualités de surface, d’écran et d’objet font notre expérience spatiale. Nous retrouvons ces éléments dans le travail de Philip Thiel : vision, surface, objets, espace. Il travaille lui aussi sur la lumière et les ombres qu’elle projette, mais ce travail n’existe pas dans ses notations. L’objectif de Thiel consiste à mettre au point un système graphique de notation pour représenter l’expérience que nous pouvons vivre dans les espaces architecturaux et urbains. Son 90 THIEL Philip, a sequence-experimence notation for architectural and urban spaces, the town planning, vol 1, avril 1961 Cité par POUSIN Frédéric, De la chorégraphie à l’architecture du paysage : noter pour concevoir, In Welcomme Bernard (dir), Comme une danse, Arles, les carnets du paysage, 2007,n°13-14, p30
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système de notation se construit en trois étapes : la première vise l’anatomie du paysage architectural et urbain ; la seconde, les sens, c’est-à-dire pour Thiel l’expérience spatiale ; la dernière articule les deux premières par le mouvement du visiteur. Dans ce système de notation, notre expérience spatiale est réduite à la vue, au champ de vision que nous possédons car « pour l’homme la vision occupe une place privilégiée et de ce
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Codification de l’orientation (THIEL Philip. La notation de l’espace, du mouvement et de l’orientation in Architecture d’Aujourd’hui n° 145, 1969, pp. 49-58. (Town Planning Review, 1961) p 52)
fait requiert toute notre attention ».91 Philip Thiel représente ce champ de vision par un cercle, et non une ellipse, où le diamètre horizontal permet de signaler si l’objet perçu se situe en haut ou en bas, et le diamètre vertical à gauche ou à droite. La ligne verticale représente l’horizon dans notre champ de vision. Il va complexifier le système en ajoutant sous le cercle de vision des chiffres qui correspondent à des zones d’éloignement entre nous et l’objet. Nous pouvons faire l’analogie aux distances sociales établies par Edward T. Hall92, même si Thiel établit ces zones d’éloignement plus largement et va plus loin dans les distances. Il synthétise ces données de zones d’éloignement dans un tableau. Nous retrouvons tout de même des caractéristiques similaires comme la distance qui sépare des personnes échangeant des propos ou encore la distance limite pour des relatons sociale ou pour reconnaitre un visage. Il va synthétiser les relations perceptives entre surface, écrans, objet et forme spatiale dans un tableau. La réflexion qu’il porte sur la morphologie spatiale, la qualité de la forme donne lieu à une catégorisation simple et à une classification des connexions entre types de formes. Celle-ci permet de rendre compte des éléments comme les fontaines, monuments, tours, à l’intersection de deux places dans les villes italiennes par exemple. C’est un outil qui permet d’analyser l’espace en fonction de notre perception visuelle. 91 THIEL Philip. La notation de l’espace, du mouvement et de l’orientation in Architecture d’Aujourd’hui n° 145, 1969, pp. 49-58. (Town Planning Review, 1961) p 52 92 HALL Edward T., La dimension cachée, Paris : Points, Seuil, 1971
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pages précédentes à gauche : Notation espace forme pour des surfaces orthogonales (THIEL Philip. La notation de l’espace, du mouvement et de l’orientation in Architecture d’Aujourd’hui n° 145, 1969, pp. 49-58. (Town Planning Review, 1961) p 52) à droite : association et cas divers de surfaces verticales occupant des positions latérales (ibid)
Pour Philip Thiel, l’étape sur le sens s’établie par le fait que l’expérience spatiale combine l’expérience visuelle avec les autres sens. Cependant, il semble que Thiel ne représente dans son système de notation que la vue même s’il admet que « le sens est défini comme l’agencement de signes et de symboles, qui ne sont pas seulement visuels mais aussi oraux, olfactifs, kinésiques, thermiques. »93 La notation de l’espace, du mouvement et de l’orientation que propose Philip Thiel articule par le mouvement morphologie spatiale et perception visuelle, il préfère les termes d’anatomie de l’espace et sens, mais étant donné que seule la vue est représentée nous préférons ne pas employer le terme de sens. Cette notation est construite sur une référence temporelle, la ligne de temps qui est représentée verticalement, en référence à la notation chorégraphique. Son travail permet de noter des séquences d’expérience architecturales et urbaines en temps réel. Le déplacement du corps dans l’espace « se réfère à un changement de position dans l’espace en fonction du temps, et une situation spatiale initiale donnée (latitude, longitude et élévation) peut se décrire en fonction du temps, de la distance et de la direction »94. De ces facteurs de notation du mouvement en découlent d’autres, le temps et la distance donnent la vitesse, 93 POUSIN Frédéric, De la chorégraphie à l’architecture du paysage : noter pour concevoir, In Welcomme Bernard (dir), Comme une danse, Arles, les carnets du paysage, 2007,n°13-14, p32 94 THIEL Philip. La notation de l’espace, du mouvement et de l’orientation in Architecture d’Aujourd’hui n° 145, 1969, pp. 49-58. (Town Planning Review, 1961) p 48
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que ce soit la vitesse de déplacement ou l’accélération et le ralentissement ; le temps et la direction donnent un trajet. Il représente également les changements verticaux qui sont indiqués par des flèches et des nombres (qui indiquent la hauteur montée ou descendue.) Il va établir des systèmes plus ou moins complexes allant de la codification du déplacement à la codification de l’environnement. Il développe quatre moyens pour décrire une expérience de l’espace. Le premier et le plus important est la codification du déplacement. Il représente ici les informations temporelles, la distance horizontale et les changements de direction horizontaux et verticaux. La seconde est la notation de l’orientation. Pour représenter l’orientation il identifie cinq éléments formels visuels physiques qui se réfèrent aux études de Kevin Lynch95 qui conçoit un principe de notation lorsque nous sommes en voiture (nous ne l’étudierons pas ici car notre étude se porte sur le mouvement du corps en tant que piéton). Ces cinq éléments sont réunis en fonction de leur représentation conceptuelle. Les deux premiers éléments sont « les éléments plans bidimensionnels, ce sont les quartiers et les croisements où l’on peut pénétrer et qui peuvent être traversés »96, le troisième et quatrième sont les éléments linéaires comme les rues ou les bords que l’on peut suivre ou emprunter ; le cinquième les points ou éléments unitaires « qui n’ont pas de dimension et dont la seule caractéristique est 95 LYNCH Kevin, APPELYARD Donald et MYER John R., The view from the Road, Cambridge, The MIT press, 1964 96 THIEL Philip. La notation de l’espace, du mouvement et de l’orientation in Architecture d’Aujourd’hui n° 145, 1969, pp. 49-58. (Town Planning Review, 1961) p 50
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la situation, ce sont par exemple les points de repère »97. Thiel ajoute un sixième élément : les signaux. Ce sont des signaux d’indication et d’orientation que nous pouvons trouver en ville, dans des croisements ou sur la route. A chaque élément correspond un code graphique. Ainsi la notation permet d’analyser une séquence de déplacement en fonction de la perception visuelle de notre espace. Nous pouvons ainsi comprendre pourquoi un espace nous 97 THIEL Philip ibid. p 50
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Liaisons entre les surfaces (THIEL Philip. La notation de l’espace, du mouvement et de l’orientation in Architecture d’Aujourd’hui n° 145, 1969, pp. 49-58. (Town Planning Review, 1961) p 52)
oriente ou non (en fonction des points de repère par exemple). Le troisième moyen pour décrire l’expérience spatiale est l’anatomie, la morphologie de l’espace. C’est une représentation de l’environnement physique où l’expérience prend place. Il distingue différents types d’espaces qu’une personne peut occuper. L’espace primaire, un « petit » espace, celui qui est le plus déterminé ; les sous-espaces, les espaces plus petits et moins bien déterminés et les espaces secondaires, les espaces plus vastes que les primaires. Dans n’importe quelle expérience de l’espace nous nous déplaçons directement, selon Philip Thiel, d’un espace primaire à un autre, sans prendre en compte les sousespaces ou les espaces secondaires. Le quatrième et dernier moyen regroupe les trois premiers en un système complexe qui est représenté le long d’une ligne verticale que nous lisons de bas en haut. Cependant, Philip Thiel n’intègre dans sa notation aucune notion d’ambiance. Il parle de surface mais ne décrit même pas le type de matériau employé. Les points de repère indiqués sur la notation ne sont pas toujours visuels, ils peuvent être auditifs, le bruit d’une fontaine, olfactifs ; la présence d’un magasin vendant de la nourriture ; thermiques, la fraîcheur d’une rue ; ou encore tactiles, le matériau utilisé pour le sol. Il indique si nous suivons une rue ou une route, nous pouvons imaginer la différence sonore si la rue est empruntée par des voitures ou si elle est simplement piétonne. La notation de l’espace, du mouvement et de l’orientation est selon son concepteur, « un moyen technique utilisé pour analyser et créer des environnements physiques en s’appuyant sur une
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Symboles de Motation (HALPRIN Lawrence, Motation, Progressive architecture, Juin 1965, p129)
expérience séquentielle en temps réel ».98 Cependant, aucun projet ne semble, à ce jour, avoir été conçu en se basant sur cette notation. Elle reste pour le moment un médium intéressant pour l’analyse de l’espace architectural et urbain. Lawrence Halprin Le système de notation du mouvement que Lawrence Halprin, appelé motation (contraction de mouvement et notation) permet d’évaluer et de concevoir les environnements humains en fonction du mouvement. Il commence son travail en remarquant que les représentations de l’architecture sont statiques et ne donnent aucune dimension du mouvement. Motation est un système de transcription des déplacements dans l’espace. Il comprend deux sous-systèmes : le premier les symboles et le second le format dans lequel les symboles sont enregistrés. Il existe trois symboles concernant le concept de base : le point, l’arc et la ligne droite. Utilisés seul ou combinés, ces éléments géométriques produisent la base de la notation. Le point et le cercle (considéré par Halprin comme un point ouvert) représentent les objets qui bougent. Le point représente toujours l’homme. Il utilise une feuille de papier pour transcrire le mouvement. «La feuille standard peut être rejoint d’un bout à l’autre pour former une composition de mouvement ou un enregistrement de n’importe quelle longueur. Il est facile de lire sur un rouleau de papier. De plus la notation de mouvement sur la feuille permet de les comparer facilement »99. En utilisant un matériau que chacun 98 THIEL Philip. Ibid. p 48 99 HALPRIN Lawrence, Motation, Progressive architecture, Juin 1965, p129 (traduction
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Exemple de Motation (HALPRIN Lawrence, Motation, Progressive architecture, Juin 1965)
peut avoir à portée de main, Halprin rend accessible cette notation à tout le monde. Il divise la feuille en deux horizontalement. La moitié droite inclut une liste des symboles constants et ceux supplémentaires qu’il pourrait y avoir. Au-dessous de cette liste le bloc de titre indique le titre évidemment mais aussi les types de mouvements, les unités de temps et la distance. La moitié gauche de la feuille est utilisée pour enregistrer l’expérience elle-même, sur deux colonnes séparées. La piste nommée « horizontale » est une colonne de grands cadres qui permet de noter le trajet et les changements de direction en plan. Il commence en bas par montrer un cadre clef montrant le trajet de base. Il représente ici le trajet de la personne sur un plan où est esquissé grossièrement l’espace où le mouvement a lieu. Les cadres successifs de la piste horizontale répètent seulement la section de trajet qui est notée dans les cadres correspondants sur la piste nommée « verticale ». Celleci, située à droite de la piste horizontale, est composée de cadres plus petits. Cette piste permet de noter « l’horizon visuel normal que nous voyons lorsque nous avançons. »100 Le cadre vertical est divisé en deux par une ligne au centre afin de représenter les objets qui sont à gauche ou à droite de l’observateur. La ligne de centre elle-même représente le chemin du mouvement. En lisant ensemble les deux pistes, horizontale et verticale, du bas vers le haut, les trois dimensions de l’espace sont représentées, c’est-àpersonnelle) 100 HALPRIN Lawrence, Motation, Progressive architecture, Juin 1965, p130 (traduction personnelle)
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dire la hauteur aussi bien que la distance horizontale. Deux bandes supplémentaires à gauche et à droite de la piste verticale indiquent respectivement la distance et la vitesse de déplacement. La bande de distance permet de représenter à l’aide d’un trait vertical, la pente du sol, s’il monte, descend ou si ce sont des escaliers. La bande de temps utilise des points. Plus les points sont éloignés plus la vitesse est importante et inversement. Une pause sur la piste représente un changement de type de mouvement. Ce changement est aussi accompagné par des changements dans les unités de distance et de temps. A chaque fois des descriptions verbales et photographiques accompagnent le système pour faciliter la lecture. La remarque que nous pouvons faire à ce système est tout d’abord la dominance de la vue. Même s’il représente les nuages par exemple, ce qui peut nous faire penser à une ombre portée, un espace plus frais, les autres sens n’existent pas. Tout comme Philip Thiel, l’odorat, l’ouïe, le toucher ne sont pas représentés. Les ambiances architecturales et urbaines sont laissées de côté. De plus nous pouvons avoir quelques difficultés à déchiffrer la notation car certains symboles de direction peuvent se confondre avec les symboles indiquant des objets. Nous pouvons imaginer que les symboles directionnels peuvent être terminés par une flèche. « Les flèches sont universellement acceptées comme des indicateurs de direction. »101 101 PREJMIT TALWAR, Notation systems in architecture [en ligne], Dspace@MIT, disponible sur http://dspace.mit.edu/handle/1721.1/31019 consulté le 15 avril 2012
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Nous pouvons cependant remarquer que la combinaison horizontale et verticale permet de représenter la fluidité du mouvement d’une part et les séquences clefs qui composent le mouvement d’autre part. En effet, la représentation du trajet dans la colonne horizontale permet de lire l’ensemble du déplacement, alors que la colonne verticale semble représenter des séquences clefs dans le mouvement. La vitesse et le temps permettent de lier tout le système de notation. Il représente les éléments dans l’espace mais nous n’avons pas de symboles pour représenter la morphologie de celui-ci. La lecture de l’espace dans la colonne horizontale semble composée uniquement d’objets de taille plus ou moins importante, comme si nous nous situions toujours dans des espaces ouverts, à l’extérieur et non à l’intérieur d’un édifice. Nous pouvons remarquer que parmi les « motations » que nous avons recueillis, aucune ne représente un espace intérieur. Nous pouvons alors penser que la morphologie d’un espace ne constitue pas à elle seule le caractère statique ou dynamique de l’espace mais que les objets, les éléments présents dans notre environnement y contribuent. Cette « motation » est utilisé par Lawrence Halprin pour analyser principalement les chorégraphies de sa femme, mais aussi l’espace et les objets qui le composent. Il semble que ce système n’ait jamais servi à la conception d’un espace qu’il soit intérieur ou extérieur. Manhattan Transcripts Bernard Tschumi pense que l’architecture du vingtième siècle est caractérisée par une fragmentation, une discontinuité
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des formes, des usages et des valeurs sociales. Il n’existe selon lui, plus de grands dispositifs ou de grandes compositions mais des fragments qui se combinent pour appartenir à un système hétérogène. Son hypothèse de travail est « qu’il n’y a jamais d’architecture sans espace, sans programme, sans mouvement mais qu’aujourd’hui ces notions ne peuvent plus se rapporter à un système unificateur, à un langage unique. »102
Il propose, pour sortir des limites qu’offrent les représentations architecturales « classiques », d’offrir une autre lecture de l’architecture. Les Manhattan Transcripts essaient de proposer une lecture différente de l’architecture où « espaces, mouvements et évènements sont indépendants les uns des autres, tout en suggérant de nouveaux rapports, où les composantes de 102 TSCHUMI Bernard, Manhattan Transcripts index illustré, In CORIN Florence (dir) Danse et architecture, Bruxelle, nouvelles de danse, 2000, n°42-43, p 92
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Manhattan Transcript (TSCHUMI Bernard, Manhattan Transcripts index illustré, In CORIN Florence (dir) Danse et architecture, Bruxelle, nouvelles de danse, 2000, n°42-43,)
l’architecture sont brisées et reconstruites selon d’autres axes. » 103 La notation questionne les modes de représentation utilisés par les architectes : plan, coupe, axonométrie ou perspective. Les évènements sont une partie de programme, ils peuvent contenir certains usages ou fonctions particulières. Ces évènement sont indépendants et ne résultent rarement des circonstances qui les entourent. Les espaces ont pour Tschumi, leur propre autonomie et logique. Résultat des formes architecturales et urbaines, ils peuvent être comprimés, juxtaposés, distordus fragmentés… Le mouvement est défini par Tschumi comme l’action de se mouvoir mais d’une façon particulière. Il signifie « l’intrusion d’un corps dans l’ordre contrôlé de l’architecture. »104 Les Manhattan transcripts sont un système de notation qui réunit et met en confrontation ces trois catégories. Cette notation combine « les représentations architecturales, des photographies d’évènements particuliers et des diagrammes fléchés de chorégraphies diverses »105. Ce système rend compte de manière séquentielle l’architecture qui contient, pour Tschumi, autant l’action que l’objet et le temps autant que l’espace. Cependant Tschumi ne cherche pas à établir une synthèse de ces trois catégories mais à rendre compte des contradictions et des relations d’indifférence, de renforcement ou de conflit. 103 TSCHUMI Bernard, Manhattan Transcripts index illustré, In CORIN Florence (dir) Danse et architecture, Bruxelle, nouvelles de danse, 2000, n°42-43, p 92 104 TSCHUMI Bernard, Manhattan Transcripts index illustré, In CORIN Florence (dir) Danse et architecture, Bruxelle, nouvelles de danse, 2000, n°42-43, p 92 105 ibid
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Lorsque le programme et l’espace sont distinct l’un de l’autre, où les qualités spatiales et morphologiques ne dépendent pas obligatoirement des exigences programmatiques, Tschumi parle de relation d’indifférence. A l’inverse l’espace et le programme peuvent être totalement interdépendants, se nourrir l’un l’autre, c’est une relation de renforcement. La relation de conflit se produit lorsque l’espace et l’action se contredisent. Il illustre ses propos en imaginant l’espace de la Chapelle Sixtine accueillant un 110 mètre haies. Ces relations sont soulignées par Tschumi pour montrer qu’elles existent malgré les « idéologies prescriptives de l’architecture ». Le système de notation développé par Tschumi tente « d’éliminer les significations préconçues données à des actions particulières pour se concentrer plutôt sur leur effet spatial : le mouvement des corps dans l’espace. » Le mouvement du corps est représenté par des sortes de « corridors » où le passant, le danseur, se fraye un passage dans la matière. Ainsi la notation suggère des volumes linéaires, continus comme si le trajet du mouvement des corps est solidifié en un « vecteur massif et permanent ». La caractéristique principale des Manhattan Transcript est la séquence : une succession complexe de cadrages qui confronte espace, mouvement et évènements. Cette notion s’oppose à la fluidité évoquée précédemment. Il semble que le mouvement peut se représenter de deux manières différentes : en séquences, qui indiquent les moments clef du parcours, du mouvement, ou alors de façon plus linéaire, plus fluide, qui représente l’ensemble du mouvement.
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Expérience de notation personnelle J’ai élaboré lors de mon mémoire de Master 1106 un code barre du parcours réalisable dans les édifices de Le Corbusier. Ce travail cherchait à savoir s’il est possible d’utiliser le parcours comme processus de conception. J’ai étudié cinq œuvres architecturales de cet architecte en essayant de dégager un parcours dans chacune d’elle. Ce parcours était basé sur les commentaires que l’architecte avait faits de ces œuvres et plus particulièrement de la « promenade architecturale ». Le choix de l’architecte s’est porté sur Le Corbusier car c’est le premier à parler de « promenade architecturale » lorsqu’il évoque la villa La Roche. Nous avons vu que selon lui, « l’architecture s’apprécie à la marche avec le pied ; c’est en marchant, en se déplaçant que l’on voit se développer les ordonnances de l’architecture. »107 Les projets ont été étudiés par thématiques : le repérage du parcours, l’ambiance du parcours à travers la lumière et les mises en vues, puis à travers le corps. En s’appuyant sur le discours de l’architecte et en le discutant, j’ai dégagé des outils de fabrication du parcours synthétisés dans un code barre. Les outils dégagés ont été l’orientation corporelle par rapport aux éléments physique du projet, les effets ressentis, les changements de direction (en plan uniquement les changements d’altitude ne sont pas spécifiés), le dimensionnel, qui note les 106 ACHARD Ellyn, La marche comme processus de conception, Mémoire de M1, ENSAG, mai 2011 107 Fondation Le Corbusier, Villa Savoye, Poissy France 1928 [en ligne] disponible sur http://www.fondationlecorbusier.fr/ consulté le 20 Avril 2011
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hauteurs, longueurs et largeurs de l’espace. Dans ce système de notation, nous retrouvons certains facteurs de mouvement comme les changements de direction ou la morphologie spatiale. Un facteur vient s’ajouter à la liste déjà établi par nos précédentes études : les effets ressentis. Ceux-ci permettent de qualifier l’espace en fonction de ce que nous pouvons ressentir dans ce type d’espace. C’est un élément subjectif basé sur la morphologie et les ambiances lumineuses principalement (la présence d’ouvertures et leurs orientations). Ces « effets » sont basés également sur les propos de l’architecte et des visiteurs. Nous pouvons remarquer que le code barre est lui aussi élaboré à partir d’éléments principalement visuels : la morphologie spatiale, la lumière, les dimensions. Mais ceci est peut-être dû au fait que l’architecture de Le Corbusier fait appel principalement au sens de la vue. Nous avons pu le remarquer dans la partie traitant de la multiplicité des points de vue. Cependant l’aspect tactile principalement mais aussi sonore ou olfactif n’est pas à oublier dans les œuvres de Le Corbusier. Une fois le code barre établi, je l’ai soumis à des étudiants en leurs demandant dessiner ce qu’ils souhaitaient à partir du code. Ceci afin de savoir s’il était possible de redessiner les plans de la villa La Roche par exemple, seulement à partir du code. Il s’est avéré que celui-ci était trop complexe, il intégrait peut-être trop de notions dans un seul et même code car certains n’ont dessiné que les dimensions et les changements de direction, d’autres que les effets ressentis et les changements de direction, ou encore
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toutes les dimensions du code en dessinant tout d’abord les dimensions, puis les changements de direction et enfin les effets et les rapports aux parois. L’expérience a été proposée à plusieurs étudiants qui n’ont pas réussi à dessiner le parcours à partir du code. Ils ont expliqué qu’ils auraient souhaité commencer par une coupe, continuer sur un plan et finir par un croquis ou une axonométrie. Nous avons pu conclure que les codes barre étaient trop complexes, rassemblant trop d’éléments différents. Peutêtre qu’en le décomposant la fabrication du parcours aurait été plus aisée. Les outils permettant la fabrication du code barre semblent plus efficaces séparément. Au regard des diverses notation du mouvement nous pouvons à présent penser que la forme du code barre n’était pas la bonne. Ainsi, une forme plus graphique et moins descriptive aurait peutêtre été comprise plus facilement et rapidement Les outils de mise en mouvement du corps dégagés dans cette partie sont nombreux. La multiplicité des points de vue incite l’usager à observer l’espace à partir de divers endroits. La notion de découverte pousse également le promeneur à aller plus loin, à continuer sa promenade. Peter Zumthor va plus loin dans cette idée et offre aux visiteurs la liberté de créer leur parcours. Les outils tels que la stimulation d’un axe de référence ou encore l’utilisation de lignes courbes, ondulantes sont à nouveau présents dans cette partie. Les lignes de force développées par R. Arnheim permettent de donner une dynamique à l’édifice. Nous avons pu noter que le mouvement peut être représenté de manière fluide, continu ou alors en séquences. Cependant, nous pouvons
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regretter que les notations étudiées soient utilisées uniquement pour l’analyse de l’architecture et du mouvement. Il aurait été intéressant de voir ce que produit spatialement tel ou tel type de notation. De se servir de cette manière de représenter le mouvement lors de la conception de l’architecture. Une boite à outil pour penser le mouvement dès la conception Les outils dégagés jusque-là à travers l’étude du mouvement ne sont pas exhaustifs. Certains outils peuvent s’associer et se compléter. Par exemple, l’outil « multiplicité des points de vue » fait appel à l’outil « découverte » car en offrant de nouveaux points de vue, nous incitons le promeneur à découvrir le lieu, l’espace sous un angle différent. En associant les outils entre eux, nous offrons ainsi une variété d’espaces incitant au mouvement. Les outils peuvent être classés et regroupés dans trois grandes catégories. Ce classement subjectif permet de concevoir des espaces où le parcours par exemple, est un élément fort du projet. Ainsi nous allons peut-être utiliser les outils de cette catégorie en priorité.
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Perception visuelle
Morphologie spatiale
Parcours
Flux optique
Courbes - Fluidité
Mémoire topokinésthésique
Multiplicité des points de vue
Lignes de force
Stimulation d’un axe de reférence
Emotion
Equilibre
Liberté de parcours
Multitude de matériaux
Surprise - Découverts Séquence
Dans un but d’utilisation de ces outils pour la conception, nous pouvons imaginer qu’il existe des dispositifs architecturaux associés à certains outils. Ainsi la multiplicité des points de vue peut se faire par exemple, grâce aux espaces de double hauteur et aux balcons donnant sur ces espaces. C’est ce que fait Le Corbusier dans la villa La Roche où l’espace central est de toute hauteur et des passerelles et de balcons donnent à voir cet espace sous différents angles. Bloquer un axe de référence avec un mur par exemple, revient à stimuler un autre axe. Pour bloquer un axe nous pouvons placer un mur perpendiculairement à celui-ci mais une différence de niveau permet aussi de bloquer cet axe sans bloquer la vue. Les surfaces penchées peuvent permettre d’intégrer la notion d’équilibre. En effet, nous sommes habitués aux murs, plancher et plafonds droits et perpendiculaires. Si l’une de ces surfaces s’incline suffisamment, nous aurons l’impression qu’elle risque de tomber Nous pouvons imaginer que la liberté de parcours offre de larges espaces non cloisonnés, permettant de circuler librement.
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L’outil « surprise découverte » peut prendre forme en jouant avec le contraste des ambiances d’un espace à un autre. Ainsi nous pouvons passer d’un lieu très sombre à un espace baigné de lumière grâce à la taille des ouvertures. Ces quelques exemples sont eux aussi subjectif et il existe différentes manières d’utiliser ces outils. Cependant nous pouvons observer que la conception d’un projet à l’aide de ces outils est possible. Inversement, nous pouvons analyser un espace en observant la présence de ces dispositifs. Si nous remarquons qu’un espace est sur double hauteur avec des balcons, nous pouvons savoir que l’espace est dynamique et incite au mouvement. Un travail sur les dispositifs associés à ces outils serait intéressant et apporterait une diversité dans la manière d’utiliser le mouvement en architecture. Nous allons à présent mettre en pratique ces outils lors de la conception du projet de la Maison de l’Université, localisé sur le Campus de Grenoble. Les outils dégagés lors de cette recherche me permettent de concevoir un bâtiment où le mouvement occupe une place importante
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V/ Dynamique en Poche – Projet Maison de l’Université
de la
A. Contexte Le campus Universitaire de Grenoble voit le jour dans les années 60. Localisé sur les communes de St Martin d’Hères et de Gières, il se situe aujourd’hui dans un contexte particulièrement dynamique. En effet, Grenoble est l’une des villes les plus étudiantes de France accueillant plus de 60 000 étudiants. L’agglomération grenobloise est aussi le premier pôle français de recherche publique et privée après Paris et l’un des sites français les mieux dotés en infrastructures et télécommunication (le train, l’avion et la route permettent une proximité de Lyon, Genève, Turin, et Paris). Les relations internationales ancrées dans la tradition donnent un caractère cosmopolite à l’agglomération et attirent de nombreux étudiants et chercheurs étrangers. Accueillant aujourd’hui plusieurs universités, le campus offre une diversité d’études supérieures et de pôles de recherche. Cependant afin que son rayonnement s’étende au-delà de l’agglomération ou même du pays, le « Pole Université de Grenoble » a été créé. Il rassemble tous les établissements universitaires en une structure unique, et rend le paysage universitaire grenoblois plus visible à l’échelle internationale et d’entrer notamment dans le classement de Shangaï (classement qui compare 1200 institutions d’enseignement supérieur selon différents critères basés sur la recherche)
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Opération Campus Cette unification des universités s’inscrit dans le projet « Opération Campus », lancé par l’état en 2008. Ce projet a pour objectifs de hisser la France au rang des autres Universités mondiales en rénovant et restructurant 10 campus français. Cette opération est décrite comme « un plan exceptionnel en faveur de l’universitaire qui vise à renforcer l’attrait et le rayonnement de l’université française en faisant émerger des campus d’excellence, futures vitrines et socle du développement économique de demain. »108 Grenoble s’inscrit dans cette opération grâce au projet « Grenoble Université de l’Innovation » qui met en œuvre différents projets d’aménagement, d’enseignement et de recherche. Le projet prévoit trois types d’actions : améliorer le cadre de vie et de travail des étudiants et du personnel, réhabiliter certains équipements universitaires et structurer ou renforcer des pôles thématiques, scientifiques et pédagogiques constituant des « centres d’excellence ». Ce projet est à l’échelle de l’agglomération grenobloise car les pôles d’université et de recherche ne sont pas concentrés uniquement sur le campus. En effet certaines universités sont situées dans le centre-ville de Grenoble, le pôle Santé sur les communes de la Tronche et Meylan et enfin, la presqu’île scientifique qui comprend tout un domaine de recherches privées et publiques prend place au confluent entre l’Isère et le Drac. Sur le domaine universitaire l’opération se traduit par le projet « Campus 2025 Grenoble-Alpes ». Il est initié en 2010 par le PRES (Pôle de Recherche et d’Enseignement Supérieur). L’objectif reste le même que pour le projet « opération campus », c’est-àdire devenir un campus d’envergure internationale d’ici 2025. 108 http://www.grenoble-univ.fr/, consulté de 15/05/12
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Schéma Directeur d’Aménagement Le domaine universitaire se dote d’un véritable plan de composition urbaine dans les années 90. L’architecte Peter Ahrends réalise un Schéma Directeur d’Aménagement en donnant une importance à l’axe Est-Ouest grâce à la création de l’avenue centrale. Ce schéma directeur est régulièrement actualisé par les urbanistesconseils jusqu’en 2008. Aujourd’hui l’agence INterland établit le schéma directeur d’aménagement et de développement durable. Ce nouveau schéma reprend celui de Peter Ahrends en rendant l’axe central plus évident grâce à une urbanisation de celui-ci. Le schéma directeur prévoit diverses infrastructures et espaces publics tels que de nouveaux logements étudiants, un restaurant universitaire ou encore un pôle santé. En tête d’axe se trouve la Maison de l’université qui est le signal marquant l’accueil et l’entrée sur le domaine universitaire. La maison de l’Université doit refléter l’identité d’excellence, de savoir et de recherche du campus, c’est un véritable emblème de l’Université de Grenoble. Cette Maison de l’Université s’inscrit dans le réseau d’équipements de l’agglomération en participant au développement économique, social et urbain de la ville, c’est une infrastructure vectrice de dynamiques pour la ville. La Maison de l’Université est un symbole à l’échelle internationale car elle accueil des doctorants et post-doctorants venant d’universités d’autre pays.
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B. Des poches d’ambiance La Maison de l’Université Le projet sur lequel je travaille est celui de la Maison de l’Université. L’édifice prend place en tête d’axe, comme nous avons pu le voir lors de la description du projet « Campus 2025 Grenoble-Alpes ». Il doit être le symbole du campus. Nous pouvons remarquer dès l’entrée sur le campus, les cheminements piétons ne sont pas clairement définis. Les tracés de désir sont nombreux sur tout le territoire du campus. Ainsi, la liberté de parcours pour le piéton est un élément essentiel dans notre expérience du campus. C’est pourquoi, les voiries automobiles sont déviées dans le projet, pour laisser cette liberté de parcours devant la Maison de l’Université. Sur le domaine universitaire, les ambiances lumineuses, sonores ou encore thermiques sont diverses et variées. En effet, nous pouvons trouver une place publique photo qui permet le rassemblement de beaucoup d’étudiants et ainsi certains évènements comme des
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concerts ou encore des soirées étudiantes, en particulier par la proximité d’EVE (Espace Vie Etudiante). A proximité de cette place se trouve un espace où le sol accueille de larges pentes. photo C’est un espace où les étudiants se retrouvent à midi pour manger, se donnent rendez-vous ou tout simplement profitent du soleil. Plus au Nord nous trouvons un sous-bois qui offre une ambiance calme et ombragée. photo Le tapis d’épine qui recouvre le sol absorbe le bruit des pas. La lumière est filtrée par le couvert végétal. Dans le projet de la Maison de l’Université j’ai cherché à montrer cette diversité d’ambiances, à les exacerber. L’édifice devant être le symbole du campus, il doit donc le représenter et montrer la richesse d’ambiances qu’il offre. Le concept du projet est donc basé sur des poches d’ambiance qui viennent impacter les bâtiments, que ce soit la Maison de l’Université ou les bâtiments autours. Le projet prend en compte l’aménagement de l’axe imaginé par l’opération « Campus 2025 Grenoble-Alpes ». Ces poches d’ambiances sont, nous l’avons dit, les ambiances que nous pouvons trouver sur le campus mais rendues plus évidentes et concentrées autours de la Maison de l’Université L’édifice est construit au maximum que l’autorise le prospect. C’est une forme rectangulaire qui est sculpté par ces poches d’ambiance. Celles-ci sont perméables aux flux, c’est pourquoi, le tramway et l’allée des marronniers traversent ces poches. Chaque poche est traitée comme un petit projet. La poche sonore A l’ouest nous trouvons la poche sonore (qui reprend l’ambiance de la place devant la Bibliothèque Universitaire). Cet espace est
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génération de la forme dans la poche du son
en pente en périphérie et plat au centre. Il peut être assimilé aux auditoriums et aux amphithéâtres que nous connaissons, avec la scène au centre. Cette poche peut ainsi accueillir des évènements tels que des spectacles, des manifestations culturelles, ou encore des réunions d’étudiants. La pente permet aux spectateurs de voir l’espace de scène facilement. La forme de l’espace permet une interaction entre les spectateurs, se trouvant autours de la scène, et les acteurs au centre. Le son est un des facteurs d’ambiance dominant dans cet espace. C’est le son des usagers qui nous intéresse ici. Nous avons expliqué que les poches viennent sculpter les bâtiments. Cependant cet impact n’est pas aléatoire, ici c’est le son qui vient impacter, et plus particulièrement le son des usagers, le bruit des voix, des personnes qui parlent ou qui chantent. La direction du son est donc horizontale. Schémas Les bâtiments sont déformés à partir du sol, comme s’ils étaient enfoncés. La poche se ressent comme un enveloppement de tous les côtés : latéralement par la forme de la poche et verticalement par les pentes soit sur les murs de bâtiments soit par la déclivité du sol. Le son étant dominant, les matériaux utilisés ne doivent pas l’absorber mais au contraire le renvoyer, permettre de le diffuser plus facilement. Pour cela il est nécessaire d’utiliser des matériaux lisses. En effet, sur une surface lisse le son va glisser dessus ou être renvoyé. A l’inverse, une surface poreuse va absorber le son, le rendant plus difficilement audible. Au sol, un béton balayé permet une surface assez lisse mais pas trop non plus pour ne pas que le sol soit glissant les jours de pluie ou de neige. Sur le mur de la Maison de l’Université touché par la poche sonore, un acier corten est mis en place afin de renvoyer les sons. L’acier est assemblé de manière à avoir le moins de relief possible qui viendrait altérer la diffusion du son. Ce mur
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génération de la forme dans la poche de fraicheur
est incliné, résultat de l’impact de la poche, et intègre ainsi la notion d’équilibre et de stabilité vue précédemment. Les usagers vont venir jouer avec ce mur, comme ils le font avec les œuvres de Richard Serra. La poche de fraicheur Au Nord se trouve la poche de fraicheur (qui s’assimile à l’ambiance du sous-bois). Celle-ci est colonisée par la végétation. Des arbres à feuilles caduques sont plantés à différents moments, permettant ainsi une variation dans la densité de la végétation. Ici, la variation, le changement fait de cet espace un lieu dynamique. A différents moments de la journée, l’ombre va varier ; au cours de l’année le couvert végétal va s’intensifier, les couleurs vont se nuancer. Les arbres vont perdre leurs feuilles créant un tapis végétal souple, absorbant le bruit des pas. Le couvert végétal filtre la lumière, l’espace sous le vélum est donc largement ombragé et le taux d’humidité est important. La faune et la flore viennent investir les lieux. Les vents dominants viennent souffler les feuilles et les poussent contre le mur de la Maison de l’université. La fraicheur est donnée par l’ombre des arbres. Ici l’impact des poches sur les bâtiments est donné par la direction de bas en haut, la direction de pousse des arbres. Les bâtiments sont donc sculptés sur toute la hauteur, comme sectionnés de bas en haut. Les matériaux utilisés doivent pouvoir restituer la fraicheur lorsque c’est nécessaire. Ainsi, le mur de la Maison de l’université est réalisé en maçonnerie, le matériau permet de rester frais et de restituer cette fraicheur lors des heures les plus chaudes de la journée. Ce mur maçonné est innovant dans la manière de traiter l’isolation. En effet, l’été, nous souhaitons profiter de cette fraicheur, le mur ne doit donc pas être isolé. Cependant en hiver nous allons chercher à nous en protéger, le mur doit
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génération de la forme dans la poche de lumière
donc être isolé. Nous avons alors imaginé un système d’isolation réversible. Cette isolation pourrait être réalisée en bille de liège que nous viendrions injecter dans le mur lorsque l’hiver approche et aspirer l’été. Ainsi, le bâtiment profite naturellement de la fraicheur en été. La poche de lumière Au Sud se trouve la poche de lumière (qui reprend l’ambiance des pentes à proximité de la place). Cet espace est baigné de lumière naturelle, le soleil est l’élément dominant. La chaleur et l’intensité lumineuse font l’ambiance de cet espace. Celui-ci est traité au sol par une topographie qui permet de s’installer de diverses manières dans cet espace. Ainsi, nous pouvons choisir de s’exposer complètement aux rayons solaires, la topographie faisant office de solarium, ou alors de se placer plus à l’ombre. Cet espace est un espace convivial qui permet le regroupement de petits groupes de personnes. La topographie est aussi un espace de jeu pour les enfants qui l’escalade. La circulation dans cet espace se fait aux points bas de la topographie autours des espaces de rencontre, de solariums. La topographie est ici un dispositif de mise en mouvement du corps, car nous pouvons nous assoir ou nous allonger de différentes manières. C’est un espace offrant une variété d’affordances et donc d’actions. La topographie est réalisée en lame de bois. Ce matériau permet d’obtenir des courbes facilement par ceintrage des lames. De plus les surfaces exposées au soleil ne seront pas trop chaudes pour permettre aux usagers de s’assoir ou s’allonger sans se bruler. Les lames de bois, sont suffisamment proches pour obtenir une ombre portée suffisante mais permettent tout de même de laisser passer l’air et le vent afin, encore une fois, d’éviter la surchauffe. L’impact de la poche sur les bâtiments est vertical. En
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effet, c’est la lumière (et la chaleur) qui domine dans cet espace. La lumière venant du ciel, c’est une direction du haut vers le bas qui sculpte les édifices. Ainsi, ceux-ci sont sectionnés, de la même manière que pour la poche de fraicheur, sur toute la hauteur. Cependant, comme c’est la lumière qui nous intéresse ici, les bâtiments sont traités différemment. Les deux bâtiments au sud de la poche sont marqués par l’impact de la poche (en vertical) par un changement de matériau. Les parois nord sont traitées en verre et permettent ainsi, de laisser passer la lumière, alors que les parois qui se font face sont réalisées à l’aide de facettes réfléchissantes qui dirigent la lumière vers la poche. Le mur de la Maison de l’Université est quant à lui réalisé en panneaux d’Albâtre translucide. Ce matériau permet un véritable dialogue entre l’intérieur et l’extérieur. En effet, la journée, lorsque nous nous trouvons à l’extérieur, nous avons l’impression que le mur est en pierre, opaque ; alors qu’une fois à l’intérieur, nous nous apercevons que le mur filtre la lumière. La lumière de l’extérieur pénètre à l’intérieur. La nuit c’est l’inverse, la lumière produite à l’intérieur de la Maison de l’Université éclaire la poche de lumière à l’extérieur. Pour chaque mur de la Maison de l’Université, bordant une poche, il existe un véritable dialogue entre intérieur et extérieur. Pour le mur à l’ouest, celui qui borde la poche sonore, c’est le biais de celui-ci qui se ressent à l’intérieur. Le mur de la poche fraicheur, quant à lui, est conçu afin de rafraichir le bâtiment en été tout en l’isolant du froid l’hiver. Enfin, le mur de la poche de lumière dialogue entre l’intérieur et l’extérieur grâce aux panneaux de pierre translucide. La lumière est filtrée par ce mur et laisse passer les rayons lumineux dans les deux sens : de l’extérieur vers l’intérieur la journée et de l’intérieur vers l’extérieur la nuit.
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Coupe transversale
L’impact de la Maison de l’Université est important, que ce soit du point de vue symbolique ou physique. Ainsi, lorsque nous sommes dans une poche, nous nous trouvons déjà dans l’espace de la Maison de l’Université. A la sortie du tramway par exemple, nous sommes déjà dans cet espace. La Maison de l’Université vient nous chercher, nous accueille au-delà des limites physiques. Les poches servent également d’intermédiaire entre l’édifice et les autres bâtiments. En effet, par leur impact, celles-ci sont aussi un moyen de relier les bâtiments entre eux, comme une place publique le fait en ville. Ainsi, nous pouvons imaginer que le programme des bâtiments connectés à la Maison de l’Université est en relation avec ce qu’il se passe dans la poche. La Maison de l’Université entre alors en interaction avec les autres bâtiments grâces aux poches.
Organisation spatiale
Les angles de la Maison de l’Université sont traités en verre. Ceci permet au regard de circuler librement sur les courbes à l’intérieur du bâtiment. Ces grandes ouvertures apportent la lumière nécessaire et la vue sur le reste du campus. Afin d’éviter la surchauffe, notamment en été certaines vitres peuvent s’ouvrir pour ventiler naturellement le bâtiment. Des stores intérieurs sont également prévus pour se protéger des rayons solaires trop intrusifs. A l’intérieur, le rez-de-chaussée est laissé libre de tout aménagement afin de garder cette liberté de parcours qui fait le charme du campus. Les entrées dans le bâtiment se font de manière indifférenciée à chaque angle de la Maison de l’Université. Les usagers peuvent alors entrer et traverser le bâtiment à leur
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Coupe longitudinale
convenance. C’est comme si l’extérieur se prolonge à l’intérieur, les espaces entre les poches, (où les interventions sont très minimes) viennent former la continuité entre cet extérieur et l’intérieur. Cette large ouverture sur les espaces offre divers points de vue sur l’intérieur lorsque nous sommes à l’extérieur. En effet, lorsque nous nous déplaçons autours de la maison de l’université, nous avons des points de vue différents du Rez-de-chaussée. A l’intérieur, nous vivons aussi une expérience de multiplicité de points de vue. Lorsque nous nous trouvons au centre de l’espace, nous avons une vision étendue, tout autour de nous, avec des points de resserrement lorsque les courbes des murs se rapprochent. Sur le plan horizontal, nous vivons une expérience de la multiplicité des points de vue, qui met notre corps en mouvement. Soit un mouvement important, qui est de l’ordre du déplacement et implique tout notre corps, lorsque nous sommes à l’extérieur. Soit un mouvement plus discret, une rotation de la tête et les mouvements oculaires, lorsque nous sommes à l’intérieur. Nous verrons par la suite comment cette expérience de multiplicité des points de vue se retrouve également verticalement. Une fois que nous sommes à l’intérieur, nous retrouvons à chaque étage un mur qui accueille les services et les espaces techniques. Entre cet espace et le mur bordant la poche de son nous trouvons la circulation verticale qui dessert les quatre étages de l’édifice. L’escalier se trouve donc entre deux murs : le premier vertical sur toute la hauteur, le mur qui accueille les services et le second incliné qui est le mur bordant la poche sonore. Afin d’apporter de la lumière naturellement et de profiter de cet espace toute hauteur, une verrière est mise en œuvre sur la toiture, au-dessus de cet espace de circulation. La lumière zénithale vient glisser le long des murs courbes. Cette expérience d’ascension met le
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Plan de composition
corps en mouvement par la stimulation d’un axe de référence, ici l’axe haut bas. Cependant elle fait également appelle à la notion d’équilibre. En effet, le mur biais s’éloigne peu à peu de notre corps et arrivé en haut nous surplombons le vide de l’escalier. Dans les étages le programme est réparti de manière à ce que les pièces qui accueillent du public soient aux niveaux les plus haut afin d’inciter l’usager à parcourir l’édifice. Ainsi nous trouvons l’amphithéâtre et le foyer au troisième et quatrième étage.
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expression shématique de la multiplicité des points de vue au rez de chaussée. La vision est étendue sur 360 degrés avec des points de resserement.
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L’organisation intérieure se fait selon une trame orthogonale. Cette organisation découle du concept du projet : un rectangle sculpté par des poches. La trame principale est visible au sol par un traitement de matériau différent. C’est sur celle-ci que viennent se positionner les cloisons. Ainsi, si l’espace nécessite par la suite d’être plus cloisonné, il est facile d’ajouter un mur tout en conservant l’idée principale du projet. La trame secondaire permet d’aménager l’espace. Les bureaux et le mobilier vient se positionner en fonction de cette trame. Celle-ci se retrouve en façade sur les murs rideaux : les menuiseries sont positionnées en fonction de cette grille d’aménagement. Afin de dégager les courbes, les espaces de bureaux sont paysagers, ainsi l’œil suit cette courbe, glisse le long de la paroi. Nous avons vu, dans les parties précédentes, que les courbes sont un outil de mise en mouvement. En effet, nous avons vu que certains architectes pensent que l’œil préfère les lignes fluides, les courbes. Nous les suivons du regard, l’œil glisse dessus plus facilement. C’est pourquoi dans le projet, les murs ne viennent pas taper contre les courbes afin de ne pas bloquer le mouvement de l’œil. Des espaces de double hauteur sont aménagés afin d’offrir des visions différentes sur un même espace. Nous retrouvons ici l’outil de la multiplicité des points de vue. Cette multiplicité des points de vue est présent également dans avec l’escalier. En effet, à chaque étage, nous avons une vue différente de l’espace de circulation vertical. La Maison de l’Université est représentative du campus car elle réunit tout ce qui fait, à mon sens, l’identité du campus à savoir les différentes ambiances, la liberté de circulation au Rez-dechaussée et le dynamisme de la vie étudiante.
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Conclusion A travers ce travail, nous avons dégagé des outils qui permettent de mettre le corps en mouvement. Ces outils servent à la fois à l’analyse et à la conception de l’architecture. En effet, lors de la conception de la maison de l’Université, nous avons utilisé certains outils afin d’inciter les usagers à parcourir l’édifice et son environnement proche. Ces outils ont permis de rendre le bâtiment dynamique. Nous avons pu observer qu’il existe trois grandes catégories de mouvement. Le mouvement vécu, qui met le corps physiquement en mouvement à différent degrés. La marche qui implique le corps tout entier, les gestes comme toucher un matériau ou tourner la tête par exemple, et les mouvements oculaires qui permettent de d’appréhender un espace rapidement. La seconde catégorie est le mouvement simulé, c’est-à-dire que nous n’effectuons pas physiquement le mouvement mais nous l’imaginons, nous le simulons. Cette simulation n’est possible que dans notre cerveau. En effet, nous avons vu, à travers les sciences du mouvement, que lorsque nous voyons quelqu’un faire un geste par exemple, les mêmes cellules nerveuses interviennent que si nous effectuons nous même ce geste. La simulation du mouvement passe essentiellement par la vision. Cependant, lorsque les architectes ou les chorégraphes notent le mouvement, ils le simulent sur le papier. Lorsque nous lisons ces notations, nous essayons de nous représenter mentalement le mouvement. La représentation est la dernière approche du mouvement. Les diverses représentations du mouvement, que ce soit la notation ou une architecture qui représente le mouvement du corps, font le lien entre mouvement simulé et mouvement vécu. En effet, celles-ci représentent un
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mouvement qui a été ou sera vécu. Or ce mouvement n’est pas effectué par notre corps, nous nous le représentons mentalement et ainsi le simulons dans notre cerveau. Lors de la mise en pratique des outils de mise en mouvement à travers l’exercice de projet, nous avons dégagé de nouveau outils. En effet, lors de l’expérience proposée dans la poche de lumière, la topographie offre différentes manières de s’assoir, de s’allonger. Or, lorsque un objet, un espace offre différentes possibilités d’action nous pouvons parler d’affordance. L’affordance est l’ensemble de toutes les possibilités d’action qu’offre un environnement. C’est James J. Gibson qui introduit cette notion dans les années 70. Il montre 109 que chaque élément architectural peut être une affordance. Ainsi, un mur en tant qu’élément vertical nous pousse à agir face à lui. Nous ne pouvons pas le traverser, il nous incite à le contourner ou le longer jusqu’à ce qu’une ouverture nous offre la possibilité de passer de l’autre côté. En offrant diverses actions possibles dans la poche de lumière, grâce à la topographie, (le jeu, les diverses assises, les positions allongées) nous concevons un espace ayant de multiples possibilités d’action et donc de mouvement. Nous avons vu qu’il serait intéressant de connaître les dispositifs architecturaux associés aux outils de mise en mouvement. L’affordance d’un espace semble être un outil de mise en mouvement du corps. Le dispositif associé dans le projet est la topographie. Ce travail viendrait compléter cette présente étude en offrant divers moyens de mise en mouvement du corps.
109 GIBSON James J, 1977, The Theory of Affordances. In Perceiving, Acting, and Knowing, Eds. Robert Shaw and John Bransford
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Clara-Clara (Mendelson Jodie, disponible sur https://picasaweb.google.com/lh/photo/YId HzJVvNQlXvDw1lP857w, visité le 15/04/12)
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Promenade, exposition Monuenta ( Archéologie du futur, disponible sur http:// archeologue.over-blog.com/article-19749679.html, visité le 30/04/12)
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graffiti magnétiques dans le bronx ( artnet. com, disponible sur http://www.
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p46 Gestes et direction associés au symboles de la notation de Laban (Perrin Alysha, Labanwriter, disponible sur https://sites.google.com/site/ap pageproject/wikipedia-style-article-1, visité le 27/05/12)
Gestes et notation de Benesh ( Gras, Stephanie, Création d’une chorégraphie, disponible sur http:// stephaniegras.files.wordpress.com/2008/05/image-4.png, visité le 27/05/12)
Gestes et notation de Conté (Nadal michelle, la méthode Pierre Conté, disponible sur http://web. lerelaisinternet.com/danse/IFDS/Pierre_Conte.htm, visité le 27/05/12)
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Notation de Laban Websin, notation du mouvement lire, écrire, analyser, penser le mouvement [en ligne] disponible sur http://notation.free.fr/ laban/index.html consulté le 24/03/12
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Villa La Roche, multiplicité des points de vue (architecturewrass3ali, disponible sur http://architecturewrassi3ali.blogspot. fr/2011/09/villa-laroche-le-corbusier-paris.html, visité le 20/05/12)
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Cité de la Musique Christian de Portzamparc ( DUMAS Sylye, Christian de Portzamparc, disponible sur http://contemporart. voila.net/portzamparc.htm, visité le 10/03/12)
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Eglise de la Salute, Venise (miroitement de l’infini, mouvement, disponible sur http://manierisme. melancholia.fr/?3-1-3-Mouvements, consulté le 25/03/12)
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Théâtre Loïe Fuller ( Chausson vert, chorégraphes et danseurs, disponible sur http:// leschaussonsverts.eklablog.com/loie-fuller-1862-1928-la-fee- lumiere-a24352052, visité le 25/03/12)
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p71
Les thermes de Vals, Peter Zumthor (archidaily, the therms Vals, 11 fevrier 2009, disponible sur http://www. archdaily.com/13358/the-therme-vals/, consutlé le 10/12/11)
p72
Turning Torso, Santiago Calatrava (Vaughan Jordan, Turning torso, disponible sur http://vaughanjordan. wordpress.com/2011/10/23/turning-torso/, consulté le 28/04/12)
p76 Codification de l’orientation (THIEL Philip. La notation de l’espace, du mouvement et de l’orientation in Archi tecture d’Aujourd’hui n° 145, 1969, pp. 49-58. (Town Planning Review, 1961) p 52) p78
Notation espace forme pour des surfaces orthogonales (THIEL Philip. La notation de l’espace, du mouvement et de l’orientation in Architecture d’Aujourd’hui n° 145, 1969, pp. 49-58. (Town Planning Review, 1961) p 52)
p79 association et cas divers de surfaces verticales occupant des positions latérales (ibid) p83 Liaisons entre les surfaces (THIEL Philip. La notation de l’espace, du mouvement et de l’orientation in Archi tecture d’Aujourd’hui n° 145, 1969, pp. 49-58. (Town Planning Review, 1961) p 52) p85 Symboles de Motation (HALPRIN Lawrence, Motation, Progressive architecture, Juin 1965, p129) p87 Exemple de Motation (HALPRIN Lawrence, Motation, Progressive architecture, Juin 1965) p91
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Manhattan Transcript (TSCHUMI Bernard, Manhattan Transcripts index illustré, In CORIN Florence (dir) Danse et architecture, Bruxelle, nouvelles de danse, 2000, n°42-43,)
Remerciements Merci à Yann Blanchi, Jacques Scrittori, Nicolas Tixier et Walter Simone pour les séances de corrections sur le projet Merci à Grégoire Chelkoff et Magali Paris qui m’ont fait découvrir le monde de la recherche et pour le temps passé en correction Merci à Sarah Daran et Charline Daud pour leur soutient au quotidien
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Annexes Lors de la semaine du son, qui a eu lieu en janvier à l’école d’archietcture de Grenoble j’ai réalisé des interviews sur des étudiants en Master 1 afin de voir comment ils avaient pensé et réalisé leur projet. Ils devaient concevoir des projets qui prennent en compte le son et qu’il joue avec ( écho, assourdissement direction...) l’interview a été filmé et nous avons pu observer que les gestes sont très utiles pour décrire un projet. le travail rend ici compte des conversation enregistrées et permettent de savoir comment ils ont abordé ce projet de la conception à la réalisation. A chaque interview deux personnes du groupe sont interviewés en même temps. Afin de rendre compte des différentes prises de parole la couleur du texte change en fonction de la personne qui ^prend la parole.
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Description du projet L’idée au début c’était de faire une sorte de conque acoustique. On a trouvé la forme de parabole, pour la faire. Et après on a fait quelques essais avec les différentes formes et la forme d’un oeuf un peu On a trouvé que la meilleur forme c’était l’ellipsoie euh l’ellipse. Parce que avec ça le réflexion marche très bien. C’est la meilleure pour la faire. Donc on a trouvé quelques exemples, des références, des références oui c’est ça. Et après qu’on a fait la forme on a euh, comment ça s’appelle, maitrisé sur rhino on a fait une sorte de mèche avec des triangles, pour avoir des plans, car comme la forme est courbe on peut pas faire ça avec du carton comme le carton est droit. Donc on a maitrisé pour avoir beaucoup de triangles pour faires des curves Processus de conception On a juste cherché comme le but était de faire une pièce acoustique on a cherché au début la forme, on a trouvé la forme. Qu’on voulait, on a trouvé des références, comment on pouvait faire, faire quelques maquettes, des petites maquettes pour voir quels sont les problèmes qu’on va trouver dans le futur, pour la construction et, on a trouvé que les problèmes le problème le plus important c’est que la structure est pas très forte, on a besoin de chercher quelque manière de faire la structure plus forte, plus dur que ça tienne. Donc on a essayé de faire quelques pièces de bois, pour des arches intermédiaires pour que ça tienne. Car même en papier, quand la structure devient On a commencé à construire comme ça, comme ça, comme ça. Et quand on est dans la dernière filière les triangles ils commencent à tomber un peu. Et déjà en
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papier il faisait ça donc on a pensé si on a pas quelque chose plus dur que du carton pour tenir donc c’est pour ça qu’on a utilisé le carton pour les triangles et le bois pour les arcs structurels. Intentions C’était uniquement le son. Oui seulement le son. Difficultés C’était la structure surtout je pense. Comment ça va tenir. Différences entre conception et réalisation Au début on a pensé de faire une sorte de conque qui réfléchissait les sons. Mais pour ça il faut avoir des matériels propres pour ça, qui réfléchissent. Donc on a pensé à utiliser du alucobon, c’est de l’aluminium, mais comme c’est un peu cher on a pas pu acheter et la solution c’était utiliser le carton. Mais le carton il fait le contraire, il absorbe les sons. Donc finalement la forme qu’on a construite au lieu de réfléchisser pour un point quand une personne est dedans au lieu de réfléchir tous les sons qui sont dans la conque elle absorbe les sons. Dons les gens qui sont dedans ils disent qu’ils se sentent un peu le son est étouffant. Car elle absorbe le son au lieu de réfléchir. Effet du projet réalisé Ben c’est bien !! Car on a pensé au début : ah ça va pas tenir on va commencer à construire il va commencer à . Oui, je pense que on a trouvé la manière de le construire le projet c’est super bon oui parce que au début oui au début on a pensé ça va pas marcher, ça va tomber, même avec les arches et on a pensé qu’il va tomber ! Remarques des camarades Ah ils ont trouvé super beau ! Ils ont dit ah je pourrais pas imaginer qu’une chose comme ça pourrait être faite, une chose qui… un peu impressionnante. Oui, ils pensaient pas que quelqu’un peut faire cette installation avec du carton. Car pour faire les modules c’est très dur, les curves aussi Difficultés à la réalisation Pour la liaison entre les pièces c’est très dur. Car si elles sont pas
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bien faites, comme c’est du carton, et on doit couper, si les pièces sont pas exactement de la même taille et quand on commence à assembler aussi si on assemble pas très bien la forme commence à se casser parce que le carton c’est pas fort. Donc si la distance parfois, la distance n’est pas la distance qu’on a prévue dans le modèle 3D. Donc si la distance est meilleure les onglets qui se collent sont comme ça, donc il y a de la distance et à cause de ça le carton commence à casser dans le pliage. On avait beaucoup de choses comme ça. Oui les pliages aussi étaient difficiles à faire. Non la structure aussi pour la mettre ca ce sont des gosses arches donc on avait besoin de trois personnes pour faire ça. C’était un grand travail. Interview phase 2 : Bon en maquette la première arche qu’on a fait c’est la base, on a trouvé qu’elle était super utile pour placer les pièces, les triangles, car c’est la deuxième maquette ça ? Oui ça c’est la deuxième. La première on avait pas ça et la conque n’était pas très bien, elle était super souple. Avec ça là . C’est pas possible de le construire parce que toutes les pièces c’est c’est déformé c’est... ça bouge. Ça bouge oui. Donc on a fait ça au début. Ici on a la base et après la même idée de la base on a pris. On a fait trois arches structurelles, le premier c’est ici. Le deuxième est ici. Et la dernière est ici. Aussi, on a changé un peu la forma ; dans la deuxième maquette elle est déjà changée. On a cette cette comment on appelle ça ? C’est comme la forme avant elle était droite, elle venait comme ça. Mais on a eu un ingénieur pour nous donner des conseils. Il nous conseille, ici on va avoir un petit problème avec les structures parce qu’il sera tombé. Oui c’est tombé. Donc il nous a dit de faire quelques pliages sur les trois directions. Non, pas vraiment un pliage mais comme une courbe un peu pour euh tenir mieux. On a trouvé des exemples d’architectures en béton avec ces sortes de types et la structure est beaucoup moins beaucoup plus forte oui. Ça tient plus. Donc c’est pour ça qu’on a changé un peu la forme avec ça. Les deux dernières colonnes de triangles. Ah et il y a aussi l’arche centrale ici. Oui c’est la principale. On a commencé à construire jusque ici, d’ici jusque les finales. Et on monte toutes les pièces comme des arcs. Et après pour les liaisons c’est aussi très important. On utilisait pour faire les liaisons on a
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fait des petites pièces de bois pour ne pas casser le carton, à cause des trous. Et on a utilisé le serflex, ces choses en plastique qu’on utilise pour les fils d’électricité, pour les assembler. On a utilisé la même chose. Et c’était la plus facile, la plus pratique solution. C’est pas super belle mais c’est la plus pratique. Ça marche super bien aussi. Et si on a quelque problème… et c’est léger aussi. Pas comme si c’était les boulons et on peut les démonter aussi si on a quelque problème. Parce que si on utilise la colle ou quelque c’est pas possible de le démonter. Mais avec ça c’est très pratique et très facile. Et maintenant le problème de construction cétait ici, on a beaucoup de comme ça devait être comme ça mais tombe toujours. On a plusieurs comme ça. On a des cartons qui sont cassés comme ici. Ici c’est quand la distance elle est devenue plus grande. Et on a pas prévu. Et aussi à la base on avait besoin de plus de carton car elle c’est le problème de matériau, le carton parce que sur la 3D on a pas pensé à l’épaisseur comme si on utilisait par exemple l’alucobon, il n’y a pas ces problèmes d’épaisseur qu’on a fait les pièces. Ce serait meilleur si on utilisait l’alucobon. Oui bien sûr. Ça serait plus droit, plus propre aussi je pense avec l’alucobon. Et, je pense que c’est tout.
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Description du projet Notre projet c’est une cavité de distorsion. Ça part de l’idée de faire un dispositif sonore qui a les mêmes propriétés, comme une grotte. Le son à l’intérieur se réfléchit sur les parois, ça donne un effet de caverne. Intentions En premier on a expérimenté, essayé avec des formes un peu aléatoires. On veut que ça c’est comme un prisme en fait. Et après à l’intérieur, ça peut être dans un premier moment on a pas pensé beaucoup à ça. Après quand on a vu que ça pouvait donner un espace plastique intérieur intéressant, on a commencé à étudier comment on peut faire cet intérieur à partir des coupes et qu’on travaille dans l’aspect de fonctionnalité. On a fait une coupe avec une assise des choses comme ça et c’est ça comme ça on a fait en 3d, un modèle 3d avec des différentes coupes à différents moments de la structure. Et on a fait comme ça l’espace intérieur qui était un peu travaillé l’idée de parcours. Oui dans l’aspect de parcours et aussi dans l’aspect fonctionnel avec des assises et des moments qui baisse un peu pour les sonorités un peu plus concentrées. Et après oui on a aussi travaillé la plasticité et par les extrêmes. On a fait une part qui était plus haut et une part qui était plus bas et comme ça différentes sensations quand on est à l’intérieur. Processus de conception On est parti de la 3d. En premier cas des coupes et après on a fait des 3D. Par ce que en premier moment on pensait de faire la 3D avec des coupes horizontales mais après on a pensé qu’il était mieux de faire des coupes verticales parc que comme ça on peut penser un peu plus à la fonctionnalité de l’espace. Parce que à l’horizontal c’’est plus difficile de penser une assise à l’horizontal que en vertical. Et comme ça nous sommes partis de la 3D et après, on ne peut pas faire tout la 3d par ce qu’il y avait beaucoup de . De matériau. Et on a pensé de faire la structure à partir des différentes plaques.
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Difficultés A la conception… les traits. Les traits qui ne collaient pas qui étaient superposés pour faire les fichiers illustrator. Donc ça il fallait refaire les fichiers. Aussi dans la conception, c’était vraiment difficile de faire la forme qu’on veut que ça prenne à la fin. Parce que dans la 3d pour modifier une forme qui se veut organique et quelque chose comme ça, c’est difficile de manipuler à quelques moments. C’est surtout ça qui a été un peu dur. Après à la réalisation il y avait beaucoup de choses qui fallait faire tous les tasseaux un par un. Après déjà on avait des plaques de 5mm au lieu qu’elles soient plus épaisses, du coup pour les assises c’était un peu raté ! Parce que c’était trop fragile. Après c’était grand quand même donc il fallait avoir beaucoup de monde pour pouvoir le monter Différences Ben conçu, y’a des espaces entre chaque plaques qui est de 10 cm à peu près. Alors que dans la maquette par exemple, l’espace était pareil que l’épaisseur de la plaque. Du coup ça rendait pas pareil. Après, sur la 3D tout était plein, y’avait ça aussi qui était pas pareil. Oui, je pense que… un moment on a … (on n’était pas sur le thème non plus.) C’est pas mal. On a réussi à faire un truc qui ressemble beaucoup aux choses qu’on veut. Effet projet réalisé Ahhh ! Soulagement! Enfin fini ! Remarque des camarades Euh, c’était vraiment bien. Y’en a qui ont préféré le nôtre qu’aux autres ! Je pense que les choses c’est que tout le monde pensait que ce n’est pas possible de le faire, finalement on l’a fait donc c’était vraiment bien ! C’était un soulagement. Par rapport au son y’en a qui trouvaient que ça faisait rien. Mais moi personnellement je trouve que ça change. Oui moi aussi. On sent vraiment un effet. Le problème c’est que comme c’est un espace qui n’est pas complètement fermé, comme une grotte, le son, la propriété sonore c’est pas assez contrôlé, il y a beaucoup de zones où le son peu aller.
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Interview phase 2 : Ben on a joué sur les hauteurs, donc là on se baisse. Là on arrive à une hauteur assez convenable pour ceux qui sont « grand ». Là c’est où on devait s’assoir. Là, ici c’est où sont prévues les assises, là là et là. Ahhhh !!! Oui quand on rentre ça semble un peu comment dire, distordu la porte. Oui là il y a une porte. Pour accéder à la porte de derrière parce qu’il y a un local. Comme ça on regarde le son. Il est pas très fort ! On entend surtout les boums ! Il faut rester là pour euh, pour activer le son.
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Description du projet Alors le projet. Donc le sujet de base c’était de créer une chambre anécoïque. Qui au fur à mesure de la conception a évolué en isola sonore. C’était le sujet Intentions Donc le travail qui nous a été demandé c’était de faire évoluer les formes plastiques euh du modèle de knaum du modèle de knaum. Parce que donc euh, knaum sont de fabriquants de plaques de plâtre qui ont des motifs de percement pour les isolas acoustiques qui sont très standard. On nous a demandé de travailler sur une forme plastique et de faire de choisir de nouveaux motifs. On a fait ça à travers à partir d’images, donc on a choisi des images pour l’intérieur comme pour l’extérieur et on a repris tout ça en percements. Processus de conception Donc on a commencé par la recherche de motifs pour ces plaques et, donc une fois qu’on a eu choisit ce motif on a créé une structure qui vient s’adapter à nos motifs pour créer une boite isola acoustique. Difficultés La principale difficulté c’était les limites du matériau, parce que le matériau est très fragile donc euh on devait faire 20% de percements sur ces plaques et on s’apercevait qu’une fois percés elles gagnaient en fragilité et qu’elles étaient cassantes. Elles cassaient très vite en fait. ‘était la principale difficulté. Et puis aussi percer à la main, on a pas pu percer à la machine. Les problèmes durant la conception. Je pense que y’en a pas beaucoup. Non, oui y’a pas eu de problèmes durant la conception. On s’est plus amusé que !!! (rire) Différences Y’a pas eu une grande différence. Non je crois qu’entre la conception et la réalisation, à part quelques détails techniques c’était parfait !
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Remarques des camarades C’était super ! Le fauteuil est confortable ! Non y’avait quelques personnes qui ne comprenaient pas le principe du projet. Parce qu’on a surement trop d’ouvertures par rapport à la fonction principale du projet. Mais sinon les gens étaient satisfaits ! Interview phase 2 : Pour les qualités du projet je pense qu’on a plutôt bien relevé le défi. Enfin bon, on est pas à dix décibels mais on est à cinq décibel c’est déjà pas mal. Après on a durant toute cette semaine on voyait souvent des gens rentrer, sortir. Ils se trouvent vraiment isolé à l’intérieur que ce soit pour passer un coup de fil ou vraiment s’assoir réviser ou lire un livre. Et je trouve aussi que c’est intéressant d’avoir une pièce comme ça à l’école parce qu’on a pas vraiment d’endroit où on peut vraiment se sentir tout seul et au calme. Après pour les qualités plastiques je trouve que ça rend bien, et que les gens sont plutôt satisfais en regardant ça, en disant que c’est original, que c’est pas ce qu’on voit tous les jours. Je pense que c’est tout. Les qualités acoustiques et plastiques c’est ça ? Les qualités du projet il est beau. Ouai on a fait des super jolies photos. Ça marche plutôt bien peut-être que enfin bon c’est pas dommage mais on aurait pas pu de toute façon laisser l’intérieur des parois sans sans isolation et du coup pouvoir mettre de la lumière à l’intérieur. Mais le projet c’était plus isola sonore que objet lumineux donc on est plutôt satisfais. On a un jeu lumineux qui est quand même intéressant au niveau zénithal. Après c’est dommage que notre porte elle soit aussi large. On aurait pu je sais pas se restreindre d’un soixante-dix, un quatrevingt. Je crois que c’est tout.
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Description du projet Le projet, c’est dans le commence, pour penser dans le couloir sonore. Donc c’est un couloir mais la forme c’est pas un vrai couloir. C’est beaucoup de formes que tu mets ensemble donc tu commences à avoir une forme que c’est pas fonctionnel. Et un truc, c’est fait parce que ça c’est nécessaire, il y a beaucoup de formes pour remettre les sons et il y a la différenciation sonore. C’est ça la discussion du projet. Et c’est que… dans le commence pour nous, c’est plus facile de le penser dans une structure organique mais pour le son c’est pas bon. Donc tu commences à penser une autre chose. Donc pour faire le couloir comme beaucoup de formes et après ça, ç’est la forme originale, finale. Intentions Les intentions plastiques c’est que l’objet, pour nous, et pour le prof aussi, c’est que l’objet c’est nécessaire, c’est beau. Très beau. Donc il y a le truc plastique dans le « dente », que c’est l’ntérieur, c’est plus facile d’avoir. Donc quand tu entre dans l’objet, tout le truc plastique c’est que c’est tout fermé et tu n’ouvres pas quelque part et c’est ça. La lumière non (pas réfléchie) seulement le son mais dans le commence ça marche très bien. Mais après parce que, pour nous, c’est trop difficile, parce que toutes les les petites les chaque pièces que nous déjà coupé. C’est coupé à la main. Donc quand tu commences à assembler les choses pour former les arches, il y a des petits espaces dans chaque pièce. Donc ça c’est le problème comme il y a les petits espaces, le son se perd. Donc c’est pas trop, trop bien. Mais pour le commence, et sur l’ordinateur, c’est parfais, ça marche bien mais après c’est pas bon. Processus de conception Le commence pour faire le projet, c’est l’oreille de Kircher, que c’est une oreille qui commence plus petite et le final c’est grand. Elle fait comme ça. Et c’est une oreille, qu’un garçon a commencé à travailler sur ça. Parce que c’est la diffusion sonore. Donc pour nous ça c’est le principe : la diffusion sonore. Donc le commence du couloir c’est différent du son du final du couloir, et chaque pièce est différente du son. Donc pour nous c’est ça que nous commence à penser dans l’oreille de Kircher. Et après commencer à réfléchir,
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qu’est-ce que c’est que nous pouvons faire avec ce même type de différenciation sonore. Difficultés Pour nous c’est difficile parce que pour avoir cette forme organique, cette forme que c’est comme ça, comme ??? Le truc c’est que c’est difficile la structure. Parce que pour nous c’est nécessaire seulement deux, trois points dans le sol. Donc avec deux ou trois points dans le sol c’est trop difficile parce que l’objet est trop lourd et c’est trop grand. Donc ça c’est difficile pour nous mais nous déjà faire la structure avec un ingénieur. Et l’ingénieur dit qu’il marche bien, que c’est super et que nous pouvons faire la construction après. Mais dans le commence ça marche bien. Mais dans le final, quand tu commences à assembler toutes les arches, c’est pas trop bien, parce que avec trois petites pièces dans le sol, c’est pas bon pour la structure. C’est pas parce que c’est trop lourd. Différences Oui bien sûr. La forme c’est la même, c’est la vrai forme. Mais c’est ça que je t’ai dit. Il y a seulement trois points dans le sol. Donc c’est nécessaire mettre sable proches des pièces parce que sinon la structure ne marche pas. Donc c’est ça qu’il y a déjà trois qui assemblent la structure. Il y a autre chose, c’est que, j’ai déjà dit aussi, c’est pour chaque pièce déjà coupé dans la main. Donc il y a des espaces et c’est pas trop bien ça, mais ça marche comme ça. Il y a autre chose c’est que le première projet que nous déjà pensé c’est pour faire que l’intérieur, la même chose que l’extérieur. Avec chaque pièce de bois. Mais comme c’est pour la construction c’est seulement une semaine. C’est trop difficile pour couper toutes dans le « dente » et toutes pour l’extérieur. Donc c’est seulement dans l’intérieur que c’est couvert. Remarques Non pas de remarque. Projet réalisé Ah, c’était super pour moi. Parce que dans le commence c’est très difficile pour penser comment faire la construction et comment
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va marcher. Mais quand tu commences à faire c’est ah oh super, c’est parfait, tout va bien !! Mais quand on commence à assembler c’est horrible, que ça ne marche pas, c’est horrible ! Mais après tu commences à penser solution pour assembler Interview phase 2 Le truc que c’est bien, je pense, c’est la structure qui marche très bien : qu’il y a deux pièces de bois et dedans il y a un tasseau pour assembler les deux pièces et ça marche très bien. Parce que ça c’est déjà coupé à la machine, donc c’est parfais le truc. Et aussi ici, cette pièce chaque pièce est déjà coupée dans la main, mais c’est exactement parfait sur l’arche. C’est très très bien ici, donc ça c’est parfait. L’autre chose c’est que la forme, que c’est pas organique, elle touche seulement deux points, trois points au sol. Ça pour moi c’est le plus choses qui sont parfait. Et la forme, quand tu es dedans, tu es obligé, c’est comme ça c’est pas donc c’est pas une chose comme ça. Je pense c’est ça.
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Description du projet Mon projet il est parti de l’hexagone, qui sont devenus après des octogones. Après il fallait faire un travail sur le motif pour que, dès que ça coulisse, il puisse se dessiner un autre motif à l’intérieur. Par superposition ou par juste coulissement. Intentions Plastique, c’est le motif que ça va dessiner au fur et à mesure qu’il bouge selon un axe horizontal. Et structurel, c’est qu’il puisse tenir dans le cadre déjà existant de l’école, qui a ses propres mesures. Et la structure, qui est un cadre à la fin doit pouvoir s’intégrer à l’intérieur. D’ambiance c’était les effets d’ombres, parce qu’il a pas pu être vraiment acoustique vu qu’il est ouvert à la fin. Et que c’était que l’entrée, une sorte de porte mais c’était pas un sas. Au début ça devait être un sas, mais pour des questions financières je crois, nombre de plaques, et vu que j’étais seule aussi dans le projet, on pouvait pas en faire autant. Donc on a juste essayé de faire une porte. Les questions plastiques, ça concerne les jeux d’ombre et de lumière. Processus de conception Le processus de conception il est parti du dessin d’n petit module, sur autocad. Et qu’on a dû insérer et adapter aux mesures du cadre déjà existant. Ça a évolué parce que au début on devait respecter un certain pourcentage de vides et de pleins, donc on a fait plusieurs essais et plusieurs tests. Mais en petites maquettes avec la machine laser en bas. Et à l’échelle un on a vu aussi que ça différait de ce qu’on a pu voir en tout petit, au deux-centième ou au centième. Difficultés A la conception, les difficultés c’était de trouver le bon dosage entre le plein et le vide qui puisse avoir par exemple quand on faisait l’octogone, il y avait un autre carré qui se dessinait. Et pour dessiner l’octogone il fallait laisser des membres, des petites membranes. Si elles étaient trop grosses elles cachaient l’autre forme derrière. Il fallait qu’elles soient assez minces pour pouvoir
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montrer la forme et pas assez grosses et assez grosses aussi pour pouvoir faire en sorte que la plaque tienne. Parce qu’au final c’est une plaque perforée. A la réalisation, c’était déjà le fait d’être seule, parce qu’à dessiner c’était pas compliqué mais à monter c’était que deux mains. Donc il fallait attendre que quelque uns se libère pour aider et pour peindre surtout. Différences Peut-être la différence d’échelle a un peu joué. Parce que, c’est ce que je disais tout à l’heure, en petite maquette ça rendait, ça pouvait rendre bien alors qu’en vrai c’était pas vraiment ça. Donc avant de couper à la machine, à la CNC aux ateliers, aux grands ateliers, on a d’abord refait une autre maquette à l’échelle un mais en carton. Et là on sest rendu compte que ça marchait pas tellement et on a repris l’ancienne option. Projet réalisé Ben d’abord ça fait plaisir de voir que ça tient, même si il y a eu beaucoup de rafistolages, en quelque sorte. C’est juste ça. Et de voir que ça peut intéresser, attirer les gens. Qu’ils puissent euxmêmes jouer, coulisser, voir comment ça marche. Remarque Ils mont dit qu’ils aimaient bien, que ça leur rappelait les moucharabiés. Certaines marocaines m’ont dit que ça leur rappelait ce qu’elles voyaient chez elles au Maroc. Et, de la part des gens qui travaillent aussi à l’école il m’ont dit qu’ils aimaient bien. Je sais pas comment il s’appelle, il m’a dit que quand il faisait la visite pour les futurs archis qui voulaient venir, les lycéens et tout ça, quils avaient bien aimés, qu’ls se demandaient comment c’était fait et, si c’était directement comme ça. C’est lui qui a dû leur expliquer, que c’était des plaques qu’on a du amener aux grands ateliers, découper et tout ça.
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Description du projet C’est un projet fait pour la semaine du son. A ce regard, il a fallu faire un projet qui est lié sur un sens avec le son. Donc c’était pas forcément un objet qui produit des sons ou qui affecte physiquement les sons. Mais je pensais de concevoir ce projet sur un regard plus plastique. Donc j’ai trouvé des ondes sonores, qui ont créé une surface. Donc en fait ça c’est la maquette. Donc on voit que en haut il y a une onde sonore et en bas on a une autre onde. Donc ça c’est la surface crée entre les deux ondes. Donc ça c’est un son qui est glaçant ( ???) Intentions C’était un mur. Bon, l’effet est plus visuel, plus plastique que physique, il est pas auditif. Mais il est présent dans le son quand même. Au niveau de la création, c’était fait sur un logiciel. Au niveau structurel c’était fait en hexagones, donc en boites hexagonales qui suivent les deux surfaces, la surface extérieure et la surface intérieur. Ça peut être un nid d’abeille si vous voulez. Mais l’autre aspect c’était que c’était une surface qui était focalisée sur un point. Donc si on regarde là, toutes les boites suivent ce point. Donc chaque boite est focalisée. Au niveau de la construction, finalement, j’ai choisi d’avoir 135 éléments qui sont tous différents Processus de conception Le logiciel, c’est un logiciel qui s’appelle grasshoper, et c’est un plug-in pour rhino, qui est un modeleur 3D. Donc ce qui est intéressant sur ce programme, c’est que tu peux changer différents paramètres qui eux te changent l’objet. Donc je dis que je veux avoir 135 éléments. Mais en fait sur cette maquette ils ne sont que soixante-dix, donc ça c’est un paramètre que je peux changer sans effort. Difficultés La difficulté est que j’ai pas connu très bien le logiciel, donc ça m’a pris un peu de temps d’avoir un « naturalisme » en fabriquant l’objet. La première la deuxième problème c’est que de créer
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un objet qui peut être bâti. Parce qu’en fait sur 3D tu peux créer n’importe quoi, mais c’est très important d’être possible aussi. Donc pour ces raisons j’ai choisi de faire la boite. Donc en fait chaque boite elle est un élément isolé. Quand tu roules, quand tu plies la boite, ça donne la même surface avec la boite qui est voisin. Donc en fait c’est un gros puzzle, et c’est un seul moyen que tu peux monter ça. Il y avait des autres possibilités de boites, mais j’ai trouvé ça le plus simple au final c’était pas trop ça malheureusement. A la réalisation, c’était fait en carton. L’échelle de l’objet, ça c’est un vingtième. Mais à l’échelle un c’était un objet de cinq mètres de longueur par deux et demi. Un autre problème c’était de faire les boites qui rentraient sur les plaques de carton. Parce qu’on a eu des plaques avec euh... un mètre cinquante-cinq par quatre-vingt centimètres. Donc chaque élément, il a fallu qu’il rentre dans cette plaque. Donc le carton mais au final c’était pas nécessairement un bon choix. Bon, c’était un peu compliqué parce que le carton il est très résistant. Mais quand tu le plie, quand tu fais un pli sur le carton, c’est très flexible. Donc au final ça a pas fonctionné comme ici, parce qu’il a commencé à se plier un peu, parce qu’il a eu besoin de contrevents, que moi j’ai pas eu j’ai pas mis Différences Oui certaines différences à cause de la gravité. Mais en fait ce que tu vois sur l’écran, c’est la même que sur la maquette, qui est coupée au laser, et c’est la même que à l’échelle un, sauf que il a pas tenu sa forme. Donc c’est une différence. Remarques Je me rappelle pas parce que j’ai pas eu le temps. Je travaille tout seul et donc c’était . J’ai pas eu le temps pour communiquer. Interview phase 2 Grace à la lumière, qui est mis sur le point focal de l’objet, on peut voir que les ombres sont plus ou moins égales. Donc l’idée c’était qu’in peut représenter les point focal comme ça avec la lumière. Donc ça c’est un autre objet qui est pas mis sur le point focal. Donc l’ombre elle est plus je sais pas comment expliquer . Dynamique. Au final, il a fallu suspendre cet objet parce que il a
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pas tenu sa forme. Donc on a ici les trois morceaux de l’objet. Ici c’est le premier morceau qui est un fiasco total à cause des boites. Donc elle a pas soutenu. La deuxième ça tient un peu avec l’aide de quelques facettes qu’on a mis dans les boites. Ça fonctionne mais seulement parce qu’elle est à plus petite échelle. Le troisième morceau on a décidé de le suspendre pour voir comment la surface se déroule. Donc ici ça commence un peu à ressemble à la maquette.
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Description du projet Alors le projet, c’est une pièce avec des oreilles qui ressortent, ça donne un truc assez fou finalement, assez surprenant on va dire. En fait quand on est à l’intérieur on se rend pas compte qu’à l’extérieur c’est aussi développé. Non en fait on voit rien. C’est marrant. Intentions Les intentions d’ambiances faut pas qu’on oublie de dire que le but principal de cette boite c’est de pouvoir écouter le son extérieur, le son ambiant c’est une pièce d’écoute. Voilà oui c’est une pièce d’écoute. D’où les oreilles pour écouter. Qui devait servir à amplifier les sons en fait. Qui sert à amplifier les sons d’ailleurs. Qui sert d’ailleurs oui, oui tout à fait quand on colle son oreille à l’oreille ça marche très bien. Processus On s’est inspiré pas mal on a fait des recherches déjà de références. Oui avec les oreilles de Kircher. Oui voilà, on s’est inspiré pas mal des oreilles de Kircher, des trompes d’eustache. Et puis à partir de là, on a vu un projet c’était sur le site internet de cresson. C’était un pavillon pavillon d’écoute. Y’avais qu’une oreille qui entrait et qui ressortait aussi, enfin voilà, qui était à l’intérieur et à l’extérieur. Et nous on s’est dit, on va en mettre juste à l’extérieur mais par contre on va en mettre plein. Au départ on avait prévu d’en mettre cinq ou six des oreilles. Puis y’en a trois c’est déjà pas mal. Difficultés Les fûtes en 3D. À la conception. Oui à la conception c’était en 3D. On a d’abord dessiné le profil des fûtes à la main qu’on a scanné, repassé en 2D tout ça. Mais après faut les monter en 3D sur rhino. Faire les développés de surface aussi. Savoir quel matériau on allait utiliser à l’intérieur aussi, parce que une fois qu’on a eu imaginé la structure en contre-plaqué de cinq millimètre avec les anneaux comme ça puis les bras qui viennent les relier. On s’est demandé de quelle surface on avait besoin à l’intérieur. On a bien galéré.
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Pour recouvrir parce qu’on ne pouvait pas laisser juste la structure c’est pas du tout … et puis il fallait qu’on calcule les surfaces mais on a pas pu. A la réalisation c’est pour que ça tienne. Le plus dur c’est de faire tenir les deux oreilles sur les côtés là. C’est pour ça qu’on a mis des ficelles. Celle du dessus elle tient toute seule, mais sur les côtés c’était un peu plus compliqué. parce que c’est lourd en fait. Différence Non. D’ailleurs on a pas pris la maquette ? Parce que la maquette elle ressemble assez à il y a juste plus d’oreilles en maquettes. Sinon non. Enfin, nous depuis le début nous on prend ça vraiment comme une expérience, c’est un projet complètement expérimental donc on est quand même assez contente que, quand on colle l’oreille à l’oreille ça amplifie quand même les sons. En fait, ça fait un peu comme enfin ça fait un bruit un peu plus sourd, ça exacerbe certains sons et ça en masque d’autres. Projet réalisé Ça fait plaisir. On est heureuses !! Non mais c’est cool, c’est sympa. Non c’est vrai qu’on pensait pas y arriver quand même pour monter trois oreilles comme ça Remarques Ben que c’était assez surprenant. Après y’en a qui se sont moqué de nous, Oui c’est vrai. Ceux des autres masters, je ne citerai personne (rire) !! Eux aussi ils vont souvent aux grands ateliers. Non c’était surprenant, mais après, je sais pas ça intrigue tout le monde finalement, ça les fait rire. Ils trouvent ça bizarre mais en même temps ils trouvent ça sympa, ils trouvent ça marrant. C’est assez atypique. Oui.
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