Baguet Marie
Traversées du Campus Comment l’Architecture façonne l’Espace Public?
Lundi 18 et Mardi 19 Juin 2012 Ecole Nationale Supérieure d’Architecture de Grenoble Master Architecture et Cultures Sensibles de l’Environnement
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Jury : Christian Drevet, architecte, enseignant ENSA de Saint Etienne Jacques Schmitt, Direction du Développement et de l’Aménagement Université de Grenoble Nicolas Dubus, architecte, enseignant ENSA de Grenoble Eric Seguin, architecte, enseignant ENSA de Grenoble Catherine Pierre (sous réserve), rédactrice en chef adjointe de la revue AMC Grégoire Chelkoff, architecte, enseignant ENSA de Grenoble (directeur d’études) Jacques Scrittori, architecte d’intérieur, enseignant associé ENSA de Grenoble (représentant de l’UE) Encadrement du master ACSE : Grégoire Chelkoff, responsable du Master ACSE, architecte, professeur Yann Blanchi, architecte, maître-assistante associée Jacques Scrittori, architecte d’intérieur, maîtreassistant associé Magali Paris, ingénieure paysage, maître-assistante associée Avec les participations de : Nicolas Tixier, architecte, maître-assistant Walter Simone, architecte, vacataire
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Première de couverture : Maquette d’étude / Stratégie à l’échelle du campus dans son ensemble
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Remerciements
Je souhaite remercier sincèrement l’ensemble de l’équipe pédagogique du Master ACSE pour leurs enseignements, et tout particulièrement Magali Paris, Grégoire Chelkoff, Yann Blanchi et Jacques Scrittori. Je voudrais également remercier Charline, Sarah, Ellyn, Laura, Simon, Arnaud, Matthieu, Sylvain, Jeremy et les autres pour leur aide et leur bonne humeur. Enfin, un grand merci à mes amis et à ma famille pour leur soutien inconditionnel.
Sauf notifications contraires, toutes les photographies et illustrations présentes dans ce mémoire sont de l’auteur. 5
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Traversées du Campus Comment l’Architecture façonne l’Espace Public? 1/ Introduction......................9 2/ Parcourir l’espace public aujourd’hui.........................10 Les critères de l’Espace Public Espace public et Architecture Partage de l’espace public et Mobilité 3/ L’espace public sur le Campus de Saint-Martin d’Hères................24 L’espace public dans la conception du Plan Campus pour 2025 Pratiques de l’espace public sur le campus L’Espace Public vu à la manière de Nolli 4/ Stratégies territoriales et architecturales ..........................40 Irriguer le campus Révéler les Traversées existantes La Maison de l’Université comme nouvel Espace Public 5/ Un Campus en devenir.............80 6/ Annexes..........................84 Bibliographie Catalogue photographique existantes remarquables
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de
traversées
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1/ Introduction L’espace public est le lieu du vivre ensemble, il contribue à l’identité d’une ville: Central Park pour New York, les Champs Elysées pour Paris, la Place Bellecours pour Lyon... A chaque époque, en chaque point du monde, l’aménagement de l’espace public urbain reflète les valeurs de la société. Bâti en 1960 sur le modèle des campus américains, le campus de Saint-Martin d’Hères s’étend au Nord-Est de la ville de Grenoble. Ce vaste parc universitaire est aujourd’hui traversé, d’un point A à un point B, sans prendre le temps de se poser, de profiter des qualités du site. Ce territoire se déploie aujourd’hui sur environ 180 hectares, dont plus de 110 hectares d’espace libre. Mais peut-on pour autant qualifier ces espaces libres comme des espaces publics à part entière ? Dans une première partie, nous définirons les critères qui caractérisent l’espace public. Nous verrons également les différentes façons de parcourir l’espace public ainsi que les différentes articulations entre l’Architecture et l’espace public, et les intériorités qui en découlent. Dans une deuxième partie, nous nous intéresserons plus particulièrement à l’espace public du campus de Grenoble, comment celui-ci est vécu et comment l’architecture existante participe à cet espace. Enfin, dans une troisième et dernière partie, nous nous attacherons à développer, à partir de l’analyse réalisée et des enjeux que soulève la notion d’espace public, une logique de projet aussi bien à l’échelle du territoire qu’à l’échelle de l’édifice et des usages, afin de requalifier l’espace public du campus et ainsi réaffirmer son identité. Ce sera également l’occasion de voir comment les principes développés peuvent générer de nouvelles traversées et de nouveaux lieux, à l’image de la Maison de l’Université projetée par le Plan Campus pour 2025. 9
1/ Parcourir l’espace public aujourd’hui Les critères blic?
de
l’espace
pu-
L’espace public est un terme polysémique selon qu’on le regarde du point de vue social, culturel, politique, esthétique, architectural ou urbanistique. C’est un espace à la fois métaphorique et matériel, vécu et rêvé. Définir l’ensemble des caractéristiques de l’espace public nécessiterai une approche plus précise et plus longue qu’un projet de fin d’études ne le permet. Nous nous attacherons donc à définir les critères qui définissent l’espace public L’espace public est accessible « La première caractéristique de l’espace public est l’accessibilité. »
TERRIN, Jean-Jacques. Le piéton dans la ville : L’espace public partagé. Marseille : Parenthèses, 2011.
L’accessibilité, ou le fait de pouvoir circuler librement, est une des qualités majeures de l’espace public. C’est l’un des critères qui le distingue de l’espace privé, où l’accessibilité est restreinte. L’espace public est gratuit La gratuité est une composante essentielle de l’espace public. L’espace, dès qu’il devient payant, perd sa qualité publique. Ainsi, de nombreux équipements culturels comme certains musées, par exemple, imposent le payement d’un droit d’entrée pour accéder à l’intérieur. Ils ne sont donc plus publics en tant que tels. L’espace public appartient à tous « L’espace partagé. Considéré dans sa seule acception de lieu de l’échange citoyen, l’espace public est l’objet d’un ultime paradoxe, celui de l’hospitalité : car sa vocation est bien d’offrir sans contraindre, d’accueillir sans diriger, de donner la possibilité de la rencontre sans la forcer, de toujours ménager une place sans jamais placer, d’assurer le 10
TEXIER, Simon. Voies publiques : Histoires et pratiques de l’espace public à Paris. Paris : Editions du Pavillon de l’Arsenal, 2006.
Accessibilité et Porosité selon Bernardo Secchi et Paola Vigano
«L’accessibilité mesure la possibilité effective de passer d’un point à un autre. Un lieu peut être accessible en vélo ou à pied, mais inaccessible en tram ou en métro parce qu’aucun tram ni métro n’y arrive (ou parce qu’une fracture du tissu urbain s’y oppose). Porosité, connectivité et perméabilité sont des conditions nécessaires, mais non suffisantes de l’accessibilité. La porosité est la fraction d’espace dans laquelle les déplacements peuvent avoir lieu. C’est donc le rapport entre la surface non-bâtie, par exemple la surface des routes, des places, des espaces verts (selon la modalité considérée) et la surface totale. La porosité est donc toujours comprise entre 0 et 1. Evidemment, une grande porosité implique que l’espace à disposition pour se déplacer est grand. Mais cela n’implique pas que les déplacements soient effectivement favorisés. (...) Une grande porosité ne correspond pas toujours à une bonne mobilité : par exemple, lorsque les pores (les espaces non-bâtis) ne sont pas connectés entre eux. Les barrières empêchent la connectivité et construisent des enclaves.
SECCHI, Bernardo, VIGANO, Paola. La ville poreuse : un projet pour le Grand Paris et la métropole de l’après-Kyoto. Métis Presse, 2011.
La perméabilité mesure non seulement le niveau de porosité d’un tissu urbain, mais aussi son degré de connectivité (c’est-à-dire la possibilité de mouvement dans les différentes directions). (…) Porosité et connectivité sont des caractéristiques qui concernent la géométrie du tissu ; la perméabilité concerne aussi les sujets qui se déplacent : là ou passe une fourmi il n’est pas dit qu’un camion puisse aussi passer. Pour chaque type de mobilité, la connectivité se joue selon des règles différentes, étant donné que les tissus peuvent être perméables pour les piétons ou les vélos et non pour les trams et vice-versa.» 11
proche et le lointain, d’être le lieu de la main tendue comme du « don d’inattention ». L’espace public appartient à tout le monde, dans le sens où il est accessible à tous. Ce n’est ni un espace privé, ni commun à un groupe de personnes définies. Il est partagé par tous ceux qui y habitent et qui le parcourent. C’est un espace avec une forte identité, qui favorise le sentiment d’appartenance à une rue, un quartier, une ville. L’espace public est un lieu d’appropriation, de concentration et de représentation d’imaginaires. L’espace public est ouvert L’espace public favorise les rencontres, incitant à la tolérance. Il est le lieu de l’urbanité, du Vivre Ensemble, principal support de l’identité d’une ville. Il est le reflet de sa complexité, à la fois technique, sociale et culturelle. La diversité de la vie urbaine constitue l’un des fondements d’une ville socialement harmonieuse. C’est à la fois un espace quotidien et un espace rêvé.
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Partage de l’espace public et Mobilité ROGERS, Richard. Des villes durables pour une petite planète. Paris : Editions du Moniteur, 2000.
Sectorisation et Enclaves « Nous avions créé les villes pour célébrer ce que nous avions en commun. Aujourd’hui elles sont conçues pour nous séparer les uns des autres. » L’espace public est par définition un lieu de partage et non celui qui sépare ou qui cloisonne. Cependant, lorsque l’on observe l’aménagement de l’espace public aujourd’hui, chaque usager a sa voie propre. Les piétons sont séparés des cyclistes, qui eux-mêmes sont mis à distance des voitures et des transports en commun, essentiellement pour des raisons de sécurité. Ces séparations, démultipliées autant que la largeur de l’espace disponible le permet, sont le support d’un trop plein de panneaux routiers, de poteaux, de bornes qui pollue visuellement l’espace public. Car jusqu’à très récemment, la séparation de chaque fonction était à la base de tout projet d’aménagement de l’espace public.
TERRIN, Jean-Jacques. Le piéton dans la ville : L’espace public partagé. Marseille : Parenthèses, 2011.
Partage de l’espace public « Le principe de l’aménagement de l’espace partagé réside dans une minimalisation des caractéristiques de la rue : le désencombrement et l’élimination des limites formalisées libèrent la circulation. » Le partage de l’espace public amène les usagers à être conscients les uns des autres et du contexte qui les entoure. C’est ce partage qui permet de développer le sentiment d’appartenance à un lieu spécifique.
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La marche à pieds, maillon essentiel de ce nouveau partage de l’espace public La ville est un espace de vie mais aussi un lieu de passage qui semble prôner la mobilité des individus et des flux. Certains s’arrêtent un instant, tandis que d’autres investissent plus longuement un banc, un parc ou un couloir de métro. D’autres encore ne font que défiler sans prêter attention à leur environnement immédiat. Vient alors la notion de flânerie, autrement dit le fait de se promener sans but précis, d’errer dans les rues à la recherche de lieux inconnus. Walter Benjamin décrit le flâneur comme « le prêtre du genius loci », « qui vit, éprouve, découvre et invente autant entre les murs des maisons que l’individu à l’abri entre ses quatre murs ». Parce que le piéton trame le territoire de l’espace public par la multiplicité de ses parcours quotidiens, on assiste en Europe à une meilleure prise en compte de la marche dans la conception des espaces publics. Cependant, les modes de déplacement motorisés consomment une fraction importante de l’espace public, un espace qui devrait légitimement être mieux réparti. La marche à pieds apparaît alors comme le plus simple des modes de déplacement. C’est aussi celui qui interagit le mieux avec les autres usagers et avec les diverses activités qu’offre l’espace public : loisirs, culture, consommation, détente. La présence du piéton conditionne le développement de la vie publique d’un lieu, lui donne du sens.
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Le piéton dans la ville
«La capacité de déplacement des individus restreint ou élargit l’horizon de leur possible. (…) Dans une société en mouvement, c’est la mobilité qui donne accès au logement, au travail, à l’éducation, à la culture, à la santé, aux loisirs, au pouvoir … Quant à l’immobilité, elle peut souvent s’avérer source d’exclusion. La marche, longtemps laissée pour compte, est porteuse d’ « identité situative », c’est dire qu’elle facilite la capacité d’orientation et d’action de l’individu qui la pratique sous quelque forme que ce soit. La marche décloisonne les espaces (privés/publics), les métiers (transversalités), les publics (vivre ensemble). Le choix d’ouvrir la réflexion sur les nouveaux usages de l’espace public et les nouvelles stratégies urbaines par le binôme « marche et espace public » révèle cette exigence de transversalité. Car c’est bien là l’enjeu : en rendant l’environnement urbain plus accueillant aux piétons, il s’agit en fait de produire de la ville là où il n’y en a pas vraiment ; et de faire émerger cette qualité première, intimement liée à l’urbanité, qu’est l’hospitalité. Sans le passant, le flâneur, le marcheur, qui prend le temps, qui réinvente quotidiennement son rapport à l’environnement et aux autres, point de vie urbaine, point de ville ; seulement des paysages urbains traversés, aperçus, divisés.»
TERRIN, Jean-Jacques. Le piéton dans la ville : L’espace public partagé. Marseille : Parenthèses, 2011.
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Espace public et Architecture L’espace public est parfois défini comme l’espace libre entre différents bâtis. Cependant, de nombreux espaces publics peuvent exister à l’intérieur même d’un édifice. Ces espaces, ambigus à la première approche, possèdent des qualités d’espaces et d’ambiances qui peuvent rivaliser avec certains espaces publics extérieurs. Ainsi, à travers les exemples de la galerie couverte à Milan, des passages parisiens, des Traboules à Lyon, de l’Ecole d’Architecture de Grenoble, de la Médiathèque de Sendaï et du hall d’accueil du Centre Georges Pompidou, nous pouvons voir que l’espace public «habite» en quelque sorte notre architecture. La faille lumineuse Construite de 1867 à 1878, la Galleria Vittorio Emmanuele II est une galerie commerçante historique au centre de Milan. Elle constitue un passage entre la Place du Dôme et la Scala. La galerie est constituée de deux galeries monumentales, couvertes par une verrière impressionnante, qui permet aux rues intérieures d’être à l’abri des intempéries tout en étant aussi lumineuses que si elles avaient été à l’extérieur. Malgré la présence de nombreuses boutiques, librairies, antiquaires, cafés, restaurants, boutiques de luxe, ce n’est pas un centre commercial mais bel et bien un espace public puisqu’elle est accessible gratuitement à quiconque souhaite la traverser. Les Passages parisiens, construits au 19ème siècle, générés par l’urbanisme haussmannien, sont pour la plupart de simples traversées lumineuses, mais qui permettent quelque soit le temps, grâce aux verrières, de s’y attarder. Le passage Choiseul, édifié entre 1825 et 1827 à proximité des Grands boulevards, est avec ses 190 mètres de longueur l’un des plus longs de la capitale.
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Galleria Vittorio Emanuele II, Milan, Italie Architecte: Giuseppe Mengoni Source: http://www.photographium.com/galleria-vittorioemanuele-ii-milan-italy-18601890 Consulté le 01/05/2012
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Passage Choiseul, Paris, France Architectes: François Mazois et Antoine Tavernier Photo: www.tout-paris.org/tourisme/passages-parisiens Consulté le 25/04/2012
La Galleria Vittorio Emmanuele II et les Passages parisiens sont deux exemples de failles lumineuses abritées qui se développent sur la longueur, générant un effet de perspective fort accentué par le rythme de l’architecture métallique des verrières. Le parcours discontinu Les Traboules de Lyon sont composés par un ensemble de passages publics traditionnels qui permettent de relier un immeuble à un autre, en traversant les cours et coursives attenantes aux habitations. La variété des caractéristiques architecturales des espaces que l’on rencontre au 18
Traboule, Lyon, France Photo: www.club.doctissimo.fr/ yeoman/france-biennale-2009165461/photo/vieux-lyon-traboule-5041547.html Consulté le 25/04/2012
cours de ces passages explique le fort attrait des Traboules. On en dénombre environ 500 dans la ville. Elles se situent majoritairement dans les quartier du Vieux Lyon, de la Croix-Rousse et de la Presqu’île. Malheureusement, de plus en plus de ces passages sont fermés et redeviennent privés. La multitude des coursives et patios font de ces espaces cachés un réseau discontinu de parcours à travers la ville. L’Ecole d’Architecture de Grenoble, construite par Roland Simounet entre 1975 et 1978, avant sa rénovation en 1996, était traversable depuis la passerelle à l’Ouest, en passant par ce qui est 19
Vue de la rue intérieure, Ecole d’Architecture de Grenoble, Roland Simounet. Source: SIMOUNET, Roland. D’une architecture juste: 19511996. Paris: Le Moniteur, 1997.
aujourd’hui la Cafétaria et la Documentation. Ce passage public couvert était l’ancienne entrée principale de l’Ecole d’Architecture de Grenoble. Cette traversée fut fermée afin de permettre la modernisation de l’Ecole. Transparence intérieur / extérieur La médiathèque de Sendai de l’architecte Toyo Ito au Japon, qui regroupe en un seul lieu une médiathèque, une galerie d’art, une bibliothèque et un centre d’informations pour les citoyens, fut pensée dès sa conception comme un espace «sans barrière». La peau de l’édifice, composée de grands panneaux de verre plaqués de bandes d’aluminium discontinues génère un effet miroir progressif passant de la transparence totale des niveaux inférieurs vers la semi-transparence des niveaux supérieurs. Le rez-de-chaussée devient ainsi par transparence l’extension de l’espace public extérieur. Le centre national d’art et de culture Georges Pompidou (CNAC) est lui aussi un établissement polyculturel. S’il faut payer l’entrée aux différentes salles d’exposition, le hall central est lui gratuit, et donc public. La transparence de la façade permet à cet espace d’être en continuité avec le parvis extérieur, la pente de celui-ci invitant à entrer à l’intérieur. 20
A travers ces deux exemples, on peut voir que la transparence joue un rôle essentiel dans la perception que l’on a de ces espaces intérieurs. Elle permet d’atténuer la limite entre deux espaces publics, l’un intérieur et l’autre extérieur.
Centre George Pompidou, Paris, France Architectes: Renzo Piano et Richard Rogers Photo: Thomas Grascoeur Consulté le 25/04/2012
Médiathèque, Sendaï, Japon Architecte: Toyo Ito Photo: www.architecturerevived.blogspot.fr/2010/02/sendai-mediatheque-aoba-ku-sendai-japan.html Consulté le 25/04/2012
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Sécurité et privatisation de l’espace public Lorsque l’on parle d’un espace public intérieur, la question de la sécurité des biens et des personnes se pose inévitablement. En effet, lorsqu’un espace est gratuitement accessible à tous, cela peut poser certains problèmes de sécurité vis à vis des équipements de cet espace (vol, dégradation de toute sorte, ...), et d’incivilité. Afin qu’un espace public intérieur soit le plus sûr possible, il ne s’agit pas de faire en sorte que l’architecture soit seulement un réceptacle spatial mais qu’elle invite le public, qu’elle l’accueille en offrant des «affordances» d’usage et en faisant en sorte que l’acte d’habiter passe d’une relation de spectateur à celle d’acteur. Un espace public intérieur suffisamment ouvert sur l’extérieur, lumineux, aéré, sera plus attractif, agréable, et donc présentera moins de risque d’insécurité qu’un espace refermé, sombre et mal aéré.
« Un espace public où règne la mixité, la variété, un espace public attrayant, où il fait bon se trouver, sera par là même potentiellement un espace sûr. Et inversement. » Les centres commerciaux en France sont des exemples remarquables de la tendance qui vise à privatiser l’espace public, ou plutôt, dans une certaine mesure, de rendre public des espaces privés. L’espace y est mis en scène. Les allées entre les commerces portent le nom de rues, on y trouve des restaurants, des salles de cinéma, du mobilier urbain, etc. La lumière naturelle y est, dans la plupart des cas, absente. Les haut-parleurs diffusent de la musique d’ambiance. Tout est contrôlé afin de créer une ambiance particulière, différente de celle que l’on peut trouver à l’extérieur du centre commercial. 22
WYVEKENS, Anne. La sécurité urbaine en questions: Comprendre pour agir aujourd’hui dans sa collectivité et sur son territoire. Editions: Le passager clantestin. Les pratiques n°12.
Forum des Halles à Paris Source: www.centrepompidou. fr/education/ressources/ENSla_place/ENS-la_place.html Consulté le 01/05/2012
La multiplication des restrictions d’accès et des systèmes de vidéo-surveillance renforce le caractère contrôlée de ces espaces, favorisant ainsi certains usages et laissant peu de place à l’imprévu. Les passants ne sont plus alors considérés que comme des consommateurs potentiels. Mais peut-on pour autant définir ces lieux comme des espaces publics à part entière ? L’enjeu économique assumé par les créateurs de ces centres commerciaux crée une ambiguïté difficile à saisir. La pauvreté du mobilier urbain, le repli vis à vis de l’extérieur et l’atmosphère contrôlée créent parfois un malaise. Ce ne sont ni des espaces privés, ni pour autant publics. En réalité, il ne s’agit que d’un ersatz d’espace public. Ces lieux sont fermés à un certain moment de la journée et leur accès peut être refusé à certaines personnes dont l’aspect ou le comportement aura été jugé dérangeant. En outre, l’espace public est aujourd’hui dans les politiques urbaines l’enjeu de mouvements contraires : ouverture aux mobilisations citoyennes d’un côté et fermeture par les privatisations et la sécurisation de l’autre. L’espace public du futur sera-t-il donc ségrégatif et commercial ou sera-t-il un lieu démocratique et ouvert ? 23
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2/ L’espace public sur le Campus de Saint-Martin d’Hères 25
L’espace public dans la conception du Plan Campus pour 2025 Le campus de Saint-Martin d’Hères est un site doté d’un patrimoine architectural et paysager qu’il faut aménager afin de répondre à l’évolution de la société et des besoins de l’Université. La requalification des accès et des équipements est indispensable pour améliorer l’accueil du public tout au long de l’année. En ce sens, le Plan Campus 2025 de Grenoble, qui fait partie d’un Programme National d’Aménagement des Universités afin d’améliorer la position de la France dans le classement de Shanghaï, parle de politique immobilière et d’attractivité par de nouveaux équipements et infrastructures mais questionne peu la place et rôle de l’espace public en tant que tels.
«L’objectif de l’Opération Campus est de fédérer, voire de créer, les grands campus universitaires français de demain. Nos universités sont soumises à la compétition mondiale de la connaissance : l’Opération Campus leur donne les moyens de construire leur visibilité internationale. L’intention est, d’abord, de définir leur projet scientifique et pédagogique stratégique qui considère la politique immobilière comme un élément majeur de l’attractivité des universités envers les étudiants, les enseignants et les chercheurs français et du monde entier. Mais c’est aussi une réponse immédiate aux besoins urgents de rénovation des locaux universitaires et des locaux d’accueil et de vie.» Le projet développé dans ce mémoire réinterroge le Plan Campus 2025 par rapport à la notion d’espace public, d’accessibilité, d’ouverture, de partage, et des potentialités d’aménagement qu’elle génère.
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Discours d’introduction de Valérie Pécresse, Ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, Présentation des 6 premiers projets retenus dans le cadre de l’Opération Campus, Paris, le 14 novembre 2008.
Image : schéma directeur d’aménagement durable © INterland Source: Press / Université de Grenoble
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Pratiques de l’espace public sur le campus Animation et Temporalités La vie sur le campus, et notamment la vie étudiante, même si elle est importante, varie selon différentes temporalités. Durant la journée, le campus fourmille d’étudiants. Le soir et durant les vacances, le campus se vide, les étudiants préférant l’effervescence du centre ville. Le weekend, ce sont les riverains et sportifs du dimanche qui remplacent les étudiants. Prédominance de l’automobile L’enjeu actuel des politiques urbaines est de limiter la dépendance automobile quotidienne et de favoriser des modes de circulation plus doux (à pied ou vélo). La voiture a sur le campus un impact fort, d’une part par la multitude des voies de circulation et par l’emprise au sol des parcs de stationnement. Ainsi la hiérarchisation des modes de déplacement au sein du campus s’avère nécessaire : piétons, cyclistes, transports publics et en dernier, voitures. La réduction de la vitesse automobile est également une condition de l’apaisement et de la cohabitation de ces différents modes de déplacement. La réduction du parc de stationnement permettrai également de laisser plus de place aux autres usagers de l’espace public. Perte de repère On ne se rend pas facilement compte de la taille du campus. L’absence de hiérarchie des espaces et du bâti crée une perte de repères. Il est aisé, pour quelqu’un qui ne connait pas les lieux, de s’y perdre. Malgré quelques édifices remarquables, la plupart des entrées ne sont pas évidentes, et parfois peu accueillantes, ce qui accentue la désorientation. Dans de nombreux cas, pour rentrer dans un édifice, il faut traverser au préalable le parking attenant, voire parfois le local à vélos ou à poubelles.
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Des enclaves qui limitent l’accessibilité A de nombreux endroits, les possibilités de parcours sont limitées par des barrières végétales et minérales, des grilles. Le piéton est alors obligé d’effectuer un détour, parfois important, afin de se rendre à l’endroit souhaité. L’accessibilité de certains sites du campus est donc limitée, et mériterait d’être améliorée.
Exemples de limites d’accessibilité sur le territoire du campus.
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L’Espace public vu à la manière de Nolli Dans notre approche du campus de Grenoble et son devenir nous avons donc pris le parti d’exprimer la manière donc l’espace public s’articule aux édifices, notamment en observant les continuités en rez de chaussée, ainsi que les porosité et perméabilité qui y ont été mises en place. Le campus vue à la manière de Nolli En 1748, l’architecte Giambattista Nolli établit un
Giambattista Rome, 1748.
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Nolli,
Plan
de
plan de Rome qui mit en évidence le domaine de la ville accessible librement à tous. Hormis les rues, passages, parcs et places reconnus publics en tant que tels, nous pouvons remarquer que le domaine public de la ville englobe également différents espaces intérieurs comme les lieux de culte, les marchés, etc. Cette façon d’identifier et de représenter le sol accessible nous a ainsi donné la nôtre et a guidé notre manière de projeter. Ainsi, la réalisation d’un plan d’une partie du campus à la manière de Nolli nous a permis de comprendre les relations entre les espaces intérieurs des édifices présents sur le campus et l’espace public. Méthode d’analyse Etant donné qu’il n’existe aucun plan représentant l’ensemble des rez-de-chaussée du domaine universitaire, un relevé in situ du rez-de-chaussée de chaque édifice s’est avéré nécessaire. La méthode la plus simple et la plus rapide, a consisté à photographier les plans de secours présents à l’entrée des différents bâtiments. Cependant, plusieurs édifices étant fermés, même en période universitaire, d’autres étant en travaux, il était impossible d’avoir accès à certains plans de secours. Parfois, une demande d’autorisation était obligatoire afin de pouvoir photographier l’intérieur des édifices, alors que ceux-ci sont reconnus comme étant publics et ouverts à tous. Ce qui démontre que même si un bâtiment est public, certains usages ne sont pas possibles.
Pages suivantes: Plan de l’Est du Campus à la manière de Nolli
En conséquence, la précision du plan du domaine public du campus est relative. Il permet cependant de se rendre compte de la surface occupée par l’espace public et révèle les espaces accessibles à l’intérieur du bâti.
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Traversées, ambiances et usages Ce plan établi à la manière de Nolli met en évidence les traversées possibles aujourd’hui. Cependant, il ne permet pas de qualifier les ambiances qu’elles génèrent. Un catalogue photographique et un relevé des usages pendant et aux abords de ces traversées complètent le plan de Nolli. Cette seconde partie de l’analyse (Cf. Annexe) montre que la richesse architecturale de ces traversées n’induit pas obligatoirement une grande diversité d’usages. De la même manière, ce relevé photographique a permis de remarquer différentes typologies de traversées induites par l’organisation du bâti: l’entre deux vertical, l’entre deux horizontal, le patio, la percée, la coursive intérieure et la coursive extérieure. On remarquera également que les parcours à travers les bâtiments peuvent être linéaires ou discontinus. Dans ce dernier cas, l’effet de perspective est masqué par l’organisation du bâti.
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L’ENTRE-DEUX VERTICAL L’entre deux vertical relie autant qu’il sépare différentes parties d’un même ensemble. Celui-ci peut être soit totalement ouvert soit protégé par une toiture opaque ou transparente.
L’ENTRE-DEUX HORIZONTAL L’entre deux horizontal est perceptible essentiellement au rez-de-chaussée des édifices construits sur pilotis. On se retrouve alors entre le sol et la masse construite au dessus, provoquant parfois une sensation de pesanteur.
LE PATIO L’intérêt du patio, en plus de favoriser la pénétration de la lumière à l’intérieur, permet, au cours de la traversée du bâti, d’être successivement à l’intérieur et à l’extérieur.
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LA PERCÉE La percée génère un vide, une porosité du bâti qui permet de passer d’un côté à un autre sans avoir besoin de contourner l’édifice. Cependant certaines sont étroites et donc désagréables à trraverser.
LA COURSIVE INTÉRIEURE INT ÉRIEURE Une coursive à l’intérieur qui s’ouvre d’un côté sur l’extérieur donne l’impression de marcher à l’extérieur tout en étant à l’abri.
LA COURSIVE EXTÉRIEURE EXT ÉRIEURE Certains édifices forment un ensemble par la présence de coursives extérieures qui les relient entre eux.
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Ces passages sont essentiellement traversés car ils constituent, pour certains, le chemin le plus court pour aller d’un point A à un point B. Cependant, peu abritent des espaces accueillants. On y trouve le plus souvent des espaces techniques (chaufferie, poubelles, garage à vélos) ou de distribution... Néanmoins, certaines, à l’image de la «Galerie des amphis», sont conçues et utilisées comme des parcours abrités autant que des lieux de détente entre deux cours... Ces exemples mettent en avant le caractère social de ces traversées sur la vie du campus. En outre, cette analyse montre qu’il existe parfois une véritable limite entre l’espace extérieur et l’espace intérieur. Cependant, les possibilités de traversées (et donc de relation entre intérieur et extérieur) existent… et peuvent devenir un vecteur d’aménagement intéressant pour le développement du campus. Le projet territorial et architectural développé dans la partie suivante propose de requalifier ces traversées existantes (et d’en créer de nouvelles) afin qu’elles deviennent des lieux de passages et de pauses privilégiés.
Ci-contre: La galerie des amphithéâtres, espace de rencontre et de détente.
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3/ StratĂŠgies territoriales et architecturales
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Irriguer le campus « Le campus est-il vital pour la ville au point que l’on pourrait proposer le concept de ville universitaire, au sens d’une ville innervée par l’université ?» Les traversées existantes aujourd’hui sur le campus n’ont pas de lien apparent les unes avec les autres. La stratégie proposée afin de créer ce lien à l’échelle du territoire est le prolongement à l’extérieur de ces traversées intérieures. Ce prolongement crée un réseau de circulation piétonne qui irrigue l’ensemble du domaine universitaire.
Le campus de Grenoble, par Bernadette Dufrene, extrait de Paysages des campus - Urbanisme, architecture et patrimoine, Sous la direction de Philippe Poirrier, Editions U-Culture(s).
Ainsi, chaque édifice est traversé par un chemin et chaque chemin traverse un édifice. La largeur de chaque circulation est définie par son passage à travers un édifice. Certaines sont étroites et d’autres plus larges… De plus, la création de ce réseau de circulation permet au piéton, en hiver, de traverser des espaces intérieurs et donc isolés du froid extérieur. A l’inverse, en été, le piéton, en empruntant ces chemin, profite de l’ombre des édifices et de la fraîcheur intérieure. Traverser les limites du campus « Privilégier l’urbanisme de tracés plutôt que l’urbanisme de secteurs. » Aujourd’hui, le Campus est limité au Sud par la zone des Glairons et par le boulevard Gabriel Péri, et au Nord par l’Isère. Ces composantes du territoire définissent plus des limites que des espaces de connexions. Le projet met en place un réseau de circulation piétonne qui contribue à décloisonner le territoire du campus. Le prolongement des traversées intérieures définit de nouvelles «portes d’entrée» sur le domaine 42
MANGIN, David. La ville franchisée : Formes et structures de la ville contemporaine. Editions de la Villette, 2004.
universitaire. Ces portes, qui invitent le piéton à emprunter le réseau de circulation, repoussent les limites actuelles du campus. La plupart se trouvent le long de la promenade qui borde l’Isère, d’autres le long de la rue des résidences, d’autres encore de l’autre côté de l’avenue Gabriel Péri.
SECCHI, Bernard, VIGANO, Paola. La ville poreuse : un projet pour le Grand Paris et la métropole de l’après-Kyoto. Métis Presse, 2011.
Un réseau isotrope «Dans un corps isotrope, il n’y a pas de directions privilégiées. S’il s’agit d’un réseau, tous ses nœuds sont également connectés entre eux, tout plan qui le croise le sépare en deux parties spéculaires. Un corps et un réseau isotrope n’ont ni centre ni périphérie.» Ce nouveau réseau de circulation est un élément de connexion puisqu’il relie entre eux les différents bâtiments éparpillés au sein du campus. Il s’appuie sur la réalité physique du campus, avec ses centralités et ses caractéristiques propres. En conséquence, le réseau imaginé n’est ni totalement isotrope, ni parfaitement hiérarchisé. C’est aussi une grille de lecture qui répond à certains besoins en termes de lisibilité du territoire, un repère pour se déplacer.
SECCHI, Bernard, VIGANO, Paola. La ville poreuse : un projet pour le Grand Paris et la métropole de l’après-Kyoto. Métis Presse, 2011.
« L’intérêt d’une ou plusieurs traversées est d’arpenter le territoire de près, de donner la possibilité d’une continuité aujourd’hui impossible à pratiquer et à percevoir. »
Page suivante: Plan Masse du Campus
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Campus 44
Voirie
Bâti
Intérieur
Traversées
Réseau
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La Transparence selon Robert Slutzky et Colin Rowe «Les figures sont dotées de transparence, c’està-dire qu’elles sont en mesure de s’interpénétrer l’une l’autre, sans s’annuler optiquement. Mais la transparence possède autre chose que cette seule qualité optique ; elle implique un ordonnancement spatial plus large. La transparence signifie percevoir simultanément différentes couches spatiales. Non seulement l’espace se déploie, mais il est fluctuant, et ce, en une activité permanente. (…) quand il est question (et c’est souvent le cas) de «couches transparentes superposées», nous sentons bien qu’il s’agit d’autre chose que la seule transparence physique.
ROWE, Colin, SLUTZKY Robert. Transparence : réelle et virtuelle. Paris : Editions du demi-cercle, 1992.
La double définition, précise, du concept de transparence, réelle et virtuelle, constitue tout d’abord un moyen précis pour l’analyse de l’architecture, qui distingue entre l’ «être» et le «paraître» de la transparence. Ceci renvoie au rapport entre forme et contenu en architecture, c’est-à-dire à la question qui reste encore déconcertante aujourd’hui : un bâtiment «est»-il ou «signifie»-t-il ?»
Ci-contre: «Transparency, n°2», 1948 1950; Dessin de Louis Kahn. McCARTER, Robert. Louis I Kahn. Paris: Phaidon, 2007.
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Transparence virtuelle et Perspectives
«Au bout de chaque rue, une montagne», tel était le slogan imaginé par Stendhal pour vanter les mérites de Grenoble. Cela est aussi vrai sur le territoire du campus. Ces traversées sont aussi des perspectives visuelles qui incitent à aller plus loin. Si ces chemins se terminent à l’intérieur d’un édifice, sur l’Isère ou sur un espace vert, ces perspectives, elles, n’ont pas de fin. Ces points de vue relient l’espace du campus aux éléments forts du territoire de Grenoble : les montagnes, l’Isère, les espaces verts importants comme le Parc de l’Ile d’Amour. Ces perspectives sont aussi perceptibles grâce à un effet de transparence virtuelle généré par l’organisation du bâti. En effet, selon Colin Rowe et Robert Slutzky, il existe deux concepts de transparence visuelle: l’une dite réelle, l’autre dite virtuelle. La première montre tandis que la seconde suggère. Dans le premier cas, l’observateur «voit» l’espace, dans le second il le devine. La transparence virtuelle est induite par un ordonnancement de l’espace tel qu’il crée de la profondeur et donc qui suggére que l’espace continue. La profondeur, induite par la transparence, provoque aussi une mise en mouvement du corps à travers l’espace. Ainsi, le fait de valoriser les traversées existantes permetterai de révéler ces perspectives. JUNOD, Philippe, Nouvelles variations sur la transparence, Revue Appareil (en ligne), numéro 7 (2011), consulté le 11/04/2012.
«La perspective est liée étymologiquement à la transparence, puisque perspicere signifie voir à travers. »
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Révéler les Traversées existantes « Lorsque les bâtiments enrichissent le domaine public, ils encouragent les gens à se rencontrer et à se parler. Ils interpellent le passant. Ils stimulent plutôt que répriment l’humanité naturelle de chacun. Ils humanisent la ville. »
ROGERS, Richard. Des villes durables pour une petite planète. Paris : Editions du Moniteur, 2000.
L’espace intérieur génère de l’espace public et l’espace public génère de l’intériorité. Ce sont les bâtiments qui définissent la forme et la qualité du domaine public. Cette réciprocité engendre de la porosité, de la transparence entre l’espace intérieur et l’espace extérieur. Le seuil, à la fois séparation et passage, se démultiplie et les limites intérieures/ extérieures disparaissent peu à peu. Les traversées projetées rendent à l’espace public les rez-dechaussée du bâti, et favorisent les déplacements et les rencontres au coeur même des édifices. Ce principe de réciprocité entre Architecture et espace public sera le point de départ d’une dynamique de projet visant à reconsidérer et à requalifier le bâti existant. L’un des objectifs de valorisation des traversées est de les rendre plus visibles. Ces interventions peuvent aussi se traduire par la création de nouveaux espaces d’accueil, d’information, de partage et de détente, et/ou par soustraction créant de nouvelles entrées et perspectives. Afin d’expérimenter comment l’architecture peut valoriser ces passages, le choix des traversées à révéler s’est porté sur un ensemble d’édifices se situant au Nord de l’axe principal projeté par le Plan Campus pour 2025. Ces édifices, représentatifs de l’architecture des années 60, sont différentes déclinaisons d’un même modèle architectural que l’on retrouve sur l’ensemble du campus.
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A droite : Photographies illustrant la ressemblance architecturale entre les trois édifices choisis. Pages suivantes: Localisation de la zone d’intervention.
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DĂŠployer
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Etirer
Dilater
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Dilater Cette médiathèque universitaire est séparée en deux par une traversées centrale Nord/Sud. Il s’agit ici d’un entre deux vertical, même si celui-ci est couvert sur toute sa longueur. Cette circulation centrale est attenante à un patio végétalisé. Cependant, celui-ci est inaccessible et ne participe que visuellement au parcours. L’action de transformation propose de dilater cet espace à la fois vers le haut et sur les côtés. La toiture est supprimée afin d’ouvrir zénithalement cette traversée. Une ossature en bois, rythmée par un bardage, reprend les charges de part et d’autre de cette circulation. Le traitement du sol permet également d’exprimer cette dilatation. En effet, celui-ci se prolonge d’une part sur l’axe de la traversée et d’autre part sur les côté, valorisant la porosité latérale de l’édifice. Il permet également de créer un lien avec le patio, redevenu accessible Enfin, les passerelles qui relient les deux partie de la médiathèque sont conservées car elles créent un lien visuel entre le rez-de-chaussée et les niveaux supérieurs.
A gauche : Dilatation vers le ciel et le patio. A droite : Coupes et Plan du dispositif mis en place 1/500
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AA’
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A
A’
B
B’
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Etirer Cette traversée perce de manière latérale cet édifice. En effet, afin d’entrer à l’intérieur, on longe sur toute la longueur la paroi de ce bâtiment. Actuellement, rien n’est aménagé pour rendre cette circulation agréable. Le dispositif mis en place afin de valoriser ce passage est l’étirement de cette traversée à l’extérieur. Cet étirement est illustré ici par l’implantation d’un vélum en verre et en bois, qui abrite le piéton sur toute la longueur de l’édifice. Le rythme du bardage de cette couverture crée une progression lumineuse qui adoucit la transition entre l’espace intérieur et l’espace extérieur. En outre, cet étirement permet de créer une extension extérieure de cette traversée, une coursive qui marque l’entrée.
A gauche : Etirement et progression lumineuse A droite : Coupes et Plan du dispositif mis en place 1/500
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AA’
BB’
A
B B’ A’
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Déployer Il s’agit, pour cet édifice, d’une traversée qui perce qui creuse frontalement la façade et laisse entrevoir ce qui se passe de l’autre côté. Peu visible, cette traversée est relativement étroite et rien n’invite à ralentir sa marche ou à s’arrêter. Le dispositif d’augmentation de l’impact visuel et d’amplification du volume de cette traversée se traduit ici par l’installation d’une structure métallique bardé de bois accrochée à la façade, qui se plie et se déploie de part et d’autre de la traversée. Cette installation légère permet de créer des espaces abrités plus généreux à proximité de cette percée. Elle permet également d’adoucir la transition entre l’espace extérieur et l’espace sous l’édifice. La structure mise en place peut également devenir un support d’informations qui indiquent la fonction de l’édifice et des services que l’on peut y trouver.
A gauche : Repère visuel et transition A droite : Coupe, Plan et Élévation du dispositif mis en place 1/500
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AA’
A
A’
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Ces trois interventions sur l’existant sont un exemple de valorisations architecturales des traversées du campus. Dans une hypothèse de requalification de ces circulations sur l’ensemble du territoire universitaire, nous pouvons imaginer une variation de ces dispositifs et actions de transformation, en tenant compte des caractéristiques propres de chaque traversée. Chaque variation serait alors l’objet d’un projet architectural à part entière, qui pourrait inclure la programmation de nouveaux espaces et fonctions qui enrichiraient l’identité du campus. Ces expérimentations sur l’existant, ainsi que les typologies de traversées relevées au cours de l’analyse nous permettent de définir des principes pour l’édification de nouveaux espaces. Concevoir des édifices traversants sur le campus renforcerait la cohérence produite par la multiplicité des traversées existantes. Le Plan Campus pour 2025 propose l’implantation de nouveaux équipements universitaire sur ce territoire, parmis lesquels la Maison de l’Université. Ce projet d’infrastructure sera le point de départ pour mettre en place les dispositifs développés.
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La Maison de l’Université comme nouvel espace public Un n emplacement et un rôle stratégique «Le projet d’une ville poreuse est aussi un projet qui multiplie les nœuds de l’accessibilité. Ces nœuds sont censés devenir des lieux significatifs eux-mêmes et des points d’orientation fondamentaux qui rendent lisible l’agglomération dans son intégralité.» La maison de l’Université, à la croisée des chemins, est l’un des nœuds du réseau d’accessibilité. Située à la tête de l’axe proposé par le Plan Campus 2025, elle est en quelque sorte une balise territoriale, un repère visuel... Ce nouvel espace d’accueil et de relai (qui regroupe le collège doctoral et les services de Grenoble Universités) pour les étudiants et visiteurs, de par son rôle et son emplacement, est l’un des projets emblématiques pour le futur du campus… La Maison de l’Université ne doit donc pas être conçue comme un monument mais comme un espace public à part entière afin que la relation entre cet édifice et l’espace public environnant favorise les rencontres et les pratiques. L’objectif du projet pour la Maison de l’Université était aussi de créer un repère visuel dans le paysage qui capte le piéton pour l’attirer à l’intérieur. La prise en compte de la position des arrêts de tramway «Les Tailées-Université» et «Hector Berlioz-Universités», qui sont aussi des portes d’entrée sur le campus donne à cet espace cette forme asymétrique. Cette traversée permet de relier l’axe central à l’Est à l’étendue végétale nommée «La Plaine» à l’Ouest. La Maison de l’Université s’ouvre donc ainsi vers l’Ouest, et génère, par le prolongement de la traversée intérieure, un place centrale d’entrée sur le campus. Ce parvis est aussi un espace de détente grâce à des assises qui permettent de se pauser.
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SECCHI, Bernardo, VIGANO, Paola. La ville poreuse : un projet pour le Grand Paris et la métropole de l’après-Kyoto. Métis Presse, 2011.
Nouvel Axe Axxe
Maison de l’Université
Arrêt de tramway tramw way
Schémas de principe
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Arrêt Arrê êt de tramway
Un miroir d’eau alimenté par la récupération des eaux de pluie agrémente cet espace et permet de diriger la circulation sur les côtés et les deux entrées.
Plan Masse : Projet de la Maison de l’Université
Métaphoriquement, la Maison de l’Université est comme un oiseau qui ouvrirait ses ailes. Cet envol est ici exprimé par un élément unique qui se plie et devient à la fois mur et toiture. Cette forme reprend le dispositif de déploiement mis en place sur une des traversées existantes. Ce pli génère trois volumes: une s’ouvrant au Nord vers la Chartreuse, une autre s’ouvrant vers Belledonne au Sud et une troisième s’ouvrant vers l’Ouest et vers le Vercors. Les différents espaces et fonctions se répartissent à l’intérieur de ces trois volumes: au Nord, le collège doctoral, au Sud les services de Grenoble Université et au centre l’amphithéâtre, l’espace d’accueil et d’exposition. C’est un équipement qui non seulement se traverse librement, qui devient espace public mais qui l’organise aussi.
Image évocatrice Transparence et Ouverture
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Un n entre-deux lumineux La Maison de l’Université est un équipement développé pour le Campus de Grenoble, et non pour un autre site. En ce sens, cet espace doit s’intégrer dans son environnement. Nous avons donc choisi de réinterpréter une des six typologies de traversées relevées sur le territoire du campus. L’entre deux vertical permet de dédoubler la Maison de l’Université: d’un côté le collège doctoral de site, de l’autre, les services de Grenoble Université. La Maison de l’Université s’organise donc autour d’une traversée centrale qui relie l’axe à l’Est au parvis à l’Ouest. A l’image du dispositif mis en place pour valoriser l’entre-deux de la médiathèque, cette traversée est ouverte sur le ciel. Cette ouverture zénithale permet d’une part à cet espace d’être lumineux, et d’autre part de valoriser la hauteur des voiles en béton teinté. Celle-ci est rythmée par un vélum en bois et en verre qui abrite la traversée. Il permet également d’atténuer visuellement la hauteur de l’édifice, comme une casquette qui redéfinit cette traversée à une échelle plus proche du corps. On retrouve également des passerelles en hauteur qui relient les différents volumes et fonctions de la Maison de l’Université. Ces passerelles offrent une variation de point de vue sur la traversée et de créer un lien visuel entre le rez-de-chaussée et les niveaux supérieurs.
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Vue de la traversée et de l’espace d’accueil et d’exposition
Coupe AA’ sur la traversée 1/200
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5
5
5
A
A’
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C
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C’
Plan Rez-de-chaussée 1/200 : 1. Hall d’accueil : 57 m2 2. Espace d’exposition : 154 m2 3. Consigne : 16 m2 4. Sanitaires HF : 26 m2 5. Espace Traiteur, Stockage et Régie : 65 m2 6. Activités de Relai : 52 m2 7. Stockage commun : 32 m2 8. Reproduction et Fournitures : 37 m2 9. Archives : 20 m2
Total : 459 m2
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1 6
2
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3
4
Plan R+1 1/200 : 1. Foyer : 135 m2 2. Espace de convivialité : 64 m2 3. Accueil Chercheurs étrangers : 52 m2 4. Service Relation Internationales : 44 m2 5. Service d’orientation pour les entreprises : 38 m2 6. Sanitaires : 18 m2
Total : 351 m2
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1
9 2
2
4
3
9 7
5
Plan R+2 1/200 : 1. Foyer : 103 m2 2. Espace traiteur, Vestiaires : 23 m2 3. Amphithéâtre : 171 m2 4. Stockage et Régie : 28 m2 5. Espace de convivialité : 39 m2 6. Antichambre : 13 m2 7. Salle de réunion : 38 m2 8. Salle de conseil : 44 m2 9. Sanitaires : 18 m2
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Total : 477 m2
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Plan R+3 1/200 : 1. CIES : 38 m2 2. Plateforme pour les doctorants : 39 m2 3. Secrétariat de direction : 13 m2 4. Direction du collège doctoral : 44 m2 5. Secrétariat du directeur : 20 m2 6. Bureau du directeur : 38 m2 7. Secrétariat du président et Antichambre: 17 m2 8. Bureau du Président de Grenoble Université : 44 m2 9. Sanitaires : 18 m2 Total : 271 m2
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1
1
2 5
5 3
4
Plan R+4 1/200 : 1. Salle de travail : 91 m2 2. Salle de travail et de visio-confĂŠrence : 44 m2 3. Service de Gestion : 70 m2 4. Service de Communication : 65 m2 5. Sanitaires : 18 m2
Total : 288 m2
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3 1
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Plan R+5 1/200 : 1. Service ChargĂŠs de missions : 70 m2 2. Plateforme bureau : 65 m2 3. Sanitaires : 18 m2
Total : 153 m2
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ElĂŠvation Ouest 1/200
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ElĂŠvation Est 1/200
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Coupe BB’ 1/200
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Coupe CC’
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Ouvertures et Transparence Afin de rendre cet équipement universitaire le plus ouvert et transparent possible, une double peau en verre englobe chaque volume. La première, enchâssée à l’intérieur, permet aux personnes qui travaillent au sein des différents services de Grenoble Université d’ouvrir les fenêtres afin de renouveler l’air intérieur.
Détails de la double peau en verre: en position fermée et en position ouverte 1/50
La seconde est constituée de panneaux rotatifs en verre, qui s’ouvrent et se ferment selon les saisons. Ainsi, en hiver le système est fermé pour augmenter l’isolation et ainsi retenir la chaleur. En été, l’ouverture de ces panneaux permet d’augmenter l’aération et ainsi rafraîchir l’intérieur.
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5/ Un Campus en devenir
Campus 80
Voirie
Bâti
Intérieur
Traversées
Réseau
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Ces traversées sont des espaces signifiants, facteurs d’expériences quotidiennes, qui rythment le parcours à travers différentes séquences. Elles ralentissent les trajets, de par les ambiances qu’elles proposent et aussi parce qu’elles sont des nœuds de convivialité, où l’on a le plus de chance de rencontrer l’autre. Elles permettent aussi aux étudiants et aux habitants une ré-appropriation de leur territoire, en particulier en dehors des heures de cours ou de travail, afin d’éviter une certaine indifférence des usagers envers l’espace public et inversement. Même si l’on peut imaginer des usages et pratiques sur le campus aujourd’hui, on ne sait pas comment celui-ci va évoluer dans les décennies à venir. L’hypothèse d’une forte densification du campus est une possibilité qu’il faut prendre en compte, tout comme la raréfaction de la voiture en faveur de modes de circulation
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plus écologiques. Les temporalités d’enseignements peuvent varier. De la même manière, le nombre d’étudiants peut, dans les années à venir, augmenter comme diminuer. La trame de circulation mise en place dans ce projet peut devenir, dans un futur proche ou lointain, la base de nouveaux plans d’aménagement du territoire. Idéalement, le principe de traversées reliant espaces publics et édifices guiderait toute nouvelle implantation ou programme immobilier. Les nouveaux équipements projetés par le Plan Campus pour 2025, pourraient soit s’implanter sur une traversée existante, soit en générer une nouvelle, enrichissant ainsi le réseau de circulation.
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6/ Annexes
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Bibliographie
BERTHOZ, Alain. Fondements cognitifs de la perception de l’espace. in AUGOYARD, Jean-François. (dir.). Faire une ambiance. Grenoble : A la croisée, 2011. 527 p. Ambiances, ISBN 978-2912934222 BERTHOZ, Alain. Les architectes ont-ils oublié le plaisir du mouvement. in BERTHOZ, Alain (dir.) Le sens du mouvement. Paris : O. Jacob, 1997. 345 p. ISBN 9782738104571 BONNIN, Philippe. Dispositifs et rituels du seuil : une topologie sociale. Détour japonais. Communications n° 70, mai 2000, pp. 65-92. CHELKOFF, Grégoire, THIBAUD, Jean-Paul. Les mises en vue de l’espace public : les formes sensibles de l’espace public. Grenoble : Ecole d’Architecture de Grenoble, 1992. DELBAERE, Denis. La fabrique de l’espace public: ville, paysage et démocratie. Paris: Ellipses, 2010. 187 p. La France de demain. DUBUS, Pascale. Transparences. Paris : Editions de la Passion, 1999. 142 p. FLEURY, Antoine. L’espace public. hypergeo.eu. [en ligne]. mis à jour en 2004. [Consulté le 11 avril 2012]. Disponible sur http://www.hypergeo.eu/spip.php?article482 GRENOBLE ALPES METROPOLE. Grand projet de ville Grenoble Saint-Martin d’Hères: une ambition renouvelée. 2003. 100 p. JOLE, Michèle. Espaces publics et cultures urbaines. Lyon: Centre d’étude sur les réseaux, les transports et l’urbanisme (CERTU), 2002. 427 p. JUNOD, Philippe, Nouvelles variations sur la transparence, Revue Appareil (en ligne), numéro 7 (2011) mis à jour le 11/04/2011, www.revues.mshparisnord.org/appareil/ LAMUNIERE Inès & STEINMANN Martin, Transparence(s), Extrait de FACES n° 45, hiver 1998-99. MANGIN, David. La ville franchisée : Formes et structures
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de la ville contemporaine. Editions de la Villette, 2004. 480 p. ISBN 978-2903539757 LEISEING, Dorothée. Quand le piéton s’arrête dans l’espace public: le coin et l’étendue. Grenoble: Ecole d’Architecture de Grenoble, 2006. 130 p. LEVY, Jacques, LUSSAULT Michel. Dictionnaire de la Géographie: et de l’espace des sociétés. Belin, 2003. 1033 p. ISBN 978-2701126456 PAQUOT, Thierry. L’espace public. Paris: Editions la Découverte, 2009. 126 p. Repères. POIRRIER, Philippe. Paysages des campus : Urbanisme, architecture et patrimoine. Editions Universitaires de Dijon, 2009. 187 p. U-Culture(s), ISBN 978-2915611281 RATOUIS, Olivier. Le sens de la marche: dans les pas de Walter Benjamin. Les annales de la recherche urbaine, Extrait n° 57/58. ROGERS, Richard. Des villes durables pour une petite planète. Paris : Editions du Moniteur, 2000. 213 p. ISBN 978-2-281-19414-2 ROWE, Colin, SLUTZKY Robert. Transparence : réelle et virtuelle. Paris : Editions du demi-cercle, 1992. ISBN 9782907757485 SECCHI, Bernardo, VIGANO, Paola. La ville poreuse : un projet pour le Grand Paris et la métropole de l’aprèsKyoto. Métis Presse, 2011. 294 p. Vues d’ensemble, ISBN 978-2940406562 TERRIN, Jean-Jacques. Le piéton dans la ville : L’espace public partagé. Marseille : Parenthèses, 2011. 279 p. La ville en train de se faire, ISBN 978-2-86364-228-3 TEXIER, Simon. Voies publiques : Histoires et pratiques de l’espace public à Paris. Paris : Editions du Pavillon de l’Arsenal, 2006. 315 p. ISBN 2-907513-89-3 THOMAS, Rachel. Marcher en ville: faire corps, prendre corps, donner corps aux ambiances urbaines. Paris: Editions des archives contemporaines, 2010. 194 p.
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Catalogue photographique de traversĂŠes existantes remarquables
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PERCÉE EXTÉRIEURE EXT ÉRIEURE PARCOURS LINEAIRE Edifice: Bâtiment Universitaire PHITEM Repère: 1 Matérialité: Asphalte de teinte rouge Equipements: Rail à vélos. Usages: Ce passage permet de traverser cet édifice mais rien n’invite à ralentir ou à arrêter son chemin. L’entrée est peu visible. On ne sait pas où s’adresser. Ambiances: Le manque d’espaces appropriables et le faible volume de cette percée fait de ce passage un étranglement peu agréable à traverser.
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PERCÉES EXTÉRIEURES EXT ÉRIEURES PARCOURS LINEAIRE Edifice: Bâtiment Universitaire Biologie Repère: 2 Matérialité: Goudron et béton Equipements: Aucun Usages: Traverser, s’abriter ... Ambiances: Le rez-de-chaussée de cet édifice sur pilotis est traversant à plusieurs endroits. Cependant, ces espaces sont peu occupés, de par l’absence de mobiliers urbains et d’autre part par la proximité avec le parking attenant.
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PERCÉE INTÉRIEURE INT ÉRIEURE PARCOURS LINEAIRE Edifice: Bâtiment Universitaire Université Pierre MendèsFrance
Repère: 3 Matérialité: Goudron, pavés intérieurs et extérieurs. Equipements: Espace d’accueil et d’information, panneaux d’affichage. Usages: Traverser, s’informer, se retrouver ... Ambiances: L’espace intérieur généré par cette percée à travers l’édifice est généreux et lumineux. Le couleur rouge à l’intérieur crée un contraste avec l’extérieur.
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PERCÉE INTÉRIEURE INT ÉRIEURE + COURSIVE EXTÉRIEURE EXT ÉRIEURE PARCOURS LINEAIRE Edifice: Bâtiment Universitaire Informatique et mathématiques Repère: 4 Matérialité: Goudron, béton et pavés intérieurs. Equipements: Banquettes Usages: Cet espace, bien que peu occupé, est aménagé par des banquettes de manière à être agréable ... Ambiances: Les lambris de bois aux murs rendent cet espace chaleureux. Ce petit volume est de plus généreusement ouvert sur l’extérieur.
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PERCÉES INTÉRIEURES INT ÉRIEURES + COURSIVES EXTÉRIEURES EXT ÉRIEURES PARCOURS DISCONTINU Edifice: Bâtiment Universitaire ENSE3 Bergès Repère: 5 Matérialité: Béton, pavés intérieurs Equipements: Rails à vélos, table et assises extérieures, panneaux d’affichage Usages: Entrer, Traverser, S’asseoir, Se retrouver, Se détendre ... Ambiances: Les traversées intérieures se prolongent ici par des cheminements couverts. La structure de ces coursives crée des perspectives qui pénètrent le bâti.
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PERCÉES INTÉRIEURES INT ÉRIEURES + COURSIVES EXTÉRIEURES EXT ÉRIEURES PARCOURS DISCONTINU Edifice: Bâtiment Universitaire U.Stendhal Repère: 6 Matérialité: Goudron, pavés intérieurs et extérieurs Equipements: Panneaux d’affichage, assises et tables intérieures et extérieures, rails à vélos Usages: La présence de mobiliers appropriables permet à ces espaces d’être habités et conviviaux ... Ambiances: La richesse des ouvertures et des couleurs rend ces traversées lumineuses et accueillantes même si ce sont essentiellement des espaces de distribution.
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L’ENTRE DEUX VERTICAL INTÉRIEUR INT ÉRIEUR + COURSIVE EXTÉRIEURE EXT ÉRIEURE PARCOURS LINEAIRE ET/OU DISCONTINU Edifice: Médiathèque universitaire Repère: 7 Matérialité: Pavés intérieurs et extérieurs Equipements: Boîte aux lettres, rails à vélos. Usages: Entrer, Traverser, seoir ...
S’as-
Ambiances: Les différentes entrées, facilement repérables, se rejoignent au centre dans le hall d’accueil qui sépare en deux cette médiathèque. Néanmoins, celui-ci est relativement sombre.
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L’ENTRE DEUX VERTICAL INTÉRIEUR INT ÉRIEUR + COURSIVE EXTÉRIEURE EXT ÉRIEURE PARCOURS LINEAIRE ET/OU DISCONTINU Edifice: Bâtiment Universitaire ARSH Repère: 8 Matérialité: Goudron, béton. Equipements: Rails à vélos. Usages: Traverser, Entrer, Afficher Se retrouver ... Ambiances: Ces traversées, qui s’organisent autour d’une cours au centre de cet édifice, abritent peu de mobiliers urbains sinon des voitures et vélos...
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L’ENTRE DEUX VERTICAL INTÉRIEUR INT ÉRIEUR + PATIOS PARCOURS LINEAIRE Edifice: Bâtiment Universitaire IAE Repère: 9 Matérialité: Goudron, pavés intérieurs et extérieurs. Equipements: Assises et tables extérieures, rails à vélos, tableaux d’affichage. Usages: Entrer, Traverser, Afficher Se retrouver, Contourner ... Ambiances: Deux patios rythment cette traversée et illuminent les espaces de distributions attenants.
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COURSIVES EXTÉRIEURES EXT ÉRIEURES ET INT INTÉRIEURES ÉRIEURES PARCOURS LINEAIRE Edifice: Galerie des amphithéâtre Université Pierre MendèsFrance Repère: 10 Matérialité: Goudron, pavés intérieurs et extérieurs Equipements: Assises et tables intérieures et extérieures, Panneaux d’affichage, rails à vélos Usages: Entrer, Traverser, Afficher S’asseoir, Se retrouver, Se détendre, Boire un café, Echanger, Organiser un évènement ... Ambiances: Il s’agit ici de l’un des espaces les plus investis par les étudiants. La galerie des amphis est un espace de traversée, de passage, mais aussi de détente, de rencontre qui profite à l’ensemble de l’Université Pierre Mendès-France. 98
COURSIVES INTÉRIEURES INT ÉRIEURES PARCOURS DISCONTINU Edifice: Bâtiment Universitaire DLST Repère: 11 Matérialité: Goudron, béton, pavés intérieurs et extérieurs. Equipements: Panneaux d’affichage, assises et tables extérieures, rails à vélos, Usages: Entrer, Traverser, Afficher Se retrouver, Se détendre ... Ambiances: Ces traversées relient plusieurs bâtiment faisant partis du même ensemble. En outre, ce sont des espaces qui sont animés par les étudiants qui les traversent.
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COURSIVES INTÉRIEURES INT ÉRIEURES + PATIOS PARCOURS LINEAIRE ET/OU DISCONTINU Edifice: Bâtiment Universitaire Institut d’études politiques Repère: 12 Matérialité: Goudron, pavés intérieurs et extérieurs. Equipements: Rails à vélos, assises et tables intérieures et extérieures, panneaux d’affichage. Usages: Entrer, Traverser, Afficher Se retrouver, Boire un café ... Ambiances: Deux patios reliées par des coursives intérieures rythment cette traversée. C’est un espace de rencontre et de détente entre deux cours. La cafétaria participe à cette atmosphère.
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COURSIVES INTÉRIEURES INT ÉRIEURES + PATIOS PARCOURS DISCONTINU Edifice: Bâtiment Universitaire ENSE3 Ampère Repère: 13 Matérialité: Goudron, béton, pavés intérieurs. Equipements: Assises, rails à vélos, panneaux d’affichage. Usages: Entrer, Traverser ... Ambiances: Ces nombreuses traversées s’organisent autour de trois patios. Cependant, ceux-ci ne sont pas accessibles et rien n’est aménagé afin de pouvoir s’arrêter et se détendre.
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L’ENTRE DEUX HORIZONTAL EXTÉRIEUR EXT ÉRIEUR ET INTÉRIEUR PARCOURS LINEAIRE ET/OU DISCONTINU Edifice: Bâtiment Universitaire Informatique et mathématique Repère: 14 Matérialité: Goudron, béton et pavés intérieurs. Equipements: Assises, Vitrines, neaux d’affichage,
Pan-
Usages: Entrer, Traverser, S’asseoir, Afficher, Se retrouver, S’abriter ... Ambiances: L’architecture de cet édifice génère un espace au rez-de-chaussée laissé libre en grande partie. L’espace est largement ouvert sur l’extérieur et lumineux.
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L’ENTRE DEUX HORIZONTAL EXTÉRIEUR EXT ÉRIEUR PARCOURS LINEAIRE Edifice: Bâtiment Universitaire PHITEM Repère: 15 Matérialité: Béton et pavés intérieurs. Equipements: Aucun. Usages: Traverser, S’abriter ... Ambiances: Cet édifice sur pilotis est presque complètement vide au rez-de-chaussée. L’entrée se trouve à l’intérieur d’un cube de verre. Malgré la porosité totale du rez-de-chaussée, la faible hauteur donne une impression de pesanteur qui perturbe la traversée.
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Bâti en 1960 sur le modèle des campus américains, le campus de Saint-Martin d’Hères, qui s’étend au nord-est de la ville de Grenoble, est amené à être réaménagé dans les années à venir afin de répondre à l’évolution de la société et des besoins de l’université. Ce territoire universitaire se déploie aujourd’hui sur environ 180 hectares, dont plus de 110 hectares d’espaces libres. Mais peut-on pour autant qualifier ces espaces libres d’espaces publics à part entière ? Le Plan Campus pour 2025 est l’occasion de ré-interroger ce territoire à partir de la notion d’espace public. Le projet développé propose de requalifier le domaine universitaire à travers un réseau de parcours généré par le prolongement à l’extérieur des traversées intérieures. Ce réseau de circulation irrigue l’ensemble du domaine universitaire et permet de parcourir le territoire du campus en passant à travers le bâti. Il en résulte une grille de lecture qui répond à certains besoins en termes de lisibilité du territoire en définissant des repères visuels pour se déplacer. Ces passages à l’intérieur des édifices redéfinissent les rezde-chaussée comme des espaces publics à part entière qui participent à la vie du campus. Ces traversées à l’intérieur du bâti rythment les parcours, de par les ambiances qu’elles proposent et aussi parce qu’elles sont des nœuds de convivialité, où l’on a le plus de chance de rencontrer l’autre. L’architecture façonne l’espace public et l’espace public façonne l’architecture. Cette articulation soulève de nombreux enjeux: accessibilité, partage, ouverture, ambiances et usages. Nous nous attacherons tout particulièrement à comprendre comment l’architecture de ces traversées du campus participe à l’espace public. Cette analyse du bâti nous permettra également de définir des principes et des dispositifs pour requalifier l’existant et imaginer de nouveaux lieux. La Maison de l’Université, nouvel espace d’accueil et de relai projeté par le Plan Campus pour 2025 sera l’occasion de mettre en pratique ces dispositifs.