Picsou Soir n°3

Page 1


SOMMAIRE 03. ACTUALITÉS

03. Panique avec les magazines Disney ! Les Ultrahéros : deuxième fournée 04. Mickey, Donald & Cie : les figurines 05. DoubleDuck à l'honneur La couv' de... Alessandro Gottardo

06. ANALYSES

06. Une petite poule avisée... 09. The Stone That Turns All Metals Gold 10. Quelques questions à Kari Korhonen 13. Ducklings : les fans franco-italiens 14. Le réalisme chez Carl Barks

16. EXPRESSIONS

16. Coin-coin : les fanarts des lecteurs 18. Gag - VRRRRRRR ! 20. Gag - Magie vs technologie !

06

09

L'Édito

par Corey, rédacteur en chef L'équipe est fière de vous présenter dans ce nouveau numéro notre première interview d'un auteur Disney : celle de Kari Korhonen, qui a très gentiment accepté de répondre à nos questions. Nous espérons que cette interview sera la première d'une longue série, et qu'elle vous plaira. Vous pourrez également découvrir, entre autres, un dossier sur un personnage un peu oublié, et pourtant si important, ainsi qu'un article sur une belle initiative de fans. D'autres surprises vous attendent évidemment dans le reste du numéro. En bref, nous espérons que ce Picsou Soir 3 sera à la hauteur de vos attentes. Une version papier suivra d'ici quelques temps. Nous avons d'ailleurs constasté le succès de nos éditions papier, puisque les deux premiers numéros sont en rupture de stock depuis le 8 avril ! Le présent numéro sera imprimé à plus grand tirage pour satisfaire tout le monde, c'est promis ! Nous en profitons pour nous excuser des (gros ! ) retards de livraison qu'ont dû subir certains. En parallèle de Picsou Soir, nous avons lancé un petit projet supplémentaire (merci à Alban Leloup qui le supervise) : le « Canard exquis ». Il s'agit tout simplement de créer une histoire à plusieurs, chacun réalisant quelques cases puis passant la main au suivant, et ainsi de suite... Tous les détails sont sur notre page Facebook. En attendant, bonne lecture !

PICSOU SOIR N°3 - PRINTEMPS 2020 www.picsou-soir.com Rédacteur en chef Corey Couverture Alessandro Gottardo Ont collaboré à ce numéro Le Bertel-Express • Kylian Bourichet-Passier • Dark Yada • Cédric Demarne • Gaucelm • Alban Leloup • Mathias Lenarduzzi • Loris Maiolino • Soupic • et un grand merci à Kari Korhonen et au collectif Ducklings !

10

14

18

ENVIE DE PARTICIPER AU PROJET ? MAIL : CONTACT@PICSOU-SOIR.COM

Contact Mail : contact@picsou-soir.com Les images Disney sont © Walt Disney Company, Picsou Soir n'y est pas affilié. Toute reproduction, totale ou partielle, du contenu du numéro est interdite. Version numérique. Merci à Picsou Wiki et ses 7816 pages !


PRESSE

PANIQUE AVEC LES MAGAZINES DISNEY !

D

epuis quelques semaines, les lecteurs réguliers des magazines Disney sont un peu déboussolés. Picsou Soir a mené sa petite enquête.

L'histoire commence avec la découverte par certains lecteurs, vers le milieu du mois d'avril, de nouveaux titres chez leurs marchands de journaux, en lieu et place des habituels magazines : Le Coffre de Picsou d'abord, Méga Picsou ensuite. Tout se complique lorsque d'autres lecteurs trouvent, quant à eux, les magazines originaux – à savoir, les Trésors de Picsou et Super Picsou Géant. Pour mettre cette affaire au clair, nous avons contacté les services d'Unique Heritage Entertainment (UHE) – l'éditeur Disney français – qui nous ont apportés de précieux éléments de réponse. Tout d'abord, rassurez-vous : vos ma-

gazines préférés ne changent pas de noms ! Il s'agit en fait d'une solution d'urgence qui a été adoptée face à la crise sanitaire liée au Covid-19, et à la situation de quasifaillite de la société Presstalis qui achemine les magazines Disney vers les marchands de journaux (et qui a fini par déposer le bilan le 20 avril 2020). UHE a donc fait le choix de sortir exceptionnellement des répliques des magazines habituels, en les faisant distribuer par MLP, une autre société de diffusion : Méga Picsou n°1 a remplacé Super Picsou Géant n°217 et Le Coffre de Picsou n°1 a remplacé Les Trésors de Picsou n°50. Le changement des titres des magazines est probablement dû à une question de contrat d'exclusivité avec Presstalis. En tout cas, seule la couverture change, l'intérieur est exactement le même, et UHE a d'ailleurs fait en sorte qu'on ne puisse pas trouver deux versions différentes du

même magazine dans la même région, pour éviter aux lecteurs d'acheter par mégarde deux fois le même contenu. En parallèle, la sortie du Picsou Magazine n°548 a dû être reculée : au mieux, il sera disponible autour du 20 mai. Les abonnés ont, quant à eux, reçus les magazines « normaux » et sans trop de retard. Finalement, tout devrait finir par rentrer dans l'ordre, et UHE nous certifie bien que Super Picsou Géant et les Trésors de Picsou ne changent pas : « Le numéro 218 et le numéro 51 sortiront sur la totalité des points de vente ». Affaire classée. Corey

COMPTE-RENDU

LES ULTRAHEROS : DEUXIÈME FOURNÉE

Q

uatorzième numéro de la série Mickey Parade Géant Hors-Série, voici le grand retour des meilleurs justiciers de Donaldville et Mickeyville : les Ultrahéros. Pourquoi un grand retour ? Eh bien car les Ultrahéros sont parus pour la première fois en France dans les Mickey Parade Géant n°309 à 316. Il y a eu une réédition dans deux albums édités par Glénat et surtout le premier Mickey Parade Géant Hors-Série sorti en 2012. Cet album reprend ce hors-série, mais avec en supplément trois histoires inédites. L'histoire débute par l’enlèvement de Picsou et de son coffre fort

géant. À l’origine de ce « kidnapping » le machiavélique Oscar Rapace et ses complices les Bad 7 : Pat Hibulaire, Zafire, le Fantôme noir, Spectrus, Flairsou et Intoxman. À Mickeyville, Iga Biva se rend compte que Oscar Rapace a monté ce plan pour récupérer des éléments mystérieusement éparpillés un peu partout qui devraient ensuite lui permettre de reconstituer une arme redoutable : l’Ultramachine… Iga Biva réunit alors sa propre équipe de héros, à savoir Fantomiald, Super Daisy , Super Popop, Super Dingo, Iron Gus, le Trèfle (Gontran Bonheur) et Picsoumiald. Le combat peut commencer… Cette grande saga Disney, s'inspire bien évidement des

aventures des plus célèbres super-héros américains, on y retrouve d'ailleurs beaucoup de références à l'intérieur. Mais ce n'est pas forcément une nouveauté car les superhéros existent déjà depuis longtemps comme le prouvent Fantomiald, Super Daisy et Super Dingo notament. Un album qui se laisse lire avec beaucoup de plaisir. Suspense, humour et action sont au rendezvous de ce numéro qui ravira les fans comme les novices et pour un prix tout à fait abordable surtout que le Hors-série 1 est depuis longtemps épuisé... Cédric Demarne

3


COLLECTION

MICKEY DONALD & CIE : LES FIGURINES

D

epuis le 26 décembre 2019, Hachette Collections a lancé sa grande collection de figurines Disney en résine. Il s'agit d'une série en quelques dizaines de numéros en kiosque qui propose une série « collector » avec des abonnements et des livrets exclusifs.

Personnellement, je suis plus un habitué des séries LEGO que de figurines en résine, mais je me suis laissé tenter par cette collection. Ayant reçu à ce jour les huit premiers numéros, plus quatre des six cadeaux exclusifs, que dire de cette série de figurines en résine sur leur qualité et le contenu supplémentaire ?

Des figurines détaillées et réalistes mais imparfaites

Les huit figurines reçues – Donald, Mickey, Dingo, Picsou deux fois, Minnie, Pluto, Daisy et Pat – sont vantées comme des pièces d'art à collectionner par Hachette, dont les moindres détails ont été pensés avant de procéder à une fabrication minutieuse. Véritables objets de collection pour adultes – ne laissez pas à un enfant la figurine de Mickey ou Minnie, sinon ils y perdront leur queue ! –, on sent le détail pour chaque figurine. Les personnages sont à l'échelle, comme Pat Hibulaire, livré dans un carton énorme comparé aux autres, ou Dingo qui est grand mais fin.

Il y a aussi une volonté de « donner vie » aux personnages en leur faisant adopter des postures récurrentes chez des auteurs comme Barks ou Rosa. Ainsi, Donald et Dingo lèvent leur béret et chapeau respectif, Picsou nage dans son or ou marche en tenant sa canne et son sou fétiche, et Pat pointe du doigt quelqu'un à la hauteur de Riri, Fifi et Loulou, quand les autres ont des postures classiques. Il faut saluer cette partie colossale du travail qui rend attirante la collection. Et il faut quand même noter cette magnifique figurine de Picsou qui nage dans son or, au réalisme frappant, puisque les pièces brillent et les billets sont présents comme dans le coffre. Mais il y a des imperfections, y compris sur la magnifique figurine de Picsou dans son or : le bouton de sa redingote est gris sur ma version. Les lorgnons prennent la même couleur, alors qu'ils auraient pu être a priori transparents, et ce, sur les deux versions de la figurine de Picsou. Nous ne sommes pas charmés par Pluto, un peu basique, ni par Minnie, dont le choix de la version en jupe est contestable, mieux connue de nos jours sous la forme de sa robe.

Livrets et cadeaux « exclusifs »

Les livrets sont intéressants pour redécouvrir le personnage en une quinzaine de pages. Une descrip-

4

tion sommaire, un historique rapide, quelques cases cultes, une histoire tout aussi culte vite résumée, l'évolution visuelle du personnage, et une « histoire d'un mythe » comme le mythe Don Rosa dans le fascicule sur Picsou. Ça fait l'affaire, et ça justifie un peu plus le prix exorbitant de 15 € qui nous est demandé au bout du quatrième numéro. Chez Picsou comme chez Hachette, on ne perd pas le sens des affaires... Mais au fond, le prix aurait pu justifier un plus grand livret, qui contient plus d'informations que ce que Picsou Wiki en contient déjà pour la plupart. Et Picsou Wiki, c'est gratuit ! Évidemment, c'est d'abord pour la figurine qu'on achète cette collection, mais aussi pour les quelques extras. En bonus, nous avons un énième arbre de Rosa qui pourra remplir le mur de la chambre, et qui fait le job, même si on regrettera d'avoir au dos des informations écrites sur la collection. On a en deuxième position un classeur qui nous permet de stocker quelque part les fascicules – une merveilleuse idée. On trouve une plaque en métal qui


sans le porter non plus à 15 € par numéro.

Conclusion : une bonne collection ?

Globalement, difficile d'être déçu du réalisme et du niveau de détails de cette collection. Mais on pourrait être plus exigeants sur les livrets et surtout le prix – abor-

COMPTE-RENDU

DOUBLEDUCK À L'HONNEUR

S

on nom est Duck. DoubleDuck. C’est par une compilation de ses premières péripéties que commence ce numéro 1 du hors-série Donald. Mais qui est-il ?

Déjà publié dans plusieurs Super Picsou Géant entre 2008 et 2015 ainsi qu’en version cartonnée aux éditions Glénat (5 volumes à ce jour), nous suivons les aventures de Donald qui se révèle être un redoutable agent secret, profession qui lui était alors inconnue du fait de l’effacement de sa mémoire, survenu lors de sa dernière mission. Gardant ce leitmotiv en tête, les scénaristes Fausto Vitaliano et Marco Bosco, plongent notre palmipède ingénu dans 315 pages de BD rythmées par des enquêtes policières, des voyages, quelques gadgets et de nombreux retournements de situation.

C’est d’ailleurs le principal reproche que l’on peut faire aux quatre histoires présentes dans ce volume, bien ficelées et réfléchies, mais malheureusement trop répétitives, les ressorts narratifs étant trop souvent les mêmes. Pour autant, l’ensemble reste agréable à lire grâce à une équipe d’auteurs parvenant à retranscrire une parodie de James Bond très dynamique où l’humour se mêle à l’action. Des 6 dessinateurs présents dans ce volume, notons la présence de Giorgio Cavazzano (habitué à un registre similaire avec Fantomiald) et d’Andrea Freccero avec une mise en page très « comics » et de belles scènes en monochrome. Le travail éditorial est succinct mais intéressant avec un rapide descriptif de la série, des illustrations pleines pages, un poster reprenant la couverture du numéro et quelques pages sur l’univers du célèbre héros de Ian Fleming en fin de volume. Chronologiquement incomplet (un épisode manque entre chacun des deux derniers chapitres), ce premier numéro est néanmoins une bonne occasion de découvrir notre canard favori aussi à l’aise en smoking que dans un hamac. Loris Maiolino

dable au premier numéro, mais qui devient excessif au bout du quatrième numéro. Autrement, une belle série pour collectionneurs adultes et fans des héros de leur enfance. Maintenant, on attend Géo Trouvetou au numéro 9 – et le populaire Fantomiald, plus vite que ça ! Dark Yada

LA COUV' DE... ALESSANDRO GOTTARDO

La couverture de ce numéro 3 de Picsou Soir a été réalisée à l'aquarelle par Alessandro Gottardo, dessinateur professionnel italien et fan de canards Disney depuis son enfance. Après être passé par une école de dessin publicitaire, il rencontre le célèbre Giorgio Cavazzano dans les années 1980, et ce dernier (dont il deviendra l'élève) lui permet de commencer une carrière chez Disney. Il a aujourd'hui commis près de 200 histoires et une cinquantaine de gags, souvent en collaboration avec Rodolfo Cimino au scénario, et malheureusement peu publiées en France... Alessandro Gottardo a également reçu un « TopoOscar » (prix remis chaque année par Papersera.net, site internet italien spécialisé dans la bande dessinée Disney) en 2015, dans la catégorie « Meilleure histoire courte ».

Félicitations à JB18V et à Olivier qui ont été les premiers à trouver la case du jeu dernier numéro.

reprend la célèbre affiche du court-métrage de 1937, Nettoyeurs de pendules (ou Clock Cleaners) et qui ne se refuse pas. Ensuite, un piédestal du sou fétiche, non reçu à ce jour, mais qui accompagne parfaitement Picsou sur son tas d'or. Et enfin, un mug, qui ne vaut pas le coup/coût... Les extras justifient un peu le prix,

5


PERSONNAGE

UNE PETITE POULE AVISÉE...

A

ujourd'hui, Picsou Soir rend hommage à une héroïne oubliée de l'univers de Donald Duck : la Petite Poule avisée. Et même si Pâques est passé depuis plusieurs mois, les poules sont de saison toute l'année, n'est-ce pas ? Au pays des trois collines, une petite poule maligne pour élever ses gentils poussins avait besoin de grain… C'est ainsi que commençait Une Petite Poule avisée, un dessin animé de la série « Symphonies Folâtres » dans lequel Donald Duck fit sa première apparition le 9 juin 1934. Suite à ce court-métrage, Donald a fait la belle et longue carrière qu'on lui connaît. En effet, seulement deux mois plus tard, il revenait déjà en héros aux côtés de Mickey dans Le Gala des Orphelins, « and the rest is history », comme disent les AngloSaxons. Pourtant, ce n'était pas lui le héros du film du 9 juin 1934, mais une certaine Petite Poule ! Jusqu'à ce jour, les créateurs ont négligé cette mère de famille courageuse et futée. Nous autres à Picsou Soir, nous trouvons que cette injustice doit être réparée. Mais avant tout, parlons un peu du cartoon. Réalisé par Wilfred Jackson, Une Petite Poule avisée appartient à la série des Silly

Extrait du dessin animé Une Petite Poule avisée de 1934.

Symphonies (ou « Symphonies Folâtres » dans la langue de Molière), qui adaptait de manière plus ou moins libre des contes populaires européens et américains. En l'occurrence, le courtmétrage de Jackson s'inspire de La petite poule rousse, un conte d'origine russe qui enseigne les valeurs du travail, de l'initiative personnelle, et de l'entraide. Résumons brièvement l'histoire du film : une poulette sage et travailleuse cherche de l'aide pour planter son maïs. Elle sollicite ses voisins Pierre Cochon et Donald Duck, qui invoquent tous deux l'excuse d'un mal de ventre pour échapper à la corvée. Plus tard, lorsqu'il est temps de récolter le maïs, la poule sollicite à nouveau

Extrait de l'adaptation en bande dessinée du cartoon de 1934.

6

l'aide des deux compères, qui lui rejouent la même comédie. Par contre, une fois le maïs transformé en plats succulents, les deux vauriens ne se font plus prier quand la Petite Poule les appelle pour venir en manger ! Mais quand ils ouvrent le panier que leur tend leur voisine, ils n'y découvrent qu'une bouteille d'huile de castor… excellente contre les maux d'estomac ! Les voilà bien attrapés. Venons-en enfin à notre héroïne. Que nous apprend le dessin animé au sujet de cette fameuse Petite Poule ? Eh bien pas grand-chose en vérité. Pour commencer, la pauvre n'a même pas de nom, juste un descriptif. Même sur sa boîte aux lettres, il n'est rien écrit d'autre que « Wise Little Hen ». (Pour faire simple, nous l'appellerons ci-après « la Petite Poule »). Nous voyons également qu'elle est la mère d'une couvée de neuf poussins, qu'elle élève manifestement seule. Où donc est passé le père ? Nous l'ignorons, mais différents portraits de coqs apparaissent dans la cuisine et le salon, et l'un


d'entre eux suggère que le compagnon de la Petite Poule aurait pu être un coq de combat. Un autre portrait est d'ailleurs orné de rubans, sans doute décernés lors de concours. Sa carrière de combattant se serait-elle mal terminée, laissant ses poussins orphelins de père ? Le mystère reste entier. Une chose est certaine, c'est que la Petite Poule est pleine de ressources. En effet, elle cultive ellemême le maïs dont se nourrit toute sa petite famille, et elle est passée maître dans l'art de transformer cette matière première en plats délicats : « gâteaux tout chauds fondant sous la dent, petits pâtés ventrus et odorants, pains de maïs aux épices – quel délice ! –, épis de maïs tendres et blonds, nappés de beurre qui glisse quand il fond, et une soupe, mes enfants, de quoi nourrir un régiment ! ». Même si vous n'êtes pas amateurs de maïs, une telle description ne peut pas vous laisser de marbre. À en juger par les fleurs en pot qui ornent les rebords de fenêtre de sa petite mais coquette maison, nous pouvons également conclure que notre amie a la main verte – ou peutêtre faudrait-il dire « les rémiges vertes » ? Pour en apprendre davantage, il faut nous tourner vers une série de strips dominicaux scénarisés par Ted Osborne et dessinés par Al Taliaferro (toujours en 1934). Plus que de simplement transposer Une petite poule avisée sur papier, ces strips racontent des aventures inédites et révèlent de nouveaux détails. Ainsi, nous apprenons que notre héroïne habite à Fermeville, charmante bourgade sans impôts ni politiciens. Nous découvrons également qu'elle n'a pas neuf, mais dix poussins, dont le dernier, qui s'ap-

Donald, Pierre, la Petite Poule et ses dix poussins (dont Noiraud).

pelle Noiraud, lui donne bien du fil à retordre. Un jour, alors que toute la famille partait rendre visite à Mamie Cane au-delà de la colline, Noiraud s'est éloigné du sentier jusqu'à perdre son chemin. Donald et Pierre Cochon, toujours à l'affût d'une récompense imméritée, prétendirent l'avoir ramené, alors que le petit avait fini par retrouver son chemin seul. Ce fut l'occasion pour la Petite Poule d'enseigner à ses voisins une nouvelle leçon : le mensonge ne paie pas. Plus tard dans l'année, notre mère de famille consciencieuse tenta à plusieurs reprises de persuader Donald et Pierre qu'ils feraient mieux de rénover leurs habitations respectives avant l'arrivée des grands froids. Ils n'en firent rien, bien sûr, mais elle les autorisa gentiment à passer l'hiver dans sa cabane à bois, pour peu qu'ils acceptent de scier et refendre les bûches qui s'y trouvaient. Les compères se rendirent compte que le travail n'était pas si terrible, et toute cette histoire s'acheva – un peu comme dans un album d'Astérix – par un banquet.

déroulés les événements d'Une Petite Poule avisée. Il n'avait donc pas encore atteint l'âge adulte, mais vivait pourtant seul sur une sorte de petite péniche, sans ses parents ni même sa grand-mère pour veiller sur lui. On comprend qu'à travers toutes les leçons de vie qu'elle lui a enseignées, la Petite Poule a servi de mère de substitution à notre canard préféré. En 1936, la Petite Poule réapparut discrètement dans le dessin animé de Mickey Mouse L'Équipe de Polo, où elle assistait en simple figurante à un match opposant l'équipe de Mickey à celle des stars de cinéma. Elle y était en bonne compagnie, puisque les trois petits cochons, Pluto, l'actrice-enfant Shirley Temple, et d'autres personnages issus des Silly Symphonies se trouvaient également dans les gradins. Par la suite, la Petite Poule n'a fait La Petite Poule présente dans les gradins dans L'Équipe de Polo.

Vous l'aurez compris, la Petite Poule a joué un rôle déterminant dans la vie du jeune Donald Duck, qui à cette époque de sa vie semblait livré à lui-même. En effet, d'après Keno Don Rosa (qu'on ne présente plus ! ), Donald n'avait que quatorze ans lorsque se sont

7


que très peu d'autres apparitions, encore moins même que Pierre Cochon, qui a eu droit à un bref retour dans des aventures chroniquées par les Italiens Pedrocchi et Pinochi. En effet, notre aimable gallinacée n'est apparue que dans une poignée d'histoires et d'illustrations. Dans Mickey Boxeur, un obscur récit yougoslave en deux pages, nous apprenons que la Petite Poule a voulu assister à un improbable match de boxe entre Mickey et le comédien aimé de tous Oliver Hardy ! Elle n'y est montrée que le temps d'une case, demandant s'il est possible d'assister gratuitement au match…

La Petite Poule dans Mickey Boxeur.

En 1952, Harvey Eisenberg réinterpréta l'histoire d'origine en y ajoutant deux voisins paresseux qui n'étaient pas dans le dessin animé : Clarabelle et Horace. Et bien sûr, en 1994, le grand Carl Barks se souvint d'elle lorsqu'il réalisa une peinture (Surprise Party at Memory Pond) où les parents et amis de Donald lui font

une surprise pour son soixantième anniversaire. À partir de là, ce fut la grande traversée du désert pour la Petite Poule... En fait, il fallut attendre 2019 ( ! ) pour avoir enfin de ses nouvelles dans une histoire hollandaise intitulée Een dag vol buikpijn. Apparemment, la Petite Poule a fini par quitter Fermeville pour emménager juste à côté de chez Grand-Mère Donald, et trois de ses poussins (qui ont bien grandi) s'avèrent être des filles ! Riri, Fifi, Loulou et Daisy eurent l'occasion de faire sa rencontre le jour de la récolte du maïs à la ferme de Grand-Mère. Mais ce jour-là, Donald ne put revoir sa vieille voisine car, ironiquement, il avait prétexté un mal au ventre pour échapper à la corvée. Il faut croire qu'on ne se refait pas. Pour conclure, notons que certains ont fait le rapprochement entre la Petite Poule et Clara Cluck, une autre reine de bassecour apparue pour la première fois dans le dessin animé Le Gala des Orphelins en août 1934. Plus troublant encore, elles ont toutes les deux la même voix, qui ressemble étrangement à celle de l'actrice et chanteuse Florence Gill ! Clara et la Petite Poule seraient-elles de la même famille, tante et nièce par exemple ?

La Petite Poule face à Donald, Pierre, Clarabelle et Horace.

8

Clara Cluck dans le dessin animé Le Gala des Orphelins.

Peut-être… La prochaine fois que nous passerons près du Club des Filles à Donaldville, nous irons poser la question à Clara directement. Peut-être un jour apprendrons-nous enfin le vrai nom de cette mère courageuse et énergique qui prodigua à Donald Duck de si importantes leçons de vie... Alban Leloup

Références

– Wilfred JACKSON (réal.), Une petite poule avisée, 1934. – Burt GILLETT (réal.), Le Gala des Orphelins, 1934. – David HAND (réal.), L'Équipe de Polo, 1936. – Ted OSBORNE, Al TALIAFERRO, La petite poule avisée, 1934 (ZS 3403). – Vlastimir BELKIC, (Mickey Boxeur), 1936 ( XY MM 5A). – Harvey EISENBERG, Wise Little Hen, 1952 (W SS 1-10). – Evert GERARDTS, Daniel PEREZ, Een dag vol buikpijn, 2019 (H 2018379). – Carl BARKS, Surprise Party at Memory Pond, 1994 (CB OIL 142).


CAN-ART

THE STONE THAT TURNS ALL METALS GOLD (CARL BARKS, 1991)

N

ous poursuivons notre exploration de l'œuvre de Barks avec cette fois-ci un tableau au caractère mythologique... Comme l’indique le titre de l’œuvre (que l’on pourrait traduire par « La pierre qui transforme tous métaux en or » , ce tableau fait référence à l’histoire La pierre philosophale, publiée pour la première fois en juin 1955 dans Uncle Scrooge n°10, aux États-Unis. Celle-ci nous conte une des nombreuses aventures extraordinaires de l’éternel aventurier Balthazar Picsou – toujours accompagné de ses neveux : le milliardaire se lançait cette fois-ci à la recherche de la mythique pierre philosophale, qui aurait été créée par les alchimistes pour changer n’importe quel métal en or massif. Un artefact qui intéressait bien évidemment Picsou, qui y voyait un nouveau moyen de s’enrichir. Cependant, il fut poursuivi dans son aventure par Maurice Barbedrue, membre du Conseil Monétaire International (organisation dont le nom n’est pas sans rappeler celui du Fond Monétaire International), qui craignait l’effondrement du cours de l’or qu’aurait causé cette découverte. Les canards finirent tout de même par découvrir la pierre dans une immense caverne, qui s’avéra être le mythique labyrinthe du Minotaure, en Crète. Et c’est ce labyrinthe qui est représenté sur ce tableau ; on reconnaît aisément la tête de celui qui fut son locataire dans l’immense statue de taureau qui semble garder la salle au trésor, mais également regarder le spectateur de l’œuvre. Picsou, plus occupé par les nombreux joyaux qui

remplissaient les innombrables amphores, venait de jeter par dépit ce qui semblait n'être pour lui qu'un simple caillou. Mais quelle ne fut pas sa surprise en réalisant que cette pierre qu’il pensait sans intérêt était en réalité ce qu’il cherchait depuis des jours. Celle-ci venait de frapper une lampe-torche qui prit soudainement une inestimable valeur. En outre, d’autres détails ne sont pas sans intérêt dans cette salle au trésor ; on remarque un bouclier et une épée brisée, qui semblent avoir survécu à l’époque où Thésée combattit le Minotaure. On pourrait même imaginer que ce fut avec cette épée

qu’il vainquit l’abominable créature. Au-delà des nombreuses amphores et coffres remplis de précieux joyaux, on est surpris par ce décor égyptien et ces statues d’Anubis et d’Horus qui semblent hors-sujet dans un labyrinthe grec. Barks a ainsi mêlé dans ce tableau toutes ces mythologies de toutes les époques – égyptienne, grecque et médiévale (pour la pierre philosophale) –, pour créer une oeuvre qui évoque un monde lointain pour les hommes modernes, un monde mystique que les canards redécouvrent dans ce labyrinthe enseveli depuis des millénaires… Soupic

9


DES CANARDS ET DES HOMMES

QUELQUES QUESTIONS À KARI KORHONEN...

K

ari Korhonen (né en 1973) est l'un des auteurs nordiques les plus prolifiques dans le monde de la bande dessinée Disney européenne. Il a accepté de répondre à quelques questions pour Picsou Soir. Comment avez-vous découvert l’univers des canards ? Pourquoi avez-vous décidé d’écrire et de dessiner des bandes dessinées Disney ? J’ai toujours été un fan de Donald. Je devais avoir quatre ans quand mes parents m’ont abonné à l’hebdomadaire finlandais Aku Ankka, et j’ai accroché à cet univers depuis. Cela m’a mené à vivre ma jeunesse dans le Donaldville de Carl Barks, tout en admirant les dessins animés Disney. À 16 ans, j’ai eu un job d’été dans un magasin de bandes dessinées, où j’ai connu pas mal d’artistes et d’éditeurs. Tout cela m’a fait devenir auteur après mes études. Quel est votre personnage Disney préféré ? Avez-vous déjà créé de nouveaux personnages ? Mon personnage préféré dépend des jours, en réalité. Certains jours je m’identifie à Géo ou j’espère être un aventurier comme Picsou, mais la plupart du temps je m’inspire de la ténacité de Donald. Il se relève à chaque fois, peu importe ce qu’il affronte dans la vie. Je suis également collectionneur, donc Picsou m’est cher pour cette raison. J’ai créé certains personnages qui sont devenus récurrents (comme Young Donnie Duck), mais aucun ne mérite particulièrement d’être mentionné.

10

Quelle est votre histoire de canards ou de souris préférée ? Pour des raisons purement personnelles, je dirais Quel cadeau pour Noël ? de Barks. Je l’ai lue pour la première fois dans le Christmas Parade finlandais en 1977 et je l’ai adorée.

1993, et je faisais également quelques dessins de mon côté. Et j’ai beaucoup de chance de pouvoir faire cela depuis vingt-six ans. Mes histoires s’accumulent. Je ne pourrais dire laquelle est ma préférée. Quels sont vos auteurs Disney préférés ? Nous sommes tous les enfants du grand Barks, artistiquement parlant. Mais la liste des autres artistes que j’admire est longue : Daniel Branca, Daan Jippes, Vicar, William Van Horn pour n'en citer que quelques uns.

Combien de bandes dessinées avez-vous créées selon vous ? Parmi toutes vos histoires, laquelle préférez-vous ? Honnêtement, je n’en ai aucune idée. J’ai commencé en tant que scénariste pour des artistes tels que Vicar ou [Daniel] Branca en

Quel type d’histoires préférezvous créer (comédies, aventures, voyages…) ? Autant les comédies que les aventures, en réalité. Cela dit, les éditeurs actuels n’aiment pas trop les longues histoires. Quand une histoire dépasse douze pages, elle est divisée en plusieurs parties dans les magazines scandinaves.


La plupart des éditeurs ne les aiment donc pas, car ces magazines sont vendus dans les kiosques à l’unité et si un lecteur a raté la première partie d’une histoire particulière, il peut se sentir perdu. Par conséquent, quasiment personne ne réalise des aventures de plus de vingt pages, ce qui est pourtant la longueur nécessaire d’une bonne aventure. J’aimerais en faire plus. Une comédie classique, elle, rentre parfaitement dans les dix pages données habituellement. Quand vous créez une histoire, quelle partie du travail préférez-vous : écrire ou dessiner ? Les deux sont des disciplines très différentes. Ces jours-ci je préfère dessiner, car c’est plus relaxant. Je peux écouter des podcasts ou des livres audios pendant que je travaille. Quels sont vos inspirations quand vous créez une histoire ? Je pense toujours que les meilleures histoires sont inspirées par quelque chose de réel, qui a été vu ou entendu par l’auteur. Si quelqu’un garde ses oreilles attentives, même la plus petite des choses peut lui servir d’inspiration pour une histoire. J’ai déjà écrit une histoire à partir d’une note que quelqu’un avait laissé sur le tableau d’un supermarché. Je me demande toujours : « comment Donald ou Picsou réagiraient à cela ? » Si vous avez un peu de chance, les canards s’occupent du travail à partir de là. Vous avez travaillé avec beaucoup d’auteurs, quelle collaboration avez-vous préférée ? J’ai toujours pensé que travailler avec des gens plus expérimentés et meilleurs que vous est la meilleure façon d’apprendre.

Quand je découvrais les dessins finis de Vicar, Daniel Branca, Cesar Ferioli, Giorgio Cavazzano ou d’autres, j’étais toujours impres-

Connaissez-vous des magazines Disney français ? Avezvous déjà travaillé pour eux ? Pas directement, mais je suis toujours heureux de voir mes histoires publiées dans Picsou Magazine ou Le Journal de Mickey. Récemment, vous avez réalisé une histoire mettant en scène le jeune Picsou (Le journal du Klondike, publié dans Picsou Magazine n°547), que pensez-vous de La Jeunesse de Picsou de Don Rosa ? J’admire beaucoup la passion de Don Rosa pour l’histoire de Picsou et son attention particulière aux détails.

sionné de voir comment leur esprit avait travaillé, comment ils avaient amélioré l’histoire de façon impressionnante. D’où venez-vous ? Est-ce-que ce lieu apparaît dans vos histoires ? Je viens d’Espoo, en Finlande (en banlieue d’Helsinki), et j’y vis toujours. Je préfère cependant que mes histoires se déroulent strictement à Donaldville, au Calisota. Avez-vous déjà été en France ? Avez-vous aimé ? J’adore la France ! Je ne voyage plus très souvent, mais je l’ai visitée quelques fois. Mon séjour préféré était lorsque j’ai vu l’entraînement d’un Winnie l’Ourson à Disneyland, à Paris il y a une vingtaine d’années ( j’ai dessiné des couvertures de Winnie l’Ourson pendant des années). Et avant que vous ne le demandiez, manger du miel n’était pas inclus dans l’entraînement, ce qui est assez dommage d’ailleurs. Par-dessus tout, j’adore la nourriture, l’histoire et les habitants sympathiques de votre pays.

Selon vous, y a-t-il une seule version de l’univers Disney ? Ou pensez-vous que chaque auteur Disney peut écrire et dessiner ce qu’il veut ? L’univers Disney est quelque chose en constante évolution. Je pense que c’est important d’y apporter sa touche tout en respectant ce qui a été accompli avant. Par exemple, je prends quelques libertés avec l’histoire de Picsou, mais la plupart du temps je ne contredis pas Barks ou

11


l’histoire de Picsou qui vont sortir. Nous allons, entre autres, apprendre le secret de Miss Frappe, et voir la première rencontre entre Picsou et Géo Trouvetou. D’autres histoires plus longues sont aussi prévues pour 2021.

Don Rosa. On peut placer de nouvelles histoires sur une vieille échelle de temps. En même temps, Picsou, c’est plus qu’une seule vie. Adhérer à tout ce qui a été fait auparavant étoufferait la créativité. Pouvez-vous imaginer quelqu’un qui ferait un nouveau film de Robin des Bois, mais qui serait obligé d’inclure tous les éléments issus des précédents films de Robin des Bois ? Ce serait ridicule, non ? Le Journal du Klondike est un peu ma version à moi de cet univers. Il y aura cinq nouveaux récits sur

Pensez-vous, comme Don Rosa, que les canards vivent seulement dans les années 1950 ? Visuellement parlant, oui. Par exemple, je préfère dessiner un téléphone fixe qu’un portable. Mais je suis l’exemple de Barks, ici. Barks évolua avec son temps, tout comme ses canards. C’est juste qu’une grande partie de son temps était justement les années 1950. Dans les années 1960, Barks transforma ses personnages en répliques de ces années là. Vous rappelez-vous de cette histoire très drôle où Gontran s’était fait pousser la barbe et jouait de la guitare comme un hippie ou un beatnik [Un albatros en trop, NDLR] ? Ou cette grande aventure où Picsou se faisait de l’argent

EN EXCLUSIVITÉ MONDIALE, PICSOU SOIR VOUS OFFRE UNE CASE DE L A PROCHAINE HISTOIRE DE DUCKLINGS ! DÉCOUVREZ LA SUITE SUR LEUR PAGE FACEBOOK DÈS LE 7 JUIN 2020... LISEZ VITE LA PAGE 13 POUR SAVOIR CE QU'EST LE COLLECTIF DUCKLINGS !

12

Extrait du Mystère perruque.

grâce à la mode des perruques qui touchait Donaldville [Le mystère perruque, NDLR], un véritable phénomène des années 1960 ? On n’a pas vu plus de hippies ou d’autres phénomènes contemporains parce qu’il prit sa retraite en 1966. Mais il a toujours évolué avec son temps. Prétendre que les téléphones portables ou Internet n’existent pas à Donaldville limiterait les possibilités d’histoires, ou pire, nous ferait faire des histoires plus du tout adaptées aux jeunes enfants, qui constituent, après tout, une grande partie de nos lecteurs. Propos recueillis par Soupic et Corey.


COUAC-TUALITÉ

DUCKLINGS : LES CANARDS FRANCO-ITALIENS

N

é dans l’esprit de trois fans français et d’une fan italienne en 2018, le collectif Ducklings a un objectif simple : rendre hommage à la vie de Balthazar Picsou, à travers des fancomics dans le plus pur style de Carl Barks et Don Rosa. Leur nom est inspiré des Inklings, un cercle littéraire britannique de l’entre-deux-guerres ayant accueilli notamment C. S. Lewis et J. R. R. Tolkien, qui se réunissait pour partager son amour de la littérature fantastique. Ici, pas de fantasy à l’horizon, mais une passion commune pour l’œuvre des maîtres Barks et Rosa, qui pousse les quatre jeunes franco-italiens à réaliser leurs propres comics. Leur première planche, intitulée Forever et publiée le 27 mars 2020 sur la page Facebook du collectif, est un hommage discret à l’amour de jeunesse de notre aventurier préféré, Goldie O’Gilt. Le style y est concis et sobre : seulement deux phylactères parcourent la planche, tandis que les teintes sombres renforcent l’impression d’intimité qui s’en dégage. Une entrée en matière réussie pour Ducklings, qui s’attaque ici à l’une des relations préférées des fans de canards,

Balthazar et Goldie dans Forever.

imaginée par Barks en 1953 dans Retour au Klondike et longuement développée par Rosa près de cinquante ans plus tard. Le comics, initialement publié en anglais, en français et en italien connaît une traduction espagnole le 3 avril. Changement radical de style avec Moneybinny Routine, le deuxième comics du collectif, publié le 17 avril. L’intimité et l’émotion sont délaissées au profit d’un gag en deux pages, comme Barks en a produit des centaines au cours de sa carrière. Ce nouveau style est pleinement assumé. « On avait envie d’alterner entre les styles, passer de BD émouvantes à des choses purement comiques », nous confie le collectif. La volonté de Moneybinny Routine est de centrer l’histoire et le dessin autour de Miss Frappe, l’infatigable secrétaire de Picsou. Tout tourne autour de Miss Frappe et de sa machine à écrire, élément central de toutes les cases rythmées par

l’entrée et la sortie des visiteurs du coffre. Don Rosa n’est pas délaissé non plus, avec de nombreux « détails inutiles » typiques du dessinateur du Kentucky. En conclusion, une petite incursion dans la vie privée de cette employée infatigable, toujours présente et pourtant peu exploitée par les comics Disney traditionnels. Quand on interroge Ducklings sur leurs prochaines BD, la réponse est plus mystérieuse. Un grand projet en plusieurs parties est en préparation pour cet été. Le thème reste un secret pour l’instant, si ce n’est que l’on sait que le jour de la publication, le 7 juin, n’a pas été choisi au hasard (si vous vous posez la question, c’est la journée mondiale du donut, mais on peut douter qu’il y ait un rapport). En attendant la date fatidique, on ne peut que vous recommander d’aller lire les premières BD de Ducklings, « du pur fancomics, par et pour des fans ! ». Mathias Lenarduzzi Picsou Soir vous offre en exclusivité une image de la prochaine BD de Ducklings.

« Essaye encore, Miss Tick ! ». Extrait de Moneybinny Routine.

13


BARKSOLOGIE

CARL BARKS ET LE RÉALISME

P

armi les plus belles histoires de Carl Barks, on trouve d'abord les longs récits d'aventures, comme Le casque d'or ou Perdus dans les Andes ! qui mettent en scène nos canards préférés dans les contrées les plus reculées de la planète. Mais qu'est-ce qui fait alors le génie de ces histoires ? Une des réponses est très certainement la combinaison magistrale de la fiction et de la réalité, grâce à laquelle la famille Duck voyage bien au-delà de sa Donaldville chérie (au Brésil, en Inde, en Égypte...) et font la rencontre d'autres cultures fictives, comme celle des Indiens Windigos. Au-delà du côté fictif des histoires, Carl Barks a toujours essayé de donner l'impression que ce qu'il dessinait était réel. C'est pourquoi il a presque tout le temps incorporé des éléments réalistes dans ses arrière-plans. L'idée était de faire vivre les personnages dans un environnement authentique quand il décrivait des pays lointains. Barks expliquait ceci en 1975 : « J'ai toujours essayé de faire du réel. (...) Chaque scène doit correspondre à la réalité, c'est-àdire que lorsque vous réalisez par exemple une histoire qui se dé-

roule dans les Andes, il faut qu'elle ressemble visuellement aux Andes, et les gags doivent être cohérents avec l'atmosphère, les habitants, la nature, les paysages ». En insistant sur l'authenticité et les détails réalistes, Barks a réussi à créer une atmosphère cohérente qui donnait à ses aventures une vraie crédibilité. L'influence réaliste dans son œuvre se retrouve dès sa première histoire, Donald et le trésor du pirate (1942). Il utilisait alors des photos issues du National Geographic comme modèles pour ses dessins, d'abord avec précision, puis en simplifiant les formes et les détails. Barks affirmait que sans ces magazines, il n'aurait pas été capable de dessiner de façon aussi réaliste : il s'en est servi pour copier des bateaux, des constructions humaines, voire même des paysages entiers. Pour sa deuxième histoire, L'anneau de la momie (1943), Barks a massivement utilisé ses numéros du National Geographic afin de montrer l'Égypte de la façon la plus authentique possible. Il a copié les images avec une précision et une attention remarquables, c'est pourquoi les éléments réalistes soigneusement ombrés se dé-

Un exemple de paysage plus anonyme (ici, Le Temps des Vacances).

marquent de son style plutôt minimaliste. Avec le temps, Barks a développé un style particulier, détaillé, et donc plus réaliste, en utilisant de façon magistrale les ombres, si bien qu'il eut de moins en moins besoin de copier les photos du National Geographic. On estime qu'à partir de 1949, Barks était capable de créer ses cadres et atmosphères sans aide. Il continua en revanche d'utiliser le National Geographic comme source d'inspiration, tout en évoluant vers des histoires où le besoin de réalisme se faisait moins grand et où il pouvait un peu plus s'appuyer sur sa créativité. Les lieux utilisés restaient réels et réalistes, mais étaient plus anonymes et plus difficilement identifiables.

Un exemple d'inspiration réaliste chez Barks, ici avec les Colosses de Memnon, en Égypte.

14


En revanche, pour les personnages secondaires, Barks a commencé par réutiliser ceux qu'il avait vus chez Floyd Gottfredson ou Al Taliaferro, c'est-à-dire des « chiens anthropomorphes », des sortes d'humains avec un visage canin – et donc assez irréalistes. Cependant, il témoignait tout de même d'un effort d'authenticité, particulièrement quand il représentait des cultures éloignées (Esquimos, Arabes, Indiens, etc.). En outre, Barks a toujours pris le soin d'intégrer ses canards dans une société humaine, les considérant justement comme des êtres humains : « Je n'ai jamais vu les Ducks comme des canards vivant dans un monde d'animaux et de chiens anthropomorphes ; pour moi, ils étaient simplement des hommes, qui ressemblaient par hasard à des canards ». Au départ, il avait l'intention de dessiner des bandes dessinées sérieuses, mettant en scène des humains. À la fin des années 1940, Barks réalisa d'ailleurs un certain nombre de dessins pour un projet qui ne vit finalement jamais le jour. En parallèle, son attirance pour le dessin d'humains s'est fait de plus en plus visible dans ses bandes dessinées pour Disney, et ses personnages secondaires étaient plus souvent dotés d'éléments humains. Ainsi, les oreilles de chien tombantes sont devenues des oreilles d'homme, les personnages se sont mis à avoir cinq doigts, les nez humains ont remplacé les truffes. La figure humaine a pris le dessus : l'histoire Charivari en délire ! (1950) dans laquelle on ne remarque que trois chiens anthropomorphes en est un exemple parfait. Carl Buettner, le directeur artistique de Barks à la Western Publishing, a alors accepté ce flot de personnages secondaires humains parce que l'histoire se déroulait surtout dans un cirque.

Une espionne déjà très humaine dans Donald Duck garde-côte.

En 1944, le film Les Trois Caballeros, qui mêlait animation (pour les canards) et prises de vues réelles (pour les décors et les personnages secondaires), a encouragé Barks à réaliser une histoire avec des personnages humains : Apparence trompeuse (1950). Dans cette aventure, les humains sont de vrais humains et pas des chiens anthropomorphes ; ils ont donc vraiment un nez et pas simplement une truffe. Dans le scénario, Donald et ses neveux doivent faire face à des espions étrangers sur la Côte d'Azur, et Barks ne pouvait pas les représenter autrement que comme il les voyait au cinéma. Cependant, avec Apparence trompeuse, il est allé particulièrement loin, et Carl Buettner ne pouvait plus accepter un tel niveau de réalisme dans une bande dessinée Disney :

« Autant de personnes réelles dans un comics, ça ne va pas. Nous ne sommes plus dans le monde des Ducks ! ». Barks voulait simplement accentuer le contraste entre l'univers de Donaldville et le reste du monde, mais il prit la critique de Buettner à cœur et ne retenta quasiment jamais l'expérience – même s'il a pu quelques rares fois redessiner des personnages avec des éléments humains. Aujourd'hui, les bandes dessinées Disney ne contiennent presque que des chiens anthropomorphes. Cependant, les paysages réalistes sont toujours présents chez les auteurs qui continuent à dessiner dans le style barksien. Stefan Binter (Bertel-Express)

Références

– Thomas ANDRAE, Geoffrey BLUM, « Das Ferne und Vergangene » in Der Donaldist Sonderheft n°18, 1986. – Donald AULT, Thomas ANDRAE, Stephen GONG, « An Interview with Carl Barks, Duckburg's True Founding Father » (1975) in Carl Barks Conversations, 2003. – J. Michael BARRIER, Glenn BRAY, Bob FOSTER, Bill SPICER, « A Conversation with Carl Barks » (1971) in Carl Barks Conversations, 2003.

Trois êtres humains dans Apparence trompeuse.

15


COIN-COIN

LES FANARTS DES LECTEURS Envoyez-nous vos plus belles Œuvres par mail à l'adresse contact@picsou-soir.com

se un ous propo ène n u ie r u le e F ne sc Vincent d inspiré d'u sa : la in s s e d e Don Ro magnif iqu histoire de eau e r b lè é c nier traîn r e d'une D e d ursuite course-po on (1988). pour Daws

Merlin Delrieu

16

Un dessin d e Gaucelm, fan français que vous co mmencez à con vous nous lis ez régulièrem naître si ent.

Un gag signé PiM


L'Italien Roberto Cataldi nous propose ce dessin-hommage réalisé pour les 85 ans de Donald, mettant côte à côte le Donald de 1934 et le Donald de 2019 !

“ Care to come and say that to my face, lad ? ” Le dessin en haut à droite a été réalisé par la française Eeryl. Nous vous proposons également de découvrir en pages 18 et 19 un gag de son invention, qui met en scène des personnages relativement peu courants pour les fans de canards que nous sommes. Vous reconnaitrez probablement le célèbre Flagada Jones que l'on aperçoit dans la dernière case, mais il peut être nécessaire de faire un petit rappel (voire de les présenter !) sur les deux autres personnages : Albert Colvert et sa fille adoptive Poussinette Canardstein (en VO, Drake Mallard et Gosalyn). Ces deux personnages proviennent de la série Myster Mask (en VO, Darkwing Duck) spin-off de la Bande à Picsou diffusé en France principalement dans les années 1990. « Myster Mask », c'est surtout le nom de l'identité secrète d'Albert Colvert, « la terreur qui corrige les erreurs » et combat les méchants à Bourg-les-Canards !

17


18

EN PLUS, JUSTE APRÈS L'AVOIR SERMONNÉ...

C'EST LÉGAL DE LAISSER UN ENFANT TOUT SEUL DANS UN SUPERMARCHÉ ?

MA CHÉRIE, TU DOIS APPRENDRE À T"AMUSER AVEC CE QUE TU AS DÉJÀ, T'EN TENIR AU STRICT MINIM...

POUR LA DERNIÈRE FOIS : NON, JE NE VAIS PAS T'ACHETER UN NOUVEAU VÉLO JUSTE PARCE QUE « CELUI-LÀ A L'AIR TROP COOL » !

BD ET NON, CE N'EST PAS PARCE QU'IL A DES FLAMMES QU'IL VA PLUS VITE !

SI ! NON, TU N'AS PAS BESOIN D'UN NOUVEL...

NON !

PAPA ?

VRRRRRRR ! par Eeryl, 2019


19

MYSTER MASK !

UNE POUSSIÈRE DE PLUS VIENT DE SE FAIRE ASPIRER PAR L'INTIMIDANT...

UNE SEMAINE PLUS TARD...

NE L'ENCOURAGE PAS !

D'UN CÔTÉ, LA MAISON N'A JAMAIS ÉTÉ AUSSI PROPRE...


BD

MAGIE VS TECHNOLOGIE ! par Mattia Grossi & Debora Giuliani, 2017 J'AI RÉUSSI ! IL EST ENFIN À MOI !

LES AVENTURES MAGIQUES DE

MISS TICK MAGIE VS IE ! TECHNOLOG

ALORS CETTE FOIS C'EST VRAIMENT FINI, DONALD ?

JE VAIS ÊTRE LA SORCIÈRE LA PLUS RICHE DU MONDE !

PLUS PERSONNE NE PEUT M'ARRÊTER ! LE POUVOIR DE MIDAS SERA BIENTÔT À MOI !

JE CROIS BIEN QUE OUI, ONCLE PICSOU...

TU NE CROIS PAS QUE L'ON DEVRAIT ÉTEINDRE LA DUCKSTATION MAINTENANT QU'ELLE A ATTEINT LE NIVEAU « RÉALISER SON RÊVE » ?

ATTENDEZ UN PEU ! JE NE SUIS ENCORE JAMAIS ARRIVÉE JUSQUE LÀ !

FIN 20


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.