N° 143 OCTOBRE 2011 www.poly.fr
MAGAZINE Dossier Quelles perspectives pour le Parlement européen ? Amiri Baraka Entretien avec la voix de la cause noire Biennale Sélest’art L’art contemporain dans la ville Les Journées de l’Architecture dans le Rhin supérieur
L’art sans
frontières au ZKM
VOS PROCHAINS RENDEZ-VOUS! RALLYE DE FRANCE
JAMEL DEBBOUZE
JAMES BLUNT
CHARLES AZNAVOUR
LENNY KRAVITZ
du JE 29 SEPT au DI 2 OCT
ME 5 OCT
ME 12 OCT
VE 14 OCT
MA 18 OCT
M POKORA
AGE TENDRE ET TÊTES DE BOIS
ORIENTALE EXPO DE STRASBOURG
BIRDY NAM NAM
GEORGE MICHAEL
VE 4 NOV
SA 5 NOV
du VE 11 NOV au DI 13 NOV
VE 18 NOV
ME 23 NOV
CARMINA BURANA
JAMIROQUAI
RAMMSTEIN
ABBA MANIA
DANI LARY
SWEET PEOPLE
MERRY CHRISTMAS GOSPEL TOUR
JE 24 NOV
VE 25 NOV
JE 1ER DÉC
VE 2 DÉC
DI 4 DÉC
SA 10 DÉC
JE 15 DÉC
TRIAL INDOOR
NICOLAS CANTELOUP
VE 13 JANVIER
DI 15 JANVIER
MUSIKANTENSTADL 2012
THE AUSTRALIAN PINK FLOYD SHOW
LE GRAND CIRQUE DE NOËL
Et en 2012 : SA 17 DÉC
ROCK MEETS CLASSIC
LE LAC DES CYGNES
ÉGALEMENT À L’AFFICHE : LAURENT GERRA • LETZ ZEP • LES ÉTOILES DU CIRQUE DE PÉKIN • HANSI HINTERSEER & DAS ORIGINAL TIROLER ECHO • MAGIC SYSTEM • DAS FRüHLINGSFEST 2012 • DRACULA, L’AMOUR PLUS FORT QUE LA MORT • SI CARMEN M’ÉTAIT CONTÉE… • CIRQUE DU SOLEIL «ALÉGRIA» • SEMINO ROSSI • SYMPHONIE ÉQUESTRE II «LES CHEVAUX DU MONDE» • STÉPHANE ROUSSEAU • RFM PARTY 80’ • T’CHOUPI FAIT SON SPECTACLE • JULIEN CLERC • CLOCLO NIGHT FEVER • DISNEY LIVE «LA FABULEUSE TOURNÉE DE MICKEY» • FESTIVAL DES ARTEFACTS : HUBERT FELIX THIEFAINE + INVITÉS • LAURA PAUSINI • CABARET «LE MUSICAL DE BROADWAY» • THRILLER LIVE • ELIE SEMOUN • MAMMA MIA!
INFOS ET RENSEIGNEMENTS
03 88 10 50 50 DI 22 JANVIER
JE 26 JANVIER
DI 29 JANVIER
JE 2 FÉVRIER
TOUT
BRÈVES
SCHUSS !
CONFORTABLE COMME
UNE FRAISE « On l’a imaginé comme un fruit mûr. » Voilà comment les frères Ronan et Erwan Bouroullec, célèbres designers français (notamment responsables du café du Mudam Luxembourg), décrivent Ploum. « Un fruit mûr voluptueux », un canapé avant-gardiste et douillet, dans lequel on rêve de se vautrer. Plouf ! À découvrir (en avant-première lors de la Nuit du design, voir p. 77) chez Ligne Roset, 8 Quai Kellermann, à Strasbourg. www.ligneroset.fr – www.bouroullec.com
T’ES OPEN ?
Avec L’Opening Night, l’art contemporain se déguste la nuit, vendredi 14 octobre, de 18h à minuit. Un grand circuit nocturne. Une belle occasion pour (re)découvrir les nombreuses expos strasbourgeoises d’Apollonia, de La Chambre ou du MAMCS, de vivre des instants arty et festifs en ces lieux, mais aussi à La Semencerie (installations des artistes résidents et surprises), Stimultania (sangria, paella et dance floor) ou au CEAAC (DJ set et vidéos).
Auteur d’un troisième album nommé Courchevel, le chanteur français dorénavant moustachu semble très attaché aux stations de ski savoyardes, mais surtout au monde de l’enfance. Une période importante de notre vie qui laisse des traces… utiles à Florent Marchet – en concert jeudi 13 octobre à L’Illiade d’Illkirch (photo Mathieu Dortomb) – pour lui inspirer des chansons symphoniques et doucement nostalgiques. www.illiade.com
MÉLI-MÉLODIES Depuis 1973, Nancy Jazz Pulsations fait pulser la ville et tout l’Est de la France grâce à sa programmation jazz… et à beaucoup d’autres styles. Ainsi, du 5 au 19 octobre, découvrez les chansons d’Arnaud Fleurent-Didier, le groove de Chucho Valdès & the Afro-Cuban Messengers, l’éthio-jazz de Mulatu Astatke, le hip-rock de Saul Williams ou encore la pop-funk-calypso de Kid Creole & The Coconuts. www.nancyjazzpulsations.com
CONNAN PAS
BARBARE Ce Connan-là n’est pas une brute épaisse. Au contraire, les chansonnettes aériennes du Néo-Zélandais nous transportent dans un univers bizarre et fragile, digne des contes de fées. Écoutez l’album de Connan Mockasin, Forever Dolphin Love, composé en plein air lors de soirées caniculaires, et rendez-vous à son concert à la petite salle de La Laiterie, vendredi 7 octobre. www.artefact.org
www.artenalsace.org
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Dimanche 2 octobre à 20h30 LA FOLLE PART EN CURE Nouveau show de Liane FOLY Mardi 8 novembre à 20h30 HISTOIRES DE THEATRE Samedi 19 novembre à 15h et 20h GALA DER VOLKSMUSIK Samedi 17 décembre à 20h30 UN NOEL RUSSE Jeudi 26 janvier à 20h30 MATIN BRUN – Dans le cadre du festival « décalages » Vendredi 24 février à 20h30 DE MA FENETRE, CHANSONS A VOIR Vendredi 23 mars à 20h30 GAINSBOURG FOR EVER Vendredi 20 avril à 20h30 LA FOLLIA, ORCHESTRE DE CHAMBRE D'ALSACE INVITE DAVID GUERRIER Le Moulin 9 42 avenue Foch 67110 Niederbronn les Bains Tél : 03 88 80 37 66 Courriel : Niederbronn-culture@wanadoo.fr Site: niederbronn-culture.com
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PLATEAU
REPAS NOUVEAUX
L’association Fragment propose une soirée Plateau TV, mercredi 2 novembre au Théâtre du Saulcy à Metz (57). Au menu, un concert de la contrebassiste-improvisatrice-compositrice Joëlle Leandre (avec Jérôme Bourdellon) suivi d’un repas, puis de la projection de Basse continue de Christine Baudillon. www.fragment-asso.com
EXPLORATEURS Une 18e édition pour un événement “majeur”, le festival international de musique, danse et performance Densités. Ça défrichera à nouveau, du 21 au 23 octobre, au Pôle Culturel de Fresnes-en-Woëvre (55), avec le rock australien de Pivikxki (voir photo © Sabina Maselli), les performances dansées (Laure Terrier) et chantées (Paul Dutton) ou encore la musique electro-acoustique “circassienne” de Laurent Bigot. www.vudunoeuf.asso.fr
ET MA BD, C’EST DU POULET ? Le duo Satrapi / Paronnaud viendra-t-il présenter son film Poulet aux prunes durant l’événement illus’ & BD orchestré par l’asso Central Vapeur (28-30 oct) ? Mystère à l’heure où nous bouclons… mais qu’importe, le programme est suffisamment alléchant avec des conférences (Gerner, Menu, Morgan…) à l’Université de Strasbourg, un salon des indépendants (en présence de L’employé du moi, Habeas Corpus, 3 fois par jour…) ou une expo de Simon Roussin (voir image) au Hall des Chars. http://centralvapeur.org
ENTRETIEN AVEC
DES VAMPIRES
UTOPIE VOSGIENNE
Dans le cadre de l’exposition L’Europe des esprits du Musée d’art moderne et contemporain de Strasbourg (du 8 octobre 2011 au 12 février 2012), L’Auditorium du MAMCS accueille, samedi 29 octobre (à 16h), le cinémix de Château Flight, groupe composé de Gilb’r et d’I:Cube, sur trois des dix épisodes du film Les Vampires (1915) de Louis Feuillade. Des têtes coupées, de l’electro, de l’hémoglobine, du krautrock…
Artopie ? Un centre de création artistique parrainé par Stephan Balkenhol dans son fief de Meisenthal (57). La structure expose le travail de ses résidents d’été (du 1er octobre au 5 novembre) : les sculptures et dessins d’Andréas Zedtwitz (artiste de Karlsruhe) et les objets “iconiques” du Lyonnais Marc Étienne.
www.musees.strasbourg.eu
www.artopie-meisenthal.org Poly 143 Octobre 11
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BRÈVES
TOUT FEU TOUT
FLAMENCO Une ouverture de saison brûlante à La Salle du Cercle de Bischheim, jeudi 6 octobre, avec la chanteuse de flamenco d’origine gitane Montse Cortés. L’artiste espagnole sera accompagnée des notes de guitare de Juan Carmona ou encore des mouvements de danse d’Alfonso Losa. www.salleducercle.fr
SUR LE VIF Du 1er octobre au 12 novembre, la Médiathèque centreville de Strasbourg expose deux manières de Croquer la ville. Alors que l’architecte et dessinateur Laurent Kohler présente ses dessins urbains, le metteur en sons Philippe Aubry livre ses captations sonores prouvant que le micro peut être aussi juste qu’un stylo. www.mediatheques-cus.fr
ORIENTAL DELIGHT Selon Noé Duchaufour-Lawrance (qui a travaillé pour Baccarat ou Paco Rabanne), le design « doit être vecteur de sens et d’émotions ». Mission accomplie avec le fauteuil Ottoman réalisé pour Cinna. Inspiré des poufs marocains, il mêle confort moderne et charme oriental. À découvrir chez Cinna, 23 rue de la Nuée Bleue, à Strasbourg (et chez Quartz à Colmar). www.cinna.fr
CECI N’EST PAS
UN ARP
DANDYCYCLETTE
Radial Art Contemporain, galerie depuis peu installée au 11b Quai Turckheim, à Strasbourg, expose les travaux de deux plasticiens (jusqu’au 16 octobre) : les sculptures sonores tout en rondeurs de Pius Morger (voir image) et les Wall papers colorés de François Fries.
« Je prends des clichés de gens élégants à vélo en allant au boulot, en rentrant le soir, et parfois à ma pause déjeuner : place du Corbeau, place Gutenberg, autour de Rivetoile… », nous confie Vincent Longy, initiateur de Strasbourg Cycle Chic. Un site amusant et stylé (inspiré par Copenhagen Cycle Chic) dédié aux cyclistes lookés parcourant la cité. N’hésitez pas à lui envoyer vos images.
art.radial@gmail.com
http://strasbourgcyclechic.blogspot.com Poly 143 Octobre 11
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Les coups de cœur du Kurhaus de Baden-Baden
Aimez-vous les grands événements mondains, les galas ou les bals à l’instar du Grand Prix Ball ? Préférez-vous savourer les plaisirs culinaires devant le Kurhaus illuminé à l’occasion des Baden-Badener Sommernächte ou des Kurpark-Meetings ? Êtes-vous passionné de cabaret, spectacle d’humour ou de musique ? Alors n’hésitez plus à nous contacter et nous vous enverrons notre programme. Baden-Baden Events GmbH Schloss Solms · Solmsstr. 1 76530 Baden-Baden tél. : +49 (0)7221-275275 · fax : +49 (0)7221-275222 www.badenbadenevents.de
Extrait du programme :
10e Soirée Tango Argentin concert, spectacle, bal 12 novembre 2011 à 21h salle Bénazet
The Treagles A Tribute to the Eagles
concert avec le Seán Treacy Band 19 novembre 2011 à 20h salle Bénazet
Bal et Dîner de Nouvel An 31 décembre 2011 à 19h30 salle Bénazet
BRÈVES
CABARET
DANSEZ ! Samedi 5 novembre – en live sur la chaîne allemande SWR – au Kurhaus de BadenBaden se déroule un gala de danse de très haut niveau… Un show ébouriffant avec notamment les champions du monde italiens Mirko Gozzoli et Edita Daniute, les Penguin Tappers… et bien d’autres. Tous les styles, toutes les danses dans une des plus belles salles de bal du continent.
De l’effeuillage sexy avec Luna Moka, femme-enfant adepte du new burlesque. De l’excentricité avec Joe black, sorte de Marilyn Manson joueur de banjo. De l’expressionnisme et du transformisme avec Mr Pustra (photo)… Le Cabaret Clandestin, les 7 et 8 octobre à La Salamandre strasbourgeoise, nous plongera dans le Berlin des années 1920. http://lasalamandrestrasbourg.com
LE PLEIN DE
SUPER Supersounds, festival concocté par Hiéro (au Grillen ou au cinéma Colisée à Colmar, à Pôle Sud ou Stimultania à Strasbourg) convoque, du 30 septembre au 31 octobre, le folk électronique de Lucky Dragons, la pop quatre étoiles des Luyas, les chansons du mythique Darren Hayman (d’Hefner) ou encore les beats cradingues “façon Suicide” de Dirty Beaches (photo)…
www.badenbadenevents.de
À LIVRE OUVERT Des bouquins y sont vendus par milliers tous les ans : la 38 e édition de la plus grande Foire aux Livres de l’Est aura lieu au Centre de Congrès Atria à Belfort (90), du 7 octobre au 1er novembre. Pour dénicher la perle rare d’occase ou neuve, à prix réduits… www.livres-90.fr
http://hiero.fr
LES AMATEURS THEATRA, le festival qui s’écrit en majuscule fête ses 25 ans du 7 au 9 octobre à Saint-Louis (La Coupole, sous chapiteau…). Dédiée au théâtre amateur, cette manifestation convie notamment, cette année, des compagnies qui ont marqué son histoire : Les Malades d’imaginaire, Teatro Laboratorio (photo), L’Emporte-pièce, etc. www.theatra-saint-louis.fr
La Tour de Babel de Jakob Gautel © Geoffroy Krempp
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Infos / inscriptions
strasbourg.aime.ses.etudiants
BRÈVES
DE LA LUMIÈRE
NEW AGE
AU SUD
« Susciter un nouveau regard sur les pays du Sud. » Tel est le parti pris des sept photographes de la prestigieuse agence Magnum Photos (Olivia Arthur, Jean Gaumy ou John Vink) qui exposent leurs images du Cambodge, d’Indonésie ou de Mauritanie, du 21 au 29 octobre, place Kléber à Strasbourg. Sur d’étonnants panneaux cubiques, elles racontent le développement en sept chapitres : “Éducation”, “Santé”, “Eau et assainissement”…
La méditation est l’élément central de Le moins du monde, exposition contemplative du Frac Lorraine, à Metz, rassemblant (du 7 octobre au 8 janvier 2012) les œuvres, forcément spirituelles, de Tania Mouraud, Marina Abramovic ou Ann Veronica Janssens.
www.objectif-developpement.fr www.magnumphotos.com
www.fraclorraine.org Tania Mouraud, Initiation room n°5, 1969 / 1992
ÇA VA OU BIEN ? © Olivia Arthur
Pierre Fraenkel alias Alsachérie est de ces artistes interventionnistes rendant le quotidien plus poétique. Il y a quelques semaines, il squattait les panneaux d’“expression libre” strasbourgeois, notamment avec « Crach ta valda ! ». Dernier terrain de jeu en date, les rues de Mulhouse avec des « Wesh bien » devant la Porte Jeune, des « mi amor » ou encore un « Hopla kum » place de la Concorde, en volume siou-plait ! http://alsacherie.free.fr
APP’ART
Un appart du 18 rue de Soleure, à Strasbourg, transformé en espace d’art ? C’est la Galerie Margaretha Murr qui accueille, pour sa première manifestation, le travail de Tony Weingartner, alias Milkvonstrass. L’artiste “contextuel” prend possession du lieu (expo Latitude, jusqu’au 16 octobre) en y glissant des éléments urbains comme cette palette (voir photo) poncée, lissée… et donc méconnaissable. hi@angelamurr.eu – www.milkvonstrass.blogspot.com www.isneyland.fr
INJUSTICE RÉPARÉE Cette saison, Daniel Klajner a choisi de placer la programmation de l’Orchestre symphonique de Mulhouse sous le signe de Théodore Dubois (1837-1924), compositeur français trop mal connu. Premier éclat de cette “résidence posthume” (en collaboration avec le Palazetto Bru Zane de Venise, Centre de musique romantique française) avec In Memoriam Mortuorum, à découvrir vendredi 28 et samedi 29 octobre à La Filature de Mulhouse. www.orchestre-mulhouse.fr Poly 143 Octobre 11
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SOMMAIRE
22 Dossier : Quelles perspectives pour le Parlement européen de Strasbourg ? 28 Le Choc des civilisations vu par Fellag, comique algérien invité à Saint-Louis et à Épinal 30 Hard to be a God, pièce choc du hongrois Kornél Mundruczó sur la prostitution et la traite d’êtres humains en Europe 32
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Interview d’Amiri Baraka, légendaire voix de la cause noire et précurseur du spoken word à Pôle Sud
36 Le samoan Lemi Ponifasio, livre sa vision de la danse à l’occasion de sa venue avec Birds with Skymirrors au Maillon
52
38 Plongée avec deux commissaires dans la Biennale Sélest’art 42 Destination Luxembourg, à la découverte d’une ville en plein boom 52 Hubert Mahela, qui présente plusieurs spectacles au TJP durant le festival StrasbourgKinshasa, nous parle de la capitale de la RDC
22
71
66 Louise Bourgeois célébrée pour son centenaire par la Fondation Beyeler 71
Promenade à l’assaut de l’Ortenbourg
74 L a Source des Sens, expériences culinaires à Morsbronn-les-Bains 38
76 Les Journées de l’Architecture et la Nuit du design s’offrent à nous
COUVERTURE
Au ZKM de Karlsruhe, The Global Contemporary (voir page 64) invite à réfléchir sur l’art mondialisé. Parmi les artistes présentés, le photographe sud-africain Pieter Hugo, nous plonge, avec sa série Nollywood, au cœur de l’industrie cinématographique du Nigéria, une des plus prolixes au monde avec environ 1 000 films produits chaque année. Cette photo de 2008, Chris Nkulo and Patience Umeh, évoque une zone improbable où les frontières entre fiction et réalité semblent être abolies. www.pieterhugo.com
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DANSE, THÉÂTRE / BELGIQUE
ŒDIPUS/BÊT NOIR TEXTE JAN DECORTE CHORÉGRAPHIE WIM VANDEKEYBUS
WWW.le-maillon.com
03 88 27 61 81
Photo © Danny Willems
JEU 20 + VEN 21 + SAM 22 OCTOBRE / 20H30 MAILLON-WACKEN
OURS
ils font poly
Ours
Liste des collaborateurs d’un journal, d’une revue (Petit Robert)
Pascal Bastien (né en 1970) Libération, Télérama, Le Monde… et Poly : Pascal Bastien est un fidèle de notre magazine. Il alterne commandes pour la presse et travaux personnels. www.pascalbastien.com
Emmanuel Dosda (né en 1974) Il forge les mots, mixe les notes. Chic et choc, jamais toc. À Poly depuis une dizaine d’années, son domaine de prédilection est au croisement du krautrock et des rayures de Buren. emmanuel.dosda@poly.fr Photo de Stéphane Louis
Jérémie Fischer (né en 1986) Après de nombreuses années à bourlinguer, il entre aux Arts déco de Strasbourg. Diplômé en 2011, on a pu voir ses illustrations dans la revue Nyctalope et prochainement dans le magazine Nobrow 6. www.jeremiefischer.com
Thomas Flagel (né en 1982) Théâtre moldave, danse expérimentale, graffeurs sauvages, auteurs algériens… Sa curiosité ne connaît pas de limites. Il nous fait partager ses découvertes depuis trois ans dans Poly. thomas.flagel@poly.fr
Dorothée Lachmann (née en 1978) Née dans le Val de Villé, mulhousienne d’adoption, elle écrit pour le plaisir des traits d’union et des points de suspension. Et puis aussi pour le frisson du rideau qui se lève, ensuite, quand s’éteint la lumière. dorothee.lachmann@poly.fr
www.poly.fr RÉDACTION / GRAPHISME redaction@poly.fr – 03 90 22 93 49 Responsable de la rédaction : Hervé Lévy / herve.levy@poly.fr Rédacteurs Emmanuel Dosda / emmanuel.dosda@poly.fr Thomas Flagel / thomas.flagel@poly.fr Dorothée Lachmann / dorothee.lachmann@poly.fr Ont participé à ce numéro Catherine Jordy, Geoffroy Krempp, Pierre Reichert, Laure Roman, Irina Schrag, Lisa Vallin, Daniel Vogel et Raphaël Zimmermann Graphistes Pierre Muller / pierre.muller@bkn.fr Anaïs Guillon / anais.guillon@bkn.fr Maquette Blãs Alonso-Garcia en partenariat avec l'équipe de Poly © Poly 2011. Les manuscrits et documents publiés ne sont pas renvoyés. Tous droits de reproduction réservés. Le contenu des articles n’engage que leurs auteurs. ADMINISTRATION / PUBLICITÉ Directeur de la publication : Julien Schick / julien.schick@bkn.fr Co-fondateur : Vincent Nebois / vincent.nebois@bkn.fr
Benoît Linder (né en 1969) Cet habitué des scènes de théâtre et des plateaux de cinéma poursuit un travail d’auteur qui oscille entre temps suspendus et grands nulles parts modernes. www.benoit-linder-photographe.com
Stéphane Louis (né en 1973) Son regard sur les choses est un de celui qui nous touche le plus et les images de celui qui s’est déjà vu consacrer un livre monographique (chez Arthénon) nous entraînent dans un étrange ailleurs. www.stephanelouis.com
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Administration, gestion, diffusion, abonnements : 03 90 22 93 38 Gwenaëlle Lecointe / gwenaelle.lecointe@bkn.fr Publicité : 03 90 22 93 36 Julien Schick / julien.schick@bkn.fr Catherine Prompicai / catherine.prompicai@bkn.fr Vincent Nebois / vincent.nebois@bkn.fr Magazine bimestriel édité par BKN / 03 90 22 93 30 S.à.R.L. au capital de 100 000 e 16 rue Édouard Teutsch – 67000 STRASBOURG Dépôt légal : septembre 2011 SIRET : 402 074 678 000 44 – ISSN 1956-9130 Impression : CE COMMUNICATION BKN Éditeur / BKN Studio – www.bkn.fr
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le spectacle vivant en touRnÉe
EN PARTENARIAT AVEC LA RégIoN ALsACE
19 spectacles - 36 villes
les dÉBats de l’ gence meRcRedi 14 dÉc 2011
« multidisciplinaRitÉ, inteRdisciplinaRitÉ, indisciplinaRitÉ. comment compRendRe les tendances actuelles des aRts ? » AgENCE CULTURELLE D’ALsACE / CoNsEIL RégIoNAL D’ALsACE EN PARTENARIAT AVEC L’oBsERVAToIRE DEs PoLITIQUEs CULTURELLEs INsCRIPTIoN oBLIgAToIRE
www.secuRite-spectacle.oRg www.lumieRe-spectacle.oRg www.sonoRisation-spectacle.oRg www.macHineRie-spectacle.oRg www.oRganisateuR-eXposition.oRg www.scenes-alsace.oRg www.oRganisateuR-spectacle.oRg www.touRnages-alsace.oRg
collection des
e-BooKs de la cultuRe
ÉDITO
Du vert au gris Par Hervé Lévy Photo de Stéphane Louis
O
n le sait – mais c’est toujours utile de le rappeler – un hectare représente 10 000 mètres carrés. Un terrain de football – c’est moins connu – a une taille de 7 200 m² environ, selon les normes de la FIFA. Bien. Chaque année, disparaît en Alsace une surface de terres agricoles et d’espaces naturels correspondant à un peu plus de 900 terrains de foot, soient 650 hectares. Leur destinée ? Habitat, zones économiques et commerciales ou infrastructures routières et ferroviaires. Ces chiffres émanent du Comité régional de suivi du Grenelle de l’environnement (qui a tenu séance à la Maison de la Région le 16 septembre). Face à une consommation massive d’espace (en réduction néanmoins depuis les années 1980 où les chiffres oscillaient entre 800 et 1 000 hectares) par une société de plus en plus avide de terres à “artificialiser” (pour reprendre le vocable officiel), il faut agir. L’objectif, très concret, de diviser par deux le rythme d’ici 2020, a été fixé avec, pour pivot, une Plate-forme RÉgionale du Foncier en Alsace et de la Consommation des Espaces (nommée PRÉFACE) où se rencontrent, depuis mai 2011, les acteurs majeurs du secteur.
« Entre béton et bitume / Pour pousser je me débats / Mais mes branches volent bas / Si près des autos qui fument » chantait Maxime Le Forestier. C’était en 1972. Aujourd’hui, la ville continue à avancer à un rythme soutenu. Les entrées de Strasbourg, Colmar ou Mulhouse se sont métamorphosées en musées des horreurs : espaces commerciaux hideux, zones pavillonnaires à perte de vue, pépinières d’entreprises… On en passe et des meilleures. Dans son ouvrage Non-Lieux, introduction à une anthropologie de la surmodernité (1992), Marc Augé décrivait avec justesse la genèse 16
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des zones interstitielles qui naissent de ce maillage nouveau du territoire : « Dans la réalité concrète du monde d’aujourd’hui, les lieux et les espaces, les lieux et les non-lieux s’enchevêtrent, s’interpénètrent. La possibilité du non-lieu n’est jamais absente de quelque lieu que ce soit. » On aurait presque envie de remplacer “possibilité” par “certitude”… Estce que la plaine d’Alsace est destinée à devenir une étendue urbaine continue et sans aucune âme, où l’on passerait de la banlieue de Wissembourg à celle de Bâle sans presque s’en rendre compte ? Dans cette vaste entreprise d’uniformisation, tout le monde est perdant. Pas seulement Cricetus cricetus, le sympathique Grand hamster… Voilà une pollution polymorphe (esthétique au premier chef, elle génère évidemment son lot de nuisances environnementales) d’autant plus dangereuse qu’elle est insidieuse et bien moins spectaculaire que les bolides pétaradants et fumants du Rallye de France qui parcourent les routes de la région cet automne. L’espoir ? Il consiste, d’un côté, à inverser la tendance: une vingtaine d’hectares sont aujourd’hui rendus chaque année à l’agriculture, une cinquantaine à la nature… Ce sont évidemment souvent des friches industrielles, difficiles à dépolluer, mais ce mouvement à rebours mérite d’être encouragé et soutenu afin que ces statistiques gonflent. De l’autre côté, il importe, comme on le fait, de tenter de réduire l’ampleur du grignotage. Seule cette double impulsion permettra d’éviter la métamorphose de l’espace du Rhin supérieur en une morne zone périurbaine à la teinte uniformément grisâtre. Le danger de cette apocalypse molle est bien présent. Jusqu’ici tout va bien…
e e l a t i enn Cap é p ro
Orchestre PHILHARMONIQUE DE STRASBOURG
eu
ORCHESTRE NATIONAL
OCTOBRE
2011
CONCEPTION REYMANN COMMUNICATION // MONTAGE BKN.FR // LICENCES D’ENTREPRENEURS DE SPECTACLES N° 2 : 1006168 ET N°3 : 10066169
jeudi 13 vendredi
PMC - SALLE ÉRASME 20H30
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• theodor Guschlbauer direction
haydn
• Evelyne Alliaume violon • Alexander Somov violoncelle • René Bellier hautbois • Jean-Christophe Dassonville basson
Symphonie concertante pour hautbois, basson, violon, violoncelle et orchestre, en si bémol majeur Hob.I.105
jeudi
20
Symphonie n°5 en si bémol majeur A96
PMC - SALLE ÉRASME 20H30 Satie Deux Gymnopédies
• ilan Volkov direction • Pierre-Laurent Aimard piano Projection de PIANOMANIA avec la participation de Pierre-Laurent Aimard Mercredi 19 octobre 2011 20h Auditorium de la Cité de la Musique et de la Danse Entrée libre sur invitation
jeudi 27 vendredi
Bruckner
(orchestration de Debussy)
ayreS N° 46 pour orchestre création française BrahmS Concerto pour piano
et orchestre n°1 en ré mineur op. 15
PMC - SALLE ÉRASME 20H30
28
• muhai tang direction • Sol Gabetta violoncelle
Glinka Rouslan et Ludmilla, Ouverture, Marche et Danses orientales elGar Concerto pour violoncelle et orchestre en mi mineur op. 85 tchaïkoVSki Symphonie n°5
en mi mineur op. 64
SAISON 2011>2012
Renseignements : 03 69 06 37 06 / www.philharmonique.strasbourg.eu Billetterie : caisse OPS entrée Schweitzer du lundi au vendredi de 10h à 18h Boutique Culture, 10 place de la cathédrale du mardi au samedi de 12h à 19h
experts-comptables
LIVRES – BD – CD – DVD
ROBESPIERRE La collection “T’étais qui, toi ?”, destinée à faire connaître aux enfants (dès 9 ans) les personnages illustres de l’histoire, s’est enrichie d’un nouveau titre. Après Staline, de Gaulle ou Toussaint Louverture, voici Robespierre. Écrit par l’auteur strasbourgeois Philippe Lechermeier (star de la littérature jeunesse avec notamment Princesses oubliées ou inconnues) et illustré par Guillaume Long, l’ouvrage restitue de manière intelligible et intelligente la trajectoire de l’artisan de la Terreur. Et ce n’était pas gagné d’avance, tant, en général, les clichés l’emportent dans la description de celui qui demeure une des figures centrales de la Révolution. Une dose d’humour, quelques litres d’hémoglobine (à l’époque, les têtes tombaient « comme des ardoises » selon le mot de Fouquier-Tinville), une écriture alerte et une érudition à toute épreuve : telle est la recette d’un livre réussi qui passionnera les petits… et en apprendra aussi aux grands. (H.L.) Paru chez Actes Sud Junior (9 €) www.actes-sud-junior.fr
UÏK, LE COCHON ÉLECTRIQUE C’est l’histoire d’un cochon tout mignon et tout rose prénommé Uïk. Jusqu’ici tout va bien. Sauf qu’il a peur du noir et qu’un soir de tonnerre la foudre s’abat sur lui. Uïk devient électrique. Uïk flotte dans l’air. Avec malice, l’auteure Karin Serres décrit comment la famille de fermier tire profit de ce miracle, lui confiant des tâches plus ou moins saugrenues :
électrifier les enclos en touchant les fils, battre les œufs en neige avec de simples fouets placés dans ses naseaux… Mis sur des rails, Uïk devient même locomotive des wagons du p’tit dernier. Avec un dessin aux traits très expressifs, Till Charlier, formé à l’École de l’Image d’Épinal et aux Arts décoratifs de Strasbourg, fait naître l’espoir sur les visages d’une famille rêvant d’en tirer moult profits. Mais très vite, Uïk fugue dans la noirceur de la nuit, pleure en myriades d’étoiles filantes s’échouant sur le sol, jusqu’au coup de foudre avec Raïa, une raie… électrique ! (I.S.) À paraître le 12 octobre, aux éditions du Rouergue, 12 € (dès 4 ans) – www.lerouergue.com
MYSELF Comment définir la musique du groupe strasbourgeois Myself ? Jazzcore, free noise, postje-ne-sais-quoi ? L’exercice est vain… Sa pochette annonce la couleur : Haro ! est rouge comme l’hémoglobine, violent comme une corrida, cruel comme une bataille déloyale, tranchant comme l’épée du matador. Ça fait mal, ça castagne, ça crie, ça tape fort (le batteur Pascal Gully n’y va pas de main morte), ça souffle dans son sax (Claude Spenlehauer) à y perdre haleine, ça gratte sa guitare électrique (Nicolas Gully) à en saigner… Pas de doute, ce disque à la fois physique et cérébral, qui s’écoute le volume au max, va déplaire à vos voisins. (E.D.)
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Paru sur Whosbrainrecords (10 €) http://whosbrain.free.fr http://thebandmyself.free.fr En concert dimanche 30 octobre à Stimultania (Strasbourg) avec Les Comptes de Korsakoff et Architektone – www.stimultania.org
DIS-LEUR…
EN SUBSTANCE
Derrière les mots, « les masques parlent dans leur nudité insolente » comme l’écrit Nadia Reiff, animatrice de l’atelier d’écriture de l’association strasbourgeoise Ithaque. Fruit des écrits de personnes usagères de drogues, le recueil Dis-leur… en substance défie les clichés qu’on accole trop facilement aux toxicomanes. Au fil des pages, on retrouve un regard acide et des questionnements existentiels (« Sourire à l’avenir ou souffrir au passé ? » Frédéric Krembel), la solitude et la douleur, mais aussi une quête touchante d’amour-propre et d’estime de soi dont on peut présager que l’énonciation poétique constitue un grand pas pour leur auteur. (T.F.) Publié par Espace Indépendance (20 €) www.ithaque-asso.fr – www.espace-independance.org
NOUS LES VAGUES L’écriture peut se révéler prophétique, l’empathie effleurer l’âme au plus près. En 2009, Mariette Navarro débute une pièce de théâtre en Algérie. Elle achève Nous les vagues un an plus tard, lors d’une résidence d’écriture dans le même pays. Plusieurs mois avant le “printemps arabe”, cette jeune auteure passée par l’École du TNS, diplômée dans la section dramaturgie en 2007, avait senti poindre le fourmillement de grands desseins. Avec ce texte de forme incantatoire, totalement centré sur l’intériorité de personnages confrontés aux élans les plus purs et dignes de liberté et d’espoir, elle nous emporte au cœur de bouillonnements identitaires, au moment même où frémit la naissance d’un collectif. Et l’on peut déjà parler de “style Navarro” (voir Alors Carcasse, Poly n°140), dans sa manière toute personnelle d’approcher avec minutie et force précisions le moi profond de ses personnages, de cerner l’essence de la fragilité de l’élan qui les anime, menacé par chaque petit reniement de soi. Mais, « il est l’heure décidée pour faire la lumière à l’intérieur des cages… » écrit-elle. Pour prendre la Vague. Devenir Vague. Et déferler. (T.F.) Paru aux Éditions Quartett (11 €) www.quartett.fr
TOUS LES SOLEILS Ceux qui ont manqué la sortie en salles (le 30 mars), du film de Philippe Claudel (ou qui l’ont adoré) peuvent acquérir le DVD. L’auteur des Âmes grises a choisi de situer l’action de Tous les soleils à Strasbourg : « C’est une ville dont j’aime l’esthétique, ses ambiances différentes selon les quartiers. J’aime aussi son expression sonore. On y entend toutes les langues de l’Europe », explique-t-il. Avec l’excellent Stefano Accorsi et l’exquise Clotilde Courau, c’est à une promenade douce-amère teintée de nostalgie et de tendresse à laquelle nous sommes conviés sur fond de musique baroque. Même si les évolutions géographiques des personnages – pour des Strasbourgeois – demeurent invraisemblables, il n’en demeure pas moins que la ville est ici intelligemment portraiturée. En bonus, un entretien avec Philippe Claudel, des scènes coupées, un clip… Que demande le peuple ? (H.L.) Édité par UGC et distribué par TF1 Vidéo (19,99 €) À voir lundi 10 octobre au Cheval Blanc de Schiltigheim – www.ville-schiltigheim.fr
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CINQ QUESTIONS À…
céline bernard Lieu de pédagogie très bien équipé et espace de diffusion où les pratiques transversales sont de mise, la spacieuse Maison des Arts de Lingolsheim nous est présentée par sa directrice.
Par Emmanuel Dosda Photo de Benoît Linder pour Poly Maison des Arts de Lingolsheim, 8 rue du Château 03 88 78 88 82 www.lingolsheim.fr Prochains spectacles Vendredi 7 octobre : ouverture de saison et spectacle de rentrée avec Wow ! Du 18 au 23 octobre : Les gens déraisonnables sont en voie de disparition de la Compagnie Coup de Théâtre Jeudi 17 novembre : Steve Lacy’s Music (dans le cadre de Jazzdor)
Vous entamez votre troisième saison. Qui est à l’origine de ce projet dont l’originalité réside dans sa double spécificité : à la fois lieu de développement artistique – à destination des enfants (dès 4 ans), des ados ou des adultes – et de diffusion ? Yves Bur, député-maire, a eu la volonté de créer cette structure afin de rassembler les différentes écoles de la Ville de Lingolsheim. Théâtre, danse, musique ou arts plastiques : l’idée était de fédérer toutes ces pratiques, sachant que le projet architectural incluait des espaces dédiés à l’aspect pédagogique, mais aussi une salle de spectacles d’une jauge de 126 personnes, permettant de développer une programmation. La Maison des Arts, ouverte en juin 2007, est animée par une équipe de trente enseignants dont je suis chargée. Avant ce poste de directrice, je travaillais dans l’action culturelle en Franche-Comté et je m’occupais de la programmation du Petit Théâtre de la Bouloie, au Crous de Besançon, avec, déjà, ce souci de lier offre artistique et actions pédagogiques.
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Un des buts de votre structure est d’aider tous les publics à trouver « leur place au sein de la société dans laquelle ils s’inscrivent ». C’est-à-dire ? Nous développons la pratique collective qui permet à chacun de trouver sa place dans un groupe, de prendre la parole, d’échanger… toujours avec ce souci d’accompagner des élèves (qui étaient 600 l’an passé, NDLR) de tous âges, dans une logique de création, d’expérimentation et de recherche. Aussi, la programmation s’inscrit dans les problématiques d’aujourd’hui. Cette année, deux spectacles parlent de la notion d’exil : Mes poupées ont beaucoup maigri, elles ne comprennent 20
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pas les langues étrangères (le 20 janvier 2012) de la compagnie Les Acteurs de Bonne Foi, autour d’un texte de la roumaine Aglaja Veteranyi, et Loin / Lontano (le 23 mars 2012) par la compagnie Les Clandestines qui travaille avec deux interprètes du Salento, au Sud de l’Italie.
À Présent que le versant “école” est connu du public, vous cherchez à vous imposer en tant que salle de spectacles. Un pari difficile dans une région déjà riche en équipements culturels ? Nous travaillons en complémentarité avec les autres salles de la CUS et en partenariat avec des événements comme Jazzdor (JeanJacques Avenel Quartet joue Steve Lacy, le 17 novembre) ou Momix (Absurdus de la Compagnie étantdonné, le 3 février 2012). Nous essayons d’orienter notre saison culturelle par rapport aux disciplines enseignées, mais aussi d’accueillir des spectacles de qualité destinés au public de Lingolsheim et, plus globalement, de la CUS. Notre défi actuel est effectivement de nous positionner dans le paysage local avec une programmation exigeante, inscrite dans les préoccupations contemporaines et intégrant des formes pluridisciplinaires : danse / arts plastiques, théâtre / musique, etc. Le dialogue entre l’école et la salle de diffusion est constant… La saison dernière, nous avons accueilli Ainsi surgit… Pan ! de la compagnie Estro qui traite de la question de la métamorphose. Des enseignants de diverses disciplines ont souhaité travailler sur ce sujet. Cette réflexion, en lien avec la programmation, s’est développée dans les ateliers respectifs et dans le cadre de stages. Cette saison, en mai, le groupe de musique improvisée PFL Traject s’inscrira
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Notre défi est de nous positionner dans le paysage local avec une programmation exigeante, inscrite dans les préoccupations contemporaines et intégrant des formes pluridisciplinaires
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dans un projet global de création qui va intégrer un groupe d’élèves d’ici mais aussi de Nancy. Ce travail se fera en collaboration avec le festival Musique Action de Vandœuvre-lèsNancy. Nous avons même lancé un atelier art plastique / danse en 2011 / 2012. Les ateliers “en binôme” sont amenés à se développer du fait de ces rencontres entre disciplines. Cette saison, des rendez-vous seront prévus sur presque tous les spectacles : avec la compagnie Degadezo qui présente Romane – en bateau entre une chaise et un mot, avec Les Acteurs de Bonne Foi, ou Les Clandestines pour un stage autour de la voix…
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D’où l’intérêt de travailler avec la scène locale… Nous suivons en effet des compagnies de la région afin d’installer une relation privilégiée et un travail pédagogique sur la durée. Notre programmation n’est cependant pas uniquement construite autour des propositions régionales. Le 17 février 2012, nous accueillons notamment une version du Quatuor pour la fin du temps d’Olivier Messiaen, mêlant musique contemporaine jouée par l’Ensemble Orchestral Contemporain, originaire de RhôneAlpes, et poèmes déclamés par un slameur. Un nouvel exemple de croisement des genres… Poly 143 Octobre 11
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DOSSIER : Quelles perspectives pour le Parlement européen ?
strasbourg l’europtimiste D’un côté, des députés – britanniques – spécialistes de l’agitprop qui luttent de toutes leurs forces pour la délocalisation du Parlement européen à Bruxelles, s’auto-proclamant porte-paroles de la majorité silencieuse. De l’autre, un statut inscrit dans le marbre des Traités et des partisans de Strasbourg qui jugent le polycentrisme comme le cœur du projet commun. La bataille du siège, engagée depuis longtemps, a connu de récentes péripéties. Perspectives.
Par Hervé Lévy et Daniel Vogel Photos de Pascal Bastien
Deux en fait (Affaires C-237/11 et C-238/11) l’une visant à annuler la délibération du Parlement européen relative au calendrier des périodes de session pour 2012, l’autre pour 2013 2 www.oneseat.eu 3 www.democratieeuropeenne.eu 1
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empête dans un hémicycle : le 9 mars, les députés européens adoptaient, avec une majorité confortable (357 voix pour, 253 contre et 40 abstentions) un amendement proposé par l’un des leurs, le Conservateur britannique Ashley Fox, prévoyant la suppression d’une session plénière en Alsace, pour 2012 et 2013. La levée de boucliers des partisans de Strasbourg fut unanime, Laurent Wauquiez en tête. Alors Ministre des affaires européennes, il évoqua un « coup de canif dans les équilibres des Traités ». Pour Catherine Trautmann, présidente de la délégation socialiste française au Parlement européen, nous « sommes entrés dans une nouvelle phase de la remise en question du statut de capitale de Strasbourg, pourtant gravé dans le marbre des Traités ». En réaction au coup d’éclat d’Ashley Fox, la France a introduit un recours à la Cour de justice de l’UE1. Depuis des mois, les escarmouches se multipliaient en effet dans cette guérilla institutionnelle, la plus marquante étant la publication, en février, du rapport A Tale of two cities, commandité par un autre député britannique, Libéral-démocrate celui-là, Edward McMillan-Scott. Au-delà de l’amusante référence à Dickens, il s’agit d’une charge ultraviolente contre Strasbourg, montrant à grands coups de chiffres l’impact politique, financier, environnemental et social (tout ça !) des multiples lieux de travail du Parlement.
Strasbourg menacée ?
Figure de proue des anti-Strasbourg, le très médiatique Ashley Fox nous reçoit dans son
bureau du onzième étage des bords de l’Ill. Look éminemment british – chemise bleue au col blanc, chaussettes mauves pétantes – il affirme, un sourire rayonnant aux lèvres : « Je suis en faveur d’un seul site pour le Parlement et crois que les parlementaires devraient avoir le droit de voter et de décider eux-mêmes où il doit être. Je n’ai rien contre la ville de Strasbourg, bien plus belle que Bruxelles à mon avis, mais il est ridicule d’avoir deux sites – et même un troisième, Luxembourg – parce que c’est une perte d’argent, 200 millions d’euros par an, et de temps. De plus, les déplacements incessants entraînent le rejet de 20 000 tonnes de CO2. » Arguments mille fois entendus, apparemment frappés du sceau du bon sens, surtout en période de crise économique. Et de poursuivre : « En 1958, Strasbourg était un très bon choix car c’était le symbole de la réconciliation. Aujourd’hui, c’est celui du gaspillage. » Ces chiffres que l’on retrouve partout et que brandissent notamment les instigateurs de la très partisane campagne One Seat2 destinée à recueillir des signatures pour un seul Parlement (plus d’un million à ce jour) sont néanmoins largement contestés, notamment par l’association strasbourgeoise Pour la Démocratie Européenne3 qui met en exergue un document du Parlement, une Résolution budgétaire du 22 avril 2008 expliquant : « Les trois lieux de travail ne coûtent, dans leur ensemble que 155 millions d’euros. Strasbourg ne peut donc pas coûter à lui seul plus de 200 millions d’euros. »
Économie vs Symbole
En ces temps de crise, la banqueroute hellène permet aux thèses économiques de servir d’épouvantail, reléguant l’argument symbolique originel du choix de Strasbourg aux calendes… grecques. Mais pour Catherine Trautmann, ancien Maire et actuelle députée européenne, pas question « d’abandonner ce lien historique sur lequel se sont construites les valeurs de l’Europe, prouvant qu’il était possible, malgré les guerres passées, de vivre ensemble ». Quant au changement de siège, ce serait ouvrir la boîte de Pandore d’une « redistribution de tous les organismes et agences européennes de chaque pays dans un désespérant jeu de chaises musicales ». Ashley Fox, lui, s’y voit déjà. Beau joueur, il imagine contrebalancer la perte du Parlement par « une nouvelle université européenne ou la relocalisation de la Cour européenne de justice pour faire de Strasbourg, qui accueille déjà celle des Droits de l’homme, la
capitale de la Justice ». Tout cela n’est, pour l’alsacien Joseph Daul, député et président du Parti populaire européen (regroupant UMP, CDU…), « qu’une utopie alors que la structure actuelle est tout à fait viable. D’ailleurs, le polycentrisme européen fait sa force. Nous sommes des parlementaires nomades puisque nous nous déplaçons énormément, allant par exemple dans les organismes délocalisés de l’UE comme l’Agence européenne des médicaments à Londres, l’Autorité européenne de sécurité des aliments à Parme, l’Observatoire européen des drogues et des toxicomanies à Lisbonne… »
Manque d’attractivité
D’autres critiques ciblent Strasbourg qui pâtit de son image de ville provinciale – en comparaison de Bruxelles – à la vie nocturne peu entraînante, aux nuits d’hôtel à prix excessifs (l’idée d’une Charte des hôteliers est néanmoins dans les tuyaux) et surtout difficile Poly 143 Octobre 11
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ment accessible depuis la plupart des pays de l’Europe (pas de vol direct la reliant à 21 des 27 pays de l’Union). Du côté de la municipalité, on travaille ces aspects, notamment, dans le cadre du Contrat triennal4 sur l’accessibilité ou en développant les liaisons ferroviaires à grande vitesse (projet Eurocap-rail reliant Bruxelles, Luxembourg et Strasbourg). Roland Ries entend aussi valoriser le futur quartier international du Wacken, proposant de mettre une réserve foncière de 35 000 m2 à disposition du Parlement afin de lui permettre de travailler plus confortablement et de pouvoir s’étendre. Cela ne résout pas les problèmes d’éloignement avec les lobbyistes, think-tanks et autres organes d’influence et de pouvoir concentrés dans la capitale belge. Mais cette distance n’est-elle pas plus saine pour l’indépendance du Parlement ? Reste pour Strasbourg à « accueillir les parlementaires dans les meilleures conditions, dans une ville dynamique et vivante » selon les mots de Jean-Luc Heimburger (dans Le Point éco), président de la Chambre de Commerce et d’Industrie de Strasbourg et du Bas-Rhin. 24
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Optimisme européen
N’en déplaise à ceux qui raillaient le choix de la “marque économique” de Strasbourg, trouvant bien plus sexy les I Amsterdam et autre Be Berlin, le message lancé au printemps dernier était clair. Avec Strasbourg l’Europtimiste, la ville affiche fièrement son statut de capitale européenne et croit dur comme fer en son avenir. C’est avec des actions multiples qu’elle le défend, favorisant, par exemple, des cycles de conférences, les Dialogues de Strasbourg auxquels participent des personnalités prestigieuses (Gorbatchev, Badinter…) ou les Rencontres européennes. Pour Nawel Rafik-Elmrini, seconde adjointe aux relations internationales et européennes, ce sont « des moments privilégiés de proximité entre les Alsaciens et les représentants européens. Renforcer Strasbourg, c’est aussi soutenir des manifestations culturelles des pays assurant la présidence de l’Europe. » Mais un des signes les plus forts – et les plus attendus de Roland Ries – sera la prochaine création d’un « Lieu d’Europe » dont le nom n’est pas encore arrêté, « dédié à la citoyen-
DOSSIER : Quelles perspectives pour le Parlement européen ?
neté européenne, l’information, la connaissance et les débats d’idées ». Le Parlement n’est d’ailleurs pas insensible à cette démarche puisqu’il vient d’accorder à ce Lieu d’Europe le siège du réseau du prix Sakharov pour la liberté de l’esprit5. Et Nawel Rafik-Elmrini n’est pas peu fière de nous annoncer qu’en partenariat avec le Parlement et le Conseil de l’Europe, la Ville de Strasbourg accueillera, en octobre 2012, la première édition du Forum mondial de la démocratie. « L’équivalent du Forum social de Porto Alegre6 et du Forum économique mondial de Davos ; les politiques et spécialistes réunis pour repenser le modèle social et économique à l’aune de ce qui se passe notamment dans les pays arabes ne manqueront pas de faire rayonner la Ville à l’échelon mondial », conclut-elle.
Dans l’attente du jugement
De toute manière, sur le plan pratique, il faudrait une modification des Traités pour remettre en cause le statut de Strasbourg : en attendant le “grand soir”, les pro-Bruxelles multiplient les anicroches espérant rogner, dans les faits, l’importance des sessions strasbourgeoises. L’affaire aujourd’hui pendante devant la justice européenne est fondamentale. Si la Cour donne raison à Ashley Fox et à ses amis, affirmant que « les Traités ne déterminent pas la longueur d’une session, parlant uniquement de douze sessions annuelles », l’étape suivante est déjà prévue : « Le prochain amendement consistera à ne venir à Strasbourg que six fois par an pour douze sessions de deux jours », se plait à annoncer le député anglais. On se souvient néanmoins
que la Cour de Luxembourg avait déjà annulé, en 19977, une délibération du Parlement fixant un calendrier de travail réduit à onze sessions alsaciennes, arguant que Strasbourg est « le lieu où doivent être tenues, à un rythme régulier, douze périodes de sessions plénières ordinaires ». En proposant que deux plénières mensuelles soient réduites de quatre à deux jours (pour se tenir durant la même semaine au mois d’octobre), il ne semble pas qu’Ashley Fox ait tenu compte du « rythme régulier » que prône la Cour. L’esprit de la jurisprudence communautaire semble donc lui donner tort… Mais ce qui inquiète le plus, c’est le retournement progressif de l’hémicycle. Si, deux ans plus tôt, Ashley Fox avait perdu le vote, alors à mains levées, d’un amendement similaire, il a remporté avec plus de cent voix d’avance celui de mars 2011, à bulletins secrets. Preuve s’il en fallait de l’évolution de la question dans les rangs parlementaires. Preuve aussi de la nécessité, pour les partisans de Strasbourg, de se mobiliser, de mettre en avant les qualités de “laboratoire européen” de la ville que décrit Roland Ries : « Je crois qu’on a trop longtemps été sur des positions défensives en privilégiant à l’excès les questions d’infrastructures d’accès, notamment aériennes. Il faut se poser la question de la spécificité strasbourgeoise par rapport aux autres villes qui se réclament de l’Europe et réenraciner notre identité européenne. Il faut imaginer ici l’Europe des peuples, celle des droits de l’Homme et de la démocratie locale »… sous peine qu’elle ne nous échappe.
4 Par le contrat triennal “StrasbourgCapitale européenne, 2009-2011”, l’État s’est engagé financièrement (117 millions d’euros sur un montant global de 244 millions de travaux) pour conforter le statut de Strasbourg, siège du Parlement européen, ville d’accueil de nombreuses institutions européennes et internationales. L’initiative est renouvelée pour la période 2012 / 2015 5 Le Prix Sakharov récompense des personnalités qui luttent contre l’intolérance, le fanatisme et l’oppression – www.europarl.europa.eu 6 L’édition 2011 du Forum social mondial s’est tenue à Dakar http://fsm2011.org 7 Arrêt du 1er octobre 1997, République française contre Parlement européen dans l’Affaire C-345/95
Quelques dates 1952. Strasbourg est le siège de l’Assemblée parlementaire de la Communauté Européenne du charbon et de l’Acier, ancêtre lointain de l’UE 1958. Première session de l’Assemblée parlementaire européenne à Strasbourg qui devient, en 1962, Parlement européen (dont les membres sont désignés) 1979. Élection du Parlement européen au suffrage universel direct 2007. Dans son Protocole n°6, le Traité de Lisbonne (entré en vigueur le 1er décembre 2009) stipule : « Le Parlement européen a son siège à Strasbourg, où se tiennent les douze périodes de sessions plénières mensuelles, y compris la session budgétaire. Les périodes de sessions plénières additionnelles se tiennent à Bruxelles. Les commissions du Parlement européen siègent à Bruxelles. Le secrétariat général du Parlement européen et ses services restent installés à Luxembourg. »
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Image extraite du film de Benoît Maire, Le Berger (2011), présentant un personnage conceptuel qui incarne la « mémoire de la répétition ». © Galerie Cortex Athletico
EXPOSITION – MULHOUSE
l’alchimiste
À Mulhouse, la saison de la Kunsthalle s’ouvre avec la monographie Bientôt le métal entre nous sera changé en or. Des œuvres de Benoît Maire, “plasticien philosophe” qui s’amuse à métamorphoser la pensée en matière.
Par Dorothée Lachmann
À Mulhouse, à la Kunsthalle, jusqu’au 13 novembre (vernissage jeudi 6 octobre à 18h30) 03 69 77 66 47 www.kunsthallemulhouse.com
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B
ientôt le métal entre nous sera changé en or. Un titre poétique autant qu’intriguant pour une exposition qui ne l’est pas moins. « La phrase est tirée du film Le Berger, une des œuvres présentées à la Kunsthalle. Ce qui constitue un problème sera bientôt résolu et deviendra une force : voilà ce qu’elle signifie pour moi », explique Benoît Maire. « Mais il ne s’agit pas d’un résumé de l’exposition… Uniquement un morceau. Je ne pouvais pas mettre en titre le bras d’une sculpture, alors j’ai choisi cet extrait d’une vidéo. » Premier rendez-vous proposé par le curateur Vincent Honoré à la Kunsthalle de Mulhouse, la monographie de l’artiste français (né en 1978) s’inscrit dans une ligne directrice creusant la question du savoir. « Aujourd’hui les savoirs n’ont plus de sources stables, ils naissent parfois de rencontres hasardeuses, par le biais d’Internet, de la publicité. On est dans la coproduction collective d’une culture, c’est ce que je souhaite mettre en relief au cours de cette saison », confie Vincent Honoré. En invitant Benoît Maire à imaginer une présentation inédite, le commissaire entend placer sous les projecteurs « un des artistes les plus brillants de sa génération. En France, son travail reste peu connu car il est assez
complexe. Il est souvent caricaturé comme s’intéressant à la philosophie alors que ses créations sont très sensuelles, avec une extrême beauté formelle. » Sa formation de philosophe, le plasticien la transcende bel et bien en matérialisant la pensée, l’idée, la notion. Mêlant art conceptuel et éléments hétérogènes de la culture populaire, ses œuvres sont traversées, à la fois, par la géométrie, la mythologie, l’histoire du cinéma, de l’architecture, du design. Sculptures, films et installations se succèdent et se répondent à travers cinq espaces distincts et pourtant reliés les uns aux autres. « L’exposition est construite comme une chaîne métonymique : on glisse d’une chose à l’autre en retrouvant dans chaque pièce un élément de la précédente et de la suivante », explique l’artiste. « En soi, elle n’est qu’un outil de ce que le spectateur peut en faire. Son rôle est de recréer cette métonymie », précise Vincent Honoré. La cinquième salle (temporaire) est en réalité celle du cinéma Bel Air, où sera projeté L’île de la répétition, long-métrage de Benoît Maire (samedi 8 novembre à 20h). Quant au vernissage, il donnera lieu à une performance de l’artiste : « une manipulation d’objets concernant la mesure et la lecture de trois récits ».
DOCUMENTAIRE – POLITIQUE
extrême alsace Dans son documentaire Alsace, première à droite, le réalisateur haut-rhinois Christophe Jarosz s’interroge sur la spécificité d’une région où le FN réalise des scores parmi les plus importants du pays.
Par Dorothée Lachmann
À Thann, au Relais cuturel, vendredi 30 septembre À Wittenheim, Cinéma Gérard Philippe, vendredi 14 octobre À Saverne, au Ciné Cubic, jeudi 20 octobre À Benfeld, au Cinéma le Rex, vendredi 21 octobre À Obernai, au Ciné Adalric, mardi 25 octobre À Colmar, au Cinéma le Colisée, vendredi 4 novembre À Karlsruhe (Allemagne), au Centre culturel franco-allemand, mardi 8 novembre À Strasbourg, au Cinéma Odyssée, courant novembre (dans le cadre du “Mois du film documentaire de création”) www.christophejarosz.net
U
n dimanche, au petit matin, sur les routes du Sundgau. La caméra de Christophe Jarosz suit le périple de Patrick Binder, chef de file du FN mulhousien, alors en campagne pour la présidentielle de 2007. De village en village, il colle lui-même les affiches où s’étale le visage de Jean-Marie Le Pen. « Patrick Binder a tout de suite accepté que je le suive, en sachant que je n’étais pas favorable à ses idées. C’est par lui que j’ai pu rencontrer des électeurs du FN, qui ont été d’accord pour témoigner, même si ça n’a pas toujours été évident », raconte le documentariste originaire de Saint-Louis. Son projet voit le jour fin 2006. « J’allais devenir papa d’un enfant métis, et me demandais, dans ce contexte, si je voulais l’élever en Alsace ou ailleurs. L’idée de suivre la campagne du point de vue du staff du Front national m’a paru intéressante pour essayer de comprendre. » Avec pour référence Le Chagrin et la pitié de Marcel Ophüls, Christophe Jarosz s’impose de mettre de côté tous les préjugés, même si sa voix off rappelle en fil rouge les valeurs qu’il défend. « Il n’était pas question de faire un film à thèse, d’interroger les gens à charge, de les diaboliser. Mon but était plutôt de créer un espace de dialogue possible, ensuite, avec les spectateurs. » Son enquête de terrain le porte alors des communes rurales du Sundgau jusqu’aux quartiers sensibles
de Mulhouse, à la rencontre de différentes générations. « Les responsables politiques sont dans une rhétorique bien rôdée, je voulais surtout entendre du ressenti. Alors bien sûr, ceux qui témoignent ne s’expriment pas toujours brillamment, mais est-ce un tabou de dire que l’électorat du FN est d’abord un électorat populaire ? » Les arguments de ces électeurs “en colère” font souvent figure de clichés, la réflexion est simpliste, la démagogie y fait son lit avec délectation. « Mais j’ai du respect pour leur souffrance », glisse Christophe Jarosz. Et son film le confirme, sans porter aucun jugement sur ces témoignages. Sans doute sont-ils déjà suffisamment éloquents… Quant aux raisons de cette forte implantation de l’extrême droite en Alsace, le réalisateur a son idée : « Patrick Binder prétend que c’est la rigueur germanique qui explique cela. Pour ma part, je pense qu’il y a un repli identitaire lié à l’histoire de la région, si souvent occupée. Les dirigeants actuels sont les fils des MalgréNous, ils vivent encore dans la pesanteur de ces silences. Je pense souvent au film Indigènes, qui a débloqué tant de choses pour les anciens combattants d’Afrique du Nord. Ce travail n’a toujours pas été fait concernant les Malgré-Nous, la page ne peut donc pas se tourner. Et c’est en laissant cette question dans l’oubli que fermentent les idées du Front National. » Poly 143 Octobre 11
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HUMOUR – ÉPINAL & SAINT-LOUIS
couscous gaulois Avec Petits chocs des civilisations, l’humoriste et écrivain algérien Fellag ne se prive pas de faire grincer des dents en pratiquant un humour aussi acerbe que salvateur. Rencontre avec un artiste à la plume aiguisée et à la verve chaleureuse.
Par Dorothée Lachmann Photo de Denis Rouvre
À Épinal (dans le cadre du festival Les larmes du rire), au Centre des congrès, mardi 11 octobre 03 29 68 50 23 www.epinal.fr À Saint-Louis, à La Coupole, mercredi 12 octobre 03 89 70 03 13 www.lacoupole.fr www.fellag.fr
Selon un sondage bien connu, le couscous est le plat préféré des Français : dans votre nouveau spectacle, vous imaginez qu’il s’agit d’une déclaration d’amour aux Maghrébins. Un autre sondage accordait récemment plus de 20% d’intentions de vote au FN en 2012. Comme déclaration d’amour, on fait mieux… Le couscous comme preuve d’affection est une douce ironie, bien sûr. C’est juste un prétexte pour spéculer joyeusement sur la difficulté pour nos deux sociétés, nos deux cultures, de se regarder en face. Si, comme je le crois, le public d’un soir au théâtre forme une petite république, Petits chocs des civilisations touillera les ferments des conflits visibles ou refoulés et proposera des solutions humoristiques pour les dépasser. Les citoyens de la république théâtrale de toutes origines se sentiront soudés pendant une heure et demi et rentreront chez eux avec le cœur plein, je l’espère, d’envie d’aimer… même si ça ne dure que quelques heures, c’est déjà pas si mal par les temps qui courent, non ? Vos précédents spectacles étaient ancrés en Algérie. Celui-ci a les deux pieds en France : vous sentez-vous désormais davantage concerné par la réalité française que par votre pays d’origine ? Ce n’est pas aussi catégorique. Je continuerai à faire des allers-retours entre ces deux rives. Quand je vivais en Algérie, mes spec-
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tacles parlaient de l’imaginaire algérien. En France, mon écriture a trouvé sa vraie place : dans l’entre-deux. Avec ce spectacle, elle est beaucoup plus ancrée dans la société française, mais avec les éléments de cet entredeux conflictuel, surchargé de ressentiments, de méconnaissances et d’incompréhensions. C’est un riche terreau pour un homme qui, comme moi, aime croiser les histoires et les émotions qui en découlent. Qu’avez-vous envie de titiller, dans la société française actuelle ? Comme pourrait le suggérer le titre du spectacle, je m’amuse à pointer du doigt les peurs que suscitent les mœurs des autres. La peur est le plus grand producteur d’imagination que l’homme connaisse. La méconnaissance de l’autre fabrique aussi de l’imagination donc de la peur. Petits chocs des civilisations explore ces fantasmes. Vous qui avez dû vous exiler en France après l’explosion d’une bombe pendant l’un de vos spectacles en Algérie, quel regard portez-vous sur le “printemps arabe” ? C’est la mise à mort d’une façon de vivre totalement rétrograde, l’expression d’un ras-le-bol général, l’explosion d’une bombe atomique depuis longtemps comprimée, la naissance de nouvelles générations, l’espoir d’une entrée avec panache dans le monde d’aujourd’hui.
polo graphiste et L. Salles, photo C. Creutz
Relais culturel Erstein Programme 2011 - 2012 Une saison Ă rire ! www.ville-erstein.fr
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THÉÂTRE – PULVERSHEIM
affreux, sales et méchants Découvert en 2008 lors du Festival Premières à Strasbourg, le metteur en scène hongrois Kornél Mundruczó revient, à La Filature, avec Hard to be a god. Une plongée infernale dans le trafic d’êtres humains et la prostitution venue de l’Est, pour les amateurs de chair fraîche à l’Ouest.
cienne mine de potasse Rodolphe, fermée en 1976. Deux semi-remorques s’y installeront, un gradin pour le public leur faisant front.
Humanité en transit
Par Thomas Flagel Photos de Márton Ágh
À Pulversheim, au Hangar Parapluie sur le carreau de la mine Rodolphe, spectacle en hongrois surtitré en français (déconseillé aux -18 ans), jeudi 6 et vendredi 7 octobre 03 89 36 28 28 www.lafilature.org
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on Frankenstein – Project avait éclaboussé la quatrième édition du Festival Premières (co-organisé par Le Maillon et le Théâtre national de Strasbourg) dédié aux jeunes metteurs en scène européens. Anormalité, monstruosité ordinaire et questions identitaires y étaient interrogées dans un container où s’entassaient public et comédiens. Trois ans plus tard, Joël Gunzburger, directeur de La Filature, a l’audace de programmer l’ultraviolent – physiquement et psychologiquement – Hard to be a god. Avec un art certain de la mise en scène, Kornél Mundruczó choisit dans chaque ville accueillant ce spectacle un lieu isolé, à la frange, pour l’inscrire sur les décombres d’un passé industriel et humain. Le voilà donc délaissant Mulhouse pour un hangar de Pulversheim, sur le carreau de l’an-
Trois prostituées hongroises sous le joug de Mamy Blue, leur mère maquerelle, s’entassent dans un camion, cousant de faux jeans Gucci le jour, laissées aux jouissances et aux vices des plus offrant la nuit. Ambiance glauque à souhait, entre exploitation de faux espoirs, esclavage moderne et cruauté sans limites. Lorsqu’un groupe d’hommes se met en tête, pour faire tomber un député européen et tout l’establishment dans son sillage, de tourner une vidéo dans laquelle ils rejoueraient le meurtre et l’inceste dont ils l’accusent, la descente aux enfers se profile. La route est longue. Caméra à la main, les scènes tournées, à l’arrière d’un des camions sont retransmises en direct sur la bâche le recouvrant. Humiliations sordides, sadisme, soumissions et hurlements de douleur à la limite du supportable se suivent tel un reality show hyperréaliste dans lequel des femmes tout juste sorties de l’adolescence sont violentées sans retenue pour d’obscurs desseins. Du roman de science-fiction des frères Strugatsky – célèbres depuis l’adaptation par Andreï Tarkovsky de Stalker – dont est tirée la pièce ne reste plus grand chose si ce n’est le personnage de Rumata, observateur infiltré venu d’une autre planète, qui a pour ordre de ne pas intervenir, quelque soient les événements. Kornél Mundruczó en fait un toubib chargé d’examiner les filles, de les rafistoler après des passes trop violentes et de remédier à leurs éventuelles grossesses. Observer avec
la distance de Dieu et vivre avec cette pesante responsabilité d’assister à un carnage sans rien y faire. La douleur du témoin en corollaire de la joie de la création. Hard to be a god ne s’entend pas que pour Rumata – qui fera ses propres choix : interviendra pour stopper le carnage ou n’interviendra pas ? – mais aussi et surtout pour le public. Au milieu de l’enchaînement de scènes cauchemardesques où règne, entre terreur et effroi, le désespoir, surgissent aussi des instants d’humanité pure. Explosion de sentiments, tendresse fugace et intense de personnages en quête de bribes d’amour et de réconfort, moments de joie partagée autour de beat pop et electro où chacun entonne une chanson (notamment Mamy blue) en jouant des objets qui les entourent… L’humanité se faufile dans les méandres même du sordide, entre un enterrement vivant et un avortement pratiqué avec le squelette d’un parapluie désinfecté au Cif.
La réalité bien en face
Depuis plusieurs années, ce théâtre hyperréaliste n’est plus soutenu en Hongrie où Kornél Mundruczó est plus reconnu comme cinéaste que metteur en scène. En témoignent les
prix reçus pour ses films, notamment Delta, Grand Prix de la Fédération internationale de la presse cinématographique lors du Festival de Cannes 2008. L’univers est le même, la distance est différente. Explorer les faces les plus sombres de l’esclavage moderne, de la prostitution organisée depuis les pays de l’Est pour les grandes capitales de l’Ouest (Bruxelles, Paris, Genève…) avec son cortège de sauvagerie sourde et gratuite dans un espace en déshérence heurte forcément. Le rôle et le bien-fondé d’une violence si crue assénée à des spectateurs n’ayant d’autres choix que de rester en encaissant tout cela de plein fouet ou de partir face à ce qui peut être, parfois, insoutenable questionne. Kornél Mundruczó nous place sciemment dans la position de celui qui observe, tel le Dieu de son titre, sans intervenir. Chacun trouvera sa propre réponse mais une chose est sûre : détourner le regard n’empêchera pas le drame en cours d’advenir. Le malaise dans lequel il nous laisse, une fois la pièce terminée, passe notre bonne conscience au révélateur de la réalité brute et froide d’une Europe générant son lot d’affreux, sales et méchants… bien réels.
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JAZZ – STRASBOURG
afro jojo Célèbre militant de la cause noire – né LeRoi Jones, il changea de nom après la mort de Malcolm X –, musicien et écrivain engagé, Amiri Baraka se produit, à Strasbourg, dans un concert unique en France. Entretien avec cette légende septuagénaire à la verve révolutionnaire.
Par Thomas Flagel Portrait de Pascal Bastien À Strasbourg, à la Cité de la Musique et de la Danse (présenté par Musica, Jazzdor et Pôle Sud), mardi 4 octobre 03 88 39 23 40 www.pole-sud.fr www.festivalmusica.org www.jazzdor.com
Gil Scott-Heron est mort le 27 mai 2011. Quel souvenir gardez-vous de celui qui fut, comme vous, l’une des figures engagées et militantes de la poésie noire, l’un des inventeurs du spoken word ? J’ai rencontré Gil Scott quand il était à l’Université. Il est venu à Newark (New Jersey) pendant notre campagne visant à faire élire Ken Gibson, le premier maire afro-américain de Newark1. J’ai toujours admiré Gil Scott en tant que poète et artiste. The Revolution will not be televised était sa chanson la plus connue dans laquelle il critiquait ce média de masse et la vision du monde qu’il véhiculait… Ce morceau a été le moment phare de ses débuts. Mais il a écrit et déclamé tant de grands textes et chansons. La frustration d’être noir en Amérique, avec autant de talent, l’a mené dans les horreurs de la drogue.
Peuplée à plus de 53% par des Afro-américains, Newark est une des plus grandes villes du New Jersey. Kenneth Allen Gibson fut, en 1970, le premier Afro-américain élu maire d’une ville du nord-est des États-Unis 2 LeRoi Jones, Le Peuple du blues : une musique noire dans une Amérique blanche, Gallimard, collection Folio 3 Wise, Why’s, Y’s : The Griot’s Song Djeli Ya, Third World Press, 1995 1
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Dans Le Peuple du blues2 vous analysiez les origines et le pouvoir libérateur de la musique afro-américaine, critiquant les tentatives de récupération par les blancs. Les choses ont-elles changées depuis 1963 ? C’est l’explication de ses maux qui a changé aux États-Unis. Il y a un langage différent, tout comme l’est l’histoire à la Une. De nombreux changements importants ont eu lieu mais ils ont été le résultat de luttes constantes et implacables, en particulier de la communauté noire contre l’esclavage, les discriminations, les lynchages… encore aujourd’hui, même avec un Président noir. L’Amérique vient de commémorer le 11 septembre et l’on se souvient de votre endiablé Somebody blew up America dans lequel vous rapprochiez le terrorisme dont fut victime l’Amérique et ce-
lui qu’elle-même engendra sur son sol envers les Indiens et Afro-Américains. Le chemin parcourut est énorme depuis les luttes pour les droits civiques. Pourtant, la route semble toujours longue… Oui, avec emphase, nous sommes toujours sur cette longue route. Mais le monde luimême est encore et toujours sur cette route en direction d’une meilleure manière de vivre. C’est pourquoi il y a de si nombreuses guerres, meurtres, coups d’état mais aussi ces mensonges et règles internationales violentes, l’impérialisme et le monopole du capitalisme qui jamais ne créent le bonheur des gens sur terre. Donc la lutte continue ! Comme dans les 60’s, la musique black domine le marché et s’exporte à l’étranger. Vous revendiquiez un héritage culturel africain avec un besoin de reconnaissance identitaire. La jeune génération le revendique encore. C’est ce qui fait la vitalité et la force de la musique black ? La vitalité de la musique black est celle de ses créateurs car, pour la plupart, ils continuent de lutter et d’évoluer dans un monde de troubles dont leur art est le reflet. La musique noire a toujours contenue une part importante de revendication, d’engagement contre la racisme et l’absence de liberté subis par la communauté noire. Dans l’Amérique d’Obama, le combat se perpétue ? Oui, cette lutte est toujours en court. Les années Obama ont engendré de nouvelles sortes de frustrations. La majorité des Afro-Américains est toujours oppressée et exploitée. Le Ku Klux Klan a enlevé ses robes blanches et cagoules pointues pour rejoindre le Congrès américain, le Parti républicain ou le Tea Party.
Vous étiez venu à Strasbourg en 2008, pour un hommage à Curtis Mayfield. Que nous réservez-vous, cette fois, avec votre Quintet ? Le nouveau Quintet avec lequel je viens inter-
prétera des extraits de mon livre Wise, Why’s, Y’s3. Cela parlera des nouvelles luttes mondiales entre la vérité et les mensonges, notamment autour de mon poème Somebody blew up America. Poly 143 Octobre 11
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CLASSIQUE – STRASBOURG
l’archet rayonnant Sol Gabetta vient au PMC nous donner, avec Muhai Tang et l’Orchestre philharmonique de Strasbourg, sa vision, intérieure et incandescente, du Concerto pour violoncelle d’Elgar.
Par Hervé Lévy Photo de Marco Borggreve
À Strasbourg, au Palais de la musique et des congrès, jeudi 27 et vendredi 28 octobre 03 69 06 37 06 www.philharmonique. strasbourg.eu www.solgabetta.com
1 Le deuxième volume de son Progetto Vivaldi est sorti en septembre chez Sony Classical www.sonymusic.de 2 Enregistrement disponible chez RCA Red Seal (2010) réalisé avec le Danish National Symphony Orchestra et Mario Venzago 3 Jacqueline du Pré (1945-1987) est une violoncelliste dont l’enregistrement du Concerto d’Elgar fait aujourd’hui référence
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outes les petites filles rêvent de devenir une princesse. C’était aussi le cas de Sol Gabetta qui découvrit la plus parfaite incarnation de ses aspirations, à neuf ans, en Argentine, où elle vivait, en entendant Christina Walewska jouer le Concerto de Dvořák : « Je me souviens encore du couple qu’elle formait avec son instrument », explique-telle, « mais j’ai surtout été éblouie par sa présence sur scène. On aurait dit une princesse. Ce soir-là, je crois que j’ai décidé de tout faire pour que le violoncelle devienne mon métier. » Elle en jouait déjà depuis quelques années et allait suivre, dans l’avenir, des cours avec deux éminents représentants de “l’école russe”, Ivan Monighetti (à Madrid, puis à Bâle), le dernier élève de Rostropovitch au Conservatoire de Moscou, et David Geringas (à Berlin). Le répertoire de prédilection de la trentenaire ? Aucun, à vrai dire puisqu’elle déteste cette tendance contemporaine de placer les musiciens dans des cases : « Lorsqu’un jeune interprète enregistre deux ou trois fois des pages de Bach, on lui colle l’étiquette de “spécialiste de Bach” ». De Vivaldi1 aux compositeurs contemporains, comme Michel van der Aa ou Pēteris Vasks, en passant par les standards du répertoire, Chostakovitch ou Schumann, elle aime, par-dessus tout, la diversité et les contrastes. Avec l’OPS, elle interprètera le Concerto d’Elgar 2 (1919)… à sa manière : « J’ai le sentiment que beaucoup, même de manière complètement inconsciente, essaient de suivre la voie tracée par Jacqueline du Pré 3 » confie-t-elle. « C’est une tentation qui m’a évidemment aussi habitée, mais qui, rapidement, s’est éloignée. Aller dans cette direction ne mène nulle part : chez elle, toute
l’intensité de la pièce est extériorisée, comme si une puissante chaleur émotionnelle irradiait et irriguait le public. En me plongeant dans la partition, en analysant les indications du compositeur, j’ai voulu retrouver une intensité et un rayonnement plus intérieurs, plus proches, à mon avis, de ce qu’il avait écrit. »
DANSE – STRASBOURG
cérémonie de vie Après Tempest without a body en janvier 20101, Lemi Ponifasio revient au Maillon avec la première française de Birds with Skymirrors. Rencontre avec ce chorégraphe néo-zélandais engagé et engageant.
Par Thomas Flagel Photos de Sébastien Bolesch
À Strasbourg, au MaillonWacken (en co-réalisation avec Pôle Sud), mercredi 9 et jeudi 10 novembre 03 88 27 61 81 www.le-maillon.com Rencontre avec Lemi Ponifasio, mercredi 9 novembre, à l’issue de la représentation
Birds with Skymirrors est une sorte de méditation écologique ou environnementale traitant de l’impact de l’homme sur la planète. J’ai l’impression que, pour vous, la danse n’est pas une performance mais la vie et son partage… Vous avez raison, la danse est vie, et donc une conscience de la relation. La danse est tout. Elle inclut la performance mais je ne viens pas à Strasbourg uniquement pour servir la performance, la danse, des définitions ou des manuels d’art. Je voudrais être utile à découvrir pourquoi nous faisons de la danse ou de l’art. Je pense que c’est ce que doit être la performance. Votre travail n’a pas pour dessein de donner des solutions. Il semble s’attacher à expliquer comment nous pouvons être profondément plongés dans notre être et faire face au monde… La réalisation personnelle de l’individu est la raison pour laquelle je fais de la danse. Que signifie être humain ? Que signifie avoir un frère, se retourner autour et regarder dans
les yeux de son fils et se poser cette question à soi-même : qu’est-ce que signifie être votre propre père ? Être consciemment vivant. Dans Tempest without a body, Tame Iti, un des leaders indépendantistes maori, parlait dans sa propre langue. Le public français ne pouvait comprendre ce qu’il disait. Pourquoi avoir choisi de ne pas traduire ses propos à l’aide du surtitrage ? Mon théâtre n’est pas là pour conforter votre image du monde, mon théâtre est plutôt situé entre l’espace de vos mots, entre l’espace de vos pensées comme l’événement du lever de soleil. Ce n’est pas une question de contrôle. C’est la possibilité de ce qui peut naître. Est-ce la même chose dans Birds with Skymirrors ? Oui, mais je fais un théâtre où tout n’est pas question de langage théâtral ou de langage de la langue. Il est question de s’ouvrir à l’extérieur en direction du cosmos.
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DANSE – STRASBOURG
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L’imagination, la constante sensation de ce qui n’est pas ici, la sensation d’une autre alternative. C’est la libération, l’espoir. L’imagination fait de la vie un acte merveilleux
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C’était un engagement fort de placer Tame Iti sur scène. Parlez-nous de cette vision d’oiseau avec dans leur bec des bandes magnétiques sur l’atoll de Tarawa (au sud des Îles Marshall) qui est à l’origine de Birds with Skymirrors… Cela faisait longtemps que je voulais faire ce travail. La majeure partie des membres de ma compagnie vient des îles du Pacifique qui s’amenuisent à cause de l’élévation du niveau de la mer. Donc je passe du temps sur ces îles car elles me fournissent le sens le plus fort de la fragilité de notre planète, de l’urgence et, bien sûr, le triste sentiment que ces îles sont aussi les foyers de nombreux membres de ma compagnie MAU. Rencontrer les oiseaux sur l’Île de Tarawa m’a inspiré la métaphore poétique nécessaire à la création de cette pièce. Le Pacifique est loin des préoccupations des Français. Parlez-nous de l’augmentation dramatique de la pollution et des déchets dans cette partie du globe que vous présentez de manière métaphorique ? Oui, indirectement mais je ne veux pas parler des déchets ou de la nécessité de nettoyer toutes les toxines des rivières et des mers ou encore de la destruction du Pacifique par les Français avec d’absurdes essais nucléaires. Comme je le disais précédemment, dans Birds with Skymirrors, je parle de connection avec la Terre. Je parle des valeurs de l’âme : vénération, empathie, tolérance, harmonie, partage, reconnaissance que l’existence ne tourne pas qu’autour de moi-même. Les pro-
grès de l’évolution humaine ne sont peut-être pas l’invention des derniers smart phones ou des bombes intelligentes mais plutôt la manière dont nous pouvons vivre nos vies, avec sagesse, avec tous les êtres sensibles. Dans un monde dominé par la consommation et la technologie, nous ne savons plus faire preuve d’empathie. Nous nous sommes isolés de la Terre et donc les uns des autres. Sans vouloir réduire votre travail à vos origines samoanes, en quoi cela influence-t-il votre conception de la danse, de l’art et votre manière de voir le monde ? Je ne suis pas Samoan uniquement depuis ma naissance. J’ai été construit comme un Samoan longtemps avant de naître. Je viens de la chair de ma mère qui vient de la pluie du ciel et de la chair de sa mère et de la nature. Bien sûr, mon travail est influencé par ma vie samoane mais mon travail s’inspire du monde entier. J’ai, par exemple, beaucoup pensé à La Conférence des oiseaux2, la Vénus de Botticelli, le printemps arabe, le Tsunami japonais et la flaque d’huile de British Petroleum dans le Golfe du Mexique lorsque je créais Birds with Skymirrors. Ces événements du monde réel font véritablement partie de ma vie quotidienne en tant qu’être humain. Vous vous décrivez comme un « activiste humain ». Vos chorégraphies mélangent une grande tension à un éventail de mouvements et d’images rappelant les figures animales, les
croyances ancestrales, les connections ou déconnections d’avec la nature… Nous vivons dans un monde qui n’est pas uniquement peuplé d’Hommes. Le théâtre est trop centré sur l’humain. Je voudrais un théâtre qui contiendrait tous les amis de mon enfance : les geckos (une espèce de la famille des lézards, NDLR), les serpents, les chiens, les tortues, les dieux et naturellement les humains. Par conséquent, je veux faire de la danse un activateur de conscience pour tous les êtres. La danse relève de cette sensibilité relationnelle. Le mouvement n’est qu’un petit pas vers la danse. Le rythme et les chants traditionnels tiennent une place importante dans vos spectacles qui s’approchent de la cérémonie, du rituel. Est-ce un moyen pour vous de nous relier à un passé ancestral et à la spiritualité, deux choses que la plupart des européens ont perdu ? Je n’essaie pas de vous renvoyer au passé. Je cherche en fait à rester dans le présent. Chaque jour qui passe est emprunt de spiritualité et le présent est, bien entendu, le moment le plus mystérieux. La danse et le théâtre reconnaissent ce moment, ce lien mystique entre l’humain et le cosmos. C’est l’origine de la danse, du théâtre et de l’imagination. L’imagination, la constante sensation de ce qui n’est
pas ici, la sensation d’une autre alternative. C’est la libération, l’espoir. L’imagination fait de la vie un acte merveilleux. Je ne crois pas que vous ayez perdu quoi que ce soit. C’est un choix que vous pouvez toujours faire. Huit danseurs et trois danseuses jouent et chantent sur scène. Quel est votre processus de création avec eux ? Je fais de la danse principalement avec ceux qui sont disponibles. Je n’ai pas choisi ces huit danseurs et trois danseuses après des auditions. Ce sont des gens qui sont comme une sorte de famille pour moi. Le “processus créatif” résulte de la façon dont ils vivaient leur vie avant de venir au théâtre. Les danseurs, la danse et les chants servent à l’activation de l’espace. L’activation de l’espace n’est pas tant un processus de création qu’un processus d’éveil de la sensibilité, de prise de conscience. Par conséquent, le processus ne consiste pas à fabriquer quelque chose au travers de l’improvisation artistique, mais plutôt à déterminer la manière de présenter un corps cérémonieux afin de mettre en valeur l’espace. Mettre en scène signifie prêter attention à l’espace et amener l’interprète à un corps ou un état sacrificiel. Dans ce sens, le sacrifice est un corps communicatif, un corps offert au Va3.
Voir Poly n°130 – www.poly.fr Recueil de poèmes médiévaux en langue persane du soufi Farid Al-Din Attar 3 Lemi Ponifasio définit ce terme comme « le rapport cosmologique conscient avec toute existence » 1
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EXPOSITION – SÉLESTAT
c’est pas bientôt fini ? La dix-neuvième édition de Sélest’art s’intitule ironiquement Encore une ! Noch eine !, clin d’œil d’une manifestation confrontée aujourd’hui à la multiplication d’événements analogues. Rencontre avec ses commissaires.
Par Emmanuel Dosda
À Sélestat, dans divers lieux (au Frac Alsace, à la Médiathèque Intercommunale, la Bibliothèque Humaniste, dans la cave Frœbel…), du 24 septembre au 30 octobre 03 88 58 85 75 www.selest-art.fr
Michel Gouéry, Scaphandre degré zéro, 2011 Terre cuite émaillée, Courtsesy Galerie Anne de Villepoix, Paris
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as de fil rouge » pour cette édition où « l’œuvre prime ». Pas de thématique afin d’éviter d’« altérer le propos des artistes », selon Otto Teichert, directeur de l’École supérieure des Arts décoratifs, un des cinq commissaires avec Hans Dünser, directeur du Kunstraum Dornbirn (centre d’art en Autriche), Olivier Grasser, directeur du Frac Alsace, Sophie Kaplan, directrice du Crac Alsace, et Pierre-Olivier Rollin, directeur du B.P.S.22 de Charleroi (espace d’art en Belgique). Son titre : Encore une ! Noch eine ! Encore quoi ? Encore une édition avant la vingtième ? Encore une exposition d’art contemporain dans une région riche en manifestations ? Encore un dialogue instauré entre patrimoine et création d’aujourd’hui ? Autant de remarques que se sont faites ceux qui ont
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choisi d’exposer un artiste par lieu, sans tomber dans le piège de ce qu’ils nomment l’« effet antiquaire » d’une “belle œuvre dans un bel écrin”. Les commissaires de la biennale créée en 1984 – l’une des plus anciennes de France – la questionnent. « Vers quoi va-t-elle, comment la singulariser, quels sont ses acquis, ses routines et ses tics ? », se demande Sophie Kaplan, citant le travail de Michael Dans qui consiste en l’apposition de phrases faites de lettres découpées sur les façades. L’une d’elles dit « Si tu continues, tu pourras le regretter ! » « Un pied de nez, une boutade sur toute la vacuité de notre métier et de celui d’artiste. » La biennale se pose des questions existentielles, mais apporte des réponses poétiques et humoristiques, pop et fun.
Installation de Tony Matelli par Sophie Kaplan
Susanne Bürner, 50.000.000 Can’t Be Wrong, 2006 Vidéo expérimentale, noir et blanc, 6’24’’, Allemagne – Collection BPS 22, Charleroi
50 000 000 Can’t Be Wrong de Susanne Bürner par Pierre-Olivier Rollin « Il s’agit d’une vidéo à la fois fascinante et angoissante, une compilation de séquences qui montrent des femmes complètement hystériques en gros plan. On n’entend quasiment pas le son, recouvert par une bande musicale, et ne voit jamais la star, même si on devine que c’est Elvis Presley, le titre de l’œuvre renvoyant au slogan publicitaire des années 1950 “50 000 000 Elvis Fans Can’t Be Wrong”. Cette foule devient inquiétante, elle perd la raison et adule un personnage qui a un pouvoir énorme… alors que nous sommes environ 15 ans après la Seconde Guerre mondiale. 50 000 000 Can’t Be Wrong questionne quant à la dictature du nombre. C’est une mise en abyme : une manifestation d’art contemporain doit-elle, d’office, attirer un grand nombre de visiteurs ? Les meilleures biennales sont-elles les plus chères ? Cette œuvre, la première du parcours, pose les principes de cette édition. Au-delà de ça, j’ai un héritage pop que j’assume tout à fait. Arrivé à l’art par Warhol, je revendique ce lien entre les différentes formes de culture : arts plastiques, musique et cinéma. La pop culture sera également présente avec Emilio López-Menchero qui diffusera le cri de Tarzan, héros hollywoodien, dans les rues de Sélestat. Il annoncera l’événement comme le faisaient les crieurs dans les villes médiévales. Tarzan n’est d’ailleurs pas si incongru que ça ici, à proximité de la Montagne des Singes… » Au Caveau Sainte-Barbe
« Dans la plus pure tradition de la sculpture américaine, ce plasticien néo-pop souvent comparé à Duane Hanson fait des sculptures à l’accès direct. Il intervient avec une série de pièces qu’il a imaginée comme une avancée dramatique, quasiment cinématographique. Dans la première salle, le visiteur découvre un entassement de cartes à jouer, de canettes de Coca, de vieux cartons de bières ou de boîtes de pizzas, laissés par des marginaux ou des ados. Il s’aperçoit alors que ce sont des sculptures en bronze ou en laiton. Tout à l’air vrai, mais tout est faux, c’est du fake plus vrai que nature. Dans la seconde salle, la tension monte : un billet est en train de brûler et le responsable vient sans doute de filer. Dans la dernière, le visiteur tombe nez à nez avec une jeune somnambule très réaliste, déstabilisante. Il pourrait s’agir de vrais objets, de vrais personnages, mais Tony Matelli nous interroge quant à leur statut, celui des œuvres d’art qui imitent la réalité. La cave renvoie au Mythe de la caverne et nous plonge dans des questions fictionnelles et métaphysiques. Cette installation extrêmement narrative porte un regard acide sur le rêve américain, de la société de consommation… Elle fait écho à l’œuvre de The Plug (voir Poly n° 142) qui travaille sur les exclus de la société. » À la cave Frœbel
Tony Matelli, Sleepwalker, 2008 Sculpture. Collection Art Foundation Mallorca
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THÉÂTRE – STRASBOURG & OBERNAI
chatte sur un toit brûlant Dans un huis-clos anxiogène, une femme est prise entre deux feux : son ex et son actuel mari lui demandent des comptes. Durant les répétitions, Cyril Pointurier (Cie Orchestre Seconde) évoque sa mise en scène de Créanciers d’August Strindberg. Par Emmanuel Dosda Photo de Benoît Linder À Strasbourg, au Taps Scala, du 4 au 9 octobre 03 88 34 10 36 www.taps.strasbourg.eu À Obernai, à L’Espace Athic, mardi 8 novembre (dans le cadre de la tournée des Régionales) 03 88 95 68 19 www.espace-athic.com
L
a lumière est douce sur le plateau du Taps Scala, mais la tension monte entre les protagonistes. Pendant leur dialogue, Tekla (Laure Wolf) ramasse machinalement la veste que Gustave (son mari interprété par Gaël Chaillat) vient de jeter au sol. Cyril Pointurier bondit et s’adresse à la comédienne, tournoyant comme un avion : « On dirait que Tekla va lancer une lessive ! » Tekla ne peut pas commettre ce geste : elle n’est pas soumise mais, au contraire, terriblement moderne (le texte date de 1888), libre, indépendante… Le metteur en scène évoque le point de départ de l’intrigue : « L’aigreur et la rancœur de l’ex-mari remonte et il commence à imaginer le projet infâme de prouver au mari actuel que sa femme ne l’aime pas. » Les deux hommes s’entretiennent et sympathisent avant de, tour à tour, venir réclamer leur dû, estimant avoir beaucoup donné et peu reçu. « Quel amour on veut offrir, quel amour on veut recevoir ? La créance apparaît quand il y a ce décalage. » Médiocres, ils viennent quémander la monnaie de leur pièce. Tekla se retrouve « dans la ligne de mire. Mais cette cible leur échappe, non pas parce qu’elle est fuyante, mais parce qu’elle est hors de leur portée. Cette mesquinerie, cette comptabilité qu’ils sont en train de dresser les éloignent davantage. »
Avec cette pièce en trois actes, l’auteur suédois parvient, selon Cyril Pointurier, « à disséquer ce qui est moteur dans les sentiments, ce qui nous anime dans le désir, dans le rapport à autrui. Ici, l’apparent canevas d’un théâtre bourgeois du XIXe devient prétexte à initier une pièce sur l’énorme effort de sincérité de chaque individu envers ses propres émotions. Pour comprendre l’autre, il faut rechercher au plus profond de soi. » D’après Strindberg (« charnellement, émotionnellement et artistiquement dépendant aux femmes »), l’amour ne doit pas être un carcan, « mais quelque chose qui libère les individus ». Très intéressé par les auteurs (Ibsen) ou cinéastes (Bergman ou Lars von Trier) scandinaves, Cyril Pointurier, qui mit en scène Nietzsche ou Tennessee Williams, aime, comme eux, interroger la liberté individuelle… dans cet espace confiné où chacun joue un rôle : le couple. Vidéoprojecteurs utilisés comme simples sources lumineuses afin de « créer un rythme, des couleurs, une fébrilité du plateau », présence de l’élément liquide permettant « à la sensualité de s’exprimer »… la scénographie « sous expressive » met en exergue le jeu des comédiens. « J’essaye d’expliquer à l’éclairagiste, au scénographe ou même au metteur en scène (sic.) que tout repose sur les interprètes », dit-il en riant, heureux de parvenir, avec Créanciers, à « laisser libre champ à [s]es musiques personnelles ». 40
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destination
luxembourg
La Philharmonie © Wade Zimmerman
Des banques, des institutions européennes… et rien d’autre ? Il suffit d’aller visiter la cité de Luxembourg pour faire voler ces clichés tenaces en éclats.
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nviron 100 000 habitants et un dynamisme à faire pâlir bien des villes de plus grande importance : voilà comment Luxembourg se présente aujourd’hui. Évidemment, son centre historique, classé “patrimoine mondial de l’humanité” par l’UNESCO, fascine avec son passé de “cité forteresse” dont les premiers bastions ont vu le jour en 963. Au fil des siècles, les murailles se sont renforcées et complexifiées. Vauban y a posé sa patte habile. Défenses et remparts permettent une promenade qui attire les foules puisque les premières
attractions touristiques de la capitale sont les Casemates du Bock et de la Pétrusse. Luxembourg est cependant une terre de contrastes : depuis quelques années, l’architecture contemporaine attire de plus en plus de visiteurs. Des bâtiments européens (la Cour de justice en tête) au Mudam (Musée d’Art Moderne Grand-Duc Jean), c’est à une étonnante floraison à laquelle on a pu assister. En témoigne le bâtiment de la Philharmonie Luxembourg (ou Salle de concerts grande-duchesse JoséphineCharlotte), inauguré en 2005. Cette œuvre de Christian de Portzamparc est
ceinte de 823 colonnes d’acier blanc réparties en plusieurs rangées comme un sas d’entrée symbolique et grandiose dans l’univers de la musique. En 1995, Luxembourg avait été désignée Capitale européenne de la culture. Aujourd’hui, la vie intellectuelle et artistique y est extrêmement dense. Octobre pourrait bien être le mois idéal pour y faire un petit tour… (H.L.) Pour plus de renseignements, consulter l’Office du tourisme de la Ville +352 222 809 – www.lcto.lu
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DESTINATION LUXEMBOURG
high level Pluridisciplinaire (opéra, théâtre, musiques, danse…), le Luxembourg Festival programme cette année une trentaine de productions de très (très très) haut niveau.
À
côté de la création mondiale de Der Turm, opéra de Claude Lenners (6 et 8 octobre au Grand Théâtre), remarquons deux programmes différents d’une des meilleures phalanges au monde, le Cleveland Orchestra sous la baguette de Franz Welser-Möst (27 et 28 octobre à La Philharmonie) ou un récital de la sublimissime Magdalena Kožená dédié à Ravel, Debussy, Britten, Fauré et Messiaen (13 novembre à La Philharmonie). Pour la danse, impossible de manquer les deux programmes de Bianca Li, Le Jardin des Délices (11 octobre au Grand Théâtre) création inspirée du triptyque de Jérôme Bosch exposé au musée du Prado, à Madrid. Mêlant plaisir et vices, elle y dénonce le strass et le paraître s’imposant jusqu’aux plus hautes sphères de notre société (un tout petit Président et sa femme à guitare sont ici singés). L’ensemble possède une poésie qui s’exprime jusque dans l’incarnation animale de l’être. Elektro Kif (13 et 14 octobre au Grand Théâtre) sera la seconde pièce présentée dans laquelle Bianca Li se
souvient de sa découverte de la danse electro, un élan de liberté et d’excitation qu’elle restitue dans des tourbillons de bras endiablés. Notre coup de cœur ? Le récital de la mezzo Anne Sofie von Otter (4 octobre à La Philharmonie) dédié aux Lieder composés à Terezin (Theresienstadt, en allemand) un “camp modèle” situé à une soixantaine de kilomètres de Prague, qui servit aux nazis de vitrine visant à mystifier la communauté internationale où l’on retrouvait la fine fleur de la création musicale des années 1930. Avec des œuvres méconnues de Viktor Ullmann, Erwin Schulhoff ou encore Pavel Haas, voilà des jaillissements soudains de vie, comme si, même dans le neuvième cercle de l’Enfer, le bonheur et l’amour étaient la plus belle manière de lutter contre la barbarie. Dans différents lieux, du 1er octobre au 30 novembre www.luxembourgfestival.lu
Le Jardin des délices © Laurent Philippe
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subtiles
translations Lost in Translation, film de Sofia Coppola bien connu : ces trois mots constituent la matrice de cette exposition collective, nommée, de manière antonymique, Found in Translation, chapter L. Elle constitue le troisième volet d’un concept curatorial initié en janvier 2010 par Emmanuel Lambion. Tout cela pour dire que le dénominateur commun des œuvres présentées est à trouver dans le concept de translation qui, pour le commissaire, « rend compte et caractérise bien des pratiques et recherches de l’art actuel », à une époque « où le sens se love souvent dans l’interstice ». Au Casino Luxembourg, jusqu’au 8 janvier 2012 www.casino-luxembourg.lu
Robert & Shana ParkeHarrison, Edison’s light, 1998 (Courtesy of Jack Shainman Gallery, NY and the artist)
artistes & inventeurs Avec Mondes inventés – Mondes habités, le Mudam propose une exposition collective en forme de réflexion sur le lien entre art et technique. Quatre volets et une vingtaine de plasticiens… Certains ont imaginé des machines transcendant l’utilitarisme : des étranges appareillages érotiques de Jan Švankmajer au personnage mystérieux de Robert et Shana ParkeHarrison qui, avec ses prothèses improbables semble arpenter le monde, en quête de compréhension. L’expérience sera au cœur de la deuxième partie de l’exposition : observation de la nature chez Panamarenko ou science physique amusante pour Chris Burden. Suivra une réflexion sur l’exploration des limites de l’univers avec notamment la plongée dans le cosmos qu’autorisent les gravures hyperréalistes de Vija Celmins. Au Mudam, du 8 octobre au 15 janvier 2011 www.mudam.lu Aline Bouvy & John Gillis, Ne t’inquiète pas, je ne te veux aucun bien, 2010 (collection privée)
c’est beau un musée,
sous la ville
Visites guidées, rencontres avec des artistes, performances dansées, concerts… Cette onzième Nuit des musées organisée par D’stater muséeën, groupement des Musées de Luxembourg-Ville, permettra de découvrir les établissements participants. Rajoutons que chaque musée réserve à ses visiteurs une surprise culinaire.
Le Musée National d’Histoire et d’Art propose, entre le 21 octobre et le 2 février 2012, une exposition intitulée Sous nos pieds. Sous-titrée L’archéologie au Luxembourg de 1995 à 2010, cette vaste rétrospective présente des découvertes majeures de la préhistoire aux temps moderne. À la rencontre de l’oppidum celtique du Titelberg, des ateliers sidérurgiques médiévaux de Peppange-Genoeserbusch ou encore les restes du monument funéraire du gouverneur du Luxembourg Claude de Neufchâtel.
la nuit
Dans tous les musées, samedi 8 octobre de 18h à 1h du matin www.nuit-des-musees.lu www.statermuseeen.lu
www.mnha.public.lu
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DESTINATION LUXEMBOURG
marque de fabrik À
moins de vingt kilomètres au sud de la capitale,Esch-sur-Alzette, ancien centre sidérurgique du pays en plein cœur des “terres rouges”, a vu naître en 1983 une expérience originale : la Kulturfabrik. Installé dans les bâtiments de l’ancien abattoir municipal, le centre culturel est bien plus qu’une salle de spectacles où sont programmées plus de cent manifestations annuelles (musique, théâtre, danse…). Son crédo ? Faire se rencontrer les disciplines et les gens, susciter des envies, générer le débat culturel, entrer en interaction avec le tissu social local. Scène phare des musiques actuelles – avec un accent porté sur le métal et le rock – la KuFa accueillera cette année des groupes comme The Melvins (27 octobre) : trente ans de carrière, et ces pionniers du grunge, influencés par le punk hardcore des eighties et des formations historiques comme Black Sabbath, sont toujours
d’attaque pour redonner des couleurs au métal. Notre coup de cœur du mois ? Magie noire (18 octobre), un spectacle proposé par de jeunes artistes venus des favelas de Recife : entre théâtre, danses afro-brésiliennes, hip-hop, capoeira et percussions. Époustouflant ! À Esch-sur-Alzette, 116 rue de Luxembourg +352 55 44 931 www.kulturfabrik.lu
Date unique Le 21 octobre, la Rockhal d’Eschsur-Alzette accueille deux légendes pour le prix d’une : Bob Dylan et Mark Knopfler (ex Dire Straits) partagent en effet la scène pour un concert unique dans la région… www.rockhal.lu
Se loger Châtelet
Un hôtel charmant au rapport qualité / prix imbattable. Entre gare et centre ville, un établissement lumineux. Si la chambre d’angle est libre, n’hésitez pas ! www.chatelet.lu
Le Sofitel Grand Ducal
Les chambres avec vue sur le Grund, la “ville basse”, sont épatantes. Contemporaines et de bon goût, elles ressemblent à une bulle chic. www.sofitel.com
L’Albert premier
Un hôtel intimiste, décoré avec une élégance… So british. www.hotelalbertpremier.lu
Manger Chiggeri
Trois ambiances. Un café sombre, à la déco alchimique et Mitteleuropa et Le Jardin d’hiver, d’une séduction toute orientale. À l’étage, un restaurant à la gastronomie enthousiasmante et originale. www.chiggeri.lu
Bacchus
Une institution ! Les pizzas sont, comme souvent à Luxembourg, parmi les meilleures que l’on ait dégusté hors d’Italie. L’endroit idéal pour voir à quoi ressemble cette ville pimpante et énergique. www.resto.lu/bacchus
Mosconi
Sa réputation a dépassé depuis longtemps les frontières du pays… Deux Macarons au Guide Michelin. What else ? www.mosconi.lu
Sortir Le Palais
Un établissement récent qui ne désemplit pas. Sur deux étages, toute la faune clubbeuse et chic se presse. Un point de chute du milieu de nuit avant des endroits plus noctambules encore comme le VIP ou le White… www.lepalais.lu
Cat Club
Pénétrer au Cat Cub, c’est entrer dans une institution… qui n’est pourtant pas facile à trouver. Mais une fois que vous avez traversé le rideau, la magie opère. www.catclub.lu
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Tant à découvrir Temps à savourer Durant la matinée, laissez-vous séduire par le charme de la ville-forteresse millénaire, classée patrimoine mondial par l’UNESCO. A midi, savourez un verre de bon vin de la Moselle luxembourgeoise autour d’un menu gastronomique. L’aprèsmidi, profitez d’une séance de shopping avec des enseignes internationales. Terminez la soirée sur un air d’opéra au Grand Théâtre de la Ville ou à la Philharmonie. Découvrez les contrastes enchanteurs de la ville de Luxembourg!
Un endroit irrésistible pour vos séjours gastronomiques dans les Ardennes luxembourgeoises
Dirbach Plage Auberge de la Sûre
00 352 2695 92 39
dirbach@internet.lu – www.dirbach.eu
Pour plus d’informations: Luxembourg City Tourist Office Tél. (+352) 22 28 09, touristinfo@lcto.lu www.lcto.lu
SPECTACLE – STRASBOURG & MULHOUSE
le rêve et son double James Thiérrée est le descendant d’une grande lignée. Avec Charlie Chaplin pour grand-père, difficile de ne pas embrasser la vie d’artiste. Dans Raoul, il se présente, seul sur scène, pour un voyage mystérieux dans son royaume intime.
Par Thomas Flagel Photos de Richard Haughton
À Strasbourg, au Théâtre national de Strasbourg, du 6 au 16 octobre 03 88 24 88 00 www.tns.fr À Mulhouse, à La Filature, du 19 au 21 octobre 03 89 36 28 28 www.lafilature.org
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é “petit-fils de”, James Thiérrée embrasse la vie de saltimbanque à quatre ans avec Le Cirque Imaginaire de ses parents. Depuis, il a fait son chemin, pris son envol sur le devant de la scène, récoltant honneurs et estime dont quatre Molière pour la seule Symphonie du hanneton, en 2006. Trois ans plus tard, il délaisse ses acrobaties théâtrales pour le septième art. Tony Gatlif retient son visage émacié au regard clair et à la chevelure grisonnante pour incarner l’un des tziganes de Liberté. Barbe naissante, vêtements amples et déguenillés, l’esthétique de son Raoul n’y est pas étrangère. Après plusieurs spectacles collectifs et cette incartade cinématographique, le comédien / artiste / metteur en scène se lance seul en scène, accompagné quasi-schizophréniquement par d’autres lui-
même au cours d’apparitions / disparitions rythmant un spectacle pour lequel il use de ressorts et trouvailles incroyables afin de tenir son public en haleine.
L’architecture du rêve
Sur un plateau proche de l’univers d’un déluge, une structure constituée de poteaux métalliques est ceinte d’immenses draps, voilures de bric et de broc comme tirées d’un naufrage. Raoul est là, voyageur solitaire aux pieds meurtris et au baluchon usé. Un air de Schubert et la déconcertante facilité d’une vrille tourbillonnante donnent le ton d’un spectacle où la poésie le dispute à l’onirisme. James Thiérrée ne fait jamais les choses à moitié et condense tout son art, convoquant les dieux du mime et l’humour des cartoons,
la science du tempo et des effets de surprise. Comme si la pesanteur n’avait pas prise sur lui, il se jette à l’assaut de la structure, chutant au ralenti depuis son sommet. Tout un poème. Dans le monde de Raoul, on manipule à vue. Architecte de son propre rêve – en estil le captif, s’y complait-il ? – le voilà tirant des fils invisibles faisant se déployer les voiles enserrant sa cabane de Robinson. Comme par magie, les roseaux métalliques s’effondrent en cadence puis s’envolent au loin. Signe des très grands, tout paraît simple, surprenant, mélange de fraîcheur d’une première fois et d’évidente aisance.
Le voyage extraordinaire
S’il est quasiment seul en scène, se débattant parfois avec lui-même, un bestiaire créé pièce par pièce par sa mère, Victoria Thiérrée-Chaplin, lui rend visite. Un oiseau squelettique ressemblant à un épouvantail animé, une méduse de tissu et de voiles ou encore un énorme poisson, un poil trop collant, participent à cette chevauchée fantastique. Pas très loin de l’univers d’un Terry Gilliam. Autre apport familial, le titre du spectacle, tiré d’un numéro du père Thiérrée qui racontait les aventures d’un poisson neurasthénique, sur baguettes, qui pensait à “se jeter en l’air”… Venu comme une boutade, le clin d’œil est resté, Raoul prenant corps, se libérant de sa tour et se dépouillant petit à petit des assauts de son subconscient et de son imaginaire. Le tout sans grands sentiments ni fols éclats. Il
leur préfère une sensibilité retenue, savamment entretenue, puissamment ténue. On voit le vent, on vit l’aurore et la fin du jour avec l’enchantement des contes de fées. Il faut dire que le moindre geste est exploré dans sa dimension comique et conflictuelle : croiser les jambes, tenir un livre ou poser sa tête dans sa main deviennent des missions improbables. Et quelques pas de danse plus loin, c’est Charlot et son pastiche du music-hall qui est convié.
Me, Myself and I
Face à son propre reflet dans le miroir, Raoul contemple l’abîme de cet étrange lui-même ondulant sous ses yeux. Avare de mots – une poignée seulement est prononcée dans la pièce – James Thiérrée se fait l’inventeur, le destructeur et le re-configurateur de son monde… avant, une nouvelle fois, d’en rire. Mettant en scène sa tentative grossière de cacher un technicien apportant une échelle nécessaire à un ajustement du décor, il nous emporte dans un tourbillon de spirales, de mouvements sans rupture, de la chute à l’élévation, explorant avec la gracilité d’un lézard les barreaux de l’échelle. Comme une métaphore de sa douce mais irrésistible lutte au corps à corps avec cet univers muet qui l’enserre et le hante, Raoul est ce rêveur magnifique qui sommeille en chacun de nous, coincé dans la solitude de son royaume intérieur, dont l’imaginaire, porté en étendard, sera le salut. Poly 143 Octobre 11
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THÉÂTRE – COLMAR
la vérité si je mens
Louvoyant entre mensonge et vérité, le spectacle Bluff est d’abord un projet atypique, régi par le chiffre trois. Un jeu auquel se sont prêtés autant de metteurs en scène, dont le directeur de la Comédie de l’Est, Guy Pierre Couleau.
Par Dorothée Lachmann Photos de André Muller
À Colmar, à la Comédie de l’Est, du 18 au 21 octobre 03 89 24 31 78 www.comedie-est.com
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rois pièces de 33 minutes, trois Centres dramatiques, trois metteurs en scène, trois comédiens, dans un espace trifrontal… Le projet est singulier. Inédit, même. Tout est parti d’une commande de Vincent Garanger, codirecteur du Préau (dans le Calvados), à l’auteur Enzo Cormann. « Je lui ai proposé d’écrire une pièce qui serait créée dans le cadre de notre festival pour les ados, avec deux contraintes : il fallait que le texte s’adresse spécifiquement à ce public et qu’il tourne autour des thèmes de la vérité et du mensonge. » L’écrivain a relevé le défi… en y ajoutant ses propres règles du jeu : trois courtes pièces, avec chacune trois personnages, sont nées de sa plume. Alors pourquoi pas trois metteurs en scène ? Et sur la lancée, trois Centres dramatiques – Le Préau à Vire, le Nouveau Théâtre d’Angers et la Comédie de l’Est à Colmar – se sont trouvés associés à l’idée. Un exercice insolite pour les metteurs en scène, Vincent Garanger, Caroline Gonce et Guy Pierre Couleau, qui, tous, ont proposé un comédien. « Il faut penser à l’unité du spectacle tout en prenant chacun sa totale liberté, réussir à développer un sens du collectif en même temps que son propre point de vue », estime Vincent Garanger. « C’est important de travailler sur la singularité de nos univers, car la cohérence du spectacle existera de toute façon par la présence des mêmes
acteurs et des mêmes décors dans les trois pièces », poursuit Caroline Gonce, l’assistante de Frédéric Bélier-Garcia au Nouveau Théâtre d’Angers. À chacun sa pièce et son univers. « Le choix s’est fait de manière assez instinctive et, par miracle, chacun s’est tourné vers un texte différent », s’amuse la jeune metteuse en scène qui a jeté son dévolu sur la première, Yaya. L’histoire d’une jeune réfugiée obligée de mentir pour obtenir une carte de séjour. La deuxième, Sonya, où une fille doit faire face à l’obsession de son père pour le jeu, est mise en scène par le Colmarien Guy Pierre Couleau. « Le texte est fait de monologues intérieurs, de non-dits, on y entend penser les personnages », confie le directeur de la Comédie de l’Est. « Pour créer le contraste entre ce qu’ils disent et ce qu’ils pensent, je travaille sur la dilatation du temps, sur la vie qui se fige. » L’initiateur du projet, Vincent Garanger, s’approprie quant à lui la dernière pièce, Alya : dans un studio de casting, une actrice débutante use de la tromperie pour rencontrer une star de cinéma. Un spectacle sur le mensonge, donc sur la vérité, dont l’écho est amplifié par un dispositif tri-frontal. Les spectateurs, comme autant de miroirs. Mais qui bluffe qui ?
Willkommen in Hausland, sérigraphie (détail)
L’ILLUSTRATEUR
jérémie fischer Né à Lyon en 1986, Jérémie passe de nombreuses années à bourlinguer – Clamart, Potsdam ou Berlin – avant d’entrer aux Arts déco de Strasbourg. Diplômé en 2011, on a pu voir ses illustrations dans la revue Nyctalope et on les verra prochainement dans le magazine Nobrow 6. Les influences de celui qui travaille beaucoup à la plume et réalise des sérigra-
phies ? La liste est longue : les avant-gardes russes des années 1920, les dessinateurs italiens Bruno Munari, Iela & Enzo Mari, l’artiste Paul Cox ou encore les gravures de Käthe Kollwitz, Goya, Ambroise Paré… www.jeremiefischer.com
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LITTÉRATURE
drôle d’oiseau Romancière et chanteuse, Lola Lafon vient de publier un livre, Nous sommes les oiseaux de la tempête qui s’annonce, et un album, Une vie de voleuse. Elle sera au Noumatrouff pour un concertlecture à l’occasion de Tout Mulhouse lit.
Par Dorothée Lachmann Photo de Lynn S.K. / Flammarion
À Mulhouse, au Noumatrouff, vendredi 21 octobre (rencontre avec Lola Lafon et Marie Nimier à 17h30 au Forum Fnac)
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n souvenir de Barbara dans la voix. Dans l’élégance, aussi. Lola Lafon possède cette grâce sombre d’une danseuse ayant grandi dans la Roumanie de Ceauşescu. Sa musique est enchanteresse, son univers cabossé, ses textes sont des couperets qui tombent comme des caresses, des accrocs dans la dentelle. Née en 1975, elle se déclare féministe, “assurant” que « ce n’est pas un gros mot ». Pour aggraver son cas, elle est libertaire. Et se fiche éperdument des cases et des étiquettes : trop écrivaine dans le monde de la chanson, trop chanteuse dans l’univers littéraire. Après avoir tant dansé, elle troque le mouvement du corps pour celui de l’esprit. Et pratique le grand écart entre la scène et la librairie, avec la même exigence. « Je trouve bien qu’en France il y ait un amour tel de la littérature qu’on puisse la chanter sans que ce soit ennuyeux. » Pas étonnant qu’on retrouve des textes de chansons dans ses romans, et vice-versa : le grand écart n’est finalement qu’un entrechat. Lola Lafon privilégie les concerts lectures, des performances intenses qui mêlent morceaux de son dernier opus et extraits de son nouveau roman. Après Une fièvre impossible à négocier et De ça je me console, l’auteure continue à creuser les thèmes qui la hantent – le sort des femmes, l’insurrection, la résistance – même si le style se fait plus lyrique dans Nous sommes les oiseaux de la tempête qui s’annonce, une histoire au féminin, où s’entrelacent de multiples voix. Poésie et révolte se disputent le premier rôle dans ce « conte insurrectionnel » se déroulant sur fond d’état sécuritaire et appelant à prendre son envol… avant la tempête qui s’annonce.
De Bob Dylan à Pierre Perret Musique et littérature : le thème de cette onzième édition de Tout Mulhouse lit élargit les horizons d’un festival qui monte en puissance. Plus d’une cinquantaine d’auteurs, journalistes, musiciens et artistes de tous poils seront présents. À l’affiche : Enzo Cormann, Marie Nimier, Gilles Verlant, Alain Rémond ou encore la chef d’orchestre Zahia Ziouani. La manifestation investit les quatre coins de la ville, avec de nouveaux lieux, comme le passage du théâtre, où se cache la sympathique librairie Canal BD-Tribulles, qui accueille plusieurs concerts. Parmi les temps forts, les Cinépoèmes live de Rodolphe Burger et Pierre Alferi, croisant musique, voix, poésie et cinéma, ou encore le show des Weepers Circus, extrait de leur nouvel opus, N’importe où hors du monde (voir Poly n°142). À Mulhouse, dans différents lieux, du 15 au 23 octobre 03 69 77 67 17 – www.mulhouse.fr
Maison des Arts - 19 rue des Charrons - Bischwiller Service Culture - tél. 03 88 53 99 28
www.bischwiller.com
Réalisation : Service communication - Ville de Bischwiller / Impression : Modern’Graphic
Création Gabrielle Schmuck
© Myrtille Béal, détail
Gaspard GRESLY, « Fileuse endormie » © Besançon, Musée des beaux-arts et d’archéologie - Cliché Charles CHOFFET
auteur : Emmanuel Gaillard – cliché Bibliothèque Forney / Parisienne de Photographie
ERNEST PIGNON ERNEST (Ernest PIGNON, dit), Rimbaud, 1978, photographie lithographiée © Adagp, Paris 2011
© Freesurf - Fotolia.com
Media Création / D. Schoenig
Bernard Latuner
Péplum MUSÉE DES BEAUX-ARTS DE MULHOUSE DU 8 OCTOBRE 2011 AU 15 JANVIER 2012
TOUS LES JOURS (SAUF MARDIS ET JOURS FÉRIÉS) DE 13H À 18H30
ENTRÉE LIBRE
Exposition - Bischwiller
LA SAGA DU JEAN 1er octobre - 31 décembre 2011
Maison des Arts
UNE VILLE VUE PAR…
kinshasa vu par hubert mahela Homme de théâtre bavard, conteur prolixe originaire de la République démocratique du Congo, Hubert Mahela est intarissable quand il s’agit de parler de ses spectacles – à découvrir au TJP dans le cadre du festival Strasbourg-Kinshasa – ou de sa ville.
Par Emmanuel Dosda Photo de Benoît de Carpentier
Spectacles de ou avec Hubert Mahela à voir dans le cadre de Strasbourg-Kinshasa (du 16 au 26 octobre) au TJP : • King Kongo, les 20 et 21 octobre • Ça va ! Une histoire de Kishasa, samedi 22 octobre • Kinsiona, du 23 au 26 octobre À découvrir aussi : • Berceuses Kitoko (création TJP), du 16 au 19 octobre • Congo my body, mardi 18 octobre Et plus tard : • Jules Verne et le Griot (texte d’Hubert Mahela, mise en scène de Grégoire Callies), mardi 15 novembre 03 88 35 70 10 www.theatre-jeune-public.com
L
orsqu’il empoche l’équivalent du Bac à la fin du lycée, Hubert Mahela passe une année dans une école de commerce… sans conviction aucune. Ses parents l’y ont poussé, mais il a d’autres rêves : apprendre le théâtre qu’il a pratiqué avec ferveur depuis le déclic occasionné par le passage d’une troupe amateur dans son école. Il se souvient : « Depuis ce moment, en 1984, j’étais sans cesse sur scène et je voulais en faire mon métier, quitte à gagner difficilement ma vie. Les compagnies vivent sans aides de l’état, mais grâce à diverses institutions, comme, aujourd’hui, le réseau des Centres culturels français, l’Organisation internationale de la Francophonie ou Africalia en Belgique. » Il troque alors les affaires pour la scène, fait une école de théâtre et suit une formation à l’Institut national des arts. Avec une poignée d’amis, suivant la route tracée par des compagnies telles que M. majuscule, Hubert Mahela fonde Tam Tam, en 1990, compagnie mettant en place le très actif festival Rencontre des Conteurs et des Griots à Kinshasa.
Une tradition qui se perd
Rien ne le destinait à cette activité. Petit, il ne fréquentait pas les salles de spectacles, ne sachant pas grand-chose de la chose théâtrale, même s’il avait connaissance du Théâtre national : « Le président Mobutu y mettait beaucoup de moyens pour assurer sa propagande, pour chanter la gloire du 52
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candidat unique et du Mouvement Populaire de la Révolution dont tu étais déjà membre dans le ventre de ta mère ! » Son goût pour le spectacle lui vient peut-être de ses parents, lorsqu’ils lui racontaient des histoires, le soir, avant qu’il ne s’endorme. Quand, des années plus tard, à l’Institut national des Arts, Hubert travaille sur l’interprétation d’un conte, l’exercice lui procure « beaucoup de joie. Être tous ensemble et partager ce moment m’a ramené en enfance. J’ai décidé de m’orienter vers le métier de conteur dès 1993, sans avoir de modèle en tête. » La tradition se perd, « les conteurs sont peu nombreux, comme les griots*. »
Une histoire de l’Afrique
Dans ses spectacles, comme Ça va ! Une histoire de l’Afrique (présenté dans le cadre du festival Strasbourg-Kinshasa), il raconte Kinshasa où il se rend un peu moins fréquemment depuis deux ans puisqu’il vit en France.
« Je décris une ville où la vie n’est pas toujours facile. Nous avons connu la violence, la guerre, la souffrance, mais pas la solitude. Jamais personne n’y passe une journée seul, sans parler, ça n’existe pas ! Si tu montes dans un taxi / bus et lance un sujet, tous les passagers vont se entrer dans la discussion, vont échanger. Quand tu fais une fête, tu ne déranges pas les voisins, tu les invites à venir danser avec toi. Quand tu es en deuil, tu ne souffres pas de la solitude, tu es entouré par le quartier qui vient veiller à tes côtés. À Kinshasa, les gens se réveillent en se demandant ce qu’ils vont manger, mais ils gardent espoir. L’essentiel est de ne pas se fâcher entre nous, de garder le sourire. Si on ne rigole plus ensemble, on meurt », débite-t-il.
Chagrin et espoir
Solidarité Artistique et Artisanal pour accompagner les jeunes des rues et anciens enfants soldats, en collaboration avec des centres d’hébergement. Soutenu par la Communauté Emmaüs de Strasbourg, le théâtre Tohu-Bohu ou le TJP, l’Espace Masolo permet aux enfants de retrouver une place dans la société grâce aux activités artistiques proposées : ateliers musiques, spectacles de marionnettes, etc. Ainsi, Congo my body et King Kongo (à voir au TJP), intègrent des jeunes encadrés par cette structure. Hubert Mahela, à propos de King Kongo : « Une fanfare constituée d’enfants des rues interviendra. Il faut voir de quelle détermination ils font preuve. Ils font vibrer la salle ! » Les enfants dont l’Espace se charge « finissent toujours pas se réinsérer », lance-t-il comme un message d’espérance.
Selon Hubert Mahela, le griot est la mémoire d’une région, « c’est un historien qui chante une généalogie alors que le conteur est plus dans l’imaginaire. On ne décide pas de devenir griot, on l’est de père en fils. » *
Là, « 15 000 gamins en rupture avec leurs familles » vivent dans les rues. En 2003, Hubert et ses amis ont créé le Centre de Ressources de Poly 143 Octobre 11
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GALERIE
un monde de brut La galerie Ritsch-Fisch s’est installée dans la rue des Charpentiers (Strasbourg) en septembre. Cette institution discrète, mais connue des amateurs d’art brut dans le monde entier, a enfin pignon sur rue.
Thomas Palme, Sans titre (Maus), 2011
Par Catherine Jordy
Galerie Jean-Pierre RitschFisch, 6 rue des Charpentiers à Strasbourg L’exposition inaugurale de cette nouvelle implantation est dédiée à Thomas Palme (jusqu’au 28 octobre) 03 88 23 60 74
J
ean-Pierre Ritsch-Fisch vient de déménager sa galerie dans le lieu occupé précédemment par la galerie Espace Suisse. Ce spécialiste de l’art brut – que Dubuffet définissait comme l’œuvre de « personnes indemnes de culture artistique » – possédait un lieu d’exposition depuis quinze ans… “dissimulé” en étage. Vitrines en avant, il devrait se faire mieux connaître des Strasbourgeois, le galeriste ayant déjà une audience internationale auprès des collectionneurs. Il entretient en effet des relations privilégiées avec ses clients qu’il connaît personnellement et pour qui il recherche des pièces très précises. L’homme est lui-même collectionneur, depuis son plus jeune âge, influencé en cela par un professeur qui l’a initié, adolescent, à Brecht, Béjart ou Eisenstein. Il a appris à reconnaître les créateurs des copieurs serviles, un apprentissage de l’œil qui est devenu une méthode de travail et un credo idéologique. « Nous achetons avec l’œil, pas avec les oreilles », affirme le galeriste rétif à la spéculation et qui s’est d’abord intéressé à la figuration narrative, puis à de jeunes artistes “bruts”, vendant peu à l’époque. À force de persévérance, de rencontres avec des créateurs qu’il a appris à connaître – voire à apprivoiser – et d’achats
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spontanés, il s’est fait un nom, jusqu’à devenir une référence dans les foires d’art contemporain où se concentre l’essentiel de son activité. Impossible en effet de fonctionner avec les seuls Alsaciens… qui ne permettent guère de payer davantage que la facture d’électricité ! Avec Jean-François Kaiser, son assistant, notre marchand cherche à élargir son public grâce à une surface d’exposition ample et la présentation de jeunes artistes connus (ou pas), tous des coups de cœur des deux partenaires. Par ailleurs, une politique tarifaire permet de mettre ces œuvres à la portée de toutes les bourses : on peut acquérir des lithographies de petite taille à prix raisonnables tout comme des pièces de très grand format, dans des matériaux quelquefois inattendus… Au départ, les collectionneurs de ce type d’œuvres étaient des médecins en psychiatrie, mais les artistes sont avant tout des marginaux. Pour faire connaître les Jacik, Podesta et autres Corbaz, le galeriste reçoit des scolaires, intervient aux Arts décoratifs, cherche à surprendre et à faire découvrir. On aura compris qu’avant d’être un métier, l’activité de JeanPierre Ritsch-Fisch est une passion, de celles qui dévorent une vie entière…
Créanciers Visuel Kathleen Rousset, graphisme Polo
d’August Strindberg Mise en scène Cyril Pointurier Orchestre Seconde, Strasbourg – création 2011 Taps Scala du mardi 4 au samedi 8 octobre à 20h30 dimanche 9 octobre à 17h
Les Taps info. 03 88 34 10 36 www.taps.strasbourg.eu insert-poly.ai 1 22/08/2011 17:07:12
LE PÔLE D’ARCHÉOLOGIE INTERDÉPARTEMENTAL RHÉNAN PRÉSENTE
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Musée Historique de Mulhouse du 10 septembre 2011 au 8 janvier 2012
CMJ
ENTRÉE LIBRE
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+ d’infos sur
LES FEMMES DE L’OMBRE
l’art de la traduction Un ton posé, une voix souriante et toujours le souci du mot juste, Patricia Priss nous dévoile les particularités de deux métiers souvent assimilés et pourtant bien différents : la traduction et l’interprétariat.
pour respecter ce que l’auteur a voulu dire, la marge de création est donc limitée ce qui peut-être un peu frustrant. » Le travail doit être précis et minutieux afin de coller au plus prêt au style original. Par exemple, pour un reportage, la traductrice travaille à la fois sur les commentaires des journalistes et sur les dialogues des personnages, les “sonores” dans le jargon du milieu. Textes en langue originale, vidéos à l’appui, elle doit cerner le contexte pour respecter les intonations, le type de langage – soutenu ou familier – mais aussi les durées des phrases. L’objectif est que, lors du doublage, les mots du comédien se confondent avec la voix du personnage. Même si une seconde correction du texte est entreprise par un journaliste, Patricia avoue s’essayer chez elle à la lecture, à haute voix, de sa traduction sur les images. « Cela permet de se rendre compte si le texte est fluide et impactant », ajoute-t-elle. « Puis, lors de la diffusion, j’aime écouter la version finale pour entendre comment ma traduction sonne dans la bouche d’un acteur. » Par Laure Roman Photo de Benoît Linder pour Poly
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l’âge de 30 ans, après des études de langues à l’université et plusieurs années comme assistante trilingue pour ARTE, Patricia Priss reprend une formation spécialisée en interprète de conférence. Femme “multicasquette”, elle est installée aujourd’hui en Alsace et exerce à la fois comme interprète de conférences pour la Communauté urbaine de Strasbourg, la Région, les institutions européennes et comme traductrice pour les informations ou reportages d’ARTE. Elle jongle ainsi en permanence entre l’allemand, sa langue maternelle, le français mais aussi l’anglais ou l’espagnol. Patricia interprète dans les deux sens, même si « travailler vers l’allemand me permet de mieux trouver les nuances », explique-t-elle. Métiers de l’ombre, « il faut trouver l’expression juste
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L’interprétariat, se faisant uniquement à l’oral, demande une autre gymnastique d’esprit : en traduction simultanée c’est davantage la mémoire qui joue… et la concentration pour pouvoir écouter, analyser et retransmettre aussitôt. Il faut aussi « faire attention aux tics de langage » et « apprendre à respirer » détaille Patricia pour que la voix ne soit pas trop crispée, mais agréable, simple et naturelle. Rester dans la neutralité sans jamais être monotone. Elle avoue toutefois que travailler dans l’audiovisuel comme pour ARTE Reportage est davantage à la croisée de ces deux métiers : « Il s’agit de traduire un texte, mais le langage parlé est plus proche de l’interprétariat, j’y trouve une forme de liberté et d’amusement. Ce qui me passionne dans ces deux voies aux déclinaisons diverses, c’est le côté challenge vivant et permanent. »
11 > 27 octobre & 3 > 10 novembre 2011 • De Howard Barker • Mise en scène Fanny Mentré • Création avec les comédiens de la troupe du TNS • Première mondiale • 03 88 24 88 24 • www.tns.fr
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A R T A HE S
OU L T AIN
07 octobre 2011 08 09 IS
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FESTIVAL INTERNATIONAL DE THÉÂTRE AMATEUR
LE PARNASSE
ARTISTES ASSOCIÉS
des mots des notes En résidence cette saison à l’Espace Grün de Cernay, la compagnie strasbourgeoise Des Mots Des Notes revisite l’histoire du cabaret, lieu de toutes les transgressions. Par Lisa Vallin Photo Des Mots Des Notes À Cernay, à l’Espace Grün, vendredi 21 octobre 03 89 75 74 88 www.espace-grun.net
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n ce début de saison, il flotte comme un parfum montmartrois à l’Espace Grün. Des notes s’échappent du plateau et nous voilà sur la butte, à la grande époque. Pendant plusieurs semaines, Francisco Gil et sa compagnie s’installent à Cernay pour faire surgir du passé leur Rouge Cabaret. « Quand on parle de cabaret aujourd’hui, on pense au Moulin Rouge. Mais le “vrai”, c’était autre chose : un lieu de transgression politique, sociale, sexuelle. Sa dimension satirique s’est perdue et j’avais envie de la retrouver » confie le metteur en scène, également comédien et chanteur dans le spectacle. Pour cela, il s’est plongé dans l’histoire de cette esthétique qui a tant marqué la mémoire du spectacle vivant. « Je me suis aperçu que la Deuxième Guerre mondiale avait été un tournant, que le traumatisme se révélait particulièrement dans de tels lieux. Actuellement nous vivons une période de crise, ce n’est pas la guerre, mais on peut trouver un écho. » Derrière les paillettes, le traumatisme et la mémoire comme points de départ. Trois personnages amnésiques, dans un décor de fin du monde, entièrement rouge, « comme si le feu avait tout imprégné ». Comment continuer quand on a tout perdu ? À coups de théâtre et de musique, les artistes vont reconstruire leur cabaret détruit, mais aussi leur propre
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mémoire. Avec en fil narratif des extraits d’Opéra Panique de Jodorowsky, le spectacle déroule des chansons des répertoires français, allemand et américain de la fin du XIXe siècle à nos jours. Des airs qui planent encore avec une vague nostalgie dans la mémoire collective ou des pépites oubliées dans les vieilles malles des coulisses de jadis. « Ces musiques m’ont toujours questionné, ces chansons qui racontent des moments de vie, petits ou grands. Mais je voulais aller plus loin qu’une simple succession de tableaux, en créant une véritable dramaturgie. Le cabaret apporte un vocabulaire différent de celui du théâtre : dès qu’on commence à chanter, quelque chose s’ouvre, une énergie spéciale », souligne Francisco Gil. Autour de lui, Jean-Raymond Gelis – par ailleurs l’un des grands spécialistes français de la viole de gambe – signe l’adaptation musicale, tandis que la comédienne et chanteuse Jeanne Barbieri apporte la touche de sulfureuse féminité sans laquelle le cabaret perdrait son âme. Peu à peu, le spectacle avance vers une renaissance : des gravats, émergent les fondations nouvelles du Rouge Cabaret. « Les moments de crise offrent une chance de pouvoir rebondir vers quelque chose de meilleur qu’avant, c’est vraiment le message du spectacle. »
Montse Cortés
Jeudi 6 octobre / 20h30 Flamenco, Espagne
Les Saisons
Merc. 16 novembre / 20h30 d’Artavazd Pelechian Musique : Akosh S. & Gildas Etevenard
Titi Robin
Merc. 30 novembre / 20h30 Maroc, Inde, Turquie
Bonga
Vend. 27 janvier / 20h30 Angola
ENTRÉE LIBRE AVEC LE PASS MUSÉES
Ô SOLEIL ! UNE EXPOSITION SUR LE SOLEIL ET SES ÉNERGIES... 08/10/2011-25/03/2012 AU MUSÉE EDF ELECTROPOLIS, MULHOUSE
www.passmusees.com
Juan Carlos Cáceres
Vend. 17 février / 20h30 Tango, Argentine
Speedy
Vend.16 mars / 20h30 Film burlesque avec Harold Lloyd
Mayra Andrade Vend. 30 mars / 20h30 Cap Vert
WOW
Vend. 13 avril / 20h30 Humour
Tabou
Vend. 20 avril / 20h30 de F.W. Murnau & R.Flaherty Musique : Christine Ott
Daby Touré
Vend. 11 mai / 20h30 Mauritanie
UN REGARD
coastline No.14 de xiao zhang Par Thomas Flagel
Prix HSBC pour la photographie – Lauréats 2011, exposition à Metz (57), à L’Arsenal, du 30 septembre au 30 octobre 03 87 74 16 16 www.arsenal-metz.fr www.zhangxiaophoto.com
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De l’estuaire du fleuve de Beilun au sud jusqu’à celui de Yalu au nord, la côte chinoise s’étend sur près de 18 000 kilomètres. Xiao Zhang, photographe tout juste trentenaire, a observé les mutations du littoral à l’œuvre – qui donne son titre à sa série Coastline –, lieu de tous les espoirs pour tant de Chinois venus des campagnes à la recherche de travail et de jours meilleurs. Ses clichés de moyen format témoignent d’un empire du milieu en pleine urbanisation massive dans lequel le grand bond en avant, la croissance à deux chiffres et les inégalités toujours plus criantes font, jusqu’à aujourd’hui, fi des préoccupations écologistes qui s’imposent petit à petit
en occident. Coastline No.14, présentée cidessus, recèle tout cela : les déchets échoués au premier plan ne semblent pas gêner le couple d’amoureux venus se balader sur une plage dont on devine, par les montagnes de graviers et de sable de ses abords, qu’elle n’a rien de naturel. La richesse de la construction de cette image – l’avion s’envolant vers d’autres cieux, écho humain à la plateforme de chargement / déchargement de marchandises sur la droite – ainsi qu’une certaine poésie des attitudes, valurent à Xiao Zhang le prestigieux prix HSBC pour la photographie en 2011, avec la mexicaine Alinka Echeverria.
UN REGARD
sur le chemin de tepeyac par alinka echeverria Par Thomas Flagel
Prix HSBC pour la photographie, Actes Sud Beaux Arts (25 €) www.actes-sud.fr www.alinkaecheverria.com
Mexicaine de 29 ans, Alinka Echeverria n’a de cesse de parcourir le monde pour ses études d’anthropologie d’abord (Bologne, Édimbourg), puis à New York, Cuba et en Afrique pour son activité de photographe. Dans son pays, c’est au célèbre pèlerinage de la Vierge de Guadalupe qu’elle prend part. Au milieu des quelque six millions de fidèles se pressant dans la procession – véritable cohue s’il en est –, elle choisit d’isoler les fidèles décrochant l’icône de la Vierge de leur bâtisse pour la transporter sur leur dos afin de la faire bénir dans ce lieu saint situé à proximité de Mexico. Cette série, Sur le Chemin de Tepeyac, réunit près de trois cents clichés nous
faisant découvrir la diversité de supports et d’esthétiques utilisées en guise de représentation populaire. Les porteurs anonymes nous font dos sur un fond volontairement neutre où leur trésor de dévotion fait face à l’objectif d’Alinka Echeverria. La Madone est sculptée, tissée, décorée, enveloppée, mise sous verre, brodée, entourée de guirlandes aux couleurs criardes… Autant d’expressions d’une foi ancestrale et d’une culture vivace saisie sur le vif par une photographe qui reçue le prestigieux prix HSBC pour la photographie en 2011, avec le chinois Xiao Zhang.
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AILLEURS
la vie matérielle Remarquée avec Vaterland, le pays du père de Jean-Paul Wenzel (à revoir mardi 28 février), Cécile Backès propose un collage de textes de Marguerite Duras dans La Maison. a Vie matérielle est de ces textes à part dans l’œuvre de Margueritte Duras. Retranscription d’entretiens entre l’écrivaine et Jérôme Beaujour, ce texte prend la forme d’un long monologue intérieur dans lequel Duras « cherche, inlassablement, les lieux d’une identité féminine », dévoile Cécile Backès. « Des corps, des images, des figures : mère, petite fille ou sorcière, Duras parle de toutes les femmes en une seule. » Cette matière intime dévoilant le mouvement de l’être est mis en espace avec « du presque rien », des signes minuscules. Un théâtre totalement focalisé sur le jeu et l’écoute avec pour ambition le partage d’une « confidence philosophique à l’usage de tous » pour « inscrire dans cet espace le fantasme de la maison commune ». À Forbach (57), au Carreau, du 13 au 18 octobre – 03 87 84 64 34 www.carreau-forbach.com
un jeu dangereux Inspiré par l’histoire des sœurs Papin, Jean Genet trace dans Les Bonnes un angoissant portrait. Une mise en scène de Jacques Vincey créée à Belfort.
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Frederick Whitman Glasier, American, 1866-1950 Illeson sisters
laire et Solange sont sœurs. Depuis des années, elles travaillent comme femmes de chambre pour Madame. En son absence, elles se livrent dans sa chambre à un jeu de rôle, où Claire incarne Madame tandis que Solange devient Claire, mélangeant les identités jusqu’à frôler la schizophrénie. « Elles se projettent dans des fictions qui exacerbent leurs pulsions et donnent consistance à leurs fantasmes », explique Jacques Vincey. Très vite, les bonnes révèlent des personnalités inquiétantes, qui laissent libre cours à une haine longtemps refoulée et nourrie d’humiliations. Improvisant une vengeance, elles rédigent une fausse lettre de dénonciation pour faire emprisonner Monsieur, l’amant de Madame. Prisonnières de leur propre jeu, les deux sœurs vont avancer aveuglément dans leur folie meurtrière et tenter d’empoisonner leur maîtresse. « Rien n’est plus éloigné du réel que ces figures outrancières, et pourtant, rien ne nous parle plus intimement de notre humanité la plus secrète. » À Belfort (90), au Granit, du 11 au 14 octobre 03 84 58 67 67 – www.legranit.org À Haguenau, au Théâtre, mardi 18 octobre – 03 88 73 30 54 www.relais-culturel-haguenau.com
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© Jany de Chambord
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AlAin ChAmfOrt 01.10.2011 20:30 variétés
www.lacoupole.fr
N° de licence d’entrepreneur du spectacle : 136138-139-140 ~ Conception : starHlight / CHIC MEDIAS
AILLEURS
transnational Une multitude d’artistes et de propositions : la très ambitieuse exposition du ZKM, The Global Contemporary, invite à réfléchir sur l’art mondialisé et son statut après 1989. Par Raphaël Zimmermann
À Karlsruhe (Allemagne), au ZKM, jusqu’au 5 février 2012 +49 721 8100 1200 www.zkm.de www.global-contemporary.de
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a date est symbolique : 1989 marque en effet la Chute du mur de Berlin et le début d’un cheminement vers une mondialisation également à l’œuvre dans la création plastique. Le ZKM (fondé cette même année) a lancé un processus de recherche sur ce thème1 et The Global Contemporary a été élaborée dans ce cadre. La question est de savoir comment l’univers artistique – foires, ventes, musées rapport du plasticien à son environnement immédiat… – peut se penser à l’échelle de la planète. « L’art contemporain se présente aujourd’hui non seulement comme un “art nouveau”, mais aussi comme une “nouvelle forme d’art” en expansion sur le globe. Il est contemporain non seulement dans un sens chronologique, mais aussi symbolique, idéologique même », écrit l’historien de l’art Hans Belting, conseiller scientifique de la manifestation qui compte deux commissaires Andrea Buddensieg et Peter Weibel. Ce dernier en résume du reste l’essence lorsqu’il affirme : « Avec la mondialisation, nous assistons à une réécriture de l’art moderne dans une nouvelle ère. » Construite en sept parties, l’exposition débute avec Temps universel. Le monde comme zone de transit : une interrogation sur une
Anna Jermolaewa: Kremelin Doppelgänger, 2009 © VG Bild-Kunst, Bonn 2011
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www.globalartmuseum.de www.nskstate.com
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planète qui se réduit comme peau de chagrin puisque de plus en plus “continue” dans l’espace et dans le temps, une zone géographique unique où l’attachement à un territoire devient de moins en moins nécessaire à la création. Suivent Mondes réels et mondes d’images qui analyse le rapport des artistes aux médias de masse et Mondes artistiques, le cabinet de curiosité à partir d’une perspective postcoloniale dont l’intitulé se passe de commentaires… Venus des cinq continents, pratiquant tous les media possibles et imaginables, les plasticiens invités sont au cœur du processus de mondialisation : en témoignent les membres du Neue Slowenische Kunst (et notamment son émanation picturale, IRWIN) inspirés des esthétiques totalitaires, qui ont fondé un état virtuel et transnational2… Tentative de bilan ? Essai critique ? Fragments d’un portrait par essence impossible ? Il y a un peu de tout cela dans cette exposition à laquelle ont été conviés dix artistes internationaux pour un programme de résidence. Leur mission ? Élargir la perspective des commissaires et intervenir au fil des mois… Le résultat de ce work in progress sera à découvrir dans le catalogue sortant début 2012.
L’EUROPE DES ESPRITS OU LA FASCINATION DE L’OCCULTE, 1750-1950
MUSÉE D’ART MODERNE ET CONTEMPORAIN, STRASBOURG WWW.MUSEES.STRASBOURG.EU Cette exposition est reconnue d’intérêt national par le ministère de la Culture et de la Communication/ Direction générale des patrimoines / Service des musées de France. Elle bénéficie à ce titre d’un soutien financier exceptionnel de l’État. Sous le patronage de Monsieur Thorbjørn Jagland, Secrétaire Général du Conseil de l’Europe.
18.10.2011
MAGIE NOIRE (BRÉSIL-FRANCE) Création théâtre – danse – musique
KING’S GO FORTH (USA)
27.10.2011
THE MELVINS (USA) Grunge rock
03.11.2011
THE AGGROLITES (USA) 09.11.2011
KING’S GO FORTH (USA) Soul
27.11.2011
PINBACK (USA) Indie pop
PINBACK (USA)
THE MELVINS (USA)
MAGIE NOIRE
www.kulturfabrik.lu
KULTURFABRIK’S CHOICES
Dirty reggae from L.A.
17.12.2011
FRIENDLY FIRES (UK) Electro pop disco
Centre culturel Kulturfabrik 116, rue de Luxembourg L-4221 Esch-sur-Alzette Tel.: +352 55 44 93-1
Henry Fuseli, Robin Goodfellow-Puck, 1787-1790, Sturzenegger-Stiftung, Schaffhausen, Museum zu Allerheiligen Schaffhausen. Graphisme : Rebeka Aginako
8.10.2011 12.02.2012
Vue extérieure de la Fondation Beyeler avec Maman (1999), sculpture de Louise Bourgeois © Serge Hasenböhler
AILLEURS
spider girl Louise Bourgeois (1911-2010) aurait eu cent ans le 3 septembre : la Fondation Beyeler lui rend un double hommage en présentant ses œuvres au cœur des collections et en installant une sculpture monumentale dans les jardins. Par Hervé Lévy
À Riehen, à côté de Bâle (Suisse), à la Fondation Beyeler, jusqu’au 8 janvier 2012 + 41 61 645 97 00 www.fondationbeyeler.ch
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epuis sa création, le credo de la Fondation Beyeler est de faire entrer en résonance ses collections – qui vont de l’impressionnisme à l’expressionnisme abstrait des années 1960 – avec d’autres propositions artistiques. Si l’on est désormais habitués à croiser un fétiche africain à proximité d’une toile de Paul Cézanne ou une sculpture océanienne questionnant un immense tableau de Roy Lichtenstein, l’intrusion amicale d’une vingtaine de pièces signées Louise Bourgeois est tout aussi stimulante. Fernand Léger, Francis Bacon ou Alberto Giacometti ont en effet toujours été des figures tutélaires pour l’artiste française, naturalisée américaine au milieu des années 1950. Préparée par la plasticienne juste avant sa disparition, le 31 mai 2010, l’exposition est une rêverie en forme de “portrait Janus” : les liens tissés avec les pièces que l’on connaît bien répondent, en effet, à l’intimité de l’œuvre de Louise Bourgeois qui sut abolir la frontière existant entre abstraction et figuration comme dans ses “cells” dont la plus grande, Passage Dangereux, est ici présentée. Au centre de l’exposition se trouve, montrée pour la première fois au
public, une œuvre – qui lui donne son nom – parmi les plus significatives. Elle se nomme À l’infini et rassemble 14 gravures “représentant” chacune des lignes à la complexion charnelle et évanescente à la fois. Voilà bien le point de départ de tout : des traits qui se croisent et s’entrecroisent, des fils qui s’entrelacent pour former, au final, un morceau de tissu. Essentielle et élémentaire, l’œuvre de Louise Bourgeois, qui plonge ses racines dans l’enfance, est symbolisée par son animal tutélaire, celui qu’on associe toujours à l’artiste, une araignée. Une autre histoire de fil… Après une longue tournée helvète – qui l’a menée à Berne, Zurich et Genève – Maman s’est installée devant la Fondation Beyeler. Il s’agit d’une monumentale statue de bronze d’une dizaine de mètres de haut de l’animal, hommage direct à la mère de la plasticienne qui, toute sa vie durant, a restauré des tapisseries. Mais avant toute chose l’arachnide était, pour l’artiste, la manifestation la plus parfaite du cycle de la vie marqué par un renouvellement incessant. Une vision de l’éternel retour cher à Nietzsche.
Exposition
Du 3 au 21 octobre 2011
ESAD de Strasbourg / 1, rue de l’Académie www.esad-stg.org
Art imprimé : Carte blanche à Damien Deroubaix, avec : Gilles Barbier /// Marcel van Eeden ///Rainier Lericolais /// Maël Nozahic /// Manuel Ocampo /// Fabien Souche /// Yannick Vey /// Jérôme Zonder ///
Braderie le 8 octobre à partir de 11h30 (Éditions de l’ESADS et du CEAAC) Zoom
Exposition
Du 14 octobre au 5 novembre 2011 La Chaufferie / 5, rue de la Manufacture des Tabacs
Vernissage le 13 octobre à 12h30 Exposition dans le cadre du projet culturel européen Et-Lettera : www.etlettera.eu
Dominique Goblet Hélène Riff Jean Alessandrini Blexbolex Paul Cox Jean-François Martin Renaud Perrin... L’École supérieure des arts décoratifs de Strasbourg fait partie du Pôle Alsace d’enseignement supérieur des arts, établissement public de coopération culturelle, qui réunit depuis 2011 l’ESADS, Le Quai - École supérieure d’art de Mulhouse et l’enseignement supérieur de la musique du Conservatoire de Strasbourg. www.esad-stg.org
AILLEURS
viva españa Un nouveau nom, un nouveau projet, de nouvelles ambitions : à Montbéliard, l’allan, l’Arche et [ars]numerica ont donné naissance à MA scène nationale qui ouvre sa saison sous le signe du flamenco.
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l fallait bien une fiesta d’enfer pour célébrer la naissance de MA scène nationale. MA comme Montbéliard Agglomération, mais aussi – et surtout – pour montrer que cette nouvelle structure polycéphale appartient à tous les habitants du territoire. Sa saison inaugurale débute avec un festival dédié au flamenco : conférences, rencontres, films, virées culinaires… et la présence exceptionnelle (vendredi 30 septembre) de deux légendes du flamenco contemporain, le danseur Andrés Marín et le chanteur Jesús Mendez. Ils seront précédés par les Catalans d’Escarlata Circus, une bande de joyeux frappadingues pour un carnaval des plus surprenants. (R.Z.)
À Montbéliard (25), à L’Hôtel de Sponeck, au Théâtre, au Conservatoire et au Colisée, du 29 septembre au 1er octobre 0 805 710 700 – www.mascenenationale.com Andres Marin © Hans Speekenbrink
consonne, voyelle… Patrick Moya a su métamorphoser les quatre lettres de son nom en matrice créatrice. Un univers à découvrir à Metz.
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n nom comme un acronyme, M.O.Y.A. (ma foi, si un jour il expose dans le musée le plus célèbre du monde, cela pourrait donner “MOYA au MOMA”) : quatre lettres (sur)utilisés dans toutes ses œuvres, peintures, sculptures monumentales, installations, films, photos, performances… Patrick Moya ou comment (apparemment) se mettre en scène. Il est le rejeton turbulent de cette génération d’artistes des années 1960, ceux de l’École de Nice. On aurait cependant tort d’assimiler cette symphonie de caractères typographiques à un délire crypto-lettriste, voire hyper graphique. En se mettant sans cesse sous les feux de la rampe dans une orgie de signes, Moya s’efface (se cache ?) et sa peinture devient un médium naturel venant interroger la place de l’artiste. Moya pose la question du spectacle et la résout en prônant une “non-représentation sur-représentée”… (H.L.) À Metz (57), à la Montée des Marches, jusqu’au 15 octobre 03 87 56 18 48 – www.shimonigallery.com
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Patrick Moya, L’éléphant du Moya Circus, 2009 (courtesy : Shimoni Gallery-Metz)
AILLEURS
paysages intranquilles Rassemblant plus de 70 tableaux de Max Beckmann autour du thème du paysage, le Kunstmuseum de Bâle permet de découvrir la trajectoire artistique d’un “moderne” majeur.
Par Hervé Lévy
À Bâle, au Kunstmuseum, jusqu’au 22 janvier 2012 +41 61 206 62 62 www.kunstmuseumbasel.ch
Max Beckmann, Face à face au Museum der bildenden Künste de Leipzig, jusqu’au 22 janvier 2012 www.mdbk.de 2 Max Beckmann et l’Amérique au Städel Museum de Francfort, du 7 octobre au 8 janvier 2012 www.staedelmuseum.de 1
L’
année 2011 serait-elle celle de Max Beckmann (1884-1950) en terre germanique ? Aucun anniversaire marquant n’est à l’ordre du jour, et pourtant trois expositions d’importance s’ouvrent cet automne. À Bâle, la première est dédiée aux paysages. La seconde, à Leipzig1 (cité natale du peintre), est consacrée au portrait tandis que la dernière, à Francfort2, se concentre sur la période américaine d’un homme qui passa les trois dernières années de sa vie aux ÉtatsUnis. Voilà l’occasion rêvée de (re)découvrir la singularité d’un artiste qui n’appartint à aucun groupe (mis à part la Berliner Freie Sezession dont il est un des fondateurs en 1914), même s’il fut imprégné par bien des courants, qu’il s’en approche – impressionnisme, expressionisme, Nouvelle Objectivité… – ou qu’il les refuse, comme l’abstraction. Dans un article, Pensées sur l’art temporel et intemporel, il écrit en effet : « Une chose est récurrente en tout art. C’est la sensibilité artistique, liée au caractère figuratif et objectif des objets à représenter. » S’il est considéré comme un des “modernes” les plus influents, lui se voyait comme le continuateur du classicisme, choisissant d’explorer les genres les plus traditionnels : nus, scènes mythologiques, natures mortes et, bien évidemment, paysages.
À Bâle, ces derniers reflètent l’évolution d’une création profondément enchâssée dans son siècle. Formes arrondies et couleurs lumineuses : nous sommes au début des années 1920 et Das Nizza in Frankfurt am Main ressemble à un ilot de calme. Une apparence seulement : des éléments dérangeants – barrière, panneau “Halt” – viennent troubler la quiétude. Il n’y a généralement rien de tranquille, ni de paisible dans les paysages de Beckmann. Dans ses tableaux, aux teintes de plus en plus sourdes, on sent monter la chape
de plomb du nazisme que l’artiste va fuir : en 1937, une dizaine de ses œuvres figurent dans l’exposition dédiée à l’art “dégénéré” à Munich. Il part pour un exil définitif : Paris, Amsterdam… En Hollande, il peint d’après ses souvenirs – et des cartes postales – des vues, parmi les plus saisissantes, de la Côte d’azur et montre que la “french Riviera” peut être d’une intense tristesse. Même sous le soleil.
Max Beckmann, Meer mit grosser Wolke, 1943 © ProLitteris, Zürich
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PROMENADE
les deux inséparables Deux châteaux, un grand et un petit, l’Ortenbourg et le Ramstein, connurent une destinée commune. Leurs ruines se dressent encore fièrement à l’entrée du Val de Villé. À la (re)découverte de deux classiques alsaciens.
Par Hervé Lévy Photos de Stéphane Louis pour Poly
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l en va des promenades comme des partitions du répertoire symphonique : certaines sont de véritables découvertes, des perles méconnues, tandis que d’autres entrent dans la catégorie des “tubes”. Celle que nous avions décidé d’entreprendre ce dimanche où l’été jetait ses derniers feux, peut être considérée comme la neuvième symphonie de Beethoven des balades alsaciennes. Quel randonneur digne de ce nom n’a pas, en effet, régulièrement arpenté les pentes escarpées menant à l’Ortenbourg ? Chaque fois cependant, comme dans la composition du “maître de Bonn”, les chemins semblent se réinventer, les impressions se font nouvelles et inédites… La marque des chefs d’œuvre.
Allegro ma non troppo
Une fois la voiture garée au cœur de Dambach-la-Ville, riant village bas-rhinois (ses maisons à colombages, son usine de chaussettes Labonal), nous filons en direction de Dieffenthal à travers le vignoble le plus vaste 70
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d’Alsace (quelque 470 hectares), où peinent, à cette heure matinale, des centaines de vendangeurs. Première et amusante étape, le Rocher des Celtes situé à quelques encablures au-dessus du village avec son “trône” de pierre et ses cupules immenses où, diton, les femmes accouchaient dans des temps reculés. Environné par un paysage de lande bretonne, il ressemble aujourd’hui à un lieu de rêverie… ou de rendez-vous galant. Un de nous émet même une hypothèse osée : « La moitié du village a été conçue ici. » Séduisant, mais invérifiable. Reste que chaque année, au mois de février, s’y déroule une cérémonie aux accents païens : le Schieweschläuje. Des disques incandescents sculptés dans des fûts de chêne sont jetés en l’air. Ils retombent dans une pluie d’étincelles afin de chasser l’hiver et de souhaiter la bienvenue au printemps. Quelques pas encore et nous voici à la Hühnelmühle. Pour l’instant le terrain était plutôt plat et accorte. Les choses vont subitement changer.
Molto vivace
La montée vers les deux châteaux – Ortenbourg et Ramstein – est tonique : à travers une forêt où dominent des chênes aux formes alambiquées, sur des sentiers striés par un réseau complexe d’immenses et saillantes racines, on aperçoit, de loin en loin, d’altiers rochers. Parfois même, un tronc taillé par un émule de Stephan Balkenhol présente une forme d’animal, écureuil ou serpent… La pente est raide. Le souffle est court et les propos se font rares. Après une quinzaine de minutes d’ascension, nous voilà au Rams-
tein. Son appellation n’a rien à voir avec le fameux groupe – l’orthographe n’est pas la même – mais provient simplement du terme allemand signifiant “corbeau”. Ne subsiste presque rien de la petite forteresse perchée sur le rocher : un mur profondément lézardé, des soubassements menaçant de tomber qui sont patiemment restaurés par des bénévoles (voir encadré). Pas étonnant que l’accès de la ruine soit interdit au public par Arrêté municipal. Dommage car le lieu vaut le coup. Certains l’ont qualifié de “château de siège”, mais c’est relativement improbable puisqu’il est
L’Ortenbourg, joyau militaire médiéval
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situé à plus de 300 mètres de sa cible… et que la portée des armes de l’époque n’était que de 150 mètres ! Le Ramstein fit sans doute partie d’un réseau de forteresses (une située à Scherwiller, l’autre sur une crête opposée, dont il ne reste guère de traces) destiné à servir de base arrière au cours du siège de l’Ortenbourg et à couper toute communication entre ses défenseurs et l’extérieur. Son histoire est en tout cas inextricablement liée à celle de son prestigieux voisin : le titre de l’ouvrage de Jean Pons, Deux ruines, une histoire commune (1968) est en cela signifiant.
Adagio molto e cantabile
Le Bernstein
Riesling & Carpes frites La Hühnelmühle est un endroit fantastique… puisqu’on y trouve une auberge située juste au pied de l’Ortenbourg où il est possible de manger les meilleures Carpes frites (14,20 €) à l’Ouest du Rio Grande ! Une montagne délicate de poissons frits, une salade de pommes de terres à tomber et un peu de salade verte… Hop ! Si vous n’aimez pas (noooon), possibilité de tester la Truite au bleu (14,50 €). Tous les poissons sont tirés des viviers maisons. Et le vin ? Il vient d’en face, du domaine maison (bis) qui produit un Riesling d’une minéralité à couper le souffle. Comment ne pas vous conseiller le Rittersberg 2007 (13,75 € la bouteille) ? Même le critique américain le
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Quelques mètres de montée et nous voilà face au chef d’œuvre des chefs d’œuvres, un pur joyau de l’architecture militaire médiévale : l’Ortenbourg (ou Ortenberg, du nom de la famille qui le fit bâtir dans le dernier quart du XIIe siècle). En 1262, Rodolphe de Habsbourg modifie le château originel donnant naissance à cette merveille de granit (alors que la plupart des autres forteresses de la région sont en grès) avec son donjon pentagonal de 32 mètres de haut, son imposant rempart pourvu de trois rangées d’archères, son logis seigneurial aux fenêtres gothiques en ogive joliment sculptées, sa cheminée monumentale… Reste qu’il tombe en quelques mois en 1203 sous la poussée des troupes cantonnées au Ramstein, avant de subir les vicissitudes d’une histoire complexe (il servira notamment de repaire à une bande de chevaliers brigands) et d’être partiellement détruit par les Suédois – un grand classique – au cours de la Guerre de Trente Ans.
Presto
plus exigeant, Robert Parker, a succombé à ses charmes, lui accordant 91 points dans l’édition 2010 de son guide qui fait référence. Auberge de la Hühnelmühle, Route du Sel à Scherwiller (d’octobre à avril : à midi, lundi, mardi et jeudi, tout la journée vendredi, samedi et dimanche) 03 88 92 06 04 Le Domaine Jean-Paul Schmitt est juste en face www.vins-schmitt.com
Le retour nous entraine, à travers de denses forêts vers un troisième château fort, un des plus anciens de la région, puisqu’il daterait du début du XIe siècle. Point culminant de la promenade (552 mètres d’altitude), le Bernstein est construit sur un piton rocheux où, dit-on, logeait une famille d’ours (d’où sont nom qui dérive de Bärenstein et n’a rien à voir avec sa traduction allemande signifiant “ambre”). Voilà une autre forteresse de granit relativement bien conservée où l’on distingue un magnifique donjon-bouclier (dans lequel on peut grimper) d’une hauteur de presque 20 mètres. Mais le temps passe et la pluie menace. Descente expresse des escaliers de fer. Direction Dambach avec une dernière halte au programme : la Chapelle SaintSébastien, en plein vignoble du Frankstein.
PROMENADE
La vue est imprenable sur le sillon rhénan et la Forêt noire et, si le temps le permet, il est même possible d’apercevoir la Cathédrale de Strasbourg. Ce ne sera pas pour cette fois. Impossible de ne pas rendre visite au sublime maître-autel baroque de bois (réalisé dans les années 1690) orné d’une belle statue représentant le martyre du Saint. Avant que nos pas nous entrainent dans la vallée, reprendre une existence “normale”, nous faisons un détour par l’ossuaire. Des centaines de tibias, de crânes, de radius et de cubitus nous contemplent depuis le tréfonds des siècles, avec cette inscription sur une plaque de grès : « Ce que vous êtes, nous l’étions. Ce que nous sommes, vous le deviendrez. » La descente se fait dans un silence de plomb…
STRASBOURG 50km
CHAPELLE SAINT SÉBASTIEN
DAMBACH -LA-VILLE NORD
D
552m
BERNSTEIN
681m
LE DACHFIRST
496m
KALTENBERG
À l’assaut de l’Ortenbourg
ROCHER DES CELTES
DIEFFENTHAL
523m
Distance 11 km Temps estimé 4 h Dénivelé 330 m
LE RITTERSBERG
TAENNELKREUZ
444m
ORTENBOURG 390m
RAMSTEIN
Surveiller & Guérir
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es Veilleurs du Ramstein est une association qui œuvre (sous l’égide du Conseil Général du Bas-Rhin), depuis une dizaine d’années, pour que ces fragiles ruines ne tombent pas dans l’oubli. Après des campagnes de débroussaillage (en 2002) est venu le temps de la consolidation des murs, « indispensable pour que l’ensemble se maintienne » explique son président, Claude Frey. Régulièrement, les bénévoles, armés de pelles, de pioches et de truelles montent au château pour travailler. Peu à peu, au fil de leur patient labeur, se révèlent les plans et la structure d’une forteresse qui demeure encore largement méconnue. Gageons que sans eux, le château, en piteux état, serait retourné à la nature.
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GASTRONOMIE
aux sources du goût Dans le Nord de l’Alsace, Pierre Weller pratique une cuisine audacieuse, faisant preuve de créativité et de maîtrise mêlées. Depuis quelques années, La Source des Sens – dont le nom n’est pas usurpé – fait vibrer les papilles.
Par Hervé Lévy Photo de Stéphane Louis pour Poly
La Source des Sens est située 19 route de Haguenau à Morsbronn-les-Bains. Le restaurant est fermé du dimanche soir au mardi midi (inclus). Menus de 14 € (à midi, en semaine) à 60 € 03 88 09 30 53 www.lasourcedessens.fr
À
la fin des années 1970, l’endroit se nommait “Hôtel de la Marne”. Dans cet établissement de bord de Nationale était servie une cuisine bourgeoise de terroir. Les anciens s’en souviennent… Lorsqu’à l’aube du troisième millénaire, Pierre Weller, succédant à ses parents, reprend l’endroit avec Anne, son épouse, ils décident de se tourner vers l’avenir changeant tout, même le nom. En 2006, La Source des Sens était née. En quelques années sortaient de terre un spa, de nouvelles chambres design – les anciennes
étant complètement repensées –, un jardin tendance zen… Les transformations ne sont pas terminées, puisqu’un vaste projet va démarrer, métamorphosant ce qui n’est encore qu’un ★★ (mais qui vaut déjà, à notre sens, bien plus) en ★★★★. Voilà pour l’hôtel. Mais c’est la table qui nous intéresse ici. Après des collaborations avec Alain Ducasse (dans son établissement de Monte-Carlo, trois Macarons au Guide Michelin), Antoine Westermann ou Fernand Mischler (à l’Auberge du Cheval Blanc de Lembach) et une expérience brésilienne à São Paulo, le diplômé de l’École hôtelière de Strasbourg arrive aux fourneaux, des idées – claires – plein la tête, souhaitant développer « une cuisine jeune et fraîche, d’ici et d’ailleurs ». Un beau résumé de l’art de Pierre Weller (tout juste 40 ans), dont on découvre de scintillants et réjouissants éclats dans une salle au design contemporain décorée de quelques œuvres de Raymond Waydelich. Histoire de se souvenir qu’on est en Alsace. Dans l’assiette, c’est une symphonie où la contemporanéité se marie à la tradition qui nous attend avec des cuissons ultra maîtrisées, un jeu habile entre les textures, un choix de produits de belle qualité, une présentation impeccable et… une totale transparence, puisqu’on peut suivre l’élaboration des plats sur un écran géant relié à un caméscope placé au-dessus des fourneaux, un « bidouillage » de Pierre Weller qui avait « toujours rêvé d’une cuisine ouverte ». Que dire du Mignon de veau en picatta de chorizo noisette, purée de Monalisa juste aillée ou du Foie gras de canard poêlé, quetsches rôties au miel, jus aux épices douces et tuile sésame-pavot ? Ils sont tout simplement p-a-r-f-a-i-t-s… et accompagné de vins idoines, puisque le sommelier François – Franz – Machi, toujours en recherche, fait des choix d’une grande pertinence. Décidément, on se baigne avec délice dans les eaux de cette Source…
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GASTRONOMIE
thé russe Événement pour tous les tea addicts : une boutique Kusmi Tea vient d’ouvrir à Strasbourg (29 rue des Hallebardes), la deuxième en province. C’est tout l’univers de la vénérable maison fondée en 1867 à Saint-Pétersbourg par Pavel Michailovitch Kousmichoff qui se déploie dans les efflorescences colorées des boîtes et les fragrances exquises des thés noirs ou verts. Mettez-moi 500 grammes de Prince Wladimir, imaginé en 1888 pour célébrer les 900 ans de la fondation de la Sainte Russie. www.kusmitea.com
burger
américain À Strasbourg, place SaintÉtienne (au n°3), Cédric Moulot – qui tient déjà Le TireBouchon – vient d’ouvrir 231 East St. : si l’adresse vous dit quelque chose, c’est normal, puisque c’était celle de la Factory d’Andy Warhol à NYC dans les années 1960. Ambiance Pop donc pour des burgers de haute qualité gustative élaborés avec les meilleurs ingrédients… Nous voilà loin des stéréotypes et des goûts trop souvent standardisés. Ma parole, c’est bon comme à New York ! www.231-east.fr
cuisinier alsacien On ne présente plus Marc Haeberlin, un des mythes de la gastronomie mondiale, qui tient avec solidité et brio les rênes de L’Auberge de l’Ill (à Illhaeusern) sur laquelle flottent les – plus que mérités – trois Macarons du Guide Michelin. Dans cet ouvrage joliment illustré, il confie ses meilleures recettes, prodiguant aussi au lecteur ses conseils pour les réussir en le guidant pas à pas. Par quoi commencer ? Va pour un Jarret de veau au curry. www.editions.flammarion.com
bière “monde” À l’occasion du troisième Mondial de la bière (du 21 au 24 octobre au Parc des expositions de Strasbourg), Perle, une marque que Poly aime beaucoup, sort une nouvelle bière* comportant des ingrédients venus des cinq continents : houblons américains et néo-zélandais, malt belge et épices de Côte d’Ivoire (maniguette) et de Chine (gingembre). Et comme on est en 2011 et que Christian Artzner est un garçon logique, la boisson titre 11%… Vivement 2050 ! www.biere-perle.com *
L’abus d’alcool est dangereux, à consommer avec modération.
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LES JOURNÉES DE L’ARCHITECTURE
à la mesure de l’homme Cette année, “Architecture sur mesure” est le thème des Journées de l’Architecture. Rencontre avec Christian Plisson, président de la MEA1, organisatrice de la manifestation, autour d’un terme aux acceptions multiples. vaille pas uniquement pour les plus fortunés, le plus grand nombre doit avoir accès au “sur mesure”. En fait, la mesure de toute architecture ne devrait pas être une quelconque unité métrique, mais plutôt l’homme : c’est lui qui doit induire une réflexion sur les largeurs, les hauteurs…
Par Hervé Lévy
Dans tout le Rhin supérieur, du 30 septembre au 4 novembre 03 88 22 56 70 www.ja-at.eu
Renée Gailhoustet, lotissement en centre-ville, Ivry-sur-Seine © Alex S. MacLean
Pourquoi avoir choisi cette thématique pour l’édition 2011 des Journées de l’Architecture ? Chaque année, nous essayons de choisir un thème susceptible de fédérer les énergies, dans tout le Rhin supérieur. La notion de “sur mesure” et, plus généralement, le mot “mesure” (et son corollaire, la démesure) est essentielle. Elle se manifeste de multiples manières en architecture : la question de la hauteur, par exemple, se pose de plus en plus dans nos pays en raison de la densification des villes. Il faut arrêter de gaspiller les sites : construire “la ville sur la ville” devient urgent.
Maison européenne de l’architecture Jeudi 20 octobre à 16h, au TNS. En amont, à 15h, visite guidée du nouveau parvis “sur mesure” du Théâtre
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La multiplicité des contenus possibles qu’on peut injecter dans “sur mesure” est étonnante… Un deuxième champ qui nous intéresse est la dimension sociale de l’architecture : on ne tra-
Comment est-ce possible de construire à la mesure de l’homme dans de grands ensembles ? Le collectif ne tue-t-il pas le “sur mesure” ? L’important est que les habitats puissent s’approprier l’espace : prenez, par exemple, les “Étoiles” d’Ivry-sur-Seine réalisées dans les années 1970 par Renée Gailhoustet et Jean Renaudie. Au cœur d’une opération d’habitat collectif extrêmement dense, ils ont réussi à faire des appartements différents les uns des autres, à créer des espaces et à installer une relation entre le dedans et le dehors grâce à des terrasses végétalisées. On revient à de telles préoccupations aujourd’hui dans des projets créant une plus grande proximité avec la nature… Quelle est, pour vous, une manifestation emblématique de l’esprit des Journées de l’Architecture 2011 ? Difficile de choisir parmi plus de 150 ! S’il ne fallait en citer qu’une, je mentionnerais une table ronde2 avec une femme de théâtre, Julie Brochen, un philosophe, Daniel Payot, et deux architectes Renée Gailhoustet et JeanFrédéric Luscher, autour du thème “L’Habiter implique-t-il le sur mesure ?”. Ce qui nous importe, c’est que les Journées de l’Architecture sortent de la sphère des spécialistes qu’elles rencontrent d’autres disciplines, qu’elles passionnent un large public… Les visites à vélo et les actions en direction du jeune public sont essentielles dans cette optique.
LES JOURNÉES DE L’ARCHITECTURE
archi design Les architectes travaillent bien souvent en étroite collaboration avec les designers. C’est un fait. Certains – citons la plus célèbre, Charlotte Perriand – cumulent même les casquettes… Normal, dès lors, de convier les travaux de designers durant les Journées de l’Architecture, à l’occasion de La Nuit du design. Objets et mobilier stylés sont à découvrir lors d’un parcours by night, dans les rayons des boutiques ou les allées de lieux d’art à Colmar (Roche Bobois, Bulthaup…), Mulhouse (Nomade, Les Ateliers contemporains, la Kunsthalle, Le Quai…) et Strasbourg (Cor+Interlübke, Galerie Fou du roi, Elastabil…). Présentation de quelques perles sélectionnées par les commerçants… La Nuit du design, vendredi 14 octobre, à Colmar, Mulhouse et Strasbourg, à partir de 17h www.ja-at.eu
TAPIS ENTRELAC BIBLIOTHÈQUE LAGO Bibliothèque et rangements du système Air / 36e8 de la collection Lago. Etagères en bois laqué montant et portes recouvertes de verre mat ou brillant. Design : Danièle Lago.
Le tapis 100% laine Entrelac designé par Marie-Aurore Stiker-Metral. Ce tapis (207 x 297 cm) est tufté main, ciselé pour donner un effet saisissant de tressage. Quartz Mobilier Contemporain, 7 / 9 route de Neuf Brisach, à Colmar (autre boutique Quartz à Mulhouse, 20 rue des Tanneurs) 03 89 23 20 48 – www.quartz-design.fr
Kintz Collections, 8 passage de l’Hôtel de ville à Mulhouse 03 89 46 18 17
TABLE TAVOLO TOMMASO Le fabriquant Zeus Noto présente cette grande table épurée en tôle d’acier, découpée et courbée, conçue par Doriana et… Massimiliano Fuksas, invité d’honneur des Journées de l’Architecture. Quartz & Kartell, 8 / 9 Quai St-Jean à Strasbourg 03 88 22 47 78 – www.quartz-design.fr
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LES JOURNÉES DE L’ARCHITECTURE
transformer
Intitulée Extension, Rénovation, Réhabilitation, cette exposition, initiée par L’Architektenkammer Baden-Württemberg est une réflexion sur les modifications réussies de bâtiments d’habitation existants. Comment métamorphoser le bâti ? Quels sont les critères permettant d’innover en respectant l’architecture déjà en place ? Voilà des questions d’autant plus essentielles que, bien souvent, adjonctions et modifications ressemblent plus à des verrues qu’à des réussites ! À Karlsruhe, à l’Architekturschaufenster, du 4 au 19 octobre www.architekturschaufenster.de
Deux habitations sur la ruine du château Mauren, Ehningen. Architecte: Ingo Bucher-Beholz, Gaienhofen. Photo de Sandra Jöhle
pédaler
© ixo architecture
Rendez-vous désormais traditionnels des Journées de l’Architecture, les parcours à vélo permettent de découvrir la richesse architecturale du coin à un rythme paisible… guidés par des spécialistes. Quelques suggestions alsaciennes : une balade mulhousienne sur le thème “La mesure de la ville, de gare en gare” (dimanches 2 et 9 octobre), une errance inspirée à Strasbourg “Du haut des parkings au pied des tours” (dimanches 2, 9 et 16 octobre) ou encore une randonnée cycliste au titre énigmatique : “Colmar sur mesure” (dimanches 2, 9 et 16 octobre). www.ja-at.eu
imaginer
Quel sera le visage de la ville demain ? Face à cet enjeu majeur, Strasbourg a choisi de présenter les projets issus de 15 concours d’architecture. Pour réfléchir à la forme de l’espace urbain, un voyage dans le futur est proposé au citoyen… Du Palais de la musique et des congrès au groupe scolaire Branly, en passant par le gymnase Jacqueline ou les piscines de la Kibitzenau et de Lingolsheim. Demain, c’est déjà aujourd’hui ! À Strasbourg, au Centre administratif, du 7 octobre au 3 novembre www.strasbourg.eu Extension du Palais de la musique et des congrès (Rey-Lucquet & Dietrich-Untertrifalle) 78
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LES JOURNÉES DE L’ARCHITECTURE
un lieu
Instant d’exception au Zénith de Strasbourg : entre le “Jamel tour” (mercredi 5 octobre) et le concert de James Blunt (mercredi 12 octobre) se déroule la soirée d’ouverture des Journées de l’Architecture. Au programme, une rencontre avec le concepteur du lieu, une star de l’architecture mondiale, Massimiliano Fuksas (né en 1944) qui découvrit la couleur avec un des meilleurs maîtres, Giorgio De Chirico. De ses premières réalisations – funéraires, comme le rempart de tuf d’inspiration étrusque du cimetière d’Orvieto – à ses créations récentes – la Armani Ginza Tower (2008), par exemple – le directeur de la Biennale de Venise en 2000 est toujours resté fidèle à son credo : « Je conçois toujours mes projets sous l’aspect de trois lumières : la lumière directe naturelle, la lumière indirecte telle qu’on la perçoit ici et là en des points particuliers et la lumière mystérieuse, magique, dont on ne sait pas d’où elle vient. » Une rencontre rare pour une soirée qui ne le sera pas moins… et s’achèvera en musix avec Panimix.
Le Zénith de Strasbourg (Massimiliano Fuksas architecte) © Christian Deschler
un homme,
À Strasbourg, au Zénith, vendredi 7 octobre www.zenith-strasbourg.fr www.fuksas.it
les enfants L’architecture n’est pas qu’une affaire de grandes personnes. Chaque année, la Maison de l’Architecture propose en effet un concours aux élèves des établissements scolaires du Rhin supérieur (de la maternelle à la terminale). L’année passée, 98 classes venant de France (cinq villes), Allemagne (quatre cités) et Suisse (deux cantons) s’étaient impliquées dans une compétition qui avait pour thème “Invite-nous dans ton musée”. Pour 2011, appel a été lancé pour réaliser des maquettes ayant pour sujet “École en rêve”… Imaginer son école idéale, n’est-ce pas le fantasme de tout enfant ? Utopie, révolte contre l’ordre établi, fraîcheur du regard, imagination débridée… Ces projets, exposés dans plusieurs villes, nous permettront de découvrir l’inventivité des plus jeunes… dont certains “grands” ne manqueront pas de s’inspirer.
Le musée du toucher (2010) © Isabelle Mallet
aussi…
À Mulhouse, au Temple Saint-Étienne et à Sélestat, à la Médiathèque, du 17 au 22 octobre À Offenburg, au Museum im Ritterhaus, du 22 au 28 octobre À Freiburg, à l’Architekturforum, du 24 au 28 octobre À Bâle au Bau-und Verkehrsdepartement Basel-Stadt im Lichthof, du 1er au 11 novembre
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DESIGN
Alea iacta est © D-Light / Christian Koch
chic planète Une belle dose d’imagination, un soupçon d’enfance, une pincée de préoccupations écolos et un travail sur les formes et les mots : voilà le secret de La Boule verte qui roule depuis quelques années grâce au talent de Christina Stein. Par Hervé Lévy
On peut trouver les objets de La Boule verte chez 197.Design (197, avenue de Strasbourg à Brumath) et sur le site de la créatrice www.la-boule-verte.com
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S
i elle est formellement née en 2007, La Boule verte tournicotait dans la tête de sa créatrice depuis quelques années déjà : « C’était comme une crise de la quarantaine… avant la quarantaine » résume Christina Stein. Il est vrai qu’a priori rien ne destinait cette Allemande résidant à Strasbourg au design : « Je n’avais aucune formation dans le domaine. » Ses études ? Sciences politiques à Fribourg. Son job depuis 1995 ? Journaliste free lance, elle traitait l’actualité culturelle et politique alsacienne pour des journaux et des radios du pays de Bade. Désormais, cette autodidacte complète est aussi « créatrice d’objets », une vocation embrassée tout naturellement : « J’ai besoin de changer d’activité tous les dix ans », affirme-t-elle dans un éclat de rire.
Les mots
À dix ans Christina dessinait, découpait, coloriait et créait des “jeux utilitaires” pour sa mère : « Elle ne savait jamais quoi cuisiner, alors j’ai imaginé un plateau avec six trous. Dans chacun se trouvait une recette. Il suffi-
sait de lancer un dé pour savoir laquelle faire. Évidemment, il n’y avait que des plats que j’aimais, comme des spaghettis bolognaise. » De son enfance, elle a gardé l’envie d’imaginer des choses à la fois ludiques et fonctionnelles : « Un objet doit être pratique et faire réfléchir ou rire – et pourquoi pas les deux ? – celui qui s’en empare. Le beau pour le beau, complètement gratuit, ne m’intéresse pas ». Est ainsi né un Escargot tout chaud : si la référence à une comptine célèbre est évidente, l’objet ne tombe pas, pour autant, dans un gnangnan régressif. Il s’agit plutôt d’un amical clin d’œil à l’enfance qui constitue le dénominateur commun des objets estampillés La Boule verte. En témoigne cet Escargot… un bougeoir de table d’une cinquantaine de centimètres de diamètre rassemblant vingt bougies chauffe-plat et permettant d’éclairer toute une pièce. Une phrase évoquant le tourbillon de la vie y est gravée : pour résoudre les problèmes techniques posés par l’objet, il a fallu faire appel à un menuisier de haut vol que Christina a trouvé tout près de chez elle. C’est un credo : « produire localement et, donc, chercher des artisans pour réaliser mes idées en Alsace et de l’autre côté du Rhin est primordial. La Boule verte est une coopération franco-allemande ». Est-ce pour des raisons écolos que cette Boule est verte ? « Oui… Il s’agit d’un hommage à la planète bleue. » Les mots comme point de départ. Toujours. On le découvre dans Notre pain quotidien, une planche de bois et une série de six planchettes sur lesquelles on peut manger – « typisch deutsch » – gravées de slogans : être & paraître, rire & pleurer… Comme un résumé des sentiment contradictoires que l’on peut ressentir de manière concomitante dans l’existence.
maine : « Chacun est unique et peut faire sens tout seul. Mais ils sont tellement plus jolis ensemble. » Les arrêtes coupées, voilà Alea iacta est – « parce qu’il n’y a pas de “j” en latin » – trois cubes qui restituent la trajectoire d’un dé en train de rouler (le premier se tient sur une face, le deuxième sur un angle, le troisième sur une pointe) pour nous rappeler que « peu importe que l’on soit le dé ou celui qui le lance, seul le changement est éternel dans notre vie ». Dans cet autre vase, objet de “dé-design”, se trouve concentrée la philosophie, optimiste et joyeuse, qui irrigue toutes les inventions de Christina Stein.
Escargot tout chaud © Bartosch Salmanski
Les formes
Christina aime les formes simples. Son minimalisme fonctionne cependant, éloigné de toute austérité rigide, car il demeure empreint de fraicheur. Et nous ne sommes guère surpris d’apprendre qu’un de ses référents artistiques majeurs se nomme Hans Arp (auquel elle rendra hommage dans une de ses futures créations, un vase flottant encore en gestation). Sa figure géométrique de prédilection est le cube. Elle l’a décliné… Unique, il se nomme Tube cube, un soliflore massif en forme d’invitation au jeu. Multiples, ces cubes composent Les Cinq continents : différentes couleurs de bois, différentes textures, différentes masses… Un vase comme un reflet de la diversité huPoly 143 Octobre 11
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midam
scénariste et dessinateur
Dernier gag trop osé. Dans Panik room, Kid explique pourquoi les noirs courent toujours le 100 mètres plus vite que les autres de manière assez… osée ! Dernière manette fracassée. Je joue très peu en fait, mais il m’arrive régulièrement d’écraser mes pinceaux d’encrage sur mon bureau lorsqu’ils fourchent et m’empêchent de faire de belles lignes. Dernier Blork croisé dans la vraie vie. Je me demande parfois si je ne suis pas cerné par les Blorks. Dernière tentative de vous récupérer. Les Éditions Soleil. J’avais fait Harding was here chez eux mais ils ne pensaient qu’à attirer Kid Paddle dans leur giron. Dernier moment kafkaïen. Une séance de dédicaces à la Fnac des Halles. Une panne de courant a plongé dans le noir tout le 1er arrondissement de Paris. Tout le monde a été évacué, sauf l’équipe de la MAD Fabrik qui a décidé de rester avec le public dans le forum… Dernier coup de gueule. Quand Dupuis, auquel appartient le fonds des premiers tomes de Kid Paddle, a réussi à réimprimer des albums avec des couvertures floues ! 82
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Dernière folie. Une montre Hublot. Dernière remarque de fan. Un gosse qui me dit : « Pourquoi Kid a deux dents de lapin sur la couverture de Waterminator ? » Preuve que les enfants voient tout et regardent mieux que nous… Enfin que moi en tout cas (rire) ! Dernier “game over”. Une triple hernie discale après un déménagement de canapé. J’ai dormi assis pendant un mois tout en ayant mal. J’étais vraiment game over ! Dernier livre lu. Un Homme de Philippe Roth. Dernière volonté. Je suis né dans la commune d’Etterbeek à Bruxelles, comme Franquin et Hergé. Quand je suis en Belgique, je cherche toujours à l’éviter car je ne veux pas y mourir. Ce serait pour moi le comble du looser qu’on écrive “né et mort à Etterbeek, Belgique”. Dernière BD. Kid Paddle, Panik room, tome 12, édité par MAD Fabrik (10,50 €)
e e l a t i enn Cap é p ro eu
CONCEPTION REYMANN COMMUNICATION // MONTAGE BKN.FR // LICENCES D’ENTREPRENEURS DE SPECTACLES N° 2 : 1006168 ET N°3 : 10066169
Orchestre PHILHARMONIQUE DE STRASBOURG ORCHESTRE NATIONAL
DIMANCHE 16 oCtobrE Auditorium de lA Cité de lA musique et de lA dAnse 11H • Anne Clayette flûte • Stéphanie Corre clarinette • Philippe Bertrand basson • Patrick Caillieret cor • Hugues Chabert piano GlinkA Trio pathétique en ré mineur rossini Quatuor à vents n° 6 rimsky-korsAkov Quintette pour piano et vents en si bémol majeur
SAISoN 2011>2012
Renseignements : 03 69 06 37 06 / www.philharmonique.strasbourg.eu Billetterie : caisse OPS entrée Schweitzer du lundi au vendredi de 10h à 18h Boutique Culture, 10 place de la cathédrale du mardi au samedi de 12h à 19h
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