Poly 245 - Avril 2022

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N°245

AVRIL APRIL

2022 POLY.FR

MAGAZINE

Lika Nüssli Auguste Renoir Louise Bourgeois Berliner Philharmoniker

Champagne !

DOSSIER



Oraison © Ryo Ichii

BRÈVES IN KÜRZE

Life Circus

La 14e édition de Prise de CirQ’ investit la métropole de Dijon (14-27/04). S’y déploient le travail de cerceaux aériens Cha Cha Chabelita (15 & 16/04, Jardin de l’Arquebuse) ou encore l’Oraison autour du clown blanc de la compagnie Rasposo (15-23/04, sous chapiteau, Quetigny). Die 14. Auflage von Prise de CirQ’ erobert die Metropole Dijon (14.-27.04.). Hier zeigt sich die Arbeit der Luft-Reifen Cha Cha Chabelita (15. & 16.04., Jardin de l’Arquebuse) oder auch Oraison rund um den Weißen Clown der Truppe Rasposo (15.-23.04., im Zirkuszelt, Quetigny). cirqonflex.fr

Ice S’attaquant au changement climatique, le photographe Thomas Wrede expose La Neige était blanche à la Städtische Galerie Neunkirchen (08/04-17/07). Dans cette impressionnante série, il immortalise la fonte des glaciers : « Je voulais trouver des images qui rendent visibles les traces de la crise climatique et la lutte presque désespérée contre ces changements rapides », explique-t-il.

Au Musée de l’image populaire de Pfaffenhoffen, les "collections maison" croisent celles du Frac Alsace dans Les Images de la vie (jusqu’au 30/04), questionnant les grandes étapes de l’existence. Ainsi, les souhaits de baptême voisinent-ils avec les clichés de Françoise Saur (p. 82), tandis qu’une sculpture de Jean Claus dialogue avec des textes offerts aux mariés. Im Musée de l’image populaire in Pfaffenhoffen treffen die Sammlungen auf jene des Frac Alsace in Die Bilder des Lebens (bis 30.04.), das die großen Etappen der Existenz hinterfragt. So stehen Taufwünsche den Aufnahmen von Françoise Saur (S. 82) gegenüber, während eine Skulptur von Jean Claus einen Dialog mit Texten für Brautpaare eingeht. commune-valdemoder.fr

Rhonegletscher II, 2018 © VG Bild-Kunst, Bonn 2022 / Courtesy Beck & Eggeling

Der Photograph Thomes Wrede thematisiert mit Weiß war der Schnee in der Städtischen Galerie Neunkirchen den Klimawandel (08.04.-17.07.). In dieser beeindruckenden Serie hält er die Gletscherschmelze fest: „Ich wollte Bilder finden, die die Spuren der Klimakrise und den fast hoffnungslosen Kampf gegen diese rapiden Veränderungen in unserer Heimat sichtbar werden lassen sollen“, erklärt er. staedtische-galerie-neunkirchen.de POLY 245

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L’Assemblé © Maël Gros

Ghost Light © Emmanuel Burriel

BRÈVES IN KÜRZE

Air

Ground

Au Moulin de la Blies de Sarreguemines, la 6e édition de MADE IN IEAC (jusqu’au 31/07) met à l’honneur la création céramique contemporaine avec les pièces réalisées par quatre jeunes talents fraîchement diplômés de l’Institut européen des Arts céramiques de Guebwiller. Coup de cœur pour les assemblages de couleur de Solène Dietz ! Im Moulin de la Blies in Sarreguemines ehrt die 6. Auflage von MADE IN IEAC (bis 31.07.) die zeitgenössische Keramik-Kreation mit Stücken, die von vier jungen Talenten realisiert wurden, die frische Absolventen des Institut européen des Arts céramiques in Guebwiller sind. Einer unserer Favoriten sind die Farb-Assemblagen von Solène Dietz! sarreguemines-museum.eu

Le transfrontalier Festival Perspectives (02-11/06) fait son grand retour sur scène, en présentiel ! À Sarrebruck et en Moselle se déploient pièces de théâtre, spectacles de danse et autres concerts façon club berlinois underground. Avec Ghost Light – Entre la chute et l’envol (Hôtel de Ville de Sarreguemines, 10/06), les virtuoses acrobates de la compagnie Machine de cirque suspendent le temps grâce à leur poétique bascule. Das grenzüberschreitende Festival Perspectives (02.11.06.) ist zurück auf der Bühne, in Live und in Farbe! In Saarbrücken und in Lothringen entfalten sich Theaterstücke, Tanzaufführungen und Konzerte nach Art der Berliner Underground-Clubs. Mit Ghost Light – Entre la chute et l’envol (Hôtel de Ville von Sarreguemines, 10.06.), lassen die virtuosen Akrobaten der Truppe Machine de cirque die Zeit dank ihrer poetischen Wippe stillstehen. festival-perspectives.de

River

Pour la photographe bretonne Léonie Pondevie, les paysages sont le reflet de notre société. Sur les cimaises du strasbourgeois pôle visuel Simultania, Le Fleuve et son île (jusqu’au 24/04), résultat de sa résidence à Givors, fait le récit de son exploration entre rives du Rhône et ponts autoroutiers. Für die bretonische Photographin Léonie Pondevie sind die Landschaften ein Abbild unserer Gesellschaft. An den Wänden des Straßburger Pôle visuel Stimultania, erzählt Le Fleuve et son île (bis 24.04.), das Ergebnis ihrer Residenz in Givors, von ihrer Erkundung zwischen dem Ufer der Rhône und den Autobahnbrücken. simultania.org POLY 245

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BRÈVES IN KÜRZE

Ostern

© Karine Faby

Pâques

© Tom Gundelwein / Weltkulturerbe Völklinger Hütte

Pour Pâques, Nicolas Multon, chef pâtissier de la Villa René Lalique, a imaginé un œuf, en hommage au centenaire de la manufacture. Il évoque une mailloche en bois, saisissant le moment où le verrier cueille une goutte de cristal en fusion au creuset à l’aide d’une canne. Zu Ostern hat Nicolas Multon, der Chef-Patissier der Villa René Lalique ein Ei als Hommage an die Hundertjahrfeier der Manufaktur kreiert. Es erinnert an einen Holzhammer und hält den Moment fest, an dem der Glasbläser einen Kristalltropfen mithilfe eines Stocks aus dem Schmelztiegel entnimmt. villarenelalique.com

Banzaï

À Strasbourg, la Bibliothèque nationale et universitaire convie à explorer l’univers des Samouraïs, guerriers et esthètes (jusqu’au 13/07) au-delà des clichés. Prenant pour pivot la garde de leur sabre – ou tsuba – cette passionnante exposition nous en apprend beaucoup sur le Japon du Xe siècle à la fin du XIXe, battant en brèche l’image qu’en ont fixée les films de sabre et les récits légendaires. In Straßburg lädt uns die Bibliothèque nationale et universitaire dazu ein das Universum der Samurai, Krieger und Ästheten (bis 13.07.) jenseits der Klischees zu entdecken. Dreh-und Angelpunkt dieser begeisternden Ausstellungen, die uns vieles über Japan vom 10. bis 19. Jahrhundert lehrt, ist ihr Säbel – oder tsuba – und die Bilder, die Filme und legendäre Erzählungen erzeugt haben, werden neu eingeordnet. bnu.fr

Tsuba Kawarigata, Époque Edo Edo-Zeit, Coll. part Privatsammlung

Like a star

La Völklinger Hütte, monstre de fer tentaculaire de Voelklingen, offre ses entrailles au Monde des vidéo-clips pour une exposition témoignant de la créativité de ce genre devenu le terrain de jeu des plus grands artistes (jusqu’au 16/10). L’occasion de re-découvrir Baby Baby Baby du groupe d’electro Make the Girl Dance avec ses interprètes anonymes, nues dans les rues de Paris ! Die Völklinger Hütte, das weitverzweigte Eisenmonster, bietet in seinem Inneren The World of Music Video, für eine Ausstellung, die von der Kreativität dieses Genres zeugt, das den größten Künstlern als Spielwiese dient (bis 16.10.). Die Gelegenheit Baby Baby Baby der Elektro-Gruppe Make the Girl Dance wieder zu entdecken mit ihren anonymen Interpreten, die nackt durch die Straßen von Paris ziehen! voelklinger-huette.org POLY 245

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THOMAS FLAGEL

SARAH MARIA KREIN

Théâtre des balkans, danse expérimentale, graffeurs sauvages, auteurs africains… Sa curiosité ne connaît pas de limites. Il nous fait partager ses découvertes dans Poly.

Cette française de cœur qui vient d’outre-Rhin a plus d’un tour dans son sac : traduction, rédaction, corrections… Ajoutons “coaching des troupes en cas de coup de mou” pour compléter la liste des compétences de SMK.

Balkantheater, experimenteller Tanz, afrikanische Autoren... seine Neugierde ist grenzenlos !

Diese Französin im Herzen ist mit allen Wassern gewaschen: Übersetzung, Redaktion, Korrektion... Fügen wir „Truppenmotivation im Falle von Durchhängern“ hinzu.

Berlin Bear © Geoffroy Krempp

OURS Liste des collaborateurs d’un journal, d’une revue (Petit Robert) Liste aller Mitarbeiter einer Zeitschrift (Duden)

www.poly.fr — www.poly.fr/de mag.poly

magazine.poly

DIRECTEUR DE LA PUBLICATION HERAUSGEBER Julien Schick julien.schick@bkn.fr RÉDACTEUR EN CHEF CHEFREDAKTEUR Hervé Lévy herve.levy@poly.fr LA RÉDACTION DIE REDAKTION Thomas Flagel thomas.flagel@poly.fr

JULIEN SCHICK

ANAÏS GUILLON

Il papote archi avec son copain Rudy, cherche des cèpes dans les forêts alsaciennes, se perd dans les sables de Namibie… Mais comment fait-il pour, en plus, diriger la publication de Poly ?

Entre clics frénétiques et plaisanteries de baraque à frites, elle illumine le studio graphique de son rire atomique et maquette à la vitesse d’une Fiat 500 lancée entre Strasbourg et Bietlenheim. Véridique !

Er plaudert mit seinem Freund Rudy über Architektur, sucht Morcheln in den elsässischen Wäldern. Aber wie schafft er es nebenbei Herausgeber von Poly zu sein?

Zwischen frenetischen Klicks und Wurstbuden-Humor erhellt sie das GraphikStudio mit ihrem atomaren Lachen.

Suzi Vieira suzi.vieira@bkn.fr

TRADUCTRICE ÜBERSETZERIN Sarah Krein sarah.krein@bkn.fr ONT PARTICIPÉ À CE NUMÉRO HABEN AN DIESER AUSGABE TEILGENOMMEN Lucie Chevron, Geoffroy Krempp, Pierre Reichert, Irina Schrag, Daniel Vogel, Éric de Subeut & Raphaël Zimmermann STUDIO GRAPHIQUE GRAFIKSTUDIO Anaïs Guillon anais.guillon@bkn.fr

Camille Dorland studio@bkn.fr

DIGITAL Jordan Herth webmaster@bkn.fr MAQUETTE LAYOUT Blãs Alonso-Garcia logotype Anaïs Guillon maquette avec l’équipe de Poly

SUZI VIEIRA

ÉRIC MEYER

ADMINISTRATION GESCHÄFTSFÜHRUNG

Après Courrier international ou Books, elle pose ses valises à Poly. Intraitable avec les concepts, elle jongle avec les mots comme son homonyme le faisait avec les ballons à la Coupe du monde 1998.

Ronchon et bon vivant. À son univers poétique d’objets en tôle amoureusement façonnés s’ajoute un autre, description acerbe et enlevée de notre monde contemporain.

Mélissa Hufschmitt melissa.hufschmitt@bkn.fr +33 (0)3 90 22 93 30

Nach Courrier international und Books, ist sie bei Poly angekommen. Unnachgiebig wenn es um Konzepte geht, spielt sie mit den Worten, wir ihr Homonym mit den Bällen bei der Fußballweltmeisterschaft 1998.

Miesepeter und Lebenskünstler. Zu seinem poetischen Universum von Objekten aus Blech kommt ein weiteres hinzu, die bissige und virtuose Beschreibung unserer zeitgenössischen Welt, die er graviert.

Verpassen Sie keine Ausgabe von POLY mehr! Schicken Sie eine Email mit ihrer Anschrift an administration@bkn.fr Bitte überweisen Sie das Porto an folgende Bankdaten:

DIFFUSION VERTRIEB Vincent Bourgin vincent.bourgin@bkn.fr +33 (0)3 90 22 93 32 CONTACTS PUB ANZEIGENSCHALTUNG Julien Schick julien.schick@bkn.fr Sarah Krein sarah.krein@bkn.fr Laetitia Waegel laetitia.waegel@bkn.fr Pierre Ledermann pierre@poly.fr Patrice Brogard patrice@poly.fr Benjamin Lautar benjamin@poly.fr BKN Éditeur & BKN Studio 16 rue Édouard Teutsch 67000 Strasbourg www.bkn.fr Magazine mensuel édité par BKN Dépôt légal : Mars 2022 — Impression : CE S.à.R.L. au capital de 100 000 € SIRET : 402 074 678 000 44 — ISSN 1956-9130

Magazin POLY / Éditions BKN IBAN FR76 3008 7330 0100 0201 6510 123 BIC : CMCIFRPP ► 6 deutsch-französische Ausgaben 30€ ► 11 Ausgaben (französisch + deutsch-französisch) 50€ 8

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© Poly 2022 Les manuscrits et documents publiés ne sont pas renvoyés. Tous droits de reproduction réservés. Le contenu des articles n’engage que leurs auteurs.



SOMMAIRE INHALTSVERZEICHNIS

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Dossier Champagne ! 56

SCÈNE BÜHNE 52 Queen Blood, dernière pièce d’Ousmane Sy, figure majeure de la danse hip-hop Queen Blood, das letze Stück von Ousmane Sy, der großen Figur des Hip-Hop-Tanzes 56 Quand Christophe Marthaler n’a Aucune idée, le dérisoire et l’absurde deviennent un art de vivre Wenn Christophe Marthaler Keine Idee hat, werden das Lächerliche und das Absurde zur Lebenskunst

MUSIQUE MUSIK 62 Le rappeur Georgio évoque son monde fait de flow et de littérature Der Rapper Georgio über seine Welt aus Flow und Literatur

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66 La musique chamanique d’Anne Paceo nous met en transe Die schamanische Musik von Anne Paceo versetzt uns in Trance 74 Les Osterfestspiele de Baden-Baden honorent les compositeurs russes Die Osterfestspiele in Baden-Baden ehren die russischen Komponisten

EXPOSITION AUSSTELLUNG

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78 Rencontre entre Renoir et les artistes du rococo à Francfort-sur-le-Main Begegnung zwischen Renoir und den Künstlern des Rokoko in Frankfurt am Main 90 À Bâle, Jenny Holzer compose un parcours Louise Bourgeois In Basel trifft Jenny Holzer auf Louise Bourgeois 92 Les dessins de Haleh Zahedi forment une jolie Mise en plis Die Zeichnungen von Haleh Zahedi bilden eine schöne Wasserwelle 78

COUVERTURE TITELBILD “Artiviste” revendiquée, Lika Nüssli est co-éditrice du zurichois magazine de comics underground Strapazin. En 2017, face à la montée des populismes en Europe et aux discours de haine qui fleurissent de Cologne à Berne contre les réfugiés, l’illustratrice commet un dessin en forme de lumineux appel à la résistance contre la terreur et ses dérives autoritaires : « Bye Bye Fear, Hello Peer » (« Au revoir la peur, bonjour mes frères »). Une œuvre présentée dans le cadre de l’exposition Enivrement du Cartoonmuseum Basel (voir p. 96). Die bekennende „Artivistin“, Lika Nüssli ist Co-Herausgeberin des Underground-Comic-Magazins Strapazin in Zürich. Im Jahr 2017 im Angesicht des zunehmenden Populismus in Europa und den Hassdiskursen, die von Köln bis Bern gegen Flüchtlinge aufblühen, zeichnet die Illustration eine strahlenden Appell zum Widerstand gegen Angst und ihre autoritären Ableger: „Bye Bye Fear, Hello Peer“ („Auf Wiedersehen Angst, Guten Tag meine Brüder“). Ein Werk, das im Rahmen der Ausstellung Im Taumel im Cartoonmuseum präsentiert wir (siehe S. 96). cartoonmuseum.ch – likanuessli.ch 10

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ÉDITO

I hope the Russians love their children too Par Von Hervé Lévy — Illustration de von Éric Meyer pour für Poly

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a soprano ukrainienne Liudmyla Monastyrska étreint longuement la mezzo russe Ekaterina Gubanova à la fin d’une représentation d’Aïda au Teatro di San Carlo de Naples. Quel plus bel acte existe-t-il pour affirmer la fonction de l’art dans notre monde plongé dans le chaos depuis quelques mois ? Bien évidemment, c’est dérisoire en comparaison des bombes s’abattant sur Marioupol. Mais qu’est-ce qui ne l’est pas ? Symboliquement, cette image est tellement plus digne, forte et nécessaire que les rodomontades hypocrites d’un BHL, allant tagguer « Liberté, Égalité, Fraternité », sur une barricade d’Odessa ou que les décisions de certaines institutions choisissant de boycotter les musiques russes. « Poutine partira. Tchaïkovski restera », éclata Marek Halter à qui on ne saurait donner tort, sur ce coup-là… Alors oui, poursuivons notre mission de passeurs dont témoignent les pages qui suivent, écrites une boule au ventre mais avec l’espoir d’une paix possible chevillé à l’âme. 12

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D

ie ukrainische Sopransängerin Liudmyla Monastyrska umarmt am Ende der Vorstellung einer Aïda im Teatro di San Carlo in Neapel lange die russische MezzoSopransängerin Ekaterina Gubanova. Welch schöneren Akt könnte es geben um die Funktion der Kunst zu unterstreichen, in unserer Welt, die seit einigen Monaten in Chaos getaucht ist? Natürlich ist das lächerlich gegenüber den Bomben, die auf Mariupol fallen. Aber was wäre das nicht? Symbolisch ist dieses Bild so viel würdevoller, stärker und nützlicher als die heuchlerischen Prahlereien eines BHL, der „Liberté, Égalité, Fraternité “auf die Barrikaden von Odessa sprüht oder die Entscheidungen einiger Institutionen die russische Musik zu boykottieren. „Putin wird gehen. Tschaikowski wird bleiben“, sagte Marek Halter, dem man nur beipflichten kann... Also ja, setzen wir unsere Mission als Kulturvermittler fort, von der die folgenden Seiten zeugen, geschrieben mit einem Kloß im Magen aber mit der unsterblichen Hoffnung auf einen möglichen Frieden in der Seele.


Gastronomie Culture Kultur Tourisme Tourismus

Sacy © Cyrille Beudot - Office de Tourisme du Grand Reims


Champagne pour tous De Reims à Épernay, de Châlons à Aÿ, des vignobles ont façonné une civilisation. Escapade en Champagne, entre gastronomie, patrimoine et culture, dans une région où Art et Histoire se mêlent indissolublement.

Champagne für alle Von Reims bis Épernay, von Châlons bis Aÿ, haben die Weinbaugebiete eine Zivilisation geformt. Ausflug in die Champagne, zwischen Gastronomie, Kulturerbe und Kultur, in eine Region, in der Kunst und Geschichte aufs Engste miteinander verknüpft sind. Par Von Hervé Lévy

Phare de Leuchtturm von Verzenay © Cyrille Beudot - Office de Tourisme du Grand Reims

D’

Reims © Carmen Moya

abord, il y a des paysages. Echappées belles somptueuses où la mélancolie de grands espaces piquetés de rares villages se confond avec des alignements au cordeau de vignes célèbres dans le monde entier, inspirant les poètes : « Bonjour soldats bouteilles champenoises où le sang fermente / Vous resterez quelques jours et puis remonterez en

Villa Demoiselle 14

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ligne / Échelonnés ainsi que les ceps de vigne / J’envoie mes bouteilles partout comme les obus d’une charmante artillerie », écrivit Apollinaire. Le Dom de Dieu Mais à quand remonte cette révolution faisant naître un vin effervescent ? Ses origines se perdent dans la légende, attribuant l’affaire au fameux Dom Pérignon, à l’abbaye d’Hautvillers. Les historiens ont un gros doute. Reste que le Champagne apparaît en France au début du XVIIIe siècle. La suite de cette épopée est narrée au Musée du vin de Champagne (Épernay) où l’on apprend tout sur un breuvage dont l’AOC s’étend sur 34 300 hectares répartis sur cinq départements et quatre grandes régions : Montagne de Reims, Vallée de la Marne, Côte des Blancs et Côte des Bar. Pour l’expérience sensorielle, on préfèrera Pressoria (Aÿ), parcours immersif sollicitant les cinq sens. Et bien évidemment la visite de 1 001 caves, labyrinthes de craie peuplés de millions de flacons dans de vénérables maisons qui ont su se mettre au goût du jour en développant un réel tropisme pour l’art contemporain. Cuvées luxueuses conçues avec des plasticiens, caves métamorphosées en espaces d’exposition comme chez Pommery, etc.


© Vincent VDH

La Comédie de Reims

Le réveil de Reims Une Cathédrale comme un ostinato de pierre avec son ange à l’énigmatique sourire, Mona Lisa sculptée. « La façade est une des plus magnifiques symphonies qu’ait chantées cette musique, l’architecture », écrivit Victor Hugo. La merveille gothique où furent sacrés les rois de France éclipse trop souvent la beauté d’une ville martyre en 14-18, dont la reconstruction doit beaucoup aux milliardaires américains, Carnegie et Rockefeller. Autre guerre, autre histoire : un musée rappelle que la reddition du Troisième Reich y fut signée par Jodl le 7 mai 1945. À Reims, se nichent des joyaux comme la Basilique Saint-Rémi qui palpite de douceur et d’émotion, un ensemble

© Cyrille Beudot - Office de Tourisme du Grand Reims

À travers villes et villages La déambulation nous emporte à Épernay et sa célèbre avenue du Champagne bordée de somptueuses folies architecturales reflétant la puissance et la gloire de leurs propriétaires – Moët & Chandon, Perrier-Jouët, Boizel, Mercier, etc. – sous lesquelles 110 kilomètres de caves abritent plus de 200 millions de bouteilles ! Arpenter les “Champs-Élysées” sparnaciens est une charmante expérience tout comme la visite du phare de Verzenay : planté dans un océan de ceps, cet édifice de béton érigé en 1909 afin de vanter les mérites du Champagne Joseph Goulet a été métamorphosé en Musée de la vigne. Parmi les autres curiosités, on ne manquera pas la Cave aux Coquillages (Fleury-la-Rivière), excursion géologique où de gigantesques fossiles rappellent qu’une mer tropicale recouvrait la région il y a 45 millions d’années. Enfin, notre coup de cœur va à la charmante Aÿ et ses bâtisses Art déco, où René Lalique vit le jour.

Palais du Tau POLY 245

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© ADT Marne

Cathédrale - Reims architectural Art déco unique, la place royale à l’altier classicisme ornée d’une statue de Louis XV ou encore la chapelle décorée dans les sixties par Foujita, fraîchement converti au catholicisme. La cité se prête à la déambulation amoureuse, la main dans la main, dans un étrange romantisme à l’accent frenchy, les yeux levés vers les étoiles de pierre polychromes de sa Cathédrale… Longtemps la cité fut la belle endormie : souvenirs de la fin des années 1980 où l’on écoutait de la bonne zik au Tigre. Le reste ? Pas grand-chose ! Aujourd’hui, elle a bien changé, notamment boostée par la culture qui irradie dans toute la région.

Z

unächst sind da die Landschaften. Schöne Abstecher bei denen die Melancholie der von seltenen Dörfern übersäten großen Weite sich mit den ordentlich aufgereihten Weinreben vermischt, die in der ganzen Welt berühmt sind und die Dichter inspirierten: „Guten Tag Flaschen-Soldaten aus der Champagne wo das Blut gärt / Ihr werdet einige Tage bleiben und dann wieder in einer Linie stehen / Abgestuft wie die Rebstöcke / Ich sende meine Flaschen überall hin wie die Granaten einer charmanten Artillerie“, schrieb Apollinaire.

Der Dom Gottes Aber auf welche Periode ist diese Revolution zurückzuführen, die einen Schaumwein hervorbrachte? Seine Ursprünge verlieren sich in der Legende, die die Geschichte dem berühmten Dom Pérignon in der Abtei Hautvillers zuschreibt. Die Historiker haben große Zweifel. Sicher ist, dass der Champagner in Frankreich Anfang des 18. Jahrhunderts auftaucht. Den Rest kennt man... Dieser Epos wird im Musée du vin de Champagne (Épernay) erzählt, wo man alles über einen Trank lernt, dessen AOC* sich auf 34 300 Hektar erstreckt, verteilt auf fünf Departements und vier große Regionen: Montagne de Reims, Vallée de la Marne, Côte des Blancs und Côte des Bar. Für die sinnliche Erfahrung ziehen wir Pressoria (Aÿ) vor, einen Rundgang zum Eintauchen, der alle fünf Sinne anspricht. Und natürlich die Besichtigung der 1001 Weinkeller, Labyrinthe im Kreidefelsen, bevölkert von Millionen von Flaschen, in ehrwürdigen Häusern die sich dem Geschmack der Zeit anzupassen wussten, indem sie eine echte Vorliebe für zeitgenössische Kunst entwickelt haben. Luxus-Jahrgänge, die mit Künstlern konzipiert wurden, Weinkeller, die in Ausstellungsräume umgewandelt wurden wie bei Pommery, etc. 16

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Pressoria - Aÿ Durch Städte und Dörfer Der Spaziergang führt uns nach Épernay mit seiner berühmten Avenue du Champagne, die von prächtigen architektonischen Verrücktheiten gesäumt wird, welche die Macht und den Ruhm ihrer Besitzer widerspiegeln – Moët & Chandon, PerrierJouët, Boizel, Mercier, etc. – und unter denen 110 Kilometern Weinkeller mehr als 200 Millionen Flaschen aufbewahren! Die „Champs-Élysées“ von Épernay zu durchstreifen ist eine charmante Erfahrung, ebenso wie die Besichtigung des Phare de Verzenay: Inmitten eines Ozeans aus Rebstöcken wurde dieser Leuchtturm aus Beton, der 1909 errichtet wurde um die Vorzüge des Champagne Joseph Goulet anzupreisen, in ein Museum der Weinrebe verwandelt. Unter den anderen Kuriositäten darf man die Cave aux Coquillages (Fleury-la-Rivière) nicht verpassen, einen Weinkeller, der in ein geologisches Ausflugsziel verwandelt wurde, in dem gigantische Fossilien daran erinnern, dass ein tropisches Meer die Region vor 45 Millionen Jahren bedeckte. Und schließlich unser Favorit, das charmante Dorf Aÿ, mit seinen Art-Déco-Gebäuden, in dem René Lalique zur Welt kam. Das Erwachen von Reims Eine Kathedrale wie ein steinernes Ostinato mit seinem Engel mit rätselhaftem Lächeln, der Mona Lisa in Skulptur-Form. „Die Fassade ist eine der schönsten Symphonien, die diese


And Also the Trees

© Mika Boudot

Le Parc naturel régional de la Montagne de Reims abrite la première réserve mondiale de faux, hêtres tortillards fascinants. Les mystérieux Faux de Verzy sont à découvrir absolument avec leurs formes complexes générant une atmosphère inquiétante. Der Parc naturel régional de la Montagne de Reims beherbergt die weltweit größte Reserve an Süntelbuchen, faszinierenden gewundenen Buchen. Die geheimnisvollen Faux de Verzy mit ihren komplexen Formen, die eine unheimliche Atmosphäre kreieren, sind absolut sehenswert. parc-montagnedereims.fr

© R. Kiezer-Coll. ADT Marne

Musik, die die Architektur ist, je gesungen hat“, schrieb Victor Hugo. Das gotische Meisterwerk, in dem die französischen Könige gekrönt wurden, stellt allzu oft die Schönheit einer Märtyrer-Stadt von 1914/18 in den Schatten, deren Wiederaufbau zu großen Teilen den amerikanischen Milliardären Carnegie und Rockefeller zu verdanken ist. Anderer Krieg, andere Geschichte: Ein Museum erinnert daran, dass die Kapitulation des Dritten Reichs hier von Jodl am 7. Mai 1945 unterzeichnet wurde. In Reims verstecken sich Juwelen wie die Basilique Saint-Rémi, die vor Sanftheit und Emotion bebt, ein einzigartiges Art-Déco-Ensemble, der Königsplatz im stolzem Klassizismus, der von einer Statue von Louis XV geschmückt wird oder die in den sechziger Jahren vom frisch zum Katholizismus übergetretenen Foujita erdachte und dekorierte Kapelle. Reims lädt zum verliebten Flanieren ein, Hand in Hand, in einer merkwürdigen Romantik à la française, die Augen zu den steinernen bunten Sternen der Kathedrale erhoben... Lange war die Stadt eine schlafende Schöne: Erinnerungen an das Ende der 1980er Jahre als man im Le Tigre gute Musik hörte... Der Rest? Nicht viel! Heute hat sie sich sehr verändert, insbesondere von der Kultur beflügelt, die in die gesamte Region ausstrahlt. Appelation d’origine contrôlée, „Kontrollierte Herkunftsbezeichnung“ französischer Weine

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Chantons sous la pluie © Pierre Bolle

Opera magica

Arty Chaque année, la Maison Ruinart invite un artiste contemporain à livrer sa vision de l’histoire de l’illustre domaine. En 2022, l’installation participative Récits de Champagne de Jeppe Hein est exposée à Paris, au Palais de Tokyo (01-03/04), entrant en résonance avec un coffret en série ultra limitée, véritable œuvre d’art renfermant un jéroboam de Ruinart Rosé. Jedes Jahr lädt das Haus Ruinart einen zeitgenössischen Künstler dazu ein, seine Vision der Geschichte des illustren Champagnerhauses zu liefern. Im Jahr 2022 wird die Mitmach-Installation Récits de Champagne („Geschichten aus der Champagne“) von Jeppe Hein in Paris im Palais de Tokyo ausgestellt (01.03.04.), wobei sie mit einer limitierten Edition einer Weinkiste in einen Dialog tritt, die eine 3l-Flasche Ruinart Rosé enthält. ruinart.com

Pink

Spécialité champenoise, le biscuit rose de Reims est né dans les années 1690 : cuite deux fois (d’où le nom de biscuit), cette craquante délicatesse est encore produite de façon inchangée par la vénérable Maison Fossier fondée en 1756. La coutume veut qu’on les trempe dans un verre de Champagne ou de Bouzy rouge pour les ramollir. Eine Spezialität aus der Champagne ist das Biscuit rose de Reims („Rosa Biskuit aus Reims“), das um 1690 entstand: Zweifach gebacken (daher der Name „Biscuit“) wird die knusprige Delikatesse noch auf unveränderte Weise vom ehrwürdigen Maison Fossier hergestellt, das 1756 gegründet wurde. Es ist Tradition es in ein Glas Champagner oder Bouzy Rouge zu tunken, um es aufzuweichen. fossier.fr

Instagram @biscuitsfossier 18

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Une bonbonnière à l’italienne de style Art déco, installée dans un bâtiment à la délicatesse néo-classique : telle est la salle de l’Opéra de Reims avec ses splendides ferronneries d’Edgar Brandt ou les fresques bachiques de sa coupole signées René Rousseau-Decelle. S’y déploie une programmation où voisinent Dido and Æneas de Purcell (07 & 08/04) et le classique du musical Chantons sous la pluie (23 & 24/04). Ein kleines Haus nach italienischer Art im Art-Déco-Stil, das in einem Gebäude mit neoklassischer Delikatesse installiert ist: Das ist der Saal der Opéra de Reims mit seinen wunderbaren Kunstschmiedearbeiten von Edgar Brandt oder den bacchantischen Fresken seiner Kuppel von René Rousseau-Decelle. Hier entfaltet sich ein Programm, bei dem Dido and Æneas von Purcell (07. & 08.04.) und der Musical-Klassiker Singin‘ in the Rain (23. & 24.04.) aufeinandertreffen. operadereims.com

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Le sacre de la culture Maire de Reims depuis 2014 et vice-président de la Région Grand Est, en charge de l’attractivité, du tourisme et de la culture, Arnaud Robinet décrit la politique culturelle de la cité.

Die Krönung der Kultur Arnaud Robinet, der seit 2014 Bürgermeister von Reims und Vizepräsident der Région Grand Est und zuständig für die Attraktivität, Tourismus und Kultur ist, spricht über die Kulturpolitik seiner Stadt. Par Von Hervé Lévy – Photo de von Alexandre Dumoutier

Pourquoi avoir décidé de candidater au titre de Capitale européenne de la culture 2028 ? Il importe de mener des projets fédérateurs à une période où la société est fracturée, afin de mobiliser l’ensemble de la population et des acteurs culturels. Je précise que la candidature ne concerne pas uniquement Reims, mais tout un territoire englobant l’ancienne région Champagne-Ardenne, auquel s’est adjoint Laon. Nous avons aussi le désir de créer des synergies avec les villes jumelées à Reims*. Il s’agit de se remettre en question pour exploiter nos atouts, mais aussi d’explorer nos failles, comme le manque d’espaces d’exposition dédiés à l’art contemporain à côté du Frac. Notre objectif est de métamorphoser la ville, avec pour modèle Lille 2004. En 2019, vous avez souhaité une large concertation afin de vous doter d’un schéma d’orientation sur cinq ans pour un secteur mobilisant environ 15% du budget. Quels axes ont été dégagés par cette démarche “Vivre la culture à Reims” ? Cinq priorités ont été définies, comme le soutien à la création, la valorisation du patrimoine ou encore l’intensification des liens entre les acteurs culturels rémois dont le festival transdisciplinaire FARaway est une belle illustration. Longtemps, Reims a été considérée comme une belle endormie : ce temps 20

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est révolu et la culture a largement contribué à cette métamorphose. Quels sont les derniers axes ? Je souhaite que notre politique culturelle soit tournée vers la jeunesse et serve de vecteur de mixité sociale. Des institutions comme Le Manège à Orgeval et La Comédie à Croix-Rouge, sont, par exemple, très présentes dans les quartiers prioritaires. Pour résumer, je désire une culture pour tous et partout ! Dès votre élection, vous avez abandonné le projet de création d’un musée au Boulingrin au profit d’une rénovation du Musée des Beaux-Arts sur site (réouverture en 2025). Pourquoi ? Le financement n’était pas assuré. On construisait par ailleurs un musée sans se poser la question des réserves, ni celle du devenir du bâtiment actuel. J’ai ainsi souhaité, non pas une rénovation, mais une réelle reconstruction, triplant la surface d’exposition en préservant l’esprit de l’histoire de cette ancienne abbaye. Cela entrait aussi dans une vision urbanistique avec cette “Voie des Sacres”, véritable artère culturelle allant de la Cathédrale à Saint-Rémi, avec le Musée des Beaux-Arts, le Palais du Tau (métamorphosé en Musée des Sacres ; ouverture en 2025, NDLR), le Frac, le Conservatoire… Warum haben Sie sich dazu entschieden für den Titel der Europä-

ischen Kulturhauptstadt 2028 zu kandidieren? In einer Zeit, in der die Gesellschaft zersplittert ist, ist es wichtig verbindende Projekte zu tragen, um die Gesamtheit der Bevölkerung und der kulturellen Akteure zu mobilisieren. Ich präzisiere, dass die Kandidatur nicht allein Reims betrifft, sondern ein ganzes Territorium, das die ehemalige Region Champagne-Ardenne mit einbezieht, zu der Laon dazukam. Wir haben auch den Wunsch Synergien mit Partner-Städten1 von Reims zu erzeugen. Es geht darum, sich zu hinterfragen um unsere Stärken auszunutzen, aber auch unsere Schwächen zu erkunden, wie den Mangel an Ausstellungsflächen für zeitgenössische Kunst. Unser Ziel ist es die Stadt zu verwandeln, mit Lille 2004 als Vorbild. Im Jahr 2019 haben Sie eine große Befragung veranlasst um einen Fünfjahresplan für einen Sektor aufzustellen, der ungefähr 15% des Budgets ausmacht. Welche Linien sind aus diesem „Die Kultur in Reims (er) leben“ entstanden? Fünf Prioritäten wurden definiert, wie die Unterstützung der Kreation, die Aufwertung des Kulturerbes oder auch die Intensivierung der Beziehungen zwischen den kulturellen Akteuren in Reims, für die das interdisziplinäre Festival FARaway eine schöne Illustration ist. Lange wurde Reims als eine schlafende Schöne betrachtet: Diese Zeit ist vorbei


Objectif 2028 Ziel 2028

Début mars, les premiers éléments de la candidature au titre de Capitale européenne de la culture 2028 ont été dévoilés. Tournant autour de la thématique éminemment champenoise des assemblages, 14 “maisons de concertation” – groupes de travail thématiques – ont été installées. Elles sont coordonnées par le directeur artistique Loïc Magnant, qui avait déjà œuvré avec succès pour Lille 2004 et Marseille 2013. Un excellent présage ! Verdict en 2023. Anfang März wurden die ersten Elemente der Kandidatur für den Titel der Europäischen Kulturhauptstadt 2028 präsentiert. Rund um die Thematik der Verbindung aufgebaut, wurden 14 „Maisons de concertations“– thematische Arbeitsgruppen – gebildet. Sie werden vom künstlerischen Direktor Loïc Magnant geleitet, der schon zum Erfolg von Lille 2004 und Marseille 2013 beitrug. Ein gutes Omen! Das Ergebnis 2023. reims2028.eu

und die Kultur hat einen großen Beitrag zu dieser Metamorphose geleistet. Was sind die letzten Tendenzen? Ich wünsche mir, dass unsere Kulturpolitik sich der Jugend zuwendet und als Vektor für soziale Durchmischung dient. Institutionen wie Le Manège in Orgeval und La Comédie in Croix-Rouge sind, zum Beispiel, sehr präsent in diesen „Quartiers prioritaires“2. Kurz, ich will Kultur für alle und überall! Sofort nach ihrer Wahl haben Sie das Projekt eines Museumsneu-

baus im Viertel Boulingrin zugunsten der Renovierung des Musée des Beaux-Arts (Wiedereröffnung 2025) aufgegeben. Warum? Die Finanzierung war nicht gesichert. Man baute außerdem ein Museum ohne sich die Frage der Depots oder der Zukunft des aktuellen Museums zu stellen. Deshalb wollte ich keine Renovierung, sonder einen echten Umbau, der die Ausstellungsfläche verdreifacht und gleichzeitig den historischen Geist dieser ehemaligen Abtei beibehält. Das fügte sich auch in eine städtebauliche Vision mit dieser „Krönungs-Straße“ ein,

einer echten kulturellen Ader, die von der Kathedrale in Saint-Rémi, über das Musée des Beaux-Arts, den Palais du Tau (in ein Musée des Sacres verwandelt, Eröffnung 2025, Anm.d.Red.), den Frac, bis zum Konservatorium verläuft... Aix-La-Chapelle, Arlington, Brazzaville, Canterbury, Florence, Kutná Hora, Nagoya, Salzbourg

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1 Aachen, Arlington, Brazzaville, Canterbury, Florenz, Kutná Hora, Nagoya, Salzburg 2 „Quartiers prioritaires“ sind sozial benachteiligte Stadtviertel, die man durch eine besondere Politik der (kulturellen, sozialen, städtebaulichen,...) Förderung zu unterstützen versucht

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© LMS

La Forge

Everywhere In Town De Yuksek à Brisebard et Chester Remington, Reims est une ville où les talents abondent. Portrait d’une scène musicale en constante ébullition. Von Yuksek bis Brisebard und Chester Remington: Reims ist eine Stadt voller Talente. Portrait einer ständig boomenden Musikszene. Par Von Suzi Vieira

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a cité des rois est une ville culte. Et pas que pour son pétillant breuvage ou sa régalienne cathédrale ! Aux yeux des amateurs de musique, elle fut d’abord la capitale de l’electro pop à la française dans les années 2010, avec Brodinski en tête d’affiche et Yuksek en figure tutélaire. C’était la grande époque de ce qu’on a appelé la “Classe rémoise”, destinée à assurer la relève de la French touch. « Ils ont ouvert la brèche, montré à tous que c’était possible ! Aujourd’hui, la scène musicale du cru est plus bouillonnante que jamais et totalement décomplexée », s’enthousiasme Arnaud Bassery. À la tête de Quartier Libre, lieu alternatif proche de la gare, il accueille chaque week-end les DJ sets des nouveaux collectifs / labels electro pullulant dans la ville, des surdoués de La Forge à Lune (en concert les 24 & 25/06 dans le cadre du festival La Magnifique Society). Une effervescence qui va désormais bien au-delà de la techno, comme en témoigne

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le succès grandissant de la chanteuse ardennaise Fishbach, de Brisebard avec sa sunshine pop seventies (tous deux aussi à La Magnifique Society, les 25 & 26/06), ou de rappeurs comme San-Nom et Leys. Un incubateur de talents Leur point commun à tous ? La Cartonnerie ! Depuis son ouverture en 2005, la salle de musiques actuelles labellisée SMAC – l’une des plus grosses de la Région Grand Est, avec ses trois espaces de concert et ses studios de répét’ – a su créer les conditions pour l’émergence d’une scène locale obstinément pétillante et féconde. Après avoir servi de “base de lancement” aux projets des Yuksek & Co, la structure a mis au point un plan d’attaque redoutable pour la suite. « L’idée est d’offrir un dispositif d’accompagnement par strates, depuis les locaux de répétition où nos équipes conseillent quelque


L’esprit d’entraide L’autre atout majeur de la ville, c’est sa Magnifique Society. Succédant au mythique Elektricity – dont l’essor contribua grandement à celui de la “Classe rémoise” en son temps –, l’ambitieux festival porté par La Cartonnerie se veut avant tout éclectique. Fin juin, la 5e édition brassera sur les pelouses du somptueux Parc de Champagne stars internationales (Herbie Hancock), reines de la chanson française (Clara Luciani) et… jeunes pousses locales. Sans oublier la présence de leurs illustres “grands frères” – jamais bien loin –, à l’instar cette année de Yuksek (encore lui, décidément !), qui viendra avec son émission de radio Nova offrir cinq heures de programmation. Comment rêver meilleurs tremplin et vitrine ? Mine de rien, il est sans doute là le secret de la success story : dans ces gens attachés à leur territoire, toujours prêts à partager leur expérience et à filer des coups de mains.

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© LMS

ie Stadt der Könige ist eine Kultstadt. Und nicht nur für ihren prickelnden Wein oder seine königliche Kathedrale! In den Augen der Musikliebhaber war sie zunächst die Hauptstadt des Elektro-Pop à la française in den 2010er Jahren mit Brodinski oder Yuksek. Es war die große Zeit

Yuksek

von dem, was man die „Classe rémoise“ getauft hat, deren Berufung es war, den French Touch abzulösen. „Sie haben eine Bresche geschlagen, gezeigt, dass es möglich war! Heute ist die musikalische Szene aus der Gegend brodelnder als je zuvor und total enthemmt“, freut sich Arnaud Bassery. An der Spitze von Quartier Libre, einem alternativen Ort in der Nähe des Bahnhofs, empfängt er jedes Wochenende DJ-Sets von neuen Künstlergruppen und Elektro-Labels, von denen es in der Stadt wimmelt, von den Überbegabten von La Forge bis Lune (Konzert am 24. & 25.06. im Rahmen des Festivals La Magnifique Society). Ein Sprudeln, das heute über die Techno-Musik hinausgeht, wovon der zunehmende Erfolg der Sängerin Fishbach aus den Ardennen, von Brisebard mit seinem Sunshine-Pop direkt aus den Siebzigern (beide auch bei La Magnifique Society, am 25. & 26.06.) oder von Rappern wie San-Nom oder Leys zeugt. Ein Brutkasten für Talente Ihre Gemeinsamkeit? La Cartonnerie! Seit seiner Eröffnung im Jahr 2005 hat dieser Saal für aktuelle Musik mit dem Label SMAC* – einer der größten der Région Grand Est mit drei Konzerträumen und Probenstudios – die Bedingungen für das Auftauchen einer lokalen, spritzigen und fruchtbaren Szene geschaffen. Nachdem sie als „Abschussbasis“ für die Projekte von Yuksek & Co diente, hat die Struktur für die Zukunft einen ernst zu nehmenden Plan geschmiedet. „Die Idee besteht darin, Begleitmaßnahmen in verschiedenen Schichten anzubieten, von den Probenräumen in denen unsere Teams mehr als 300 Gruppen im Jahr beraten, bis zu Künstlerresidenzen für fortgeschrittene Projekte“, fasst ihr Direktor Cédric Cheminaud zusammen. „Zwischen technischen Ateliers, Meisterkursen und Begegnungen, kreieren wir einen positiven Kreislauf zum Teilen und Netzwerken.“ Odilon Horman, Kopf von Chester Remington, einer Garagenrock-Gruppe, die mehr und mehr

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© A. Thome

300 groupes par an, jusqu’aux résidences pour les projets plus avancés », résume son directeur, Cédric Cheminaud. « Entre ateliers techniques, master-class et rencontres, on crée un cercle vertueux de partage et de réseau. » Et ce n’est pas Odilon Horman, leader des Chester Remington, un groupe de rock garage faisant de plus en plus parler de lui (en première partie de SLIFT, le 15/04), qui dira le contraire… « C’est une ressource inestimable, capable d’encadrer les jeunes de A à Z, jusqu’à envoyer ceux qu’elle pense prêts aux Inouïs du Printemps de Bourges rencontrer les professionnels (labels, tourneurs, etc.). »


© Margaux FMX

von sich reden macht (Vorgruppe von SLIFT am 15.04.), würde ihm nicht widersprechen... „Es ist eine unschätzbare Ressource dazu fähig zu sein Junge von A bis Z zu begleiten, bis man jene die man bereit dafür hält zu den Inouïs du Printemps de Bourges schickt, damit sie dort auf Profis treffen (Labels, Tourmanager, etc.).“ Gegenseitige Unterstützung Die andere Trumpfkarte der Stadt ist ihre Magnifique Society. Sie ist der Nachfolger der legendären Elektricity – deren Aufschwung in ihrer Zeit zu großen Stücken zur „Classe rémoise“ beitrug – dem ambitionierten Festival, das von La Cartonnerie organisiert wird und vor allem eklektisch ist. Ende Juni wird die 5. Auflage auf dem Rasen des prächtigen Parc de Champagne internationale Stars (Herbie Hancock), Königinnen des französischen Chansons (Clara Luciani) und junge lokale Talente aufeinandertreffen lassen. Ohne die Präsenz ihrer „großen Brüder“ zu vergessen – die nie sehr weit entfernt sind –, wie in diesem Jahr Yuksek, der mit seiner Sendung auf Radio Nova ein fünfstündiges Programm liefern wird. Was könnte besser als Trampolin oder Vitrine dienen? Allem Anschein zum Trotz liegt darin sicherlich das Geheimnis dieser Erfolgsstory: In diesen Leuten, die mit ihrer Region verbunden sind, immer bereit dazu, ihre Erfahrungen zu teilen und zu helfen. Scène de musiques actuelles, „Bühne für aktuelle Musik“, ein offizielles französisches Label, das vom Kulturministerium seit den 1998 verliehen wird. Es unterstützt aufkommende Künstler der Regionen in ihrer Entwicklung.

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Zone créative Kreativzone Le Port Sec n’a plus rien d’une friche industrielle. Dans ce nouveau “Quartier Musique”, La Cartonnerie voisine désormais avec Le Césaré, le tiers lieu du Shed et sa programmation orchestrée par Jazzus, l’école de musique Le Lieu, le Studio de danses urbaines 511 et même, depuis février, la grosse machine à concerts de l’Arena (9 000 places). Une proximité dont ces acteurs ont décidé de faire une force, travaillant en complémentarité et non en concurrence. Événements croisés, communication partagée… Der Port Sec hat nichts mehr mit einer Industriebrache gemein. In diesem neuen Musikviertel ist La Cartonnerie nun Nachbar von Le Césaré, dem Drittort des Shed und seinem von Jazzus zusammengestellten Programm, der Musikschule Le Lieu, dem Streetdance-Studio 511 und sogar, seit Februar, der großen Konzertmaschine Arena (9000 Plätze). Eine Nähe, aus der die Akteure eine Stärke machen wollen, indem sie komplementär arbeiten und nicht in Konkurrenz zueinander treten. Gemeinsame Veranstaltungen und geteilte Kommunikation...

© Studio 511

Chester Remington



Back to basics En avril, La Cartonnerie lorgne du côté de l’Angleterre et accueille le so british Miles Kane, entre énergie rock et flamboyance soul. Im April liebäugelt La Cartonnerie mit England und empfängt Miles Kane, zwischen Rock-Energie und brennendem Soul. So british. Par Von Suzi Vieira – Photo de von Lauren Luxenberg

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égaine de grand échalas dégingandé, élégance arrogante du costume vintage, fine cravate sur chaussettes blanches et mocassins noirs à la façon des jeunes Mods arpentant Carnaby Street dans les sixties : pas de doute, Miles Kane est anglais ! De la baie de Liverpool même, où l’ex-gamin gouailleur a formé la voix nasillarde et le jeu de guitare insolent qu’il affiche aussi bien dans ses projets solo qu’au sein du duo The Last Shadow Puppets – avec le complice de toujours, Alex Turner. De retour en Grande-Bretagne après un exil californien de quelques années, ce grand fan de David Bowie a décidé, avec Change The Show, de regarder dans le rétro. Le résultat ? Onze titres parfaitement orchestrés,

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mêlant rock classique, northern soul des années 1970, esprit Motown et échappées funky dans une suave et planante légèreté. En témoignent l’intro pétulante de Tears are Falling et l’ambiance soul moderniste de l’entêtant Nothing’s Ever Gonna Be Good Enough, interprété avec Corinne Bailey Rae.

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ie Silhouette eines großen schlaksigen Pfahls, arrogante Eleganz des Vintage-Kostüms, feine Krawatte zu weißen Socken und schwarzen Mokassin nach der Mode der jungen Mods, die in den sechziger Jahren durch die Carnaby Street streifen: Kein Zweifel möglich, Miles Kane ist Engländer! Aus der Bucht von Liverpool selbst, wo der spöttische Ex-Lausbube

seine näselnde Stimme und das freche Gitarrenspiel ausgebildet hat, die er ebenso in seinen Soloprojekten als auch mit dem Duo The Last Shadow Puppets – mit seinem langjährigen Komplizen Alex Turner – zur Schau trägt. Zurück in Großbritannien nach einem Exil von einigen Jahren in Kalifornien hat sich dieser große Fan von David Bowie dazu entschieden mit Change The Show in den Rückspiegel zu schauen. Das Resultat? Elf perfekt orchestrierte Titel, die klassischen Rock, Northern Soul der 1970er Jahre, Motown-Geist und Funk in einer lieblichen und schwebenden Leichtigkeit vereinen. Davon zeugt die ungestüme Intro Tears are Falling und die modernistische Soul-Stimmung des betörenden Nothing’s Ever Gonna Be Good Enough, das er mit Corinne Bailey Rae interpretiert. À La Cartonnerie (Reims) samedi 16 avril, au Mascotte (Zürich) samedi 23 avril, à La Laiterie (Strasbourg) mardi 26 avril et à Den Atelier (Luxembourg) mercredi 27 avril In La Cartonnerie (Reims) am Samstag den 16. April, im Mascotte (Zürich) am Samstag den 23. April, in La Laiterie (Straßburg) am Dienstag den 26. April und in Den Atelier (Luxemburg) am Mittwoch den 27. April mileskane.com

Édité par Erschienen bei BMG Rights Management bmg.com



Show Show Show Entre le théâtre contemporain à La Comédie et les formes plus hybrides (danse, cirque, performance, musique) au Manège, la cité des sacres fait saliver les amateurs de spectacle vivant. Zwischen zeitgenössischem Theater in La Comédie und den HybridFormen (Tanz, Zirkus, Performance, Musik) in Le Manège, macht die Krönungsstadt Liebhabern der darstellenden Kunst den Mund wässrig. Par Von Thomas Flagel

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nauguré en 1867, le cirque en dur et le manège conçus par l’architecte de la Ville, Narcisse Brunette, dans le jardin redessiné de la Patte d’Oie, forment un site d’exception. En lieu et place des spectacles de boxe d’antan, le théâtre (475 places) et le cirque (800 places, rénové en bleu et ocre rehaussé d’or après les dégâts de la Première Guerre mondiale), accueillent désormais les esthétiques les plus actuelles venues du monde entier (notamment durant le festival Born to be Alive). L’ensemble a conservé le nom historique de Manège, qui se complète depuis 2016 d’une verrière dans sa

cour intérieure. Un espace de convivialité où dîner et prendre un verre, que l’on vienne ou pas voir une pièce. Bruno Lobé, directeur de cette scène nationale, déploie son projet sur l’ensemble du territoire avec des tournées itinérantes mais aussi en investissant le quartier Orgeval avec des résidences d’artistes réalisant ateliers et spectacles participatifs (Les Familiarités). En 2017 naissait ainsi le studio K622, dédié aux résidences de création et plus largement aux équipes inscrites dans la région. La compagnie Basinga va réaliser une incroyable Traversée funambule (gratuite et en plein air, à Orgeval, 03/07). Les habitants du quartier sont invités à créer les costumes et la musique du spectacle dont ils assurent aussi le show en devenant "cavalettistes" : limiter les oscillations du fil en tirant sur des cordes, permettant ainsi la progression de Tatiana-Mosio Bongonga, diplômée du Centre national des Arts du Cirque de Châlons-en-Champagne. Autre théâtre d’importance, La Comédie de Reims est conduite par Chloé Dabert depuis janvier 2019. Si les deux maisons se réunissent pour le festival FARaway avec les autres structures rémoises, La Comédie et son écrin de béton brut tout en rondeur présente aussi bien le superbe Un Sacre de Lorraine de Sagazan1 (18-20/05), que la reprise par Marcial Di Fonzo Bo et Frédérique Loliée du Richard III du génial Matthias Langhoff datant de 1995 (Gloucester Time – Matériau Shakespeare, 04-06/05). La directrice développe aussi une petite forme pensée pour l’itinérance ayant vu le jour dans le cadre du dispositif “Lycéen·ne·s citoyen·ne·s, sur les chemins du théâtre”. Dear Prudence2 est une commande de texte à Christophe Honoré, qui réunit deux quarantenaires parlant d’un certain Jean. L’un est son père, l’autre son professeur et aussi… son amant. Un texte en forme de thriller psychologique, tout en suspense, sensibilité et ambiguïté.

© Nicolas Waltefaugle

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er 1867 eingeweihte steinerne Zirkus und die Manege, die vom Architekten der Stadt, Narcisse Brunette im umgestalteten Jardin de la Patte d’Oie konzipiert wurden, sind eine außergewöhnliche Sehenswürdigkeit. An der Stelle der früheren Box-Veranstaltungen empfangen das Theater (475 Plätze) und der Zirkus (800 Plätze, die nach den Zerstörungen des Ersten Weltkrieges in Blau und Gold renoviert wurden) heute die aktuellsten Ästhetiken aus aller Welt (insbesondere während des Festivals Born to be Ali-


ve). Das Ensemble hat den historischen Namen Le Manège beibehalten und wurde 2016 mit einem Glashaus in seinem Innenhof ergänzt. Ein Ort der Geselligkeit wo man speisen oder etwas trinken kann, egal ob man für eine Aufführung da ist oder nicht. Bruno Lobé, der Direktor dieser Nationalbühne entfaltet sein Projekt über die Gesamtheit der Region mit Wanderbühnen aber auch indem er das Viertel Orgeval mit Künstlerresidenzen bespielt, die Ateliers und Aufführungen zum Mitmachen organisieren (Les Familiarités). So entstand 2017 das Studio K622, das Kreations-Residenzen gewidmet ist und für die Truppen der Region gedacht ist. Die Compagnie Basinga wird eine unglaubliche Seiltanzüberquerung zeigen (Traversée, kostenlos im Freien, in Orgeval, 03.07.). Die Bewohner des Viertels sind dazu eingeladen die Kostüme und die Musik von Traversée zu kreieren. Sie sichern auch die Aufführung indem sie „Cavalettistes“ werden: Sie schränken die Schwingungen des Drahtseils ein, indem sie an Stricken ziehen und so das Vorankommen von TatianaMosio Bongonga sichern, einer Absolventin des Centre national des Arts du Cirque in Châlons-en-Champagne. Ein weiteres wichtiges Theater, La Comédie de Reims wird seit Januar 2019 von Chloé Dabert geleitet. Während die beiden Institutionen für das Festival FARaway mit anderen Häusern der Stadt zusammenarbeiten, präsentieren die Comédie und ihr ganze runde Betonhülle ebenso das wunderbare Un Sacre von Lorraine de Sagazan (18.-20.05.), wie die Wiederaufnahme von Richard III des genialen Matthias Langhoff aus dem Jahr 1995 von Marcial Di Fonzo Bo und Frédérique Loliée (Gloucester Time – Matériau Shakespeare, 04.-06.05.). So entwickelt die Direktorin auch eine kleine Form, die als wanderndes Projekt gedacht ist und im Rahmen der Maßnahme „Lycéen·ne·s citoyen·ne·s, sur les chemins du théâtre“ entstanden ist. Dear Prudence* ist ein Auftragstext von Christophe Honoré, der zwei Vierzigjährige vereint, die über einen gewissen Jean sprechen. Der Eine ist sein Vater, der andere sein Professor und auch... Liebhaber. Ein Text in Form eines psychologischen Thrillers, voller Spannung, Sensibilität und Mehrdeutigkeit. Voir Poly n°241 ou sur poly.fr À voir du 25/04 au 07/05, détails sur lacomediedereims.fr * Zu sehen vom 25.04. bis 07.05., Details auf lacomediedereims.fr 1

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© Vincent VDH

La Comédie

Le Cirque

© Michael Mauclert

© Alain Julien

La Verrière

La Comète à in 360°

La scène nationale de Châlons-en-Champagne fait partie des lieux d’architecture circulaire à vocation artistique (comme Le Manège de Reims) situés dans une dizaine de pays, réunis dans le Réseau 360°. Labellisée Pôle européen de production et de création, La Comète mélange les genres, du cirque au théâtre en passant par la musique et la danse. Elle organise aussi bien l’excellent festival War On Screen, qui embrasse tous les genres du 7e art, que le festival de magie nouvelle Illusions. Cette saison, deux artistes associés ont créé dans la maison : en janvier Arthur Chavaudret signait Intempéries autour de la perception du temps et Lucie Antunes prépare pour le printemps Au rythme de ton cœur à Châlons et en décentralisation. Die nationale Bühne in Châlons-en-Champagne gehört zu den Orten in Form einer kreisförmigen Architektur mit künstlerischer Bestimmung (wie Le Manège de Reims) in rund zehn Ländern, die zum Réseau 360° gehören. Unter dem Label Europäisches Zentrum für Produktion und Kreation mischt La Comète die Gattungen, vom Zirkus bis zum Theater über Musik und Tanz. Sie organisiert ebenso das exzellente Festival War On Screen, das alle Gattungen der 7. Kunst umfasst, als auch das Festival der neuen Magie Illusions. In dieser Saison haben zwei eingeladene Künstler im Haus gearbeitet: Im Januar hat Arthur Chavaudret Intempéries rund um die Wahrnehmung der Zeit verfasst und Lucie Antunes bereitet für das Frühjahr Au rythme de ton cœur in Châlons vor. la-comete.fr POLY 245

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Monumentum of Isolation (1) Chorégraphe trentenaire de Vancouver, Shay Kuebler signe des œuvres mêlant danse hybride, arts martiaux et théâtralité. Ce projet explore l’isolement social au milieu d’un environnement numérique en constante évolution. Der dreißigjährige Choreograph Shay Kuebler aus Vancouver vermischt in seinen Werken hybriden Tanz, Kampfsportarten und Bühnenwirkung. Dieses Projekt erkundet die soziale Isolation und die Einsamkeit inmitten einer digitalen Umgebung in stetiger Entwicklung. 05. & 06.04. La Comète (Châlons-en-Champagne) la-comete.fr Showgirl Le duo de comédiens Jonathan Drillet et Marlène Saldana s’inspire du film de Paul Verhoeven pour un solo décadent et queer dans l’enfer du showbiz, avec pole dance et danse butō sur un mamelon volcanique. Le tout sur une bande-son electro-punk de Rebeka Warrior. Vous avez dit Hot ? 05.-07.04. La Comédie de Reims (avec Le Manège) dès 16 ans lacomediedereims.fr – manege-reims.eu FIQ ! (Réveille-toi !) (2) Le Groupe acrobatique de Tanger, nourri à la meilleure tradition marocaine, fusionne les élans de la street culture, l’énergie du rap et celle du cirque dans un flot ininterrompu de couleurs et de rythmes fous fous fous. Die Akrobatik-Gruppe aus Tanger, die von der besten Tradition der marokkanischen Akrobatik genährt wurde, fusioniert den Schwung der Street Culture, die Energie des Raps und jene des Zirkus für einen ununterbrochenen Strom an Farben und verrückten Rhythmen. 22. & 24.04. Le Manège (Reims) manege-reims.eu Hedda Gabler Ibsen a inventé l’un des très grands personnages féminins du théâtre, dont la quête de sens et de beauté se heurte à l’impossibilité de vivre. Marja-Leena Junker, Finlandaise installée de longue date à Luxembourg, met en scène cette pièce fascinante et cruelle. 26. & 27.04., La Comète (Châlons-en-Champagne) puis 04.-13.05., Grand Théâtre de Luxembourg la-comete.fr – theatres.lu 30

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Fase, Four Movements to the Music of Steve Reich LA grande œuvre des débuts d’Anne Teresa De Keersmaeker que la chorégraphe a transmise, il y a peu, à une nouvelle génération de danseuses. Un must see… DAS große Werk der Anfänge von Anne Teresa De Keersmaeker, das die Choreographin vor kurzem an eine neue Generation von Tänzern weitergegeben hat. Ein must see... 28. & 29.04., Le Manège (Reims) manege-reims.eu Sacre Les 10 acrobates australiens du Circa Ensemble revisitent l’iconique Sacre du printemps de Stravinsky avec leur virtuosité bien particulière. Une fête rituelle et sauvage signée Yaron Lifschitz. Die 10 australischen Akrobaten des Circa Ensemble interpretieren das ikonische Sacre du printemps von Strawinsky mit ihrer ganz eigenen Virtuosität neu. Ein rituelles und wildes Fest von Yaron Lifschitz. 03. & 04.05. La Comète (Châlons-en-Champagne) la-comete.fr Zypher Z Avec leur univers plastique puissant et leur art du masque, Louis Arene et Lionel Lingelser du Munstrum Théâtre signent un conte kafkaïen d’anticipation en tous points baroque qui interroge la frontière entre l’Homme et le monstre. 04.-06.05. Le Manège (avec La Comédie de Reims) dès 14 ans manege-reims.eu – lacomediedereims.fr Festival DanSité Nouveau rendez-vous signé Aurore Gruel, qui dirige depuis 2021 le Laboratoire chorégraphique de Reims, avec la première pièce de Sarah Cerneaux (Either Way), danseuse découverte chez Akram Khan, et la création du strasbourgeois Marino Vanna avec le vibrant Man’s Madness. Das neue Rendezvous von Aurore Gruel, die seit 2021 das Laboratoire chorégraphique de Reims leitet, mit dem ersten Stück von Sarah Cerneaux (Either Way), einer Tänzerin, die bei Akram Khan entdeckt wurde und der Kreation der Straßburgerin Marino Vanna mit dem vibrierenden Man’s Madness. 21.05. Le Manège (Reims) manege-reims.eu

© Hassan Hajjaj

Agenda Kalender



Vive la vie, Taittinger Présidente de la célèbre maison de Champagne et du Frac Champagne-Ardenne, Vitalie Taittinger a les pieds plantés dans la terre et la tête dans les étoiles. Rencontre. Die Präsidentin des berühmten Hauses in der Champagne und des Frac Champagne-Ardenne, Vitalie Taittinger ist mit den Füßen in der Erde verankert und hat den Kopf in den Sternen. Begegnung. Par Von Hervé Lévy – Photo de von Martin Morrell

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la tête de la maison de Champagne éponyme depuis 2020, Vitalie Taittinger, qui avait rejoint son père dans l’aventure en 2007 lorsqu’il l‘avait rachetée, a su très tôt à quoi s’en tenir : « Il avait décidé de partir à la retraite à 65 ans. Rapidement, il a mis la jeune génération (son frère Clovis est à ses côtés, NDLR) dans la place », explique-t-elle. « L’ADN, on le connaît. Notre objectif est de partir de ces fondamentaux pour nous tourner vers le futur et “augmenter” ce que nous avons dans les mains », explique, dans un sourire, celle pour qui l’art est « une nourriture essentielle ». Guère surprenant lorsqu’on porte un prénom rimbaldien en diable… Des études de dessin à l’École Émile Cohl et une monographie écrite sur l’inclassable et génial Alfred Courmes plus tard, la voilà propulsée dans le grand bain de bulles avec notamment l’envie de poursuivre l’aventure pionnière de Taittinger Collection, initiée en 1983 (des flacons marquant une étroite collaboration avec des artistes comme Sebastião Salgado). Il est donc fort logique qu’elle prenne la présidence du Frac Champagne-Ardenne en 2017 (puis celle de l’association Platform, regroupant les 23 Frac de France, l’année suivante). « L’art contemporain a besoin d’être aidé. Le modèle des Frac va étouffer si on ne lui donne pas de ressources financières supplémentaires », pointe-t-elle, décrivant « un enjeu de société majeur, celui de cultiver la diversité, d’être capable de toujours s’interroger sur des formes nouvelles et de ne pas se replier sur monde qui existe déjà. » C’est aussi ce qu’elle essaie de faire avec Taittinger, maison pour laquelle mécénat et action culturelle ne sont pas de vains mots. Elle soutient nombre d’institutions (comme l’Opéra de Paris) et d’initiatives, organisant aussi un Prix récompensant la cuisine d’auteur dont le lauréat 2020 est le (très) talentueux Charles Coulombeau, qui œuvre désormais à Nancy. La création d’une fondation est à l’étude… Dans l’attente, Vitalie continue, imperturbable, son chemin, affirmant : « La culture, ce n’est pas un affichage, ce n’est pas du marketing. On parle de vie ! Je n’ai pas envie de participer à une société fabriquée, mais de construire avec le cœur et la tête. » On ne saurait mieux conclure. Fonds régionaux d’Art contemporain (Frac) sind Regionalfonds für zeitgenössische Kunst, die ab 1982 unter der Präsidentschaft von François Mitterand eingerichtet wurden

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eit 2020 an der Spitze des gleichnamigen ChampagnerHauses wusste Vitalie Taittinger, die ihren Vater in diesem Abenteuer seit 2007 begleitete, als der das Haus gekauft hatte, sehr früh, auf was sie sich gefasst machen musste: „Er hatte entschieden mit 65 Jahren in Rente zu gehen. Sehr schnell hat er die junge Generation (ihren Bruder Clovis an ihrer Seite, Anm.d.Red.) in Stellung gebracht“, erklärt sie. „Die DNA, die kennt man. Unser Ziel ist es, von diesen Fundamenten auszugehen, um uns der Zukunft zuzuwenden und das was wir in den Händen haben zu „vergrößern“, erklärt mit einem Lächeln jene, für die die Kunst „ein Grundlebensmittel“ ist. Kaum überraschend wenn man einen Namen à la Arthur Rimbaud trägt... Ein Zeichenstudium an der École Émile Cohl und eine verfasste Monographie über den herausragenden und genialen Alfred Courmes später, badet sie im großen Becken der Blasen, insbesondere mit dem Bestreben das Pionier-Abenteuer von Taittinger Collection fortzusetzen, das 1983 begonnen wurde (Flaschen in enger Zusammenarbeit mit Künstlern wie Sebastião Salgado).

Es ist also nur logisch, dass sie im Jahr 2017 die Leitung des Frac Champagne-Ardenne übernimmt (und dann jene des Vereins Platform, der die 23 Frac* Frankreichs vereint, im Jahr darauf). „Die zeitgenössische Kunst braucht Hilfe. Das Modell der Fracs wird ersticken wenn man ihnen keine zusätzlichen finanziellen Mittel gibt“, zeigt sie auf und beschreibt „eine große gesellschaftliche Herausforderung, jene die Vielfalt zu kultivieren, fähig zu sein sich immer über neue Formen in Frage zu stellen und sich nicht in die Welt zurückzuziehen, die schon existiert.“ Das versucht sie auch mit Taittinger umzusetzen, ein Haus für das Mäzenatentum und kulturelle Aktionen keine leeren Worte sind. Sie unterstützt zahlreiche Institutionen (wie die Opéra de Paris) und Initiativen, organisiert auch einen Preis der die Autorenküche auszeichnet, deren Preisträger 2020 der (sehr) talentierte Charles Coulombeau war, der nun in Nancy tätig ist. Die Gründung einer Stiftung wird momentan studiert... Bis dahin setzt Vitalie unermüdlich ihren Weg fort und bekräftigt: „Die Kultur ist keine Plakatierung, das ist kein Marketing. Wir sprechen vom Leben! Ich habe keine Lust darauf, an einer fabrizierten Gesellschaft teilzunehmen, sondern mit Herz und Verstand zu konstruieren.“ Wir könnten keinen besseren Schluss-Satz finden.


Craque pour le Frac ! Frac macht schwach!

Une façade verte. Éclatante. Une porte nous invitant à découvrir tout un monde. Sous la houlette de sa directrice Marie Griffay, le Frac Champagne-Ardenne s’est largement ouvert sur la ville et ses habitants, inventant son avenir, à l’aube de ses 40 ans. Côté exposition, on découvre Pirouettes (jusqu‘au 24/04). Commissionnée par le directeur du Frac Picardie, Pascal Neveux, elle accueille quatre jeunes designers – Baptiste Meyniel, Jean-Simon Roch, Marion Pinaffo et Raphaël Pluvinage – dans une scénographie époustouflante. À découvrir absolument !

Eine grüne Fassade. Strahlend. Eine Tür, die uns dazu einlädt die Welt zu entdecken. Unter der Führung der Direktorin Marie Griffay hat sich der Frac Champagne-Ardenne zur Stadt und ihren Bewohnern hin geöffnet um mit 40 Jahren seine Zukunft zu erfinden. Als Ausstellung entdeckt man (bis 24.04.) Pirouettes. Ko-kuratiert mit dem Direktor des Frac Picardie, Pascal Neveux, empfängt sie vier junge Designer – Baptiste Meyniel, Jean-Simon Roch, Marion Pinaffo und Raphaël Pluvinage – mit einem atemberaubenden Ausstellungsdesign. Nicht verpassen! frac-champagneardenne.org POLY 245

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Love Is In The Air Maison de Champagne iconique, Deutz élabore une des plus célèbres cuvées de la région, placée sous le signe de Cupidon. Visite. Das ikonische Champagner-Haus Deutz produziert eine der berühmtesten Cuvée der Region, ganz im Zeichen von Amor. Besichtigung. Par Von Éric de Subeut – Photos de von Serge Chapuis

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ondée en 1838 par Pierre-Hubert Geldermann et William Deutz, deux négociants en vin originaires d’Aix-la-Chapelle, la maison Deutz est située à Aÿ, cœur vigneron de l’appellation Champagne dont les coteaux, maisons et caves sont inscrits depuis 2015 sur la liste du Patrimoine Mondial de l’Unesco. Les grandes cuvées vieillissent paisiblement dans un dédale de galeries – ici nommées “berceaux” – creusées à même la craie à plus de trente mètres de profondeur. Une fois remontées à la surface, à la date choisie, le triptyque qui caractérise leur “style maison” (finesse, vinosité et complexité) donne toute sa mesure. En témoigne l’emblématique Deutz Brut Classic, associant la fraîcheur du chardonnay, le fruité et l’onctuosité des pinot noir et meunier, les trois cépages entrant à parité immuable dans sa composition. La cuvée mythique Amour de Deutz – dont la plaque de muselet est un véritable bijou – est pur ravissement. Composé à 100 % de grands chardonnays, complexe, véloce et séducteur, dans un torrent de bulles fines et d’arômes subtils, sa destinée est d’accompagner les plus beaux moments de l’existence. Presque un hommage à René Lalique, natif de ce haut lieu de magie créatrice. Champagne Deutz 16 rue Jeanson (Aÿ) champagne-deutz.com

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as Haus Deutz, das 1838 von Pierre-Hubert Geldermannn und William Deutz, zwei Weinhändlern aus Aachen, gegründet wurde, liegt in Aÿ, dem WeinbauZentrum des Champagners, dessen Weinberge, Häuser und Keller seit 2015 zum Weltkulturerbe der Unesco gehören. Die großen Jahrgänge reifen friedlich in einem Labyrinth von Galerien – die hier „Gewölbe“ genannt werden – welche in mehr als dreißig Metern Tiefe direkt in den Kreidestein geschlagen wurden. Einmal wieder an der Oberfläche, entfaltet das Triptychon, das den Stil des Hauses ausmacht (Finesse, hoher Alkoholgehalt und Komplexität), sein ganzes Können. Davon zeugt der symbolträchtige Deutz Brut Classic, der die Frische des Chardonnay und die Geschmeidigkeit von Pinot Noir und Meunier verbindet, wobei jede Rebsorte den gleichen Anteil an der Komposition hat. Die legendäre Cuvée Amour von Deutz – dessen Champagnerdeckel ein echtes Schmuckstück ist – ist reiner Zauber. Zu 100% aus großen Chardonnay komponiert, komplex, schnell und verführerisch, mit einem Wasserfall von Bläschen, ist es seine Bestimmung, die schönsten Momente des Lebens zu begleiten. Wie eine Hommage an René Lalique, der an diesem magischen Ort der Kreativität geboren wurde.



TION SÉLEC HL A AUSW

ENT L AU R T L IN G A p.42

Terre

Feu

Eau

Air

Erde

Feuer

Wasser

Luft

L’opération “Caviste pour le climat” permet de planter un nouveau chêne en Argonne pour toute caisse achetée d’Esprit Nature de l’excellente maison Henri Giraud (Aÿ). Assemblage de pinot noir et de chardonnay, cette cuvée est une ode à la Champagne.

Die Aktion „Weinhändler für das Klima“ erlaubt es eine neue Eiche in den Argonnen zu pflanzen, für jede Kiste von Esprit Nature aus dem exzellenten Haus Henri Giraud (Aÿ). Als Assemblage von Pinot Noir und Chardonnay ist dieser Jahrgang eine Ode an die Champagne. champagne-giraud.com

Bien nommé, L’Incandescent est un Champagne signé Mouzon Leroux (Verzy) : 100 % pinot noir, ce rosé de saignée (les baies ont macéré afin de transmettre leurs arômes et leurs teintes au moût) est une explosion joyeuse nous emportant dans la galaxie des fruits rouges.

De r t re f fe n d b e n a n n te L’Incandescent („Der Lebhafte“) ist ein Champagner von Mouzon Leroux (Verzy): 100% Pinot noir ist dieser „Rosé de saignée“ (die Trauben haben mazeriert um dem Most ihre Aromen und Farbe weiterzugeben) eine fröhliche Explosion, die uns in die Galaxie der roten Früchte entführt. champagne-mouzon-leroux.com

Associée avec Amphoris, la maison Leclerc Briant (Épernay) a immergé un lot de bouteilles à 60 mètres de profondeur pendant 15 mois. Abyss est un assemblage équitable entre chardonnay, pinot noir et meunier, qui se marie à merveille avec huitres et autres mets iodés.

In Kooperation mit Amphoris hat das Haus Leclerc Briant (Épernay) einen Satz Flaschen 15 Monate lang in 60 Metern tiefe reifen lassen. Abyss ist eine ausgewogene Assemblage zwischen Chardonnay, Pinot Noir und Meunier, die sich auf wunderbare Art mit Austern und anderen jodhaltigen Speisen verträgt. leclercbriant.fr

Le millésime 2012 de Salon est l’occasion de découvrir un vin mythique issu d’un seul terroir, la Côte des Blancs, d’un seul cru, Le Mesnil-sur-Oger, d’un seul cépage, le chardonnay. Aérien, il nous emporte dans un univers parallèle fait de transparence debussyste.

Der Jahrgang 2012 aus Salon ist die Gelegenheit einen legendären Wein aus einem einzigen Terroir zu entdecken, der Côte des Blancs, aus einem einzigen Weingebiet, Le Mesnil-sur-Oger, aus einer einzigen Rebsorte, dem Chardonnay. Er ist luftig und nimmt uns mit in ein Paralleluniversum voller Transparenz à la Debussy. champagne-salon.fr

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Mille saveurs Champenois d’adoption, Philippe Mille officie dans une institution gastronomique : au restaurant Le Parc du Domaine Les Crayères, sa cuisine doublement étoilée entre en résonance avec le terroir.

Tausend Geschmacksnoten Philippe Mille wirkt in seiner Wahlheimat der Champagne in einer gastronomischen Institution: Im Restaurant Le Parc du Domaine Les Crayères führt seine Zwei-Sterne-Küche einen Dialog mit der Region. Par Von Hervé Lévy – Photos de von Mathieu Garçon

«D

es odeurs flottant au-dessus de casseroles fumantes, des ambiances de convivialité, de partage, à la ferme de mes grands-parents… À trois ans, je savais que je deviendrai cuisinier », explique Philippe Mille, natif de la Sarthe. Passant par des maisons prestigieuses (où il œuvre avec Michel Roth, Frédéric Anton ou encore Yannick Alleno), son cursus honorum culinaire le mène à Reims en 2010, aux Crayères, dans un château érigé au début du XXe siècle pour Louise Pommery, marquise de Polignac, et métamorphosé en hôtel-restaurant au début des années 1980. Y flotte encore l’ombre bienveillante de Gérard Boyer, un des plus grands chefs français, qui décrocha trois Étoiles au Guide Michelin. Un graal qui est aussi l’objectif avoué de son successeur, véritable “bête a concours” – Meilleur Ouvrier de France et Bocuse de Bronze –, un qualificatif qui le fait sourire : « Je pars du principe que je fais un concours chaque jour », affirme celui qui trouve son inspiration chez les producteurs, les artisans d’art et… les plasticiens. En 2018, il avait ainsi réinterprété une toile de Michel Majerus, MoM-Block #8, appartenant aux collections du Frac, lors d’une performance culinaire restée dans les mémoires. En arrivant à Reims, il ne « connaissai[t] rien au Champagne. Je n’avais que des clichés en tête et me suis pris une grande claque. J’ai mis deux ans et demi avant de comprendre qu’il est un vin de gastronomie. » Aujourd’hui, sa cuisine est profondément ancrée dans le terroir : « Ce n’est pas le Champagne que je travaille, plutôt ses cépages : chardonnay, pinot noir ou meunier et bien d’autres, dont certains sont oubliés », résumet-il. Preuve avec son hommage à Notre-Dame de Reims, plat époustouflant évoquant la grande rose de la cathédrale : esthétiquement parfait, ce vitrail de langoustines marinées au verjus – dont l’acidité joue en toute finesse avec l’iode du caviar – est certes une symphonie graphico-chromatique en rouge, vert et jaune dont l’ordonnancement rappelle la maîtrise des artisans du Moyen-Âge, mais surtout, et avant tout, 38

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Frédéric Anton oder auch Yannick Alleno zusammenarbeitet), führt ihn sein kulinarischer Cursus Honorum 2010 nach Reims, nach Les Crayères, in ein am Anfang des 20. Jahrhunderts für Louise Pommery, Marquise de Polignac, errichtetes Schloss, das Anfang der 1980er Jahre in ein Hotel-Restaurant verwandelt wurde. Hier schwebt noch der Geist von Gérard Boyer durch die Räume – einer der größten Küchenchefs Frankreichs – der drei Sterne im Guide Michelin erreichte. Ein Gral, der auch das Ziel seines Nachfolgers und echten „Trophäenjägers“ – Meilleur Ouvrier de France und Bocuse de Bronze – ist, eine Bezeichnung, die ihn schmunzeln lässt: „Ich gehe von dem Prinzip aus, dass jeder Tag ein Wettbewerb ist“, sagt jener, der seine Inspiration bei den Erzeugern, den Kunsthandwerkern und... bildenden Künstlern findet. Im Jahr 2018 hat er so ein Gemälde von Michel Marjerus, MoM-Block #8, interpretiert, das zur Sammlung des Frac gehört, bei einer erinnerungswürdigen kulinarischen Performance.

un feu d’artifice de goûts. Le reste du menu est à l’avenant, où se croisent un altier Saint-Pierre de ligne sur une douelle (parfait compagnon d’un Bollinger Grande Année 2007) et un incroyable filet de bœuf contisé d’oseille flirtant en tout bien tout honneur avec une variation sur la carotte et la truffe dans une géométrie éminemment kandinskienne. La carte de Philippe Mille a trouvé son identité : « Au lendemain de ma deuxième Étoile, en 2012, je faisais une cuisine transposable ailleurs. Aujourd’hui, elle est tellement liée à cette région qu’elle l’est beaucoup moins », conclut-il.

„G

erüche, die aus rauchenden Töpfen aufsteigen, ein geselliges Ambiente des Teilens, auf dem Bauernhof meiner Großeltern... mit drei Jahren wusste ich, dass ich Koch werden würde“, erklärt Philippe Mille, der aus dem Departement Sarthe stammt. Nachdem er in prestigeträchtigen Häusern gelernt hat (wo er mit Michel Roth,

Als er in Reims ankam, „kannte [er] nichts vom Champagner. Ich hatte nur Klischees im Kopf und habe eine große Ohrfeige bekommen. Ich habe zweieinhalb Jahre gebraucht um zu verstehen, dass er ein Wein der Gastronomie ist.“ Heute ist seine Küche fest in der Region verankert: „Ich arbeite nicht mit dem Champagner, eher mit seinen Rebsorten: Chardonnay, Pinot Noir oder Meunier und vielen anderen, von denen einige vergessen sind“, fasst er zusammen. Der Beweis mit seiner Hommage an Notre-Dame de Reims, ein atemberaubendes Gericht, das an die Fensterrosette der Kathedrale erinnert: Graphisch perfekt, ist dieses Kirchenfenster aus im Saft unreifer Trauben mariniertem Hummer – dessen Säure voller Finesse mit dem Jod des Kaviars spielt – sicher eine graphisch-farbliche Sinfonie in Rot, Grün und Gelb, deren Anordnung an das Können der Handwerker des Mittelalters erinnert, aber vor allem, ein Geschmacks-Feuerwerk. Der Rest des Menüs ist ansprechend, ein stolzer Petersfisch auf einem Stück Weinfass (perfekter Begleiter eines Bollinger Grande Année 2007) und ein unglaubliches eingeschnittenes Rinderfilet mit Sauerampfer das mit einer Variation zu Karotte und Trüffel in einer Geometrie à la Kandinsky flirtet. Die Karte von Philippe Mille hat ihre Identität gefunden: „Nach meinem zweiten Stern im Jahr 2012 machte ich eine Küche, die man überallhin übertragen konnte. Heute ist sie so mit dieser Region verbunden, dass das weniger möglich ist“, sagt er abschießend. Le restaurant Le Parc est situé dans le Domaine Les Crayères, 64 boulevard Henry Vasnier (Reims). Fermé les lundis et mardis, mais aussi, le midi, les mercredis. Menus de 115 à 390 €. Philippe Mille gère aussi la carte de la brasserie Le Jardin (menus de 33 à 55 €) installée à deux pas. Das Restaurant Le Parc liegt im Domaine Les Crayères, 64 Boulevard Henry Vasnier (Reims). Montags und dienstags geschlossen, aber auch mittwochs mittags. Menü von 115 bis 390€. Philippe Mille ist auch für die Karte der einen Steinwurf entfernten Brasserie Le Jardin verantwortlich (33 bis 55€) . lescrayeres.com POLY 245

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Histoires champenoises Phare de la gastronomie française, L’Assiette champenoise brille au firmament des trois Étoiles. Visite dans une maison où rayonne la cuisine d’Arnaud Lallement, dont chacune des créations fait narration.

Champagner-Geschichten L’Assiette champenoise erstrahlt als einer der bedeutendsten Tische der französischen Gastronomie am Firmament der Drei-SterneRestaurants. Besuch in einem Haus, in dem die Küche von Arnaud Lallement glänzt und jede seiner Kreationen eine Geschichte erzählt. Par Von Hervé Lévy

L’

histoire débute à Châlons-sur-Vesle avec Jean-Pierre Lallement, en 1975 : autant dire qu’Arnaud (né en 1974) tombe dans la marmite tout petit : « Je suis fils de restaurateur et enfant des guides. J’ai appris à lire dans le Michelin », s’amuse-t-il. En 1997, lorsqu’il rejoint la brigade paternelle désormais installée à Tinqueux, l’Étoile décrochée dix ans plus tôt s’est envolée. Passé par des maisons prestigieuses – chez Alain Chapel et Michel Guérard, notamment – il contribue à redresser la barre, la reconquérant en 2001. Son père disparait subitement l’année suivante : Arnaud décide de se battre, mariant atmosphère familiale et excellence. Mêlant étroitement résilience, volonté, élégance et talent, sa trajectoire lui permet d’accéder au graal de la troisième Étoile au Guide Michelin en 2014, avec une cuisine profondément ancrée dans le terroir champenois, qu’on accompagne avec joliesse d’une brassée de bulles : « Il ne faut jamais oublier d’où on vient et où on se trouve », résume le chef. Une autre caractéristique de ses créations est de « raconter des histoires. Je ne fais pas un plat parce que c’est la tendance ou parce qu’il rendra bien en photo », explique ce maestro brocardant avec bienveillance la “cuisine instagrammable” : « Tout ne doit pas être dicté par l’image. Le plus important réside dans le goût, la mâche, l’identité… » Preuve par l’exemple avec une barbue des côtes bretonnes : pas d’effet wahou devant un vrai plat de cuisinier, complexe à souhait, où le fond prime sur la forme. Voilà variation aquatique d’une intense subtilité où les textures des produits – poisson, murex et oignons – initient une savante relation dialectique entre elles, tandis que les goûts s’emboitent avec un naturel désarmant. Un des plats emblématiques de la maison est un souvenir d’enfance en forme d’hommage à son père, qui « travaillait

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tous les jours de l’année, sauf le 24 décembre au soir. Il préparait alors une cocotte en fonte avec des homards entiers, des pommes de terre et une sauce au paprika. Je n’ai pas retrouvé de notes et l’ai reconstitué de mémoire. » Le résultat ? Une composition élégante explorant les différentes nuances du rouge et de l’orangé, où la suavité marine du noble crustacé joue, empathique, avec le tubercule terrestre et terreux nimbé d’une sauce époustouflante. La sauce ! Voilà une des grandes affaires de la maison depuis les origines : de généreuses casserolettes d’argent accompagnent chaque plat. Un appel à se resservir de jus et autres bouillons et / ou à y plonger une tranchette de pain avec jubilation ! Une invitation à y revenir. Encore et encore.

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ie Geschichte beginnt 1975 in Châlons-sur-Vesle mit Jean-Pierre Lallement: Man kann sagen, dass Arnaud (geboren 1974) schon ganz klein in den Kochtopf gefallen ist: „Ich bin ein Gastronomen-Sohn und ein Kind der Restaurantführer. Ich habe mit dem Guide Michelin lesen gelernt“, amüsiert er sich. Als er 1997 Teil der väterlichen Küchenbrigade wird, die nun in Tinqueux arbeitet, hat sich der zehn Jahre zuvor erkochte Stern in Luft aufgelöst. Mit seiner Erfahrung in prestigeträchtigen Häusern – insbesondere bei Alain Chapel und Michel Guérard – trägt er dazu bei das Ruder herumzureißen und ihn 2001 zurückzuerobern. Sein Vater verstirbt plötzlich im Jahr darauf: Arnaud entscheidet sich dazu, zu kämpfen, eine familiäre Atmosphäre und Exzellenz zu kombinieren. Indem er Widerstandsfähigkeit, Willenskraft, Eleganz und Talent vereint, erlaubt es ihm seine Laufbahn im Jahr 2014 den Gral des dritten Sterns zu erreichen, mit einer Küche, die zutiefst in der Region Champagne verankert ist, anmutig begleitet von einigen Perlen: „Man darf nie vergessen wo man herkommt und wo man sich befindet“, fasst er zusammen. Eine weitere Charakteristik seiner Kreationen liegt darin „Geschichten zu erzählen. Ich mache kein Gericht weil es im Trend liegt oder auf einem Photo gut aussieht“, erklärt der Meister, der mit Wohlwollen die Instagram-Küche verspottet. „Es darf nicht alles vom Aussehen bestimmt sein. Das Wichtigste liegt im Geschmack, dem Biss, der Identität...“ Der Beweis mit dem Beispiel eines Glattbutts von der bretonischen Küste: Kein Wow-Effekt vor dem Gericht eines Kochs, bei dem der Inhalt wichtiger ist als die Form. Eine Wasser-Variation von intensiver Subtilität bei der die Texturen der Produkte – Fisch, Stachelschnecke und Zwiebeln – eine kunstvolle dialektische Beziehung untereinander eingehen, während die Geschmacksnoten sich auf natürliche Weise verbinden. Eines der typischen Gerichte des Hauses ist eine Kindheitserinnerung in Form einer Hommage an seinen Vater, der „jeden Tag des Jahres arbeitete, außer an Heiligabend. Er bereitete dann einen gusseisernen Schmortopf mit ganzen Hummern, Kartoffeln und einer Paprika-Soße vor. Ich habe keine Notizen gefunden und haben ihn aus der Erinnerung rekonstruiert.“ Das Ergebnis? Eine elegante Komposition, die die verschiedenen Rot-und Orangenuancen erkundet, in der die maritime Sanftheit des noblen Krustentiers auf empathische Weise mit den erdverbundenen und erdigen Knollen spielt, umrahmt von einer atemberaubenden Soße. Die Soße! Eine der großen Angelegenheiten des Hauses, von Anfang an: Edle Pfänn-

chen aus Silber begleiten jeden Gang. Eine Aufforderung sich mehrfach Bratensaft und Brühe zu servieren und / oder jubelnd eine Scheibe Brot darin zu tunken! Eine Einladung dazu, wiederzukommen. Immer wieder und wieder. L’Assiette champenoise est situé 40 avenue Paul Vaillant-Couturier (Tinqueux, commune jouxtant Reims). Fermé les mardis et mercredis. Menus de 145 à 355 €. La maison abrite aussi un hôtel cinq étoiles labellisé Relais & Châteaux. L’Assiette champenoise liegt in der 40 avenue Paul Vaillant-Couturier (Tinqueux, eine Vorstadt von Reims). Dienstags und mittwochs geschlossen. Menüs von 145 bis 355€. Zum Haus gehört auch ein Fünfsternehotel mit dem Label Relais & Châteaux. assiettechampenoise.com

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© Au Clos du Lac © Axel Coeuret

Country cool Art déco

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En face des Halles du Boulingrin, la Brasserie du Boulingrin est une institution rémoise depuis 1925. Sur deux étages, une cuisine française avec une touche canaille se déploie dans un cadre Art déco qui ravira les audacieux sans les ruiner ! Mention spéciale au Sabayon de poires au champagne, divin dessert. Gegenüber der Halles du Boulingrin, ist die Brasserie du Boulingrin seit 1925 eine Institution in Reims. Auf zwei Etagen entfaltet sich eine französische Küche mit einer Prise Hausmannskost in einem Art-Déco-Rahmen, der die Kühnsten begeistern wird und sie nicht arm macht! Besonders erwähnenswert ist die Zabaione von Birnen mit Champagner, ein göttliches Dessert. boulingrin.fr

Situé à quelques encablures de Reims, Gueux abrite une perle : Au Clos du Lac (18 rue du Lac) réussit le mariage d’un ancien corps de ferme et de la contemporanéité. Design épuré des suites, spa comprenant une piscine intérieure… Voilà une maison d’hôtes idéale pour découvrir la Champagne. Einen Steinwurf von Reims entfernt, in Gueux, findet man eine Perle: Au Clos du Lac (18 rue du Lac) verbindet ein altes Bauerngehöft mit zeitgenössischer Eleganz. Suiten mit schlichtem Design, ein Spa mit überdachtem Schwimmbad... Ein ideales Gästehaus um die Champagne zu entdecken. auclosdulac.fr

Place to be

En plein cœur de Reims, l’ami Laurent Lingat tient La Régence (44 place Drouet-d’Erlon), une institution créée en 1919 : à côté de stylos et autres cigares, il présente une sélection pointue de rhums et… Champagnes. Le temple des flacons d’exception ! Mitten in Reims führt unser Freund Laurent Lingat La Régence (44 place Drouet d’Erlon), eine Institution, die 1919 eröffnet wurde: Neben Füllern und Zigarren präsentiert er eine hochqualifizierte Auswahl von Rum und... Champagner. Der Tempel der außergewöhnlichen Flaschen! regence-reims.com 42

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City break

À l’ombre de Notre-Dame se niche un cocon d’une extrême élégance. Installée dans un hôtel particulier du XIXe siècle avec un joli jardin, La Demeure des Sacres (29 rue Libergier) propose quatre chambres d’hôtes et un espace bien-être où tout n’est qu’ordre et beauté, luxe à la française, calme et volupté. Im Schatten von Notre-Dame versteckt sich ein extrem eleganter Kokon. In einem Stadtpalais aus dem 19. Jahrhundert mit einem schönen Garten installiert, bietet La Demeure des Sacres (29 rue Libergier) vier Gästezimmer und einen Wellness-Bereich, die Schönheit, Luxus à la française, Ruhe und Sinnlichkeit vereinen. la-demeure-des-sacres.com


© La Cave aux Coquillages

Inside

© ADT Marne

À Fleury-la-Rivière, La Cave aux Coquillages propose une excursion souterraine dans les sables calcaires rappelant qu’il y a 45 millions d’années, la Champagne était une plage tropicale, arpentée par des Campaniles giganteum, escargots de plus de 40 centimètres de long ! Un lieu incroyable d’œnogéologie puisque la cave est celle de la maison Legrand-Latour. In Fleury-la-Rivière bietet La Cave aux Coquillages eine unterirdische Exkursion in den Kalksandstein an, die daran erinnert, dass die Champagne vor 45 Millionen Jahren ein Tropenstrand war, über den Campaniles giganteum wanderten, Schnecken von mehr als 40 Zentimetern Länge. Ein unglaublicher Ort der Weingeologie, da der Weinkeller jener des Hauses Legrand-Latour ist. geologie-oenologie.fr

Outside

Plus grand lac artificiel d’Europe conçu pour protéger Paris des inondations, le Lac du Der a une superficie de 48 km2. Voilà le lieu idéal pour se ressourcer et observer des myriades d’oiseaux, puisqu’on y dénombre plus de 200 espèces. Célèbre pour ses grues cendrées – 200 à 350 000 y transitent chaque année – il abrite aussi grèbe huppé, sterne pierregarin ou encore pygargue à queue blanche. Der größte künstliche See Europas, der geschaffen wurde um Paris vor Überschwemmungen zu schützen, der Lac du Der hat eine Oberfläche von 48 km2. Der ideale Ort um sich zu entspannen und unzählige Vögel zu beobachten, da man mehr als 200 Arten zählt. Für seine Kraniche bekannt – 200 bis 350 000 sind jedes Jahr auf der Durchreise – beherbergt er auch Haubentaucher, Flussseeschwalben oder Seeadler. lacduder.com


Bonnes adresses Adressbuch

Instagram @shedreims

REIMS

ÉPERNAY

Boire un verre Trinken Chic Schick

Le bar de l’Hôtel de la Paix 9 rue Buirette bestwestern-lapaix-reims.com Sympa Sympatisch

Le Clos 25 rue du temple Culte Kult

Ernest Hemingway Café 69 place Drouet-d'Erlon

Se restaurer Essen Moment exceptionnel AußergewÖhnlicher Moment

L’Assiette champenoise 40 avenue Paul VaillantCouturier (Tinqueux) Voir page 40 Siehe S.40 assiettechampenoise.com Coloré Bunt

L’Atelier 2 rue Tronsson-Ducoudray restaurantlatelierreims.com Sympa Sympatisch

Le Tablier 30 place Drouet-d’Erlon La Pizz’ Pizza

Sur les toits 1 Über den Dächern 1

Il Duomo 46 rue Buirette

Sur les toits 2 Über den Dächern 2

Gabrielle 11 rue des Fuseliers restaurant-gabrielle-reims.fr POLY 245

Hors du temps Zeitlos

Les Crayères 64 boulevard Henry-Vasnier Voir page 38 Siehe S.38 lescrayeres.com Été Sommer

La Guinguette rémoise (23/0629/08) 44 rue de la Roseraie Intemporel Zeitlos

Le Court 1920 15 rue Lagrive lecourt1920.com

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Cuisine française Französische Küche

Why Not 5 place Pierre-Mendès-France whynot-epernay.com Salle des Coffres

La Banque 46 rue général Leclerc brasserie-labanque.fr Gastro

La Table Kobus 3 rue du Dr Rousseau la-table-kobus.fr Une glace ? Ein Eis?

Carnivore Fleischfresser

Maison Dallet 4 rue Saint-Rémy 03 26 54 96 58 chocolat-vincentdallet.fr

Repère de décoratrices Deco

MONTAGNE DE REIMS

Cul de Poule 46 boulevard Carteret auculdepoule.com

En Appart’thé 23 rue Chanzy enaparthereims.fr

Caf’conc & brasserie

Le Shed 49 rue Gosset shedreims.fr

Se détendre Sich entspannen

Da Nello 39 rue Cérès

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Voyage Reise

Influence d’Orient 33 rue des Romains influencedorient.fr Hôtel & Spa

La Caserne Chanzy 13 rue Chanzy deepnature.fr

Chouette Klasse

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AŸ CHAMPAGNE On y mange bien Gut essen

Avarum 18 rue Roger-Sondag avarum.fr

Jolie terrasse et belle maison Schöne Terrasse und schönes Haus

Le Vieux Puits 7 rue Jules-Lobet 03 26 56 96 53 Cool

Rôtisserie Henri IV 46 boulevard Charles-deGaulle

CHÂLONS-ENCHAMPAGNE Chic Schick

Au Carillon Gourmand 15 bis place MonseigneurTissier carillongourmand.com

Couvert de Vignes 4 bis place Pommery (Chigny-les-Roses) benjamingillescuisine.fr

Cool

Découverte Entdeckung

Familial Familiär

Coq et Vins 3 rue de la Prévôté (Villedommange) coqetvins-villedommange. blogspot.com La vie de château Auf dem Schloss

Château de Rilly 38 rue de Reims (Rilly-la-Montagne) lechateauderilly.com

Les Années Folles 75 rue Léon-Bourgeois restaurant-les-annees-folles.fr Maison Souply 8 rue du Faubourg Saint-Antoine restaurant-souply.com


THÉÂTRE

Aux portes du mâle Le venin des Serpents de Marie NDiaye ne quitte plus Jacques Vincey qui porte à la scène cette pièce où « se télescopent impressions organiques et atmosphère fantastique ». Entretien avec le metteur en scène. Par Thomas Flagel – Photo de Christophe Reynaud De Lage

Est-ce la fin de cette pièce, rebattant totalement les cartes, entre cauchemar et destins tragiques, qui vous a saisi ? Bien sûr, les dernières scènes sont incroyables, mais avant cela, le début m’avait déjà happé. C’est rare d’être conquis de la sorte et pas par l’histoire à la situation très triviale : une belle-mère venant demander de l’argent à son fils, se retrouvant devant France, sa femme, qui l’empêche d’entrer. Le tout compliqué par l’arrivée de l’ancienne épouse, Nancy, devant une maison où se terre l’homme. Ce sont les sensations, dès les premières pages, l’ambiance de chaleur, de maïs, d’euphorie pré-14 juillet… Ce concret qui entre en résonnance avec du symbolique. Le cheminement vers la dernière scène nous oblige à nous raconter une histoire. L’autrice instille un venin qui nous fait gamberger et renvoie à notre imaginaire. L’organique se double de dimensions symboliques et psychanalytiques riches et singulières, qui forment une coexistence de réalités superposées. Comme une perception ouverte du monde et de ce qui nous dépasse, les Hommes étant « mis aux portes du ciel », comme disait Genet. À quels indices visuels nous raccrochez-vous ? Avez-vous choisi un lieu en métropole, une île française, un coin de Louisiane ? La question de l’image est première, la scénographie s’anticipant beaucoup. Les sensations sont omniprésentes : images de champs de maïs, canicule, touffeur, soif, excitation d’avant le feu d’artifice. Il convenait de ne pas écraser les imaginaires, ni de tomber dans l’abstrait coupant le public du sensible. Nous avons travaillé avec les outils primaires du théâtre : le son et la lumière. Des PARs* éclairent latéralement les comédiennes depuis le plateau. Ils les chauffent même, et claquent lorsqu’ils montent en intensité, amenant une sensorialité très juste. Cela découpe et tranche dans les visages. Quant au mur de la maison, il est composé d’enceintes gigantesques. Tout ce qui est derrière, voix de l’homme et bruits, vibre en infra-

basses et demeure invisible. Il faut faire confiance à la langue de Marie NDiaye qui active déjà fortement les imaginaires. Comment composez-vous, avec Hélène Alexandridis, le personnage terrible de la mère, aux abois par manque d’argent au départ mais se révélant finalement celle qui veille sur la maison, dans un pacte terrible avec le fils ? Hélène est une comédienne qui avance pas à pas, se laissant emporter avec beaucoup d’intelligence et d’intuition. Notre cheminement vers la fin, qui demeure mystérieuse, nous impose de choisir pour nous raconter quelque chose au plateau. Après cette ellipse temporelle, que protège-t-elle dans cette maison qui nous reste interdite, qui avale comme un tombeau ? Ce personnage est très lourd à porter, il demeure dans une constance par rapport aux autres femmes de la pièce. Elle a fait le choix de la raison. Elle est comme une dent dévitalisée, là en apparence mais dont le nerf, ce qui fait mal et rend vivant, n’est plus. Dans ces personnages, nous pourrions reconnaître un Ogre et Cerbère, gardien des Enfers… J’ai monté il y a une bonne dizaine d’années Madame de Sade de Yukio Mishima. Six femmes s’y retrouvaient dans un salon pour parler de ce monstre embastillé. Au-delà du statut de cet homme affreux et de ce qu’il symbolise pour elles, il permet de mettre des mots, de créer une histoire racontant des angoisses et des gouffres qui nous traversent tous. La dimension de conte de fée est un outil pour rendre acceptables des peurs qui, si elles n’avaient pas de représentation, seraient indépassables. Les femmes de ces deux pièces ont le besoin vital de se raconter des choses pour vivre. Au Théâtre national de Strasbourg du 27 avril au 5 mai tns.fr *

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THÉÂTRE

Écrire pour survivre Avec Le Journal d’Anne Frank, Geneviève Pasquier et Nicolas Rossier portent à la scène un monument de la littérature d’une brûlante actualité. Par Lucie Chevron – Photos de Julien James Auzan

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lle est allemande, juive, exilée aux Pays-Bas avec sa famille depuis 1933 et l’arrivée au pouvoir d’Hitler. Le 12 juin 1942, à Amsterdam, Annelies Marie Frank reçoit un carnet à l’occasion de son treizième anniversaire. Quelques jours plus tôt, alors qu’elle arpente une ruelle aux côtés de son père, l’adolescente s’arrête pour admirer cet objet au travers de la vitrine d’un magasin. Il est recouvert d’un morceau de tissu au motif écossais de couleurs rouge, blanche et taupe, muni d’une boucle en métal en guise de fermoir. Bientôt, elle posera ses mots (et maux) intimes en son sein. Plus tard, c’est sous le titre Le Journal d’Anne Frank, que l’on connaîtra ce chef-d’œuvre de la littérature mondiale. Soixante-dix-sept ans plus tard, deux artistes, Geneviève Pasquier et Nicolas Rossier, ont souhaité adapter ce texte fondateur sur la Seconde Guerre mondiale, l’exil, l’enfermement, la place de la femme dans la société de l’époque et la psychologie de l’adolescence. Au plateau : lumière noire, décor blanc. Au centre,

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un mur faisant office de support de projection. De chaque côté de ce dernier, deux escaliers en guise de précipices. Si l’atmosphère sonore se veut sensible et sensitive, le minimalisme de la scénographie rompt avec un réalisme immersif pouvant apparaître comme évident en raison de l’univers convoqué. Loin de vouloir recréer l’Annexe – cette étroite pièce confinée où ont vécu, pendant 24 mois, Anne Frank, sa famille et des amis de celle-ci −, la scène semble davantage s’apparenter à une maquette. La neutralité de l’espace offre ainsi la possibilité aux personnages d’évoluer, de grandir, de se construire, au rythme du texte, de l’âge et de l’Histoire avançant, tel que fut son journal pour l’adolescente. Au fil des paroles prononcées, des anecdotes convoquées, le théâtre se fait l’analogie du processus d’écriture de la jeune fille. La brutalité originelle du texte et son interprétation par les comédiens rendent sa réception d’autant plus violente émotionnellement. Tandis que les adultes sont figurés par des voix en hors-champ, le focus et l’at-

tention sont portés sur les trois enfants présents. On retrouve Anne, sa sœur Margot et le jeune Peter, fils des amis de la famille, cachés avec eux. Le récit qui part de l’intimité de l’adolescente, est profondément universel. Il décrit et traverse avec un réalisme poignant la psychologie d’une jeunesse ébranlée, plongée dans l’une des plus effroyables périodes de l’Histoire. De l’insouciance à la prise de conscience, des petites joies aux pires angoisses, de l’espoir à la mort. En adaptant au théâtre ces écrits, Geneviève Pasquier et Nicolas Rossier ont voulu réveiller l’œuvre, toucher les jeunes générations et rappeler le péril de l’antisémitisme et de la guerre. Un pari réussi, dans un contexte contemporain pas si éloigné. Au TAPS Scala (Strasbourg) du 27 au 30 avril (dès 12 ans) taps.strasbourg.eu



Qui êtes-vous, Molly Bloom ? Avec Molly Bloom, le metteur en scène Jan Lauwers adapte pour l’extraordinaire Viviane De Muynck le dernier chapitre d’Ulysse de Joyce. Un monologue cru et délicat. Par Thomas Flagel – Photo de Stephan Vanfleteren

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oilà plusieurs décennies que les deux artistes se côtoient. En 2004, ils créaient La Chambre d’Isabella à Avignon, plongée dans le cerveau d’une vieille femme aveugle ayant traversé le XXe siècle, entre secrets et ivresse de vie. Une pièce qui fit date, révélant tout le talent d’une Viviane De Muynck se bonifiant avec les années. Il y avait déjà dans son personnage quelque chose de la Molly Bloom de James Joyce. La même acuité de conscience, les yeux clos. Une convocation des mystifications de l’imagination comme réponse à celles de la réalité, une passion indéfectible pour la vie, « seule arme contre la dictature du mensonge ». Il faut dire qu’en 1999, le metteur en scène et la comédienne avaient commencé à plancher sur l’ultime chapitre d’Ulysse, monologue au féminin. Mais le petit-fils de l’auteur irlandais en avait sonné le glas, refusant l’utilisation de l’œuvre. Une poignée de lectures clandestines eurent lieu en Allemagne, mais rien de plus. Deux décennies plus tard, la voilà tombée dans le domaine public, ouvrant la voie à une reprise du travail autour de la parole de cette épouse infidèle. Publié en 1921, ce roman de plus de 700 pages racontant de manière fragmentée une journée ordinaire à Dublin fut longtemps interdit : une femme parlant librement de sexe, d’amour, d’amants, de 48

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menstruations, de regrets, avec ce mélange de panache et de profonde vérité introspective était bien trop libre pour la pudibonderie bourgeoise et ses carcans puritains. Tout ceci nous est, un siècle plus tard, offert dans un décor dépouillé d’artifices. Une table et une chaise, un angle vide pour le mari, l’autre pour l’amant. Et tout l’espace pour la Pénélope de Joyce, bien plus bavarde que son aïeule homérique. Molly Bloom parle pour les hommes de sa vie, piochant dans ses souvenirs, qu’elle émaille d’anecdotes. Ici on digresse sans fard, on cache si peu, on s’avoue tout. Premiers amours, mariage, aventures… la crudité est de mise, jusque dans les déceptions et les douleurs. Ivresse de vie, désir de se raconter dans une phrase immensément longue, suspendue, rythmée, dans laquelle Viviane De Muynck, septuagénaire au regard lumineux, séduit par sa gouaille délicate autant que par la profondeur de sa mise à nu. Dans la brutalité de ses souvenirs et de ses sentiments se dégagent la complexité d’une vie, doublée d’une dose d’espoir. À La Filature (Mulhouse) du 5 au 7 avril (dès 16 ans) lafilature.org



THÉÂTRE & DANSE THEATER & TANZ

Les mots et les gestes L’artiste suisse François Gremaud débarque avec deux mises en scène en forme de cours farcesque de tragédie classique (Phèdre !) et de ballet romantique conté (Giselle…). L’érudition le dispute à la joie.

Von Worten und Gesten Der Schweizer Künstler François Gremaud präsentiert gleich zwei Inszenierungen in Form scherzhafter Kurse zur klassischen Tragödie (Phèdre!) und erzähltem romantischem Ballett (Giselle...). Wenn Gelehrsamkeit auf Freude trifft. Par Von Thomas Flagel – Photos de von Cloan Nguyen & Dorothée Thébert Filliger

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deux semaines d’intervalle, Le Carreau de Forbach et Le Maillon strasbourgeois présentent deux pièces de François Gremaud faisant partie d’une trilogie autour de grandes figures féminines au destin tragique. Les chefsd’œuvre auxquels il s’attaque, Phèdre de Racine et Giselle de Théophile Gautier – complétés par Carmen de Bizet – sont nés d’un amour : celui pour Mademoiselle de Champmeslé, amante du tragédien français, et de Carlotta Grisi adulée sa vie durant par le poète parnassien. C’est bien par l’infime 50

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détail, l’anecdote érudite et un amour sans feinte du partage des connaissances qu’il propose de traverser ces monuments du théâtre et du ballet, racontés par… un seul comédien ! Des odes aux interprètes, « passeurs d’étonnement, et à l’ineffable de l’émotion » qui saisit le metteur en scène lorsqu’il les regarde. Faisant mine de transmettre le contexte et l’histoire de leurs œuvres respectives, agrémentées d’un trait de ponctuation, Romain Daroles et Samantha van Wissen plongent dans l’écrin dessiné par François Gremaud comme un cadeau sur-mesure pour leur art de la scène. Aucun des deux ne pourra résister à l’envie de donner corps à leur enthousiasme saisissant, faisant passer les cours de français au lycée pour des séances de torture héritées du temps des moines. En orateur de choix, Romain Daroles chemine avec joie dans les alexandrins, livrant les origines mythologiques des protagonistes autant que les ressorts passionnels et truculents qui les animent. Le théâtre du XVIIe siècle s’en trouve redynamisé comme rarement. La même recette méta-théâtrale est appliquée dans Giselle…, sans pédagogie à l’emporte-pièce, mais avec une subtile et savoureuse façon de dénouer ce qui fait geste et sens. Un délice de sensible livré tambour battant. Une manière d’ouvrir un monde en soi à partir de petits riens, qui vous fera regarder vos prochains ballets autrement. L’art de dire ce qui nous chamboule et nous active dans une radicalité du dénuement. Le talent de l’ancienne danseuse d’Anne Theresa De Keersmaeker réside dans sa facilité à se glisser dans l’espace nu du plateau pour faire naître dans nos seules têtes ce ballet romantique dont la musique est interprétée en direct par quatre instrumentistes. Elle redonne ses lettres de noblesse au pantomime et ses interprétations oubliées, déjoue nos attentes par les mots et certaines lectures misogynes renvoyées aux limites de leurs tenants actuels. De cette frustration orchestrée naît une libération de l’imaginaire avec passion et mélancolie, comme le rejet d’un désenchantement certain du monde. Un hymne à la beauté, qui parfois se cache ici et là, n’attendant que d’être découverte pour mieux rayonner de son éclat.


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it zwei Wochen Abstand präsentieren Le Carreau in Forbach und Le Maillon in Straßburg zwei Stücke von François Gremaud, die zu einer Trilogie rund um große Frauenfiguren mit tragischem Schicksal gehören. Die Meisterwerke, mit denen er sich beschäftigt, Phèdre von Racine und Giselle von Théophile Gautier – vervollständigt von Carmen von Bizet – sind aus einer Liebe entstanden: Jener für Mademoiselle de Champmeslé, die Geliebte des französischen Tragödienschriftstellers und jener zu Carlotta Grisi, die ihr Leben lang vom parnassischen Dichter verehrt wurde. Anhand des geringsten Details, gebildeten Anekdoten und einer echten Liebe für das Teilen von Wissen bietet er die Möglichkeit, diese Monumente des Theaters und des Balletts zu durchstreifen die von... einem einzigen Schauspieler erzählt werden! Oden an die Interpreten, „Schleuser der Verwunderung und unaussprechlicher Emotionen“, die den Regisseur erfassen, wenn er sie betrachtet. Indem sie so tun als ob sie den Kontext und die Geschichte ihrer jeweiligen Werke weitergeben, tauchen Romain Daroles und Samantha van Wissen in das Schmuckstück ein, das von François Gremaud wie ein maßgeschneidertes Geschenk für ihre Bühnenkunst gezeichnet wurde. Keiner der beiden kann der Versuchung widerstehen ihrem ergreifenden Enthusiasmus Leben einzuhauchen, so dass die Französisch-Stunden am Gymnasium wie Folter-Sitzungen als Erbe aus der Zeit der Mönche erscheinen. Als ausgezeichneter Sprecher bewegt sich Romain Daroles mit Freude zwischen den Alexandrinern, verrät die mythologischen Ursprünge der Protagonisten ebenso wie den leidenschaftlichen Elan, der sie bewegt. Dem Theater des 17. Jahrhunderts wird hier wie selten eine neue Dynamik verliehen. Dasselbe meta-theatralische Rezept wird für Giselle angewandt... ohne ätzende Pädagogik aber mit einer subtilen und köstlichen Art und Weise das aufzuklären was Geste und Sinn ausmacht. Eine Wohltat an Sensibilität im Eiltempo.

Eine Art eine eigene Welt auf der Basis von Kleinigkeiten zu öffnen, die den Zuschauer die nächsten Ballette mit anderen Augen sehen lassen wird. Die Kunst das auszusprechen, was uns durcheinanderbringt und uns in einer Radikalität der Mittellosigkeit aktiviert. Das Talent der ehemaligen Tänzerin Anne Theresa De Keersmaeker liegt in ihrer Fähigkeit, ihre Sensibilität in den nackten Bühnenraum einzuführen um einzig in unseren Köpfen dieses romantische Ballett entstehen zu lassen, dessen Musik live von vier Musikern gespielt wird. Sie verleiht der Pantomime und ihren vergessenen Interpretationen ihren Adelsbrief, vereitelt unsere Erwartungen durch Worte und bringt einige aktuelle frauenfeindliche Lektüren an ihre Grenzen. Aus dieser orchestrierten Frustration entsteht eine Freiheit der Vorstellungskraft voller Leidenschaft und Melancholie, wie die Zurückweisung einer gewissen Entzauberung der Welt. Eine Hymne an die Schönheit, die sich manchmal hier und dort versteckt und nur darauf wartet entdeckt zu werden um besser zu erstrahlen. Phèdre ! de François Gremaud, au Carreau (Forbach) mardi 12 et mercredi 13 avril (en français surtitré en allemand) Phèdre ! von François Gremaud, im Carreau (Forbach) am Dienstag den 12. und Mittwoch den 13. April (in Französisch mit deutschen Übertiteln) carreau-forbach.com > Busfahrten von Saarbrücken aus Giselle… de François Gremaud, au Maillon (Strasbourg) du 27 au 30 avril (en français surtitré en allemand) Giselle... von François Gremaud, im Maillon (Straßburg) vom 27. bis 30. April (in Französisch mit deutschen Übertiteln) maillon.eu > Kulturbus Offenburg / Straßburg, Mittwoch 27.04.

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DANSE

Afro House Spirit Figure de la danse hip-hop française, Ousmane Sy disparaissait brutalement fin décembre 2020, laissant notamment en héritage Queen Blood, pièce 100% féminine. Die große Figur des französischen Hip-Hop-Tanzes, Ousmane Sy, ist Ende Dezember 2020 plötzlich verstorben. Er hinterlässt Queen Blood, ein 100% weibliches Stück. Par Von Thomas Flagel – Photos de von Saïdo Lehlouh

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en déplaise aux grincheux de tous bords, les temps changent. Et le milieu du hip-hop, masculin s’il en est, évolue lui aussi avec son époque. Avant de disparaître soudainement, foudroyé par une crise cardiaque à 45 ans en décembre 2020, Ousmane Sy montrait la voie. “Babson” avait fait ses armes avec le Wanted Posse et dirigeait depuis une poignée d’années le Centre chorégraphique national de Rennes, qu’il avait choisi d’investir avec le collectif FAIR-E. L’une de ses dernières pièces, Queen Blood, sonne comme un vibrant hommage à la féminité. Les sept interprètes, toutes issues du groupe Paradox-Sal, se rejoignent dans une house influencée par la danse de club. Le chorégraphe mâtine ce vocabulaire propre au hiphop d’influences africaines. L’Afro

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House Spirit qui en résulte pioche allègrement dans les danses traditionnelles afin de nourrir un ensemble sautillant et enlevé, dans lequel le groupe se forme à l’envi, cassant l’unisson pour mieux laisser émerger l’éclat de chacune. La musique y joue les premiers rôles avec plusieurs titres de Culoe De Song ou de Thabzen Bibo, jeunes DJs et producteurs sud-africains aux rythmes gorgés d’énergie. Sur un plateau entouré de projecteurs placés au ras du sol, les danseuses travaillent leurs démarches et attitudes, poses lascives et corps saccadés, ralentis tout en observation de la pulse qui monte et prend, collectivement, possession des êtres. L’écoute est grande, la recherche de chœur palpable, la fulgurance de mise. Défi du regard, ensemble de pas légers et de phrases-signatures se for-

ment en joutes joyeuses. Leur vivacité et leur rapidité frise la virtuosité. Se succèdent éléments de danse debout new style, de popping donnant l’illusion de mouvements se figeant, roulement des avants bras du locking et jeux de steps fous se transformant en hype collective. Les isolations du corps et l’intensité du regard de Linda Hayford vibrent d’une aura particulière au milieu de ses partenaires. Loin d’être un étalage de techniques, Queen Blood puise dans l’intime. Le très engagé Four Women de Nina Simone, qui la voit dénoncer l’oppression des femmes noires dans l’Amérique contemporaine, donne libre cours à une extériorisation des sentiments. En ligne au plus près du public, quatre interprètes vivent les paroles poignantes dans leur corps, heurté de soubresauts et de colère froide.

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uch wenn es den Griesgramen auf allen Seiten nicht gefällt, die Zeiten ändern sich. Und das Milieu des Hip-Hops, so männlich es auch ist, geht mit seiner Zeit. Bevor er plötzlich verstarb, getroffen von einem Herzinfarkt mit 45 Jahren im Dezember 2020, zeigte Ousmane Sy den Weg. „Babson“ hatte seine Sporen als Tänzer mit der Truppe Wanted Posse verdient und leitete seit einigen Jahren das Centre chorégraphique national de Rennes, das er mit dem Tanzkollektiv FAIR-E in Beschlag nahm. Eines seiner letzten Stücke, Queen Blood, klingt wie eine leidenschaftliche Hommage an die Weiblichkeit. Die sieben Interpreten, alle aus der Gruppe Paradox-Sal, treffen mit einer House-Musik aufeinander, die vom Tanz in den Clubs be-


TANZ

Schritten und Haltungen, laszive Posen und ruckartige Körper, gedrosselt, für eine Beobachtung des Pulses, der immer schneller wird und kollektiv die Wesen in seinen Besitz nimmt. Die Aufmerksamkeit ist groß, das Streben nach Harmonie spürbar, der Geistesblitz angebracht. Herausfordernde Blicke, ein Ensemble von leichten Schritten und Signatur-Phrasen bilden fröhliche Turniere. Ihre Lebhaftigkeit und Schnelligkeit grenzen an Virtuosität. Es folgen aufrechte New-Style-Tanzelemente und Popping aufeinander, das die Illusion von erstarrenden Tanzelementen verleiht, rollende Unterarme des Lockings und verrückte Steps-Spiele, die sich sich in einen kollektiven Hype verwandeln. Die Isolationen des Körpers und die Intensität des Blicks von Linda Hayford schwingen in einer besonderen Aura inmitten ihrer Partner. Weit von einer Demonstration von Techniken entfernt schöpft Queen Blood aus der Intimität. Das sehr engagierte Four Women von Nina Simone, die die Unterdrückung der schwarzen Frauen im zeitgenössischen Amerika denunziert, lässt der Gefühlsäußerung freien Lauf. In einer Linie, so nah wie möglich am Publikum, erleben vier Tänzerinnen die verletzenden Äußerungen in ihren Körpern, mit abgehackten Zuckungen und kalter Wut. À Pôle Sud (Strasbourg) vendredi 8 et samedi 9 avril In Pôle Sud (Straßburg) am Freitag den 8. und Samstag den 9. April pole-sud.fr > Club‘in House sous la houlette de la cie Watt / Noémie Cordier, samedi 9 avril à l’issue de la représentation, pour danser au son de la DJ Antoinette Gomis > Club‘in House unter der Leitung der cie Watt / Noémie Cordier, am Samstag den 9. April nach der Vorstellung um zur Musik von DJ Antoinette Gomis zu tanzen

einflusst ist. Der Choreograph kreuzt dieses dem Hip-Hop eigene Vokabular mit afrikanischen Einflüssen. Der Afro House Spirit, der daraus hervorgeht, entleiht fröhlich Elemente aus dem traditionellen Tanz um ein hüpfendes und virtuoses Ensemble zu nähren, in dem die Gruppe sich nach Lust und Laune vereint, den Einklang aufbricht um noch

besser den Glanz jedes einzelnen Tänzers zur Geltung zu bringen. Die Musik spielt hier eine Hauptrolle mit mehreren Titeln von Culoe De Song oder Thabzen Bibo, jungen DJs und südafrikanischen Produzenten, mit energiegeladenen Rhythmen. Auf einer Bühne, die von am Boden installierten Projektoren umgeben ist, arbeiten die Tänzer an ihren

À La MALS (Sochaux) jeudi 14 avril In La MALS (Sochaux) am Donnerstag den 14. April mascenenationale.eu > Initiation à la House Dance avec Odile Lacides, interprète de Queen Blood, mercredi 13 avril (14h) aux Bains Douches (Montbéliard) > Einführung in den House Dance mit Odile Lacides, Interpretin von Queen Blood, am Mittwoch den 13. April (14 Uhr), in Les Bains Douches (Montbéliard)

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DANSE TANZ

Oh my love Créé en 2011 par Jan Martens, le duo charnel et sensuel Sweat Baby Sweat invite à la contemplation et au lâcher-prise. Das 2011 von Jan Martens kreierte, fleischliche und sinnliche Duo Sweat Baby Sweat lädt zur Kontemplation und zum Loslassen ein. Par Von Irina Schrag – Photo de von Klaartje Lambrechts

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ans une chorégraphie à la lenteur hypnotique, Kimmy Ligvoet et Steven Michel n’en finissent pas d’explorer un corps-à-corps amoureux conçu voilà plus de 10 ans. Le désir s’y déploie dans une séance d’acrobaties d’une grande délicatesse. Multipliant postures et contre-postures avec une attention soutenue à l’autre, leurs portés transpirent la sensualité dans une mise en jeu totale des êtres. En sousvêtements, ils se dévorent du regard avec une intensité qui n’a d’égale que la grâce de leurs étreintes retenues. Jan Martens suspend le temps et nous offre une heure d’intimité entre deux amants dont tous les gestes disent ce qu’ils taisent, dont le moindre tremblement emporte nos élans. Certains y verront des emprunts à la danse butô, au cirque, voire au yoga, sans que cela ne nuise à la sincérité de l’ensemble, porté par une musique créée sur-mesure par Jaap van Keulen. Ce duo est un petit bijou d’amour qui jamais ne se consume jusqu’à l’extinction.

Au Centre culturel André Malraux (Vandœuvre-lès-Nancy) mardi 26 et mercredi 27 avril Im Centre culturel André Malraux (Vandœuvre-lès-Nancy) am Dienstag den 26. und Mittwoch den 27. April centremalraux.com 54

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n einer Choreographie von hypnotisierender Langsamkeit erkunden Kimmy Ligvoet und Steven Michel ohne Unterlass den verliebten Nahkampf, den sie seit mehr als 10 Jahren erkunden. Das Verlangen entfaltet sich darin in einer AkrobatikVorstellung von großer Feinfühligkeit. Indem sie die Posituren und Gegenposituren mit einer intensiven Aufmerksamkeit gegenüber dem Anderen vervielfältigen, triefen ihre Tragefiguren vor Sinnlichkeit in einem totalen Einsatz der Wesen. In Unterwäsche verschlingen sie sich gegenseitig mit Blicken, mit einer Intensität, der nur die Grazie ihrer zurückhaltenden Umklammerungen gleichkommt. Jan Martens lässt die Zeit still stehen und bietet uns eine Stunde der Intimität zwischen zwei Liebenden, bei denen jede Geste das ausdrückt, was sie verschweigen, deren geringstes Zittern unsere Phantasie anregt. Einige werden darin Bezüge zum Butoh-Tanz, zum Zirkus, sogar zum Yoga sehen, ohne dass dies der Aufrichtigkeit des Ensembles schadet, das von einer maßgeschneiderten Musik von Jaap van Keulen getragen wird. Dieses Duo ist ein kleiner Diamant der Liebe, die bis zum Erlöschen nie verglimmt.



THÉÂTRE THEATER

Élégante irrévérence Dernière pièce du suisse Christoph Marthaler, Aucune idée réunit deux complices de longue date dans une mise en scène où le dérisoire côtoie l’absurde pour former… un art de vivre.

Elegante Respektlosigkeit Das aktuelle Stück des Schweizers Christoph Marthaler, Aucune idée, vereint zwei langjährige Komplizen in einer Inszenierung, in der das Lächerliche auf das Absurde trifft um eine... Lebenskunst zu bilden. Par Von Thomas Flagel – Photos de von Julie Masson

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oilà plusieurs décennies que Christoph Marthaler s’attèle avec une radicalité certaine à la rénovation du théâtre musical. Depuis toujours (ou presque), il creuse ce sillon avec Graham F. Valentine, acteur rencontré à la fin de l’adolescence lorsque celui-ci quitta son Écosse natale pour venir étudier la littérature à Zurich, logeant dans la pension familiale des Marthaler. La légende veut que leur amitié artistique, déterminante s’il en

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est, se soit scellée autour d’un petit spectacle joué cette même année 1970 dans une modeste paroisse de campagne autour d’une chanson de Marlene Dietrich, un simple drap pour vêtement. Scandale pour l’époque dans le milieu réformé d’une Suisse n’ayant pas qu’inventé le Dadaïsme ! Depuis lors, ils ne se sont quasiment plus quittés. Christoph est devenu un maître de la lenteur dont le théâtre orchestre un dialogue permanent entre musique, parole

et chant, maniant comme nul autre l’ironie, l’impertinence et le décalage. Son comédien et chanteur fétiche a déjà gouverné le Paradis et les Enfers, pris les traits d’un guide touristique aveugle ou d’un majordome des plus excentriques. Le voici de nouveau en première ligne d’Aucune idée, sur le palier d’un immeuble, sorte d’entre-deux propice aux imbroglios de voisinages avec sa multitude d’ouvertures, de portes et de chausse-trappes en forme de boîtes aux


lettres. Pour faire face à la floppée de problèmes ordinaires qui ne manquent de surgir, le voilà accompagné du gambiste et violoncelliste baroque Martin Zeller. Leur traversée de l’absurde, dans laquelle le dehors se joue du dedans, mêle habilement musique de Bach et extraits de Michaux, vers de Léo Ferré, air de Saint-Saëns et composition de Marin Marais, humour de boulevard et délire kafkaïen. Leur exploration de la lacune se joue des registres, des langues (passant du français à l’anglais à l’envi) et d’une multitude de quiproquos cocasses. La poésie des mots se niche dans nos angles morts, exploration des faiblesses de l’âme et des difficultés de l’altérité. Leur tendre manière d’habiter le temps laisse à chacun le loisir de la contemplation et de l’introspection salvatrice.

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eit mehreren Jahrzehnten geht Christoph Marthaler mit einer gewissen Radikalität an die Renovierung des Musik-Theaters heran. Seit jeher (oder fast) bahnt er sich beharrlich diesen Weg mit Graham F. Valentine, einem Schauspieler, den er als Jugendlicher kennenlernte, als jener seine Heimat Schottland verließ um in Zürich Literatur zu studieren und in der Familien-Pension der Marthalers wohnte. Der Legende nach ist ihre künstlerische Freundschaft im Zuge einer kleinen Vorführung entstanden, die im selben Jahr 1970 in einer bescheidenen Land-Pfarrei zu einem Lied von Marlene Dietrich, bekleidet mit einem einfachen Laken, gespielt wurde. Ein Skandal für die damalige Zeit in einer reformierten Schweiz die nicht nur den Dadaismus erfunden hat! Seitdem haben sie sich fast nie wieder getrennt. Christoph ist ein Meister der Langsamkeit geworden, dessen Theater einen permanenten Dialog zwischen Musik, Liedtext und Gesang orchestriert, wobei er wie kein anderer mit Ironie, Impertinenz und Diskrepanzen arbeitet. Sein LieblingsSchauspieler-und Sänger hat schon über Paradies und Hölle geherrscht, die Züge eines blinden Touristenführers oder eines äußert exzentrischen Haushofmeisters angenommen. Hier steht er wieder in der ersten Reihe von Aucune idée, auf dem Treppenabsatz eines Gebäudes, einer Art Zwischenbereich, der Nachbarschaftsstreitigkei-

ten begünstigt, mit seinen zahlreichen Öffnungen, Türen und Fallgruben in Form von Briefkästen. Um dem Rattenschwanz an ordinären Problemen zu begegnen, die natürlich auftreten, wird er vom Barock-Gambist-und Violoncellisten Martin Zeller begleitet. Ihre Überfahrt der Absurdität, in der das Äußere mit dem Inneren spielt, mischt auf geschickte Weise Musik von Bach und Auszüge von Michaux, Verse von Léo Ferré, Arien von Saint-Saëns und Kompositionen von Marin Marais mit Boulevard-Humor und Wahnsinn à la Kafka. Ihre Erkundung der Lücke spielt mit den Tonfällen, mit den Sprachen (sie gehen nach Lust und Laune vom Französischen ins Englische über) und einer Vielfalt von drolligem Durcheinander. Die Poesie der Worte versteckt sich in unseren toten Winkeln, Erkundungen der Schwächen der Seele und der

Schwierigkeiten mit der Andersartigkeit. Ihre zarte Art und Weise die Zeit zu beherrschen, lässt jedem die Gelegenheit zur Betrachtung und heilsamen Selbstbeobachtung. Au Grand Théâtre (Dijon) vendredi 8 et samedi 9 avril (coréalisé avec l’Opéra de Dijon) Im Grand Théâtre (Dijon) am Freitag den 8. und Samstag den 9. April (koproduziert mit der Opéra de Dijon) opera-dijon.fr – tdb-cdn.com Au Maillon (Strasbourg) du 18 au 21 mai (en français et en anglais surtitré en allemand) Im Maillon (Straßburg) vom 18. bis 21. Mai (in französischer und englischer Sprache mit deutschen Übertiteln) maillon.eu > Kulturbus Offenburg / Straßburg, Mittwoch 18.05.

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MUSIQUE MUSIK

Sounds of the city Dans Tōkyō no oto / , le compositeur Jérôme Combier trace la géographie sonore de la ville que le plasticien Yannick Jacquet met en images. Mit Tōkyō no oto / , zeichnet der Komponist Jérôme Combier die Klang-Geographie der Stadt, die der Bildhauer Yannick Jacquet in Bilder umsetzt. Par Von Daniel Vogel – Maquette par Modell von Yannick Jacquet

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uni d’un système MS de microphonie permettant des captations quasi tridimensionnelles, Jérôme Combier a parcouru la mégalopole nipponne. Ses enregistrements sonores et son collectage de phrases entendues servent de trame à une composition contemporaine associant inserts électroacoustiques, chant (2 sopranos, 2 altos, 2 ténors et 2 basses des Cris de Paris dirigés par Geoffroy Jourdain) et instruments de l’Ensemble Cairn (accordéon, flûte, clarinette, shô japonais et trompette). Tōkyō no oto prend ainsi les atours d’une cantate profane qui s’inscrit dans la tradition de la musique vocale occidentale, entre polyphonie et chanson populaire. Des fragments de poèmes de Makoto Ōoka, notamment Gens de Tokyo, et de Nicolas Bouvier (Le Vide et le plein) résonnent dans leurs langues respectives. Leurs traductions se déploient sur d’étranges kakemonos numériques à led, disposés à trois mètres au-dessus du sol, encadrant le double arc de cercle formé par les chanteurs et les musiciens. Quant à Yannick Jacquet, il propose, en vidéo et multiplication de lignes, une carto-calligraphie numérique de la ville, flot de signes abstraitement évocateurs. Au Théâtre Ledoux (Besançon) jeudi 14 avril Im Théâtre Ledoux (Besançon) am Donnerstag den 14. April les2scenes.fr 58

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it einem Micro-Phonie-System ausgestattet, das fast dreidimensionale Aufnahmen ermöglicht, hat Jérôme Combier die japanische Riesenstadt durchstreift. Seine Klangaufnahmen und seine Sammlung von aufgeschnappten Sätzen dienen als Leitfaden für eine zeitgenössische Komposition, die elektroakustische Einlagen, Gesang (2 Sopranstimmen, 2 Altstimmen, 2 Tenorstimmen und 2 BassStimmen von Cris de Paris unter der Leitung von Geoffroy Jourdain) und Instrumente des Ensembles Carin (Akkordeon, Flöte, Klarinette, japanisches Shō und Trompete) vereint. Tōkyō no oto nimmt so die Form einer profanen Kantate an, ganz in der westlichen Tradition der Vokalmusik, zwischen Vielstimmigkeit und populärem Chanson. Die Fragmente der Gedichte von Makoto Ōoka, insbesondere Gens de Tokyo, und von Nicolas Bouvier (Das Leere und das Volle) werden in ihrer jeweiligen Sprache interpretiert. Ihre Übersetzungen entfalten sich auf bizarren digitalen Kakemonos, die drei Meter über dem Boden angebracht sind und den doppelten Bogen einrahmen, der von Sängern und Musikern gebildet wird. Yannick Jacquet seinerseits bietet anhand von Videos und einer Multiplikation der Linien eine digitale Karto-Kalligraphie an, eine Flut der Zeichen, die auf abstrakte Weise vielsagend sind.



Demolition Men Le Galactik Ensemble continue de jouer sa première pièce, Optraken, qui réunissait déjà tout ce qui fait son succès : un art du contrôle de la chute et du danger. Das Galactik Ensemble spielt weiterhin sein erstes Stück Optraken, das schon alles vereinte, was seinen Erfolg ausmacht: Die Kunst der Kontrolle des Absturzes und der Gefahr. Par Von Irina Schrag – Photo de von Nicolas Martinez

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éritable coup de maître, cette création de 2017 a permis à la jeune compagnie de cirque contemporain de se faire un nom. Et même plus, une signature esthétique. Les cinq acrobates surdoués du Galactik Ensemble ne cessent d’y jouer avec des éléments scéniques n’arrêtant pas de menacer de tomber, quand ils ne se fracassent pas au sol. Réflexion sur l’humanité et son rapport à un environnement hostile, leur pièce illustre à sa manière ce « jeu symbolique avec la mort qui révèle l’intensité de l’existence » analysé par le sociologue strasbourgeois David Le Breton*. Quand ce ne sont des pans entiers de murs, les chaises se déplacent toutes seules, surtout lorsqu’une paire de fesses s’en approche. Si leur maîtrise du danger est grande, ils jouent à en mettre partout pour révéler l’incongruité de nos peurs incontrôlées. La mise en scène des chutes de sacs lestés les frôlant, dont le bruit du choc à terre fait frémir, sert de mise en tension des corps. Chacun ici ruse avec des balles de tennis lancées à toute vitesse, passant de l’esquive à la chute dans une recherche du rétablissement de l’équilibre. Avec un humour dosé de sérieux, ils citent Godard – « confronter des idées vagues avec des images fortes » – tout en affirmant que « l’instant de la décision est une folie ».

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in echter Volltreffer ist dies Kreation von 2017, die es der jungen Truppe für Zeitgenössischen Zirkus erlaubt hat sich einen Namen zu machen. Und darüber hinaus ein ästhetisches Markenzeichen. Die fünf hochbegabten

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Akrobaten des Galactik Ensemble spielen ohne Unterlass mit den Bühnenelementen, die stets zu fallen drohen, wenn sie nicht am Boden zerschellen. Als Überlegung zur Menschheit und ihrer Beziehung zu einer feindlichen Umwelt illustriert ihr Stück auf seine Weise dieses „symbolische Spiel mit dem Tod, der die Intensität der Existenz offenbart“, wie es der Straßburger Soziologe David Le Breton analysiert. Wenn es keine kompletten Stücke der Wand sind, bewegen sich die Stühle alleine fort, insbesondere wenn sich ihnen ein Hinterteil nähert. Auch wenn ihre Beherrschung der Gefahr groß ist, spielen sie überall mit ihr, um die Unangebrachtheit unserer unkontrollierten Ängste aufzuzeigen. Die Inszenierung der Stürze der beschwerten Säcke, die sie streifen, deren Aufknallen auf dem Boden erzittern lässt, dient als Spannkraft für die Körper. Jeder wendet hier Tricks an, mit schnell geworfenen Tennisbällen, vom Ausweichen zum Sturz in einer Suche nach der Gewinnung des Gleichgewichts. Mit einer Mischung aus Humor und Ernst zitieren sie Godard – „vage Ideen mit starken Bildern konfrontieren“– um gleichzeitig zu behaupten, dass „der Moment der Entscheidung eine Tollheit ist“. À l’ACB (Bar-le-Duc) vendredi 29 avril Im ACB (Bar-le-Duc) am Freitag den 29. April acb-scenenationale.org

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Conduites à risque. Des jeux de mort au jeu de vivre (PUF, 2004)



Social poetry Avec son double opus Sacré – Ciel enflammé, Georgio revient clamer sa passion partagée pour le rap et la littérature, de La Mafia K’1 Fry à Édouard Louis. Rencontre avec un chanteur à la conscience affûtée. Mit seinem Doppel-Werk Sacré – Ciel enflammé („Heilig“ – „Brennender Himmel“) schreit Georgio seine geteilte Leidenschaft für den Rap und die Literatur heraus, von La Mafia K’1 Fry bis Édouard Louis. Begegnung mit einem Sänger mit einem geschärften Gewissen. Par Von Suzi Vieira – Photo de von N’Kruma

Ciel enflammé se présente comme u n e ré é d i t i o n d e S a c ré , so r t i quelques mois plus tôt. Comment est né ce double album de 30 titres ? J’y ai travaillé trois ans, pendant la crise sanitaire. Confiné, je me suis penché sur les notions de sacré et de profane, 62

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réalisant que je sacralisais moi-même nombre de choses dans ma vie, la ponctuant de rituels, comme quand j’écris dans la solitude de la nuit, à mon bureau. Les morceaux sont traversés par les champs lexicaux de la liberté, du voyage, de l’amour – de la musique

et de ma famille –, de l’amitié : toutes choses sacrées à mes yeux. « Si tu savais ce que ça fait / Que de faire de l’argent quand les bourgeois te méprisent / Et que tes potes t’envient. » Dans Équilibre, vous reve-


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nez sur les tiraillements qui sont les vôtres… Ces tensions sont inhérentes au statut des “transfuges sociaux”, comme on les appelle. Il suffit de lire Édouard Louis et Annie Ernaux… Les gens mesurent mal l’abîme qui sépare les milieux populaires et plus aisés. Personnellement, j’ai été choqué par le mépris (inconscient, la plupart du temps) de la classe bourgeoise vis-à-vis de la classe populaire, lui refusant toute légitimité culturelle. La lutte des classes est loin d’avoir disparu ! Le rap est-il un moyen pour le dénoncer ? Je ne fais pas de rap politique. Je préfère parler de l’humain, mais il est vrai que plus je lis – je viens de finir Un bref instant de splendeur, d’Ocean Vuong – et plus je réalise combien les questions de race, culture et classe sociale me travaillent. On met souvent en avant les références littéraires de vos textes, vous rapprochant d’un Nekfeu. Qu’en pensez-vous ? Ah, cette case du soi-disant “rap littéraire” dans laquelle les médias me rangent ! Au début, cela ne me dérangeait pas. Jusqu’à ce que l’essai Connexion, de Kae Tempest, m’ouvre les yeux : derrière cette obsession, se joue encore et toujours la question du mépris de classe. C’est une façon pour les dominants de dire : “Lui est écoutable, puisqu’il connaît les grands écrivains”. Comme si je n’étais acceptable, en tant que rappeur, que parce que je lis Maïakovski… Mais quand je chante « J’ m’endors avec Jay-Z et Jacques Prévert » (Petit Prince), c’est au contraire pour dire combien mes influences sont multiples et clamer qu’aucune n’est plus noble que l’autre. Albert Camus n’a pas été plus important dans la formation de mon esprit que La Mafia K’1 Fry. Et en ce moment alors, qu’est-ce qui vous nourrit ? Le dernier album du rappeur marocain Zamdane, Couleur de ma peine.

Et Nobody’s Home, de Bakar, un artiste londonien incroyable !

sehr die Fragen der Rasse, Kultur und sozialen Klasse mich beschäftigen.

Ciel enflammé („Brennender Himmel“) präsentiert sich wie eine Neuauflage von Sacré („Heilig“), das einige Monate vorher erschien. Wie ist dieses Doppelalbum mit 30 Titeln entstanden? Ich habe drei Jahre lang, während der Coronakrise, daran gearbeitet. Im Lockdown habe ich mich mit den Begriffen des Heiligen und des Profanen beschäftigt, realisiert, dass ich zahlreichen Dingen in meinem Leben einen sakralen Charakter verlieh, sie mit Ritualen unterstrich, wie wenn ich in der Einsamkeit an meinem Schreibtisch schreibe. Die Stücke sind von den lexikalischen Wortfeldern der Freiheit durchzogen, von Reise, Liebe – zur Musik und meiner Familie – und Freundschaft: In meinen Augen alles heilige Dinge.

Man stellt oft die literarischen Bezüge in ihren Texten in den Vordergrund und vergleicht Sie mit Nekfeu. Was halten Sie davon? Ah, diese Schublade des sogenannten „literarischen Raps“ in die mich die Medien gerne stecken! Am Anfang störte mich das nicht. Bis der Essay Connexion von Kae Tempest mir die Augen öffnete: Hinter dieser Obsession versteckt sich immer noch die Frage der Klassenverachtung. Es ist eine Art und Weise der Dominierenden zu sagen: „Den kann man hören, weil er die großen Schriftsteller kennt“. So als ob ich als Rapper nur akzeptabel wäre weil ich Majakowski lese... Aber wenn ich singe „Ich schlafe mit Jay-Z und Jacques Prévert ein“ (Petit Prince, „Kleiner Prinz“) ist es im Gegenteil um auszudrücken wie vielfältig meine Einflüsse sind und herauszuschreien, dass keiner nobler als der andere ist. Albert Camus war für die Bildung meines Geistes nicht wichtiger als La Mafia K’1 Fry.

Wenn Du wüsstest wie das ist / Geld zu verdienen wenn dich die Bourgeoisie verachtet / Und deine Kumpels dich beneiden“, singen Sie auf Équilibre („Gleichgewicht“). Sie sprechen die Zwiespalte an, die die ihrigen sind... Diese Spannungen gehören zum Status der „sozialen Überläufer“, wie man sie nennt. Es reicht Édouard Louis und Annie Ernaux zu lesen... Die Leute sind sich des Abgrundes zwischen dem populären Milieu und den Wohlhabenden nicht bewusst. Persönlich war ich schockiert über die (meist unterbewusste) Verachtung der bürgerlichen Klasse gegenüber dem einfachen Volk, dem jede kulturelle Legitimität abgesprochen wird. Der Klassenkampf ist noch lange nicht vorüber! Ist der Rap ein Mittel um dies zu denunzieren? Ich mache keinen politischen Rap. Ich ziehe es vor, über menschliches zu sprechen, aber es stimmt, je mehr ich lese – ich habe gerade Auf Erden sind wir kurz grandios von Ocean Vuong beendet – desto mehr realisiere ich, wie

Von was nähren Sie sich momentan? Vom letzten Album des marokkanischen Rappers Zamdane Couleur de ma peine („Farbe meines Leids“). Und Nobody’s Home („Keiner zuhause“) von Bakar, einem unglaublichen Künstler aus London! À La Vapeur (Dijon) jeudi 31 mars et à La Laiterie (Strasbourg) vendredi 15 avril In La Vapeur (Dijon) am Donnerstag den 31. März und in La Laiterie (Straßburg) am Freitag den 15. April lavapeur.com — artefact.org

Édité par Erschienen bei Panenka Music / Wagram Music georgioxv3.com

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Les fils du large Entre saudade du Caucase et vibrations créoles, le duo franco-arménien Ladaniva réinvente la scène world.

Die Söhne der Ferne Zwischen Sehnsucht nach dem Kaukasus und kreolischen Vibrationen erfindet das französisch-armenische Duo Ladaniva die Weltmusik neu. Par Von Suzi Vieira – Photo de von Alexis Yousla

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adaniva, c’est le nom d’une grosse voiture très populaire dans l’ex-URSS, au volant de laquelle « les kékés aimaient frimer... Plus jeune, mon père en avait une », confie Jacqueline Baghdasaryan dans un sourire taquin. Née en Arménie, avant de grandir en Biélorussie et de débarquer à 18 ans à Tourcoing avec sa mère – un statut de réfugiées politiques dans les valises –, la pétillante jeune femme est la voix d’un duo métissé et joyeux. Avec le multi instrumentiste Louis Thomas, inscrit comme elle au Conservatoire de Lille et rencontré lors d’une jam session dans un bar, elle réinvente depuis trois ans le folk balkanique. Ensemble, les deux comparses composent un répertoire nourri de sonorités du monde, entre musiques traditionnelles de Serbie ou d’Arménie, pop russe, ragas indiens ou même maloyas réunionnais. Ils se font d’abord connaître grâce à leurs clips sur Internet, et en premier lieu 64

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Vay Aman (2020), qui fait des millions de vues. La diaspora arménienne n’y est pas pour rien. « C’est la communauté qui nous a rendus visibles au monde en nous relayant de façon totalement incroyable ! » Au point que les deux fondateurs et leurs musiciens font l’objet, l’été dernier à Erevan, d’un accueil digne des plus grandes stars en tournée. « C’était fou ! Les gens nous recevaient comme si nous faisions partie de leur famille. » Jacqueline écrit et chante essentiellement en arménien, parfois en français (Pourquoi t’as fait ça ?) ou même en serbe, comme sur Ajde Jano (« La fille du large »), une vieille chanson populaire qui pourrait être l’histoire de sa propre vie : « Tout vendre, tout laisser, partir et ne faire que chanter et danser »… Dans ce grand carambolage revendiqué « entre tradition et modernité », Ladaniva alterne sans complexes entre


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ballades virevoltantes et cri de colère contre les puissances indifférentes aux victimes du conflit opposant l’Arménie à l’Azerbaïdjan depuis 2020, avec ses centaines de milliers de réfugiés. Sur scène, le groupe ne manque pas aujourd’hui de dédier Oror à tous les damnés de l’ancienne terre soviétique, du Haut-Karabagh à l’Ukraine.

Jaqueline schreibt und singt ausschließlich in Armenisch, manchmal in Französisch (Pourquoi t’as fait ça ?) oder sogar in Serbisch, wie auf Ajde Jano, („Das Mädchen von der offenen See“), einem alten Volkslied, das die Geschichte ihres eigenen Lebens sein könnte: „Alles verkaufen, alles hinter sich lassen, fortgehen und nur singen und tanzen“... In dieser großen Karambolage „zwischen Tradition und Moderne“, wechselt Ladaniva ohne Komplexe zwischen wirbelnden Balladen und Wutschreien gegenüber den Mächten, die den Opfern des seit 2020 herrschenden Konflikts zwischen Armenien und Aserbaidschan, mit seinen hunderttausend Flüchtlingen, gleichgültig gegenüberstehen. Auf der Bühne widmet die Gruppe Oror allen Verdammten der ehemaligen sowjetischen Länder, vom Bergkarabach bis zur Ukraine.

© Christophe Urbain

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adaniva ist der Name eines großen Autos, das in der ExUdSSR sehr beliebt ist, an dessen Lenkrad „die Angeber gerne protzen... Als er jünger war, hatte mein Vater einen“, vertraut uns Jacqueline Baghdasaryan mit einem schelmischen Lächeln an. In Armenien geboren, bevor sie in Weißrussland aufwuchs und mit 18 Jahren mit ihrer Mutter nach Tourcoing kam – mit dem Status eines politischen Flüchtlings im Koffer – ist die quirlige junge Frau die Stimme eines gemischten und fröhlichen Duos. Mit dem Multi-Instrumentalisten Louis Thomas, der wie sie am Konservatorium von Lille eingeschrieben ist, den sie bei einer Jamsession in einer Bar kennenlernt, erfindet sie seit drei Jahren den Balkan-Folk neu. Gemeinsam komponieren die beiden Komparsen ein Repertoire, das sich von den Klänge der Welt nährt, zwischen traditioneller Musik aus Serbien oder Armenien, russischem Pop, indischem Raga oder sogar Maloya aus La Réunion. Sie werden zunächst dank ihrer Videoclips im Internet bekannt, an erster Stelle Vay Aman (2020), mit Millionen von Aufrufen. Die armenische Diaspora ist daran nicht unbeteiligt. „Es ist die Gemeinschaft, die uns für die Welt sichtbar gemacht hat, indem sie uns auf unglaubliche Weise verbreitete!“ So sehr, dass den beiden Gründern und ihren Musikern im vergangenen Sommer in Erevan ein Empfang zuteil wurde, der den größten Stars würdig war. „Es war verrückt! Die Leute empfingen uns so als ob wir Teil ihrer Familie seien.“

Pagan night

Flûtes anciennes, harpe, violon et percussions du monde… Sans oublier l’entêtement des synthés et les sons collectés ! Depuis la sortie de Balkan Pulse en 2014, les quatre virtuoses strasbourgeois de Lolomis “détraditionnalisent” les folklores d’Eurasie – de la Finlande au Sri Lanka en passant par la Bulgarie – à grands coups d’hypnotiques chansons sorcières. Avec Red Sonja, Romane, Stélios, Élodie et Louis poursuivent leur transe tribale atypique. C’est l’autre groupe à découvrir au cours d’une soirée qui promet d’être sans frontières ! Alte Flöten, Harfe, Geige und Trommeln... ohne die Synthesizer und die gesammelten Töne zu vergessen! Seit dem Erscheinen von Balkan Pulse im Jahr 2014 „enttraditionalisieren“ die vier Virtuosen von Lolomis aus Straßburg die Folklore Eurasiens – von Finnland bis Sri Lanka über Bulgarien – mit hypnotisierenden Hexen-Liedern. Mit Red Sonja setzen Romane, Stélios, Élodie und Louis ihre atypische Stammes-Trance fort. Das ist die andere Gruppe, die man an diesem grenzenlosen Abend entdecken kann!

À l’Espace Django (Strasbourg) vendredi 8 et au Gueulard Plus (Nilvange) samedi 9 avril Im Espace Django (Straßburg) am Freitag den 8. und im Gueulard Plus (Nilvange) am Samstag den 9. April espacedjango.eu – legueulardplus.fr

À l’Espace Django (Strasbourg) vendredi 8 avril Im Espace Django (Straßburg) am Freitag den 8. April lolomis.net

Édité par Erschienen bei Flan Prod /flanproduction

Édité par Erschienen bei Buda Musique budamusique.com POLY 245

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Le pouvoir de la musique Entre transes vocales et rythmiques extatiques, Anne Paceo poursuit, avec S.H.A.M.A.N.E.S, sa quête musicale et spirituelle.

Die Macht der Musik Zwischen stimmlicher Trance und extatischen Rhythmen setzt Anne Paceo mit S.H.A.M.A.N.E.S ihre musikalische und spirituelle Suche fort. Par Von Suzi Vieira – Photo de von Sylvain Gripoix

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ar son écriture à la fois organique, solaire et généreuse, la prolifique batteuse et compositrice Anne Paceo a su inventer, en une petite décennie à peine, un style bien à elle, aux frontières du jazz, de l’electro et des musiques du monde. Avec S.H.A.M.A.N.E.S, tout frais paru sur son nouveau label, la trentenaire livre un septième opus viscéral et poétique, tout en spiritualité, inspiré des chants de divination de Sibérie, des rituels d’exorcisme de Bali ou encore des cérémonies vodoues d’Haïti. Habituée à jouer aux côtés des plus grands – d’Archie Shepp à Jeanne Added en passant par Christian Escoudé ou China Moses – la jeune femme convoque ici les ensorcelants pouvoirs de la percussion et de la voix, instruments primordiaux grâce auxquels l’humanité, de tout temps, a 66

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tenté d’entrer en relation avec l’autre monde. Sur l’incantatoire Piel, psalmodié avec les complices polyglottes Isabel Sörling et Marion Rampal, Paceo plonge aux racines du chant sacré, tandis qu’elle s’adonne, sur le puissant Dive Into The Unknown, à une envoûtante et céleste langue imaginaire. Un disque mystique, invitant à la transe sonique, dont on a hâte de faire l’expérience en concert !

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nhand ihrer gleichzeitig organischen, sonnigen und großzügigen Schreibweise hat die produktive Schlagzeugerin und Komponistin Anne Paceo, in knapp einem Jahrzehnt, ihren ganz eigenen Stil erfunden, an der Grenze zwischen Jazz, Elektromusik und Weltmusik. Mit dem gerade frisch bei ihrem Label erschie-

nenen S.H.A.M.A.N.E.S liefert die Dreißigjährige ein siebtes tiefgründiges und poetisches Werk, voller Spiritualität, das von den Divinations-Gesängen Sibiriens, den Exorzismus-Ritualen Balis oder auch den Voodoo-Zeremonien Haitis beeinflusst ist. Die junge Frau, die daran gewöhnt ist, neben den Größten zu spielen – von Archie Shepp bis Jeanne Added über Christian Escoudé oder China Moses – bestellt hier die verführerischen Einflüsse von Schlaginstrumenten und Stimme ein, grundlegende Instrumente, dank welcher die Menschheit seit Urzeiten versucht hat mit der anderen Welt in Kontakt zu treten. Auf dem beschwörenden Piel, einem gemeinsamen Sprechgesang mit den polyglotten Isabel Sörling und Marion Rampal, taucht Paceo hinab zu den Wurzeln des Sakralgesangs, während sie sich auf dem kraftvollen Dive Into The Unknown einer betörenden, imaginären, göttlichen Sprache hingibt. Eine mystische Platte, die zur Klang-Trance einlädt und auf deren Live-Erfahrung wir gespannt warten. À la Briqueterie (Schiltigheim) mardi 5 avril et à l’Arsenal (Metz) mercredi 6 avril In der Briqueterie (Schiltigheim) am Dienstag den 5. April und in L’Arsenal (Metz) am Mittwoch den 6. April annepaceo.com

Édité par Erschienen bei Jusqu’à la nuit Records /jusqualanuit



FESTIVAL

Imagine Entre arts numériques interactifs et musiques actuelles, le nouveau festival D’autres formes anticipe les concerts du futur. Zwischen interaktiver digitaler Kunst und aktueller Musik nimmt das neue Festival D’autres formes die Konzerte der Zukunft vorweg. Par Von Suzi Vieira – Photo de von SMing © Studio Superbe

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oilà détonant festival d’un troisième type ! Avec D’autres formes, La Rodia projette le public dans une expérience musicale 3.0, ludique, immersive et surtout interactive. « Ça fait deux ans qu’on essaye de monter un événement d’un genre nouveau, basé sur les usages du numérique de demain », confie Simon Nicolas, en charge de la programmation de ce week-end d’anticipation. Né de réflexions engagées pendant la crise de la Covid, le projet tente « d’imaginer le concert du futur, d’ouvrir une fenêtre sur les possibilités du spectacle vivant », à grands coups de bluffantes installations, accessibles à tous (gratuitement). En témoignent par exemple l’étrange chorale virtuelle SMing ou encore ACT, grand cube transparent de cinq mètres par cinq où, grâce à une technologie de tracking, vos propres déplacements déclenchent des samples et composent une musique. L’occasion aussi, de créer une œuvre sonore collective et collaboratrice, puisque le dispositif prend en compte l’interaction avec les autres corps présents dans la matrice. Quand on vous dit que c’est magique… Le soir, place à des lives musicaux assez dingos – avec notamment les orfèvres du sextet à cordes réuni par Chapelier Fou –, pensés pour casser le rapport frontal habituel avec la scène en plaçant le public à 360 degrés autour des artistes. Ça promet ! À La Rodia (Besançon) du 1er au 3 avril In La Rodia (Besançon) vom 1. bis 3. April larodia.com 68

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in explosives Festival der dritten Art! Mit D’autres formes versetzt La Rodia das Publikum in eine musikalische Erfahrung 3.0, verspielt, immersiv und vor allem interaktiv. „Seit zwei Jahren versuchen wir eine neuartige Veranstaltung auf die Beine zu stellen, die auf der digitalen Nutzung von morgen beruht“, vertraut uns Simon Nicolas an, der für das Programm dieses futuristischen Wochenendes verantwortlich ist. Aus Überlegungen während der Zeit der Coronakrise entstanden, versucht das Projekt „das Konzert der Zukunft zu entwerfen, ein Fenster auf die Möglichkeiten der darstellenden Kunst zu öffnen“, mit großen umwerfenden Installationen, die für alle (kostenlos) zugänglich sind. Davon zeugen zum Beispiel der bizarre virtuelle Chor SMing oder auch ACT, ein großer transparenter Würfel von fünf auf fünf Metern, in dem anhand der Technik des Trackings, die Bewegungen des Besuchers Samples auslösen und eine Musik komponieren. Ebenfalls die Gelegenheit ein kollektives und gemeinsames Werk zu schaffen, da das System die Interaktion mit den anderen Körpern in der Matrix in Betracht zieht. Wir haben ja gesagt, es ist magisch... Am Abend Platz für verrückte LiveKonzerte –mit den Juwelieren des Saiten-Sextetts rund um Chapelier Fou – die so konzipiert sind, dass sie die normalerweise frontale Beziehung mit der Bühne auflösen, indem sie das Publikum in 360 Grad rund um die Künstler platzieren. Vielversprechend!


Liberté grande Placé sous le signe du Nouveau Monde par son directeur artistique Marc Coppey, le Festival de Pâques des Musicales de Colmar est de retour.

Große Freiheit Das Festival de Pâques der Musicales de Colmar ist zurück und wird von seinem künstlerischen Direktor Marc Coppey unter das Motto der Neuen Welt gestellt. Par Von Hervé Lévy – Photo de von Ulrike von Loeper

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ans la continuité des historiques Musicales, ce Festival de Pâques propose une brassée de concerts dont le pivot est le centenaire du Musée Bartholdi. Il est célébré par un programme Dvořák du Prague Philharmonia dirigé par l’Alsacien Emmanuel Villaume (14/04). S’y croisent le Concerto pour violoncelle interprété par Marc Coppey et la Symphonie n°9 “Du Nouveau Monde” où se mêlent avec grande finesse influences européennes et américaines, si bien que certains ont pu parler à son propos d’œuvre “entre deux mondes”. Autre réjouissance symphonique, un concert de l’OPS (16/04) avec la baguette de l’incandescent Aziz Shokhakimov pour une soirée Prokofiev / Ravel / Beethoven. Le reste de l’événement est tout aussi festif, piqueté d’instants chambristes, à l’image d’un concert 100% russe (09/04), et de découvertes, comme une surprenante rencontre entre musique et vin (10/04). Notre coup de cœur ? La réduction des Sept dernières paroles du Christ en croix de Haydn interprétée par les virtuoses du Quatuor Goldmund (15/04).

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n einer Kontinuität mit den historischen Musicales präsentiert dieses Osterfestival zahlreiche Konzerte deren Drehund Angelpunkt die Hundertjahrfeier des Musée Bartholdi ist. Es wird mit einem Programm zu Dvořák der Prague Phil-

harmonia unter der Leitung des Elsässers Emmanuel Villaume (14.04.) gefeiert. Darin treffen das Konzert für Violoncello, interpretiert von Marc Coppey und die Sinfonie Nr. 9 „Aus der neuen Welt“ aufeinander, in denen sich mit großer Finesse europäische und amerikanische Einflüsse mischen, so dass einige sein Werk als „zwischen zwei Welten“ bezeichnen konnten. Eine andere Sinfonie-Freude ist das Konzert des OPS (16.04.) unter der Leitung des lebhaften Aziz Shokhakimov für einen Abend mit Prokofjew / Ravel / Beethoven. Der Rest des Ereignisses ist ebenso feierlich, übersät mit Kammerkonzerten wie dem 100% russischen Konzert (09.04.) und Entdeckungen wie einer überraschenden Begegnung zwischen Wein und Musik (10.04.). Unser Favorit? Die vereinfachte Fassung der Sieben letzten Worte unseres Erlösers am Kreuze von Haydn, interpretiert von den Virtuosen des Quator Goldmund (15.04.). En l’Église Saint-Matthieu, au Musée Unterlinden et à la Salle Europe (Colmar), en l’Église Saint-Michel (Horbourg-Wihr) et à la Confrérie Saint-Étienne (Kaysersberg) du 8 au 16 avril In der Église Saint-Matthieu, im Musée Unterlinden und in der Salle Europe (Colmar), in der Église Saint-Michel (Horbourg-Wihr) und in der Confrérie Saint-Étienne (Kaysersberg) vom 8. bis 16. April les-musicales.com

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Purcell revisited Co-fondateur du collectif Peeping Tom, Franck Chartier monte un Dido & Aeneas augmenté, prenant des libertés avec Purcell : une claque ! Der Gründer der Gruppe Peeping Tom, Franck Chartier, präsentiert eine erweiterte Version von Dido & Aeneas und befreit sich von Purcell: Eine Ohrfeige! Par Von Hervé Lévy – Photo de von Carole Parodi

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ien connu, l’iconoclaste collectif belge Peeping Tom – avec la trilogie Vader, Moeder, Kind – plonge dans un bain baroque en bonne compagnie, puisqu’à la baguette on retrouve Emmanuelle Haïm. Assurée par son Concert d’Astrée, la partie musicale de Dido & Aeneas se voit enrichie d’intermèdes composés par Atsushi Sakaï doublant la durée de l’opéra de Purcell, haché de séquences théâtrales portées par ce nouveau matériau sonore… S’il surprend, le greffon contemporain prend néanmoins. La musique secoue et la vision des amours tragiques de la reine de Carthage et du héros troyen est à l’avenant, formant une plongée vertigineuse dans la psyché de l’héroïne au cœur d’une cité envahie par les sables. Entre mise en abyme géniale – une riche veuve abandonnée qui désire voir jouer l’opéra de Purcell ad nauseam – et réflexion sur l’échec amoureux, cette production où abondent puissantes chorégraphies et autres visions de cauchemar – avec un final à très grand spectacle purement dantesque – ne laisse personne indifférent ! Pour notre part, on adore.

Au Grand Théâtre (Luxembourg) mercredi 27 et vendredi 29 avril Im Grand Théâtre (Luxemburg) am Mittwoch den 27. und Freitag den 29. April theatres.lu 70

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ie sehr bekannte bilderstürmerische belgische Gruppe Peeping Tom – mit der Trilogie Vader, Moeder, Kind – taucht in bester Gesellschaft in ein barockes Bad ein, da man auf den Dirigenten Emmanuelle Haïm trifft. Von seinem Concert d’Astrée ausgeführt, wird der musikalische Teil von Dido & Aeneas von Intermezzos von Atsushi Sakaï bereichert, was die Dauer der Oper verdoppelt, die durch Theater-Sequenzen unterteilt wird, welche von diesem neuen Klangmaterial getragen werden... Auch wenn es überrascht, gelingt das zeitgenössische Transplantat. Die Musik erschüttert und die Vision der tragischen Liebe zwischen der Königin Karthagos und dem trojanischen Helden ist dementsprechend, ein schwindelerregender Sprung in die Psyche der Heldin inmitten einer Stadt, die vom Sand heimgesucht wird. Zwischen genialer Mise en abyme – eine reiche verlassene Witwe, die die Oper von Purcell ad nauseam sehen will – und Überlegungen zum Scheitern einer Liebe, lässt diese Produktion, in der starke Choreographien und albtraumhafte Visionen einander jagen – mit einem Finale, das großes Spektakel à la Dante ist –, niemanden kalt! Wir für unseren Teil, lieben es.



OPÉRA OPER

Belle Époque L’Opéra national de Lorraine accueille la très belle mise en scène signée Denis Podalydès du rare Fortunio de Messager. Die Opéra national de Lorraine empfängt Denis Podalydès sehr schöne Inszenierung des seltenen Fortunio von Messager. Par Von Hervé Lévy – Photos de von Stefan Brion / Opéra Comique

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elui qui connaît encore André Messager (1853-1929) le résume souvent à un compositeur de “musique légère” dont Véronique serait l’archétype. Fortunio nous invite à reconsidérer l’affaire : opéra de 1907 ressuscité en 2009 par Denis Podalydès, il accorde cette futilité à une réelle profondeur. Adaptée du Chandelier de Musset, cette histoire a quelques atours du boulevard : cédant aux avances d’un militaire, l’épouse d’un vieux notaire décide de manipuler un jeune clerc naïf pour détourner l’attention du cocu. Le gamin est néanmoins follement épris de la dame volage… Le metteur en scène, qui a beaucoup pratiqué l’auteur de Lorenzaccio – notamment sous la férule de Jean-Pierre Vincent au Conservatoire –, le rapproche néanmoins des « romantiques allemands », l’éloignant « de la tradition française d’un Musset purement spirituel, aimable, sorte de sous-Marivaux. » C’est ce mélange de mélancolie et de folie que l’on retrouve dans une mise en scène intensément précise, servie par des costumes de Christian Lacroix où les officiers portent pantalon garance et les belles, chapeaux à plumes. À l’Opéra national de Lorraine (Nancy) du 24 au 30 avril In der Opéra national de Lorraine (Nancy) vom 24. bis 30. April opera-national-lorraine.fr 72

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er noch André Messager (1853-1929) kennt, reduziert ihn oft auf einen Komponisten „leichter Musik“, deren Archetyp Véronique wäre. Fortunio lädt uns dazu ein, die Sache neu zu betrachten: In der Oper von 1907, die im Jahr 2009 von Denis Podalydès wiederbelebt wurde, vereint er diese Oberflächlichkeit mit echtem Tiefgang. Diese Geschichte nach Le Chandelier von Musset hat etwas von Boulevard: Die Ehefrau eines alten Notars gibt den Annäherungsversuchen eines Soldaten nach und beschließt einen jungen naiven Kleriker zu manipulieren um die Aufmerksamkeit des betrogenen Ehemanns abzulenken. Dennoch ist der Knabe über beide Ohren verliebt in die treulose Dame... Der Regisseur, der sich viel mit dem Autor von Lorenzaccio beschäftigt hat – insbesondere unter der Fuchtel von Jean-Pierre Vincent am Konservatorium – verortet ihn nichtsdestotrotz in der Nähe der „deutschen Romantiker“, entfernt ihn „von der französischen Tradition eines rein spirituellen, netten Musset, einer minderwertigen Version von Marivaux.“ Es ist diese Mischung aus Melancholie und Wahnsinn, die man in einer intensiven und präzisen Inszenierung wiederfindet, unterstützt von den Kostümen von Christian Lacroix, bei denen die Offiziere krapprote Hosen und die Schönen Hüte mit Federn tragen.


MUSIQUE MUSIK

Vive la France ! Avec le prodige de la trompette Gábor Boldoczki, l’Orchestre philharmonique de Strasbourg fait se croiser Tomasi, Bizet et Debussy. Mit dem Wunderkind der Trompete Gábor Boldoczki, lässt das Orchestre philharmonique de Strasbourg Tomasi, Bizet und Debussy aufeinandertreffen. Par Von Hervé Lévy – Photo de von Marco Borggreve

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onsidéré comme le successeur de l’immense Maurice André, Gábor Boldoczki est l’un des plus grands souffleurs de la planète. Preuve en sera apportée avec son interprétation du Concerto pour trompette d’Henri Tomasi, œuvre emblématique du répertoire dédié à l’instrument, que son auteur qualifiait en 1949 de « musique pure. J’ai essayé de faire la synthèse de toutes les possibilités expressives et techniques de la trompette, depuis Bach à nos jours en passant par le jazz ». Sous la baguette de feu du directeur musical de l’OPS Aziz Shokhakimov, le reste du programme est un hommage à une certaine élégance française avec la lumière provençale de la Suite n°1 tirée de L’Arlésienne de Bizet. En clôture, se déploient les trois Images de Debussy au fort pouvoir évocateur, nous emportant de l’Espagne fantasmée d’Iberia aux bien nommées Rondes de printemps, en passant par les mélancoliques Gigues. Pétrie d’un humour triste, cette dernière pièce est inspirée de Street, un poème de Verlaine, et des souvenirs d’Angleterre de son auteur, puisqu’on y retrouve l’air populaire écossais The Keel Row.

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ábor Boldoczki, der als der Nachfolger des großen Maurice André betrachtet wird, ist einer der größten Blechbläser des Planeten. Der Beweis wird mit seiner Interpretation des Trompetenkonzerts von Henri Tomasi geliefert, einem symbolträchtigen Werk des diesem Instrument gewidmeten Repertoires, das sein Autor folgendermaßen bezeichnete: „Pure Musik. Ich habe versucht eine Synthese zwischen allen Möglichkeiten des Ausdrucks und der Technik der Trompete zu machen, von Bach bis heute, über Jazz“, sagte er 1949. Unter dem feurigen Dirigentenstab des musikalischen Direktors des OPS, Aziz Shokhakimov, ist der Rest des Programms eine Hommage an eine gewisse französische Eleganz, mit dem provenzalischen Licht der Suite n°1 aus L’Arlésienne von Bizet. Zum Abschluss entfalten sich die drei Images von Debussy, mit starker Aussagekraft, die uns ins phantasierte Spanien von Iberia mit den Rondes de printemps entführt, über die melancholischen Gigues. Von tristem Humor durchzogen, ist dieses letzte Stück von Street inspiriert, einem Gedicht von Verlaine, und den Erinnerungen seines Autors aus England, da man darin die schottische Volksmelodie The Keel Row wiederfindet.

Au Palais de la Musique et des Congrès (Strasbourg) jeudi 28 et vendredi 29 avril Im Palais de la Musique et des Congrès (Straßburg) am Donnerstag den 28. und Freitag den 29. April philharmonique.strasbourg.eu POLY 245

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FESTIVAL

Pâques russe L’Orchestre philharmonique de Berlin investit Baden-Baden pour des Osterfestspiele marquées par une nouvelle production de La Dame de Pique de Tchaïkovski.

Russische Ostern Die Berliner Philharmoniker erobern Baden-Baden für die Osterfestspiele, die mit einer Neuproduktion der Pique Dame von Tschaikowski begangen werden. Par Von Hervé Lévy – Photos de von Monika Ritterhaus

politique. Le faire rayonner en Allemagne ou en France en est un cinglant rappel. À la baguette de la formation berlinoise, Kirill Petrenko – qui s’est exprimé avec grande clarté sur l’invasion de l’Ukraine – est sans doute l’interprète le plus à même de nous emporter dans les arcanes de la musique de Tchaïkovski dont il dirige aussi Iolanta (17/04) en version concertante avec Sonya Yoncheva dans le rôle-titre.

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ondée sur la nouvelle éponyme de Pouchkine, La Dame de pique de Tchaïkovski (09-18/04) saisit d’une ivresse vertigineuse : entre frénésie du jeu, amours contrariés et expériences surnaturelles, l’opéra luit d’une sombre lumière, nous attirant irrémédiablement. À Baden-Baden, la mise en scène a été confiée à l’iconoclaste duo formé par Moshe Leiser et Patrice Caurier, qui œuvrent ensemble depuis le début des années 1980. Ils voient Hermann, le protagoniste principal, comme un 74

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innocent, une âme perdue et brisée évoquant Woyzeck, métamorphosant l’histoire en une enquête policière qui rappelle Agatha Christie ou Edgar Wallace. Très attendue, cette production est le point d’orgue de la traditionnelle résidence des Berliner Philharmoniker à Baden-Baden, qui prend cette année des teintes russes, entrant en collision frontale avec l’actualité… et rendant peut-être encore plus urgente la nécessité de faire entendre ce répertoire, qui ne peut être confondu avec un régime

Au pupitre des Berliner se succèdent des chefs comme François-Xavier Roth pour un programme où irradie Stravinski (10/04) et Andris Nelsons (16/ 04), faisant voisiner Le Sacre du Printemps et le Concerto pour trompette de Mieczysław Weinberg interprété par Håkan Hardenberger. Voilà œuvre qui sonne curieusement, lorsqu’on sait que son auteur avait fui sa Pologne natale au moment de l’invasion nazie de 1939. Rajoutez à cela une douzaine de rendez-vous chambristes proposés par les membres de la prestigieuse phalange dans de multiples lieux et des événements comme une causerie avec le philosophe Peter Sloterdijk (11/04, Kurhaus), et vous comprendrez que la cité thermale va battre au rythme berlinois dix jours durant. « Nous avons envie de faire résonner notre festival pascal avec l’histoire et l’âme de Baden-Baden et non d’aligner les concerts comme à la


parade », explique Benedikt Stampa. Et l’intendant du Festspielhaus de dévoiler « un lien puissant avec Richard Strauss l’année prochaine, avec notamment Die Frau ohne Schatten », et d’annoncer un événement au cours de l’année 2025 autour de Pierre Boulez, en toute complicité avec le SWR Symphonieorchester.

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uf der Basis der gleichnamigen Novelle von Puschkin ist die Pique Dame von Tschaikowski (09.-18.04.) wie ein schwindelerregender Rausch: Zwischen Leidenschaft des Spiels, verhinderter Liebe und übernatürlichen Erfahrungen, leuchtet die Oper in einem düsteren Licht, das uns hoffnungslos anzieht. In Baden-Baden wurde die Inszenierung dem ikonoklastischen Duo aus Moshe Leiser und Patrice Caurier anvertraut, die seit Anfang der 1980er Jahre zusammenarbeiten. Sie sehen Hermann, die Hauptfigur, wie einen Unschuldigen, eine verlorene und gebrochene Seele, die an Woyzeck erinnert, indem sie die Geschichte in eine Detektivgeschichte verwandeln, die an Agatha Christie oder Edgar Wallace denken lässt. Diese sehnlichst erwartete Produktion ist der Höhepunkt der

traditionellen Residenz der Berliner Philharmoniker in Baden-Baden, die in diesem Jahr russische Farben annimmt, die wie ein frontaler Zusammenstoß mit den aktuellen Nachrichten sind... und es noch dringlicher machen, dieses Repertoire zu hören, das man nicht mit einem politischen Regime verwechseln darf. Es in Deutschland oder in Frankreich zu verbreiten erinnert daran. Der Dirigent des Berliner Orchesters, Kirill Petrenko – der sich mit großer Klarheit zur Invasion der Ukraine geäußert hat – ist sicherlich der beste Interpret um uns in die Geheimnisse der Musik von Tschaikowski einzuweihen, von dem er auch Jolanthe (17.04.) in einer erstaunlichen Version mit Sonya Yoncheva in der Titelrolle dirigiert. Am Dirigentenpult der Berliner folgen Chefs wie François-Xavier Roth für ein Programm, das von Strawinsky (10.04.) oder Andris Nelsons (16.04.) durchzogen wird, mit Le Sacre du Printemps und dem Trompetenkonzert von Mieczysław Weinberg, interpretiert von Håkan Hardenberger. Ein Werk, das kurios erscheint, wenn man weiß, dass sein Autor beim Einmarsch der Na-

zis 1939 aus seinem Heimatland Polen geflohen war. Man füge dem mehr als zwölf Kammerkonzerte hinzu, die von den Mitgliedern des prestigeträchtigen Orchesters an verschiedenen Orten gegeben werden und Ereignisse wie einen Vortrag des Philosophen Peter Sloterdijk (11.04., Kurhaus) und man versteht, dass die Badestadt zehn Tage lang im Berliner Rhythmus pulsieren wird. „Wir wollen unsere Osterfestspiele mit der Geschichte und der Seele von BadenBaden in Einklang bringen und nicht die Konzerte aneinanderreihen wie bei einer Parade“, erklärt Benedikt Stampa. Und der Intendant des Festspielhauses verrät „eine starke Verbindung mit Richard Strauss im kommenden Jahr, unter anderem mit Die Frau ohne Schatten“, bevor er ein Ereignis für das Jahr 2025 in Kooperation mit dem SWR Symphonieorchester rund um Pierre Boulez ankündigt. Au Festspielhaus (Baden-Baden), du 9 au 18 avril Im Festspielhaus (Baden-Baden) vom 9. bis 18. April festspielhaus.de

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EXPOSITION AUSSTELLUNG

Aux origines Réalisée en tandem par le ZKM et le Musée d’Histoire naturelle, The Beauty of Early Life est aux confluences de l’art et de la science.

Uranfang Die gemeinsam vom ZKM und dem Staatlichen Museum für Naturkunde Karlsruhe organisierte Ausstellung The Beauty of Early Life ist eine Begegnung von Kunst und Wissenschaft. Par Von Raphaël Zimmermann — Photo de von Marco Cappelletti

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édérant plus de 30 institutions, Kultur in Karlsruhe est une initiative reflétant l’effervescence de la cité du BadeWurtemberg qui s’est vue décerner le label Unesco City of Media Arts. En témoigne une exposition en forme de voyage dans le (très, très, très) lointain passé de la planète, en quête des origines de la vie. Avec cette plongée allant de 3,8 milliards d’années à 444 millions d’années avant notre ère se découvrent d’étonnants fossiles illustrant les processus d’évolution décrits par Darwin (expliqués à la lumière des plus récentes découvertes dans le domaine) dont la beauté entre en résonance avec des œuvres d’art moderne et contemporain. Hans Arp, Joan Miró ou encore Max Ernst rencontrent en effet Len Lye, mais aussi Robertina Šebjanič (entre bioart, performance audiovisuelle, art sonore, installation et environnements immersifs) ou encore Jakub Nepraš et ses “vidéo-sculptures”. Explorer le passé pour tenter de percer les mystères du présent…

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ie Initiative Kultur in Karlsruhe, die mehr als 30 Institutionen vereint, spiegelt die Lebhaftigkeit der Stadt in Baden-Württemberg wider, die ihr das Label Unesco City of Media Arts eingebracht hat. Davon zeugt diese Ausstellung in Form einer Reise in die (sehr, sehr, sehr) ferne Vergangenheit des Planeten auf der Suche nach den Ursprüngen des Lebens. Mit diesem Eintauchen in die Zeit von 3,8 Milliarden bis 444 Millionen Jahren vor unserer Ära entdeckt man erstaunliche Fossilien, die den Evolutionsprozess, wie er von Darwin beschrieben wurde, illustrieren (erklärt am Beispiel der neuesten Erkenntnisse in diesem Bereich) deren Schönheit in einen Dialog mit Werken der modernen und zeitgenössischen Kunst tritt. Hans Arp, Joan Miró oder auch Max Ernst treffen in der Tat auf Len Lye, aber auch Robertina Šebjanič (zwischen Bio-Kunst, audiovisueller Performance, Klangkunst, Installation und immersivem Umfeld) sowie Jakub Nepraš und seine „Video-Skulpturen“. Die Vergangenheit erkunden um besser die Geheimnisse der Gegenwart aufzudecken...

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EcoLogicStudio, Bit.Bio.Bot, 2021

Au ZKM (Karlsruhe) jusqu’au 10 juillet Im ZKM (Karlsruhe) bis zum 10. Juli zkm.de – smnk.de kulturinkarlsruhe.de



EXPOSITION

Rococo connection À Francfort, Renoir Rococo Revival montre avec intelligence que le peintre impressionniste est l’héritier de Watteau, Fragonard et consorts. In Frankfurt zeigt Renoir Rococo Revival auf intelligente Weise, dass der impressionistische Maler ein Erbe von Watteau, Fragonard und Konsorten ist. Par Von Hervé Lévy

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uguste Renoir l’affirmait sans ambages : « Je considère avec modestie que mon art descend non seulement d’un peintre comme Watteau, d’un Fragonard et d’un Hubert Robert. Mais encore que je suis un des leurs. » Tout le parcours de l’exposition consiste en une éclatante illustration de cette assertion dont les racines plongent dans ses années de formation à la manufacture de porcelaine Michel-Lévy Frères où les motifs sont souvent inspirés des artistes rococo. Et l’on comprend mieux le caractère décoratif revendiqué chez Renoir, qui avait orné les murs du château de Wargemont, appartenant à son mécène Paul Bérard, de bouquets de fleurs et autres natures mortes. Utilisant pour dessiner les mêmes techniques que ses prédécesseurs – prisant les pastels et les “trois crayons” combinant pierre noire, sanguine et craie blanche –, il est aussi épris de liberté dans sont trait et explore Pierre-Auguste Renoir, Femme nue au paysage Weiblicher Akt in einer Landschaft, 1883 Musée de l’Orangerie, Paris, Jean Walter and Paul Guillaume Collection © RMN-Grand Palais (Musée de l’Orangerie) / Franck Raux

d’identiques thématiques. Dans ses toiles, se déploient ainsi des “fêtes galantes” – couples amoureux, rondes de plaisirs aristocratiques – mises au goût de l’époque, dont le décor n’est plus une nature idéalisée, mais des lieux d’excursion bien identifiés (La Grenouillère, célèbre établissement de bains, de canotage et de bal des bords de Seine, par exemple). Accrochées côte à côte, sa Balançoire (1876) et Fête champêtre (vers 1725-35) de Jean-Baptiste Pater irradient d’une semblable et charmante insouciante légèreté. Plus loin, l’immense amazone d’Allée cavalière au bois de Boulogne (1873) est l’héritière du portrait équestre de Marie-Antoinette réalisé par LouisAuguste Brun, en 1783 : avec cette œuvre, Renoir illustre le triomphe de la bourgeoisie, conférant à l’une de ses représentantes une splendeur toute royale. Au fil des salles et des sujets, cette parenté de motifs éclate jusqu’à culminer dans les voluptueux nus tardifs comme Femme nue couchée (Gabrielle) de 1903, aux formes généreuses, dialoguant avec Jeune fille allongée (1751) de François Boucher, odalisque blonde représentant Marie-Louise O’Murphy, qui enflamma les sens de Louis XV. Il faut contempler ce duo plein d’un érotisme mutin avec les mots de Camille Mauclair à l’esprit : « C’est la même fête, le même épanouissement galant et capricieux, les mêmes yeux, les mêmes profils un peu camus, les mêmes lèvres (…) dans l’oubli de penser et la joie un peu animale de vivre. C’est le même paganisme voluptueux, ingénieux, rieur et décoratif. »

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uguste Renoir sagte es ohne Umschweife: „Ich denke in aller Bescheidenheit, dass meine Kunst nicht nur von einem Maler (wie) Watteau, von einem Fragonard, einem Hubert Robert abstammt, sondern dass ich einer der ihren bin.“ Der gesamte Rundgang der Ausstellung ist eine strahlende Illustration dieser Behauptung, deren Wurzeln auf seine Ausbildungsjahre in der Porzellan-Manufaktur MichelLévy Frères, zurückgehen, wo die Motive oft von RokokoKünstlern inspiriert waren. Und man versteht besser den von Renoir – der die Wände des Château de Wargemont, das seinem Mäzenen Paul Bérard gehörte, mit Blumensträußen und Still-Leben geschmückt hatte – in Anspruch genommenen dekorativen Charakter. Während er für die Zeichnung die gleichen Techniken wie seine Vorgänger benutzt – mit einer Vorliebe für Pastell und die Trois-crayons-Technik, eine Mischung aus Rötel, schwarzer und weißer Kreide –, strebt er in seinem Zeichenstrich auch nach Freiheit und erkundet identische Thematiken. In seinen Gemälden entfalten sich so „Fêtes galantes“– Liebespaare, Runden mit aristokratischen 78

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AUSSTELLUNG

François Boucher, Mademoiselle O’Murphy Ruhendes Mädchen (Louise O‘Murphy), 1751. Wallraf-Richartz-Museum & Fondation Corboud, Köln © Rheinisches Bildarchiv

Freuden – die dem Geschmack seiner Zeit angepasst sind, deren Dekor nicht mehr eine idealisierte Natur ist, sondern genau identifizierbare Ausflugsziele (La Grenouillère, eine berühmte Einrichtung für Bäder, Kahnfahrten und Bälle am Ufer der Seine, zum Beispiel). Seine Schaukel (1876) und Ländliches Fest (um 1725-35) von Jean-Baptiste Pater strahlen einen ähnliche und charmante sorglose Leichtigkeit aus. Die riesige Amazone Morgendlicher Ausritt im Bois de Boulogne (1873) ist die Erbin eines Reiterportraits von Marie-Antoinette, das Louis-Auguste Brun 1783 realisierte: Mit diesem Werk illustriert Renoir den Triumph des Bürgertums, indem der eine seiner Vertreterinnen in royaler Pracht darstellt. Im Laufe der Säle und Themen explodiert diese Verwandtschaft der Motive, die ihren Gipfel in den späten wollüstigen Gemälden wie Liegender Akt (Gabrielle) von 1903, mit üppigen Formen findet, das mit dem Ruhenden Mädchen (1751) von François Boucher kommuniziert, einer blonden Odaliske, die Marie-Louise O‘Murphy darstellt, die die Sinne von Louis XV. entflammte. Man muss dieses Duo der verschmitzten Erotik mit den Worten von Camille

Mauclair im Kopf betrachten: „Es ist dasselbe Fest, dasselbe galante und launische Aufblühen, dieselben Augen, dieselben ein wenig platt gedrückten Profile, dieselben Lippen (...) in der Abkehr vom Denken und der ein wenig animalischen Freude am Leben. Es ist derselbe sinnliche, findige, fröhliche und dekorative Paganismus.“ Au Städel Museum (Francfort-sur-le-Main) jusqu’au 19 juin Im Städel Museum (Frankfurt am Main) bis zum 19. Juni staedelmuseum.de > Geführte Besichtigungen 05.04.-19.06. Di-So zu verschiedenen Uhrzeiten > „Rendezvous mit Renoir“, 30.04. & 14.05., 19-23 Uhr, ein exklusiver Abend mit Führung und Drink im Städel-Garten > Le documentaire Pierre-Auguste Renoir. Entre rococo et impressionisme de Linn Sackarnd est visible jusqu’au 30/05 sur la médiathèque de Arte > Der Dokumentarfilm Renoir. Porträt einer Zeitenwende von Linn Sackarnd ist bis zum 30.05. in der Mediathek von Arte zu sehen POLY 245

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EXPOSITION

Dorfstrasse im Winter, 1911. Städtische Galerie im Lenbachhaus und Kunstbau München, Gabriele Münter Stiftung 1957

Olga von Hartmann, ca. 1910. Gabriele Münter- und Johannes Eichner-Stiftung, München

La Cavalière bleue L’écrin du Zentrum Paul Klee de Berne célèbre enfin Gabriele Münter, Pionnière de l’Art moderne. La première rétrospective consacrée à cette artiste majeure est tout un symbole. Par Thomas Flagel

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oixante ans. C’est le temps qu’il aura fallu pour qu’enfin soit reconnue l’œuvre et le rôle prépondérant de Gabriele Münter (1877-1962) dans l’avant-garde allemande. Autant d’attente posthume que de temps à peindre et dessiner. Longtemps cantonnée au rôle d’amante de Kandinsky, dont elle suivit les cours de peinture avant que la Première Guerre mondiale ne les éloigne définitivement, elle symbolise l’invisibilisation des femmes dans les sociétés occidentales. Marquée par le Fauvisme, elle expose pourtant avant ses 30 ans au célèbre Salon des artistes indépendants (1907), voyage aux États-Unis, en Tunisie et en Europe, ses photographies documentant paysages et personnes rencontrées avec curiosité et goût. Si sa peinture sera toujours figurative, elle est encore proche d’un impressionnisme qui s’essouffle. Mais Gabriele se passionne pour les techniques d’art populaire, emprunte celle du couteau à Gauguin, copie dessins d’enfants et acquiert objets sacrés (dont on trouve un mélange dans la nature morte de Stillleben Pfingsten, 1934) mais aussi peintures sous verre. Dans ce foisonnement, elle fonde avec Kandinsky, Franz Marc et Alfred Kubin l’un des groupes novateurs parmi les plus marquants du début du XXe siècle, Der blaue Reiter (Le Cavalier bleu). August Macke et Paul Klee les rejoindront rapidement, même si le premier sera tué sur un champ de bataille de Champagne en septembre 1914, à l’âge de 27 ans. Gabriele Münter est alors l’une des figures principales de cet expressionnisme allemand flamboyant avec des toiles lumi80

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neuses dont les surfaces aux couleurs vives sont cernées de traits noirs renforçant aussi bien ses impressions extérieures que ses expériences et sentiments intérieurs. Elle représente du monde ce qui, littéralement, la saisit. Ainsi en va-t-il de sa vision de la Dorfstrasse im Winter (1911) dans lequel un morne ciel bleu pâle renvoie d’éclatantes teintes vives des toits, façades et fenêtres, s’écoulant jusqu’à se confondre avec le sol. Son langage pictural évolue, privilégiant la surface à une utilisation de la perspective quasi naïve. Elle délaisse souvent toute ombre et, dans le cas contraire, comme dans Zuhörerinnen (1925-1930), compose une inquiétante vision symbolique dans laquelle l’alignement des jambes de jeunes femmes tranche avec les aplats noirs semblant découler d’une poupée votive suspendue au mur, derrière elles. Son audace en fera l’une des bannies du régime nazi. Elle cachera – et sauvera ! – les œuvres des membres du Cavalier bleu dans sa cave jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Puisqu’on vous dit qu’elle est essentielle… Au Zentrum Paul Klee (Berne) jusqu’au 8 mai zpk.org


Photos © 2021, ProLitteris, Zürich

AUSSTELLUNG

Zuhörerinnen, ca. 1925-1930. Gabriele Münter- und Johannes Eichner-Stiftung, München

Stillleben Pfingsten, 1934. Gabriele Münter- und Johannes Eichner-Stiftung, München

Die blaue Reiterin Das Schmuckkästchen Zentrum Paul Klee in Bern feiert endlich Gabriele Münter, Pionierin der Moderne. Die erste Retrospektive, die dieser großen Künstlerin gewidmet ist, ist ein Symbol für sich. Von Thomas Flagel

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echzig Jahre. Diese Zeit brauchte es, bis endlich das Werk und die maßgebliche Rolle von Gabriele Münter (18771962) für die deutsche Avantgarde anerkannt wurden. Die Zeit nach ihrem Tod war so lange, wie jene, die sie mit Malen und Zeichnen verbrachte. Lange auf die Rolle der Geliebten von Kandinsky beschränkt, dessen Malkurse sie besuchte, bevor der Erste Weltkrieg sie definitiv voneinander entfernte, symbolisiert sie die systematische Ausblendung der Frau in den westlichen Gesellschaften. Vom Fauvismus geprägt, stellt sie dennoch schon bevor sie 30 Jahre alt wird im berühmten Salon des artistes indépendants (1907) aus, reist in die Vereinigten Staaten, nach Tunesien und Europa, ihre Photographien dokumentieren Landschaften und Personen, denen sie mit Neugierde und Geschmack gegenübertritt. Auch wenn ihre Malerei immer figurativ sein wird, steht sie noch einem zu Ende gehenden Impressionismus nahe. Aber Gabriele begeistert sich für die Techniken der Volkskunst, entleiht jene des Malmessers von Gauguin, kopiert Kinderzeichnungen und ersteht sakrale Objekte (eine Mischung daraus findet man in Stillleben Pfingsten, 1934) aber auch Hinterglasmalerei. In dieser Fülle gründet sie mit Kandinsky, Franz Marc und Alfred Kubin eine der markantesten innovativen Gruppen des beginnenden 20. Jahrhunderts, Der blaue Reiter. August Macke und Paul Klee treffen bald hinzu, selbst wenn Ersterer im September 1914 auf einem Schlachtfeld in der Champagne im Alter von 27 Jahren getötet werden wird. Gabriele Münter ist damals eine der

Hauptfiguren dieses glühenden deutschen Expressionismus, mit strahlenden Gemälden, deren Oberflächen mit lebendigen Farben von schwarzen Strichen umgeben sind, die sowohl ihre äußerlichen Eindrücke, als auch ihre innerlichen Erfahrungen und Gefühle verstärken. Sie stellt das von der Welt dar, was sie im wahrsten Sinne des Wortes ergreift. So ist es mit ihrer Vision der Dorfstrasse im Winter (1911) in der ein trübseliger blassblauer Himmel die strahlenden Töne der Dächer, Fassaden und Fenster, die in den Boden zu fließen scheinen, widerspiegelt. Ihre Bildsprache entwickelt sich, zieht die Oberfläche einer fast naiven Benutzung der Perspektive vor. Sie vernachlässigt oft jeglichen Schatten und wenn das nicht der Fall ist wie in Zuhörerinnen (1925-1930), komponiert sie eine beunruhigende symbolische Vision, in der die Aneinanderreihung der Beine junger Frauen mit den schwarzen Flächen in Kontrast steht, die von einer Votiv-Puppe, welche hinter ihnen an der Wand hängt, auszugehen scheint. Ihre Kühnheit machte sie zu einer der vom Nazi-Regime Ausgestoßenen. Sie wird die Werke der Mitglieder des Blauen Reiters bis zum Ende des Zweiten Weltkrieges in ihrem Keller verstecken – und retten ! Wir sagen doch, sie ist essenziell... Im Zentrum Paul Klee (Bern) bis zum 8. Mai zpk.org

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EXPOSITION AUSSTELLUNG

Des vies de rien

Au Musée des Beaux-Arts de Mulhouse, Françoise Saur met en images notre passage subreptice sur terre et Ce qu’il en reste.

Leben aus Nichts Im Musée des Beaux-Arts in Mulhouse übersetzt Françoise Saur unsere unbemerkte Passage auf der Erde und Das was übrig bleibt in Bilder. Par Von Suzi Vieira

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est une chose si petite, si éphémère, si futile, la vie d’un homme. À la mort de ses parents, la photographe Françoise Saur co-hérite d’une maison pleine à craquer d’objets accumulés au fil des générations. Un bric-à-brac fait de breloques dérisoires qui, mises bout à bout, constituent pourtant la seule mémoire tangible de ces existences ordinaires ayant précédé la sienne : tout Ce qu’il en reste… De vieux chapeaux à plume décatis, bobines de fil et boutons de chemises, médailles de guerre et de baptême, lettres d’amours échangées, cartes postales reçues d’Alger. Disciple d’Otto Steinert, théoricien de la “subjektive Photographie”, Saur trie, ordonne le fatras, le met en scène pour figer à l’aide de sa caméra les souvenirs évanescents. « La photographie est art de mémoire », souligne la première femme lauréate du prix Niépce en 1979, qui tient, depuis cinq décennies, un journal photographique de quelque 11 300 clichés. De ce fonds mnésique, elle a extrait les images les plus gorgées de joie (enfants s’ébrouant dans les prés, bouquets de rires et repas de famille), en a fait un film – mis en musique par le clarinettiste Joris Rühl – et un livre. Comme une ode à l’élan vital, mettant un point magistral à cette réflexion sur la finitude et le temps qui passe.

La guerre Der Krieg

Alles Das was übrig bleibt... Alte Hüte mit zerrupften Federn, Garnrollen und Hemdknöpfe, Kriegs-und Taufmedaillen, Liebesbriefe, Postkarten aus Algerien. Die Schülerin von Otto Steinert, dem Theoretiker der subjektiven Photographie, sortiert und ordnet den Kram, setzt ihn in Szene um mithilfe ihrer Kamera die schwindenden Erinnerungen festzuhalten. „Die Photographie ist die Kunst des Gedächtnisses“, unterstreicht die Frau, die 1979 die erste weibliche Preisträgerin des Prix Niépce Gens d’images war und seit fünf Jahrzehnten ein photographisches Tagebuch mit rund 11 300 Aufnahmen führt. Aus diesem Erinnerungsfundus hat sie die Bilder herausgezogen, die vor Freude überlaufen (Kinder, die sich in den Feldern wälzen, Lachanfälle und Familienessen) und daraus einen Film – musikalisch umgesetzt vom Klarinettisten Joris Rühl – und ein Buch gemacht. Wie eine Ode an den Lebensdrang, der einen perfekten Schlusspunkt zu dieser Überlegung über Endlichkeit und Vergänglichkeit setzt. Au Musée des Beaux-Arts (Mulhouse) jusqu’au 15 mai Im Musée des Beaux-Arts (Mulhouse) bis 15. Mai beaux-arts.musees-mulhouse.fr

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as Leben eines Menschen ist eine so kleine Sache, so vergänglich, so belanglos. Nach dem Tod ihrer Eltern erbt die Photographin Françoise Saur ein Haus, randvoll mit im Laufe der Generationen angehäuften Objekten. Ein Durcheinander von spottbilligem Dingen, die aneinandergereiht, trotzdem die einzige greifbare Erinnerung an diese ordinären Existenzen darstellen, die der ihrigen vorausgingen:

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Paru aux éditions Erschienen bei Médiapop (16 €) mediapop-editions.fr


EXPOSITION AUSSTELLUNG

Animals À Renchen, dialoguent les œuvres de F’Murrr et Peter Gaymann : leurs Drôles de bêtes ont bien des choses à nous dire sur l’Homme. In Renchen halten die Werke von F’Murrr ein Zwiegespräch mit jenen von Peter Gaymann: Ihre Ziemlich komischen Tiere haben uns einiges über die Menschheit zu sagen. Par Von Pierre Reichert

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ous deux fascinés par Tomi Ungerer, le dessinateur français F’Murrr (1946-2018) – immortel créateur du Génie des Alpages – et son collègue allemand Peter Gaymann (né en 1950) ont des styles très différents… Ils se retrouvent cependant dans leur utilisation de figures animalières servant, à l’image des fabulistes d’Ésope à Jean de La Fontaine, à porter un regard caustique sur la société des Hommes. Avec des personnages tels Romuald le bélier et une multitude de brebis aux patronymes invraisemblables (Bouddhinette, Gaelann et compagnie), le premier affirmait : « Je cultive l’absurde et le loufoque par goût personnel. Moins le sens est évident, plus je suis content. » Pour sa part, le second utilise bien souvent des poules (mais pas que…) rapidement devenues des stars outre-Rhin. Avec ses gallinacés, il nous tend un miroir railleur dans des saynètes drolatiques : trois poulettes mutines tâtent

le plumage multicolore d’un coq. L’une affirme qu’il s’agit de plastique, composant ainsi une jolie satire du machisme. Et que dire du génial Kamasutra des poules, hommage hilarant à celui des grenouilles, dessiné par Tomi Ungerer ?

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bwohl beide von Tomi Ungerer fasziniert waren, haben der französische Zeichner F’Murrr (1946-2018) – der unsterbliche Schöpfer der Albträume – und sein deutscher Kollege Peter Gaymann sehr unterschiedliche Stile... Sie begegnen sich jedoch in ihrer Verwendung von Tierfiguren, die, wie bei den Fabeldichtern von Äsop bis Jean de La Fontaine, dazu dienen einen sarkastischen Blick auf die Gesellschaft der Menschen zu werfen. Mit Figuren wie Romuald dem Widder und einer Vielzahl von Schafen mit unmöglichen Namen (Bouddhinette, Gaelann und Konsorten), bekräftigte der Erste: „Ich kultiviere das Absurde und Verrückte aus persönlicher Vorliebe. Je weniger der Sinn auf der Hand liegt, desto zufriedener bin ich.“ Für seinen Teil nutzt der Zweite oft Hühner (aber nicht nur), die in Deutschland schnell zu Stars geworden sind. Mit seinem Huhniversum hält er uns einen spöttischen Spiegel mit lustigen Sketchen vor: Drei Hühner befühlen das bunte Gefieder eines Hahns. Eine von ihnen behauptet, dass es sich um Plastik handelt, eine schöne Karikatur des Chauvinismus. Und was muss man noch zum genialen Kamasutra der Hühner hinzufügen, dieser Hommage an jenes der Frösche von Tomi Ungerer? Au Simplicissimus-Haus (Renchen) du 1er avril au 17 juillet Im Simplicissimus-Haus (Renchen) vom 1. April bis 17. Juli renchen.de – simplicissimushaus.de > Visites guidées bilingues (10/04, 22/05 et 03/07, 15h & 16h30) > Zweisprachige geführte Besichtigungen (10.04., 22.05. und 03.07., 15 & 16:30 Uhr) > L’artiste F’murrr, conférence de Thérèse Willer (18/05, 19h) et Débat d’atelier avec Peter Gaymann (01/06, 19h) > Der Künstler F’murrr, Vortrag von Dr. Thérèse Willer (18.05., 19 Uhr) und Werkstattgespräch mit Peter Gaymann (01.06., 19 Uhr)

F’Murrr, Le chat botté Der gestiefelte Kater mit handschriftlicher Bildlegende: „Und als sein Herr ertrank, erbte er – endlich – dessen ganzes Hab und Gut …“, 1984, Collection particulière Privatsammlung

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Happy Island 01, Pendentif Anhänger, 2020

The magic of Spirit, Sculpture Skulptur, 2019

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Au Schmuckmuseum, Formose exotique montre les merveilles joaillières de Ruan Weng Mong dressant des ponts entre les continents. Im Schmuckmuseum zeigt Exotic Formosa die Meisterwerke von Ruan Weng Mong, der Brücken zwischen den Kontinenten schlägt. Par Von Raphaël Zimmermann

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é en 1953 à Taipei, Ruan Weng Mong est un orfèvre et sculpteur dont les œuvres – une centaine ici exposées, principalement des bijoux et des sculptures – font fusionner Europe et Asie dans un syncrétisme d’un intense esthétisme. Récusant la séparation entre arts appliqués et arts plastiques, il crée un monde édénique où étincellent, par exemple, les formes pures de The Magic of Spirit, sculpture abstraite où l’organicité dialogue avec la technicité, formes rondes et raides mêlées, tandis que la douceur dorée du laiton s’amuse des délicieuses nuances de vert de l’agate et de la serpentine. Ailleurs, se découvre un pendentif de la série Floating above : d’argent et de lapis-lazuli, Happy Island 01 est une composition d’une belle fluidité installant des équilibres subtils entre différentes formes géométriques qui s’ordonnancent en toute simplicité. Voilà belle illustration du credo de l’artiste : « Mes travaux sont des sublimations du flottement. » Autre pièce étonnante, la bague Tropic Echo marie la rigueur glacée de l’argent, la minéralité translucide de l’agate et… la noix de bétel, partie de la culture millénaire de l’île de Taïwan.

Au Schmuckmuseum (Pforzheim) jusqu’au 6 juin Im Schmuckmuseum (Pforzheim) bis zum 6. Juni schmuckmuseum.de 84

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er 1953 in Taipeh geborene Ruan Weng Mong ist ein Goldschmied und Bildhauer dessen Werke – rund hundert von ihnen werden hier ausgestellt, hauptsächlich Schmuckstücke und Skulpturen – Europa und Asien in einem Synkretismus von intensiver Ästhetik fusionieren lassen. Er lehnt die Trennung zwischen Angewandter Kunst und Bildender Kunst ab und erschafft eine paradiesische Welt, in der zum Beispiel die reinen Formen von The Magic of Spirit funkeln, einer abstrakten Skulptur in der Organisches einen Dialog mit Technik eingeht, runde und starre Formen sich mischen, während die goldene Milde des Messings sich mit reizenden Grünnuancen von Achat und Serpentin amüsiert. Woanders entdeckt man einen Anhänger aus der Serie Floating above: Aus Silber und Lapislazuli ist Happy Island 01 eine Komposition von schöner Flüssigkeit, die ein subtiles Gleichgewicht zwischen verschiedenen geometrischen Formen herstellt, die sich in aller Einfachheit arrangieren. Eine schöne Illustration des Kredos des Künstlers, das dieser Arbeit zugrunde liegt: „Meine Arbeiten sind Sublimationen des Schwebenden.“ Ein weiteres erstaunliches Stück, der Ring Tropic Echo vereint die eisige Härte des Silbers, die transparente Mineralität des Achats und... die Betelnuss, die Bestandteil der uralten Kultur der Insel Taiwan ist.


EXPOSITION AUSSTELLUNG

Found in transition À Mulhouse, s’ouvre le premier volet d’une vaste exposition dédiée à SMITH. Immersion dans les délicates et troublantes traversées photographiques de l’artiste trans. In Mulhouse öffnet ein erster Teil einer breiten Ausstellung, die SMITH gewidmet ist. Eintauchen in die behutsamen und beunruhigenden photographischen Überfahrten des Trans-Künstlers. Par Von Suzi Vieira

genre et de nom fige sur la pellicule des êtres et des mondes en transition, au bord de l’éclosion – atmosphères flottantes et couleurs iridescentes à la semblance d’ésotériques tableaux tout droit inspirés du romantisme allemand. Une palette fragile et vibrante, qu’il confronte aux tonalités plus affirmées de ses derridiennes Spectrographies (2012), où la caméra thermique permet de mieux révéler ces couches plurielles du réel que l’œil nu ne peut voir et qui annihilent toute pensée binaire.

Hear Us Marching Up Slowly, 2012

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C’

est au petit matin, quand la nuit laisse doucement place à la lumière et les ombres s’esquissent à peine, que SMITH aime à capturer ses sujets. Regard suspendu, posture de repli, visage détourné, paysage en latence ou cicatrice encore tendre d’une peau en train de muer… Depuis l’adolescence, ce doctorant en philosophie esthétique et plasticien prodige, qui parle de la photographie comme de sa « langue maternelle », tisse une œuvre en forme de poétique de la métamorphose, immortalise les corps en puissance, donne chair aux processus d’hybridation / subjectivation. Dans ses premières séries, de Löyly (2009) à Traum (2016) en passant par Sub Limis (2010), celui qui a lui-même changé de

n den frühen Morgenstunden, wenn die Nacht langsam dem Licht Platz macht und die Schatten sich kaum abzeichnen, photographiert SMITH gerne seine Modelle. Blicke ins Leere, Körperhaltungen mit angezogenen Gliedmaßen, abgewandte Gesichter, brachliegende Landschaften oder noch zarte Narben einer Haut im Prozess der Verwandlung... Seit seiner Jugend spannt dieser Doktorand in ästhetischer Philosophie und Wunder-Künstler, der von der Photographie als seiner „Muttersprache“ spricht, ein Werk in Form einer Poetik der Metamorphose, verewigt die potenziellen Körper, verleiht dem Prozess der Hybridisierung / Subjektivierung Leben. In seinen ersten Serien, von Löyly (2009) bis Traum (2016) über Sub Limis (2010), hält jener der selbst Geschlecht und Namen gewechselt hat, auf Film Wesen und Welten im Wandlungsprozess fest, kurz vor dem Schlüpfen – Atmosphären im Schwebezustand und schillernde Farben, welche an esoterische Gemälde erinnern, die direkt von der deutschen Romantik inspiriert sind. Eine zarte und vibrierende Palette, die er mit kräftigeren Tönen seiner Spectrographies (2012) à la Derrida konfrontiert, bei denen es die Wärmebildkamera erlaubt die verschiedenen Schichten der Realität zu enthüllen, die das nackte Auge nicht sehen kann und die jegliches binäre Denken zerstören. À la galerie de La Filature (Mulhouse) jusqu’au 7 mai In der Galerie von La Filature (Mulhouse) bis 07. Mai lafilature.org — smith.pictures > Le deuxième volet de l’exposition SMITH, entièrement consacré à son projet Désidération, aura lieu du 24 mai au 24 juillet en partenariat avec la Biennale de la Photographie de Mulhouse > Der zweite Teil der Ausstellung SMITH, der völlig seinem Projekt Désidération gewidmet ist, findet vom 24. Mai bis 24. Juli in Zusammenarbeit mit der Biennale de la Photographie de Mulhouse statt biennale-photo-mulhouse.com POLY 245

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© Museum Frieder Burda

Ok Corals Elles sont deux sœurs jumelles nées sous le signe des coraux : les œuvres de Margaret et Christine Wertheim alertent à BadenBaden sur une tragédie environnementale. Sie sind zwei Zwillingsschwestern, die im Sternzeichen der Koralle geboren wurden: Die Werke von Margaret und Christine Wertheim warnen in Baden-Baden vor einer Umwelttragödie. Par Von Hervé Lévy

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ollution. Surpêche. Tourisme massif. Réchauffement climatique. Les coraux agonisent. En témoigne la célèbre Grande barrière qui souffre de blanchissement1, phénomène de dépérissement dont la cause première est la hausse de la température de l’eau. En initiant une œuvre en expansion continue, Margaret et Christine Wertheim (nées en Australie et vivant en Californie) ont souhaité pointer la menace pesant sur ces cnidaires2 avec de fascinants coraux en… crochet. La raison de ce mode d’expression ? « Les formes particulière des coraux découlent de la géométrie hyperbolique3. Et pour matérialiser ces structures, les mathématiciens se servent de cette technique », explique la première. Elles ont conçu de manière collaborative une vaste taxinomie colorée découverte à la Biennale de Venise en 2019, dont les racines remontent à 2005. Publiant alors une invitation à participer au projet en ligne, elles reçoivent des dizaines de modèles de toutes tailles par la poste. Puis ce seront des centaines et des milliers. Aujourd’hui, quelque 20 000 personnes – « 99% de femmes » – dans une cinquantaine de pays ont pris part à ce work in progress pharaonique intitulé Crochet Coral Reef. Au 86

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rez-de-chaussée, se déploie une rétrospective dont Branched Anemon Garden est le premier jalon : dans une vitrine irradie une efflorescence où les rouges éclatants se combinent aux oranges les plus fins pour une évocation croisée de la Grande Barrière et des montagnes australiennes. À quelques encablures, de chatoyants Pod Worlds, univers en miniature, sont d’une infinie délicatesse. Plus loin, le maladif Bleached Reef aux teintes blanchâtres mortifères voisine avec le Toxic Reef et ses entrelacs infects de fil ou bande vidéo. Ils entrent en résonance avec The Midden : pendant quatre ans, les deux sœurs ont conservé leur déchets ménagers en plastique. Environ 220 kilogrammes flottent dans les airs, prisonniers d’un filet… Histoire de questionner la responsabilité de chacun dans la formation du Great Pacific Garbage Patch, répugnant et imputrescible vortex flottant. Au fil des années sont nés des Satellite Reefs. À l’occasion de cette exposition a été conçu le plus vaste d’entre eux : composé de plus de 40 000 coraux réalisés par quelque 4 000 personnes en huit mois selon un schéma directeur imaginé


EXPOSITION AUSSTELLUNG

par les artistes, il occupe l’intégralité de l’étage supérieur du musée métamorphosé en étonnant monde sous-marin. Six îles aux noms évocateurs – Neon, Tricolor, Spotted, etc. – forment un envoûtant écosystème évoquant le poème de JoséMaria de Heredia: « Et tout ce que le sel ou l’iode colore, / Mousse, algue chevelue, anémones, oursins, / Couvre de pourpre sombre, en somptueux dessins, / Le fond vermiculé du pâle madrépore. »

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Christine und Margaret Wertheim, Detail of Baden-Baden Satellite Reef, Museum Frieder Burda, Baden-Baden

erschmutzung. Überfischung. Massentourismus. Klimaerwärmung. Die Korallen ringen mit dem Tod. Davon zeugt das berühmte Great Barrier Reef, das an Korallenbleiche1 leidet, einem Phänomen des Eingehens, dessen erster Auslöser die Temperaturerhöhung des Wassers ist. Indem sie ein Werk in ständiger Erweiterung initiieren, wollten Margaret und Christine Wertheim (die in Australien geboren wurden und in Kalifornien leben) die Bedrohung aufzeigen, denen diese Nesseltiere2 ausgesetzt sind, anhand von faszinierenden gehäkelten Korallen... Der Grund für diese Ausdrucksweise? „Die besonderen Formen der Korallen leiten sich von der Hyperbolischen Geometrie3 ab. Um diese Strukturen zu materialisieren, benutzen die Mathematiker diese Technik.“, erklärt die Erste. Sie haben auf kollaborative Weise eine breite bunte Systematik entworfen, die man bei der Biennale in Venedig 2019 entdeckte und deren Wurzeln auf 2005 zurückgehen. Nachdem sie damals online zur Teilnahme am Projekt aufriefen, erhielten sie mehrere dutzend Modelle aller Größen

per Post. Dann Hunderte und Tausende. Heute haben rund 20 000 Personen – „ zu 99% Frauen“ – in fünfzig Ländern an diesem riesigen work in progress mit dem Titel Crochet Coral Reef teilgenommen. Im Erdgeschoss entfaltet sich eine Retrospektive deren erste Etappe Branched Anemon Garden ist: In einer Vitrine erstrahlt ein Blütenmeer, dessen knallrote Farben auf feinere Orangetöne treffen, für einen doppelten Bezug zum Great Barrier Reef und den australischen Bergen. Einen Steinwurf entfernt schillern Pod Worlds, ein unendlich zartes Miniaturuniversum. An anderer Stelle steht das kranke Bleached Reef mit tödlicher Blässe dem Toxic Reef und seinem Flechtwerk aus Plastik, Schnüren oder Videoband gegenüber. Sie treten in einen Dialog mit The Midden: Vier Jahre lang haben die Schwestern ihren Plastikmüll aufgehoben. Ungefähr 220 Kilogramm schweben, in einem Fischernetz gefangen, in der Luft... Eine Frage nach der Verantwortung eines jeden Einzelnen in der Bildung des Great Pacific Garbage Patch, eines widerlichen und unverweslichen schwimmenden Strudels. Im Laufe der Jahre sind Satellite Reefs entstanden. Anlässlich dieser Ausstellung wurde das größte von ihnen konzipiert: Es besteht aus 40 000 Korallen, die von rund 4000 Personen in acht Monaten nach einem Leitfaden der Künstlerinnen realisiert wurden und nimmt die gesamte obere Etage des Museums ein, das sich in eine erstaunliche Unterwasserwelt verwandelt. Sechs Inseln mit bezeichnenden Namen – Neon, Tricolor, Spotted, etc. – bilden ein berauschendes Ökosystem, das an das Gedicht von José-Maria de Heredia erinnert: „Und alles was das Salz oder das Jod färbt / Schaum, langhaarige Alge, Anemonen, Seeigel, / Bedeckt mit dunklem Purpur, in prächtigen Zeichnungen, / den runzelige Grund der bleichen Steinkoralle.“ Au Museum Frieder Burda (Baden-Baden) jusqu’au 26 juin Im Museum Frieder Burda (Baden-Baden) bis zum 26. Juni museum-frieder-burda.de margaretwertheim.com > Un petit Satellite Reef est aussi visible au Gasometer de Pforzheim, entrant en résonance avec le panorama à 360° de la Grande Barrière de corail qu’on y découvre > Ein kleines Satellite Reef ist auch im Gasometer Pforzheim zu sehen, wo es in einen Dialog mit dem 360°-Panorama des Great Barrier Reefs tritt, das man dort entdeckt gasometer-pforzheim.de

Une étude publiée en novembre 2021 dans la revue Current Biology révèle que le phénomène a touché 98% de la Grande Barrière de corail australienne depuis 1998 2 Groupe d’animaux aquatiques rassemblant notamment les méduses, les anémones de mer et les coraux 3 Avant la géométrie hyperbolique théorisée par Lobatchevski, les mathématiciens connaissaient deux sortes d’espaces, euclidiens et sphériques 1 Eine Studie, die im November 2021 in der Zeitschrift Current Biology veröffentlicht wurde, verrät, dass das Phänomen seit 1998 98% des Great Barrier Reefs in Australien betrifft 2 Eine Gruppe von Wassertieren zu denen Quallen, Seeanemonen und Korallen gehören 3 Vor der Hyperbolischen Geometrie, die von Lobatschewski theoretisiert wurde, kannten die Mathematiker zwei Arten des Raums, die Euklidische und die Sphärische Geometrie 1

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EXPOSITION AUSSTELLUNG

My Heart Will Go On Avec Love Song, le Crac Alsace donne voix à l’artiste portugais Pedro Barateiro et à sa critique de l’impact du néolibéralisme sur l’intimité de nos vies. Mit Love Song verleiht der Crac Alsace dem portugiesischen Künstler Pedro Barateiro eine Stimme, der den Einfluss des Neoliberalismus auf die Intimität unserer Leben kritisiert. Par Von Suzi Vieira — Photo de von Aurélien Mole

Cantina [Cantine], 2014-2022

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e ne veux pas changer le monde, juste essayer de le rendre un peu plus amène. » Voilà exprimé en peu de mots tout le travail de Pedro Barateiro. Artiste engagé, critique implacable du capitalisme et de ses effets délétères sur notre subjectivité, le Lisboète de 43 ans déploie depuis une quinzaine d’années une œuvre protéiforme. Dessin, sculpture, vidéo, performance, photographie… Il explore la façon dont la bête économique façonne et se nourrit de notre vie quotidienne, de nos comportements et de nos imaginaires. Une bête invisible, sans visage. Point de dictateur ni de régime d’oligarques ici, pas d’État Nouveau fasciste auquel on pourrait directement imputer la brutale privation de nos libertés. C’est un système anonyme, une structure immatérielle à laquelle nous sommes tous forcés de nous ajuster, faite de réseaux sociaux et de data, d’algorithmes et de marques, de discours communicationnels acculant l’individu à l’indispensable réalisation de soi. À l’ère de la post-vérité, Barateiro a choisi de faire débuter Love Song par les images historiques d’un autre artiste portugais, le photographe Mário Varela Gomes, qui immortalisa, le 26 avril 1974, en pleine Révolution des Œillets, la prise des bureaux de la censure du régime salazariste par les manifestants appelant à la liberté. « Ces clichés, qui font partie de la mémoire collective de mon pays, me semblent d’une importance cruciale à l’heure du tout numérique », explique le plasticien. « Ils nous rappellent combien l’information – et l’accès à celle-ci – est un outil de pouvoir. » Produit en partenariat avec le Centre d’Art contemporain d’Almada dans le

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cadre de la Saison France-Portugal 2022, le film d’animation Monologue pour un monstre met quant à lui en scène un adorable personnage dessiné s’adressant au public sur un ton personnel et intime, lui révélant la transformation qu’iel est en train de vivre. Porté par la voix de l’actrice transgenre Naelle Dariya, la créature assume sa non-binarité, parle de la façon dont les informations captées et générées finissent par transformer son identité et comment iel se relie au monde qui l’entoure. Une pièce d’une douce étrangeté, troublante, qui prépare le visiteur à une autre œuvre-expérience forte du parcours, celle qui donne son titre à l’exposition. Là, installé sur un tapis moelleux, le spectateur se laisse hypnotiser par une séquence vidéo de l’une des caméras transmettant en direct depuis la Station spatiale internationale. Pendant 45 minutes, défile alors la curieuse et relaxante bande-son de l’humanité s’affairant tout en bas : une conversation sur la plage, l’enregistrement d’un scroll de stories Instagram, Audre Lorde lisant Usages de l’érotique : l’érotique comme pouvoir ou encore les notes de My Heart Will Go On de Céline Dion, jouées sur l’orgue d’une cathédrale.

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ch will nicht die Welt verändern, sondern nur versuchen sie ein bisschen liebenswürdiger zu machen.“ Das beschreibt in wenigen Worten die Arbeit von Pedro Barateiro. Als engagierter Künstler, erbarmungsloser Kritiker des Kapitalismus und der gefährlichen Einflüsse für unsere Subjektivität entfaltet der Lissabonner von 43 Jahren seit rund fünfzehn Jahren ein vielförmiges Werk. Zeichnung, Skulptur, Video, Performance, Photographie... Er erkundet die Art und


Monologue pour un monstre, 2022

Weise auf welche das ökonomische Biest prägt und sich von unserem alltäglichen Leben ernährt, von unserem Verhalten und unseren Vorstellungswelten. Eine unsichtbare Bestie ohne Gesicht. Hier gibt es weder eine Diktatur, noch ein oligarchisches Regime, keinen neuen faschistischen Staat, dem man direkt den brutalen Verlust unserer Freiheiten anhängen könnte. Es ist ein anonymes System, eine immaterielle Struktur, der wir uns gezwungenermaßen alle anpassen müssen, gemacht aus sozialen Netzwerken und Data, Algorithmen und Marken, Kommunikations-Diskursen, die das Individuum in die unverzichtbare Selbstverwirklichung drängen. Im Zeitalter des Postfaktischen hat sich Barateiro dazu entschieden Love Song mit historischen Photographien eines anderen portugiesischen Künstlers beginnen zu lassen, des Photographen Mário Varela Gomes, der am 26. April 1974, Mitten in der Nelkenrevolution, die Erstürmung der Zensurbüros von Salazars Regime, durch Demonstranten, die nach Freiheit riefen, festhielt. „Dies Aufnahmen, die zum kollektiven Gedächtnis meines Landes gehören, erscheinen mir im Zeitalter des allseits Digitalen von entscheidender Bedeutung zu sein“, erklärt der Künstler. „Sie erinnern uns daran wie sehr die Information – und der Zugang zu ihr – ein Machtwerkzeug ist.“ In Zusammenarbeit mit dem Zentrum für zeitgenössische Kunst in Almada produziert, im Rahmen der Saison Frankreich-Portugal 2022, setzt der Animationsfilm Monologue pour un monstre (Monolog für ein Monster) seinerseits eine reizende Comicfigur in Szene, die sich in einem persönlichen und intimen Ton an das Publikum richtet, während sie vom

Transformationsprozess erzählt, die sier* gerade durchlebt. Von der Stimme der Transgender-Schauspielerin Naelle Dariya getragen, steht die Kreatur zu ihrer nicht-binären Identität, spricht über die Art und Weise, wie die Informationen, die sie aufnimmt und erzeugt sie schlussendlich verändern und wie sie sich mit der Welt verbindet, die sier umgibt. Ein Stück von zarter Fremdartigkeit, irritierend, das den Besucher auf eine weitere starke Werk-Erfahrung des Rundgangs vorbereitet, jene die der Ausstellung ihren Namen gab. Auf einem weichen Teppich installiert, lässt sich der Betrachter von einer Video-Sequenz hypnotisieren, die eine Live-Übertragung einer der Kameras der Internationalen Weltraumstation ist. 45 Minuten lang hört man dazu eine Tonspur der Menschheit, die sich da unten zu schaffen macht: Ein Gespräch am Strand, die Aufnahme eines Story-Scrolls auf Instagram, Audre Lordre, die Usages de l’érotique : l’érotique comme pouvoir liest oder auch die Noten von My Heart Will Go On von Céline Dion, die auf der Orgel einer Kathedrale gespielt werden. Au Crac Alsace (Altkirch) jusqu’au 15 mai Im Crac Alsace (Altkirch) bis zum 15. Mai cracalsace.com Während das französische Wörterbuch Le Robert das geschlechtsneutrale Pronomen „iel“ Ende 2021 aufgenommen hat, gibt es in der deutschen Sprache noch keinen Konsens. Mehrere Neologismen vom englischen „they“, über „xier/xieser/xiem/xien“, sowie die Zusammenzüge „ser“ oder „sier“ aus „sie“ und „er“ koexistieren momentan.

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EXPOSITION

Louise au pays des enfers Au Kunstmuseum de Bâle, l’artiste américaine Jenny Holzer livre sa vision toute subjective, brillante et noire, de l’œuvre de Louise Bourgeois.

Louise im Höllen-Land Im Kunstmuseum Basel liefert die amerikanische Künstlerin Jenny Holzer ihre sehr subjektive, brillante und schwarze Vision des Werks von Louise Bourgeois. Par Von Suzi Vieira

reaux vichy suspendues sur des balais… Et puis des feuilles de papier par dizaines, couvertes de mots tracés au crayon, à l’encre, au stylo. L’œuvre de Louise Bourgeois est d’une ampleur incroyable, aussi monumentale, rugueuse et dense que l’architecture compacte du Neubau du Kunstmuseum où 260 de ses créations sont réunies à l’occasion de Louise Bourgeois x Jenny Holzer, exposition événement qui lui est consacrée. Dans cette ébouriffante manifestation, entièrement pensée par l’artiste américaine Jenny Holzer – quelle commissaire d’exception ! – tout évoque le corps morcelé, le dégoût, le rapport ambigu à la maternité, le meurtre souhaité du père, le conflit entre les sexes. La violence des mots Connue pour les vers subversifs qu’elle projette depuis les années 1990 dans l’espace public, Holzer s’est plongée avec assiduité dans les milliers de pages d’archives manuscrites et journaux intimes de son ainée. Le résultat ? Neuf salles emplies des œuvres et écrits de l’artiste française tôt partie s’installer à New York pour fuir sa famille mortifère. Dans l’une, un mur entier a été tapissé de fac-similés des notes compulsives prises tout au long de la psychanalyse entamée à la mort de son père, en 1951. Contre toute chronologie, Holzer a élaboré un parcours très personnel, au plus près de l’esprit obsessionnel de Bourgeois. Pas étonnant dès lors de voir placée, à l’exact centre de cette présentation, The Destruction of the Father !

Louise Bourgeois chez elle à zuhause in New York, 2004 © The Easton Foundation / 2021, ProLitteris, Zurich, photo : Pouran Esrafily

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ne araignée, la toute première de l’artiste, dessinée à l’encre et au fusain en 1947, une des célèbres Cells – ces cages dans lesquelles elle exorcise douleurs et traumatismes –, les gouaches bleues de La Rivière Gentille où elle tenta de se suicider, des tissus brodés, robes à car-

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Banquet macabre Conçue en 1974, la cathartique installation figure une table à la semblance d’un lit et de protubérants tabourets ; le tout éclairé d’une lumière rouge, entre scène de crime et cavité utérine. Là, le visiteur fait face à ce qu’il devine être des restes paternels, morceaux de crânes, phallus ou corps démembré (en réalité, des carcasses de moutons et de bœufs moulées dans du latex). Comment mieux régler ses comptes avec celui qui multiplia les humiliations envers sa fille, imposa à la maison sa maîtresse à toute la famille, plongea la mère chérie dans une profonde détresse psychologique ? En collabora-


AUSSTELLUNG

tion avec le studio londonien Holition, Jenny Holzer a développé une application de réalité augmentée permettant d’assister à la déconstruction de cette œuvre emblématique au son de la voix de Bourgeois herself, qui chantonne une berceuse (authentique !). Sur l’une des broderies trônant dans la salle attenante, une phrase aux accents d’épitaphe : « I have been to hell and back. And let me tell you, it was wonderful » (« Je suis allée en enfer et en suis revenue. Et laissez-moi vous dire que ce fut merveilleux »).

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ine Spinne, die allererste der Künstlerin, die 1947 mit Tinte und Kohle gezeichnet wurde, eine der berühmten Cells – dieser Käfige, in denen sie Schmerzen und Traumata exorziert –, die blauen Gouache-Töne von La Rivière Gentille, in dem sie versuchte Selbstmord zu begehen, bestickte Stoffe, Kleider mit Vichy-Karo, die an Besen aufgehängt sind... Und dann zahlreiche Papierblätter, bedeckt von Worten, die mit dem Bleistift, Tinte oder Kugelschreiber geschrieben wurden. Das Werk von Louise Bourgeois ist von unglaublicher Reichweite, ebenso monumental, rau und dicht wie die kompakte Architektur des Neubaus des Kunstmuseums, wo 260 ihrer Kreationen anlässlich von Louise Bourgeois x Jenny Holzer, dem Ausstellungsereignis vereint sind, das ihr gewidmet ist. In dieser unglaublichen Veranstaltung, die in ihrer Gesamtheit von der amerikanischen Künstlerin Jenny Holzer konzipiert wurde – welche Ausnahmekuratorin! – evoziert alles den zerstückelten Körper, den Ekel, die widersprüchliche Beziehung zur Mutterschaft, den ersehnten Vatermord, den Konflikt zwischen den Geschlechtern. Die Gewalt der Worte Für ihre subversiven Verse bekannt, die sie seit den 1990er Jahren in den öffentlichen Raum projiziert, ist Holzer mit Beharrlichkeit in die tausenden handgeschriebenen Archivseiten und Tagebücher der Älteren eingetaucht. Das Resultat? Neun Säle, die mit Werken und Schriften der französischen Künstlerin gefüllt sind, die sich früh in New York installierte um ihrer todbringenden Familie zu entfliehen. In einem eine ganze Wand, die mit Faksimile der

Louise Bourgeois , Nature Study, 1984 © Kunstmuseum Basel - Jonas Hänggi

zwanghaften Notizen bedeckt sind, die sie während der gesamten Psychoanalyse machte, welche sie nach dem Tod ihres Vaters 1951 begonnen hatte. Entgegen jeglicher Chronologie hat Holzer einen sehr persönlichen Rundgang entwickelt, so nah wie möglich am zwangsneurotischen Geist von Bourgeois. Es erstaunt kaum, im genauen Zentrum dieser Präsentation The Destruction of the Father zu sehen! Makabres Bankett Die kathartische Installation von 1974 stellt einen Tisch dar, der an ein Bett erinnert, mit hervorstehenden Hockern. Hier steht der Besucher dem gegenüber, was er als väterliche Reste erahnt, Schädelteile, Phallus oder zerstückelte Körper (in Realität Gerippe von Schafen und Kühen, die in Latex gehüllt sind). Wie könnte man besser mit jenem abrechnen, der seine Tochter vielfach demütigte, zuhause seiner gesamten Familie seine Geliebte aufzwang und die geliebte Mutter in eine tiefe psychologische Not brachte? In Zusammenarbeit mit dem Londoner Studio Holition, hat Jenny Holzer eine App für Augmented Reality entwickelt, die es erlaubt, der Dekonstruktion dieses symbolträchtigen Werkes beizuwohnen, zum Klang der Stimme von Bourgeois selbst, die ein Wiegenlied vor sich her singt (authentisch!). Auf einer der Stickereien, die im Nebenraum thront, ein Satz mit

dem Akzent eines Grabspruchs: „I have been to hell and back. And let me tell you, it was wonderful“ („Ich bin in die Hölle gegangen und zurückgekommen. Lasst mich euch sagen, dass es wundervoll war“). Au Kunstmuseum (Bâle) jusqu’au 15 mai Im Kunstmuseum (Basel) bis zum 15. Mai kunstmuseumbasel.ch

> Dans The Violence of Handwriting Across a Page, splendide ouvrage accompagnant l’exposition, Jenny Holzer approfondit son étude de l’artiste française. > In The Violence of Handwriting Across a Page einem wunderbaren Buch, das die Ausstellung begleitet, vertieft Jenny Holzer ihre Studie der französischen Künstlerin. Publié par Erschienen bei JRP | Editions (70 €)

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Arrachement Herausreißen, 2019

Paint It Black S’épanouissant dans un somptueux jeu entre les noirs et les blancs, les dessins de Haleh Zahedi composent une jolie Mise en plis à Oberkirch. Die Zeichnungen von Haleh Zahedi, die sich in einem prächtigen Spiel zwischen Schwarz und Weiß entfalten, komponieren eine schöne Mise en plis in Oberkirch. Par Von Hervé Lévy

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ommissionnée par le peintre Rainer Braxmaier – dont deux toiles sont aussi montrées, ainsi qu’une immense œuvre installée dans l’espace public et réalisée à quatre mains avec l’artiste invitée – cette exposition s’inscrit dans la série Eins plus, bâtissant des ponts entre les deux rives du Rhin. Elle permet de se plonger dans l’univers de Haleh Zahedi : pour la native de Téhéran installée à Strasbourg, « le fusain est devenu une obsession. Il me permet de jouer avec les noirs, d’en moduler la densité », résume-t-elle. Sienne depuis des années, la technique a longtemps été au service d’un art d’essence narrative : chouettes mélancoliques, rats aux aguets ou encore combats de coqs d’une violence

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non feinte… Ils tendent désormais à se métamorphoser en volutes abstraites à l’image d’une encre sur papier de 2015 évoquant plus les mystères d’un Test de Rorschach que la lutte fratricide entre deux volatiles. On a le sentiment que ce glissement trouve un aboutissement – sans doute provisoire – avec les dessins de grand format rassemblés dans Mise en plis : « Auparavant, je crois que je racontais des histoires. En tout cas, j’avais l’impression de trop parler dans mes dessins », explique l’artiste qui propose aujourd'hui d’ensorcelantes énigmes en noir et blanc, toutes d’ombres et de lumières, dont la force profonde jaillit paradoxalement des gris intermédiaires. Parfois, les formes affleurent encore.

Dans les lignes fuligineuses de Sombrer (2020) où irradie une puissante mélancolie, semble ainsi se dessiner une humaine crinière, tandis que les accents surréalistes de Chevelure folle (2019) – avec ses mains, comme suppliantes, se détachant au cœur d’oppressants entrelacs – rappellent la silhouette d’un coq. Bec, œil et crête. Mais est-on bien sûr de ce qu’on voit ? Ce qui est certain en revanche, est que les compositions énigmatiques de Haleh Zahedi sont fichtrement vivantes. Le jeu dialectique entre opacité et transparence qui les traverse est souvent inquiétant : si les formes organiques d’Arrachement (2019), aux puissantes connotations sexuelles, semblent échappées d’un tableau de Francis Bacon passé au noir,


AUSSTELLUNG

une Griffe (pastel de 2021) se fait clairement menaçante. Mais ici tout n’est que métaphore. Le théâtre d’ombres que nous parcourons est en effet celui de la psyché : voyage onirique dans l’inconscient – le nôtre tout autant que celui de l’artiste – cette exposition est une invitation à l’introspection.

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iese vom Maler Rainer Braxmaier kuratierte Ausstellung – von dem ebenfalls zwei Gemälde, sowie ein riesiges Werk gezeigt werden, das im öffentlichen Raum installiert ist und gemeinsam mit der eingeladenen Künstlerin kreiert wurde – ist Teil der Reihe Eins plus, die Brücken zwischen den beiden Rheinufern schlägt. Sie erlaubt es, in das Universum von Haleh Zahedi einzutauchen: Für die, die aus Teheran stammt, aber in Straßburg lebt,

„ist die Zeichenkohle eine Obsession geworden. Sie erlaubt es, mit den Schwarztönen zu spielen, ihre Dichte anzupassen“, fasst sie zusammen. Die Technik, die seit Jahren die ihrige ist, stand lange im Dienste einer Kunst mit erzählerischem Wesen: Melancholische Eulen, auf der Lauer liegende Ratten oder auch Hahnekämpfe mit nicht fingierter Gewalt... Seit einigen Jahren tendieren sie dazu, sich in abstrakte Spiralen zu verwandeln, wie eine Tuschezeichnung auf Papier von 2015, die eher an die Geheimnisse eines Rorschachtests als an den brudermörderischen Kampf zwischen zwei Vögeln erinnert. Man hat das Gefühl, das diese Verschiebung ihren – sicherlich provisorischen – Höhepunkt mit den großformatigen Zeichnungen erreicht, die in Mise en plis (Wasserwelle) versammelt sind: „Ich

glaube, dass ich vorher Geschichten erzählte. Auf jeden Fall hatte ich den Eindruck in meinen Zeichnungen zu viel zu sprechen“, erklärt die Künstlerin, die nun bezaubernde schwarz-weiße Rätsel präsentiert, ganz aus Schatten und Licht, deren tiefe Kraft auf paradoxe Weise aus den grauen Zwischentönen stammt. Manchmal kommen die Formen noch zum Vorschein. In den rußigen Linien von Sombrer (Untergehen, 2020), das eine starke Melancholie durchzieht, scheint sich eine menschliche Mähne abzuzeichnen, während die surrealistischen Akzente von Chevelure folle (Unbändige Haare 2019) – mit ihren Händen, fast flehend, die sich im Zentrum beklemmender Flechtwerke abheben – an die Silhouette eines Hahns erinnern. Schnabel, Auge und Hahnenkamm. Aber ist man sich sicher dies zu sehen? Was hingegen sicher ist, ist die Tatsache, dass die rätselhaften Kompositionen von Haleh Zahedi verdammt lebendig sind. Das dialektische Spiel zwischen Undurchsichtigkeit und Transparenz, das sie durchzieht ist oft beunruhigend: Wenn die organischen Formen von Arrachement (Herausreißen, 2019) mit starken sexuellen Konnotationen einem Gemälde von Francis Bacon in schwarz zu entspringen scheinen, ist eine Griffe (Kralle, Pastell von 2021) klar bedrohlich. Aber hier ist alles nur Metapher. Das Schattentheater, das wir durchstreifen, ist in der Tat jenes der Psyche: Als Traum-Reise ins Unterbewusstsein – ebenso unser eigenes wie jenes der Künstlerin – ist diese Ausstellung eine Einladung zur Selbstbeobachtung. À la Städtische Galerie im Alten Rathaus (Oberkirch) du 10 avril au 5 juin In der Städtischen Galerie im Alten Rathaus (Oberkirch) vom 10. April bis 5. Juni oberkirch.de halehzahedi.com > Dans À fleur de peau, les œuvres de Haleh Zahedi dialoguent avec celles de Gisèle Bonin à la Galerie Robet-Dantec (Belfort) jusqu’au 14 mai > In À fleur de peau gehen die Werke von Haleh Zahedi bis zum 14. Mai einen Dialog mit jenen von Gisèle Bonin in der Galerie RobetDantec (Belfort) ein galerierobetdantec.com

M’as-tu-vu Angeber, 2020 POLY 245

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EXPOSITION AUSSTELLUNG

Walt Disney © Walt Disney Company 2022 / Courtesy Sammlung Reichelt und Brockmann

Al Taliaferro, Donald Duck, 1940er © Walt Disney Company 2022 / Courtesy Sammlung Reichelt und Brockmann

Mickey, Donald & Co. Barks, Taliaferro, Gottfredson… Les grands dessinateurs de Disney sont à la kunsthalle messmer pour une plongée dans la légende. Barks, Taliaferro, Gottfredson… Disneys große Zeichner sind in der kunsthalle messmer. Eintauchen in die Legende. Par Von Raphaël Zimmermann

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onnaissez vous Carl Barks (1901-2000), Al Taliaferro (1905-1969), Floyd Gottfredson (1905-1986) ou encore Ub Iwerks (1901-1971) ? Sans doute pas. Ils sont pourtant les piliers de l’univers graphique de Walt Disney. Sous la plume alerte et précise du premier, qui fait ses débuts de dessinateur avec le court-métrage Thru the Mirror en 1936, naissent des personnages comme Picsou et Géo Trouvetou. Le deuxième a imaginé Donald en 1934 – mais aussi Daisy et le trio de castors juniors formé par Riri, Fifi et Loulou –, contribuant à lui donner de l’importance, tandis que le troisième fut longtemps responsable des intrigues des aventures de la souris la plus célèbre de la planète. Quant au dernier, il fut le premier employé du studio et le créateur graphique de… Mickey Mouse. Dessins, croquis (un génial Donald en colère ou un Mickey en meneur de revue) et autres story-boards restituent la passionnante épopée Disney, BD et dessins animés confondus, tandis qu’une autre section permet d’appréhender l’évolution actuelle des célèbres personnages.

À la kunsthalle messmer (Riegel am Kaiserstuhl) jusqu’au 12 juin In der kunsthalle messmer (Riegel am Kaiserstuhl) bis zum 12. Juni kunsthallemessmer.de 94

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ennen Sie Carl Barks (1901-2000), Al Taliaferro (19051969), Floyd Gottfredson (1905-1986) oder auch Ub Iwerks (1901-1971)? Sicher nicht. Dabei sind sie die Pfeiler des graphischen Universums von Walt Disney. Aus der lebendigen und präzisen Feder des Ersten, der sein Debüt als Zeichner mit dem Kurzfilm Thru the Mirror im Jahr 1936 gibt, stammen Figuren wie Dagobert Duck und Daniel Düsentrieb. Der Zweite hat sich 1934 Donald ausgedacht – aber auch Daisy und das Junior-Trio Tick, Trick und Track –, was ihm Gewicht verlieh, während der Dritte lange für die Handlungen der Abenteuer der bekanntesten Maus der Welt verantwortlich war. Letzterer war der erste Angestellte des Studios und der graphische Schöpfer von... Mickey Maus. Zeichnungen, Skizzen (ein genialer wütender Donald oder ein Mickey als Revue-Tänzer) und Storyboards, die den begeisternden Epos von Disney wiedergeben, Comics und Animationsfilme zusammengenommen, während eine weitere Abteilung es erlaubt die aktuelle Entwicklung der berühmten Figuren nachzuvollziehen.



EXPOSITION AUSSTELLUNG

Contre l’oubli Avec Enivrement, le Cartoonmuseum de Bâle jette un regard sur l’œuvre protéiforme de Lika Nüssli, l’une des dessinatrices suisses les plus avant-gardistes.

Gegen das Vergessen Mit Im Taumel wirft das Cartoonmuseum Basel einen Blick auf das vielförmige Werk von Lika Nüssli, einer der avantgardistischsten Zeichnerinnen der Schweiz. Par Von Suzi Vieira

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a nature est omniprésente dans l’œuvre de Lika Nüssli. Le trait sinueux de son crayon rageusement libre en reproduit souvent le foisonnement et la fascinante arborescence végétale, y compris lorsqu’elle cherche à figurer les méandres tortueux des pensées, souvenirs d’enfance, rêveries ou traumatismes de ses personnages

de bande dessinée. À 49 ans, cette artiste helvète basée à Saint-Gall navigue entre installations d’art contemporain, performances associant sons, peinture et mouvements, comics d’avant-garde – elle est l’un des piliers de l’underground revue zurichoise Strapazin –, illustration et romans graphiques. Nominée pour le prestigieux Prix suisse du livre jeunesse 2022 avec l’impertinent Moni heisst mein Pony (« Moni est le nom de mon poney », en collaboration avec Andrea Gerster, non traduit), Nüssli s’apprête en outre à publier au mois de mai son deuxième roman graphique, Starkes Ding (« Un truc puissant », non traduit).

Lika Nüssli, 2021 © Herbert Weber

À travers la vie de son père Ernst, la plasticienne revient sur l’un des plus grands scandales de l’histoire de son pays, celui des enfants de familles défavorisées placés de force chez des paysans pour servir de main-d’œuvre bon marché – souvent maltraités et réduits à un travail de forçat. Une pratique orchestrée par l’administration fédérale et les services d’Assistance publique de la fin du XIXe siècle jusqu’en 1981. Temps fort de la rétrospective que lui consacre le Cartoonmuseum, les planches originales de l’ouvrage dévoilent un style librement inspiré des traditionnelles peintures d’alpage de la région du 96

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Toggenburg (aux confins du Liechtenstein) avec leurs fermiers au visage bonhomme, mais revisités façon Chris Ware et son mythique Rusty Brown. « Je ne voulais pas faire un livre historique. Je me suis énormément documentée, bien sûr, et j’avais rassemblé de nombreuses photos de l’époque, mais tout l’enjeu a consisté à réussir à m’en détacher dans le trait », explique l’intéressée. « Il s’agissait pour moi de retranscrire cette histoire de façon subjective et moderne du point de vue graphique aussi bien que narratif.» Cet art périlleux de l’auto-docu-fiction, la dessinatrice y excelle. En 2018, elle explorait déjà dans le splendide Vergiss dich nicht (« Ne t’oublie pas », non traduit) les relations changeantes à sa mère, atteinte de démence sénile, en décrivant avec une bonne dose de poésie et d’humour le quotidien d’une maison de retraite spécialisée. Un livre d’art grand format, avec reliure en cuir, papier bible vert tendre pour le touchant prologue en forme de lettre à la génitrice et blanc cartonné pour la plongée surréaliste dans les mondes intérieurs de ces personnes âgées. Sur la couverture, une image a la semblance d’une gravure, comme pour conjurer l’oubli. On y voit la mère et la fille reliées par un enchevêtrement touffu de souvenirs… et leur amour partagé de la nature.


Vergiss dich nicht, Vexer Verlag, 2018

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ie Natur ist omnipräsent im Werk von Lika Nüssli. Ihr kurvenreicher und wutentbrannt freier Zeichenstrich gibt oft die Fülle und die faszinierende Struktur der Pflanzen wieder, auch wenn sie versucht die verschlungenen Pfade die Gedanken, Kindheitserinnerungen, Träumereien und Traumata ihrer Figuren abzubilden. Mit 49 Jahren bewegt sich die Schweizer Künstlerin, die in St. Gallen lebt, zwischen Installationen zeitgenössischer Kunst, Performances mit Klangelementen, Malerei und Bewegung sowie Avant-Garde-Comics – sie ist einer der Eckpfeiler der Underground-Revue Strapazin in Zürich – Illustration und Graphikroman. Für den prestigeträchtigen Schweizer Kinder-und Jugendbuchpreis 2022 mit dem frechen Moni heisst mein Pony (in Zusammenarbeit mit Andrea Gerster) nominiert, ist Nüssli im Begriff im Mai ihre zweite Graphic Novel Starkes Ding zu veröffentlichen. Anhand des Lebens ihres Vaters Ernst behandelt die Künstlerin einen der größten Skandale der Geschichte ihres Landes, jenen der Kinder aus armen Familien, die zwangsweise bei Bauern platziert wurden um als billige Arbeitskräfte zu dienen – oft auf schlechte Behandlung und wilde Schufterei reduziert. Eine Praktik der Verdingkinder,

die von der Verwaltung des Bundes und den zuständigen Behörden vom Ende des 19. Jahrhunderts bis 1981 organisiert wurde. Ein Höhepunkt der Retrospektive, die ihr das Cartoonmuseum widmet, sind die Originalzeichnungen des Werkes, mit seinem Stil frei nach der traditionellen Senntumsmalerei aus der Region Toggenburg (an der Grenze zu Liechtenstein) mit ihren Bauern mit männlichen Gesichtern, aber nach Art von Chris Ware und seinem legendären Rusty Brown. „Ich wollte kein historisches Buch machen. Ich habe mir natürlich viele Dokumente beschafft, und ich hatte zahlreiche Photos von damals zusammengetragen, aber die ganze Herausforderung lag darin, mich im Zeichenstrich davon loszumachen“, erklärt die Interessierte. „Es ging für mich darum, diese Geschichte auf subjektive und moderne Art zu erzählen, ebenso aus einem graphischen wie narrativen Blickwinkel.“ Diese gefährliche Form der Auto-Doku-Fiktion beherrscht die Zeichnerin ganz ausgezeichnet, sie die schon 2018 im wunderbaren Vergiss dich nicht die veränderten Beziehungen zu ihrer an Demenz leidenden Mutter erkundete, indem sie mit einer gehörigen Dosis Poesie und Humor den Alltag in einem spezialisierten Altersheim beschrieb. Ein großformatiges Kunstbuch, mit Ledereinband, ein zartgrünes Bibel-

Danke Laura, 2020

papier für den berührenden Prolog in Form eines Briefes an die Mutter und weißer Karton für ein surrealistisches Eintauchen in die Innenwelten dieser alten Menschen. Auf dem Titel ein Bild, das an eine Gravur erinnert, als würde es das Vergessen abwenden. Man sieht darauf die Mutter und die Tochter, verbunden durch ein dichtes Wirrwarr von Erinnerungen... und ihre geteilte Liebe zur Natur. Au Cartoonmuseum (Bâle) jusqu’au 29 mai Im Cartoonmuseum (Basel) bis zum 29. Mai cartoonmuseum.ch

Erschienen bei Edition Moderne (29 €) editionmoderne.ch

> Visite en français, 15/05 (14h) > Performance Visual Noise en coopération avec le in Zusammenarbeit mit dem Jazzcampus Basel, 16/04 (19h30) > Sonntagsführungen, 10.04. & 08.05. (14 Uhr) > Führung mit Lika Nüssli und der Direktorin Anette Gehrig mit anschließender Signierstunde, 29.05. (14 Uhr)

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ARTKUNST

Happy Birthday La Staatliche Hochschule für Gestaltung Karlsruhe fête son trentième anniversaire. Zoom sur l’établissement allemand. Die Staatliche Hochschule für Gestaltung Karlsruhe feiert ihr dreißigjähriges Jubiläum. Fokus auf eine deutsche Institution. Par Von Pierre Reichert – Photo de von Sven Krahl / HfG Karlsruhe

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ondée en 1992 dans le même mouvement qui vit naître le ZKM auquel elle est étroitement associée – jusqu’à être installée dans le même et gigantesque bâtiment industriel –, la Staatliche Hochschule für Gestaltung est particulièrement renommée. Pensons à son enseignement de l’art numérique et du design comme à ceux portant sur la scénographie ou la philosophie des médias. Elle « n’a pas pour objectif de produire toujours les mêmes solutions, mais de remettre en question la fonction et la signification du design pour les producteurs et les consommateurs », résume Jan Boelen, son recteur depuis décembre 2019. Combinant pratique et théorie, elle a pour philosophie de repenser les espaces de liberté présents et futurs. Multipliant événements et expositions pour cette “année anniversaire” (dont celle des diplômés, HfG Graduates 21/22, 02-19/06), l’institution est à découvrir. Rajoutons qu’elle 98

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organise Mind Bombs (jusqu’au 24/04, Kunsthalle Mannheim), passionnant parcours collectif explorant l’histoire et l’iconographie politique du terrorisme moderne.

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m Jahr 1992 gegründet, parallel zum ZKM, mit der sie eng verbunden ist – bis hin zur Installation im selben riesigen Industriegebäude – ist die Staatliche Hochschule für Gestaltung besonders renommiert. Man denke an die Lehre von Medienkunst oder Medienphilosophie. Sie „zielt nicht darauf ab, immer wieder die gleichen Lösungen zu produzieren, sondern die Funktion und Bedeutung von Design für Produzenten und Konsumenten zu hinterfragen“, fasst Jan Boelen, seit 2019 der Rektor der Hochschule, zusammen. Indem sie Praxis und Theorie kombiniert, besteht ihre Philosophie darin die gegenwärtigen und zukünftigen Freiheitsräume neu zu denken. Die Institution ist an-

hand zahlreicher Veranstaltungen und Ausstellungen in diesem Jubiläumsjahr (darunter jene der Diplomarbeiten (HfG Graduates 21/22, 02.-19.06.) zu entdecken. Nicht zu vergessen, ihre Organisation von Mind Bombs (bis 24.04., Kunsthalle Mannheim) einem begeisternden kollektiven Rundgang, der die Geschichte und politische Ikonographie des modernen Terrorismus erkundet. Candidature ouvertes jusqu’au 30/04 Bewerbung möglich bis 30.04. hfg-karlsruhe.de > Exposition sur l’histoire de l’architecture du bâtiment par les étudiants de Thomas Rustemeyer 02/06-11/09, Munitionsfabrik > Ausstellung zur Geschichte der Architektur des Gebäudes der Studierenden von Thomas Rustemeyer 02.06.-11.09., Munitionsfabrik > Parcours des créations 2021/22 en arts plastiques, art sonore et musique, 21-31/07 > Rundgang der in diesem Jahr 2021/22 entstandenen Werke mit Kunstwerken, Klangkunst und Musik, 21.-31.07.




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