LES VAGUES DE CHALEUR
AUGMENTENT-ELLES
LE RISQUE D’AVC ?
Concentration, mémoire, raisonnement, antistress, prise de décision…
LES VAGUES DE CHALEUR
AUGMENTENT-ELLES
LE RISQUE D’AVC ?
Concentration, mémoire, raisonnement, antistress, prise de décision…
NEUROSCIENCES
QUAND LE CERVEAU
S’ENDORT EN CLASSE
PSYCHOLOGIE
LES POUVOIRS DU BOTOX
CONTRE LA DÉPRESSION
Cet encart d’information est mis à disposition gratuitement au titre de l’article L. 541-10-18 du code de l’environnement. Cet encart est élaboré par CITEO.
N° 167
p. 14-16
Pieter Vancamp
Neurobiologiste à l’Inrae de Nantes, spécialiste de physiologie, il décrit la façon dont les températures extrêmes augmentent le risque d’AVC, qui pourrait donc s’accroître avec le réchau ement climatique.
p. 26-31
François Maquestiaux
Professeur de psychologie cognitive et membre du centre de recherche sur les fonctionnements et dysfonctionnements psychologiques à Mont-SaintAignan (76), il étudie les grandes fonctions cognitives de notre cerveau, comme la perception, l’attention, la mémoire ou l’action.
p. 54-59
Alexandra Perrot
Maîtresse de conférences en Staps et chercheuse à la faculté des sciences du sport de l’université Paris-Saclay, elle étudie les e ets des stimulations à la fois physiques et cognitives sur la santé et le fonctionnement mental des individus.
p. 80-89
Axelle Maneval-Van Lander
Psychologue dans une unité de soins palliatifs et codirectrice du laboratoire Acceppt (Automédication accompagnement pluriprofessionnel du patient), à l’université Clermont-Auvergne, elle propose des solutions pour mieux gérer un deuil ou une maladie grave, ainsi que leur impact sur les enfants.
Rédacteur en chef
Au premier siècle de notre ère, le poète latin Juvénal inventa cette formule géniale : « un esprit sain dans un corps sain ». C’était, disait-il, tout ce qu’il fallait demander aux dieux pour être heureux. S’il vivait parmi nous, il serait ravi d’apprendre que les deux sont liés. Les neurosciences démontrent qu’une activité physique régulière et soutenue aide notre cerveau à développer mille qualités, comme la fexibilité de l’esprit, une bonne mémoire, une résistance aux atteintes de l’âge ou des capacités de concentration optimales. Et les biologistes expliquent que ce lien nous vient de notre lointain passé paléolithique : c’est en réféchissant en même temps qu’ils couraient, afn d’anticiper les mouvements de leur gibier, que nos ancêtres ont tiré leur épingle du jeu. À tel point que cette connexion corps-esprit se serait gravée dans leurs gènes.
Mais que dirait Juvénal des récents avatars de sa maxime ? Le fondateur de l’olympisme moderne, le baron Pierre de Coubertin, la remplaça par « un esprit ardent dans un corps musclé ». Autrement dit, un glissement vers la performance. Ce qui compte, ce n’est plus de souhaiter pour soi et ses proches la santé du corps et de l’esprit, mais d’être combatif et de vaincre. De décrocher des médailles. Rien de pire que d’être au pied du podium. La force d’un pays se mesure au tableau des breloques.
Nous sommes dans une société de la performance, dans une économie de la compétition globalisée. Les dégâts sont immenses. Sur la fatigue, l’inégalité, la perte de sommeil, le stress, la dépression. Les Jeux olympiques sont comme un divertissement lucratif qui vient couronner ces valeurs. Certes, ils sont pour nous tous une occasion de nous enthousiasmer pour la pratique du sport. Mais retenons-en ce que nous disent Juvénal et les neurosciences : à notre propre échelle, demander la santé tous azimuts, et travailler pour. Le sport pour nous guérir des dangers de la performance, là n’est pas le moindre des paradoxes. £
N° 167 JUILLET-AOÛT 2024
6-23
p. 6 ACTUALITÉS
Enfants : lire c’est bien, sur papier c’est mieux !
Jardiner fait bien dormir
L’injustice, c’est dans les tripes ?
Avez-vous une voix intérieure ?
Dans la jungle des neurones
Quand une langue chasse l’autre…
Des décodeurs de parole plus rapides et fiables
p. 14 FOCUS
Pourquoi les vagues de chaleur vont augmenter le risque d’AVC
Le réchau ement climatique cause des dizaines de milliers d’AVC chaque année. Comment se protéger ?
Pieter Vancamp
p. 18 ÉMOTIONS
Le Botox : antirides… et antidéprime !
En détendant les muscles du visage qui se contractent quand on est triste, le Botox aurait un e et… antidépresseur.
Sina Horsthemke
p. 26 ÉVOLUTION NÉS POUR BOUGER
Depuis des millions d’années, notre cerveau a évolué grâce à l’activité physique. Nulle surprise si le sport l’énergise aujourd’hui.
François Maquestiaux
p. 32 NEUROSCIENCES ENDURANCE ET MUSCULATION, COBIENFAITEURS DU CERVEAU
Les sports aérobies (endurance) et anaérobies (e ort intense) ont des bénéfices complémentaires sur notre cerveau.
Olivier Dupuy
p. 38 COGNITION POUR ÊTRE BIEN DANS SES BASKETS ET SA TÊTE !
Les sports collectifs développeraient nos « fonctions cognitives supérieures » en stimulant la coopération. Néva Béraud-Peigné
p. 46 PSYCHOLOGIE SOCIALE « LE COACHING PARTICIPATIF EST LA CLÉ DU SUCCÈS »
Entretien avec Olivier Krumbholz et Pascal Niggel
p. 54 NEUROBIOLOGIE DANSER POUR RAJEUNIR SON CERVEAU !
Antistress, anti-âge, stimulant du lien social : pour vos neurones, danser est une garantie santé à long terme.
Alexandra Perrot
p. 60 NEUROBIOLOGIE EXERGAMING : ET SI LES ÉCRANS ÉTAIENT BONS POUR LA SANTÉ ?
Jouer aux jeux vidéo tout en faisant de l’exercice physique : les exergames combinent les e ets stimulants du sport et de l’exercice intellectuel sur notre cerveau.
Pauline Maillot
p. p. 25p. 68-74
p. 76-91
p. 92-98
p. 68 L’ENVERS DU DÉVELOPPEMENT PERSONNEL
YVES-ALEXANDRE THALMANN
psy : des cases si confortables…
Si les tests de personnalité séduisent, c’est parce qu’ils répondent à notre besoin de nous placer nous-mêmes dans des cases.
p. 72 RAISON ET DÉRAISON
NICOLAS GAUVRIT
« Euthanasier, c’est tuer » : le sophisme de la pente glissante
Si vous faites ceci, il va arriver cela… Cette stratégie porte le nom de sophisme de « la pente glissante ». Comment cadrer le débat ?
JEAN-PHILIPPE LACHAUX
Quand le cerveau s’endort en classe
Des parties de notre cerveau peuvent s’endormir sans que l’on perde connaissance. Par exemple, en classe… ou en réunion.
p. 80 PSYCHOLOGIE
Comment réagir face à la mort ?
Des approches thérapeutiques et d’accompagnement aident à gérer l’ouragan émotionnel causé par un deuil ou l’annonce d’une maladie grave.
Axelle Maneval-Van Lander, Catherine Fache et Rebecca Medou
p. 90 LA QUESTION DU MOIS
Faut-il petit-déjeuner
pour rester concentré ?
Christophe Bamberg
p. 92 SÉLECTION DE LIVRES
Vous allez y arriver !
Découvrir le primate en nous Psychologie de l’humour
Les Émotions de l’enfant
Idées reçues sur le haut potentiel intellectuel
Dans le cerveau des champions
p. 94 NEUROSCIENCES ET LITTÉRATURE
SEBASTIAN DIEGUEZ
« Le Troupeau aveugle » : pourquoi n’agissonsnous pas pour le climat ?
Dans ce roman de 1972, on trouve déjà les principaux ingrédients de l’inaction climatique contemporaine.
Neurobiologiste à l’Inrae de Nantes.
NEUROBIOLOGIE
Responsables de dizaines de milliers d’AVC chaque année, les vagues de chaleur vont s’accentuer du fait du réchau ement climatique. Pour éviter d’exposer son cerveau, il est essentiel de comprendre leurs e ets et de prendre des mesures de protection.
Rien qu’en 2019, les accidents vasculaires cérébraux, ou AVC, ont coûté la vie à 6,6 millions de personnes dans le monde et en ont laissé de nombreuses autres handicapées. De fait, ils se sont multipliés lors du siècle dernier, en raison du vieillissement de la population et de l’évolution du mode de vie : le tabagisme, le surpoids et la pollution comptent ainsi parmi les principaux facteurs de risque. C’est au point qu’ils représentent aujourd’hui la deuxième cause de mortalité dans le monde. Une dangerosité qui inquiète d’autant plus qu’un nouveau facteur, plus inattendu, vient de faire irruption sur la scène : les températures extrêmes. Elles causeraient en effet plus d’un demi-million de décès par AVC chaque année dans le monde ! Tels sont les résultats d’une étude chinoise publiée dans le prestigieux journal Neurology, selon laquelle 8 % de tous les AVC seraient dus à ces pics de chaleur ou de froid – un chiffre en augmentation depuis trente ans…
Sur cette durée, les chercheurs ont compilé des données de santé mondiale au moyen d’une collaboration
internationale, la Global Burden of Disease Study, et les ont croisées avec des relevés de température détaillés. Conclusion : ce sont les températures extrêmes qui accentuent le risque, qu’il s’agisse des grands froids ou des fortes chaleurs. Ainsi, en 2019, le froid intense et les épisodes caniculaires étaient respectivement responsables de 474 002 et 48 030 AVC fatals à l’échelle du globe. L’impact du froid est donc pour l’instant dix fois supérieur à celui des températures élevées, mais la donne pourrait changer avec la multiplication et l’intensifcation des vagues de chaleur provoquées par le réchauffement climatique.
MOINS D’EAU
Les chercheurs tentent donc de comprendre ce qui fait que la chaleur accroît le risque d’AVC. Ces derniers peuvent être catégorisés en deux types : certains résultent de la rupture d’un vaisseau sanguin dans le cerveau (on parle d’« AVC hémorragiques »), d’autres de l’obstruction du vaisseau par un caillot, ou agrégat de sang coagulé (il s’agit alors d’« AVC ischémiques »). Dans ce second cas, le
fux sanguin s’interrompt, privant d’oxygène la région affectée, ce qui entraîne une mort rapide des neurones. Il est alors indispensable d’intervenir le plus vite possible pour éviter des séquelles motrices permanentes et invalidantes – ou la victime ne parviendra plus à bouger correctement la partie de son corps reliée à la zone cérébrale endommagée. Dans le pire des cas, l’issue est fatale. Quel rôle va jouer la température dans ce processus ? Pour assurer le bon fonctionnement des organes vitaux, comme le cœur ou les reins, notre organisme doit maintenir un degré de chaleur stable et constant. Dans les situations de froid ou de chaleur extrême, le cerveau va alors déclencher un réfexe physiologique pour préserver cet équilibre. Ainsi, quand la température baisse, les vaisseaux sanguins se contractent au niveau des extrémités (bout des doigts, pieds…), ce qui conserve la chaleur à l’intérieur du corps. Mais l’effet immédiat est de faire grimper la pression sanguine… Si les vaisseaux sont fragilisés par l’âge ou par divers facteurs comme le tabac, une
8 % des AVC seraient dus à des températures extrêmes. Un chi re en progression depuis trente ans.
alimentation inappropriée ou la consommation d’alcool, le risque est que leur paroi se rompe. Autre effet du froid : il rend le sang plus visqueux, ce qui complique sa circulation et favorise la formation de caillots.
Que se passe-t-il en cas de canicule ?
La transpiration entraîne une perte d’eau, y compris dans le sang qui devient là encore plus visqueux. La concentration en lipides grimpe dans les artères, augmentant le risque de caillot. Mais la chaleur – comme le froid intense – a aussi pour effet de provoquer une réaction infammatoire dans l’organisme. Grands froids et microbrûlures liées à la chaleur occasionnent la mort de certaines cellules dont les débris activent alors le système immunitaire. D’où une cascade de réactions infammatoires susceptibles de déboucher sur un AVC, soit par l’activation de plaquettes sanguines, qui participent habituellement à la coagulation, mais peuvent aussi favoriser la formation de caillots, soit parce que certaines molécules infammatoires endommagent les vaisseaux, amplifant les risques de rupture.
Le risque d’AVC n’est pourtant pas le même pour tous. Si les sujets jeunes et en bonne santé supportent bien les températures extrêmes, l’organisme des personnes fragilisées par une maladie cardiovasculaire comme l’hypertension ou l’insuffsance cardiaque peine à gérer les chocs thermiques. L’âge pèse également dans la balance, car la composition du sang évolue avec les années. Il a tendance à devenir plus épais, à former plus facilement des caillots et à les évacuer avec davantage de diffculté. Enfn, les hommes sont plus vulnérables que les femmes, pour des raisons encore mal comprises.
ÊTES-VOUS À RISQUE ?
Les inégalités sociales jouent aussi un rôle, mesuré par l’étude chinoise publiée dans Neurology. Les chercheurs ont examiné les données de 204 pays et territoires à travers le monde, pour constater que les AVC fatals liés aux températures sont plus fréquents dans les régions de faible niveau socioéconomique. Infrastructures de santé moins performantes, absence de systèmes
d’alerte en cas de conditions météorologiques extrêmes, manque de chauffage ou de climatisation… et moindre sensibilisation des populations aux facteurs de risques et aux symptômes de l’AVC, que sont une brusque paralysie d’une partie du visage, un engourdissement inexpliqué d’un bras ou d’une jambe, ou des diffcultés soudaines d’élocution ou de compréhension du langage.
Dans un monde où les chaleurs intenses seront de plus en plus fréquentes, que risque-t-il de se passer ? Pour le savoir, les chercheurs ont croisé les tendances observées ces trente dernières années avec les prévisions climatiques… Leurs conclusions ? Les AVC liés aux vagues de chaleur devraient se multiplier d’ici à 2030, jusqu’à advenir trois fois plus souvent dans certaines zones géographiques. L’Europe occidentale sera a priori relativement épargnée sur ce point précis, mais la chaleur y fera d’autres dégâts puisque, selon d’autres travaux, la mortalité devrait augmenter notamment par déshydratation chez les personnes âgées et par crise cardiaque
chez les patients souffrant de maladies cardiovasculaires…
Les auteurs de l’étude ne se prononcent pas sur l’évolution des AVC provoqués par les grands froids, une projection diffcile à établir car le réchauffement climatique pourrait paradoxalement entraîner des vagues de froid plus extrêmes dans certaines régions du monde ; tout dépendra donc de phénomènes météorologiques locaux. Les facteurs impliqués sont si nombreux que, sur ce plan, les prédictions manquent encore de fabilité.
Face à ces perspectives, le maître mot est l’anticipation. Sur plusieurs fronts. En renforçant l’offre de soins, en éduquant le public à ces risques et en engageant des politiques ambitieuses afn d’améliorer la résilience de nos sociétés. Cela signife d’adapter les structures urbaines pour atténuer les effets « d’îlot de chaleur » (la concentration des hautes températures dans les zones de béton) en multipliant les espaces verts. Le bénéfce est double : moins de chaleur, mais aussi moins de pollution, ce qui limite d’autant le risque d’AVC, les particules polluantes ayant un
effet infammatoire sur les vaisseaux sanguins. D’autres dispositifs sont envisagés, comme la construction d’espaces climatisés où se réfugier quelques heures par jour, ou l’utilisation d’asphalte blanc qui s’échauffe moins que le noir, voire l’installation de grands rideaux de protection au-dessus des rues pour protéger les passants du soleil (un dispositif qu’utilisaient déjà les Romains et qui revient au goût du jour à Séville, en Espagne).
Reste que des interventions ciblées seront nécessaires pour protéger les populations vulnérables. À certains endroits, cela a commencé. En France, des systèmes d’alerte ont été mis en place en réponse à la vague de chaleur catastrophique de 2003, qui a coûté la vie à plus de 15 000 personnes. Mais il faudra aller plus loin, notamment à travers des collaborations internationales pour réduire les inégalités en matière de santé. Le but étant d’éviter que les pays de faible niveau socioéconomique ne paient le prix fort du réchauffement climatique. Une chose est sûre : il faudra unir nos efforts pour bâtir des sociétés résilientes, capables de survivre dans un monde qui se réchauffe comme jamais auparavant. £
Bibliographie
Bibliographie
C. Qu et al., Burden of stroke attributable to nonoptimal temperature in 204 countries and territories, Neurology, 2024. J. Ballester et al., Heat-related mortality in Europe during the summer of 2022, Nature Medicine, 2023
M. N. Cramer et al., Human temperature regulation under heat stress in health, disease, and injury, Physiological Review, 2022.
GBD 2019
Stroke Collaborators, Global, regional, and national burden of stroke and its risk factors, 19902019, The Lancet Neurology, 2021. À Séville, on tend de grands voiles au-dessus des rues pour réduire l’impact de la chaleur. Cette pratique pourrait enrichir l’arsenal de mesures destinées à adapter les villes au réchau ement climatique.
p. 26
Nés pour bouger
p. 32
Endurance et musculation, cobienfaiteurs du cerveau
p. 38
Sports collectifs : pour être bien dans ses baskets et sa tête !
p. 46 Interview
« Le coaching participatif est la clé du succès »
p. 54
Danser pour rajeunir son cerveau !
p. 60
Exergaming : et si les écrans étaient bons pour la santé ?
Une séance de sport fait presque toujours du bien. Qui ne se sent pas plus détendu et plus calme dans les heures qui suivent ? Vous pourriez même constater que vous avez ensuite les idées plus claires pour travailler ou résoudre une diculté, et que vous dormez mieux. Et pour cause : toute activité physique est bénéfique pour la santé et le bien-être, mais aussi – et c’est l’excellente nouvelle – pour notre cerveau. À l’occasion des Jeux olympiques en France, nous avons interrogé des chercheurs en sciences cognitives pour savoir jusqu’où pouvaient aller ces bienfaits… Ils nous expliquent que « bouger » serait si profondément ancré dans notre ADN que cela serait nécessaire au bon fonctionnement de nos neurones. Avec des bénéfices au quotidien : meilleure concentration, meilleure mémorisation, meilleure réflexion. Le sport serait aussi l’un des facteurs anti-âge les plus e caces et vous apprendrez ici pourquoi. Alors, que pratiquer si l’on n’est pas un athlète « médaillable » aux JO ?
Course à pied, basket, muscu, tennis, danse, natation… ? Ce dossier vous aidera à trouver ce qui vous convient le mieux. Chaque sport a ses mérites, et ses particularités, mais tous sont bons pour le cerveau, même devant un écran ! Vous n’aurez que l’embarras du choix pour booster vos neurones ! Bénédicte Salthun-Lassalle
Kevin Mayer ne se contente pas de courir le 100 mètres, comme ici lors des Championnats du monde d’athlétisme de Budapest en 2023. En bon décathlonien, il lance aussi le javelot, le poids, le disque, saute en longueur, en hauteur et à la perche, et participe aux épreuves de demi-fond…
Le cerveau humain s’est développé pendant des millions d’années grâce à l’activité physique. Aujourd’hui, il a toujours besoin de mouvement. Le sport le lui apporte, tout en procurant des bénéfices innombrables sur nos fonctions cognitives et notre santé mentale.
Par François Maquestiaux, professeur de psychologie cognitive à l’université de Rouen Normandie, et membre du centre de recherche sur les fonctionnements psychologiques, à Rouen, et de l’unité Inserm de neurosciences et psychologie cognitive, à Besançon.
£ Au-delà des bénéfices physiques, l’activité sportive profite à notre santé mentale et à nos aptitudes cognitives.
£ Ce lien serait dû à l’évolution de notre espèce. Au fil du temps, nos ancêtres ont dû se déplacer pour chasser, cueillir des aliments et se protéger des prédateurs. Ces activités physiques ont exigé des compétences motrices complexes, une coordination précise et une adaptation rapide aux changements de situation.
£ Il est fort probable que pour y parvenir, notre cerveau se soit développé et amélioré. Aujourd’hui, à l’ère de la sédentarité, il est donc essentiel de continuer à bouger pour préserver nos facultés mentales. EN BREF
Tout le monde ou presque se réjouit de la tenue des Jeux olympiques (JO) à Paris en 2024. Les uns en attendent du spectacle, de l’excitation, du plaisir… Les autres de la convivialité et des échanges. Certes ! Mais il est un bénéfce du sport dont on a moins souvent conscience : celui qui concerne notre cerveau et nos capacités mentales. Depuis plusieurs années maintenant, les chercheurs en psychologie cognitive, neurosciences et neuropsychologie accumulent des preuves montrant que la pratique sportive bénéfcie non seulement à notre corps, mais aussi à nos pensées et notre bienêtre psychologique. Que ce soit la mémoire, la concentration, les capacités de fexibilité mentale ou de résistance au déclin cérébral lié à l’âge : l’exercice physique est sur ces plans à la fois protecteur et stimulant.
Ce bénéfce est tout aussi inattendu que méconnu. Sur son site, le comité d’organisation des JO met en avant
essentiellement les avantages en matière de santé physique. On y lit ainsi que cet événement représente « une opportunité historique pour susciter un sursaut national face à la sédentarité et à l’inactivité physique, deux enjeux de santé publique majeurs ». Mais ce que cette phrase ne dit pas, c’est que l’enjeu est aussi mental ! La santé mentale est aujourd’hui un problème de société de premier plan, avec une hausse de l’anxiété et des dépressions si importante que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) y voit une pandémie mondiale à enrayer le plus vite possible, qui touche près de 1 milliard d’humains sur Terre.
Or le sport est un moyen unique d’y contribuer. Parce que nos capacités cérébrales dépendent directement de ce que nous faisons de notre corps. Cette notion, tout sauf intuitive, est bien plus profonde qu’on ne le croit. Comme nous allons le voir, elle s’enracine dans le passé multimillénaire de notre espèce. Et l’on en remarque les signes dès le commencement de la vie d’un être humain.
DU MOUVEMENT
AVANT
Tout commence en effet dans le ventre maternel, où le fœtus se met à bouger dès la septième semaine de grossesse. Ses mouvements, d’abord involontaires, lui permettent de changer de position et peutêtre même d’explorer son corps et de l’utiliser pour communiquer ! Quelques mois avant la naissance, il n’est pas rare qu’un père qui appuie doucement sur le ventre de la mère ait l’impression que le bébé lui répond en exerçant une pression avec son petit corps sur la paroi utérine… Mais le mouvement n’est pas uniquement un moyen de se déplacer. Il contribue au développement de l’ensemble du cerveau et des capacités cognitives. Au point que, dès 1954, le psychologue suisse Jean Piaget a suggéré que le développement de la pensée – la cognition – serait étroitement lié à l’émergence précoce de la motricité… En effet, après la naissance, la motricité et la maturation du système cérébral jouent un rôle essentiel dans le développement des capacités cognitives de l’enfant. Par exemple, le langage se construit à travers les mouvements des bras, de la bouche, de la langue et de la gorge. De plus, grâce à ses déplacements – bien que limités au début, peutêtre en reculant ou à quatre pattes, en poussant au hasard sur ses appuis –, le bébé explore déjà son environnement, interagit avec les autres et recherche des informations pour tester des hypothèses. Ces étapes sont indispensables à tout apprentissage. De même, la psychologue Catherine Thévenot, de l’université de Lausanne, a souligné l’importance de l’utilisation des doigts lorsque les
enfants apprennent à compter. Et lorsqu’ils commencent à lire, ils doivent d’abord être capables de déplacer leur regard aux bons endroits…
La proximité entre mouvement et cognition chez le toutpetit fait écho à la proposition du psychologue David Rosenbaum, de l’université de Californie à Riverside, dans un article publié en 2001 dans l’Annual Review of Psychology : les capacités intellectuelles et motrices sont apprises de la même manière. Selon lui, les deux types d’acquisition mobilisent des aires cérébrales similaires et impliquent une transition progressive d’un stade initial « déclaratif » – qui correspond au « comment faire » et sollicite le cortex frontal, le centre de contrôle et de planifcation – à un stade plus « procédural » – c’est le « faire » qui implique les aires sous corticales, notamment celles liées aux émotions, ainsi que le cervelet, dont on sait depuis peu qu’il intervient à la fois dans les mouvements et les émotions.
En d’autres termes, que l’on apprenne à compter ou à escalader, l’imagerie mentale et l’abstraction jouent un rôle crucial. Face à un problème arithmétique tel que 28 x 79 = … , ou face à une paroi de 10 mètres de haut, il est nécessaire de mobiliser son esprit pour effectuer la séquence de calculs et se souvenir des produits intermédiaires – 28 x 70 = 1 960 ; 28 x 9 = 252 ; 1 960 + 252 = –ou pour trouver les voies possibles et imaginer la séquence de mouvements nécessaires en vue d’atteindre le sommet. Malgré les différences apparentes entre le mouvement et la pensée,
Nous avons en nous une matrice cérébrale issue d’une très longue histoire de chasseur, où esprit et corps ont nécessairement fait alliance dans un but simple : survivre.
David Rosenbaum soutient que les activités motrices et cognitives partagent un ancrage perceptivo moteur commun : que ce soit pour grimper ou pour calculer, nous avons besoin de représentations mentales (d’images abstraites), de planifcation temporelle – de timing – et de coordination motrice.
Dans le même ordre d’idées, lors d’une conférence internationale, le neuroscientifque Daniel Wolpert, de l’université Columbia, à New York, a soulevé une question fondamentale : pourquoi les êtres humains et les animaux possèdentils un cerveau ? Est ce pour percevoir le monde ? Pour penser ? « Non. La seule et unique raison pour laquelle nous sommes dotés d’environ 1,4 kilogramme de matière grise et blanche est de produire des mouvements adaptatifs et complexes ! » L’un de ses arguments : le mouvement constitue notre seul moyen de communiquer. La parole, les gestes, l’écriture, les langues des signes… tous impliquent des contractions musculaires.
Qu’en estil du rôle des fonctions cognitives dites « supérieures » telles que la perception, la
mémoire ou encore l’attention ? Elles semblent aussi responsables de la gestion de nos mouvements futurs ! Tout notre cerveau serait dévoué à leur service. Nous mobiliserions nos facultés cognitives, même les plus abstraites comme la mémorisation, avec en ligne de mire nos actions à venir. En effet, d’un point de vue évolutif, se souvenir d’un moment précis lors d’une réunion de travail, dans un bureau mal éclairé par exemple, ou du goût d’une tarte aux pommes, ne présenterait aucun intérêt en soi… À moins que le rôle de ces souvenirs ne soit d’infuencer nos comportements ultérieurs tels que s’installer devant l’ordinateur pour rédiger le compte rendu de la réunion ou rassembler les ingrédients nécessaires à la confection de la tarte.
Les chasseurs du désert du Kalahari, en Afrique, pratiquent encore la « chasse à l’épuisement » : les hommes poursuivent leur proie à la course en s’orientant d’après ses traces et en les interprétant. C’est grâce à cette technique de chasse, pratiquée durant des millions d’années, qu’Homo aurait développé ses fonctions cognitives d’abstraction, de raisonnement, ainsi que sa faculté à lire et à interpréter des symboles.
Comment le cerveau contrôle til nos mouvements ? Il est indéniable que les recherches scientifques menées dans ce domaine à travers le monde depuis plusieurs décennies ont permis des avancées considérables – que nous ne pourrions pas toutes présenter ici. Cependant, nous connaissons aujourd’hui le rôle essentiel du cervelet et du cortex moteur dans les mouvements, ainsi que les processus cognitifs impliqués dans leur guidage et leur contrôle. Par exemple, Rich Masters, de l’université de Waikato, en NouvelleZélande, et son équipe ont démontré l’importance des instructions lors de l’apprentissage d’un lancer franc au basketball. Pour cela, les chercheurs ont donné à des participants deux modes d’emploi différents : le groupe dit « explicite » a reçu un ensemble de huit instructions précises – garder l’avantbras à la verticale avant de lancer le ballon, aligner l’ensemble épaulecoude poignet, lâcher la balle du bout des doigts, fouetter le poignet en fn de geste… Le groupe dit « analogique », quant à lui, n’avait qu’une seule consigne : « Lance le ballon comme si tu essayais de déposer un biscuit dans une boîte située en haut d’une étagère. »
Résultat : les seconds lanceurs ont appris plus rapidement que les premiers et ont été plus performants. L’apprentissage par analogie favorise l’exécution automatique du geste, c’està dire la mobilisation de procédures cognitives peu coûteuses en attention et diffcilement exprimables avec des mots, mais qui font appel à l’imagerie mentale et aux aires cérébrales motrices. Une méthode d’apprentissage qui protège aussi le geste contre les émotions, en particulier le stress.
Cette rencontre entre le corps et l’esprit découlerait d’une bizarrerie évolutive qui aurait été
Biographie
François Maquestiaux, professeur de psychologie cognitive, a récemment coécrit, avec le réalisateur Yannick Adam de Villiers, le documentaire intitulé « Open Brain » sur le cerveau des sportifs, produit par High Sea Production. Ce documentaire sera bientôt di usé sur Canal+.
provoquée par un changement de régime alimentaire il y a au moins 1,9 million d’années, lorsque le primate frugivore est devenu carnivore, probablement en raison de nouvelles conditions écologiques. C’est la thèse avancée par le philosophe Baptiste Morizot, de l’université d’AixMarseille, dans son livre Les Diplomates. Cohabiter avec les loups sur une autre carte du vivant. Pour étayer son idée, le philosophe s’appuie sur une variété d’arguments ainsi que sur sa pratique du pistage d’animaux sauvages – il a suivi à la trace des loups, mais aussi des grizzlis de Yellowstone ! – et sur les techniques ancestrales de chasse.
Selon lui, dès lors que nos ancêtres du genre Homo ont cherché à inclure de la viande dans leur régime alimentaire, ils ont dû trouver des proies et les chasser. Or ils ne disposaient d’aucun outil pour tuer les animaux à distance – les arcs et les fèches sont apparus plus tard dans l’histoire de l’humanité, après l’émergence d’Homo sapiens. Le seul moyen pour nos ancêtres de s’approcher de leur butin était donc d’utiliser leur propre corps. Mais comment pouvaientils tuer des animaux plus rapides, plus puissants et capables de se défendre ?
Dans le documentaire Life of Mammals de la BBC, disponible sur YouTube, nous sommes témoins de la traque d’un grand koudou (un ongulé pesant environ 200 kilogrammes) pendant huit heures par des chasseurs du désert du Kalahari, en Afrique. Leur technique, appelée « chasse à l’épuisement » ou persistence hunting, est la plus ancienne de toutes : les hommes courent dans le désert et tentent de s’orienter en « lisant » les traces laissées par l’animal dans l’environnement. Ils ne voient pas leur proie, contrairement aux rapaces, qui peuvent la survoler ; ils ne la sentent pas, contrairement aux loups, qui ont un odorat surdéveloppé. Ils doivent uniquement compter sur leur « œil intérieur », c’està dire leur esprit.
Ainsi, à partir des informations fournies par une empreinte, par exemple, ils n’ont d’autres choix que de spéculer. Même si les traces au sol contiennent des données précieuses telles que la direction prise par l’animal ou son niveau de fatigue, il est nécessaire de les interpréter et de les faire parler. Pour cela, le chasseur émet des hypothèses, déduit ce qu’il devrait observer si elles étaient vérifées, puis les confronte à la réalité. Par exemple, s’il suppose que l’animal est fatigué, il devrait trouver des pas de taille réduite…
Cette logique en trois étapes – abduction ou formulation d’une hypothèse, déduction des
conséquences possibles et induction ou recherche d’arguments empiriques en accord avec l’hypothèse – constitue le fondement de la recherche scientifque et… de la pensée abstraite. Ainsi, c’est grâce à la pratique de la chasse à l’épuisement, sur des millions d’années, qu’Homo aurait développé ses fonctions cognitives d’abstraction, de raisonnement, ainsi que sa faculté à lire et à interpréter des symboles. Or la chasse est aussi une activité corporelle très physique !
Plusieurs résultats scientifques récents sur le fonctionnement cognitif et l’intelligence soutiennent cette idée. Par exemple, Olivier Houdé et Grégoire Borst, à l’université Paris Cité, ont découvert que la « résistance cognitive », c’estàdire la capacité du cerveau à inhiber les intuitions, les premières impressions et, plus généralement, les automatismes cognitifs, constitue l’un des fondements de l’intelligence et de la réussite scolaire. Il en est de même dans le désert du Kalahari : le pisteur doit prendre le temps de réféchir et de ne pas laisser ses émotions et impulsions dominer une analyse plus objective et plus rationnelle de l’empreinte – il vaut mieux qu’il réféchisse avant d’agir. Sa vie en dépend.
APPRENDRE À SE METTRE À LA PLACE DE L’ANIMAL, OU LES PRÉMICES DE L’EMPATHIE
Par ailleurs, dans le documentaire de la BBC, il est également souligné que les chasseurs cherchent à adopter le point de vue de l’animal en se mettant à sa place. Ce changement de perspective a sans doute contribué au développement de nos capacités d’empathie et de notre théorie de l’esprit, qui nous permettent de comprendre les états mentaux et intentions d’autrui, qu’il s’agisse de nos semblables ou des animaux. Revenons à l’alliance entre le corps et le cerveau. Selon Baptiste Morizot, notre développement cérébral et cognitif ne serait pas le résultat d’une compensation de nos faibles capacités athlétiques – certes, nos ancêtres couraient moins vite et étaient moins forts que la plupart de leurs proies. Ce serait radicalement l’opposé : des aptitudes physiques supérieures – grâce à la chasse – auraient favorisé l’évolution des facultés cognitives d’ Homo sapiens. En particulier, l’endurance : nos ancêtres sont devenus très résistants à l’effort physique, capables de courir pendant plusieurs heures d’afflée, comme les chasseurs du Kalahari ou les Indiens tarahumaras, au Mexique. Ils auraient alors progressivement perdu leur fourrure afn de mieux réguler leur température corporelle pendant la chasse à l’épuisement. D’ailleurs, dans le documentaire de la BBC, c’est grâce à cette alliance entre un
Quelles que soient les raisons de l’apparition de la sédentarité dans l’histoire de l’humanité, celle-ci n’a jamais été aussi préoccupante qu’aujourd’hui, à l’ère des écrans, des médias et réseaux sociaux. Selon le dernier sondage OpinionWay pour l’Institut national du sommeil et de la vigilance (INSV) 2024, plus de 80 % des Français, qu’ils soient physiquement actifs ou non, mènent une vie sédentaire, dont 50 % de manière significative : ils restent assis plus de sept heures par jour.
Il est important de ne pas confondre la sédentarité avec l’inactivité physique, comme le souligne Martine Duclos, présidente de l’Observatoire national de l’activité physique et de la sédentarité (Onaps). La sédentarité est une « situation d’éveil, en position assise ou allongée, caractérisée par une dépense énergétique proche de celle du repos ». Ainsi, il est possible d’être physiquement actif, mais sédentaire : plus d’un Français sur deux pratiquant plus de cent cinquante minutes d’activité sportive par semaine présente un niveau élevé de sédentarité. L’une des principales causes : le temps passé devant un écran, qui représente 88 % des moments où l’on reste assis… Or, tout comme l’inactivité physique, la sédentarité accroît le risque de développer de nombreuses maladies – obésité, diabète, troubles métaboliques, maladies cardiovasculaires, arthrose, cancers… – et diminue les performances cognitives et intellectuelles, d’autant plus avec l’âge. L’inactivité et la sédentarité sont donc deux priorités de santé publique. Voici quelques conseils à suivre si l’on se retrouve contraint de rester assis pendant de longues périodes, par exemple au bureau, devant son ordinateur : il est recommandé de se lever et de marcher quelques minutes chaque heure, que ce soit pour se rendre aux toilettes, se faire un café, sortir prendre l’air ou même passer un appel téléphonique.
corps endurant presque nu et un cerveau capable de voir l’invisible que les hommes du Kalahari parviennent à retrouver le grand koudou qui, lui, n’a pas notre faculté de thermorégulation ni la possibilité de transporter de l’eau. Exténué après huit heures de traque, en état d’hyperthermie, l’animal s’est effondré.
L’ENDURANCE, FONDEMENT DE NOTRE INTELLIGENCE
Sur l’échelle du temps humain, la sédentarisation et l’agriculture ne représentent qu’une période très brève, seulement cinq millièmes… Nous avons donc en nous une matrice cérébrale et cognitive issue d’une très longue histoire de chasseur, où esprit et corps ont nécessairement fait alliance dans un but simple : survivre. Notre besoin de bouger, et ses bienfaits sur notre santé cognitive, pourrait donc provenir de ce passé. Que faire aujourd’hui en cette période de
sédentarisation excessive, en grande partie liée aux écrans ? En l’espace de plusieurs millions d’années, par exaptation, c’està dire en détournant peu à peu une fonction de son usage original, nos ancêtres coureurs auraient investi leur puissance cognitive non plus dans le pistage et la chasse, mais dans les mathématiques, la musique, les arts, les technologies… De la même manière, nous avons aussi probablement détourné nos aptitudes athlétiques de chasseur – l’endurance, le lancer de projectile… – dans nos activités physiques et sportives. Alors, lorsque nos modes de vie sédentaires menacent l’alliance entre corps et esprit, Homo sapiens vacille. Dans un sursaut, il enfle ses baskets, un short et un t shirt et, presque nu également, part courir ou taper dans la balle avec sa raquette ! Réjouissonsnous du retour des « chasseurs nus » en ville et proftons des JO pour nous motiver à bouger. £
Bibliographie
B. Morizot, Les Diplomates. Cohabiter avec les loups sur une autre carte du vivant, Wildproject, 2016
D. Rosenbaum et al., Acquisition of intellectual and perceptual-motor skills, Annual Review of Psychology, 2001
ENTRAÎNEUR DE L’ÉQUIPE DE FRANCE FÉMININE DE HANDBALL
PSYCHOLOGUE DE L’ÉQUIPE DE FRANCE FÉMININE DE HANDBALL
Olivier Krumbholz était joueur de handball au plus haut niveau avant d’embrasser une carrière d’entraîneur et de prendre en charge l’équipe de France féminine de handball en 1998. Finissant régulièrement au pied de la plus haute marche du podium jusqu’alors, le groupe remporte son premier titre majeur en 2003 : le championnat du monde. Mais l’exploit tarde à se reproduire… Olivier Krumbholz est écarté de l’équipe en 2013, puis réintégré dans le coaching des Bleues en 2016, avec un préparateur mental, Richard Ouvrard. Les victoires s’enchaînent : l’équipe devient à nouveau championne du monde en 2017, puis championne d’Europe en 2018 et championne olympique en 2021. Toutefois, cette dernière épopée à Tokyo masque de nombreuses di cultés : les tensions sont palpables au sein du groupe. C’est à ce moment-là que Pascal Niggel, psychologue clinicien, est appelé dans le sta pour apporter un soutien psychologique aux joueuses et aux encadrants, ainsi que veiller à leur bien-être. En décembre 2023, vingt ans après le premier titre, l’équipe est de nouveau championne du monde et accroche une troisième étoile à son maillot. Cette année, pour les Jeux olympiques 2024 à Paris, elle est, pour la première fois, favorite lors d’une grande compétition.
Nous sommes en avril 2024 : la pression liée à cet enjeu majeur doit être considérable. Avez-vous peur ou hâte ? Olivier Krumbholz : Ni l’un ni l’autre. Nous n’avons jamais peur, car nous nous préparons toujours de manière rigoureuse pour les grands événements, et nous ne sommes pas impatients, car il nous reste encore beaucoup de travail à accomplir afn d’être prêts. Cependant, il est vrai que depuis plusieurs mois, nous discutons tous ensemble de l’importance de ces JO : toutes les joueuses, quel que soit leur âge ou leur expérience dans le sport de haut niveau, savent que c’est inévitablement la compétition la plus importante de leur vie. Remporter deux médailles d’or olympiques consécutives est extrêmement rare dans une carrière
« LE COACHING PARTICIPATIF EST LA CLÉ DU SUCCÈS »
d’athlète, en particulier dans les sports collectifs. Alors à l’approche de l’événement, la pression augmente toujours, mais nous serons prêts non seulement physiquement et tactiquement, mais aussi mentalement, pour être les plus performants.
Le mental joue-t-il un rôle important dans le sport de haut niveau ?
O. K. : Depuis les JO de Tokyo en 2021, où notre équipe a rencontré beaucoup de diffcultés, nous accordons plus d’attention au suivi personnalisé des joueuses en veillant, certes, à leur état physique, mais aussi à leur sommeil, à leur alimentation et à leur bien-être général. Ainsi, je pense au contraire que cette pression est un atout pour notre équipe, d’autant plus que nous jouons à domicile. Le stress devrait les galvaniser, les surmotiver avec une intensifcation de l’agressivité et de l’engagement sur le terrain. Et la performance individuelle nourrit la performance collective.
Pascal Niggel : La clé de la réussite au plus haut niveau, c’est le mental. Il est à la fois individuel et collectif. Individuel, car nous discutons beaucoup avec les joueuses afn qu’elles se sentent bien au sein du groupe. Mais il est aussi collectif, et c’est ce qui constitue notre force actuelle. Notre équipe est à la fois homogène et hétérogène. Homogène, parce que très soudée, et hétérogène, parce que les flles qui ont une grande expérience du haut niveau transmettent leur savoir aux plus novices, qui apportent en retour de l’originalité et de la nouveauté dans le jeu et les stratégies. Olivier a ainsi développé un « coaching participatif » qui se révèle très bénéfque.
Qu’entendez-vous par « coaching participatif » ?
P. N. : J’ai travaillé dans de nombreux staffs sportifs avant de rejoindre l’équipe de France féminine et j’ai rarement observé cela : ici, rien n’est cloisonné. Tout le monde – joueuses et encadrants (entraîneurs, kinés, médecins… voir l’encadré page 53) –
Il s’agit de sortir de la verticalité
– « je suis le coach, ou le capitaine de l’équipe, donc je vous donne l’ordre d’appliquer cette stratégie sur le terrain » – pour passer à l’horizontalité, où tout le monde a le même poids dans les réflexions et les décisions.
Olivier Krumbholz
participe au coaching, exprime ses envies, ses craintes et ses idées. Nous abordons le concept d’intelligence émotionnelle lors de nos séances de réfexion et de travail depuis les derniers Mondiaux fn décembre. Olivier souhaite que nous comprenions, acceptions et maîtrisions nos émotions, comme le stress ou l’excitation, face à des situations importantes, que ce soit de jeu, sur le terrain, ou lors de compétitions majeures comme les JO. À quoi peut me servir cette émotion ? Comment l’utiliser pour qu’elle soit bénéfque au groupe ? La colère par exemple peut être acceptée et transformée en agressivité sur le terrain –une aptitude nécessaire pour jouer au handball. Toute la préparation est collective et participative. Nous avons tous développé nos compétences en communication, en gestion des émotions et en empathie.
O. K. : Le problème, c’est que la plupart des sportifs (de tous niveaux) ont du mal à comprendre le concept de coaching participatif ! Il s’agit de sortir de la verticalité – « je suis le coach, ou le capitaine de l’équipe, donc je vous donne l’ordre d’appliquer cette stratégie sur le terrain » –pour passer à l’horizontalité, où tout le monde a le même poids dans les réfexions et les décisions. Plus rien ne fonctionne selon un mode vertical, ni le sport, ni la famille, ni l’entreprise. Or, certains athlètes ont tendance à dépasser leur rôle assigné dans le coaching participatif pour prendre le pouvoir… Le groupe devient alors ce que j’appelle une « république des joueurs ». Cela entraîne une confrontation entre l’expertise du staff ou des entraîneurs en matière de stratégies, et les ressentis et expériences des joueurs. Alors que les
deux devraient travailler en harmonie pour obtenir les meilleurs résultats sur le terrain. Dans le sport, on a tendance à penser que la solution la plus effcace et la plus simple, dès que l’on obtient deux ou trois résultats négatifs, est de changer l’encadrement. C’est ce qui s’est passé en 2013. Aujourd’hui, nous avons réussi à nous affranchir de tout cela. Le coaching participatif peut nous faire gagner.
Pourquoi certains athlètes n’adhèrent-ils pas au coaching participatif ?
O. K. : Ces joueurs, que je qualife d’« égotistes », n’acceptent pas un échec de l’équipe ou même une erreur qu’ils commettraient en jouant. Ils cherchent systématiquement des causes externes à eux-mêmes, rejetant la responsabilité – si tant est qu’il y en ait une ! – sur les « incompétents » qui les entourent, à savoir les entraîneurs, le staff, les autres joueurs, les kinés… J’ai souvent entendu des remarques telles que « il ne comprend rien à ce qu’est un entraînement » ou « il ne sait pas gérer une équipe »… Ils sont incapables de se mettre à la place des autres et sortent du cadre de leurs compétences dans l’équipe. Ils n’apprennent pas de leurs erreurs et ne les supportent pas, tout comme ils rejettent les remarques de leurs encadrants. « Je ne tolère pas que tu me fasses jouer comme ça, car je ne suis pas suffsamment mis en valeur… » De plus, leur ego les pousse à tout vouloir contrôler. Ils représentent un danger pour le groupe et ses performances, quel que soit le domaine, d’ailleurs. Mais dans le sport, en particulier de haut niveau, ce type de personnalité est très fréquent… Or un groupe devient homogène quand chaque protagoniste passe de l’égocentrisme à l’allocentrisme. Sinon, il fnit par exploser. Après les JO de Tokyo, malgré un résultat exceptionnel, nous étions au bord de la rupture. Le travail de Pascal consiste à faire accepter le coaching participatif à tous les membres de l’équipe, afn de « réveiller » ceux qui sont trop
passifs et qui n’expriment pas suffsamment leurs idées ou envies – qui sont souvent très intéressantes ! – et d’« endormir » les égotistes. C’est un équilibre délicat et, chaque jour, nous avons des séances de travail pour que chacun trouve sa place. Résultat : la confance en soi et l’estime de soi augmentent. Nous sommes dans une dynamique émotionnelle positive et, avec notre excellent résultat aux Mondiaux en décembre 2023, nous envisageons la suite sereinement.
Votre objectif est-il de remporter la médaille d’or aux JO ? Le mental ne va pas su re. Observez-vous une montée en puissance des aptitudes physiques et cognitives des Bleues au fil d’une préparation ?
O. K. : Toutes les joueuses sont très compétentes dans leur domaine – sur le terrain, dans le jeu, les stratégies et les tactiques – et possèdent d’excellentes capacités physiques sur le plan de l’endurance, de la force, de l’équilibre, de la coordination, de la souplesse… Car elles évoluent au plus haut niveau et c’est en partie pour ces raisons qu’elles sont en sélection pour l’équipe de France. Elles gèrent parfaitement leur routine physique quotidienne, connaissent leur corps et ses limites, et savent en prendre soin (avec l’aide des kinésithérapeutes). Mais elles ont aussi de très bonnes facultés cognitives, de raisonnement, de prise de décision, de vitesse d’exécution et d’inhibition. Le handball est un sport complexe qui exige de décider d’une direction, d’une action, d’une passe, d’un arrêt (pour les gardiens), au dernier moment, en quelques secondes, voire de changer de stratégie motrice pour une meilleure solution… Leur comportement moteur est contrôlé par le cognitif et j’appelle cela la « fulgurance décisionnelle ». Et oui, nous constatons une amélioration de la fulgurance décisionnelle des flles au cours d’une préparation et d’une compétition. Grâce aux entraînements physiques et aux discussions entre le staff et elles, leur
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vitesse de prise de décision s’améliore : le « moteur » nourrit également leurs aptitudes cognitives. Et nous le voyons bien sur le terrain : le jeu est de plus en plus rapide. Le mental – les émotions et le cognitif –, c’est la dernière strate qui permet de passer de la « compétence » à la « compétition ».
Qu’est-ce qui permet d’atteindre cette fulgurance décisionnelle ?
P. N. : La répétition des exercices et des stratégies, ainsi qu’une bonne intelligence émotionnelle, sont des facteurs clés. Nous savons plutôt ce qui peut l’entraver : des problèmes de confiance en soi ou en l’équipe. Lorsqu’une joueuse est stressée ou commence à trop analyser ou juger, à réféchir de façon excessive aux conséquences de ses actes, parce qu’elle doute ou a peur de commettre des erreurs (sur le terrain notamment), sa fulgurance décisionnelle diminue. Nous leur répétons constamment qu’elles sont libres d’agir selon leur instinct au moment opportun, en se déchargeant du poids des responsabilités et de la crainte de l’échec. Comme le disait Nelson Mandela : « Je ne perds jamais, soit je gagne, soit j’apprends. » La représentation que les athlètes se font souvent de l’échec et
de ses conséquences contraint leur fulgurance décisionnelle. Malheureusement, dans le sport, on encourage souvent les jeunes à essayer – « Allez vas-y, lâche-toi ! » –, mais si jamais ils échouent, on les punit. Ce n’est pas une bonne stratégie cognitive pour améliorer les performances individuelles et collectives. Car au très haut niveau, pour être les plus forts, il est nécessaire de briser la courbe de l’expérience, du jeu bien rodé, afn de surpasser les adversaires.
Voilà pourquoi vous avez réussi à battre les Norvégiennes lors des derniers Mondiaux en décembre, alors qu’elles étaient favorites ?
P. N. : Les Norvégiennes et les Danoises se préparent à nous affronter en passant des heures à regarder des vidéos de notre jeu pour anticiper au mieux les actions et tirs préférentiels de chaque joueuse et les stratégies de notre équipe. Lorsque la compétition est vraiment acharnée, si nous ne sommes pas capables de créer quelque chose de nouveau dans notre jeu, c’est-à-dire de prendre le risque de franchir une étape supplémentaire dans l’inconnu, nous ne serons pas les meilleurs sur le terrain. Oui, face aux Norvégiennes, les flles ont réussi à
sortir de leur zone de confort, à passer du prévisible à l’imprévisible. Même au maximum de leurs compétences physiques et tactiques, elles ont su ouvrir un ou deux petits tiroirs mentaux pour créer la surprise et faire la différence. Notre groupe a maintenant compris cela, et nous pensons que la fulgurance décisionnelle ne va faire que progresser jusqu’au coup de siffet fnal de la prochaine compétition.
O. K. : Bien sûr, la fulgurance décisionnelle ne garantit jamais la réussite d’une action ou la victoire, mais elle y contribue grandement. Sur un terrain de sport, il est possible de se tromper, mais il ne faut jamais hésiter. C’est la base. Peu importe le résultat. Dans le sport de haut niveau, on est obnubilé par le résultat. Nous, avec le coaching participatif, nous appliquons un vieil adage : « Le plus important n’est pas le résultat, mais le parcours pour y parvenir. » Demain, après-demain, et les jours suivants, nous continuerons à travailler. Les joueuses apprennent ainsi à connaître leurs compétences propres et celles du groupe, ainsi que leurs limites. Nous aurons autant de tendresse pour les campagnes que nous n’avons pas gagnées que pour celles où nous serons sortis vainqueurs. L’essentiel, c’est de participer, avec empathie et bienveillance.
£ Les absents
Ils font du sport lorsqu’ils y pensent ou ont le temps, et disparaissent quand cela devient important ou compétitif. À haut niveau, il n’y en a pas.
£ Les laborieux
Ils font du sport avec plaisir et s’investissent beaucoup, mais n’y consacrent pas su samment de temps ou d’e ort pour bien acquérir toutes les compétences physiques, techniques ou tactiques. À haut niveau, il n’y en a pas.
£ Les artisans
Ils font beaucoup de sport, sont très investis et maîtrisent leurs compétences, tout en étant souvent e caces et performants. Ils portent beaucoup le jeu sur leurs épaules.
£ Les artistes Ils sont non seulement très compétents dans leur domaine, mais aussi très imprévisibles, très créatifs, ce qui amène beaucoup de nouveauté dans le jeu. En revanche, ils sont moins responsables des stratégies et moins travailleurs que les artisans. À haut niveau, dans une équipe, il y a environ 20 % d’artistes et 80 % d’artisans.
Sur un terrain de sport, il est possible de se tromper, mais il ne faut jamais hésiter.
C’est la base. Peu importe le résultat. Cette fulgurance décisionnelle grandit chez les joueuses au fil de la préparation, notammentOlivier Krumbholz
Un conseil que l’on peut donner à toute personne qui pense ne pas être douée en sport et qui n’essaie donc pas de s’y mettre… D’autant que le sport peut fatiguer physiquement, mais aussi mentalement. Pour les joueuses et vous, cela ne doit pas être si facile tous les jours ?
O. K. : Effectivement, il y a de la souffrance dans le sport, surtout à haut niveau. Beaucoup de douleurs physiques, car le handball est un sport avec de nombreux contacts assez durs. On se fait mal, on prend des coups, on se blesse aussi. Presque toutes les flles ont des pathologies chroniques qui les fatiguent au quotidien : tendinites, périostites [infammations des tendons et des tibias, ndlr], chondropathies [dégénérescences des cartilages des genoux, ndlr]… Elles jouent souvent avec une
douleur. Et quand elles se lèvent le matin, elles ont toujours mal et doivent s’échauffer longuement avant de s’entraîner.
L’autre forme de souffrance est d’ordre privé. Il leur est diffcile de construire une vie personnelle, d’avoir du temps pour rencontrer un partenaire, fonder une famille, se faire des amis ; c’est un sacrifce personnel qui commence souvent dès l’adolescence. Elles ont des emplois du temps de folie, avec de nombreux déplacements, souvent dans de mauvaises conditions. C’est l’un des problèmes du sport de haut niveau lorsqu’il n’est pas irrigué par des fots d’argent comme d’autres… Certes, elles aiment être sous tension et ressentent une forme de libération jubilatoire lorsqu’elles jouent. Elles prennent énormément de plaisir à pratiquer le handball. C’est leur principale motivation.
Justement, qu’est-ce qui leur permet de rester motivées à ce point-là, sur le long terme et malgré les sou rances ?
O. K. : La motivation a trois carburants : ambition, passion et convic-
tion. Je vous ai parlé des « égotistes » précédemment, qui ont un narcissisme surdéveloppé, mais en réalité, tous les athlètes de haut niveau ont une grande ambition, souvent nourrie par un fort ego. C’est sur ce point souvent qu’ils se distinguent des autres sportifs. Ils aiment être performants et gagner, ce qui les motive à pratiquer. Dans notre équipe, avec le coaching participatif, nous partageons tous le même objectif : gagner les prochains JO. Cette ambition est étroitement couplée au deuxième moteur de la motivation, à savoir la passion. Les Bleues prennent beaucoup de plaisir à jouer, énormément même. Une personne lambda qui court régulièrement et pour le plaisir est également passionnée – c’est ce qui la stimule en général –, mais elle aura moins d’ambition et de plaisir qu’un marathonien professionnel. Et si, dans notre équipe, quelques joueuses semblent moins ambitieuses que d’autres, par exemple parce qu’elles sont en début de carrière, nous travaillons également sur le sujet avec Pascal afn que le collectif reste soudé avec le même
objectif – qui est très ambitieux ! C’est un moteur de la motivation et donc de la performance.
Et le dernier moteur, la conviction : cela signifie que vous êtes persuadés de gagner (les prochains JO) ?
P. N. : Non, nous avons un projet commun, la victoire, quelle que soit la compétition, mais cela reste un rêve, une source de motivation. Et chacun dans l’équipe voit les choses un peu différemment selon l’avancement de sa carrière. La conviction, c’est plutôt de la détermination nourrie par cet objectif partagé. En d’autres termes, les joueuses sont convaincues d’être dans le bon environnement – la bonne équipe – pour satisfaire leur ambition. Et les encadrants également ! Si ce n’était pas le cas, nous changerions quelque chose dans les rouages du groupe pour que leur conviction soit maximale. C’est aussi du coaching participatif.
L’équipe de France représente souvent une parenthèse dans la carrière des joueuses, car elles évoluent toute l’année dans leurs clubs. Cela rend le
£ 20 joueuses durant la préparation, 17 pour les JO de Paris
£ 1 entraîneur : Olivier Krumbholz
£ 1 adjoint : Sébastien Gardillou
£ 1 préparateur physique : Pierre Terzi
£ 1 médecin : Cindy Conort
£ 3 kinésithérapeutes : Cesare Cocuzza, Pierre Gillet et Célestin Dailly
£ 2 analystes vidéo : Christophe Caillabet et David Burguin
£ 1 entraîneuse des gardiennes : Amandine Leynaud
£ 1 psychologue : Pascal Niggel (le préparateur mental est parti)
£ 1 responsable management, communication et relation médias : Diane Prouhet
£ 1 directeur technique national : Pascal Bourgeais
£ 1 chef de délégation : Rémy Lévy
plaisir d’autant plus intense, car elles savent qu’elles arrivent au sommet de leur sport avec l’objectif commun de gagner. Leur motivation est à son maximum. De plus, il y a une histoire derrière les équipes de France de handball qui nourrit cette ambition, car les hommes ont déjà atteint et même dépassé tout ce dont nous venons de parler et visent « encore » la seconde médaille d’or olympique d’afflée cette année, ce qui leur ferait un deuxième doublet olympique… Si on améliore constamment les facteurs physiques, cognitifs et émotionnels sur lesquels le handball repose, on peut toujours faire mieux.
E ectivement, pour se motiver à faire du sport, il est préférable de prendre du plaisir donc de trouver l’activité qui nous plaît. Mais ce que vous décrivez chez les athlètes de haut niveau, est-ce une forme d’addiction ? Après le titre, certains d’entre eux
ressentent un « manque » ou tombent en dépression lorsque tout s’arrête…
P. N. : Oui, cela peut arriver. Cependant, il ne faut pas sous-estimer la capacité de ces jeunes femmes, lorsqu’elles sont calmes et en confance dans leur équipe, à analyser les choses et à se juger ellesmêmes de manière cohérente. Ce sont des personnes normales qui évoluent dans un monde anormal, celui du sport de haut niveau, qui est très exigeant. Elles sont beaucoup sous pression, et le rôle des encadrants est de les aider à gérer leurs émotions pour éviter qu’elles ne s’effondrent. Aujourd’hui, elles savent jusqu’où elles sont capables d’aller du point de vue des performances, mais aussi mentalement, ainsi que les aspects qui leur restent à travailler pour réussir au mieux à chaque compétition. De plus, elles ne sont jamais seules. Comme dans tous les sports d’équipe, le soutien social et le sentiment d’appartenance à un groupe apportent des émotions positives bénéfques et apaisantes. Tout est réuni pour un exploit !
O. K. : Les joueuses, de la même manière que nous, prennent énormément de plaisir dans l’équipe, malgré les souffrances et les sacrifces, tout en sachant que la victoire est un gros bonus pour la confance en soi, pour l’argent (bien sûr) et pour la carrière. Mais en cas de défaite, nous savons qu’il y aura d’autres occasions. L’équipe souffrait beaucoup mentalement après les derniers JO, c’était même « schizophrénique », selon moi. Alors, nous avons avancé, continué à travailler, changé des stratégies et développé le coaching participatif avec de la bienveillance et de l’empathie. C’est comme dans n’importe quel métier, parfois on échoue, parfois on réussit. Autant le faire avec plaisir [les JO à Paris sont la dernière compétition d’Olivier à la tête de l’équipe de France féminine de handball puisqu’il prend ensuite sa retraite, ndlr] ! £
Propos recueillis par Bénédicte Salthun-Lassalle
p. 68 L’envers du développement personnel p. 72 Raison et déraison
Professeur de psychologie au collège Saint-Michel et collaborateur scientifique à l’université de Fribourg, en Suisse.
Nous croyons aux tests de personnalité parce qu’ils nous proposent de nous classer dans un groupe de personnes qui nous ressemblent. Ce qui nous aide à mieux nous accepter.
L«’ennéagramme m’a permis de découvrir comment je fonctionnais et comment fonctionnent les autres. J’ai enfn pu cesser de me juger et m’accepter comme je suis. » Ce témoignage lu dans un magazine de développement personnel a de quoi interpeller. En effet, l’ennéagramme, qui propose de répartir les personnalités selon neuf types (le perfectionniste, l’altruiste…) n’a pas reçu de réelle validation scientifque à ce jour. Des études ont bien été menées, mais sans parvenir à des résultats concluants ni à un consensus. Autrement dit, on peut sérieusement douter que ce système aide à identifer de véritables différences de fonctionnement pérennes entre les gens, comme le ferait un test de personnalité valide tel que le modèle dit « des
Big Five », qui repose sur des décennies de recherches internationales en psychologie scientifque. La première partie du témoignage ci-dessus relève donc certainement d’une illusion. Comment se faitil dès lors qu’il produise un effet bénéfque sur le plan de l’acceptation de soi ?
PEU IMPORTE QUE LE TEST DISE VRAI
À bien y regarder, une grande part des offres de développement personnel (payantes, bien sûr, mais c’est un pléonasme), livres, sites internet, stages, ateliers proposent des outils en vue d’une meilleure connaissance de soi. La célèbre maxime socratique « Connais-toi toimême » fait apparemment encore recette, après des millénaires. On s’attendrait donc à des outils permettant vraiment de mieux se connaître. Or, que ce soit
l’ennéagramme ou le thème astrologique, beaucoup de ces systèmes ne reposent que sur les intuitions de leurs concepteurs ou de traditions qui se perdent dans la nuit des temps. En clair, leur validité fait défaut : les portraits qu’ils livrent ne correspondent pas à une réalité mesurable. Le terme de « validité » est lui-même polysémique : en premier lieu, un test est valide s’il mesure ce qu’il est censé mesurer. Par exemple, un test d’intelligence ne pourrait pas s’appuyer uniquement sur la résolution de problèmes de logique, car il ne mesurerait alors pas vraiment l’intelligence dans son ensemble. À cela s’ajoute la validité prédictive. Si un test affrme que vous êtes altruiste, cela devrait prédire que vous allez vous comporter de la sorte dans votre vie quotidienne. Un test non valide présente ainsi de forts risques
de ne rien dire de pertinent sur vous et sur votre fonctionnement. Comment dès lors pourrait-il vous aider ? Contre toute attente, il semble que cela soit le cas, vu le succès commercial de ces approches, succès qui ne se dément pas année après année. Et le monde professionnel n’est pas en reste, avec pléthore de méthodes dont raffolent les responsables des ressources humaines pour cerner la personnalité des futurs employés (Insights Discovery, Myers Briggs Type Indicator…).
C’est que nous, les êtres humains, aspirons à en savoir plus sur nous-mêmes et les autres, à lever un coin du voile qui recouvre notre fonctionnement. Comme le souligne Simine Vazire, professeuse de psychologie à l’université de Melbourne et autrice de nombreux articles à ce propos, nous avons de l’appétence pour toute
information qui pourrait nous aider à mieux nous connaître. D’où notre intérêt pour les tests de personnalité, avec le secret espoir qu’ils nous en apprennent plus sur qui nous sommes.
»
En mettant des mots (mêmes inexacts et trop généraux) sur notre fonctionnement, les typologies offrent un autre bénéfce : elles nous inscrivent dans des catégories où nous ne sommes par défnition pas seuls. Notre besoin d’appartenance s’en trouve satisfait. Mieux encore, notre manière d’être se voit « normalisée » : nous ne sommes pas des individus bizarres, anormaux, mais bien des personnes comme les autres, avec des qualités. Cet effet d’inclusion et de normalisation explique sans doute
une part du succès d’étiquettes largement plébiscitées dans le grand public. Pensons par exemple au concept d’hypersensibilité, qui a connu une diffusion spectaculaire ces dernières années alors que le travail de validation scientifque est encore en cours à l’heure actuelle : un consensus sur la défnition, les critères d’inclusion et les moyens de la mesurer n’est pas encore défnitivement établi. Pourtant, il existe des cabinets de psychologues spécialisés dans l’accompagnement des personnes catégorisées hypersensibles. Avec un succès certain si l’on en croit les témoignages de la clientèle… Qu’il est bon de se savoir reconnu dans une spécifcité partagée avec d’autres ! Cette reconnaissance peut alors entraîner une acceptation de soi-même.
ÉCLAIRAGES L’envers du développement personnel
TESTS PSY : DES CASES SI CONFORTABLES…
C’est dans ce sens que va la seconde partie du témoignage cité au début de cette chronique : « J’ai enfn pu cesser de me juger et m’accepter comme je suis. » La clé serait donc l’acceptation de soi, peu importent les étiquettes utilisées. La personne qualifée de perfectionniste dans l’ennéagramme voit son (prétendu) fonctionnement reconnu et surtout considéré comme normal. Elle n’est pas seule dans ce cas et dans cette case, elle n’est pas excentrique. Idem pour celle qui entre dans la catégorie de l’hypersensibilité, peu importe ce que recoupe ce terme exactement. Alors qu’elle a souvent été jugée comme trop sensible, qu’elle avait honte d’avoir les émotions à feur de peau et la larme facile, voilà qu’elle est accueillie dans une grande famille, qu’elle n’est plus seule, voire que son fonctionnement atypique est reconnu comme une qualité à faire valoir et non plus comme un défaut à corriger. « L’hypersensibilité : un superpouvoir ! » ou « Faire de son hypersensibilité une force » sont des titres d’ouvrages existant éloquents à ce propos.
MIEUX S’ACCEPTER
Ne pas se considérer comme anormal et faire partie d’une famille. Ne plus juger son propre fonctionnement comme un défaut ou une maladie, mais l’accepter comme une particularité bienvenue et légitime. Serait-ce le principe actif des typologies de personnalité et des étiquettes diagnostiques à la mode, permettant d’expliquer les effets apaisants qu’elles entraînent chez leurs utilisateurs ? Les données scientifques semblent aller en ce sens, mettant en œuvre un mécanisme connu sous le nom d’« autocompassion ».
L’attitude autocompassionnelle, d’après la psychologue et chercheuse Kristin Neff, qui a ouvert la voie aux travaux sur ce sujet il y a une quinzaine d’années, s’inscrit dans trois dimensions : l’accueil en pleine conscience de ce que l’on vit, notamment les émotions diffciles et la souffrance (rappelons que « compassion » vient du latin cumpatior, soit « souffrir avec »). Plutôt que de juger son vécu et tenter de le transformer, il s’agit ici de l’accepter, de lui faire une place en soi ; ensuite, considérer qu’il fait partie intégrante de
Ne pas se considérer comme anormal et faire partie d’une famille. Ne plus juger son propre fonctionnement comme un défaut ou une maladie. Tel serait le principe actif des typologies de personnalité et des étiquettes diagnostiques à la mode.
l’expérience humaine, que nous avons en partage avec d’autres : nous ne sommes pas seuls à nous sentir isolés et différents ; enfn, la bienveillance, c’est-à-dire l’invitation à nous parler à nous-mêmes comme on le ferait avec un ami. Plusieurs métaanalyses publiées ces dernières années établissent les effets bénéfques de cette attitude dans différents cadres, allant de la santé à l’épanouissement amoureux et professionnel.
Pouvoir mettre des mots et des étiquettes sur notre fonctionnement entraîne sa normalisation et, partant, son acceptation. On se montre moins critique envers soi-même, donc davantage bienveillant. Un thème astrologique ou une typologie telle que l’ennéagramme, en activant le levier de l’autocompassion, peuvent se révéler bienfaisants.
Ainsi, même une approche non validée scientifquement, voire totalement farfelue, peut faire du bien si elle encourage l’autocompassion (bien entendu, l’effet bénéfque retiré ne doit en aucun cas être considéré comme une preuve du bienfondé ou de la validité de l’approche utilisée). Mais alors, pourquoi ne pas faire un pas de plus : renoncer à ces outils indirects pour se consacrer pleinement au développement de l’autocompassion ? Pourquoi ne pas emprunter la voie royale de l’acceptation de soi plutôt que les détours de la pseudo-connaissance de soi ? £
Bibliographie
J. N. Hook et al., The Enneagram : A systematic review of the literature and directions for future research, J. Clin. Psychol., 2021
A. Wilson et al., E ectiveness of self-compassion related therapies : A systematic review and meta-analysis, Mindfulness, 2019
S. Vazire et E. Carlson, Self-knowledge of personality : Do people know themselves ?, Social and Personality Psychology Compass, 2010
• Le magazine (11 numéros / an)
Psychologue cognitiviste à l’université de Salzbourg, en Autriche.
Connaissez-vous le dicton « le petit déjeuner est le repas le plus important de la journée » ? Il s’agit en fait d’un slogan publicitaire pour les petits déjeuners Kellogg’s, datant de 1919… À l’opposé, une tendance plus récente consiste à pratiquer le jeûne intermittent : il est question de s’abstenir de manger tout au long d’une plage horaire déterminée. Souvent, entre 21 heures et 13 heures le lendemain, ce qui amène à faire l’impasse sur le petit déjeuner. De nombreux effets sur la santé sont supposés en résulter, comme une meilleure sensibilité à l’insuline (affectée dans le diabète de type II) ou une durée de vie plus longue – selon des études menées chez l’animal, uniquement. Qu’y a-t-il de vrai et de faux là-dedans ? Faut-il vraiment petit-déjeuner pour être en forme et performant physiquement et intellectuellement ? Ou au contraire s’en passer pour jouir d’une meilleure santé ?
Des scientifques ont voulu savoir si le fait de sauter le petit déjeuner entraînait ou non une baisse des performances cognitives – notamment chez les élèves qui doivent rester concentrés depuis tôt le matin. En 2016, des psychologues de l’université de Leeds, au Royaume-Uni, ont regroupé 45 études
comparant leurs performances avec et sans petit déjeuner. Résultat : enfants et adolescents ont plus de mal à se concentrer sans petit déjeuner. Ils ont alors des problèmes d’attention, de mémoire et de capacités dites « exécutives » – par exemple pour contrôler leurs impulsions ou prendre des décisions. Mais ces effets étaient de courte durée et concernaient la plupart du temps des jeunes ayant de mauvaises habitudes alimentaires à la maison. Aussi, les expériences considérées n’étaient pas irréprochables sur le plan méthodologique (par exemple, certains échantillons n’étaient pas suffsants ou les enfants de 6 à 10 ans étaient surreprésentés). Sans compter que la majorité des expériences avaient lieu en laboratoire, et non en conditions réelles. Ce qui nécessite des recherches supplémentaires avant de pouvoir appliquer les résultats à la vie scolaire réelle.
Et chez les adultes aussi, un estomac vide affaiblit-il les capacités de réfexion ? Oui, répond une autre étude de synthèse publiée également en 2016. Les hommes et femmes qui ont avalé quelque chose en se levant bénéfcient de légers avantages en matière de mémorisation, toujours en matinée. En revanche, pas d’impact notable sur l’attention et les capacités exécutives.
Bibliographie
K. Adolphus et al.,
The e ects of breakfast and breakfast composition on cognition in children and adolescents : A systematic review, Advances in Nutrition, 2016
R. Galioto et M. B. Spitznagel, The e ects of breakfast and breakfast composition on cognition in adults, Advances in Nutrition, 2016.
M. P. Mattson, An evolutionary perspective on why food overconsumption impairs cognition, Trends in Cognitive Sciences, 2019.
Si on est habitué à petit-déjeuner, sauter ce repas peut provoquer au début des chutes de mémoire, mais le cerveau s’habitue ensuite.
Le type de petit déjeuner joue-t-il un rôle ? Malgré des tentatives pour établir des différences, rien de probant n’en a émergé. Pas de conclusion défnitive sur le fait que les œufs brouillés seraient meilleurs pour nos performances mentales que les focons de maïs sucrés ou des viennoiseries, donc.
Ainsi, globalement, et en dépit des réserves que l’on peut émettre sur les études réalisées à ce jour, il semblerait que le petit déjeuner apporte quelques avantages, du moins à court terme. L’explication qui vient immédiatement à l’esprit est que penser nécessite de l’énergie, une énergie que le cerveau tire principalement du glucose. Sans sa tartine de confture, le cerveau en est moins bien approvisionné. À moins qu’un autre effet s’en mêle : la plus grande partie des gens sont tout simplement habitués à prendre leur petit déjeuner… Si vous les en privez au nom de la science (pour mener une expérience en laboratoire), ils sont contrariés et de mauvaise humeur. Et l’envie de faire des efforts pour réaliser des tâches de concentration en prend un coup…
La popularité du jeûne intermittent viendrait appuyer cette hypothèse. En effet, les quelques inconvénients du ventre creux le matin s’estompent au bout de quelques jours, une fois qu’on a pris le pli. Comme tout changement d’habitude, il faut une période d’adaptation au cours de laquelle des effets secondaires tels que la distraction et les diffcultés de concentration peuvent se manifester. Notre histoire évolutive a toutefois été marquée par de longues périodes sans apport de nourriture, ce qui nous a notamment permis de brûler les graisses stockées. Grâce à cette source d’énergie alternative, notre cerveau est assuré d’en recevoir suffsamment, même si nous devons nous passer de nourriture pendant un certain temps. Si l’on est prêt à accepter un départ diffcile, il est donc probable que l’on puisse rester alerte de manière durable sans petit-déjeuner. À condition, bien sûr, d’absorber au total suffsamment de nutriments essentiels, et de façon équilibrée. £
p. 92 Sélection de livres p. 94 Le Troupeau aveugle : pourquoi n’agissons-nous pas pour le climat ?
PSYCHOLOGIE
Vous allez y arriver !
Ayelet Fishbach
Markus Haller, 2024, 338 pages, 25 €
Comment mener à bien les projets qui nous tiennent à cœur ? Vaste question, qui repose en grande partie sur notre capacité à nous motiver. Ayelet Fishbach, psychologue et professeuse de sciences du comportement à l’université de Chicago, livre ici de multiples réponses. Proposant une synthèse très documentée des études actuelles sur la psychologie de la motivation, son ouvrage s’articule autour de quatre règles d’or : choisir soi-même des objectifs adaptés ; maintenir sa motivation en évaluant régulièrement ses avancées et les résultats de ses e orts ; apprendre à jongler avec des objectifs di érents, voire concurrents, qu’il faudra hiérarchiser ; enfin, utiliser le soutien social (s’engager devant les autres, demander de l’aide, observer des modèles compétents).
On aurait aimé voir davantage développées les dimensions sociétales de la motivation : notre époque matérialiste et consumériste, à laquelle se mêle un certain paternalisme lié à l’État-providence, fait-elle de nous des humains biberonnés aux récompenses ? Dès lors, ne risque-t-on pas d’observer chez certains un recul des capacités de motivation dite « intrinsèque » (aller vers ce qui compte pour soi, sans en attendre de récompense ou de reconnaissance immédiates) et un sentiment global de démotivation (« envie de rien, à quoi bon ? ») ? Autant de questions peu abordées ici. Pour autant, cet ouvrage très concret et pédagogique apportera à chacun des informations éclairantes et des outils précieux, tant pour soi-même que pour sa progéniture. Sa qualité réside dans le parfait dosage entre récits personnels (qu’est-ce qui motive l’autrice à vouloir rembourser au plus vite ses dettes, quitte à donner un billet de 20 euros quand elle n’en doit que 15 à une amie qui ne peut lui rendre la monnaie ?) et résultats scientifiques : on apprend par exemple que, dans un livre pour enfants, il vaut mieux éviter de mélanger des images à colorier et de courtes histoires, car cela risque de démotiver les jeunes lecteurs à accomplir chacune des deux tâches – lire et colorier. À garder en tête lors de votre prochain passage en librairie… Christophe André est médecin psychiatre.
PSYCHOLOGIE
ANIMALE
Découvrir le primate en nous avec « La Planète des singes » Jean-Baptiste de Panafieu Dunod 2024, 200 pages, 15,90 €
Dans La Planète des singes, les scénaristes inversent malicieusement les codes et prêtent aux chimpanzés, gorilles et bonobos des attributs souvent considérés comme typiquement humains : langage, rire, utilisation d’outils, conscience de soi… Mais le sont-ils vraiment ? Dans cet ouvrage, l’auteur nous montre que les frontières sont bien plus floues que nous n’avons tendance à le croire. Au passage, il s’interroge sur la volonté de se distinguer des espèces prétendument inférieures – notamment par le refus d’origines évolutives communes –, obsession partagée par les singes du film et par certains de nos contemporains.
PSYCHOLOGIE
Psychologie de l’humour
Arthur Durif Meunier
Dunod 2024, 272 pages, 26 €
«P
lus cancéreux que moi, tumeur ! », plaisantait Pierre Desproges. L’originalité de ce livre est de ne pas se contenter d’une analyse théorique – par ailleurs instructive et fouillée. Il passe à la pratique, de deux façons. D’abord, en parsemant son propos de traits d’esprits et autres calembours qui donnent un côté ludique à la lecture. Ensuite, en expliquant comment utiliser l’humour en thérapie. Il aurait en e et de multiples vertus dans ce contexte : stimuler et faciliter le dialogue, aider à relativiser certaines croyances, renforcer l’alliance thérapeutique…
PSYCHOLOGIE DE L’ENFANT
Les Émotions de l’enfant
Héloïse Junier et Mademoiselle Caroline Les Arènes 2024, 136 pages, 20 €
Quel parent n’a jamais trépigné devant un enfant qui se roule par terre ou rechigne à se préparer, pile le jour d’une réunion importante où il s’agit de ne surtout pas être en retard ? Au fil des pages de cette bande dessinée, la psychologue Héloïse Junier nous apprend à interpréter les émotions des enfants, en cherchant un juste équilibre entre diabolisation et angélisme : non, ce ne sont ni des rois du caprice et de la manipulation ni de petits saints que l’on peut laisser sans gardefous ! Surtout, l’autrice nous enseigne les bons comportements à adopter pour gérer ces émotions, sans oublier de prendre soin de soi.
COGNITION
Idées reçues sur le haut potentiel intellectuel
Nathalie Clobert
Le Cavalier Bleu 2024, 176 pages, 21 €
Le thème du haut potentiel intellectuel (HPI) est à la mode, mais véhicule bon nombre d’idées reçues. Avec des conséquences potentiellement néfastes, avertit ici la psychologue et spécialiste du sujet Nathalie Clobert : si un enfant identifié HPI croit par exemple que cette caractéristique est forcément associée à des di cultés sociales et émotionnelles, cela risque de se transformer en prophétie autoréalisatrice. L’autrice dresse un bilan précis et synthétique des connaissances sur le haut potentiel, qui aidera les personnes concernées à se démarquer des clichés et à mieux vivre avec cette ressource précieuse.
«ÇPar Guillaume Jacquemont
Dans le cerveau des champions
Jean-Philippe Lachaux
Odile Jacob, 2024, 224 pages, 19,90 €
a ressemble à un cercle très visible, comme un point lumineux avec un cercle assez di us. » Cette phrase n’est pas celle d’un accro au paranormal qui viendrait de croiser une soucoupe volante, mais… de l’ancien champion de tennis français Guy Forget ! Ce dernier décrit la façon dont il « voit » la zone que sa balle va toucher sur le court avant même de la frapper. Et de fait, la perception des sportifs de haut niveau se modifie au fil des matchs et des entraînements, d’une façon qui les rend toujours plus performants. Ce n’est bien sûr pas leur seul secret et le neuroscientifique Jean-Philippe Lachaux (également chroniqueur dans nos colonnes) passe ici en revue les « superpouvoirs » développés par leur cerveau. Il s’appuie pour cela sur les résultats des recherches scientifiques et sur ses entretiens avec des champions issus de multiples disciplines – tennis, football, escalade, parachutisme, cyclisme… Même s’il évoque des performances extrêmes, l’auteur manifeste un talent certain pour ancrer ses explications, limpides et mises en scène sous forme de dialogues, dans les situations les plus quotidiennes. Vous découvrirez par exemple en quoi la simple lecture de l’expression « sole meunière » sur un menu de restaurant vous rapproche des plus grands sportifs – certes dans un domaine très di érent…
Mais l’intérêt de cet ouvrage n’est pas seulement d’apprendre à conquérir des coupes et des médailles. De cette double grille d’analyse – témoignages et résultats scientifiques –, l’auteur extrait des conseils applicables par tout un chacun, notamment en matière de concentration ou de gestion du stress. Plus encore : pour Jean-Philippe Lachaux, l’exemple des meilleurs athlètes, mus selon lui par un désir de découverte et de perfectionnement de soi au moins autant que de victoire, peut nourrir une véritable éthique de vie : « Être humain, c’est apprendre à percevoir le monde d’une façon toujours plus profonde, enthousiasmante et riche, pour comprendre ses structures cachées, et développer des superpouvoirs pour agir et le transformer. »
Guillaume Jacquemont est journaliste à Cerveau & Psycho.
Docteur en neurosciences, auteur, enseignant et chercheur à l’université de Fribourg, en Suisse.
Assister à une catastrophe annoncée sans remuer le petit doigt : cette attitude passive des humains était mise au jour il y a déjà un demi-siècle dans un roman de l’écrivain américain
John
Brunner !
«Je veux que vous paniquiez ! » Ces paroles prononcées en 2019 par l’activiste climatique Greta Thunberg au Forum de Davos s’adressaient aux adultes de ce monde, et en particulier aux décideurs politiques. Âgée alors de 16 ans, elle ajoutait : « Je ne veux pas de votre espoir [...] je veux que vous agissiez. » En un slogan lapidaire, elle résumait ainsi l’un des plus curieux, et inquiétants, aspects de la psychologie humaine face au changement climatique : cette relative apathie, voire sérénité, face à l’imminence d’un désastre global.
Nous savons, et pourtant nous ne faisons rien, ou si peu. Comment comprendre cette inaction, alors que l’urgence climatique est décrétée depuis plus d’une trentaine d’années et que sa réalité ne fait plus aucun doute ? Si nous ne « paniquons » pas autant que nous le devrions, c’est qu’une
£ Le Troupeau aveugle met en scène un monde ultrapollué et presque invivable.
£ Un des personnages de l’intrigue, Austin Train, tente de réveiller la masse amorphe qui contemple la catastrophe.
£ Il met ainsi en lumière l’influence de biais psychologiques individuels, mais aussi de ressorts systémiques et sociétaux qui contribuent à l’inaction.
multitude de facteurs conspirent pour nous maintenir dans l’immobilité et l’impuissance.
EN ROUTE VERS L’AUTODESTRUCTION
Un roman de science-fction semble avoir anticipé notre situation actuelle. Avec Le Troupeau aveugle , l’écrivain américain John Brunner publiait en 1972 une farce cruelle et désespérante, présentant un monde au bord de l’autodestruction, dans un futur proche indéterminé. La planète est dévastée par les catastrophes naturelles, les épidémies, les rats et les nuisibles, l’eau est impropre à la consommation, l’air irrespirable, les aliments sains sont devenus une rareté et les enfants naissent avec toutes sortes de maladies et de malformations. Dans ce contexte, les inégalités sociales se creusent, les tensions internationales s’exacerbent, et les foyers contestataires se
multiplient. Avec un cynisme inouï, les politiciens, les médias et les entrepreneurs tentent de tirer parti de la situation, qui ne fait que se détériorer. Mais un personnage se révolte contre ce système et, lorsqu’il est traîné en justice, pousse un cri du cœur évoquant celui de Greta Thunberg : Austin Train, mélange de théoricien, activiste et révolutionnaire (voir l’extrait ci-dessous).
À qui s’adresse la diatribe d’Austin Train ? Dégoûté par les puissants de tous bords, dont il n’attend plus rien, il demande aux citoyens de faire le serment de rendre le monde meilleur pour les générations à venir. De fait, chacun de nous a manifestement du chemin à parcourir pour changer de comportement : même parmi la population, aujourd’hui majoritaire, qui s’inquiète du changement climatique et connaît sa réalité scientifque, peu nombreux sont ceux qui adaptent suffsamment leur mode de vie. Les chercheurs, qui étudient ce phénomène depuis la fn des années 1990, parlent d’« écart croyance - comportement » (beliefaction gap). Avec ses collègues, la spécialiste en psychologie des politiques publiques Coralie Chevallier,
de l’École normale supérieure, en a recensé les principales causes. En résumé, la connaissance du changement climatique reste souvent à un niveau très général et abstrait, qui peine à se traduire en actes. De plus, le public est fnalement peu au fait des actions les plus effcaces : au lieu d’économiser l’eau et la lumière des ampoules électriques, par exemple, il serait plus impactant d’adopter un régime sans viande ou de renoncer aux voyages en avion. Enfn, nous n’acceptons de faire des sacrifces qu’à la condition d’avoir la certitude que tout le monde fera de même – et comment l’avoir, en l’absence de loi régulant ces habitudes ?
Par ailleurs, si nous ne « paniquons » pas, c’est que nous serions victimes de nombreux biais cognitifs, qui compliquent l’appréciation objective de l’urgence climatique. En particulier, nous ne sommes véritablement sensibles qu’aux problèmes immédiats qui se posent à nous et qu’aux causes dont nous constatons tout de suite les effets. Or l’environnement et le climat évoluent sous le coup de nombreux impacts qui s’accumulent insidieusement au fl du temps, et qui ne deviennent visibles
Nous n’acceptons de faire des sacrifices qu’à la condition d’avoir la certitude que tout le monde fera de même – et comment l’avoir, en l’absence de loi régulant nos habitudes de consommation ?
qu’à partir d’un certain niveau. À ce titre, nous n’observons pas directement la conséquence de nos actes, de sorte que nous avons tendance à minimiser notre responsabilité personnelle et à sous - estimer notre propre pouvoir sur les événements.
« Quand avez-vous pris un bain de soleil pour la dernière fois, mes amis ? Quand avez-vous bu de l’eau dans un ruisseau ? Quand vous êtes-vous risqué à cueillir un fruit sur l’arbre et à le manger sur place ? Combien avez-vous dépensé chez le docteur l’année dernière ?
Lesquels d’entre vous vivent encore dans des villes où l’on peut s’abstenir de porter des masques ? Lesquels ont passé cette année leurs vacances à la montagne parce que la mer est bordée d’immondices ? […]
Mais il reste un espoir pour l’homme ! […]
Bien qu’il soit déjà trop tard pour nous, il n’est peut-être pas trop tard pour le reste de la planète ! Nous devons à ceux qui viendront après de faire en sorte qu’il n’y ait jamais un autre désert du Mékong ! Jamais plus un autre dustbowl de l’Oklahoma ! Jamais plus une autre mer morte ! Je vous le demande, je vous supplie de faire un serment solennel : bien que vos enfants soient destinés à être handicapés, retardés, anormaux, il restera quelque part, pendant su samment longtemps, un endroit où les enfants grandiront sains, intelligents, normaux ! Promettez-le ! Jurez-le ! »
Le Troupeau aveugle, de John Brunner, 1972, Le Livre de Poche, traduit de l’anglais par Guy Abadia, pp. 518-520.
Pour autant, la solution est- elle vraiment individuelle ? Malgré la diatribe d’Austin Train, Le Troupeau aveugle adopte une position bien plus fne et nuancée sur le sujet. Et ce grâce à une astuce narrative qui constitue son aspect le plus intéressant : sa structure chorale. On y suit un grand nombre de personnages distincts, et le texte est clairsemé de dépêches médiatiques, d’anecdotes locales, de documents gouvernementaux, de poèmes et autres notices d’utilisation, le tout produisant un vaste puzzle dont on n’imbrique les pièces que très progressivement. Chacun y défend ses intérêts particuliers, mais l’ensemble renvoie une impression de système qui semble rendre immédiatement caduque toute tentative individuelle
d’agir. John Brunner parvient ainsi à saisir la complexité des questions environnementales, qui oscillent en permanence du niveau individuel au niveau global. Une multiplication des niveaux d’analyse qui renvoie aux controverses actuelles sur les causes de l’inaction climatique.
Jennifer Jacquet, du département des études environnementales de l’université de New York, a ainsi fermement dénoncé les explications de notre impuissance fondées sur une « nature humaine » mal préparée pour y faire face. Si nos biais existent bel et bien face à ce problème complexe, ils varient énormément et prédisent assez mal notre disposition à agir : les moins « biaisés » ne sont pas forcément ceux qui se mobilisent le plus. Surtout, même si les explications individuelles et psychologiques ne sont pas inexactes en soi, elles tendent à occulter d’autres facteurs de nature plus systémique, en particulier les inégalités sociales. Il est plus facile aux personnes aisées de trouver le temps et les ressources pour s’inquiéter du climat et modifer leur mode de vie, et les préoccupations des plus précaires concernent leurs diffcultés quotidiennes plutôt que le sort des générations futures. À l’échelle internationale, on ne peut espérer agir sur le climat que si tout le monde s’y met. Enfin, mettre l’inaction climatique sur le dos de particuliers à la psychologie immuable tend à la fois à déresponsabiliser les plus gros pollueurs et à rationaliser l’inaction, comme si finalement personne n’y pouvait rien.
Et, de fait, cette tendance à la psychologisation de problèmes systémiques massifs serait exploitée par ceux qui en proftent au premier plan. On sait aujourd’hui que de grandes entreprises pétrolières comme Total, Exxon, Shell et BP connaissent depuis longtemps leur rôle dans le changement climatique, comme le révèlent amplement leurs propres documents de recherche internes. Après avoir tenté d’ignorer, de dissimuler puis de minimiser ces
Pourquoi j’ai aimé ce livre
Auteur de nombre de récits d’anticipation apocalyptiques, John Brunner a peaufiné dans Le Troupeau aveugle son art de mêler de nombreuses intrigues au sein d’un récit global, illustrant à merveille l’impossibilité d’aborder les problèmes complexes sous un seul angle. Il va ainsi au fond des infinies ramifications des questions environnementales, prévoyant au passage l’éco-anxiété, les conflits de générations et les tensions internationales qui s’ensuivent. L’alerte a donc été donnée dès 1972, à nous de sortir enfin du troupeau, ou de lui ouvrir les yeux !
Sebastian Dieguez
N. Chater et G. Loewenstein, The i-frame and the s-frame : How focusing on individual-level solutions has led behavioral public policy astray, Behavioral and Brain Sciences, 2023.
Q. Atkinson et J. Jacquet, Challenging the idea that humans are not designed to solve climate change, Perspectives in Psychological Science, 2022
A. Grandin et al., « The belief-action gap in environmental psychology : How wide ? How irrational ? », in J. Musolino et al., The Cognitive Science of Belief, Cambridge University Press, 2022.
risques, leur dernière stratégie en date a été de déplacer leur responsabilité sur les épaules des consommateurs : elles promeuvent par exemple le concept de « bilan carbone » individuel, où chacun est invité à mesurer et à réduire son propre impact sur le climat. C’est précisément pour éviter des changements systémiques et politiques à grande échelle, qui grèveraient lourdement leurs bénéfces, que les solutions individuelles sont promues par ces frmes, faisant alors des psychologues, le plus souvent à leur insu, les complices de leur entreprise destructrice.
Les psychologues Nick Chater et George Loewenstein, très infuents dans l’étude des biais cognitifs, ont ainsi jeté un pavé dans la mare en accusant leur propre discipline d’avoir trop longtemps contribué à mettre la focale sur les particuliers. Ils appellent à passer d’un cadre d’analyse individuel (i-frame) à une perspective plus systémique (s-frame), où la psychologie aurait également un rôle à jouer, mais plus proche des réalités sociales et quotidiennes de tout un chacun. Parviendrons-nous à surmonter les obstacles individuels et politiques qui nous empêchent d’agir ? Ou sommes -nous condamnés, tel un « troupeau aveugle », à poursuivre notre folie destructrice jusqu’à son accomplissement défnitif, qui plus est en toute connaissance de cause ? Il n’existe bien sûr aucune réponse claire à cette question. Mais après tout, le scénario développé par John Brunner en 1972 a pu, jusqu’à présent, être évité, et notre monde est encore loin d’être aussi apocalyptique que le sien. Peut- être en partie grâce à lui et à ses semblables qui ont sonné l’alarme : espérons donc que notre goût pour l’anticipation et notre talent pour nous faire peur ne servent pas seulement à inventer de belles histoires, mais également à en tirer quelques leçons sur les futurs possibles, et ainsi sur les façons de survivre. £
« Légaliser l’euthanasie ouvre la porte aux homicides à l’hôpital » : voilà un sophisme en pente glissante. Impossible à prouver ou à réfuter… et omniprésent dans le débat politique.
En détendant certains muscles du visage, le Botox empêcherait ce dernier d’exprimer des émotions comme la tristesse. Celle-ci serait alors plus difficile à ressentir, d’où des effets antidépresseurs.
Pendant votre journée, des parties de votre cerveau s’endorment sans que vous vous en rendiez compte. Localement, des groupes de neurones de votre cortex s’éteignent comme lorsqu’on dort. L’avantage ? Faciliter le renforcement de certaines compétences récemment acquises et aider à évacuer des toxines par l’activité prolongée des neurones.
« Les tests de personnalité nous permettent d’entrer dans des catégories où nous ne sommes pas seuls, où nous nous sentons normaux. » Yves-Alexandre Thalmann, université de Fribourg
des Français ont une approche « épicurienne » de la mort. Selon eux, « si on remplit pleinement sa vie, la mort n’est plus à craindre ».
La lecture d’un texte sur papier permettrait une meilleure attention que sur écran. Le cerveau des enfants produit alors des ondes alpha associées aux processus attentionnels, et retient mieux ce qu’ils ont lu.
Nous serions faits pour courir et penser en même temps parce que nos ancêtres ont survécu en réfléchissant aux mouvements de leurs proies tout en les poursuivant. Résultat : la santé du cerveau est, encore aujourd’hui, liée aux mouvements du corps – et le sport bénéficie à nos fonctions cognitives.
Sauter le petit déjeuner peut entraîner des baisses de mémoire temporaires ; des e ets qui s’estompent au bout de quelques jours, lorsque le cerveau s’est habitué.
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