Cerveau & Psycho
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RETROUVER L’ENVIE
Combattre la morosité grâce à la psychologie de la motivation
Avril 2021
N°131
N° 131 Avril 2021
L 13252 - 131 - F: 6,90 € - RD
TOMBE-T-ON AMOUREUX DE CEUX QUI NOUS RESSEMBLENT ?
RETROUVER L’ENVIE Combattre la morosité grâce à la psychologie de la motivation NEUROSCIENCES COMMENT LE SOMMEIL NETTOIE NOTRE CERVEAU
APPRENTISSAGE RÉVISER SANS S’ÉPUISER « L’ANOMALIE » UN PRIX GONCOURT TRÈS PSYCHOLOGIQUE SANTÉ LES CINQ PISTES POUR GUÉRIR ALZHEIMER DOM : 8,90 € – BEL/LUX : 8,50 € – CH : 11,90 CHF – CAN : 12,99 CA$ – TOM : 1 200 XPF
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N° 131
NOS CONTRIBUTEURS
ÉDITORIAL
p. 12-14
SÉBASTIEN BOHLER
Audrey Chagnot
Doctorante en quatrième année dans l’équipe du professeur Denis Vivien, à l’institut Blood and Brain à l’université de Caen-Normandie (BB@C) et à l’InsermPhInd, elle étudie la circulation du liquide céphalorachidien grâce à l’imagerie par résonance magnétique.
Rédacteur en chef
L’envie d’avoir envie
p. 26-31
Bruno Dubois
Professeur de neurologie à Sorbonne Université, chef du service des maladies cognitives et comportementales à l’hôpital de la Salpêtrière, à l’Institut du cerveau et de la moelle épinière, à Paris.
p. 50-53
Michel Lejoyeux
Professeur de psychiatrie et d’addictologie à l’université de Paris, il étudie la dynamique de nos envies et de nos désirs, et propose des moyens concrets de les entretenir et de les raviver dans les situations de perte d’entrain, voire de dépression.
p. 82-86
André Didierjean
Professeur de psychologie cognitive à l’université de Franche-Comté et membre honoraire de l’Institut universitaire de France, il étudie l’expertise cognitive, l’attention ou encore la psychologie de la prestidigitation.
’ai beaucoup réécouté Johnny ces derniers temps. Et surtout sa chanson L’Envie. Cette envie qui nous manque parfois aujourd’hui. Avec ces journées qui se répètent, ces vies un peu monotones, sans avenir clairement discernable, sans contacts réels. Ces gestes devenus automatiques, ces réunions en visio, cet ennui qui touche tant de nos concitoyens… Johnny a son approche de l’envie. Pour lui, elle naît du manque. Toute sa chanson est un appel à retrouver le désir des choses simples grâce à un passage par un moment de privation. « Qu’on me donne le froid pour que j’aime la flamme, qu’on me donne la nuit pour que j’aime le jour (et le jour pour que j’aime la nuit), qu’on me donne l’exil pour que j’aime ma terre », etc. La construction est binaire et efficace : nos désirs se construisent dans la privation. Alors, pourquoi ne pas le prendre au mot ? C’est un peu ce que nous dit Michel Lejoyeux dans notre dossier central sur la façon de « retrouver l’envie » : quand on n’a plus rien à faire, car on ne peut plus sortir, rencontrer des amis, aller au cinéma ou au restaurant, c’est précisément dans ces moments-là que se révèle notre « soif » de rêve, de nouveauté, de projets, cette « envie d’avoir envie ». Il conseille donc de nous plonger dans ces moments de vagabondage mental pour remonter à la source de nos désirs. La psychologie de la motivation, qui a énormément progressé ces dernières décennies, nous dit aussi de trouver notre « carburant intérieur », qui nous anime d’un feu inextinguible, nous porte à réaliser nos rêves et assouvir nos passions. Tout cela doit être ravivé. Il suffira d’une étincelle. Pour allumer le feu. £
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SOMMAIRE N° 131 AVRIL 2021
p. 39-61
Dossier p. 39
p. 12
p. 16
p. 26
p. 32
RETROUVER
L’ENVIE p. 6-38
DÉCOUVERTES p. 6 ACTUALITÉS Mangez des pommes ! Ça fait pousser les neurones… Une infusion contre la dépression On a parlé avec des rêveurs endormis ! Comment parler pour paraître honnête ? Contre les « fake news », le timing fait tout p. 12 FOCUS
À quoi servent les ruminations nocturnes de la mouche La mouche du vinaigre « nettoie » son cerveau pendant son sommeil, grâce à de petits mouvements de sa trompe… Audrey Chagnot, Géraldine Rauchs et Denis Vivien
p. 16 NEUROSCIENCES
Alzheimer : cinq pistes pour s’en sortir
p. 26 INTERVIEW
« Tous les porteurs de lésions n’auront pas Alzheimer »
Une majorité de patients, malgré la présence de plaques amyloïdes dans leur cerveau, échappent à la maladie. Reste à identifier les plus à risque. Bruno Dubois coordonne l’étude Insight. Bruno Dubois
p. 32 CAS CLINIQUE GRÉGORY MICHEL
L’alcoolorexie : manger moins pour boire plus ! Bérénice est accro à l’alcool mais veut rester mince. Alors elle se prive de nourriture pour garder la ligne ! Et bascule dans une pathologie rare : l’alcoolorexie.
La maladie d’Alzheimer ne se résume pas à l’accumulation de protéines toxiques dans le cerveau. Cinq voies de recherche très prometteuses pourraient débloquer la situation.
p. 40 PSYCHOLOGIE
COMMENT FAIRE NAÎTRE LA MOTIVATION
Quand le quotidien s’enlise et que l’entrain manque, la psychologie de la motivation aide à mieux cerner ses envies profondes. Nikolas Westerhoff
p. 46 DÉVELOPPEMENT
OÙ EST NOTRE CARBURANT INTÉRIEUR ?
Deux sentiments – capacité et autonomie – forment la base de la motivation intrinsèque. Jean-Philippe Lachaux
p. 50 INTERVIEW
« NOS DÉSIRS ONT BESOIN DE DÉCONNEXION ET DE RÊVERIE » Michel Lejoyeux
p. 54 PSYCHOLOGIE
DANS LE « FLUX » DE LA MOTIVATION
Kenneth S. Kosik
Pleinement absorbés dans ce qui nous passionne, nous sommes en état dit de « flux » qui procure une motivation sans faille.
Ce numéro comporte un encart d’abonnement Cerveau & Psycho, jeté en cahier intérieur, sur toute la diffusion kiosque en France métropolitaine. Il comporte également un courrier de réabonnement, posé sur le magazine, sur une sélection d’abonnés. En couverture : © Shutterstock.com/Sunny studio/grop
Corinna Peifer, Gina Wolters et Nora Hein
N° 131 - Avril 2021
5
p. 72
p. 78
p. 62
p. 94
p. 82
p. 88 p. 92
p. 62-71
p. 72-91
ÉCLAIRAGES
VIE QUOTIDIENNE LIVRES
p. 62 PSYCHOLOGIE SOCIALE
p. 72 APPRENTISSAGE
Le déni en six leçons
Pour nier le réchauffement climatique ou la pandémie de Covid, les récalcitrants emploient une méthode en six points fort étonnants… Sean B. Carroll
p. 68 L’ENVERS DU DÉVELOPPEMENT PERSONNEL
YVES-ALEXANDRE THALMANN
Introverti et fier de l’être !
Notre société nous pousse à être ouverts, sociables et dynamiques. Mais les introvertis ont un cerveau qui fonctionne mieux au calme !
p. 92-97
Réviser sans s’épuiser
Pour ne pas crouler sous la charge mentale, les conseils des sciences cognitives… Myriam Schlag
p. 78 ÉCOLE DES CERVEAUX
Épreuves en temps limité Ne perdez pas vos moyens !
Si vous stressez quand le temps est compté, pas de panique : c’est juste votre cerveau qui a du mal à apprécier les durées… Jean-Philippe Lachaux
p. 82 SCIENCES COGNITIVES
Saurez-vous résister au magicien ?
Les tours des magiciens pour influencer vos choix sont habilement récupérés par les professionnels d’internet ou du commerce… Cyril Thomas, Morgan Begey, André Didierjean
p. 88 LES CLÉS DU COMPORTEMENT SYLVIE CHOKRON
Amour : qui se ressemble s’assemble !
Pourquoi avons-nous tendance à nous mettre en couple avec des personnes qui nous ressemblent (eh oui !) physiquement ?
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p. 92 SÉLECTION DE LIVRES Le Syndrome d’imposture Stop à la fatigue La Bibliothèque idéale de psychologie Dans la tête de ma psy Les Quatre Temps de la renaissance Sauver l’homme par l’animal p. 94 NEUROSCIENCES ET LITTÉRATURE SEBASTIAN DIEGUEZ
L’Anomalie : le double, révélateur du soi Le prix Goncourt 2020 est comme une expérience scientifique qui nous montre ce que nous apprendrait une confrontation avec notre double.
DÉCOUVERTES
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p. 6 Actualités p. 12 À quoi servent les ruminations nocturnes de la mouche ? p. 16 Alzheimer, cinq pistes pour s’en sortir p. 26 « Tous les porteurs de
Actualités Par la rédaction NUTRITION
Mangez des pommes ! Ça fait pousser les neurones… Dans une série d’expériences in vitro et in vivo, deux « phytonutriments » des pommes ont accru la multiplication et la survie des neurones, notamment dans une région cérébrale clé pour l’apprentissage et la mémoire. M. Ichwan et al., Apple peel and flesh contain pro-neurogenic compounds, Stem Cell Reports, le 11 février 2021.
© Shutterstock/Sharomka
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e Chirac des Guignols de l’info était-il prophétique quand il clamait « Mangez des pommes ! » à qui mieux mieux ? Une équipe internationale menée par Gerd Kempermann, du Centre allemand pour les maladies neurodégénératives, vient en tout cas de montrer que certains « phytonutriments » extraits de ces fruits stimulent la multiplication des neurones (la neurogenèse) et leur survie. Les chercheurs ont mené une série d’expérience in vitro et in vivo, sur des souris, en étudiant plusieurs composants des pommes. Ils ont trouvé que deux d’entre eux, en
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lésions n’auront pas Alzheimer » p. 32 L’alcoolorexie : manger moins pour boire plus !
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PSYCHIATRIE
Une infusion contre la dépression N. L. Galvão-Coelho et al., J. Psychopharmacol., vol. 34, pp. 1125-1133, 2020.
DES COMPOSÉS QUI RÉGULENT L’EXPRESSION DES GÈNES Ces composés agiraient en régulant l’expression de certains gènes, ce qui se traduirait par une production accrue d’antioxydants par la cellule – d’où leur rôle protecteur – et par l’inhibition de substances qui freinent la croissance et la prolifération neuronales – d’où la multiplication accélérée. Gerd Kempermann insiste sur la multiplicité des voies par lesquelles l’alimentation agit sur la neurogenèse : « Traditionnellement, les gens se sont concentrés sur les fonctions antioxydantes, mais il y a bien plus de mécanismes en jeu. » D’autres ont d’ailleurs été mis en évidence avec les flavonoïdes présents dans les fruits rouges, comme les myrtilles, qui stimulent également la
production de neurones, notamment en augmentant la libération de protéine BDNF (brain-derived neurotrophic factor, ou facteur neurotrophique dérivé du cerveau). UNE CONCENTRATION TROP FAIBLE DANS LE JUS DE POMME Inutile pour autant d’engloutir des litres de jus de pomme. Si une étude à petite échelle avait semblé indiquer un effet positif de cette boisson chez des patients victimes de la maladie d’Alzheimer, d’autres travaux n’ont trouvé aucune amélioration des fonctions cognitives chez des volontaires sains. Et de fait, l’équipe de Gerd Kempermann n’a pas non plus identifié de bienfait du jus de pomme sur la mémoire et l’apprentissage des souris. Probablement parce que les concentrations des phytonutriments bénéfiques, en particulier la quercétine, étaient trop faibles dans la boisson. Quelle est alors la bonne dose ? Et sera-t-il possible d’entretenir, voire de restaurer, les fonctions cognitives à partir d’extraits de pomme plus ou moins concentrés ? C’est ce que devront déterminer les futures recherches. Dans cette attente, il faudra se contenter du dicton anglais : « A n apple a day keeps the doctor away » (« Une pomme par jour éloigne le médecin pour toujours »)… £ Guillaume Jacquemont
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’ayahuasca est une herbe qui pousse dans certains pays d’Amérique centrale et du Sud, et que les chamans utilisent traditionnellement pour ses vertus hallucinogènes. Mais les médecins et neuroscientifiques s’intéressent de plus en plus près à ses vertus thérapeutiques, notamment pour le traitement des dépressions résistantes aux médicaments classiques. Aujourd’hui 350 millions de personnes de par le monde souffrent d’épisodes dépressifs majeurs, extrêmement invalidants et potentiellement létaux en raison des taux de suicide associés. Un tiers ne répond pas aux traitements à base d’antidépresseurs. Or l’ayahuasca se montrerait efficace dans ces cas, comme l’a montré une étude de l’université de Rio Grande do Norte au Brésil : dans une étude pilote menée sur 28 patients atteints de dépression majeure résistante aux traitements usuels, les sujets ont bu une infusion d’ayahuasca, puis se sont reposés dans une pièce calme en écoutant des musiques relaxantes. Des analyses sanguines ont alors révélé une chute très nette d’une molécule pro-inflammatoire appelée « protéine C-réactive », dont les niveaux sont anormalement élevés chez les patients atteints d’états dépressifs majeurs. Dans le même temps, les symptômes dépressifs ont fortement reculé en l’espace de 48 heures, soit beaucoup plus vite que chez les personnes traitées à l’aide d’antidépresseurs. Ce type d’étude, tout en confirmant les liens entre dépression et inflammation, confirme la montée en puissance des composés hallucinogènes dans le traitement de cette maladie, tout en précisant leurs conditions d’utilisation : car l’ayahuasca, en raison de ses effets excitants sur le système nerveux sympathique, est contre-indiquée chez les patients souffrant de troubles cardiovasculaires, de psychoses ou d’états maniaques… £ Sébastien Bohler
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particulier, sont bienfaisants pour les neurones : la quercétine (un flavonoïde, abondant dans la peau du fruit) et l’acide dihydroxybenzoïque (DHBA, plutôt présent dans la chair). En éprouvette, ces composés ont augmenté la prolifération neuronale à partir de cellules souches et ont favorisé la survie des cellules nerveuses. Administrés à des souris, ils ont eu le même effet au sein de l’hippocampe, une région cérébrale clé pour l’apprentissage et la mémoire, et l’un des seuls endroits où la neurogenèse se poursuit à l’âge adulte.
© Galen Dara
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DÉCOUVERTES Neurosciences
Alzheimer Cinq pistes pour s’en sortir Par Kenneth S. Kosik, chercheur et professeur en neurosciences à l’université de Californie à Santa Barbara.
La maladie d’Alzheimer ne se résume pas à la destruction de neurones liée à l’accumulation d’amas protéiques dans le cerveau. On s’aperçoit aujourd’hui que pour vaincre cette pathologie, il est indispensable de revenir à sa biologie fondamentale. Et pour cela, cinq voies s’offrent à nous – sachons creuser les plus prometteuses…
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ucun obstacle ne nous empêche, en principe, de développer un traitement contre la maladie d’Alzheimer. D’autres troubles, qui se manifestent par de la violence, de l’avidité ou de l’intolérance par exemple, ont des origines bien plus diverses et complexes que cette maladie qui, par essence, est un problème de biologie cellulaire dont la solution devrait être à notre portée. Il existe même de fortes chances pour que la communauté scientifique dispose déjà – sans le savoir – d’un traitement potentiel stocké quelque part parmi les fioles d’un quelconque laboratoire. De même, des indices d’importance majeure pourraient se cacher dans les gigantesques bases de données, les registres de dossiers cliniques, les études menées en imagerie cérébrale, les analyses sanguines, les génomes, les enregistrements de l’activité neuronale… attendant d’être repérés. Si nous sommes passés à côté de ces éventuels indices, c’est parce que, depuis des décennies, nous avons systématiquement poursuivi, bille en tête,
EN BREF £ À ce jour, aucun traitement contre la maladie d’Alzheimer ne s’est révélé efficace. £ Une raison est sans doute que l’on s’est concentré sur un aspect de la maladie : les agrégats de protéines anormales qui s’accumulent dans le cerveau. £ Pourtant, d’autres voies touchant la biologie fondamentale de la maladie sont prometteuses, comme l’étude des défauts d’élimination des protéines anormales ou des dégâts causés par l’inflammation cérébrale. £ Ces voies, entrecroisées, plaident pour une approche plus globale de la maladie.
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toute découverte un tant soit peu miroitante, au lieu d’explorer à fond la biologie qui sous-tend cette maladie. Seules quelques hypothèses ont piloté la recherche, dont celle qui accorde à un fragment de protéine nommé « bêta-amyloïde » un rôle majeur dans la maladie. Dès lors, plusieurs médicaments ont été conçus pour réduire les concentrations de ces « peptides amyloïdes » chez les patients. Malheureusement, aucun n’est parvenu à stopper le déclin cognitif de façon significative. Désormais, il apparaît simpliste de penser qu’il sera possible de guérir les patients en éliminant ou en inhibant ces peptides, sans comprendre véritablement comment ils se développent et s’accumulent (voir l’encadré page 19). En suivant cette hypothèse, nous ne nous sommes pas nécessairement trompés de voie, mais notre zèle nous a amenés à en ignorer d’autres, voire les racines mêmes de cette voie-là. REVENONS AUX FONDAMENTAUX ! Il est temps de revenir aux fondamentaux. Depuis trente ans, je mène des projets de recherche sur des familles présentant un risque élevé de développer la maladie d’Alzheimer et sur des stratégies de prévention. Mes collègues et moi-même étudions également la physiologie des lésions des cellules cérébrales des patients atteints de la maladie. Nous qui travaillons dans des
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DÉCOUVERTES Cas clinique
GRÉGORY MICHEL
Professeur de psychologie clinique et de psychopathologie à l’université de Bordeaux, chercheur à l’Institut des sciences criminelles et de la justice, psychologue et psychothérapeute en cabinet libéral, et expert auprès des tribunaux.
L’alcoolorexie Manger moins pour boire plus !
Bérénice est jolie, aime sortir et boire de l’alcool… Mais en même temps, elle veut rester mince ! Alors, elle mange de moins en moins. Et, sans le savoir, bascule dans une maladie tentaculaire : l’alcoolorexie.
EN BREF £ Bérénice souffre de troubles de l’alimentation depuis qu’elle est adolescente. Elle compte les calories, mange peu, et se fait vomir au moindre « excès ». £ Puis, étudiante, elle commence à sortir et à boire de l’alcool, y prend goût, et continue ensuite quand elle est en couple, avec son mari. £ Mais, progressivement, la jeune femme se met à manger toujours moins pour se permettre de boire toujours plus… tout en gardant la ligne. La spirale de l’alcoolorexie est enclenchée !
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undi matin, 7 h 30. Je reçois un e-mail sur mon ordinateur au travail. Demande de consultation. La patiente, une certaine Bérénice, a des difficultés liées à l’alimentation. Elle explique avoir suivi un parcours de soins pour des problèmes d’anorexie lorsqu’elle était adolescente. Puis avoir rencontré plusieurs psys, sans véritable suivi sur le long terme. Comme elle dit souhaiter un rendez-vous rapidement, je la reçois la semaine suivante. La jeune femme arrive avec vingt minutes d’avance. Dans la salle d’attente, elle lit un ouvrage d’Anna Gavalda, Des vies en mieux.
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Dossier
COMMENT FAIRE NAÎTRE LA MOTIVATION N° 131 - Avril 2021
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Quand le quotidien s’enlise, que les objectifs deviennent flous et que nous manquons d’entrain, comment retrouver l’envie d’avancer ? En nous fixant des objectifs qui nous enthousiasment. Et, pour cela, il faut commencer par savoir vraiment ce qui nous motive, au plus profond de nous. Par Nikolas Westerhoff, psychologue et journaliste scientifique à Berlin.
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e marier, acheter une maison, avoir des enfants… Obtenir une promotion, changer de métier, apprendre le chinois… Tout le monde a des buts, des envies, des ambitions. Que ce soit au travail ou dans la vie privée, nous aimons nous fixer des caps, élaborer des plans directeurs et imaginer des scénarios pour l’avenir. Mais en fonction de quels critères ? Le plus souvent, c’est la simple recherche de plaisir qui gouverne bon nombre de nos actions. Ce qu’on pourrait appeler le « principe hédoniste », qui tient en quelques mots : « Éviter ce qui est pénible et rechercher ce qui est source de gratification et de plaisir. » Mais parfois, c’est un peu plus nuancé : est-on aiguillonné par la quête de réussite, de pouvoir… de reconnaissance ? À la base de toute psychologie de la motivation se trouve la simple question : pourquoi faiton ce qu’on fait ? Comme pour toutes les questions les plus simples, celle-ci ne trouve pas de réponse immédiate. Mais une chose semble pourtant assez claire : en chacun de nous il y a des besoins, parfois mal formulés, en sommeil, et souvent en concurrence les uns avec les autres. LA FOULE DES DÉSIRS HUMAINS Vers où fixer son désir ? Parfois la tête ne souhaite pas ce que le cœur veut, parfois c’est l’inverse. Pensez à votre souhait de réussir
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professionnellement et d’obtenir un poste recherché, alors que vos envies immédiates vous porteraient au farniente ou à la distraction. Comment mettre de l’ordre dans ce chaos ? Depuis des décennies, les psychologues dressent un inventaire foisonnant des motifs humains. C’est ainsi que dans les années 1920, un collectionneur passionné, le sociologue américain Luther Lee Bernard (1881-1951), en dénombra 14 000 ! Il y mettait, il faut dire, tout et n’importe quoi. Comme la « pulsion » qui nous empêche de manger une pomme sur notre propre plantation… Le Britannique William McDougall (1871-1938) – fondateur de ce qu’on appela la « psychologie hormonale », un concept oublié qui n’avait rien à voir avec les hormones mais dérivait en réalité du grec hormé signifiant « envie » ou « pulsion » – a inscrit le rire, l’errance, la possession et le bien-être dans la collection des objectifs humains universels, en plus de la faim, de la peur et du désir sexuel. Son collègue Henry Alexander Murray (1893-1988) de l’université Harvard à Boston (États-Unis) a identifié exactement 20 motifs – parmi lesquels la recherche de la réussite et du prestige ainsi que le désir de reconnaissance, de connaissance, de persévérance et de domination. La liste de motifs la plus connue est en fait une hiérarchie : la « pyramide des motivations » du psychologue américain Abraham Maslow (19081970). Sa base est formée par des motifs dits « déficitaires » tels que le désir de plaisir sexuel et de nourriture. Au-dessus de ces éléments se trouvent la recherche de sécurité et d’affiliation, ainsi que de nobles « motifs de croissance » tels que le besoin de nouveauté, de beauté et de réalisation de soi. Selon Maslow, les pulsions
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OÙ EST NOTRE
CARBURANT INTÉRIEUR ? Même dans des activités répétitives, nous pouvons découvrir un appétit presque infini de progression et de perfectionnement . La clé de cette motivation ? Se sentir tout à la fois capable et autonome.
Par Jean-Philippe Lachaux, directeur de recherche à l’Inserm, au Centre de recherche en neurosciences de Lyon.
£ Pour la première, deux facteurs entrent en jeu : le sentiment d’autonomie et celui de compétence. £ La motivation intrinsèque ne s’émousse pas dans des tâches répétitives si ces dernières procurent toujours du plaisir.
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u’est ce qui peut bien pousser une fillette de 9 ans à apprendre par cœur le nom de tous les acteurs des films de Harry Potter ? Ses parents, ses frères et sœurs, ses ami(e)s ? Non : sa motivation est intrinsèque, endogène. La motivation intrinsèque, c’est donc cette variable cachée qui explique qu’un individu s’adonne à une activité qui demande un certain effort, en l’absence de toute forme de récompense extérieure évidente. C’est ce moteur formidable de l’apprentissage, ce Graal de l’enseignement qui fait toute la différence
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EN BREF £ Depuis les années 1950, les chercheurs distinguent la motivation intrinsèque (moteur interne) de la motivation extrinsèque (contraintes externes).
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DANS LE « FLUX » DE LA MOTIVATION Assis à votre table de travail, vous peinez à vous motiver au point d’avoir sans cesse l’esprit qui part dans tous les sens ? Un état psychologique peut vous insuffler un plaisir et une envie sans faille. On l’appelle le « flux » – et voici quelques moyens d’y accéder. Par Corinna Peifer, Gina Wolters et Nora Hein, psychologues et chercheuses, respectivement aux universités de Lübeck, de la Ruhr et de Duisburg-Essen, en Allemagne.
£ Le flux est un état où l’on est complètement absorbé dans ce que l’on fait, au point d’en oublier tout le reste.
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£ Comme le stress, il est associé à des taux modérément élevés de cortisol dans le sang, mais, contrairement à lui, il est très agréable et favorise un sentiment de bien-être. Autre avantage, il stimule les performances. £ Les chercheurs ont identifié toute une série de leviers pour atteindre cet état, notamment en choisissant ses activités de façon appropriée et en recherchant le bon niveau d’activation physiologique.
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«
es pensées sont claires et concentrées. Je suis totalement dans l’ici et maintenant, absorbé dans ce que je fais. Je me sens bien. Le monde extérieur me semble lointain. Je remarque à peine ma propre existence et j’oublie tous mes soucis. » C’est à partir de déclarations de ce type, émanant de sportifs, d’artistes et de scientifiques, que le psychologue américano-hongrois Mihály Csíkszentmihályi a décrit en 1975 un état psychologique particulier appelé « flux » ( flow, en anglais). En état de flux, l’individu est entièrement absorbé dans ce qu’il fait, au point d’oublier tout le reste. Depuis, les recherches en psychologie ont maintes fois démontré que l’expérience du flux nous apporte bien plus qu’une gratification immédiate. Si elle a lieu régulièrement
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ÉCLAIRAGES p. 62 Le déni en six leçons p. 68 L’envers du développement personnel
Le déni
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Par Sean B. Carroll, professeur distingué de biologie à l’université du Maryland et vice-président pour les sciences de l’éducation à l’Institut médical Howard-Hughes.
Comment nier le réchauffement climatique, la théorie de l’évolution ou les ravages de la pandémie de Covid ? Étonnamment, les méthodes sont les mêmes dans tous les cas et comportent six étapes. Leur but : décrédibiliser la parole scientifique et installer des pseudoexperts à la place des personnes compétentes. EN BREF £ Dans les débats sur les vaccins, le réchauffement climatique ou les origines de l’humanité, de plus en plus de personnages « antisystème » entendent balayer d’un revers de main les connaissances scientifiques les plus solidement acquises. £ Leur rhétorique se déploie presque systématiquement en six points, dont chacun vise à saper la crédibilité des experts et à mettre à leur place des polémistes souvent incompétents.
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£ Un des aspects les plus pernicieux du déni est le déni implicite, qui consiste à rejeter un fait non parce qu’il est faux mais parce qu’il est déplaisant…
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l était une fois, dans un pays pas si éloigné du nôtre, un horrible virus qui semait la terreur dans chaque ville et chaque foyer. Bien que bénigne dans la plupart des cas, chez certaines personnes la maladie devenait plus inquiétante, avec une perte de réflexes et de contrôle musculaire, une paralysie et, parfois, une issue fatale. Les enfants étant particulièrement vulnérables, les parents surveillaient anxieusement tout signe d’infection, et les tenaient souvent à l’écart des piscines, des cinémas, des salles de bowling, de tout endroit où la foule pouvait se rassembler et où le redoutable microbe était susceptible de se cacher. On limitait les voyages et les échanges professionnels entre les différents foyers épidémiques, et les autorités de santé imposaient des quarantaines aux personnes en bonne santé qui risquaient d’avoir été exposées, afin d’arrêter la propagation de la maladie. UN VIRUS RAVAGEUR Cela se passait il y a un peu plus d’un demisiècle. Dans la première moitié des années 1950, sans remède ni vaccin, plus de 200 000 Américains ont été handicapés par le virus de la polio, env i ron 70 0 0 0 0 Européens et 50 000 Français. À l’époque, aux États-Unis, le virus était le deuxième fléau plus redouté des Américains après la bombe atomique. Puis, le 12 avril 1955, les responsables de la santé publique de l’université du Michigan ont
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annoncé qu’un vaccin « sûr, efficace et puissant » avait été trouvé. Cette annonce donna lieu à une célébration nationale qui rappelait les scènes de liesse de la fin de la Seconde Guerre mondiale. Les cloches des églises sonnaient, les klaxons des voitures retentissaient à tout rompre, les gens en pleuraient de soulagement. Le président Dwight Eisenhower invita l’inventeur du vaccin, Jonas Salk, à la Maison Blanche. Lors d’une cérémonie donnée à la Roseraie, le commandant suprême des forces maritimes alliées déclara au scientifique d’une voix tremblante : « Je voudrais vous dire que lorsque je pense aux milliers de parents et grandsparents américains qui, dans l’avenir, seront épargnés par les craintes angoissantes de l’épidémie annuelle de poliomyélite et aux agonies évitées à tant de gens ainsi qu’à leurs proches, je dois vous dire que je n’ai pas de mots pour exprimer de façon adéquate mes remerciements et ceux de tous les gens que je connais – les 164 millions d’Américains, sans parler de tous les hommes et les femmes dans le monde entier qui bénéficieront de votre découverte. » Mais, hélas, tout le monde n’a pas rejoint ce chœur de louanges, ni exprimé une pareille gratitude. Un groupe en particulier n’a pas salué le vaccin comme une percée. Les chiropracteurs. Ceux-là, et on va voir pourquoi, se sont ardemment opposés à la campagne de vaccination qui a suivi le triomphe de Salk. CHIROPRACTEURS AU CRÉNEAU ! Les chiropracteurs, dans leur majorité, ne voulaient pas entendre parler d’agents pathogènes. Ils adhéraient viscéralement au principe fondateur de la chiropractie, selon lequel toute maladie a son origine dans la colonne vertébrale.
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ÉCLAIRAGES L’envers du développement personnel
YVES-ALEXANDRE THALMANN
Professeur de psychologie au collège Saint-Michel et collaborateur scientifique à l’université de Fribourg, en Suisse.
INTROVERTI ET FIER DE L’ÊTRE ! Aller vers les autres, savoir socialiser, surmonter sa timidité... Voilà à quoi nous enjoint continuellement la psychologie. Mais qui a dit que c’était forcément conseillé à tout le monde ?
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errière un ensemble aussi foisonnant qu’hétéroclite de pratiques et théories en tout genre, une idée centrale fédère la plupart des approches de développement personnel : il y a en chacun de nous des aptitudes et des forces qui ne demandent qu’à être déployées, pour peu que nous le voulions vraiment et y travaillions assidûment. En chacune des chenilles qui sommeillent en nous se cacherait un merveilleux papillon se languissant de prendre son envol vers les cieux de
l’épanouissement. Comme si la vie d’un papillon était forcément plus belle et souhaitable que celle d’une chenille. Aux yeux d’un observateur extérieur, peutêtre ; mais pour la chenille, il est légitime d’en douter… La question sous-jacente au développement personnel concerne ce qu’il faudrait effectivement améliorer en nous. Quelle serait une meilleure version de nous-même ? Et, surtout, à quelle échelle de valeurs se réfère-t-on pour en juger ? Lorsque j’aborde la question de la personnalité avec mes étudiants en psychologie, je ne peux m’empêcher d’exprimer une réticence par rapport aux concepts proposés. Le test des Big 5, référence des tests de personnalité validés à l’heure actuelle, décrit les individus selon un ensemble de cinq traits. Il ne s’agit pas,
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comme dans les approches typologiques, d’enfermer les gens dans des cases, mais de les positionner sur une gradation toute en nuances. De cette manière, ils ne sont pas qualifiés de manière absolue, mais relative. Selon la description de la personnalité en cinq traits (l’échelle des Big 5, donc), nous pouvons être plus ou moins stables émotionnellement, extravertis, agréables, consciencieux, et ouverts. MALAISE DANS LA PERSONNALITÉ Mon malaise vient de la connotation qui entoure ces polarités. Il est évident qu’il vaut mieux manifester davantage de ces qualités que l’inverse. Qu’il est préférable d’être plus stable émotionnellement, plus extraverti, plus agréable, plus consciencieux et plus ouvert… Qui voudrait se découvrir prompt à s’énerver
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Notre monde favorise les extravertis. À l’école, où l’on pousse les enfants à la coopération et aux travaux de groupe, n’avoir qu’un ou deux amis suscite la méfiance... et s’angoisser, replié sur lui-même, intéressé avant tout à son bien-être au détriment de celui des autres, irréfléchi et peu enclin au changement et à la nouveauté ? La tentation se fait jour, alors, de vouloir modifier l’ampleur de ces traits peu désirables. Mais à quel prix ? Et pour quels résultats ? Prenons l’exemple de l’extraversion. Au fil des ans, j’ai dû me rendre à l’évidence : j’aime me retirer du monde. Non pas à l’image d’un moine qui opte pour une vie recluse, mais sous forme de longs moments où je reste seul avec moimême. Les contacts humains désordonnés et fourmillants ont tendance à m’ôter de l’énergie plutôt que de m’en fournir, de sorte que je préfère m’en préserver. Pas facile à dire ! Au moment où j’écris ces lignes, je ressens immédiatement
l’envie, presque le besoin, de me justifier : non, je ne suis pas misanthrope. J’apprécie beaucoup la compagnie de mes semblables, mais à dose modérée… Autant je me réjouis d’une soirée partagée avec quelques amis, autant je redoute une fête qui réunit une douzaine de personnes ou plus. Ce qui fait de moi un individu plutôt introverti, terme dont la paternité revient au psychiatre suisse Carl Gustav Jung, dissident de Freud. UNE QUESTION DE DOSAGE Voilà la question brûlante : devrais-je faire des efforts pour devenir davantage extraverti ? L’introversion n’est pourtant pas à amalgamer avec la timidité ou l’anxiété sociale. Il n’y a pas forcément chez les introvertis de crainte du jugement des autres. Par exemple, une part de mon
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métier, que j’apprécie beaucoup, est d’assurer des conférences devant un large public. Mais à peine la prestation accomplie, j’aspire à me retrouver seul et à m’isoler. Le paradoxe n’en est un qu’en apparence si l’on envisage l’introversion sous l’angle de la stimulation cognitive. Selon la conférencière américaine Susan Cain, autrice de l’ouvrage La force des Discrets, l’introversion se mesure à la manière dont on réagit aux stimuli de l’environnement et en particulier aux stimuli sociaux. Imaginez que l’introversion se caractérise par un degré de stimulation cognitive plutôt élevé même en l’absence d’interactions avec autrui. La présence des autres entraîne alors rapidement une sursimulation qui se révèle épuisante. Les introvertis sont parfaitement en éveil et au mieux de leurs
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p. 78 Épreuves en temps limité p. 82 Saurez-vous résister au magicien ? p. 88 Amour : qui se ressemble s’assemble !
Réviser sans s’épuiser Cours interminables, notions complexes, sources pléthoriques… Le cerveau est vite surchargé en période de révisions intenses. Heureusement, il existe des moyens, inspirés des sciences cognitives, pour ne pas étouffer sous la surcharge mentale. Par Myriam Schlag, docteure en psychologie et autrice d’un blog sur l’apprentissage (lern-inspiration.de).
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our Léonie, il est temps de se préparer : elle a bientôt un examen sur le système digestif humain. Elle pense utiliser divers documents de son cours de biologie, dont deux manuels, les notes qu’elle a prises pendant la classe et des fiches de travail qu’elle a réalisées ; elle a également récupéré les notes d’un ami qui a passé le même examen qu’elle l’année dernière. Léonie doit donc non seulement comprendre les notions physiologiques en jeu, mais aussi passer au crible les différentes sources dont elle dispose et les combiner de manière significative. Sur son bureau sont éparpillés des transcriptions, des fiches, des exercices, des illustrations de livres et une tablette sur laquelle elle a enregistré des liens utiles. Comment se repérer au milieu de ce fatras ? N’y a-t-il pas des informations qui se répètent, ou au contraire qui se
EN BREF £ Le succès d’un apprentissage ne dépend pas seulement de la complexité et de la longueur du contenu ; la présentation du matériel a également un impact majeur. £ Des sources mal organisées augmentent ainsi la charge cognitive, ce qui pénalise les apprenants. £ Heureusement, ceux-ci peuvent s’organiser eux-mêmes pour faciliter leur apprentissage : par exemple, en fusionnant les textes et les figures qui vont ensemble, ou en écartant – au moins temporairement – les détails divertissants mais non essentiels.
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contredisent ? Que doit-elle exactement en retenir pour réussir ses épreuves ? Autant de considérations qui sollicitent sa mémoire de travail, en plus du contenu à apprendre proprement dit… Comme elle, chaque fois que nous devons acquérir de nouvelles connaissances, nous sommes soumis à ce qu’on appelle de la « charge cognitive ». Cette charge qui pèse donc sur nos ressources mentales ne doit pas devenir trop importante, sous peine de réduire l’efficacité de l’apprentissage. Il faut donc veiller à organiser le matériel pédagogique de façon à la maintenir aussi faible que possible. TROIS FORMES DE CHARGE COGNITIVE Selon une théorie élaborée par le psychologue australien John Sweller à la fin des années 1980, l’apprentissage met en jeu trois catégories principales de charge cognitive. La première est intrinsèque et résulte de la complexité de la matière étudiée. Elle dépend fortement des connaissances préalables : la même tâche peut représenter une charge intrinsèque élevée chez les débutants, et très faible chez une personne qui maîtrise déjà le sujet – et qui
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Une fois toute la documentation réunie pour les révisions, ce n’est que le début du chemin. L’étape décisive consistera à repérer les informations redondantes, les superflues et les contradictoires. Cette aptitude s’exerce et s’apprend : elle est une des clés du succès.
n’aura donc aucune difficulté à intégrer les nouveaux éléments. Il existe aussi une charge cognitive extrinsèque, principalement liée au type de matériel pédagogique. Des informations non pertinentes, redondantes ou distrayantes augmentent fortement cette forme de pression mentale. La troisième catégorie, connue sous le nom de « charge cognitive essentielle », résulte de l’apprentissage proprement dit : elle fait référence à l’effort nécessaire pour constituer de nouveaux schémas cognitifs et stocker de nouvelles connaissances. Elle dépend, entre autres, de la stratégie d’apprentissage choisie. Un certain nombre de critiques ont ciblé la théorie de John Sweller. La psychologue Roxana Moreno (décédée en 2010), de l’université du Nouveau-Mexique, soulignait par exemple que l’apprentissage ne dépend pas seulement des ressources cognitives, mais aussi des émotions et de la motivation. De fait, on ne comprend pas encore très bien les liens entre ces deux derniers facteurs et la charge cognitive. La théorie de John Sweller n’en reste pas moins très influente. Toute une part de la charge
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Saurez-vous résister
au magicien ? Par Cyril Thomas, Morgan Begey et André Didierjean, respectivement maître de conférences en psychologie à l’université de Paris, doctorant et professeur des universités en psychologie à l’université de Franche-Comté de Besançon.
Attention, ils font de votre cerveau ce qu’ils veulent. Vous croyez tirer une carte de votre choix, alors que ce sont eux qui l’ont décidé. Eux ? Des prestidigitateurs. Mais aussi les manipulateurs rencontrés au supermarché, sur internet, ou ailleurs.
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ans notre quotidien, nous sommes confrontés sans cesse à des situations où nous sommes amenés à faire des choix : mettre, ou pas, un sucre dans notre café, acheter, ou non, un vêtement qui nous plaît mais qui semble un peu cher, prendre tel paquet de riz plutôt qu’un autre dans le rayon. Nous savons bien que de nombreux facteurs influent sur nos décisions et que, par exemple, il vaut mieux pour notre budget ou notre ligne ne pas se rendre dans des magasins d’alimentation quand on a très faim… En revanche, ce que l’on sait sans doute beaucoup moins, c’est que certains de nos choix sont délibérément influencés par de petits « gestes » de notre interlocuteur, sans que l’on en ait
EN BREF £ Les magiciens ont plus d’un tour dans leur sac… Et sans que vous en ayez conscience, ils peuvent décider de la carte que vous tirez dans le paquet et croyez pourtant choisir « librement ». £ Leurs méthodes, dites « de forçage », sont étudiées à la loupe par les psychologues pour comprendre tout ce qui peut influencer nos décisions. £ Ainsi, on tendrait souvent vers le choix le moins fatigant ou coûteux, physiquement ou cognitivement.
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conscience. Cette possibilité est fréquemment exploitée lors des spectacles de prestidigitation, mais vendeurs, publicitaires ou négociateurs ne sont pas en reste ! Mais comment agissent-ils ? Pour en avoir le cœur net, les chercheurs en psychologie décortiquent les méthodes mises en œuvre par les professionnels de la manipulation que sont les magiciens. Ces experts en techniques qui permettent de « piéger » la cognition, et pas seulement l’attention, sont des modèles pour comprendre les manipulations plus larges dont nous pouvons être victimes. Et même si ces connaissances sont, chez eux, souvent intuitives et non conceptualisées, le fait d’analyser leur savoirfaire offre des perspectives de recherches fascinantes pour les sciences cognitives. TIREZ UNE CARTE AU HASARD ! En prestidigitation, la situation typique de choix est celle où le magicien présente un jeu de cartes en éventail à un spectateur et lui demande de tirer « librement » l’une d’elles. Bien sûr, le
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SYLVIE CHOKRON
Membre du laboratoire de psychologie et neurocognition à Grenoble et responsable de l’équipe Vision et cognition à la fondation ophtalmologique Rothschild, à Paris.
Amour : qui se ressemble s’assemble !
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La ressemblance physique et intellectuelle serait-elle une clé de l’amour durable ? Oui, pensent les psychologues, qui en cherchent la raison dans la petite enfance.
i on vous interroge sur le choix de votre amoureux ou votre amoureuse, peutêtre répondrez-vous que vous l’avez choisi(e) pour son intelligence, son humour, ses valeurs morales ou encore sa bienveillance. Ou, pourquoi pas, pour son physique. Mais si c’était beaucoup plus simple encore que cela ? En effet, une autre raison, suggérée par des recherches ces dernières années, guiderait nos choix amoureux : le degré de ressemblance avec notre partenaire. Dès lors, le fameux adage « qui se ressemble s’assemble » aurait-il un fondement cérébral ? Se pourrait-il qu’à notre insu nous fassions souvent le choix de passer des années, voire notre vie entière avec notre double ?
EN BREF £ L’homogamie désigne notre tendance à rechercher un autre qui nous soit similaire. £ Une explication de ce comportement avéré serait que nous choisissons un partenaire qui souvent ressemble à notre père ou à notre mère.
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Le terme scientifique pour décrire ce phénomène est « homogamie » ou « homophilie ». Il désigne notre tendance à rechercher un autre qui nous soit similaire. Car dans les faits, les partenaires amoureux ont tendance à se ressembler – non seulement physiquement, mais aussi moralement, voire sur un plan physiologique ou lié à l’origine sociologique. LA PUISSANCE DU MÊME Depuis quelques années, plusieurs équipes ont tenté de percer le mystère de cette recherche d’un autre soi-même. De fait, on ne compte plus les études scientifiques montrant que les couples qui durent ont tendance à se ressembler. La liste
© Charlotte Martin/www.c-est-a-direi.fr
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LIVRES
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p. 92 Sélection de livres p. 94 L’anomalie : le double, révélateur du soi
SÉLECTION
A N A LY S E Cécile Neuville
PSYCHOLOGIE Le Syndrome d’imposture Élisabeth Cadoche et Anne de Montarlot Les Arènes, 2021, 320 pages, 19,90 €
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tudiantes, avocates, comédiennes, architectes ou même première dame… De nombreuses femmes semblent tout réussir dans leur vie et en inspirent beaucoup d’autres par leur exemple. Pourtant, combien d’entre elles doutent encore de leurs capacités et craignent, au fond d’elles-mêmes, que leur incompétence ne soit révélée au grand jour ? Quasiment toutes, selon cet ouvrage sur le syndrome d’imposture. La journaliste Élisabeth Cadoche et la psychothérapeute Anne de Montarlot y unissent leurs compétences pour apporter un éclairage très riche sur ce sentiment d’illégitimité et sur les moyens de s’en libérer. Après avoir détaillé les origines historiques, sociétales et familiales du déficit de confiance en soi, les autrices présentent les différentes formes de ce fameux syndrome d’imposture : l’occasion pour chaque femme de se situer entre la perfectionniste, l’experte, l’indépendante, la surdouée, la superwoman, la dévouée ou la fausse confiante. Les multiples témoignages aideront les lectrices à s’identifier à leurs consœurs et leur donneront le sentiment rassurant de ne pas être seules à ressentir ces doutes, ces peurs, parfois même ces angoisses. Des encadrés réguliers synthétisent en outre l’essentiel à retenir et donnent des conseils pratiques, allant jusqu’à recommander des films, des livres ou des chansons. Autant d’outils précieux pour affronter les fluctuations de la confiance et le regard des autres, mais aussi pour trouver une relation équilibrée et épanouissante avec ses homologues féminines, ses collègues de bureau ou son partenaire amoureux. Coup de cœur en particulier pour le chapitre dédié à l’éducation positive, qui apporte une nouvelle perspective optimiste sur le rôle des parents. Ceux-ci peuvent en faire beaucoup pour aider leurs filles à prendre confiance en elles et à briser le plafond de verre qu’elles s’imposent trop souvent. Même si ce rôle prend parfois des formes inattendues : pour preuve cette étude montrant qu’un des facteurs prédictifs des ambitions professionnelles des femmes est… l’implication de leur père dans les tâches ménagères ! Cécile Neuville est psychologue à Montpellier et dirigeante du centre de formation en psychologie positive ZenPro.
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SANTÉ Stop à la fatigue Grégoire Cozon Dunod
2021, 192 pages, 16,90 €
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i vous souffrez d’un sentiment de fatigue persistant, vous êtes loin d’être le seul : ce sentiment est classé dans le trio des ressentis dominants par près de deux Français sur trois, nous explique le médecin Grégoire Cozon, spécialiste du sujet. Vous trouverez alors dans ce livre tout ce qu’il faut savoir pour réagir. À commencer par des outils – informations scientifiques et questionnaires – pour distinguer une éventuelle pathologie d’un petit coup de mou bien normal après un effort ou une période stressante. Car la fatigue est associée à un grand nombre de maladies, constituant même parfois un syndrome en soi. Et selon l’origine de votre problème, le remède ne sera pas le même…
PSYCHOLOGIE La Bibliothèque idéale de psychologie Jean-François Marmion (dir.) Sciences Humaines 2020, 224 pages, 12,70 €
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rincipes de psychologie, de William James ; Soumission à l’autorité, de Stanley Milgram ; L’erreur de Descartes, d’Antonio Damasio ; L’Intelligence émotionnelle, de Daniel Goleman… Depuis sa naissance à la fin du xixe siècle, la psychologie scientifique a été façonnée par de grands chercheurs, et par les livres qu’ils ont écrits. Une histoire que cet ouvrage collectif nous propose de revisiter, à travers la présentation synthétique de près de 90 titres majeurs. Outre des repères sur un certain nombre de notions encore utilisées de nos jours, il offre une plongée dans les moments les plus marquants de la discipline.
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COUP DE CŒUR Dalila Bovet
BIEN-ÊTRE Les Quatre Temps de la renaissance Michel Lejoyeux JC Lattès
2020, 198 pages, 19,90 €
PSYCHOTHÉRAPIE Dans la tête de ma psy Sylvie Wieviorka HumenSciences 2021, 208 pages, 18 €
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n janvier 2020, plus de 30 % des Français déclarent avoir déjà fait appel à un psy, contre seulement 5 % en 2005 », apprendon dans cet ouvrage. Malgré cette progression fulgurante, la psychothérapie suscite encore nombre de craintes et de réticences, sans compter les difficultés à s’orienter dans la jungle des méthodes proposées. Forte de ses quarante années de pratique, la psychiatre Sylvie Wieviorka livre ici un précieux guide pour s’y repérer, tout en développant avec un grand recul sa propre façon d’envisager le soin psychique.
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otre esprit fonctionne comme un moteur à quatre temps : passé, présent, futur… et gérondif, selon le psychiatre Michel Lejoyeux – ce dernier formant l’arrière-plan à l’action : je marche en sifflotant. La crise sanitaire change notre rapport à ces quatre temps. Les personnes traumatisées revivent leur passé en boucle - ou cherchent à l’oublier. D’autres idolâtrent le présent selon l’idée que vivre l’instant en pleine conscience résout tout. Certains enfin se focalisent avec anxiété sur tous les risques dont le futur est porteur… La clé : reconstruire sa relation à ces trois temps, en faisant davantage appel au quatrième qui met en relation nos émotions avec nos actions. À cette fin, Michel Lejoyeux nous livre des conseils pratiques qui s’appuient sur des études validées.
PSYCHOLOGIE ANIMALE Sauver l’homme par l’animal Georges Chapouthier Odile Jacob, 2020, 240 pages, 23,90 €
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’être humain est un être remarquable sur les plans scientifique et intellectuel, mais un désastre sur le plan moral. » Telle est la conclusion du philosophe et neurobiologiste Georges Chapouthier, face aux sombres actions commises par notre espèce : guerres, esclavage, maltraitance des autres êtres vivants… Mais il propose ensuite une solution originale : pour être plus « humains », il nous faudrait retrouver nos racines animales. L’auteur déploie sa thèse à travers trois chapitres. Le premier décrit les relations entre les humains et les animaux au cours de l’histoire, depuis l’Antiquité grecque jusqu’à nos jours. Le deuxième démontre la continuité de notre intelligence et de celle de nos homologues à poils, à écailles ou à plumes, à travers un survol passionnant des dernières découvertes en la matière. Car beaucoup d’animaux communiquent entre eux, ont des formes de culture, sont victimes de pathologies mentales, éprouvent des émotions, manifestent de l’empathie... Autant de thèmes abordés ici de façon très vivante. Le troisième chapitre, enfin, replace l’intelligence humaine dans ce continuum. L’humain, « singe juvénile », se distingue dans le domaine de la raison, mais aussi dans ceux de l’imagination et de la créativité. Tout en mettant parfois, hélas, ces deux dernières capacités au service d’un déguisement de la réalité, qui le rend capable des pires cruautés malgré son désir de se comporter moralement. Notre espèce est-elle capable de respecter dans la pratique les impératifs moraux qu’elle se donne en théorie ? L’auteur répond par l’affirmative, notamment en prônant le développement d’une éducation appropriée. Il suggère que l’éducation occidentale favorise trop le raisonnement scientifique au détriment d’un certain empirisme émotionnel, probablement plus proche de la pensée sans langage des animaux. Nous devrions alors retrouver la « meilleure part » de cette pensée – l’altruisme et l’empathie –, tout en nous détournant de la violence qui lui est également inhérente. L’objectif : « remettre la morale sur ses deux jambes », à savoir l’intellect, mais aussi l’activité émotionnelle. Dalila Bovet est éthologue et professeuse au laboratoire Éthologie, cognition, développement de l’université Paris-Nanterre.
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LIVRES Neurosciences et littérature
SEBASTIAN DIEGUEZ Chercheur en neurosciences au Laboratoire de sciences cognitives et neurologiques de l’université de Fribourg, en Suisse.
L’Anomalie Le double, révélateur du soi
Et si vous rencontriez votre double ? C’est le scénario imaginé par le roman d’Hervé Le Tellier, prix Goncourt 2020. Où l’on découvre, études de psychologie à l’appui, qu’une telle confrontation nous en apprendrait énormément sur nous-mêmes.
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l se passe parfois des choses étranges dans la vie, mais on a tout de même rarement l’occasion de tomber nez à nez avec son double. Ce genre de mésaventure appartient plutôt, et heureusement, au domaine de la fiction, où les copies, divisions, avatars, simulacres et autres dédoublements du soi abondent. Il s’agit même d’un thème classique, tant on le retrouve dans les mythes, les contes ou le théâtre antique, et chez des auteurs aussi reconnus que Dostoïevski, Maupassant, Hoffmann, Stevenson, Poe, Borges ou Nabokov. De fait, nous sommes fascinés par la figure du doppelgänger, cet autre soi-même qui s’introduit dans la vie d’un personnage ordinaire, généralement pour le conduire aux confins de la folie. Et l’imaginaire du double, malgré ou peut-être grâce à sa radicale incongruité, ne montre aucun signe
EN BREF £ Dans L’Anomalie, un avion se duplique mystérieusement et la « copie » est projetée trois mois dans le futur, avec tous ses passagers. £ La rencontre avec leur double révèle à certains d’entre eux les illusions qu’ils ont sur eux-mêmes – illusions en effet communément observées par les psychologues. £ De nombreux troubles neurologiques provoquent ce type de dédoublement, suggérant que notre identité est loin d’être aussi « unitaire » qu’on ne l’imagine.
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d’épuisement, puisqu’il est au cœur du dernier prix Goncourt, attribué à Hervé Le Tellier pour son roman L’Anomalie. Il y émerge comme un puissant révélateur de l’identité, ainsi que des ambiguïtés inhérentes à cette notion. Le roman rejoint en cela les observations d’un domaine presque aussi étrange que la littérature fantastique : la clinique neurologique… DES TURBULENCES DANS LA RÉALITÉ L’Anomalie repose sur un dispositif simple, mais aux conséquences innombrables. Alors qu’il s’approche de sa destination, un vol ParisNew York est pris dans une zone de turbulences aussi soudaine que violente. L’équipage et les passagers en sont quittes pour une bonne frayeur, mais ce n’est rien comparé à ce qui les attend. Les autorités sont en effet très perplexes : cet avion n’est au programme d’aucun plan aérien et semble surgi de nulle part. De plus, il a apparemment déjà atterri sans encombre… il y a trois mois de cela ! L’enquête aboutit à une conclusion irréfutable, bien qu’inconcevable : c’est exactement le même vol qui s’est posé une seconde fois, à 106 jours d’intervalle, avec ses 243 passagers à l’identique.
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À retrouver dans ce numéro
p. 78
AIRE MOTRICE
Une partie de notre cerveau qui prépare nos mouvements, l’aire motrice supplémentaire, nous sert aussi à évaluer des durées : elle les estime en fonction du temps qu’il nous faut pour accomplir certains gestes. p. 62
PHILANTHROPE
L’inventeur du vaccin contre la poliomyélite, le biologiste américain Jonas Salk, n’a jamais déposé de brevet sur son invention qui a sauvé des millions de vies à partir de 1955.
p. 88
p. 46
SINGES SURMOTIVÉS
Dans les années 1950, le psychologue américain Henry Harlow remarque un comportement étrange chez des singes : ceux-ci se mettent à réaliser pour le plaisir des tâches de laboratoire qu’ils faisaient auparavant uniquement en échange de cacahuètes ! La motivation intrinsèque est née…
BREBIS PERVERTIES
« Des brebis élevées par des chèvres imitent, adultes, leurs mères adoptives : elles préfèrent s’accoupler avec des boucs qu’avec des moutons. » Sylvie Chokron, université de Grenoble-Alpes
p. 26
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des personnes ayant des lésions cérébrales dues à la présence de plaques d’amyloïde ne développent pas de maladie d’Alzheimer dans les cinq ans qui suivent.
p. 12
p. 32
ALCOOLOREXIE
Ce syndrome combine l’alcoolisme et l’anorexie : le ou la patient(e) se force à ne pas manger pour rester mince – et pouvoir continuer à boire de façon excessive, souvent lors de sorties entre ami(e)s… Une prise en charge urgente est généralement nécessaire.
GLYMPHATIQUE
Ensemble de fins canaux entourant les vaisseaux sanguins du cerveau, le réseau glymphatique permet d’évacuer, durant notre sommeil, les déchets moléculaires produits par les neurones. Il servirait ainsi à éviter l’apparition de maladies liées à l’accumulation de ces déchets telle la maladie d’Alzheimer.
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JEUNESSE TROMPEUSE
À 40 ans, nous avons l’impression d’être 20 % plus jeunes que notre âge véritable. La différence ne fait ensuite que s’accroître.
Imprimé en France – Maury imprimeur S. A. Malesherbes– Dépôt légal : avril 2021 – N° d’édition : M0760131-01 – Commission paritaire : 0723 K 83412 – Distribution : MLP – ISSN 1639-6936 – N° d’imprimeur : 252 431 – Directeur de la publication et gérant : Frédéric Mériot