Cerveau & Psycho
N° 85 Février 2017
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POURQUOI A-T-ON BESOIN DE GAGNER PLUS QUE SON VOISIN ?
DOULEURS CHRONIQUES Les traitements qui marchent emdr, hypnose, stimulation transcrânienne, kétamine… NEUROSCIENCES VERS UNE CARTE COMPLÈTE DU CERVEAU
MANIPULATION REPÉRER LES RUSES DES RESTAURATEURS DÉPRESSION LA FORCE DE L’ACTIVATION COMPORTEMENTALE LE CAS RONALDO IDOLÂTRER UN FRAUDEUR ? D : 10 €, BEL : 8,5 €, CAN : 11,99 $ CAD, DOM/S : 8,5 €, LUX : 8,5 €, MAR : 90 MAD, TOM : 1 170 XPF, PORT.CONT. : 8,5 €, TUN : 7,8 TND, CH : 15 CHF, ESP : 7,70 €
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DU QUOTIDIEN
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N° 85
NOS CONTRIBUTEURS
ÉDITORIAL
p. 14-19
SÉBASTIEN BOHLER
Jeff Lichtman
Professeur de biologie moléculaire et cellulaire à l’université Harvard, ce pionnier de l’imagerie microscopique du cerveau a révolutionné notre connaissance des réseaux cérébraux en établissant des cartes en 3D de nos neurones.
p. 40-45
Bernard Calvino
Neurophysiologiste spécialisé en pharmacologie de la douleur, ancien titulaire de la chaire de Physiologie de l’ESPCI, ancien responsable d’une équipe de recherche de l’Inserm puis du CNRS, sur la douleur chronique.
p. 56-63
Chantal Wood
Médecin responsable du Centre de la douleur chronique du CHU de Limoges, membre de la Société française d’étude et de traitement de la douleur (SFETD), et membre pédagogique du diplôme universitaire (DU) Hypnose et thérapies brèves de Limoges.
p. 64-66
Christian Bromberger
Professeur émérite d’anthropologie à l’université de Provence, membre sénior de l’Institut universitaire de France, il est l’auteur d’une description sociologique du football révélant les liens entre les enjeux du terrain et ceux de la société.
Rédacteur en chef
Cerveau humain contre Google : qui gagne ?
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arack Obama a quitté la Maison Blanche mais il nous laissera quelques belles phrases. Une de mes préférées : « Les prochaines terres inconnues ne se situeront pas au-delà des galaxies mais dans le kilo et demi de matière grasse qui se trouve entre nos deux oreilles. » Comprenez par là : le cerveau. Sans doute ne pouvait-il pas encore savoir à quel point il avait raison. Aujourd’hui, lorsque les scientifiques plongent dans l’infiniment petit de notre organe de la pensée, ils découvrent bien plus que des galaxies. Un entrelacs sans fin de connexions dont la complexité défie les capacités des plus puissants ordinateurs, et dont le traitement intégral demanderait plus de puissance que tous les serveurs de Google réunis. Ce voyage vers le nouvel infini qui loge en chacun de nous, nous vous invitons à le faire en page 14. À ce jour, nul ne sait encore où il nous emmènera... Ce que l’on sait en revanche, c’est que les connexions de nos neurones sont plastiques. En se renforçant lorsqu’elles sont stimulées, elles fixent nos souvenirs et nous dotent d’une mémoire et d’un passé. Mais il y a un prix à payer : nos souffrances aussi sont mémorisées par ce même mécanisme, provoquant parfois le retour d’une douleur qui devient alors chronique. C’est pourquoi les chercheurs redoublent d’efforts pour effacer ce souvenir et défaire les connexions qui nous tyrannisent. Tels des ingénieurs système réparant les connexions d’un serveur plus grand – et plus fort – que Google... £
N° 85 - Février 2017
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SOMMAIRE N° 85 FÉVRIER 2017
p. 14
p. 20
p. 24
p. 39-63
Dossier
p. 30
p. 6-36
DÉCOUVERTES p. 6 ACTUALITÉS La molécule qui déforme le temps Alzheimer : la lumière qui guérit Oublier sa peur des araignées p. 12 FOCUS
p. 39 p. 30 G RANDES EXPÉRIENCES DE PSYCHOLOGIE
DANIELA OVADIA
DOULEURS CHRONIQUES p. 40 N EUROBIOLOGIE
Les inégalités sociales rendraient malade
Au doigt et à l’œil
POURQUOI LA DOULEUR RESTE EN MÉMOIRE
Bruno Humbeeck
Daniela Ovadia
Bernard Calvino
Notre système immunitaire prend de plein fouet les effets de la précarité. p. 14 NEUROSCIENCES
L’objet le plus complexe de l’Univers Les capacités des ordinateurs semblent dépassées par la complexité du cerveau.
Nous aurions deux systèmes visuels. L’un reconnaît les objets, l’autre guide la main pour les saisir. p. 34 INFOGRAPHIE
Aux origines du cerveau
Cinq cents millions d’années d’évolution des systèmes nerveux, en images.
Jeff Lichtman, Hanspeter Pfister, Nir Shavit et Anna von Hopffgarten
Texte : Anna von Hopffgarten Graphique : Martin Müller
p. 20 C AS CLINIQUE
p. 36 LA QUESTION DU MOIS
La perroquet-thérapie Comment un patient dépressif a été sauvé par ses chers volatiles. David J. Hellerstein
p. 24 C OMPORTEMENT
Le parasite qui nous manipule
Une modification des circuits neuronaux de la douleur grave une empreinte durable des souffrances passées. p. 46 I NTERVIEW
ACTIVER LES NEURONES CALME LA DOULEUR
Un traitement d’avenir : la neurostimulation. Jean-Pascal Lefaucheur
p. 52 P SYCHOSOMATIQUE
QUAND TRAUMA Comment la patineuse PSYCHIQUE ET DOULEUR FONT QU’UN évite-t-elle le tournis ? NE Quand un choc psychologique engendre Patineurs et danseurs ont une façon particulière de déplacer leur regard pour contrer les effets du vertige. Amir Kheradmand
des douleurs physiques, longtemps après. Antoine Bioy
p. 56 T HÉRAPIES
APPRENDRE À VIVRE AVEC LA DOULEUR
Avoir la toxoplasmose pourrait modifier la personnalité.
Méditation, EMDR, hypnose : ces solutions aident à ne plus subir la douleur.
Gustavo Arrizabalaga et Bill Sullivan
Franck Henry et Chantal Wood
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5
p. 64
p. 68
p. 94 p. 74
p. 80
p. 70 p. 86
p. 92
p. 64-73
p. 74-90
ÉCLAIRAGES
VIE QUOTIDIENNE LIVRES
p. 64 R ETOUR SUR L’ACTUALITÉ
p. 74 N EUROLOGIE
Ronaldo, mon fraudeur bien-aimé
Vénéré pour ses exploits sur le terrain, désavoué pour ses agissements frauduleux, il force ses fans à un grand écart affectif. Christian Bromberger
p. 68 À MÉDITER CHRISTOPHE ANDRÉ
Non ! Je n’irai pas chez le psy… On trouve toujours une raison de ne pas aller chez le psy. Mais est-elle la bonne ? p. 70 U N PSY AU CINÉMA
p. 92-98
Mortelles secousses ? On recense environ 200 cas de syndrome du bébé secoué chaque année en France. Mais attention aux faux diagnostics... Josephina Maier
p. 80 PSYCHOLOGIE
Ah ! Si j’étais riche…
Seriez-vous plus heureux si vous gagniez plus ? Pas si sûr, révèlent de récentes études. Miriam Berger
p. 86 L ES CLÉS DU COMPORTEMENT NICOLAS GUÉGUEN
Dîner sous influence Un restaurant est un lieu où, par définition, on a le choix. Mais ce choix pourrait n’être qu’une illusion.
SERGE TISSERON
Sully : pas de pitié pour les héros
Ce film de Clint Eastwood révèle comment un exploit peut constituer un traumatisme. En couverture : © Getty Images/Yuri_Arcurs
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p. 92 L IVRES Cessez de vous déprécier ! Métro psycho dodo Éviter les erreurs médicales grâce à la simulation Développer le self-control de son enfant Trouble déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité Guérir grâce à la neuroplasticité p. 94 N EUROSCIENCES ET LITTÉRATURE SEBASTIAN DIEGUEZ
Lettre d’une inconnue La fameuse nouvelle de Stefan Zweig contenait une description avant l’heure du phénomène de stalking, ou harcèlement amoureux.
DÉCOUVERTES
6
p. 6 Actualités p. 12 Focus p.p. 1400 L’objet Xxxxxxxxxx le plus complexe p. 00 Xxxxxxxxxx de l’univers p. 00 20 Le Xxxxxxxxxx cas cliniquep.p. 0024 Xxxxxxxxxx Le parasite qui nous manipule p. 30 Grandes
Actualités Par la rédaction NEUROBIOLOGIE
La molécule qui déforme le temps
L’activation de neurones producteurs de dopamine suffit pour que le temps semble soudain passer plus vite, selon une étude portugaise. S . Soares et al., Midbrain dopamine neurons control judgment of time, Science, vol. 354, pp. 1273-1277, 2016.
© Gil Costa
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ne heure s’est écoulée, mais vous avez l’impression que c’était à peine dix minutes. Plongé dans un film, un livre ou un jeu qui vous passionne, vous n’avez pas vu le temps passer. Pourtant, votre montre a égrené exactement le même nombre de secondes que lors de cette conférence ou cette réunion qui vous a ennuyé à mourir, et qui ne semblait plus avoir de fin. Comment une durée identique peut-elle être perçue de façon si différente ? C’est que votre horloge interne, elle, n’a pas produit le même nombre de battements. À savoir, des signaux électriques périodiques émis par notre cerveau, et qui sont ralentis par un afflux de dopamine, comme viennent de le découvrir Sofia Soares et ses collègues du Centre Champalinaud, à Lisbonne. Lorsque vous pratiquez une activité agréable, la dopamine, que l’on sait associée au plaisir, réduirait donc le nombre de tics cérébraux produits pendant un
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expériences de psychologie p. 34 L’infographie p. 36 La question du mois PSYCHOLOGIE RETROUVEZ LA PAGE FACEBOOK DE CERVEAU & PSYCHO
Plus impulsifs le soir . J. Leone et al., Cognition, M vol. 58, pp. 44-55, 2017.
à modifier génétiquement certains neurones pour les rendre activables par la lumière. Une fibre optique insérée dans le cerveau permet alors de les allumer à volonté. Résultat : quand les chercheurs activaient les neurones dopaminergiques, le temps s’accélérait pour les souris. Ainsi, un même intervalle entre deux sons était plus souvent estimé comme court (inférieur à 1,5 seconde). LES BONS MOMENTS PASSENT TOUJOURS TROP VITE Cette influence de la dopamine expliquerait que le temps nous semble passer plus vite quand nous prenons du plaisir, car les neurones dopaminergiques inondent alors notre cerveau de cette substance. Elle va toutefois à l’encontre d’un certain nombre d’autres travaux, selon lesquels la dopamine tendrait plutôt à étirer le temps. La synthèse reste donc à faire. Elle est rendue complexe par les influences multiples s’exerçant sur la perception du temps, qui dépend par exemple des émotions ou de facteurs attentionnels. De nombreux systèmes cérébraux entrent ainsi en jeu, et ils répondent sans doute différemment à la dopamine. Il est en tout cas acquis que cette molécule, qui influence tant nos comportements et nos ressentis, est aussi l’un des rouages essentiels de notre horloge cérébrale. £ Guillaume Jacquemont
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P
lutôt que « la nuit porte conseil », peutêtre faudrait-il dire « la soirée induit en erreur », suggèrent les résultats obtenus par l’équipe de Mariano Sigman, de l’université Torcuato di Tella, en Argentine. Les psychologues ont en effet montré que plus la journée avance, plus nous prenons des décisions de façon impulsive. Pour leur étude, ils se sont fondés sur un des plus formidables réservoirs de décisions humaines que l’on puisse imaginer : un serveur de jeux d’échecs en ligne. À chaque partie, un joueur effectue une quarantaine de coups. Au total, ce serait plusieurs milliers de millions de décisions qui seraient stockées dans le serveur utilisé. Celles-ci, selon les chercheurs, sont suffisamment complexes pour modéliser avantageusement la vie réelle, et en même temps assez cadrées pour que leurs caractéristiques soient facilement mesurables. Les chercheurs ont ainsi défini une erreur comme un coup qui s’éloigne notablement du « coup parfait », calculé par ordinateur. Ils ont trouvé qu’en fin d’après-midi et en soirée, les joueurs prenaient des décisions plus vite que le matin, mais commettaient davantage d’erreurs. Un phénomène que les auteurs de l’étude attribuent aux fluctuations chimiques naturelles survenant dans notre cerveau au cours de la journée. Dans certaines situations, il est utile de se décider vite, quitte à risquer de se tromper. Mais pour les choix lourds de conséquences et nécessitant de peser avec soin un certain nombre de paramètres, évitez donc le soir… £ G. J.
© Shutterstock.com/Christian Mueller
temps fixé, donnant l’impression d’un temps subjectif plus court, et transformant une heure interminable en quelques « minutes neuronales ». Pour le montrer, les neuroscientifiques ont bloqué l’activité de neurones dopaminergiques (producteurs de dopamine) grâce à des produits pharmaceutiques injectés dans le tronc cérébral de souris, puis ont testé leur perception des durées. Plus facile à dire qu’à faire quand il s’agit d’un rongeur. Mais les chercheurs ont trouvé un dispositif ingénieux pour y parvenir. En appuyant avec son nez sur un bouton, la souris déclenchait l’émission de deux sons : si l’intervalle qui les séparait était supérieur à 1,5 seconde, elle devait ensuite presser un autre bouton, situé à droite ; s’il était inférieur, il lui fallait presser un troisième bouton, à gauche. Elle recevait une récompense en cas de bonne réponse. Après une phase d’apprentissage, les animaux réussissaient presque à tous les coups – sauf quand l’intervalle était très proche de 1,5 seconde, auquel cas il était plus difficile de trancher. Mais quand les chercheurs ont bloqué leurs neurones dopaminergiques, leurs performances se sont dégradées, signe qu’ils ne percevaient plus le temps de la même façon. Pour étudier plus précisément cette déformation temporelle, les chercheurs ont utilisé des techniques d’optogénétique. Celles-ci consistent
DÉCOUVERTES F ocus
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BRUNO HUMBEECK
Chercheur en psychologie familiale et scolaire à l’université de Mons, en Belgique, membre associé du laboratoire Civiic, à l’université de Rouen. PSYCHOLOGIE SOCIALE
Les inégalités sociales rendraient malade
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a pauvreté est régulièrement pointée du doigt comme un facteur de faible espérance de vie et de maladie. Une étude récente vient de préciser comment ce lien opère. Dans cette étude, des chercheurs de l’université Duke, à Durham, aux États-Unis, ont mesuré la qualité du système immunitaire de macaques en fonction de leur statut social dans leur groupe, et ont observé que celuici s’affaiblissait si le rang social diminuait, et vice versa. Cet effet se comprend si l’on observe le fonctionnement d’une colonie de macaques, ce qui est particulièrement visible chez les macaques japonais, cousins des macaques rhésus, observés dans cette étude. Dans leur milieu naturel, les macaques japonais sont soumis à divers facteurs de stress : froid intense, difficultés d’accès à la nourriture, augmentation des agressions entre membres du groupe, positionnement en périphérie du groupe qui renforce la menace des prédateurs. Or, tous les animaux ne sont pas logés à la même enseigne. Il suffit,
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pour s’en convaincre, d’observer les singes de haut rang et leur progéniture s’épouiller mutuellement dans des sources chaudes et relaxantes, stimulant ainsi tout naturellement une « zen attitude » durable pendant que les autres, les moins nantis et leur descendance, font l’objet d’agressions multiples, renoncent à toute forme d’épouillage et prennent le froid de plein fouet à la périphérie des jacuzzis où la température, impitoyable, peut tomber jusqu’à moins trente. Les quarante degrés de différence s’ajoutent aux failles d’un système immunitaire diminué par le stress pour réduire l’espérance de vie. Ces recherches nous alertent directement sur notre rôle humain et collectif dans la prévention des maladies. £
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Dans les expériences de Noah Snyder-Mackler et ses collègues, des singes de rang social élevé (a) sont rassemblés dans de nouveaux groupes (b) où s’instaurent de nouvelles hiérérarchies. Tandis que les individus dominants gardent un bon système immunitaire, les animaux de rang inférieur voient leur immunité s’effondrer, d’autant plus fortement qu’ils sont relégués au bas de l’échelle sociale. Source : N. Snyder-Mackler et al., Social status alters immune regulation and response to infection in macaques, Science, vol. 354, p. 1041, 2016.
UN SIGNAL D’ALARME
Les politiques préventives en matière de soins aux démunis feraient bien de s’inspirer de ces études. Lutter contre le déclassement social et favoriser les stratégies positives d’inclusion active apparaît sous cet angle bien plus efficace que toutes les stratégies orthogéniques qui visent à restaurer vaille que vaille l’état de santé de personnes devenues malades parce que leur système immuniaire s’est effondré.
© Cerveau & Psycho - Shutterstock.com
Selon une étude récente, une diminution de statut social aurait un impact négatif sur le système immunitaire.
MIEUX VOIR
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Les méthodes d’imagerie de précision révèlent la forêt inextricable de nos connexions cérébrales. Représenter une tête d’épingle de tissu cérébral avec cette précision équivaut à six cents ans de travail du plus performant des microscopes.
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DÉCOUVERTES N eurosciences
L’objet le plus complexe
de l’univers Par Jeff Lichtman, Hanspeter Pfister, Nir Shavit et Anna von Hopffgarten.
Aujourd’hui, l’imagerie de précision nous donne accès aux recoins les plus reculés du cerveau. Mais un problème surgit : pour traiter ces données, il faudrait une puissance supérieure à celle de tous les serveurs de Google réunis.
Daniel Berger, MIT ; avec l’aimable autorisation de Jeff Lichtman
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ans notre cerveau, environ 100 milliards de neurones forment un enchevêtrement inextricable d’axones, de dendrites et de « corps cellulaires », parties des neurones qui renferment leur noyau. Comprendre comment les neurones sont organisés et communiquent les uns avec les autres est une longue aventure qui est encore loin d’être terminée. Ainsi, il y a un siècle, un anatomiste allemand du nom de Korbinian Brodmann (1868-1918) réussissait à cartographier de façon grossière, à l’aide de techniques de colorisation particulières, la partie externe du cerveau humain, son écorce encore appelée cortex. Il les divisa en champs qui se distinguaient les uns des autres par leur architecture cellulaire (la façon dont les neurones étaient disposés les uns par rapport aux autres) et par leur fonction. Pourtant, comme on le constata ultérieurement, la carte qu’il établit ne rendait pas entièrement compte de la complexité du cerveau. Lorsqu’on tente aujourd’hui de sonder son fonctionnement,
EN BREF ££Pour comprendre comment fonctionne notre cerveau, les chercheurs observent sa structure intime par microscopie électronique et reconstruisent les connexions sur des supports digitaux. ££Il en résulte des masses de données colossales qui dépassent les capacités de traitement actuelles. ££De nouvelles représentations « allégées » des réseaux de neurones sont à inventer.
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on est obligé de porter son regard sur les connexions entre les cellules nerveuses et entre différents réseaux de neurones. Les nouvelles méthodes d’imagerie cérébrale offrent une vue toujours plus précise sur les structures du cerveau qui expliquent son fonctionnement. Le premier projet de ce genre fut relativement simple de ce point de vue : il s’agissait d’une carte du système nerveux du tout petit ver Caenorhabditis elegans qui possède environ 300 neurones. Publiée en 1986, elle demanda pourtant quatorze ans de travail. Par la suite, grâce à l’amélioration des méthodes de préparation et de microscopie, associée à la montée en puissance des logiciels de traitement des données, de plus gros cerveaux ont pu être cartographiés. Et les dix dernières années ont vu l’essor d’une nouvelle discipline des neurosciences : la connectomique. Ce domaine de recherche est encore jeune, de sorte que les neuroscientifiques ne sont pas unanimes sur ce qu’il convient de faire avec les masses de données obtenues chaque jour sur le cerveau humain. Car le fait de savoir avec quels voisins un neurone est connecté n’est de loin pas suffisant pour connaître précisément son rôle et sa fonction dans l’ensemble. Et même si l’on y
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La perroquetthérapie
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DÉCOUVERTES C as clinique
Par David J. Hellerstein, Psychiatre et chercheur à l’Institut psychiatrique de l’État de New York, et professeur de psychiatrie clinique à l’université de Columbia.
Guérir grâce à des perroquets ? C’est la surprenante histoire d’un patient dépressif qui sortit de son apathie en construisant des accessoires pour ses oiseaux. Peu importe le moyen : il nous montre que l’important est de faire quelque chose que l’on aime.
EN BREF ££Malgré divers traitements, un patient dépressif ne parvient pas à faire le moindre mouvement.
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© Shutterstcock.com/Eric Isselee
££Le psychologue qu’il voit depuis dix ans lui conseille alors une « thérapie d’activation comportementale » : reprendre peu à peu des activités. ££C’est ainsi qu’un jour, Frank prend plaisir à construire une cage à ses perroquets… puis ne s’arrête plus. Dans son cerveau, son circuit de la récompense s’est réactivé.
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ranck était coincé, sa vie n’avançait plus. Ce n’était pas de la paresse : il avait essayé plusieurs types de psychothérapies pour se remettre sur la bonne voie quelques années après avoir quitté son emploi bien rémunéré, mais ennuyeux, d’agent immobilier. Cependant, mois après mois, immobile, Frank voyait son compte en banque se vider et déprimait de plus en plus. Quand je l’ai rencontré pour la première fois il y a environ dix ans dans mon cabinet pour une évaluation psychiatrique, Frank présentait clairement les symptômes d’une dépression grave : humeur morose, sommeil perturbé, sentiments de désespoir et pensées suicidaires. Je lui ai alors prescrit de la sertraline, un antidépresseur de la famille des inhibiteurs de la recapture de la sérotonine (une molécule de communication cérébrale). En huit semaines, son humeur, son sommeil et d’autres symptômes se sont améliorés. Mais il était encore inactif. Pendant des mois, il est resté au chômage, assis à la maison avec ses perroquets gris africains, qu’il adore, ne quittant son appartement que pour aller à ses rendez-vous avec les médecins. Du côté des psychothérapies, les résultats n’étaient pas beaucoup plus encourageants.
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© Moredun Scientific ltd/Science Photo Library - Getty Images
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Le protozoaire Toxoplasma gondii (en vert) s’est répliqué dans des cellules de foie et a formé un kyste qui lui permettra de survivre pendant des années. Et peut-être, de modifier votre comportement.
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DÉCOUVERTES C omportement
Le parasite qui nous manipule Par Gustavo Arrizabalaga et Bill Sullivan.
Avoir la toxoplasmose est un fait presque banal aujourd’hui. Mais imaginiez-vous que cette maladie pourrait modifier votre personnalité ? Chez certains animaux, le parasite Toxoplasma gondii provoque même des comportements suicidaires.
I
maginez un monde sans peur. Quel soulagement que de pouvoir vivre l’esprit dégagé de toute appréhension ! Nous pourrions traverser les rues encombrées sans la moindre appréhension, connaître des aventures frissonnantes et voir toutes sortes de films d’horreur sans broncher. Mais à y regarder de plus près, une telle perspective apparaît plutôt inquiétante, pour ne pas dire mortelle. Car évidemment, nos peurs nous protègent en grande partie. Ne pas regarder à gauche et à droite avant de traverser réduirait fortement votre espérance de vie. L’absence totale de peur du vide ou de la vitesse conduit aux mêmes funestes résultats. Prenez les souris : en voilà qui sont protégées à chaque minute de leur vie par leur peur instinctive des chats. Or, ce qui les menace réellement, c’est justement un ennemi invisible qui leur ôte cette saine frayeur : le parasite unicellulaire Toxoplasma gondii. Ce protozoaire modifie le système nerveux des rongeurs d’une étrange façon : au lieu de s’enfuir à la vue d’un chat, ils éprouvent pour lui une dangereuse attirance.
EN BREF ££Le protozoaire Toxoplasma gondii s’attrape généralement à travers les chats ou la viande crue. ££Chez la souris et d’autres animaux, il fait disparaître la peur des félins, causant leur perte. ££Chez l’homme, des indices suggèrent qu’il altèrerait la personnalité. ££Ces effets s’expliqueraient par une modification de l’expression de l’adn.
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L’influence de Toxoplasma gondii ne se restreint pas aux rongeurs. Il infecte aussi le cerveau de milliards d’autres animaux terrestres, aquatiques ou aériens. L’homme ne fait pas exception. Les scientifiques estiment qu’à la surface de la Terre trois milliards d’humains sont porteurs de ce protozoaire. En France, il s’est immiscé dans les circuits nerveux d’un habitant sur deux ; dans d’autres pays, le taux de contamination atteint 95 %. Pour la plupart des gens, une infection par le parasite n’entraîne aucun symptôme apparent, mais de récents résultats de recherches ont montré que le toxoplasme remodèle activement les cellules cérébrales des mammifères à une échelle moléculaire. Certains chercheurs pensent à présent que cet organisme microscopique provoque des modifications insidieuses du fonctionnement cérébral qui vont jusqu’à altérer la personnalité. Toxoplasma gondii a été découvert en 1908. Un siècle plus tard, les chercheurs se sont fait une représentation assez précise de la façon dont il infecte les êtres humains. Tout commence, généralement, avec un chat. Pour des raisons encore inconnues, le chat est l’hôte final de ce microbe : ce n’est que dans son intestin que l’unicellulaire peut se reproduire de façon sexuée. Le protozoaire est expulsé dans ses fèces, mais les chats
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DÉCOUVERTES G randes expériences de psychologie
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Au doigt et à l’œil Par Daniela Ovadia, codirectrice du laboratoire Neurosciences et société de l’université de Pavie, en Italie, et journaliste scientifique.
À la fin des années 1980, une découverte extraordinaire révolutionne la compréhension de la vision : notre cerveau possède deux systèmes visuels. Le premier reconnaît les objets, le second les localise et guide notre main vers eux.
orsqu’ils entament leurs recher ches sur le système visuel, David Milner et Melvyn Goodale sont loin de s’imaginer qu’ils vont remettre en cause l’un des concepts fondamentaux de l’anatomie fonctionnelle humaine. Et pourtant, ils découvriront que notre cerveau ne possède pas un seul système visuel, comme on l’avait toujours pensé, mais bien deux, indépendants et chargés de tâches différentes et complémentaires. D’où est venue l’idée de ces deux systèmes ? « Après tout, nous n’avons qu’une paire d’yeux, et une seule et univoque expérience visuelle du monde », constatent les deux neuroscientifiques, respectivement professeur à l’université de Durham, en Grande-Bretagne, et directeur du Brain and Mind Institute de l’université Western, dans l’Ontario, au Canada, dans un article publié par The Psychologist en 2006. « Il serait donc naturel de supposer que le cerveau n’a qu’un seul instrument d’élaboration des images. »
EN BREF ££David Milner et Melvyn Goodale ont analysé le cas de la patiente D. F., qui, suite à une lésion cérébrale, ne reconnaissait plus ce qu’elle voyait, mais restait capable d’utiliser sa vision pour saisir des objets. ££Les neuroscientifiques en ont déduit que le cerveau a deux systèmes visuels anatomiquement distincts. ££Le premier analyse la nature des objets et en crée une représentation consciente, le second les localise dans l’espace et guide les gestes.
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© Stefano Fabbri
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DÉCOUVERTES L ’infographie
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Aux origines du cerveau Il a fallu 500 millions d’années aux premiers systèmes nerveux pour évoluer vers les cerveaux complexes des mammifères et de l’homme. Le plus souvent, en conservant des éléments constitutifs que l’on reconnaît chez la plupart des espèces animales. Texte : Anna von Hopffgarten/Illustrations : Martin Müller
Chez les vertébrés inférieurs, le tectum est le principal centre d’intégration sensorielle. Le télencéphale ne prend en charge cette fonction que chez les oiseaux et les mammifères. 2 mm Poisson rouge
7 mm 3 mm
Poisson tapir
Le poisson tapir utilise le courant pour s’orienter. Son énorme cervelet traite les signaux que recueillent ses récepteurs électriques.
Stör Vrais poissons osseux
Chondrostéens (Esturgeons)
Truite 5 mm
Requin gris
5 mm
7 mm
Poisson-chat Élasmobranches
Holocéphales
Poissons osseux Lamproie 3 mm Poissons cartilagineux Lamproies
Le plus primitif des Chordés, l’amphioxus ou lancelet, n’a pas de cerveau. Son système nerveux central est composé d’un tube neural et d’une vésicule céphalique. La plus ancienne architecture cérébrale des vertébrés apparaît chez la lamproie.
1 mm
Amphioxus Acrâniens
Vertébrés
Chordés N° 85 - Février 2017
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Alors que le tronc cérébral s’est très peu modifié au fil de l’évolution, le télencéphale a subi de larges remaniements. La partie la plus développée et antérieure du cerveau confère aux mammifères des capacités complexes, notamment d’adaptabilité et d’apprentissage. Pour rester confiné dans un volume crânien restreint, le cortex a dû se plisser.
Rorqual commun
Chien 60 mm 25 mm
40 mm
15 mm
Mammifères supérieurs Homme 10 mm
7 mm Ornithorynque
Pigeon
Lépidosauriens (serpents et lézards)
Mammifères primitifs
Synapsidés
Python
Diapsidés
Crocodiles
Oiseaux
10 mm
De nombreux oiseaux ont un gros cervelet pour se déplacer avec précision en trois dimensions. Leur télencéphale développé leur confère une intelligence parfois supérieure. Perroquet 10 mm
Tortues
Alligator
Amphibiens Rainette
3 mm
Bulbe olfactif
Cervelet
Télencéphale
Nerfs, hypophyse
Tectum
Autres structures
Source : R. Nieuwenhuys et al., The Central Nervous System of Vertebrates, Springer, Heidelberg, 1998
Chimpanzé
10 mm
Tortue
Le cerveau des vertébrés présente un même plan d’organisation : le tronc cérébral et le mésencéphale assurent des fonctions vitales comme la respiration et les battements cardiaques, le cervelet coordonne les mouvements et le télencéphale gère des fonctions supérieures comme la prise de décision et la planification.
2 mm
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Dossier
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POURQUOI LA RESTE EN MÉMOIRE Près de un adulte sur cinq souffre de douleur chronique : mal de dos, de tête, douleur post-chirurgicale inexpliquée… En cause : une modification du circuit neuronal de la douleur, qui est alors « mémorisée » dans les neurones. Par Bernard Calvino, professeur honoraire de neurophysiologie de l’École supérieure de physique et de chimie industrielles (espci), à Paris.
La douleur se propage de neurone en neurone le long d’un circuit. Parfois, elle s’imprime durablement dans ces cellules, engendrant alors une douleur chronique.
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DOULEUR
aul s’est fait opérer du genou en septembre 2015. Et il a toujours mal aujourd’hui, plus de un an après. Du coup, il commence à se poser des questions : est-ce que la douleur liée à la lésion des tissus lors de l’intervention chirurgicale aurait pu s’enraciner, se graver en quelque sorte, dans son corps pour ne plus le quitter ? Mais où se trouverait cette trace ? Et si on le savait, pourrait-on l’effacer ? C’est exactement la piste que poursuivent les chercheurs sur la douleur chronique. Selon cette hypothèse, confortée par de récents résultats, un mal anodin devient chronique à partir du moment où il est mémorisé quelque part dans les circuits neuronaux de la douleur, entre la partie du corps qui souffre et le cerveau. Mais qu’est-ce que la mémoire ?
EN BREF ££Une douleur, au dos ou à un membre, après une intervention chirurgicale, persiste parfois des mois. ££C’est parce qu’elle a été « mémorisée » dans le circuit neuronal de la douleur par un mécanisme moléculaire nommé ltp. ££C’est une forme de « potentialisation » de la force des connexions entre neurones. ££Les chercheurs tentent d’effacer cette trace mnésique pour soulager les patients.
COMMENT LA DOULEUR SE GRAVE DANS LES NEURONES La mémoire consiste en la rétention d’une information susceptible de modifier le comportement d’un organisme ; c’est ainsi que nous accumulons des souvenirs. Mais une forme de mémorisation se développe aussi à l’échelle de la cellule, notamment du neurone, qui voit son activité électrique modifiée, sur le long terme. On parle de potentialisation à long
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DOSSIER D OULEURS CHRONIQUES
INTERVIEW
JEAN-PASCAL LEFAUCHEUR NEUROPHYSIOLOGISTE À L’HÔPITAL HENRI-MONDOR, À CRÉTEIL.
ACTIVER LES NEURONES POUR
CALMER
LA DOULEUR Jean-Pascal Lefaucheur, les patients atteints de douleur chronique et résistants aux médicaments peuvent être soulagés par des techniques consistant à stimuler certaines parties de leur cerveau. Comment est-ce possible ? Il existe différents types de machines délivrant des champs magnétiques ou des courants électriques qui traversent le crâne et activent des circuits nerveux du cortex cérébral. On
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Après des séances de stimulation transcrânienne, les patients voient leur douleur s’atténuer, voire disparaître. parle de stimulation magnétique ou électrique transcrânienne, une forme de neuromodulation – ou neurostimulation – qui est pratiquée depuis plus de quinze ans. En pratique, une bobine magnétique ou des électrodes sont posées sur la tête du patient en regard des zones du cerveau que l’on souhaite activer, en l’occurrence le cortex moteur pour le traitement des douleurs. On cible le plus souvent la région du cortex correspondant au territoire corporel concerné. Environ la moitié des patients sont susceptibles de réagir favorablement à ce traitement et de voir leur douleur s’atténuer significativement. Les protocoles varient selon les patients et selon le type de douleur. Une séance de stimulation dure environ trente minutes, et on en réalise entre deux et cinq par semaine sur une durée qui peut varier entre une et quelques semaines. Puis les patients qui ont connu une amélioration reviennent pour des séances d’entretien, plus ou moins régulièrement. Quel type de douleurs peut-on ainsi atténuer ? La stimulation corticale est surtout efficace contre les douleurs dites neuropathiques, c’est-à-dire liées à une lésion ou une maladie du système nerveux périphérique ou central, et qui sont relativement localisées sur un endroit du corps.
50 % DES PATIENTS ATTEINTS DE DOULEUR CHRONIQUE
en moyenne répondent aux stimulations magnétiques transcrâniennes et voient leur douleur atténuée. L’effet antalgique perdure souvent quelques jours et peut être prolongé par la répétition des séances.
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Les causes sont diverses et peuvent résulter de l’atteinte d’un ou plusieurs nerfs ou racines nerveuses, par exemple après un traumatisme (chirurgical ou non), une compression, un zona, un diabète, ou une atteinte de la moelle ou du cerveau. Les douleurs chroniques des membres ou de la face peuvent ainsi être traitées, alors qu’il est généralement plus difficile de prendre en charge des syndromes douloureux diffus (comme la fibromyalgie), bien que la technique soit aussi parfois efficace dans ces cas. Existe-t-il d’autres techniques de neurostimulation ? Il faut distinguer, d’une part, les approches non invasives, comme les techniques de stimulation corticale transcrânienne dont il était question à l’instant, mais aussi l’électrostimulation transcutanée (tens, une excitation des fibres sensitives par une électrode posée sur la peau), et, d’autre part, les techniques invasives, qui consistent à implanter chirurgicalement une électrode (dans le cortex cérébral ou la moelle épinière notamment), qui reste à demeure et est reliée à un pacemaker. Ces interventions, pratiquées depuis quarante ans, ont l’avantage d’exciter en continu les circuits nerveux et donc d’avoir un effet sur les douleurs beaucoup plus prolongé que les techniques non invasives. Comment ces techniques sont-elles mises en œuvre concrètement ? La stimulation corticale invasive consiste à placer dans l’espace extradural (entre la dure-mère et le crâne) une ou deux électrodes plates au moyen d’une ouverture d’environ quatre centimètres de diamètre. Les électrodes sont souvent posées sur le cortex moteur, des expérimentations animales ayant mis en évidence un effet antalgique significatif de la stimulation effectuée sur cette cible. Elles sont reliées à un boîtier électrique (comme un pacemaker cardiaque)
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DOSSIER D OULEURS CHRONIQUES QUAND TRAUMA PSYCHIQUE ET DOULEUR NE FONT QU’UN
QUAND
TRAUMA PSYCHIQUE
ET DOULEUR NE FONT QU’UN N° 85 - Février 2017
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Un accident, un attentat provoquent parfois des douleurs inexpliquées longtemps après. À l’inverse, des douleurs répétées peuvent engendrer un trauma psychique. Identifier ce lien est essentiel pour guérir. Par Antoine Bioy, psychologue et psychothérapeute à Paris, professeur de psychologie clinique et psychopathologie à l’université de Bourgogne Franche-Comté.
EN BREF ££Un événement grave influence d’autant plus la survenue d’un trauma psychique que le sujet se sent victime. ££Des douleurs sans cause évidente peuvent alors apparaître, même des années après. ££De même, des douleurs aiguës fréquentes peuvent engendrer un traumatisme psychique. ££Dans les deux cas, il faut révéler ce lien entre douleur et trauma pour guérir les patients.
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Sur le Web Structures de prise en charge de la douleur sur le site de la Société française d’étude et de traitement de la douleur : www.sfetd-douleur.org
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ierre était dans son siège auto à l’arrière de la voiture ; il n’avait que deux ans. Subitement, la voiture s’est arrêtée net en pleine campagne, stoppée par un platane… Ses parents ont à peine eu le temps de hurler, son père y a laissé la vie. Pierre a souffert physiquement sur le coup, mais n’en a pas gardé de séquelles. En revanche, quinze ans après, il souffre de douleurs dorsales continuelles que personne ne peut traiter ni expliquer. Comment un tel événement de l’enfance sans blessure apparente se traduit-il par des douleurs chroniques à l’âge adulte ? C’est qu’il existe des liens entre le traumatisme psychique comme celui qu’a subi Pierre (l’accident, la perte de son père) et les souffrances du corps. En somme, l’accident qu’il a vécu enfant a des conséquences psychologiques et physiques aujourd’hui, ses douleurs dorsales en faisant partie. Le traumatisme psychique se nourrit de l’interaction d’un individu, de son environnement et de son histoire de vie. Il ne dépend d’aucun profil de personnalité – n’importe qui peut en souffrir – et doit plutôt se voir comme un choc violent ou une série de petits assauts subits par l’équilibre d’une personne, jusqu’à la rupture. Ainsi, le psychotraumatisme est évoqué quand un accident, une blessure, un décès, un attentat déborde les capacités d’élaboration psychique du sujet, autre façon de dire qu’il n’est alors plus capable de penser ou de donner du sens à ce qu’il vit.
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Le trauma psychique présente deux caractéristiques. La première est somatique : c’est « l’ébranlement » physique qui correspond aux conséquences corporelles de l’événement et de l’angoisse qui en découle (tremblements, sudation…). La seconde caractéristique, proprement psychique, est appelée « expérience d’effroi » ; le sujet est brutalement confronté à l’étendue des dégâts corporels et à la perspective de la mort pour lui-même ou pour autrui, et ce choc engendre une sidération du fonctionnement psychique, comme une paralysie de la pensée. LA SENSATION D’ÊTRE UNE VICTIME Pour autant, c’est moins la nature et l’intensité d’un événement que la façon dont il est vécu qui le détermine comme étant traumatique ou pas. En 2001, Karen Raphael, de l’université de New York, et ses collègues ont montré, dans une vaste étude prospective regroupant 676 patients, qu’il n’existe pas d’association inéluctable entre la présence de sévices anciens et l’apparition de douleurs inexpliquées chez l’adulte – une croyance qui avait jusque-là la vie dure… En effet, l’apparition de douleurs est en fait directement liée à un vécu de victime, évalué à l’aide de questionnaires, à la fois chez les patients et chez les sujets contrôles – 520 personnes n’ayant pas subi de sévices, mais se sentant pour une raison ou pour une autre victimes. La question à se poser pour savoir si des douleurs sont parfois liées à un traumatisme psychique est donc : le sujet a-t-il traversé l’événement en position de victime ? Il en va de même pour les douleurs chroniques médicalement expliquées : en 2011, Karen Raphael et ses collègues ont montré que les personnes présentant un passé émaillé de traumatismes physiques, sexuels ou de situations de négligence ne risquent pas forcément de souffrir de douleurs par la suite, sauf si elles se sont senties victimes. Ce
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DOSSIER D OULEURS CHRONIQUES
APPRENDRE À VIVRE AVEC LA DOULEUR N° 85 - Février 2017
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Quand une douleur chronique résiste à tout traitement, il reste une solution : les thérapies « psychologiques », comme la méditation, qui apprennent au patient à vivre différemment avec la douleur pour ne plus la subir. Par Franck Henry et Chantal Wood.
EN BREF ££Méditation, hypnose, tcc, emdr : des thérapies psychologiques qui soulagent souvent les patients atteints de douleur chronique. ££C’est parce que la douleur n’est pas qu’une sensation ; c’est aussi une émotion, qui s’accompagne de stress, d’anxiété et parfois de dépression.
© Getty Images/Georgiana Chitac
££Avec ce genre de thérapie, le patient apprend à accepter sa douleur et à reprendre ses activités habituelles.
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n jour, après des mois, voire des années, de douleur chronique sans cause identifiable, on s’entend dire : « C’est dans la tête. » Et c’est vrai, d’une certaine façon : toute sensation douloureuse est perçue dans le cerveau. Mais de multiples facteurs font qu’elle y reste ou non : ce qui l’a causée, la personnalité de celui ou celle qui la ressent, le contexte où elle s’exprime… Et malgré les prouesses techniques de la science et de la médecine, nous ne maîtrisons pas encore tous ces facteurs. En revanche, de nouvelles thérapies psychologiques peuvent soulager les douleurs chroniques, celles qui notamment résistent à tout autre traitement. La douleur n’est pas proportionnelle à la gravité d’une blessure. Certaines lésions n’entraînent aucune souffrance – par exemple une verrue – et il peut exister des douleurs sans lésion – par exemple, le mal de tête que nous avons parfois quand nous sommes très fatigués… C’est parce que la douleur n’est pas qu’une sensation. C’est aussi une « émotion » qui se produit dans un contexte donné avec une signification associée. Nous vivons une douleur de manière différente selon qu’elle apparaît au cours d’un cancer ou lors du passage du baccalauréat ; le stress qui y est
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associé n’est pas le même. Tout dépend de notre attention et de nos émotions. Et nous ne sommes pas tous sensibles à la douleur de la même façon (voir l’encadré page 61). Aussi plusieurs facteurs jouent-ils un rôle important dans la perception de la douleur, au premier rang desquels les attentes que nous avons quand nous souffrons, le stress, ainsi que la peur de la douleur. En 2007, Serge Marchand et ses collègues, de l’université de Sherbrooke, au Canada, ont démontré que, si nous nous attendons à avoir mal, la douleur causée par un stimulus de faible intensité est augmentée, car, inconsciemment, nous empêchons l’action de mécanismes naturels d’inhibition de la douleur dans notre cerveau et notre moelle épinière. En 2007 également, Luana Colloca, à l’université de Turin, et ses collègues ont aussi révélé que lorsque nous avons des attentes négatives et que nous pensons que la douleur va s’aggraver, nous sécrétons plus de cholécystokinine, une substance qui facilite la transmission de la douleur. LA DOULEUR, C’EST DANS LA TÊTE En 2001, Michael Sullivan, de l’université McGill, au Canada, et ses collègues avaient déjà mis en évidence le rôle du catastrophisme, à savoir une attitude mentale exagérément négative qui se construit durant une expérience douloureuse en cours ou que l’on anticipe. Ce qui contribue à se sentir impuissant. Les personnes qui se focalisent sur les aspects négatifs de la douleur ruminent de sombres pensées, s’attendent à voir revenir la douleur et, lorsqu’elle arrive, la ressentent avec plus d’intensité. Elles ont alors tendance à penser en permanence à leur souffrance, de sorte qu’elles « l’entendent » davantage, et elles croient souvent que quelque chose de grave va leur arriver et qu’elles ne peuvent rien faire pour aller mieux.
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ÉCLAIRAGES p. 64 Ronaldo, mon fraudeur bien-aimé p. 68 Non ! Je n’irai pas chez le psy… p. 70 Sully : pas de pitié pour les héros
Retour sur l’actualité
LE 3 DÉCEMBRE 2016
Match de championnat d’Espagne entre le FC Barcelone
CHRISTIAN BROMBERGER
Professeur émérite d’anthropologie à l’université de Provence, membre sénior de l’Institut universitaire de France.
Ronaldo Mon fraudeur bien-aimé
Vénéré pour ses exploits sur le terrain, désavoué pour ses agissements frauduleux, il force ses fans à un grand écart affectif.
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e 3 décembre 2016, le match entre deux des meilleures équipes du monde – le FC Barcelone et le Real Madrid – opposait les deux plus grandes stars planétaires de ce sport : Lionel Messi, le surdoué aux cinq ballons d’or, et Cristiano Ronaldo, champion d’Europe avec le Portugal et récent quadruple ballon d’or. Mais après le scandale des Football Leaks, tout le monde pensait en même temps que ce match mettait face à face un homme récemment condamné à 21 mois de prison avec sursis pour fraude fiscale et un autre ayant dissimulé 150 millions de revenus au fisc espagnol. Parler de football aujourd’hui, c’est évoquer un paradoxe : la popularité de ce sport spectacle ne cesse de croître, alors que d’année en année les scandales le ternissent. D’où une contradiction : comment continuer de supporter son équipe quand ceux qui la représentent se couvrent d’opprobre ? Il y a là une énigme qui tient à l’âme humaine : peut-on à la fois adorer un personnage et le voir transgresser régulièrement les règles du jeu social, voire de la morale ? Quand on adhère à une cause (qu’elle soit footballistique ou politique), une réaction courante
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et le Real Madrid au stade du Camp Nou à Barcelone.
L’ACTUALITÉ
LA SCIENCE
L’AVENIR
Le 2 décembre 2016 éclatait le scandale Football Leaks, révélant la fraude fiscale à très grande échelle pratiquée par plusieurs joueurs de renommée internationale. Parmi eux, la star mondiale Cristiano Ronaldo aurait omis de déclarer au fisc 150 millions d’euros.
Les supporters éprouvent malgré tout le besoin de vivre des émotions intenses en regardant jouer leurs stars. Simplement, ce besoin coexiste avec une réaction d’indignation citoyenne face à des comportements égoïstes et frauduleux. Une sorte de dédoublement du psychisme s’instaure.
La globalisation du football ne risque guère d’atténuer ce phénomène. Autrefois, les fans s’identifiaient à une ville et à un collectif. Aujourd’hui, ils entrent dans un rapport individuel avec les stars qui les obligent à les accepter comme elles sont, même quand leurs agissements débordent du cadre de la loi.
face à de telles accusations est la dénégation indignée : « On veut déstabiliser l’équipe et ses héros. » « C’est de la jalousie. » « Pourquoi lui et pas les autres ? » La réaction peut être encore plus radicale contre des rabat-joie qui viennent gâcher le plaisir. Un supporter déclarait ainsi après des révélations sur le financement de son club : « D’où vient l’argent, on s’en fout ! » L’essentiel est de gagner, et non de « participer » comme le pensait Pierre de Coubertin. Vis-à-vis du champion, grassement payé, amateur de bolides et d’arrangements divers, pas l’ombre d’un reproche s’il assure le succès de son équipe. À l’inverse, ce sera la condamnation sans appel pour le joueur tout aussi fortuné qui n’a pas « mouillé le maillot », a démérité ou, pire encore, a trahi les siens pour un juteux transfert. Le premier est « récompensé » de ses justes efforts, alors que le second « se gave » et suscite des critiques acerbes sur les excès financiers du football. Le succès avalise les excès, l’échec les exacerbe. Ces réactions éloignées de la morale commune sont particulièrement vives quand le joueur est un héros local ou national et le club le symbole de l’identité de la ville. C’est le cas dans des villes nostalgiques de leur grandeur passée, se sentant victimes d’une histoire mal écrite, et stigmatisées de l’extérieur. Tel fut le cas à Naples. Dans les années 1980, Maradona y est devenu un héros dès son arrivée et, plus encore, après les victoires du club en
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championnat d’Italie (1987, 1990) et en coupe européenne (1989). Voici comment le présentait un chroniqueur : « Avec ses courtes pattes, son torse bombé, sa gueule de voyou et son diam dans l’oreille, Diego était devenu pour nous un vrai Napolitain. Son amour des belles filles et de la bonne bouffe, sa folie des bolides (…) et, en même temps son côté église et famille sacrée (…), son sale caractère, capricieux, exubérant, indiscipliné, tout cela faisait de lui un vrai fils légitime de la cité. » RAPPELEZ-VOUS MARADONA… L’identification était telle qu’on lui attribuait volontiers des origines napolitaines, certifiées, disait-on, par un œil malicieux rappelant celui des scugnizi (gamins) des quartiers populaires de la ville. Cette légende dorée a été ternie par de graves turpitudes : la consommation de drogues dures, des relations suspectes avec un clan camorriste, un usage abondant du téléphone rose, une paternité illégitime, des violences… Néanmoins, l’année de son départ de Naples, des intellectuels composèrent un Te Diegum. Aujourd’hui c’est toujours dans la ville la référence majeure ; quand on le mentionne on n’emploie pas son nom mais le pronom personnel de la troisième personne (lui en italien ou isso en napolitain). On continue de vanter son comportement, et ses apparitions au stade San Paolo sont,
ÉCLAIRAGES U n psy au cinéma
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SERGE TISSERON
Psychiatre, docteur en psychologie HDR, université Paris vii-Diderot. Membre de l’Académie des technologies. www.sergetisseron.com
SULLY
Pas de pitié pour les héros Quand on est, en même temps, adulé par la foule pour avoir sauvé de la mort 155 personnes, et accusé par les autorités d’être une dangereuse tête-brûlée... La tension est si forte qu’elle brise le psychisme en mille morceaux.
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orsqu’on pense au syndrome post-traumatique, ce sont les conséquences de blessures physiques ou psychiques qui viennent aussitôt à l’esprit, comme une atteinte corporelle ou la perte d’un être cher. Mais un tel syndrome peut aussi apparaître à la suite d’une situation que l’on est parvenu à maîtriser et dont on est sorti indemne. C’est ce que nous raconte le dernier film de Clint Eastwood, Sully. L’histoire réelle du commandant Sully Sullenberger qui, le 15 janvier 2009, suite à une panne des deux moteurs de son airbus A320, réussit à se poser sur l’Hudson River, en plein cœur de New York, et à éviter une catastrophe qui aurait pu être aussi tragique que celle du 11 septembre 2001. UN ACCIDENT À LA BASE DU TRAUMA Le trauma psychique se définit d’abord par l’afflux brutal et inattendu de sensations, d’émotions, d’états du corps et de représentations qui débordent à la fois les capacités sensorielles, émotionnelles et mentales. À peine le commandant
EN BREF ££Le dernier film de Clint Eastwood retrace l’histoire d’un pilote qui se trouve traduit en justice pour avoir sauvé ses passagers en enfreignant des procédures. ££La succession d’événements de forte intensité, souvent contradictoires, se traduit ici par un éclatement psychique. ££Notre cerveau ne semble pas fait pour gérer plus d’une certaine quantité de stimulations fortes en un temps limité.
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Sullenberger a-t-il remarqué, quelques minutes après son départ, que le ciel est dégagé, qu’un vol d’oiseaux détruit les deux moteurs de son appareil. De tels accidents sont le plus souvent sans conséquence grave. Au pire, un moteur est endommagé, et l’avion est conçu pour pouvoir rallier la base la plus proche en utilisant celui qui lui reste. Ici, les deux moteurs sont hors d’usage, un cas de figure qui n’est pas prévu par la checklist. La tour de contrôle donne alors la même consigne que lorsque l’avion conserve un moteur : rejoindre l’un des deux aéroports les plus proches, en l’occurrence La Guardia, à New York, ou celui de Teterboro. Mais Sully Sullenberger comprend vite que ces deux options ne sont pas viables et il décide d’accomplir une manœuvre qu’aucun pilote dans l’histoire moderne de l’aviation civile n’a jamais réussie : amerrir sur une étendue d’eau, ici l’Hudson River. Une opération particulièrement risquée, puisque si l’avant de l’appareil ou l’une de ses ailes heurte l’eau, il peut se briser en deux avec des conséquences fatales pour la majorité des 155 passagers, si on inclut le personnel de bord.
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SULLY Clint Eastwood Novembre 2016
© Warner Bros 2016
Au moment où les deux moteurs de son avion tombent en panne, Sully n’a que quelques dizaines de secondes pour prendre une décision qui scellera le sort de 155 personnes – les plus longues de sa vie.
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VIE QUOTIDIENNE
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p. 74 Mortelles secousses ? p. 80 Ah ! si j’étais riche… p. 86 Dîner sous influence
Mortelles secousses ? Par Josephina Maier, journaliste scientifique et médecin.
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Comment le fait de secouer un bébé peut-il provoquer sa mort ? Les neurologues commencent à savoir ce qui se passe alors dans le cerveau du tout-petit. Et mettent en garde contre les diagnostics hâtifs.
ans le monde scientifique, il est rare qu’un chercheur prenne de la distance vis-à-vis de ses propres découvertes. Pour certains, comme ce fut le cas des physiciens atomistes Robert Oppenheimer et Otto Hahn, on comprend facilement leurs motivations : la bombe qui résulta de leurs recherches fit des centaines de milliers de morts. Par comparaison, la lettre écrite par le neurochirurgien britannique Norman Guthkelch et trente-six de ses collègues en 2015 semble quelque peu étrange : Guthkelch est considéré comme le découvreur du syndrome du bébé secoué, une combinaison de lésions cérébrales pouvant entraîner la mort, qui surviennent parfois lorsqu’un nourrisson est violemment secoué. Environ deux cents enfants seraient victimes de ce syndrome chaque année en France, le plus souvent âgés de moins de 6 mois. La première description du syndrome par Guthkelch attira dès 1971 l’attention des médecins légistes et des juges sur cette forme jusque-là inconnue de maltraitance enfantine. Dans les années qui suivirent, les premiers procès eurent lieu et des dizaines de parents ou de gardes d’enfants coupables de ces agissements furent
EN BREF ££Le syndrome du bébé secoué, identifié dans les années 1970, serait la cause de dizaines de décès chaque année en France. ££Ce syndrome combine des hématomes sous-duraux, des hémorragies de la rétine et des lésions cérébrales liées à des arrachements de neurones. ££Des recherches récentes montrent qu’un choc accidentel peut produire les mêmes symptômes et conduire à des condamnations abusives.
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traduits en justice. A priori, cela constituait plutôt un exemple de l’influence positive des progrès de la science et de la médecine. Mais quarantequatre ans plus tard, le découvreur du syndrome se fendait d’une lettre ouverte où il regrettait que ce diagnostic médical ait eu des conséquences qui allaient au-delà de ses intentions. « Des parents et des gardes d’enfants ont été condamnés à tort dans de nombreux pays, pour avoir blessé ou tué un enfant. Ils furent accusés de maltraitance et d’homicide par négligence ou préméditation », écrivit-il. Guthkelch craignait que les médecins ne posent ce diagnostic à la légère, sans mettre dans la balance d’autres causes possibles qui auraient pu expliquer l’état de l’enfant. Son intention de départ, qui était de mettre en garde les parents contre les conséquences dramatiques des secousses infligées à un tout-petit, et donc de faire acte de prévention, risquait à présent de manquer son but. Cette lettre a fait éclater une polémique qui couvait depuis des années dans le monde académique. Un débat impliquant non seulement des pédiatres, des médecins légistes et des juristes, mais aussi des biomécaniciens, des chercheurs et
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C’est généralement avant l’âge de 6 mois que se produisent les épisodes de graves secousses. La raison est tristement simple : après cet âge, un enfant devient plus lourd, et oppose davantage d’inertie à la personne maltraitante.
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Ah !
si j’étais riche… Par Miriam Berger, journaliste scientifique et psychologue.
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a France est 32e sur 157. Ce n’est pas le palmarès du concours de l’Eurovision, mais celui établi en 2015 par les Nations unies dans leur Rapport annuel sur le bonheur. Chaque année, les scientifiques y communiquent le niveau général de bien-être subjectif des habitants de chaque pays, en sondant des échantillons représentatifs de la population. Le Danemark finit premier dans ce classement, et la France arrive loin derrière des pays comme le Costa Rica ou Porto Rico, pourtant moins florissants économiquement. Et si les sondages de ces dernières années révèlent que les Français jugent la situation de leur pays difficile, ils montrent aussi qu’en majorité nos concitoyens jugent leur propre situation plutôt correcte, voire bonne. De quoi apporter de l’eau au moulin du proverbe « l’argent ne fait pas le bonheur ». Un des auteurs du rapport des Nations unies Jeffrey Sachs, économiste à l’université Columbia, à New York, a une analyse simple de la chose : pour lui, l’argent ne garantit évidemment pas une
EN BREF ££Les études montrent que l’aisance financière n’est pas associée au bonheur, mais qu’elle réduit la fréquence des moments de « vrai malheur ». ££L’argent, en stimulant le « circuit cérébral de la récompense », prend parfois la place des relations sociales. ££En revanche, l’utilisation de l’argent à des fins altruistes augmente le niveau de bonheur.
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vie heureuse. Santé, vie sociale, perception d’un sens à nos actions : tant d’autres éléments comptent pour se sentir bien. Si bien qu’au bout du compte, le dicton ne donne guère matière à controverse. Là où l’affaire se complique, c’est quand on dit que l’argent contribue au bonheur. Car les études menées ces dernières années montrent qu’au-delà de 60 000 euros de gains annuels, il n’existe plus de véritable lien entre les revenus et le bonheur. En outre, le psychologue et économiste Daniel Kahneman, Prix Nobel d’économie en 2002, a noté dans ses propres études que même sous ce seuil, un surcroît d’argent ne fournit pas plus de moments de bonheur instantané. Autrement dit, les sensations d’être heureux dans l’instant ne sont pas plus nombreuses. Un autre psychologue, Kostadin Kushlev, à l’université de Virginie, aux États-Unis, a voulu savoir dans quelle mesure le revenu d’une personne, s’il n’augmente pas son bonheur, permettrait toutefois de réduire la probabilité du malheur – lequel n’est pas, précisons-le, l’exact équivalent
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L’argent fait-il le bonheur ? Nous disons volontiers le contraire. Mais aimerions gagner plus. Et pour cause : l’argent serait une « drogue cognitive » qui, sans rendre heureux, semble vite indispensable.
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Pourquoi lui et pas moi ? Nous nous comparons involontairement au voisin dès qu’il est question d’argent. Au point que la quantité en soi importe peu.
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VIE QUOTIDIENNE L es clés du comportement
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NICOLAS GUÉGUEN Directeur du Laboratoire d’ergonomie des systèmes, traitement de l’information et comportement (lestic) à Vannes.
Dîner
sous influence En entrant dans ce restaurant, vous souhaitiez juste manger une petite salade. Et vous avez finalement pris un menu exorbitant et recommandé du vin, sans trop savoir pourquoi. Explications d’un expert.
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epas d’affaires, rencontre entre amis, dîner d’amoureux… Environ 33 % des Français se rendent au restaurant au moins une fois par mois, selon un sondage réalisé en 2015 par l’institut bva. C’est souvent l’occasion de baguenauder au gré des menus et de se laisser tenter par un verre de vin, voire de traîner jusqu’au dessert ou au café. Bref, de s’accorder un petit moment de détente et de liberté. De liberté ? Pas si sûr. Les recherches ont révélé que de multiples facteurs influencent le consommateur au restaurant. L’ambiance musicale, la décoration, l’attitude des employés, le mode de présentation des plats… Autant d’éléments susceptibles de jouer sur votre comportement tout au long du repas, depuis le moment où vous posez le pied dans le restaurant jusqu’à celui où vous en sortez, repus et satisfait – ou tout au moins, en ayant l’impression de l’être.
EN BREF ££Au restaurant, de multiples facteurs influencent ce que les clients consomment et le pourboire qu’ils laissent. ££Ces facteurs comprennent par exemple la décoration, la musique, les odeurs, la façon dont est rédigé le menu et le comportement non verbal des serveurs ou des serveuses. ££L’intérêt du secteur de la restauration pour ce sujet est tel que des revues entières lui sont consacrées.
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Commençons par la commande. Pour un restaurateur, il est parfois intéressant d’orienter les choix des clients, par exemple vers des plats de saison – ou vers des menus marins pour un restaurant de bord de mer. En effet, les ingrédients sont alors moins chers et permettent de dégager une marge plus importante. UNE FIGURINE DE BATEAU SUR LA TABLE… ET SOUDAIN, UNE ENVIE DE POISSON Premier outil d’influence, la décoration. Pour que les consommateurs inclinent à choisir le poisson plutôt que la viande, rien de tel qu’une ambiance marine ! C’est ce qu’ont prouvé Céline Jacob et ses collègues de l’université de BretagneSud, en mettant en place deux types de décoration. Dans la condition contrôle, seuls quelques bouquets de fleurs séchées ornaient les tables et le restaurant, tandis que des serviettes couleur
© Charlotte Martin/www.c-est-a-dire.fr
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LIVRES
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p. 92 Sélection d’ouvrages p. 94 Neurosciences et littérature
SÉLECTION
A N A LY S E Par Frédéric Fanget
MÉDECINE Éviter les erreurs médicales grâce à la simulation de S ylvie et Pierre Angel Odile Jacob
PSYCHOLOGIE C essez de vous déprécier ! de K evin Chassangre et Stacey Callahan D unod
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ous êtes le seul à ne pas croire en vous, vous avez toujours l’impression de tromper les autres et craignez en permanence d’être démasqué ? Vous souffrez peut-être du syndrome de l’imposteur. Ce livre vous aidera à en prendre conscience et à vous en affranchir. En le refermant, vous saurez tout sur les manifestations de ce trouble et sur les facteurs qui le favorisent : valorisation extrême de l’intelligence, amour parental conditionné par la réussite… mais aussi ce fameux besoin de reconnaissance que les psychiatres rencontrent si souvent dans les thérapies de la confiance en soi. Plusieurs axes de travail sont proposés. Vous apprendrez ainsi à distinguer la honte, paralysante et qui entraîne une remise en cause globale de soi, de la culpabilité, où le sentiment négatif porte sur des actes précis, susceptibles d’être améliorés. D’autres conseils fondamentaux sont développés, comme se donner le droit à l’erreur ou identifier ses forces et celles des personnes idéalisées, afin d’avoir une perception plus juste de soi et des autres. L’objectif est de parvenir à s’accepter de façon inconditionnelle, indépendamment de l’approbation des autres et de ses performances. Ce qui n’implique pas de renoncer à toute recherche de succès, d’ailleurs. S’inspirant des techniques utilisées dans les thérapies cognitives, les auteurs donnent des outils concrets pour identifier ses réussites, sans en attribuer tout le mérite à la chance ou aux autres. Vous pourrez ainsi mieux comprendre vos difficultés et trouver une façon de les surmonter qui vous est propre. C’est donc à une véritable auto-thérapie que le lecteur se trouve invité. Peut-être aussi vous sentirez-vous un peu moins seul en apprenant que 70 % de la population a déjà douté au moins une fois de la légitimité de son statut ou de sa position actuelle. Ou en lisant cette citation, typique du syndrome de l’imposteur : « L’estime exagérée dans laquelle on tient mon travail me met parfois très mal à l’aise. Il me semble quelquefois être un escroc malgré moi. » Son auteur, un certain Albert Einstein, passe rarement pour un raté complet. Frédéric Fanget est psychiatre, psychothérapeute et enseignant à l’université de Lyon 1.
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PSYCHOLOGIE Métro Psycho dodo de N icolas Guéguen Dunod
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’est avec un plaisir toujours renouvelé que l’on plonge dans les décryptages de Nicolas Guéguen, chroniqueur dans nos colonnes et spécialiste du comportement. Dans cette compilation de ses précédents ouvrages, agrémentée de dessins d’humour, le psychologue présente des centaines d’expériences révélant à quel point nos achats, nos interactions sociales et notre attirance pour telle ou telle personne sont modulables. Si vous souhaitez tout savoir sur la façon dont vous êtes influencé(e) par les musiques, les couleurs, les odeurs, les images, la beauté physique – et bien d’autres paramètres –, ce livre est fait pour vous !
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n médecine, limiter les erreurs n’est possible qu’en s’entraînant… et donc en faisant des erreurs ! Pour éviter que celles-ci ne nuisent aux patients, de multiples techniques de simulation ont été développées. Certains futurs médecins travaillent ainsi avec des comédiens pour s’entraîner à annoncer des diagnostics difficiles sans déclencher de stress posttraumatique. Autre exemple, des logiciels de simulation commencent à être utilisés pour le traitement des phobies, des addictions, de l’anxiété, etc. Sylvie et Pierre Angel, tous deux psychiatres, livrent ici un plaidoyer riche et convaincant pour ces techniques, encore trop peu répandues en France.
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COUP DE CŒUR Par Julien Nizard
PSYCHIATRIE Trouble Déficit de l’Attention avec ou sans Hyperactivité de M anuei Bouvard (dir.) Dunod PSYCHOLOGIE DE L’ENFANT Développer le selfcontrol de son enfant de D idier Pleux Odile Jacob
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ntre l’éducation « à la dure » qui a prévalu jusqu’aux années 1960 et la permissivité excessive qui a suivi, il est temps de trouver la synthèse, nous dit ici Didier Pleux. Psychothérapeute et docteur en psychologie du développement, il distille ici une série de conseils très concrets à l’attention des parents : que faire quand un enfant refuse de dormir ? Comment l’aider à gérer ses colères ? Comment le préparer à l’entrée à l’école ? L’objectif : lui apprendre à accepter les contraintes et la frustration, pour qu’il ne se transforme pas en enfant roi. Car ce serait un « ‘‘roi nu’’, très vulnérable au principe de réalité. »
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istrait, rêveur, dans la lune… Des traits de caractère bien souvent anodins, mais qui traduisent parfois un vrai problème : le trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (tdah). Cet ouvrage permettra aux professionnels de mieux identifier et comprendre ce trouble. L’enjeu est de taille, quand on sait que le tdah touche 5 % des gens – enfants comme adultes – et a nombre de conséquences néfastes : baisse de la réussite scolaire et professionnelle, difficultés d’intégration, faible estime de soi, idées suicidaires, survenue simultanée de troubles anxieux ou de l’humeur…
NEUROSCIENCES G uérir grâce à la neuroplasticité de N orman Doidge B elfond
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oilà un ouvrage résolument optimiste, rédigé par un auteur aussi passionné qu’éclectique. Norman Doidge, psychiatre et chercheur canadien, part du constat que le cerveau adulte évolue bien plus qu’on ne le pensait il y a quelques décennies, et présente les recherches visant à exploiter ce pouvoir de transformation à des fins thérapeutiques. Maladies neurodégénératives, douleurs chroniques, dyslexie… La liste des troubles susceptibles de bénéficier de ces recherches est impressionnante ! Les techniques utilisées pour stimuler la plasticité cérébrale vont de pratiques très simples, fondées par exemple sur une alimentation adaptée ou des exercices physiques, à des techniques traditionnelles comme la méditation. Autre avantage, ces « thérapies psychocorporelles » sont la plupart du temps sans risque, ce qui les rend particulièrement indiquées chez les personnes âgées ou supportant mal les médicaments. Elles s’inscrivent dans le cadre du développement, au sein du monde occidental, de la médecine personnalisée et de l’alliance thérapeutique, où le patient est impliqué dans son mieux-être, voire sa guérison. Il mobilise ainsi ses propres capacités à gérer la douleur et les difficultés, se découvrant souvent des ressources insoupçonnées. Les techniques proposées sont à la portée de tous et ne concernent pas que les personnes malades. Chacun de nous peut les mettre en œuvre pour renforcer sa solidité psychique. Mais l’auteur souligne à juste titre qu’elles ne sont nullement une panacée, et requièrent une implication quotidienne et durable. L’originalité de ce livre repose donc sur les ponts jetés entre le corps et l’esprit, entre la médecine occidentale, les neurosciences et les médecines traditionnelles. Le langage, clair et accessible, cède-t-il parfois à des accents ésotériques ? Qu’on ne s’y trompe pas, le fond scientifique est solide et bien documenté. En témoignent les 35 pages de bibliographie, qui sont un point fort de l’ouvrage. Elles justifient de garder espoir dans les capacités de chacun à évoluer, s’améliorer et mieux vivre. Julien Nizard dirige le Centre fédératif douleur soins palliatifs et de support, au centre hospitalier universitaire de Nantes.
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LIVRES N eurosciences et littérature
SEBASTIAN DIEGUEZ Chercheur en neurosciences au Laboratoire de sciences cognitives et neurologiques de l’université de Fribourg, en Suisse.
Lettre d’une inconnue Dans l’enfer de l’espionnage amoureux
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Avec soixante-dix ans d’avance, cette nouvelle de Zweig décrivait le stalking, un amour obsessionnel qui vire à l’espionnage, voire au harcèlement.
our Rosalinde, un personnage de Shakespeare, « l’amour n’est qu’une pure folie » qui mérite, « autant que les fous, l’hôpital et le fouet. » Mais si l’amour est déjà une folie, il existe des états qui emportent certaines personnes loin au-delà des tourments ordinaires de l’affection et du désir. Les conséquences en sont parfois dramatiques, au point que la justice doive s’en mêler. C’est notamment le cas dans ce qui est sans doute la plus contemporaine de ces pathologies de l’amour, le stalking, terme anglais parfois traduit par « harcèlement obsessionnel » ou « traque furtive ». Ce type de comportement a attiré l’attention du grand public et des autorités dans les années 1990 suite à des affaires impliquant des célébrités, agressées ou mêmes tuées par des adorateurs clandestins. Il a pris une nouvelle dimension à l’heure où les réseaux sociaux donnent un
EN BREF ££Dans Lettre d’une inconnue, Zweig décrit une jeune femme éprouvant un amour obsessionnel, qui la conduit au suicide. ££Son cas évoque le stalking, une fixation pathologique sur une autre personne. ££Cette fixation pourrait résulter de divers troubles psychiques, mais aussi de problèmes d’attachement dans l’enfance, qui déséquilibreraient les systèmes neurochimiques de l’amour.
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pouvoir inédit pour s’introduire dans la vie des autres, mais dès les années 1920, l’écrivain autrichien Stefan Zweig en décrivait les ressorts psychologiques dans sa nouvelle Lettre d’une inconnue. « JE SAVAIS TOUT DE TOI » Le récit évoque en effet un cas particulièrement frappant d’obsession amoureuse, menant à une forme de traque insidieuse. L’histoire commence quand R…, « le romancier à la mode », dandy insouciant et volontiers volage, rentre de voyage le jour de ses 41 ans et trouve dans son courrier une lettre volumineuse intitulée « À toi qui ne m’as jamais connue ». Le reste du récit est la lettre proprement dite, suivie d’un bref épilogue narrant la réaction du romancier, profondément troublé par ce qu’il a découvert. La missive est en effet rédigée par une femme qui
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LE MOIS PROCHAIN POUR LA SCIENCE 8 rue Férou, 75278 Paris Cedex 06
Le sport qui guérit Dépression, Parkinson, anxiété ... Quand le corps vient au secours de l’esprit.
Directrice des rédactions : Cécile Lestienne Cerveau & Psycho Rédacteur en chef : Sébastien Bohler Rédactrice en chef adjointe : Bénédicte Salthun-Lassalle Rédacteur : Guillaume Jacquemont Conception graphique : William Londiche Directrice artistique : Céline Lapert Maquette : Pauline Bilbault, Raphaël Queruel, Ingrid Leroy Correction et assistance administrative : Anne-Rozenn Jouble Développement numérique : Philippe Ribeau-Gésippe Marketing et diffusion : Laurence Hay, Ophélie Maillet Direction financière et du personnel : Marc Laumet Fabrication : Marianne Sigogne, Olivier Lacam Presse et communication : Susan Mackie Directrice de la publication et gérante : Sylvie Marcé Ont également participé à ce numéro : Sophie Lem, Capucine Jahan Anciens directeurs de la rédaction : Françoise Pétry et Philippe Boulanger Presse et communication Susan Mackie susan.mackie@pourlascience.fr – Tel. : 01 55 42 85 05 Publicité France Directeur de la publicité : Jean-François Guillotin (jf.guillotin@pourlascience.fr) – Tél. : 01 55 42 84 28
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LES LIENS ENTRE CORPS ET CERVEAU SE PRÉCISENT : de plus en plus d’études révèlent qu’un exercice physique approprié a des effets positifs sur notre humeur, voire sur certaines pathologies psychiatriques ou neurologiques. Les patients en dépression modérée voient ainsi leur état s’améliorer par la pratique sportive, le cerveau se reconnecte et certains cas de démence ou de Parkinson sont améliorés par une activité comme la danse. Prendre soin de son corps, c’est aussi prendre soin de son esprit.
En kiosque le 17 février 2016
Espace abonnements http://boutique.cerveauetpsycho.fr Adresse e-mail : cerveauetpsycho@abopress.fr Téléphone : 03 67 07 98 17 Adresse postale : Cerveau & Psycho - Service des abonnements 19, rue de l’Industrie - BP 90053 - 67402 Illkirch Cedex Diffusion de Cerveau & Psycho Contact kiosques : À juste titres ; Manon Castel Tel : 04 88 15 12 48 Information/modification de service/réassort : www.direct-editeurs.fr Abonnement France Métropolitaine : 1 an - 11 numéros - 54 e (TVA 2,10 %) Europe : 67,75 e ; reste du monde : 81,50 e Toutes les demandes d’autorisation de reproduire, pour le public français ou francophone, les textes, les photos, les dessins ou les documents contenus dans la revue Cerveau & Psycho doivent être adressées par écrit à « Pour la Science S.A.R.L. », 8, rue Férou, 75278 Paris Cedex 06. © Pour la Science S.A.R.L. Tous droits de reproduction, de traduction, d’adaptation et de représentation réservés pour tous les pays. Certains articles de ce numéro sont publiés en accord avec la revue Spektrum der Wissenschaft (© Spektrum der Wissenschaft Verlagsgesellschaft, mbHD-69126, Heidelberg). En application de la loi du 11 mars 1957, il est interdit de reproduire intégralement ou partiellement la présente revue sans autorisation de l’éditeur ou du Centre français de l’exploitation du droit de copie (20, rue des Grands-Augustins 75006 Paris).
Imprimé en France – Roto Aisne (02) – Dépôt légal février 2017 – N° d’édition M0760085-01 – Commission paritaire : 0718 K 83412 – Distribution Presstalis – ISSN 1639-6936 – N° d’imprimeur 16/12/0018 – Directrice de la publication et Gérante : Sylvie Marcé N° 85 - Février 2017